Language of document : ECLI:EU:T:2008:118

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (septième chambre)

18 avril 2008 (*)

« Clause compromissoire – Création d’un info point Europe – Convention conclue entre la Commission et la requérante – Incompétence manifeste du Tribunal – Recours manifestement non fondé »

Dans l’affaire T‑302/04,

Maison de l’Europe Avignon Méditerranée, établie à Avignon (France), représentée par MF. Martineau, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. J.‑F. Pasquier et E. Manhaeve, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours fondé sur une clause compromissoire visant à obtenir la condamnation de la Commission à payer à la requérante la somme totale de 394 066,76 euros en raison de son prétendu manquement aux obligations contractuelles découlant de la convention portant création d’un info point Europe à Avignon,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (septième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood, président, D. Šváby et E. Moavero Milanesi (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        La Maison de l’Europe Avignon Méditerranée (ci-après la « MEAM » ou la « requérante », auparavant dénommée « Maison de l’Europe Avignon et Vaucluse ») est une association créée en 1994 dont l’objet est d’offrir une information et une documentation sur l’Union européenne et ses activités.

2        Dès sa création, la MEAM a bénéficié du versement par la Commission de nombreuses subventions pour son fonctionnement ainsi que pour le développement et la réalisation de projets de communication et d’information sur l’Union européenne.

3        La MEAM et la Commission ont conclu, le 13 octobre 2000, une convention faisant de la MEAM la structure hôte de l’info point Europe pour la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur et lui attribuant le label « info point Europe ».

4        Au cours du premier trimestre de l’année 2001, la Commission a soupçonné la MEAM de graves irrégularités dans la gestion des fonds qui lui étaient transférés. Elle en a informé l’Office européen de lutte antifraude (OLAF), qui a décidé d’ouvrir une enquête. Cette enquête ne s’est pas limitée aux activités de la MEAM, telles qu’énumérées dans la convention, mais a inclus également celles menées par la MEAM depuis le début de sa coopération avec la Commission, soit à partir de l’année 1995.

5        Les subventions attribuées à la MEAM par la Commission pour la réalisation des projets lui ont été directement versées jusqu’en 1997, puis à partir de 1998, indirectement, par l’intermédiaire de la Fédération internationale des Maisons de l’Europe.

6        Dans le cadre de l’enquête menée par l’OLAF, le président de la MEAM a concédé que, entre 1996 et 2002, 27 projets sur les 36 subventionnés soit directement soit indirectement par la Commission, n’ont pas été réalisés par la MEAM.

7        Les projets subventionnés représentaient un montant de 200 000 euros, sur un montant total de 800 000 euros de subventions accordées par la Commission à la MEAM pendant ladite période, le montant restant de 600 000 euros étant destiné à couvrir les coûts de fonctionnement de la MEAM.

8        Par lettre du 12 décembre 2002, la Commission a informé le président de la MEAM de son intention, à la suite des informations recueillies par l’OLAF, de ne pas renouveler la convention du 13 octobre 2000, à partir du 1er janvier 2003.

9        Par lettre du 22 janvier 2003, le Commission a confirmé le contenu de sa lettre du 12 décembre 2002 et informé la MEAM que, selon les dispositions du règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil, du 25 juin 2002, portant règlement financier applicable au budget général des Communautés européennes (JO L 248, p. 1), et notamment son article 93, paragraphe 1, sous a) et c), son article 94, sous b), et son article 114, paragraphe 2, elle n’était plus éligible aux subventions des institutions européennes.

10      Par lettre du 24 janvier 2003, la Commission a informé la requérante de sa décision de dénoncer, à titre définitif, la convention du 13 octobre 2000 et confirmé le contenu de ses précédentes lettres du 12 décembre 2002 et du 22 janvier 2003.

 Procédure et conclusions des parties

11      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 26 juillet 2004, la requérante a introduit le présent recours.

12      La Commission a soulevé, en vertu de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, une exception d’irrecevabilité.

13      La requérante a présenté ses observations sur cette exception d’irrecevabilité le 6 décembre 2004.

14      Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, prévues à l’article 64 du règlement de procédure, le Tribunal a invité les parties à répondre à certaines questions écrites. Il a été déféré à cette demande.

15      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter l’exception d’irrecevabilité de la Commission ;

–        condamner la Commission au paiement de la somme totale de 394 066,76 euros en raison de l’inexécution de ses obligations financières à son égard ;

–        condamner la Commission aux dépens, qu’elle estime à un montant de 10 000 euros.

16      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

17      En vertu de l’article 111 du règlement de procédure, lorsque le Tribunal est manifestement incompétent pour connaître d’un recours ou lorsque celui-ci est manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal, peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

18      En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier pour statuer sans poursuivre la procédure.

19      Dans la présente affaire, la requérante indique que son recours en responsabilité est introduit devant le Tribunal, en vertu de la clause compromissoire contenue dans l’article 12 du statut des infos points Europe (ci-après le « statut »), annexé à la convention du 13 octobre 2000 conclue entre les parties, lequel dispose que ladite convention est régie par le droit belge et que la seule juridiction compétente pour statuer sur tout litige concernant la convention survenant entre les parties contractantes est la Cour de justice des Communautés européennes.

