Language of document : ECLI:EU:T:2015:799

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

23 octobre 2015 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale VIMEO – Marque figurative communautaire antérieure meo – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Absence de coexistence des marques – Risque de confusion »

Dans l’affaire T‑96/14,

Vimeo LLC, établie à New York, New York (États Unis), représentée par MM A. Poulter et M. Macdonald, solicitors,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par MM. P. Bullock et N. Bambara, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

PT Comunicações, SA, établie à Lisbonne (Portugal),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 27 novembre 2013 (affaire R 1092/2013-2), relative à une procédure d’opposition entre PT Comunicações, SA et Vimeo LLC,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre),

composé de M. M. Prek, président, Mme I. Labucka et M. V. Kreuschitz (rapporteur), juges,

greffier : M. I. Dragan, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 11 février 2014,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 30 avril 2014,

vu la décision du 24 juillet 2014 refusant d’autoriser le dépôt d’un mémoire en réplique,

à la suite de l’audience du 8 juillet 2015,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 25 mars 2011, la requérante, Vimeo LLC, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal VIMEO.

3        Les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 38, 41 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 38 : « Télécommunications ; fourniture de forums en ligne pour la transmission de messages entre utilisateurs dans le domaine du partage de contenu vidéo ; fourniture d’accès à des bases de données électroniques, informatiques et en ligne ; services de communication électronique ; transmission de contenu multimédia électronique, contenu multimédia, vidéos, films cinématographiques, illustrations, images, textes ; messages ; photographies ; jeux, contenu généré par l’utilisateur, contenu audio ; de données ; informations sur l’internet et d’autres dispositifs informatiques ; communication par réseaux ; fourniture de forums en ligne ; forums de discussion ; tableaux d’affichage électroniques ; revues, blogues et serveurs de listes pour communications sur des thèmes d’intérêt général ; transmission de messages ; commentaires et contenu multimédia entre utilisateurs ; fourniture en ligne de liaisons de communications transférant les utilisateurs d’un site Internet vers d’autres pages Internet locales et mondiales ; services de diffusion de contenu audio, textuel et vidéo sur des réseaux informatiques ou d’autres réseaux de communications, à savoir, téléchargement vers le serveur, publication, affichage, repérage, partage ; transmission électronique de données ; informations ; contenu audio, contenu vidéo et images ; services de diffusion ; services de diffusion par Internet ; mise à disposition d’un portail de partage de vidéos ; fourniture de forums communautaires en ligne permettant aux utilisateurs de publier, rechercher, regarder, partager, critiquer, évaluer, et commenter des vidéos et d’autres contenus multimédias ; fourniture de distribution numérique de programmes d’émissions audio et vidéo sur un réseau informatique mondial ; fourniture d’un portail de partage vidéo à des fins de divertissement et d’éducation ; services d’informations, de conseils et d’assistance dans les domaines précités » ;

–        classe 41 : « Services d’éducation ; éducation ; divertissement ; activités sportives et culturelles ; fourniture d’un site Internet contenant des vidéos générées par l’utilisateur sur une large variété de thèmes et de sujets ; services éducatifs liés à l’enregistrement de contenu sur des supports électroniques ; services éducatifs liés à la fourniture de contenus multimédias ou d’informations électroniques sur l’internet ou d’autres réseaux de communications ; services de divertissement, à savoir, fourniture de contenu multimédia ou d’informations sur l’internet et (ou) d’autres réseaux de communications ; services de divertissement et d’éducation proposant des supports électroniques, des contenus multimédias, vidéos, films, images, texte, photographies, jeux, contenus générés par les utilisateurs, contenus audio, et informations connexes via des réseaux informatiques et de communications ; services d’édition ; services d’édition électronique ; services d’édition de divertissements vidéo, audio et multimédias numériques ; services d’édition numérique en ligne ; fourniture de bases de données informatiques, électroniques et en ligne à des fins d’éducation, de divertissement et de délassement dans les domaines du divertissement, de l’éducation et de l’intérêt général ; services de partage de photographies et de partage de contenu vidéo ; fourniture de services d’informations, conseils et assistance dans tous les domaines précités » ;

–        classe 42 : « Services scientifiques et technologiques ainsi que services de recherches et de conception y relatifs ; services d’analyses et de recherches industrielles ; conception et développement d’ordinateurs et de logiciels ; fourniture d’un site Internet permettant aux utilisateurs d’ordinateurs de télécharger vers le serveur, d’échanger et de partager des vidéos ; services de fournisseurs de services d’application ; fourniture d’accès à des logiciels non téléchargeables ; fourniture d’accès à des logiciels non téléchargeables pour le téléchargement vers le serveur, le téléchargement, la saisie, la publication, la présentation, l’édition, la lecture, la lecture en transit, la visualisation, la prévisualisation, l’affichage, le repérage, le blogage, le partage, la manipulation, la distribution, l’édition, la reproduction, ou la fourniture par d’autres voies de supports électroniques, contenu multimédia, vidéos, films cinématographiques, illustrations, images, textes, photographies, jeux, contenu généré par l’utilisateur, contenu audio, et informations via l’internet et d’autres réseaux informatiques et de communications ; fourniture d’accès à des logiciels non téléchargeables afin de permettre le partage de contenu multimédia et de commentaires parmi les utilisateurs ; hébergement de contenu multimédia pour le compte de tiers ; services d’informations, de conseils et d’assistance dans les domaines précités ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires 2011/098, du 22 mai 2011.

