Language of document : ECLI:EU:T:2015:446

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

30 juin 2015 (*) (1)

« Marque communautaire – Procédure de nullité – Marque communautaire verbale VIÑA ALBERDI – Marque nationale figurative antérieure VILLA ALBERTI – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Absence de coexistence des marques – Risque de confusion »

Dans l’affaire T‑489/13,

La Rioja Alta, SA, établie à Haro (Espagne), représentée par Me F. Pérez Álvarez, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. Ó. Mondéjar Ortuño, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Aldi Einkauf GmbH & Co. OHG, établie à Essen (Allemagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 9 juillet 2013 (affaire R 1190/2011‑4), relative à une procédure de nullité entre Aldi Einkauf GmbH & Co. OHG et La Rioja Alta, SA,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. M. Prek (rapporteur), président, Mme I. Labucka et M. V. Kreuschitz, juges,

greffier : M. I. Drăgan, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 16 septembre 2013,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 28 mars 2014,

à la suite de l’audience du 14 janvier 2015,

rend le présent

Arrêt 

 Antécédents du litige

1        Le 3 juin 2003, la requérante, la société La Rioja Alta, SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire auprès de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal VIÑA ALBERDI.

3        Le 26 novembre 2004, le signe a été enregistré en tant que marque communautaire, sous le numéro 3189065.

4        Les produits pour lesquels la marque contestée a été enregistrée relèvent, notamment, de la classe 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondaient, pour cette classe, à la description suivante : « Boissons alcooliques (à l’exception des bières) ».

5        Le 5 novembre 2009, l’autre partie à la procédure devant l’OHMI, la société Aldi Einkauf GmbH & Co. OHG, a présenté à l’OHMI une demande visant à faire déclarer la nullité partielle de la marque contestée, en vertu de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009, lu conjointement avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement, pour les produits visés au point 4 ci-dessus.

6        À l’appui de sa demande en nullité, la société Aldi Einkauf a invoqué la marque allemande figurative antérieure n° 2 056 141, enregistrée le 7 février 1994 et renouvelée jusqu’au 30 septembre 2012, représentée comme suit :

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7        La marque antérieure avait été enregistrée pour les produits relevant de la classe 33 correspondant à la description suivante : « Vins d’Italie ».

8         Par décision du 11 avril 2011, la division d’annulation a accueilli la demande en nullité de la marque contestée.

9        Le 6 juin 2011, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’annulation. Dans ce cadre, elle a, le 5 août 2011, demandé que les « vins d’Italie » soient exclus des produits relevant de la classe 33 visés par la marque contestée.

10      Par décision du 9 juillet 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours de la requérante. Elle a :

–        retenu que la limitation demandée par la requérante s’agissant des produits désignés par la marque contestée s’appréciait en une renonciation au sens de l’article 50 du règlement n° 207/2009 et était, dès lors, valable ;

–        considéré que la preuve de l’usage de la marque antérieure à l’égard des « vins d’Italie » avait été apportée et rejeté l’argumentation de la requérante tirée de ce que cet usage aurait seulement été démontré pour certaines appellations d’origine ;

–        relevé que le public pertinent était constitué par le grand public allemand, présentant un degré d’attention moyen à l’occasion de l’acquisition des produits en cause ;

–        estimé que les produits en cause étaient hautement similaires sinon identiques, dans la mesure où la marque contestée excluait les « vins d’Italie », mais pas les autres vins ;

–        observé que les signes en conflit présentaient à tout le moins un certain degré de similitude visuelle et un degré moyen de similitude phonétique et ne présentaient pas de similitude conceptuelle ;

–        noté que la marque antérieure disposait d’un caractère distinctif moyen ;

–        conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée;

–        déclarer valide la marque contestée ;

–        condamner l’OHMI et l’autre partie à la procédure devant celui-ci aux dépens.

12      Lors de l’audience, la requérante s’est désistée de son deuxième chef de conclusions, ce dont le Tribunal a pris acte.

13      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité de certains éléments de preuve présentés pour la première fois lors de l’audience

14      Le Tribunal relève que, lors de l’audience, la requérante a souhaité apporter, à titre d’éléments de preuve, plusieurs bouteilles de vins dont les étiquettes reproduiraient la marque antérieure ainsi que certaines marques figuratives dont elle était titulaire.

15      Il convient à cet égard de rappeler que le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 65 du règlement n° 207/2009, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui [voir, en ce sens, arrêt du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec, EU:T:2005:420, point 19 et jurisprudence citée].

16      Les éléments de preuve présentées par la requérante pour la première fois devant le Tribunal doivent, partant, être rejetés comme étant irrecevables.

 Sur le fond

17      À l’appui du recours, la requérante avance formellement deux moyens tirés, respectivement, de la violation de l’article 52, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009 et de la violation de l’article 75 du règlement n° 207/2009.

18      Il convient, de manière liminaire, de souligner que, dans le cadre du second moyen, la requérante met en exergue, d’une part, l’insuffisance des motifs de la décision attaquée relatifs à la comparaison des produits concernés et à la comparaison des signes en cause et, d’autre part, en substance, le caractère erroné des motifs de cette décision afférant auxdites comparaisons ainsi qu’à l’existence d’un risque de confusion. Or, force est de constater que cette seconde catégorie de critiques concerne, en réalité, le bien-fondé des motifs de la décision attaquée relatifs à l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b) et de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009 et constitue, dès lors, un moyen autonome et distinct de celui tiré de la violation de l’article 75, première phrase, du règlement n°207/2009. Les parties ont eu l’occasion, lors de l’audience, de présenter leurs observations sur cette requalification des écritures de la requérante.