20      À titre liminaire, il convient de rappeler que, en vertu des dispositions combinées des articles 225 CE et 238 CE, le Tribunal n’est compétent, pour statuer en première instance, sur les litiges de nature contractuelle portés devant lui, qu’en vertu d’une clause compromissoire. Faute de quoi, il étendrait sa compétence juridictionnelle au-delà des litiges dont la connaissance lui est limitativement réservée par l’article 240 CE, cette disposition conférant aux juridictions nationales la compétence de droit commun pour connaître des litiges auxquels la Communauté est partie (ordonnances du Tribunal du 3 octobre 1997, Mutual Aid Administration Services/Commission, T‑186/96, Rec. p. II‑1633, points 45 et 47, et du 12 décembre 2005, Natexis Banques populaires/Robobat, T‑360/05, non publiée au recueil, point 12). Cette compétence étant dérogatoire du droit commun, doit en outre être interprétée restrictivement (arrêt de la Cour du 18 décembre 1986, Commission/Zoubek, 426/85, Rec. p. 4057, point 11).

21      C’est sur la base de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner les différentes demandes de paiement de la requérante, dont le montant total s’élève à 394 066,76 euros.

22      En premier lieu, en ce qui concerne la demande de paiement des intérêts de retard sur les subventions versées à la requérante entre 1996 et 2002 pour douze projets, la Commission soutient que ces demandes ont été introduites en dehors des délais réglementaires et conventionnels applicables et sont donc irrecevables. Elle fait valoir que ces demandes auraient dû être introduites dans un délai de deux mois, suivant la réception du paiement en retard, en vertu tant de l’article 106, paragraphe 5, du règlement (CE, Euratom) n° 2342/2002 de la Commission, du 23 décembre 2002, établissant les modalités d’exécution du règlement nº 1605/2002 (JO L 357, p. 1), que de l’article 13, paragraphe 3, des conditions générales applicables aux subventions aux actions et au fonctionnement des Communautés européennes. Or, les demandes de paiement d’intérêts de retard ont été introduites par des factures datées du 27 juin 2003, alors que le dernier paiement de la Commission à la requérante est intervenu le 25 juin 2002.

23      À cet égard, il convient de relever que le règlement n° 2342/2002, qui n’est, aux termes de son article 273, entré en vigueur que le 1er janvier 2003 et ne prévoit pas d’application rétroactive aux paiements effectués avant cette date, n’est pas applicable à la présente espèce. Il en va de même des conditions générales applicables aux subventions aux actions et au fonctionnement des Communautés européennes et notamment de son article 13, paragraphe 3, que la Commission oppose à la demande de paiement d’intérêts de retard de la requérante. En effet, ces conditions générales ont été annexées aux conventions de subventions conclues à partir du 1er janvier 1999. Toutefois, la convention du 13 octobre 2000 ne répondant pas au modèle des conventions de subventions types, mais étant une convention spécifiquement conclue pour financer le fonctionnement des infos points Europe, lesdites conditions générales n’ont, ainsi que la Commission le reconnaît d’ailleurs elle-même, été ni annexées à cette convention ni mentionnées dans celle-ci, et ne sont donc pas applicables dans la présente affaire.

24      Pour autant que la requérante se fonde sur les dispositions conventionnelles, formalisées par la convention liant la requérante à la Commission, qui seraient de nature à justifier, selon la requérante, la demande de paiement d’intérêts de retard sur les subventions versées entre 1996 et 2002, il suffit de constater que la MEAM reste en défaut d’établir, que ces prestations ou actions, à l’exception des subventions de fonctionnement dites « Tête de réseau Région PACA », ont fait l’objet d’avenants à la convention permettant de bénéficier du financement communautaire prévu par l’article 8 du statut.

25      Ces demandes de paiement d’intérêts de retard doivent donc être appréciées au regard du droit belge, auquel renvoie expressément la clause compromissoire figurant à l’article 12 du statut. À cet égard, l’article 1153 du code civil belge, auquel il convient de se référer, prévoit que les dommages et intérêts ne sont dus qu’à compter de la sommation de payer, excepté le cas où la loi les fait courir de plein droit.

26      Or, la Commission soutient, sans être contredite sur ce point, qu’elle n’a reçu aucune sommation de payer, à l’exception des factures datées du 27 juin 2003, alors que le dernier paiement de la Commission à la requérante est intervenu le 25 juin 2002. La demande de paiement des intérêts de retard sur toutes les subventions versées à la requérante entre 1996 et 2002 ne peut, dès lors, être accueillie et doit être rejetée comme étant manifestement non fondée.

27      En second lieu, en ce qui concerne les autres demandes de la requérante, à savoir les demandes de paiement des intérêts de retard sur les frais engagés pour la gestion de 27 dossiers de jeunes volontaires pour le service volontaire européen et sur les subventions accordées pour 36 projets dans le cadre de la Fédération internationale des Maisons de l’Europe, la demande de remboursement des frais exposés pour la tenue d’un stand d’information lors du festival d’Avignon en 2000 ainsi que pour la gestion d’un centre de documentation européen à Avignon, force est de constater que la requérante n’établit pas, par le simple renvoi aux dispositions des articles 4 à 6 du statut relatifs aux missions d’information et de documentation sur l’Union européenne de la MEAM, que ces demandes peuvent être rattachées à la convention conclue avec la Commission et au statut qui lui est annexé.

28      Par ailleurs, s’agissant de prestations ou d’actions spécifiques, la requérante ne soutient pas, ni même n’allègue, que lesdites prestations ou actions ont donné lieu à des avenants à ladite convention, permettant d’obtenir, en vertu de l’article 8 du statut, un financement communautaire.

29      Il résulte de ces considérations que le Tribunal est manifestement incompétent pour connaître de ces demandes de paiement d’intérêts de retard ou de remboursement de frais.

30      Compte tenu de tout ce qui précède, le présent recours doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

31      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé et la Commission ayant conclu à la condamnation de celle-ci aux dépens, il y a lieu de condamner la requérante à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La Maison de l’Europe Avignon Méditerranée est condamnée aux dépens.

Fait à Luxembourg, le 18 avril 2008.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      N. J. Forwood


* Langue de procédure : le français.