5        Le 24 août 2011, PT Comunicações, SA, a formé opposition au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009 à l’enregistrement de la marque demandée pour les services visés au point 3 ci-dessus.

6        Les marques antérieures invoquées au soutien de l’opposition comprenaient la marque communautaire figurative suivante :

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7        Ladite marque désigne des produits et des services relevant des classes 9, 16, 35, 37, 38, 41 et 42 et correspondant à la description suivante :

–        classe 9 : « Appareils et instruments scientifiques, électriques, électroniques, de télécommunications, téléphoniques et de communications pour l’enregistrement, la transmission et la reproduction de données, en particulier de sons, images et données vocales ; radiotéléphones, téléphones mobiles et fixes ; modems ; appareils et instruments de radio, y compris récepteurs de radiomessagerie et appareils et instruments de télécopie radio ; pièces pour tous les produits précités ; supports de données, de tous types, notamment cartes téléphoniques ; cartes encodées ; cartes à puce ; cartes à mémoire ; logiciels informatiques ; supports pour le stockage d’informations, données, images et son ; supports exploitables par une machine ; musique numérique (téléchargeable) fournie en ligne à partir d’une base de données informatique ou de l’internet, y compris sites MP3 sur l’internet ; dispositifs numériques d’aide personnelle ; appareils et instruments de réception et de transmission par satellite ; appareils permettant d’écouter de la musique téléchargée à partir de l’internet ; chargeurs de batteries à utiliser avec des appareils de télécommunications ; équipements périphériques pour télévisions et ordinateurs ; appareils de jeux électriques et électroniques compris dans la classe 9 ; ordinateurs, y compris ‘laptops’ et ‘notebooks’ ; organisateurs personnels électroniques ; appareils et instruments électroniques de navigation et de localisation, y compris systèmes de localisation mondiaux ; appareils et instruments de navigation et de positionnement par satellite ; unités montées sur bureaux ou voitures comprenant un haut-parleur permettant de se servir d’un combiné téléphonique en gardant les mains libres ; supports de combinés téléphoniques installés dans les voitures ; pièces et parties constitutives comprises dans la classe 9, pour tous les produits précités ; programmes informatiques et logiciels, à l’exclusion des programmes informatiques et des logiciels liés aux pharmacies ; graphiques et sonneries téléchargeables pour téléphones mobiles ; cédéroms ; publications électroniques (téléchargeables) fournies en ligne depuis une base de données informatique, l’internet ou un autre réseau électronique, à l’exclusion des publications électroniques (téléchargeables) fournies en ligne depuis une base de données informatique, l’internet ou un autre réseau électronique liées aux pharmacies » ;

–        classe 16 : « Magazines, y compris magazines sur la télévision et le cinéma, à l’exclusion des magazines liés aux pharmacies ; journaux, à l’exclusion des journaux liés aux pharmacies ; papier, carton, et produits en carton et de papeterie » ;

–        classe 35 : « Publicité et diffusion de matériel publicitaire, y compris articles promotionnels, aucun des services précités ne se rapportant aux pharmacies » ;

–        classe 37 : « Services d’installation et réparation dans le domaine des télécommunications » ;

–        classe 38 : « Diffusion de programmes de télévision et radiophoniques, diffusion d’actualités ; diffusion de programmes de télévision et radiophoniques et émissions télévisées et radiophoniques ; par tous les moyens y compris par câble et par satellite ; communications interactives via le réseau mondial de télécommunications (Internet), par câble ou par voie de transmission de données, transmission de sons et images par satellite ; services dans le domaine des télécommunications, y compris services d’informations en ligne de données d’autres informations, images, graphiques, son et/ou matériel audiovisuel par voie d’ordinateurs et réseaux de communications, souscription de services télévisés par Internet, télévision et téléphone » ;

–        classe 41 : « Divertissement, organisation et conduite de séminaires, conférences et spectacles, fourniture de formations, aucun des services précités ne se rapportant aux pharmacies » ;

–        classe 42 : « Services relatifs à l’étude, aux activités, à la recherche, au développement et aux projets dans le domaine des télécommunications ; conception et création de programmes informatiques de télécommunications, conception et développement de pages Internet, à l’exclusion de la conception et du développement de pages Internet liées aux pharmacies ».

8        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

9        Le 16 avril 2013, la division d’opposition a fait droit à l’opposition dans son intégralité et a condamné la requérante à supporter les frais de la procédure.