 Sur le moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1 sous b), et de l’article 53, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 207/2009

19      La requérante soutient que c’est à tort que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit, dès lors que ni les produits concernés, ni les signes en cause ne sont similaires.

20      En vertu de l’article 53, paragraphe 1, sous a), lu en combinaison avec l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, la marque communautaire est déclarée nulle, sur demande du titulaire d’une marque antérieure, lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

21      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier si c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé qu’il existait, en l’espèce, un risque de confusion entre les marques en conflit.

–       Sur le public pertinent

22      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée].

23      En l’espèce, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, aux points 24 et 25 de la décision attaquée, que le public pertinent était composé des membres du grand public allemand, manifestant un degré moyen d’attention à l’occasion de l’acquisition des produits désignés par la marque contestée, dès lors que, à la suite de la renonciation effectuée par la requérante, seuls demeuraient en cause les boissons alcooliques, à l’exception des vins d’Italie et des bières et que de tels produits étaient destinés à la consommation courante.

24      Cette conclusion vaut notamment pour les vins, autres que les vins d’Italie, inclus dans la définition plus large des produits visés par la marque contestée, dès lors que celle-ci ne désigne pas spécifiquement des vins de qualité qui seraient vendus à des prix relativement élevés et à l’égard desquels le consommateur pourrait disposait d’un degré d’attention élevé [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 13 avril 2011, Sociedad Agricola Requingua/OHMI – Consejo Regulador de la Denominación de Origen Toro (TORO DE PIEDRA), T‑358/09, EU:T:2011:174, point 29].

–       Sur la comparaison des produits

25      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [arrêt du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec, EU:T:2007:219].

26      En l’espèce, la chambre a retenu, en substance, au point 26 de la décision attaquée, que, à la suite de la renonciation effectuée par la requérante, les produits en cause étaient constitués, s’agissant de la marque antérieure, par les « vins d’Italie » et, s’agissant de la marque contestée, par les « boissons alcooliques (à l’exception des bières) et à l’exception des vins d’Italie ». Elle a conclu, au point 28 de ladite décision, que les vins d’autres pays que l’Italie relevant de la catégorie des produits visés par la marque contestée étaient hautement similaires sinon identiques aux « vins d’Italie » désignés par la marque antérieure.

27      La requérante conteste le bien-fondé de cette analyse au motif que le consommateur pertinent différencie les vins visés par la marque contestée et ceux désignés par la marque antérieure, dès lors que ces vins relèvent d’appellations d’origine différentes. Elle met en exergue l’importance de l’appellation d’origine dans la détermination de l’origine géographique et des caractéristiques d’un vin et en déduit, en substance, que l’appellation d’origine joue un rôle prépondérant à l’occasion de l’acquisition d’un vin.

28      En premier lieu, il convient de souligner que l’argumentation de la requérante repose sur un prémisse erroné en ce qu’elle soutient qu’il convient exclusivement de comparer les vins de l’appellation d’origine « Rioja » qu’elle commercialise avec ceux des appellations d’origine « Soave » et « Chianti » qui seraient seuls commercialisés sous la marque antérieure.

29      En effet, d’une part, il y a lieu de relever que la marque contestée n’a pas été enregistrée pour des vins commercialisés sous l’appellation d’origine « Rioja », mais pour des « boissons alcooliques », à l’exception des « bières » et, à la suite de la renonciation effectuée par la requérante, également à l’exception des « vins d’Italie ». C’est donc l’ensemble de ces produits qui doit être pris en compte aux fins d’apprécier l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit. En cela, la présente affaire se distingue de celle ayant donné lieu à l’arrêt du 15 février 2007, Bodegas Franco-Españolas/OHMI – Companhia Geral da Agricultura das Vinhas do Alto Douro (ROYAL) (T‑501/04, EU:T:2007:54), invoquée par la requérante, dans laquelle était en cause une demande de marque visant explicitement les « vins de La Rioja ».

30      D’autre part, pour autant que la requérante conteste la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure au motif que celle-ci n’aurait été apportée qu’à l’égard des vins relevant des appellations d’origine « Soave » et « Chianti » et non à l’égard de l’ensemble des « vins italiens », cette argumentation ne saurait prospérer.

31      Il découle de la dernière phrase de l’article 57, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 applicable aux marques nationales antérieures en application du paragraphe 3 de ce même article, que si la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure n’a été utilisée que pour une partie des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée, elle n’est réputée enregistrée que pour cette partie des produits et services, aux fins de l’examen de la demande en nullité.

32      L’article 57, paragraphe 2, dernière phrase et 57, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009 visent à éviter qu’une marque utilisée de manière partielle jouisse d’une protection étendue au seul motif qu’elle a été enregistrée pour une large gamme de produits ou services. Ainsi, lors de l’application de ces dispositions, il convient de tenir compte de l’étendue des catégories de produits ou de services pour lesquelles la marque antérieure a été enregistrée, notamment de la généralité des termes employés à cette fin pour décrire lesdites catégories, et ce au regard des produits ou des services dont l’usage sérieux a, par hypothèse, effectivement été établi [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 14 juillet 2005, Reckitt Benckiser (España)/OHMI ‑ Aladin (ALADIN), T‑126/03, Rec, EU:T:2005:288, points 42 à 44].