10      Le 14 juin 2013, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 27 novembre 2013 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours de la requérante en raison d’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, entre la marque demandée et la marque communautaire figurative antérieure reprise au point 6 ci-dessus.

 Conclusions des parties

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler la décision de la division d’opposition du 16 avril 2013 et rejeter l’opposition ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

13      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours dans son intégralité ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Introduction

14      La requérante estime que la chambre de recours a violé l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 en considérant qu’il existait un risque de confusion entre les marques en conflit. Elle allègue ladite violation parce que, premièrement, la chambre de recours s’est basée sur une jurisprudence inadéquate et n’a pas considéré chacune des marques dans leur ensemble aux fins de leur comparaison, deuxièmement, la chambre de recours a tenu compte de droits sur lesquels l’opposante n’avait pas fondé son opposition, troisièmement, la chambre de recours n’a pas pleinement pris en considération les preuves fournies pour démontrer la coexistence paisible sur le marché des marques en cause et, quatrièmement, la chambre de recours a conféré sans motif valable à l’opposante un monopole sur le groupe de trois lettres « meo ». L’OHMI conteste ces arguments et estime qu’il existe un risque de confusion entre les marques en conflit.

15      Au vu de ces griefs, il importe d’abord de se prononcer sur celui selon lequel la chambre de recours a tenu compte de droits sur lesquels l’opposante n’avait pas fondé son opposition pour ensuite se prononcer sur les autres griefs soulevés par la requérante.

 Sur les droits antérieurs pris en compte

16      La requérante estime que, comme la chambre de recours a indiqué dans la décision attaquée à la fois que l’opposition était fondée sur plusieurs droits antérieurs et que seule la marque communautaire antérieure avait été prise en considération, il ne saurait être exclu que la chambre de recours a indûment tenu compte de droits antérieurs sur lesquels l’opposante n’a pas fondé son opposition. Il s’ensuivrait que la chambre de recours aurait violé l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 en tenant compte de droits sur lesquels l’opposante n’avait pas fondé son opposition aux fins de déterminer s’il existait ou non un risque de confusion entre les marques en conflit.

17      À cet égard, il y a lieu d’observer que, au point 15 de la décision attaquée, la chambre de recours a indiqué que l’opposition était fondée sur plusieurs droits antérieurs et que, étant donné que l’opposition est réputée fondée dès lors qu’elle est accueillie sur la base de l’un des droit antérieurs invoqués, la chambre de recours examinerait tout d’abord l’opposition fondée sur la marque communautaire antérieure.

18      Ainsi, la chambre de recours a clairement indiqué que, dans un premier temps, elle examinerait l’opposition sur la base d’une seule marque, à savoir la marque communautaire antérieure. La requérante n’apporte aucun élément concret permettant de remettre en cause le fait que la chambre de recours s’est uniquement fondée sur la marque communautaire antérieure pour adopter sa décision. Partant, le grief soulevé par la requérante fondé sur la prise en compte d’autres marques antérieures doit être rejeté.

 Sur la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

 Considérations de principe

19      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), i), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques communautaires dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

20      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

21      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec, EU:T:2009:14, point 42 et jurisprudence citée].

22      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner les différents arguments de la requérante. Préalablement, il importe de préciser les produits en cause et le public pertinent, dès lors qu’ils constituent des éléments essentiels pour l’appréciation d’un risque de confusion entre deux marques.

 Sur les produits en cause

23      Après avoir constaté que les parties n’avaient pas contesté la comparaison des produits et services en cause faite par la division d’opposition, la chambre de recours a considéré que les produits en cause étaient en partie identiques et en partie similaires (point 23 de la décision attaquée).

24      Cette appréciation, qui au demeurant n’est pas contestée par les parties, doit être approuvée. En effet, compte tenu de la description des produits et services couverts par les marques en cause reprise aux points 3 et 7 ci-dessus, il convient de considérer que les produits et services en cause sont en partie identiques et en partie similaires.

 Sur le public pertinent

25      La chambre de recours a considéré que le public pertinent comprenait des consommateurs dans l’ensemble des États membres de l’Union européenne. Elle a également estimé que les produits en cause étaient ciblés et fréquemment achetés par le grand public, lequel était réputé être composé de consommateurs qui étaient normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés, ainsi que par des consommateurs professionnels ayant des connaissances ou une expertise professionnelle spécifique dans le secteur des télécommunications. Elle en a déduit que le niveau d’attention du public pertinent serait moyen ou élevé (points 17 et 22 de la décision attaquée).

26      Cette appréciation, qui n’est pas contestée par les parties, doit être approuvée. En effet, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits ou de services concernée. Ce consommateur est, en principe, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Son niveau d’attention est toutefois susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir, en ce sens, arrêt du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec, EU:T:2007:46, point 42 et jurisprudence citée]. En l’espèce, compte tenu de la nature des produits et services en cause, il y a lieu de considérer que ledit public se composera du grand public et de professionnels et fera preuve d’un niveau d’attention moyen ou élevé.

 Sur la comparaison des signes

–       Observations liminaires

27      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

28      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en conflit considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt OHMI/Shaker, point 27 supra, EU:C:2007:333, point 41 et jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts OHMI/Shaker, point 27 supra, EU:C:2007:333, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, EU:C:2007:539, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt Nestlé/OHMI, précité, EU:C:2007:539, point 43).

29      En l’espèce, la chambre de recours a concentré la comparaison des signes sur sa perception par la partie anglophone du public pertinent, en application de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 (points 27 à 29 de la décision attaquée). Cette approche n’est pas contestée par la requérante et doit être approuvée étant donné qu’elle est conforme à l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009.

–       Sur la comparaison visuelle des signes en cause

30      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a d’abord décrit chacun des signes en cause pour ensuite considérer que les éléments figuratifs de la marque communautaire antérieure (ci-après la « marque antérieure ») étaient secondaires dans l’impression d’ensemble du signe meo. Elle en a déduit qu’il convenait principalement de comparer les mots « vimeo » et « meo ». À cet égard, elle a estimé que le second était repris à l’identique dans le premier, correspondant à trois de ses cinq lettres. Elle a également considéré que, bien que l’élément « vi » fût placé au début du signe demandé, partie à laquelle le public pertinent attache généralement plus d’importance, cet élément ne serait pas ignoré visuellement. Selon la chambre de recours, l’élément « meo » crée une similitude entre les signes en question en général compte tenu du fait que les éléments figuratifs banals de la marque antérieure ne jouent pas de rôle pertinent dans l’impression d’ensemble du signe (points 30 à 32 de la décision attaquée).

31      La requérante observe qu’aucun des éléments figuratifs de la marque antérieure n’est inclus dans la marque demandée, qui est une marque verbale. De plus, dans sa demande de marque communautaire, l’opposante n’aurait pas choisi de demander l’enregistrement du mot « meo » en lettres capitales d’imprimerie, mais a intentionnellement représenté la marque antérieure avec une police de caractère stylisée et un élément figuratif, qui réduiraient nécessairement l’étendue de la protection conférée par l’enregistrement. La requérante observe également que la marque demandée est plus longue que la marque antérieure. En outre, la requérante estime que les marques en cause commencent par des lettres totalement différentes, à savoir, d’une part, « vi » et, d’autre part, « me ». Seules trois lettres de ces marques coïncident, lesquelles englobent la fin de la marque demandée. Or, il serait constant que les consommateurs attachent plus d’attention au début d’une marque. Bien que la chambre de recours invoque ce principe (point 32 de la décision attaquée), elle ne lui aurait accordé aucun poids.

32      L’OHMI estime, en substance, que les signes présentent une nette similitude visuelle liée au fait que les lettres qui composent la marque antérieure sont reproduites, dans le même ordre, au sein de la marque demandée. Le fait que les lettres de la marque demandée qui sont différentes, à savoir « v » et « i », soient situées au début du mot « vimeo » ne serait pas de nature à exclure le constat de similitudes visuelle et phonétique des signes.

33      Le Tribunal estime que l’appréciation de la chambre de recours doit être approuvée. En effet, s’il est exact que le public pertinent percevra que les signes en cause se distinguent visuellement en raison des caractères stylisés du signe antérieur, des éléments figuratifs du signe antérieur, du nombre supérieur de lettres et du groupe de lettres « vi » contenu dans la marque demandée, ledit public percevra également que lesdits signes partagent l’élément « meo ». En raison de cet élément commun, ledit public percevra une certaine similitude visuelle entre les marques en cause.

34      Cette appréciation n’est pas remise en cause par le fait que la marque antérieure comporte des éléments figuratifs. En effet, comme l’a indiqué à juste titre la chambre de recours, les éléments figuratifs de la marque antérieure seront perçus par le public pertinent comme secondaires par rapport aux éléments verbaux de cette marque. Ils ne font dès lors pas obstacle à la perception par le public pertinent d’une certaine similitude visuelle en raison de l’élément commun « meo ».

35      Le groupe de lettres « vi » placé au début de la marque demandée, qui en fait un signe plus long que la marque antérieure, ne fait pas non plus obstacle à la perception par le public pertinent d’une certaine similitude visuelle entre les marques en cause en raison de leur élément commun « meo ». En effet, s’il est certes vrai que le début des marques verbales peut être susceptible de retenir davantage l’attention du consommateur que le reste de la marque, cette considération ne saurait valoir dans tous les cas [voir arrêt du 4 juillet 2014, Advance Magazine Publishers/OHMI – Montres Tudor (GLAMOUR), T‑1/13, EU:T:2014:615, point 31 et jurisprudence citée]. Or, en l’espèce, l’élément « vi » de la marque demandée ne retient pas davantage l’attention du public pertinent que l’élément « meo », qui le suit. D’autant que la marque demandée est composée de seulement trois syllabes et qu’elle se termine par la lettre « o ». Partant, le fait que le signe demandé débute par le groupe de lettres « vi » et comporte plus de lettres que la marque antérieure n’exclut pas l’existence, pour le public pertinent, d’un certain degré de similitude visuelle entre les signes en cause en raison de leur élément commun « meo ».