33      Il en résulte que, si une marque a été enregistrée pour une catégorie de produits ou de services suffisamment large pour que puissent être distinguées, en son sein, plusieurs sous-catégories susceptibles d’être envisagées de manière autonome, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour une partie de ces produits ou services n’emporte protection, dans une procédure de nullité, que pour la ou les sous-catégories dont relèvent les produits ou services pour lesquels la marque a été effectivement utilisée. En revanche, si une marque a été enregistrée pour des produits ou services définis de façon tellement précise et circonscrite qu’il n’est pas possible d’opérer des divisions significatives à l’intérieur de la catégorie concernée, alors, la preuve de l’usage sérieux de la marque pour lesdits produits ou services couvre nécessairement toute cette catégorie aux fins de la procédure de nullité (voir, en ce sens et par analogie, arrêt ALADIN, point 32 supra, EU:T:2005:288, point 45) .

34      En effet, si la notion d’usage partiel a pour fonction de ne pas rendre indisponibles des marques dont il n’a pas été fait usage pour une catégorie de produits donnée, elle ne doit néanmoins pas avoir pour effet de priver le titulaire de la marque antérieure de toute protection pour des produits qui, sans être rigoureusement identiques à ceux pour lesquels il a pu prouver un usage sérieux, ne sont pas essentiellement différents de ceux-ci et relèvent d’un même groupe qui ne peut être divisé autrement que de façon arbitraire. Il convient à cet égard d’observer qu’il est en pratique impossible au titulaire d’une marque d’apporter la preuve de l’usage de celle-ci pour toutes les variantes imaginables des produits concernés par l’enregistrement. Par conséquent, la notion de « partie des produits ou services » ne peut s’entendre de toutes les déclinaisons commerciales de produits ou de services analogues, mais seulement de produits ou de services suffisamment différenciés pour pouvoir constituer des catégories ou s ous-catégories cohérentes (voir, en ce sens et par analogie, arrêt ALADIN, point 32 supra, EU:T:2005:288, point 46).

35      En l’espèce, il ne saurait, certes, être nié que l’appellation d’origine d’un produit puisse constituer une considération importante à l’occasion de son acquisition, en ce qu’elle est, pour le consommateur, une indication de son origine géographique et des qualités particulières qui lui sont intrinsèques.

36      À cet égard, il est révélateur que le règlement n° 207/2009 envisage la possibilité que l’enregistrement d’une marque puisse être refusé au vu de l’existence d’une appellation d’origine préexistante. Ainsi, une appellation d’origine peut constituer un signe utilisé dans la vie des affaires au sens de l’article 8, paragraphe 4, du règlement n° 207/2009, à la condition qu’elle serve à identifier une activité économique exercée par son titulaire (arrêt du 29 mars 2011, Anheuser-Busch/Budějovický Budvar, C‑96/09 P, Rec, EU:C:2011:189, points 142 à 149). De même s’agissant plus spécifiquement des vins, il ressort de l’article 7, paragraphe 1, sous j), du règlement n° 207/2009 que sont refusées à l’enregistrement les marques de vins qui comportent ou qui sont composées d’indications géographiques destinées à identifier les vins, lorsque ces vins n’ont pas ces origines.

37      Cependant, la prise en compte de l’appellation d’origine d’un vin par le consommateur à l’occasion de son acquisition ne saurait être considérée comme revêtant une importance systématique telle que des vins d’appellations d’origine différentes puissent constituer des sous-catégories de produits susceptibles d’être envisagées de manière autonome au sens de la jurisprudence citée au point 33 ci-dessus.

38      Cette conclusion n’est pas infirmée par la référence opérée par la requérante à certaines décisions de juridictions espagnoles soulignant l’importance de la prise en compte d’une appellation d’origine dans le choix d’un vin. D’une part, ainsi qu’il a été souligné au point 35 ci-dessus, le Tribunal reconnaît l’importance que peut jouer l’appellation d’origine d’un vin à l’occasion de son acquisition. D’autre part, et en toute hypothèse, il ressort d’une jurisprudence constante que la légalité des décisions des chambres de recours doit être appréciée uniquement sur le fondement du règlement n° 207/2009, tel qu’interprété par le juge de l’Union, et non sur la base d’une jurisprudence nationale [arrêts du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec, EU:T:2003:199, point 53 ; du 4 novembre 2003, Díaz/OHMI – Granjas Castelló (CASTILLO), T‑85/02, Rec, EU:T:2003:288, point 37, et du 13 juillet 2004, AVEX/OHMI – Ahlers (a), T‑115/02, Rec, EU:T:2004:234, point 30].

39      Ainsi, en l’espèce, le Tribunal estime que c’est à juste titre que la chambre de recours a procédé à une comparaison des produits visés par la marque contestée à savoir les « boissons alcooliques », à l’exception des « bières » et des « vins d’Italie », avec les « vins d’Italie » désignés par la marque antérieure.

40      En deuxième lieu, s’agissant plus particulièrement de la comparaison entre les vins d’Italie désignés par la marque antérieure et les autres vins visés par la marque contestée, la chambre de recours a valablement pu retenir qu’ils présentent notamment la même nature et la même teneur en alcool, dans la mesure où la marque contestée ne désigne pas explicitement des vins de qualité qui seraient vendus à des prix relativement élevés et destinés à un public de connaisseurs.

41      En outre, s’agissant des canaux de distribution des produits concernés, lesquels peuvent constituer un facteur pertinent dans la comparaison des produits en application de la jurisprudence citée au point 25 ci-dessus, il convient de relever que c’est à juste titre que la chambre de recours a rejeté, au point 29 de la décision attaquée, l’argumentation de la requérante fondée, en substance, sur l’allégation que les produits commercialisés sous la marque antérieure seraient disponibles dans les seuls supermarchés de l’autre partie à la procédure devant l’OHMI. En effet, s’agissant de la comparaison des vins d’Italie et des autres vins, seuls importent les canaux de distribution généralement utilisés pour la commercialisation des vins, ainsi que l’a, en substance, relevé la chambre de recours.