–       Sur la comparaison phonétique des signes en cause

36      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, après avoir observé que l’élément verbal de la marque antérieure était repris à l’identique dans la marque demandée, que, quand bien même l’élément « vi » de la marque demandée fût placé au début du signe demandé, l’élément commun « meo » des marques en cause ne serait pas ignoré phonétiquement et créerait une similitude entre les signes en cause (point 32 de la décision attaquée).

37      La requérante estime que la marque demandée est plus longue que la marque antérieure, la première étant composée de cinq lettres et de trois syllabes, alors que la seconde n’est composée que de trois lettres et de deux syllabes. De plus, le début de la marque demandée, « vi », serait absolument différent du début de la marque antérieure, « me ». Or, les consommateurs attacheraient plus d’attention au début d’une marque. Bien que la chambre de recours ait invoqué ce principe, elle aurait été incapable de lui accorder un poids quelconque.

38      L’OHMI estime que les signes présentent une nette similitude phonétique liée au fait que les lettres qui composent la marque antérieure sont reproduites, dans le même ordre, au sein de la marque demandée. Le fait que les lettres de la marque demandée qui sont différentes, à savoir les lettres « v » et « i », soient situées au début du mot « vimeo » ne serait pas de nature à exclure un constat de similitude phonétique des signes. L’OHMI réitère à cet égard le même argument que celui invoqué pour la similitude visuelle (voir point 32 ci-dessus).

39      Les marques en cause jouissent d’une certaine similitude phonétique en raison du fait que la marque antérieure comporte le groupe de lettres « meo » qui est intégralement repris dans la marque demandée. En effet, le public pertinent prononcera la marque demandée intégralement et le groupe de lettres « meo » dans la marque demandée sera prononcé de la même manière que dans la marque antérieure. Le fait que la marque demandée commence par les lettres « v » et « i » et qu’elle est par conséquent plus longue à prononcer ne permet pas de considérer qu’il n’y a pas du tout de similitude phonétique entre les marques en cause. Le public pertinent percevra une similitude phonétique en raison du groupe de lettres « meo » commun auxdites marques.

–       Sur la comparaison conceptuelle des signes en cause

40      S’agissant de la comparaison conceptuelle, la chambre de recours a considéré qu’aucun des signes en cause n’avait de signification pour le public pertinent de sorte qu’aucune comparaison conceptuelle ne pouvait être réalisée (point 33 de la décision attaquée).

41      La requérante reconnaît que les marques en conflit ne présentent aucune similitude conceptuelle faute de signification. Selon la requérante, la marque demandée sera perçue comme un mot entier qui ne peut pas être scindé en plusieurs éléments et qui n’a pas de signification. Par ailleurs, d’après la requérante, si la description de la marque demandée est considérée comme ayant trait au partage de vidéos en ligne et qu’elle utilise cette marque pour désigner des services de partage de vidéos en ligne, il apparaît que le seul concept que les consommateurs pertinents associeront à la marque demandée sera celui de « vidéo », ce qui permettrait également de la différencier de la marque antérieure.

42      Il convient d’approuver l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle aucune comparaison conceptuelle entre les marques en cause ne peut être réalisée. En effet, pour la partie anglophone du public pertinent le terme « meo » n’a pas de signification. De plus, cette partie du public pertinent ne fera pas d’office une association entre les termes « vimeo » et « video ». Lors de l’audience, la requérante a d’ailleurs indiqué ne pas avoir soumis de preuve d’une telle association. En outre, elle a précisé qu’elle ne voulait pas indiquer qu’il y avait une différence conceptuelle entre les marques en cause. Partant, la chambre de recours a considéré à juste titre qu’aucune comparaison conceptuelle ne pouvait être faite entre les marques en cause.

 Sur le risque de confusion

–       Considérations liminaires

43      Ainsi qu’exposé au point 20 ci-dessus, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce.

44      Parmi ces facteurs figurent notamment l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés ainsi que la coexistence paisible des deux marques sur le marché déterminé.

45      En effet, la Cour a considéré qu’il ne saurait être exclu que la coexistence sur un marché déterminé de deux marques puisse éventuellement contribuer, conjointement à d’autres éléments, à amoindrir le risque de confusion entre ces marques dans l’esprit du public pertinent. L’absence de risque de confusion peut ainsi être déduite du caractère paisible de la coexistence des marques en conflit sur le marché en cause (arrêt du 3 septembre 2009, Aceites del Sur-Coosur/Koipe, C‑498/07 P, Rec, EU:C:2009:503, point 82).

46      En l’espèce, la requérante estime que, dans son appréciation du risque de confusion, la chambre de recours n’a pas dûment pris en considération la coexistence paisible sur le marché des marques en conflit et qu’elle a erronément estimé que la comparaison d’ensemble des marques en cause révèle une similitude entre celles-ci.

–       Sur la coexistence des marques en cause

47      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, en substance, que les extraits des sites Internet et des bases de données d’enregistrement de la marque meo ne permettaient pas de démontrer que les marques en cause avaient coexisté paisiblement dans l’Union pendant les années précédant la date de dépôt de la demande d’enregistrement de la marque demandée. En outre, s’agissant de la marque demandée, la chambre de recours a considéré que les éléments de preuve portant sur cette marque ne donnaient aucune indication sur la façon dont le public avait été mis en présence des marques en conflit sur le marché et des produits et services pour lesquels elles avaient été utilisées. Elle souligne qu’aucun des documents présentés ne provient directement d’un consommateur des produits et services en cause. Enfin, la chambre de recours a estimé que, même si une coexistence entre les marques en cause devait être établie, ce qui n’était pas le cas, elle ne pouvait suffire pour établir une absence de risque de confusion (points 34 à 44 de la décision attaquée).

48      La requérante considère que la chambre de recours n’a pas correctement pris en considération les preuves fournies par la requérante pour démontrer que, depuis 2006 au moins, les marques en conflit avaient coexisté paisiblement sur le marché. Plus particulièrement, selon la requérante, contrairement à ce qu’affirme la chambre de recours, les preuves qu’elle a fournies montrent l’usage qui est fait de la marque demandée dans l’Union, par exemple, en tant qu’élément de la dénomination du service VIMEO et au sein du nom de domaine « vimeo.com », décrivent les profils des utilisateurs des services VIMEO établis dans l’Union et mentionnent l’utilisation du service VIMEO en Europe. En outre, le paragraphe 8 du témoignage de la présidente de la requérante établirait que la requérante exploite une plateforme de vidéo en ligne en Europe depuis l’année 2005 au moins sans avoir été informée d’un seul cas de confusion entre les marques en conflit. Par ailleurs, il ne ferait aucun doute que l’opposante a utilisé sa marque dans le domaine des télécommunications et de la radiodiffusion télévisuelle depuis 2006 au moins. L’opposante n’aurait pas contesté ces preuves et la chambre de recours n’aurait avancé aucune raison précise de douter de leur exactitude.

49      L’OHMI estime qu’il n’existe pas, en l’espèce, d’éléments objectifs démontrant que les marques coexistaient dans l’Union, de telle sorte que les consommateurs des services désignés par chacune d’entre elles ne les confondaient pas avant le dépôt de la demande d’enregistrement de la marque VIMEO en tant que marque communautaire. La conclusion de la chambre de recours selon laquelle la coexistence paisible n’était pas établie serait motivée par l’absence patente d’éléments montrant comment les marques en conflit étaient utilisées sur le marché et faisant apparaître que les consommateurs étaient habitués à voir les signes sans les confondre.

50      À cet égard, il convient de rappeler que l’éventualité qu’une coexistence de marques antérieures sur le marché puisse amoindrir le risque de confusion constaté ne saurait être prise en considération que si, à tout le moins, au cours de la procédure concernant des motifs relatifs de refus devant l’OHMI, le demandeur de la marque communautaire a indiqué à suffisance que ladite coexistence reposait sur l’absence de risque de confusion, dans l’esprit du public pertinent, entre les marques antérieures dont il se prévaut et la marque antérieure de l’intervenante qui fonde l’opposition et sous réserve que les marques antérieures en cause et les marques en conflit soient identiques [voir arrêt du 10 avril 2013, Höganäs/OHMI – Haynes (ASTALOY), T‑505/10, EU:T:2013:160, point 48 et jurisprudence citée].

51      Il s’ensuit que, en premier lieu, s’agissant de la portée géographique d’une coexistence, lorsque l’opposition à l’enregistrement d’une marque communautaire se fonde sur une marque communautaire antérieure et que la coexistence de ladite marque antérieure avec une marque identique à la marque demandée est invoquée à l’appui de l’absence de risque de confusion entre les marques en cause, il importe à la partie invoquant cette coexistence de la prouver sur l’ensemble du territoire de l’Union. En effet, si le risque de confusion existe potentiellement sur l’ensemble du territoire de l’Union en raison de la portée communautaire de la marque antérieure, l’absence de risque de confusion grâce à la coexistence de marques identiques aux marques en cause doit, à son tour, être établie sur l’ensemble du territoire de l’Union. En second lieu, il y a lieu d’observer que la coexistence de deux marques implique qu’elles soient présentes ensemble sur le marché en cause pendant une période suffisamment longue avant la date du dépôt de la demande d’enregistrement de la marque communautaire (voir arrêt ASTALOY, point 50 supra, EU:T:2013:160, points 49 et 51 et jurisprudence citée).