42      Il n’en demeure pas moins que la considération relevée au point 35 ci-dessus s’agissant des appellations d’origine peut également être pertinente, plus généralement, à l’égard de l’origine géographique d’un vin. Ainsi, y compris pour des vins destinés à une consommation courante et pour lesquels le consommateur ne manifeste qu’un degré moyen d’attention, il ne saurait être nié que l’un des éléments susceptibles d’être pris en compte à l’occasion de leur acquisition puisse être leur origine géographique.

43      Dans ces conditions, force est de constater que l’appréciation de la similitude entre les vins d’Italie et les autres vins comme étant « hautement similaires sinon identiques », apparaît excessive. Partant, il convient plutôt de conclure à une degré moyen de similitude entre ces deux catégories de produits.

44      En troisième lieu, s’agissant des produits visés par la marque contestée autres que les vins, force est de constater que la chambre de recours ne fournit aucune motivation explicite quant à leur comparaison avec les produits désignés par la marque antérieure. Il ressort néanmoins implicitement de la décision attaquée que leur a été généralisée la conclusion mentionnée au point 43 ci-dessus.

45      À cet égard, il ressort d’une jurisprudence constante que l’OHMI n’a pas l’obligation de procéder à une analyse de chacun des produits ou des services faisant partie de chaque catégorie visée par la marque contestée, mais doit porter son examen sur la catégorie en question, en tant que telle [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 14 juillet 2011, ratiopharm/OHMI – Nycomed (ZUFAL), T‑222/10, EU:T:2011:383, point 34 et jurisprudence citée].

46      Force est de constater que, en application de cette jurisprudence, la similitude constatée entre certains des produits inclus dans la catégorie des « boissons alcooliques » désignées par la marque contestée, à savoir les « vins », avec les « vins d’Italie » désignés par la marque antérieure, permettait à la chambre de recours d’étendre ce constat à l’ensemble des produits pour lesquels la marque contestée avait été enregistrée.

–       Sur la comparaison des signes

47      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

48      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt OHMI/Shaker, point 47 supra, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts OHMI/Shaker, point 47 supra, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, EU:C:2007:539, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt Nestlé/OHMI, précité, EU:C:2007:539, point 43).

49      En l’espèce, sont en cause une marque complexe et une marque verbale. La marque antérieure est constituée de l’élément verbal « villa alberti », écrit dans une police courante en petites majuscules où l’initiale du mot « alberti » dispose d’une taille supérieure. L’élément verbal « villa alberti » est inscrit au-dessus d’un cadre rectangulaire dans lequel figure un bâtiment de dimension imposante, pouvant s’apparenter à un château. La marque contestée est constitué du seul élément verbal « viña alberdi ».

50      La chambre de recours a estimé, en substance, que les signes en conflit présentaient un degré au moins moyen de similitude sur les plans visuel et phonétique et pas de similitude sur le plan conceptuel.

51      La requérante conteste l’analyse de la chambre de recours et soutient que les signes en conflit ne sont similaires ni sur le plan visuel, ni sur le plan phonétique.

52      En ce qui concerne, en premier lieu, la comparaison des signes sur le plan visuel, il convient de souligner que l’élément verbal « villa alberti » de la marque antérieure et l’élément verbal « viña alberdi » constituant la marque contestée disposent d’une grande ressemblance en ce qu’ils comprennent neuf lettres en commun et placées dans le même ordre sur un total, respectivement, de douze et onze lettres.

53      Certes, l’effet de ce facteur de similitude entre les signes en conflit est, dans une certaine mesure, compensé par la présence de l’élément figuratif dans la seule marque antérieure. Cependant, il convient d’observer que la représentation d’un château, dans le contexte de la commercialisation des « vins d’Italie » désignés par la marque antérieure ne dispose que d’une faible valeur distinctive, une telle représentation étant de nature à évoquer une propriété viticole [voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 15 novembre 2011, El Coto De Rioja/OHMI – Álvarez Serrano (COTO DE GOMARIZ), T‑276/10, EU:T:2011:661, point 33 et jurisprudence citée].

54      C’est dès lors à juste titre que la chambre de recours a retenu l’existence d’un degré moyen de similitude entre les signes en conflit sur le plan visuel.

55      En ce qui concerne, en deuxième lieu, la comparaison des signes en conflit sur le plan phonétique, la requérante fait valoir que ceux-ci seront perçus différemment par le consommateur germanophone en se prévalant des conclusions de l’expertise phonétique qu’elle a présentée devant la chambre de recours. Elle reproche également à la chambre de recours de s’être fondée sur sa propre appréciation subjective plutôt que celle privilégiée par des experts en linguistique.

56      À cet égard, il convient de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante que les chambres de recours, pour déterminer la perception que le public pertinent aura des marques en conflit, peuvent s’appuyer sur des faits notoires, sous réserve de la démonstration, par la partie à laquelle cette appréciation fait grief, d’une erreur d’appréciation au regard du caractère notoire de ces faits [voir, en ce sens, arrêts du 17 octobre 2006, Hammarplast/OHMI – Steninge Slott (STENINGE SLOTT), T‑499/04, EU:T:2006:324, point 53, et du 17 octobre 2007, InterVideo/OHMI (WinDVD Creator), T‑105/06, EU:T:2007:309, point 40].