52      À cet égard, il y a lieu d’observer que les preuves de l’usage de la marque demandée dont la requérante estime qu’elles n’ont pas été dûment prises en compte consistent en un témoignage de la présidente de la requérante, des extraits du site Internet VIMEO montrant les profils d’utilisateurs de longue date de VIMEO, des copies d’articles parus entre 2008 et 2010 dans The Guardian et des extraits d’évènements promotionnels relatifs à la plate-forme VIMEO à Berlin (Allemagne), Paris (France) et Londres (Royaume-Uni) provenant du site Internet VIMEO.

53      Ces documents indiquent que le signe VIMEO était utilisé dans l’Union avant la demande d’enregistrement faisant l’objet du présent recours. Par ailleurs, s’agissant de la marque antérieure, la requérante estime qu’il ne fait aucun doute que l’opposante a utilisé sa marque dans le domaine des télécommunications et de la radiodiffusion depuis 2006 au moins. Elle renvoie pour cela aux motifs de son recours devant la chambre de recours repris en annexe à la requête. Cette dernière appréciation n’est pas contestée.

54      Toutefois, en admettant que ces motifs suffisent à établir l’utilisation de cette marque antérieure dans l’Union, force est d’observer que le constat de la présence de marques identiques à celles en cause antérieurement au dépôt de la demande d’enregistrement ne suffit pas à démontrer la coexistence paisible des marques en cause.

55      En effet, la prise en compte de la coexistence de deux marques dans l’appréciation d’un risque de confusion n’est possible que pour autant que les indices fournis indiquent clairement que ladite coexistence reposait sur l’absence de risque de confusion entre lesdites marques (arrêt ASTALOY, point 50 supra, EU:T:2013:160, point 62).

56      Ainsi, importait-il, en l’espèce, à la requérante d’apporter des indices permettant de conclure que les consommateurs des produits ou services concernés par chacune des marques en cause ne les confondaient pas avant le dépôt de la demande d’enregistrement de la marque VIMEO comme marque communautaire.

57      Or, ni les extraits du site Internet VIMEO, ni les copies d’articles publiés entre 2008 et 2010 dans The Guardian, ni le fait qu’il ne fasse aucun doute que l’opposante a utilisé sa marque dans le domaine des télécommunications et de la radiodiffusion depuis 2006 au moins ne permettent d’indiquer de manière suffisamment concluante que les consommateurs des produits ou services concernés par chacune des marques en cause ne les confondaient pas. En effet, ces preuves ne donnent aucune indication quant à la perception de ces deux signes par le consommateur pertinent et encore moins un indice de la perception dudit consommateur comme se référant à deux entreprises ou associations distinctes.

58      Enfin, s’agissant du témoignage de la présidente de la requérante par lequel celle-ci indique que la requérante n’a jamais été informée d’un cas de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure, il y a lieu d’observer qu’il n’est pas un indice suffisant de la coexistence paisible des marques en ce que les consommateurs ne les confondent pas lorsqu’ils sont mis en présence de celles-ci. En effet, il ne s’agit que d’un seul élément, qui, de plus, n’émane pas des consommateurs des produits et services en cause.

59      Partant, pour les motifs qui précèdent, il y a lieu de considérer que la coexistence paisible des marques n’a pas été établie à suffisance pour pouvoir être prise en considération dans l’appréciation globale du risque de confusion entre les marques en cause.

–       Sur l’appréciation globale

60      La requérante estime que la présence de l’élément « meo » dans la marque demandée ne permet pas d’établir l’existence d’un risque de confusion entre les marques concernées. En effet, une comparaison des marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, révélerait l’absence de similitude entre celles-ci. Partant, la chambre de recours aurait violé l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 en concluant qu’il existerait un risque de confusion entre les marques en conflit. Les conclusions de la chambre de recours auraient pour effet de conférer à l’opposante un monopole sur le groupe de trois lettres « meo », y compris lorsque celui-ci est utilisé comme un élément d’une marque qui ne consiste pas en des éléments identifiables et séparables, ce qui est une erreur, surtout s’il est considéré que le groupe de lettres « meo » est utilisé comme un des éléments d’un mot plus grand qui n’est pas susceptible d’être scindé en plusieurs éléments par le consommateur pertinent et que l’élément « meo » est communément utilisé dans l’Union au sein de marques qui n’ont aucun rapport avec l’opposante.

61      La requérante précise encore que l’opposante n’a pas été en mesure de fournir une quelconque preuve que la marque antérieure possédait un caractère distinctif renforcé. La requérante rappelle à ce propos que la chambre de recours a considéré que le caractère distinctif de la marque antérieure serait considéré comme normal.