57      En l’espèce, il convient de souligner que c’est à juste titre que la chambre de recours a relevé, au point 34 de la décision attaquée, que, pour le consommateur allemand, tout d’abord, les signes en conflit seraient tous deux prononcés sur la base de cinq syllabes , à savoir les syllabes « vi » « la » « al » « ber » et « ti » s’agissant de la marque antérieure et les syllabes « vi » « ña » « al » « ber » et « di » s’agissant de la marque contestée, ensuite, présentent une suite de voyelles identique et, enfin, contiennent trois syllabes identiques prononcées dans le même ordre, à savoir les syllabes « vi » « al » et « ber ». Au regard de l’existence, relevée au point 35 de ladite décision, de deux facteurs de différenciation entre les signes en conflit sur le plan phonétique, à savoir la présence dans la marque antérieure du mot « viña » et de la lettre « t » et, dans la marque contestée, du mot « villa » et de la lettre « d », il convient de conclure, à l’instar de la chambre de recours, à un degré moyen de similitude entre les signes en conflit sur le plan phonétique.

58      Cette conclusion n’est pas infirmée par le renvoi effectué par la requérante dans la requête à l’expertise phonétique qu’elle a présentée dans le cadre de la procédure devant la chambre de recours. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le principe qui prévaut en droit de l’Union est celui de la libre administration des preuves et le seul critère pertinent pour apprécier les preuves produites réside dans leur crédibilité. Ainsi pour apprécier la force probante d’un élément de preuve, il convient en premier lieu de vérifier la vraisemblance de l’information qui y est contenue. Il faut alors tenir compte, notamment, de l’origine du document, des circonstances de son élaboration, de son destinataire, et se demander si, d’après son contenu, il semble sensé et fiable [voir arrêt du 30 mai 2013, Brauerei Beck/OHMI – Aldi (Be Light), T‑172/12, EU:T:2013:286, point 27 et jurisprudence citée].

59      Il convient de relever que l’expertise phonétique réalisée à la demande de la requérante conclut à l’absence de toute confusion possible pour le consommateur germanophone entre les signes en conflit sur le plan phonétique sur la seule base des différences mentionnées au point 57 ci-dessus, en dépit des facteurs de similitude entre les signes mise en exergue au même point. Or, force est de constater que le caractère particulièrement tranché de la conclusion de cette expertise, dans un contexte où il ressort notoirement de la comparaison des signes l’existence de certains éléments phonétiques communs susceptibles d’avoir une influence sur la perception des signes dans leur ensemble, doit conduire à ne pas lui reconnaître une force probante suffisante pour remettre en cause le bien-fondé de l’analyse privilégiée par la chambre de recours.

60      Enfin, en troisième lieu, s’agissant de la comparaison des signes en conflit sur le plan conceptuel, la chambre de recours a conclu, en substance, au point 37 de la décision attaquée, qu’il n’existait pas de similitude au motif que le mot « villa » de l’élément verbal de la marque antérieure sera associé à un château et que le mot « viña » figurant dans la marque contestée sera dépourvu de signification pour le consommateur allemand et que les mots « alberti » et « alberdi » ne disposent pas de signification et pourraient éventuellement être perçus comme des noms de famille.

61      La requérante soutient qu’elle partage l’appréciation de la chambre de recours tout en faisant valoir que le mot « viña » figurant dans la marque contestée sera associé à « la vigne de laquelle on obtient le raisin destiné à l’élaboration du vin ».

62      À cet égard, il convient de relever que, dans le contexte de la commercialisation de vins et pour des raisons analogues à celles exposées au point 53 ci-dessus, le mot « villa » contenu dans l’élément verbal de la marque antérieure ainsi que l’élément figuratif de la marque antérieure seront de nature à évoquer une propriété viticole. En outre, dans ce contexte particulier, il peut raisonnablement être considéré que le mot « viña » même s’il n’appartient pas à la langue allemande, sera perçu par le public pertinent comme une référence au vin. En ce qui concerne les mots « alberti » et « alberdi », c’est à juste titre que la chambre de recours a relevé qu’ils pourraient être compris comme des patronymes.

63      Or, il convient de relever qu’il est fréquent de conférer aux vins et aux autres boissons alcooliques des dénominations composées d’un terme faisant allusion à un type de parcelle ainsi qu’à son propriétaire, qui indiquent, en général, la provenance du produit concerné [voir arrêt du 16 septembre 2009, Dominio de la Vega/OHMI – Ambrosio Velasco (DOMINIO DE LA VEGA), T‑458/07, EU:T:2009:337, point 50 et jurisprudence citée].

64      Dès lors, les signes en conflit ont en commun, sur le plan conceptuel, de pouvoir être compris comme une référence à l’origine du vin ou de la boisson alcoolique commercialisée, origine consistant dans le patronyme auxquels ils renvoient.

65      Partant, dans la configuration particulière des signes en conflit, c’est essentiellement la comparaison des patronymes y figurant qui est susceptible de revêtir un caractère déterminant s’agissant de leur comparaison sur le plan conceptuel.

66      À cet égard, il convient de relever que les deux mots susceptibles d’être perçus comme des patronymes, « alberti » et « alberdi », sont très proches, en ce qu’ils ne se différencient l’un de l’autre que par une seule lettre. L’effet de cette différence est d’autant plus réduit que le public pertinent n’est réputé, pour les raisons exposées au point 23 ci-dessus, seulement manifester un degré d’attention moyen à l’occasion de l’acquisition des produits en cause. Les signes pourraient, dès lors, être compris comme renvoyant au même patronyme.

67      Dans ces conditions, il convient de considérer que, contrairement à ce qu’a retenu la chambre de recours au point 37 de la décision attaquée, les signes en conflit jouissent d’un certain degré de similitude sur le plan conceptuel.

–       Sur le risque de confusion

68      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec, EU:C:1998:442, points 16, 17 et 29 et jurisprudence citée, et GIORGIO BEVERLY HILLS, point 38 supra, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

69      Au nombre des facteurs pertinentes mentionnés au point 68 ci-dessus, figure également le caractère distinctif de la marque antérieure, que celui-ci dérive des qualités intrinsèques de cette marque ou de sa renommée. Ainsi, les marques qui ont un caractère distinctif élevé jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (arrêts Canon, point 68 supra, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec, EU:C:1999:323, point 20). Cependant, même en présence d’une marque antérieure ayant un caractère distinctif faible, il peut exister un risque de confusion, notamment, lorsque les produits en cause sont identiques et les signes en conflit sont similaires [voir, en ce sens, arrêts du 16 mars 2005, L'Oréal/OHMI – Revlon (FLEXI AIR), T‑112/03, Rec, EU:T:2005:102, point 61, et du 13 décembre 2007, Xentral/OHMI – Pages jaunes (PAGESJAUNES.COM), T‑134/06, Rec, EU:T:2007:387, point 70].

70      En outre, au titre des facteurs pertinents mentionnés au point 68 ci-dessus peut éventuellement être prise en compte la coexistence de deux marques sur un marché, dès lors qu’il est admis en jurisprudence qu’elle peut, conjointement à d’autres éléments, aboutir à amoindrir le risque de confusion entre ces marques dans l’esprit du public pertinent (arrêt du 3 septembre 2009, Aceites del Sur-Coosur/Koipe, C‑498/07 P, Rec, EU:C:2009:503, point 82 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt du 22 septembre 2011, Budějovický Budvar, C‑482/09, Rec, EU:C:2011:605, points 75 à 82).

71      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, au point 44 de la décision attaquée, que la marque antérieure disposait d’un degré moyen de caractère distinctif intrinsèque. Au vu de la similitude des produits en cause et des signes en conflit, elle a conclu, au point 51 de ladite décision à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit. Dans le cadre de son appréciation, elle a rejeté l’argument tiré de la coexistence paisible desdites marques en Allemagne.

72      La requérante reproche à la chambre de recours de ne pas avoir démontré à suffisance de droit l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit dans l’esprit du public pertinent. Elle estime que le consommateur pourra clairement les distinguer. Elle soutient également, en substance, que c’est à tort que la chambre de recours a rejeté son argument tiré de la coexistence paisible de la marque antérieure avec la marque contestée en Allemagne, alors qu’elle y commercialise depuis 1983 des vins sous la marque espagnole verbale VIÑA ALBERDI.

73      En ce qui concerne, en premier lieu, l’examen du caractère distinctif de la marque antérieure, la chambre de recours a relevé, au point 45 de la décision attaquée, que ladite marque présentait un caractère distinctif intrinsèque moyen. Cette conclusion, au demeurant non explicitement contestée par la requérante, doit être approuvée.

74      En effet, alors même que pour des raisons analogues à celles exposées aux points 53 et 62 ci-dessus, tant l’élément figuratif de la marque antérieure que le mot « villa » figurant dans son élément verbal peuvent être considérés comme ne disposant que d’un caractère distinctif intrinsèque faible s’agissant de la commercialisation de vins d’Italie, il en va différemment du mot « alberti » figurant dans son élément verbal, lequel joue, en outre, pour les raisons exposées aux points 65 et 66, ci-dessus, un rôle déterminant dans la perception de la marque antérieure.

75      En ce qui concerne, en second lieu, l’éventuelle coexistence paisible des marques en conflit en Allemagne, il convient de souligner que, devant la division d’annulation, la requérante a invoqué la marque espagnole verbale VIÑA ALBERDI sous laquelle elle commercialise des vins depuis 1983 en Allemagne. À l’appui de cette affirmation, elle a présenté plusieurs documents dont, premièrement, le chiffre des ventes de vins sous ladite marque espagnole en Allemagne de 1983 à 2009, deuxièmement, dix attestations d’importateurs allemands de vins relatives à cette marque espagnole dans lesquelles il est soutenu que, tant pour l’importateur que pour ses clients, la même marque espagnole est « une marque connue qui identifie un vin espagnol de qualité relevant de l’appellation d’origine protégée Rioja » et, troisièmement, différents articles de presse et prospectus portant sur les vins qu’elle commercialise. Elle a réitéré cette argumentation devant la chambre de recours.

76      Aux points 57 à 64 de sa décision, la division d’annulation a, en substance, considéré que les documents présentés par la requérante ne démontraient pas que la marque espagnole verbale VIÑA ALBERDI était connue d’une partie significative du public allemand. Elle a ajouté que, dans l’éventualité même d’une coexistence paisible de cette marque avec la marque antérieure sur le marché allemand, il conviendrait que la requérante démontre que cette coexistence repose sur une absence de risque de confusion entre lesdites marques et que les documents avancés par la requérante n’apportaient pas une telle preuve.

77      Enfin, au point 39 de la décision attaquée, la chambre de recours a souligné qu’elle se ralliait « aux conclusions de la division d’annulation selon lesquelles il n’a[vait] pas été établi que la coexistence démontrée reposait sur l’absence d’un risque de confusion [et a]ucun des éléments déposés à titre de preuve ne montr[ait] que la coexistence des deux signes [étai]t mutuellement reconnue et que le public allemand a[vait] appris et sa[va]it parfaitement que les signes en conflit désign[ai]ent clairement des origines commerciales différentes ».

78      À l’encontre de cette analyse, la requérante fait valoir que la preuve d’une coexistence paisible entre des marques reposant sur une absence de risque de confusion entre lesdites marques est impossible à amener. En substance, elle estime que les éléments avancés au cours de la procédure suffisaient à démontrer le caractère paisible de la coexistence de la marque espagnole VIÑA ALBERDI et de la marque antérieure invoquée à l’appui de la demande de nullité, en Allemagne.

79      En ce qui concerne l’allégation de la requérante tirée du caractère impossible de la démonstration d’une coexistence paisible entre des marques reposant sur une absence de risque de confusion entre lesdites marques, elle doit d’emblée être rejetée.

80      S’il appartient, certes, au titulaire de la marque contestée, au cours de la procédure concernant des motifs relatifs de refus devant l’OHMI, de démontrer que ladite coexistence reposait sur l’absence d’un risque de confusion, dans l’esprit du public pertinent, entre la marque dont il se prévaut et la marque antérieure qui fonde la demande de nullité [voir, en ce sens, arrêts du 11 mai 2005, Grupo Sada/OHMI – Sadia (GRUPO SADA), T‑31/03, Rec, EU:T:2005:169, point 86, et du 10 avril 2013, Höganäs/OHMI – Haynes (ASTALOY), T‑505/10, EU:T:2013:160, point 48], il lui est loisible de procéder à cette démonstration en avançant un faisceau d’indices en ce sens. À cet égard, sont particulièrement pertinents les éléments attestant de la connaissance de chacune des marques en cause par le public pertinent avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque contestée [voir, en ce sens et par analogie, arrêts GRUPO SADA, précité, EU:T:2005:169, point 89, et du 25 mai 2005, TeleTech Holdings/OHMI – Teletech International (TELETECH GLOBAL VENTURES), T‑288/03, Rec, EU:T:2005:177, point 100]. En outre, dans la mesure où il ressort de la jurisprudence que la coexistence de deux marques doit être suffisamment longue pour qu’elle puisse influer sur la perception du consommateur pertinent [voir, en ce sens, arrêts du 1er mars 2005, Fusco/OHMI – Fusco International (ENZO FUSCO), T‑185/03, Rec, EU:T:2005:73, point 64, et ASTALOY, précité, EU:T:2013:160, point 47], la durée de la coexistence constitue également un élément essentiel.

81      Il convient également de relever que tout argument tiré d’une coexistence implique au préalable la démonstration, d’une part, d’une identité des marques antérieures avec les marques en conflit (voir en ce sens arrêt GRUPO SADA, point 80 supra, EU:T:2005:169, points 86 et 88) et, d’autre part, de l’usage effectif de la marque dont la requérante se prévaut sur le territoire pertinent [arrêt du 21 avril 2005, PepsiCo/OHMI – Intersnack Knabber-Gebäck (RUFFLES), T‑269/02, Rec, EU:T:2005:138, points 23 à 25].

82      En outre, dans la mesure où seule une coexistence paisible entre les marques en cause peut être prise en compte, l’existence d’un contentieux entre les titulaires des marques antérieures empêche que la coexistence soit retenue [voir, en ce sens, arrêts ARTHUR ET FELICIE, point 15 supra, EU:T:2005:420, point 64, et du 8 décembre 2005, Castellblanch/OHMI – Champagne Roederer (CRISTAL CASTELLBLANCH), T‑29/04, Rec, EU:T:2005:438, point 74].

83      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient de vérifier si la chambre de recours a valablement pu avaliser l’analyse de la division d’annulation, rejetant l’argument de la requérante tirée de la coexistence de la marque espagnole VIÑA ALBERDI et de la marque antérieure invoquée à l’appui de la demande de nullité en Allemagne.

84      Force est de constater que les éléments avancés par la requérante au cours de la procédure devant l’OHMI ne permettent pas de démontrer une connaissance de la marque espagnole VIÑA ALBERDI par le public pertinent telle qu’elle permettrait d’amoindrir le risque de confusion entre les marques en conflit.

85      À cet égard, il convient de rappeler que le public pertinent a été défini au point 23 ci-dessus comme étant constitué par le grand public allemand.

86      Or, si la requérante démontre l’exportation de vins sous la marque espagnole VIÑA ALBERDI en Allemagne entre 1983 et la date de dépôt de la demande de marque communautaire, il en ressort que de telles exportations ont toujours été relativement limitées en termes de volume, à savoir entre 6000 et 28000 bouteilles par an pour l’ensemble du marché allemand.

87      En outre, si la requérante a présenté de nombreux articles de presse et prospectus afférents aux vins commercialisés sous la marque espagnole VIÑA ALBERDI, seuls deux de ces documents sont issus de publications allemandes et ils ne contiennent que des références très limitées aux vins en question.

88      Enfin, s’agissant des attestations fournies par des importateurs allemands des vins commercialisés par la requérante, force est de constater que, s’il y est affirmé que, « [tant pour] l’importateur que [pour] ses clients », la marque espagnole VIÑA ALBERDI est « une marque connue qui identifie un vin espagnol de qualité relevant de l’appellation d’origine protégée Rioja », de telles attestations sont essentiellement susceptibles de démontrer la connaissance de la marque en question par les importateurs ayant émis lesdites attestations, mais non par le grand public allemand.

89      Dans ces conditions, c’est à bon droit que la chambre de recours a écarté l’argument de la requérante tiré de la coexistence paisible des marques en conflit en Allemagne.

90      Au vu de tout ce qui précède et, dans la mesure où existe à la fois un degré au moins moyen de similitude entre les produits en cause et les signes en conflit, la chambre de recours a valablement pu conclure à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

91      Il convient, dès lors, de rejeter le présent moyen.

 Sur le moyen tiré de la violation de l’article 75, première phrase, du règlement n°207/2009

92      La requérante soutient, en substance, que la chambre de recours n’a pas suffisamment étayé ses appréciations relatives à la comparaison des produits concernés et, partant, a manqué à son obligation de motivation.

93      En vertu de l’article 75, première phrase, du règlement n° 207/2009, les décisions de l’OHMI doivent être motivées. Selon la jurisprudence, cette obligation a la même portée que celle consacrée à l’article 296, second alinéa, TFUE et son objectif est de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision [arrêts du 3 décembre 2003, Audi/OHMI (TDI), T‑16/02, Rec, EU:T:2003:327, points 87 et 88 ; du 28 avril 2004, Sunrider/OHMI – Vitakraft-Werke Wührmann (VITATASTE), T‑124/02 et T‑156/02, Rec, EU:T:2004:116, points 72 et 73, et du 9 juillet 2008, Reber/OHMI – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Mozart), T‑304/06, Rec, EU:T:2008:268, point 43].

94      En outre, il ne saurait être exigé des chambres de recours de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés par les parties devant elles. La motivation peut donc être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle [arrêts Mozart, point 93 supra, EU:T:2008:268, point 55, et du 11 juin 2014, Golam/OHMI – meta Fackler Arzneimittel (METABIOMAX), T‑281/13, EU:T:2014:440, point 19].

95       En l’espèce, force est de constater, en premier lieu, que les griefs avancés par la requérante au soutien d’un défaut de motivation se chevauchent dans une large mesure avec ceux développés dans le cadre du moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et visent davantage le bien-fondé des motifs exposés dans la décision attaquée que leur caractère suffisant du point de vue formel, de sorte que lesdits griefs échappent au champ d’application de l’article 75, première phrase du règlement n° 207/2009.

96      En deuxième lieu, dans la mesure où la requérante critique l’absence de preuve par la chambre de recours de ses affirmations, il convient de rappeler, ainsi qu’il a été souligné au point 56 ci-dessus que les chambres de recours, pour déterminer la perception que le public pertinent aura des marques en conflit, peuvent s’appuyer sur des faits notoires ou sur les connaissances particulières de ces faits notoires par leurs membres, sous réserve de la démonstration, par la partie à laquelle cette appréciation fait grief, d’une erreur d’appréciation au regard du caractère notoire de ces faits.

97      En troisième lieu, s’agissant plus particulièrement de l’absence de motivation explicite mentionnée au point 44 ci-dessus, alors même qu’il aurait été souhaitable, sous l’angle de l’intelligibilité de la décision attaquée, que la chambre de recours explicite les raisons pour lesquelles son constat de l’existence d’une similitude avec les produits visés par la marque antérieure a été étendu à l’ensemble des produits désignés par la marque contestée, une telle omission ne saurait être considérée comme viciant la décision attaquée. En effet, dans la mesure où, en procédant de la sorte, la chambre de recours n’a fait qu’appliquer la jurisprudence constante mentionnée au point 45 ci-dessus, il convient de conclure qu’elle était en droit de recourir à une motivation implicite.

98      Enfin, en quatrième lieu, il ressort de l’examen des critiques diligentées à l’encontre de l’analyse par la chambre de recours de l’éventuelle existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, que la requérante a été en mesure de comprendre le raisonnement figurant dans la décision attaquée et ainsi de défendre ses droits et le Tribunal d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision attaquée et que, partant, la décision attaquée est motivée à suffisance de droit.

99      Dans ces conditions, le moyen tiré de la violation de l’article 75, première phrase, du règlement n° 207/2009, doit également être rejeté.

 Sur le moyen tiré de la violation de l’article 52, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009

100    La requérante soutient que, en application de l’article 52, paragraphe 3, du règlement n°207/2009 et dans la mesure où l’usage sérieux de la marque antérieure n’a été démontrée que pour les vins italien relevant des appellations d’origine « Soave » et « Chianti », la nullité de la marque contestée n’aurait pu être demandée et obtenue que pour les vins italiens relevant de ces appellations. Elle rappelle, à cet égard, avoir renoncé à l’enregistrement de la marque contestée pour les vins italiens.

101    En application de l’article 52, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, applicable aux causes de nullité relative en vertu de l’article 53, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, si la cause de nullité n’existe que pour une partie des produits ou des services pour lesquels la marque communautaire est enregistrée, la nullité de la marque ne peut être déclarée que pour les produits ou les services concernés.

102    En l’espèce, il suffit de souligner que le présent moyen repose sur les postulats selon lesquels, d’une part, seul un usage sérieux partiel de la marque antérieure avait été démontré s’agissant des vins d’Italie qu’elle désignait et, d’autre part, le consommateur distinguera les vins visés par la marque antérieure et ceux désignés par la marque contestée. Or le caractère erroné de ces postulats a été démontré aux points 28 à 45 ci-dessus.

103    Il convient, partant, de rejeter le présent moyen et, par voie de conséquence, le recours dans son entièreté.

 Sur les dépens

104    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’OHMI, conformément aux conclusions de celui-ci.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La Rioja Alta, SA est condamnée aux dépens.

Prek

Labucka

Kreuschitz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 juin 2015.

Signatures


** Langue de procédure : l’espagnol.


1 Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.