62      La requérante estime encore que les affaires invoquées par la chambre de recours constituent des exceptions à la règle générale selon laquelle le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails. En outre, ces affaires ne seraient pas pertinentes pour le cas d’espèce, car, premièrement, la marque demandée ne serait pas composée de deux éléments identifiables et séparables ayant une signification pour le consommateur pertinent, dont l’un est la marque antérieure, comme dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 12 novembre 2008, ecoblue/OHMI – Banco Bilbao Vizcaya Argentaria (Ecoblue) (T‑281/07, EU:T:2008:489), et du 1er juillet 2009, Perfetti Van Melle/OHMI – Cloetta Fazer (CENTER SHOCK) (T‑16/08, EU:T:2009:240). Deuxièmement, la marque demandée ne serait pas composée de la dénomination de l’entreprise d’un tiers et de la marque antérieure, que celles-ci aient ou non un caractère distinctif autonome, comme dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 6 octobre 2005, Medion (C‑120/04, Rec, EU:C:2005:594). Troisièmement, la chambre de recours n’aurait pas identifié d’autres facteurs lui permettant de conclure que, lorsqu’il percevra la marque demandée, le consommateur moyen la scindera en plusieurs éléments distincts tels que « vi », « me » et « o » ou « vi » et « meo ». Il n’existerait d’ailleurs aucun facteur de ce type. Quatrièmement, la chambre de recours n’aurait pas identifié d’autres facteurs lui permettant de conclure que le groupe de lettres « meo » conservait un caractère distinctif autonome dans la marque demandée ou que le consommateur moyen identifierait autrement l’élément « meo » au sein de la marque demandée. Il n’existerait d’ailleurs aucun facteur de ce type.

63      En application de la règle générale reprise au point 62 ci-dessus, la requérante estime que, lorsqu’une marque ne peut pas être scindée, en particulier lorsque le consommateur ne la diviserait pas en plusieurs éléments qui, à ses yeux, auraient une signification concrète ou ressembleraient à des mots qu’il connaît, ou lorsque aucune dénomination d’entreprises ne figure dans la marque, il ne saurait être conclu que les marques en conflit sont similaires pour la simple raison que les lettres qui composent la marque antérieure sont présentes dans la marque demandée [arrêt du 13 février 2008, Sanofi-Aventis/OHMI – GD Searle (ATURION), T‑146/06, EU:T:2008:33].

64      L’OHMI estime que l’argument par lequel la requérante fait valoir que les signes en conflit sont globalement dissemblables n’est pas fondé. En particulier, l’OHMI estime que le Tribunal a itérativement jugé que la circonstance selon laquelle une marque est composée exclusivement de la marque antérieure à laquelle un autre mot est accolé constitue une indication de la similitude entre ces deux marques. Dès lors, le fait que l’élément verbal de la marque antérieure, « meo », soit intégralement reproduit dans le signe demandé, VIMEO, incite fortement à conclure que les signes en conflit sont similaires.

65      Dans l’appréciation globale, d’abord, la chambre de recours a considéré que l’opposante n’avait pas invoqué de caractère distinctif renforcé acquis par l’usage de la marque antérieure, de sorte que seul son caractère distinctif intrinsèque serait pris en compte. Elle a estimé que le caractère distinctif de la marque était normal étant donné que la marque antérieure dans son ensemble n’avait pas de signification par rapport aux produits et services en cause pour le public pertinent. La chambre de recours a précisé que, même en présence d’un signe antérieur à caractère distinctif faible, il pouvait exister un risque de confusion, notamment, en raison d’une similitude des signes et des produits ou services visés. Ensuite, la chambre de recours a considéré que, compte tenu, d’une part, du fait que l’élément commun « meo » rendait les signes visuellement et phonétiquement similaires, y compris pour des consommateurs particulièrement attentifs, et, d’autre part, du fait que les produits et services étaient en partie identiques et en partie similaires, l’impression d’ensemble produite par les marques en question pouvait conduire le public à croire que les produits et services en cause provenaient, à tout le moins, d’entreprises économiquement liées, ce qui impliquait un risque de confusion (points 46 à 48 de la décision attaquée).

66      Cette appréciation globale de la chambre de recours doit être approuvée.

67      En effet, compte tenu des similitudes visuelle et phonétique des marques en cause (voir points 30 et suivants ci-dessus), des similitudes des produits et services en cause (voir points 23 et 24 ci-dessus) et du caractère distinctif ordinaire de la marque antérieure, qui n’est pas contesté, l’impression d’ensemble produite par les marques en question peut conduire le public à croire que les produits et services en cause proviennent, à tout le moins, d’entreprises économiquement liées.

68      Comme l’indique à juste titre l’OHMI, bien que le groupe de lettres « meo » composant la marque demandée n’occupe pas une position distinctive autonome au sein de la marque demandée, il contribue de manière significative à l’impression d’ensemble produite par celle-ci dans la mesure où il compose les trois cinquièmes du signe. Partant, la circonstance selon laquelle ledit groupe de lettres n’occupe pas une position distinctive autonome n’est pas de nature à remettre en cause la conclusion de la chambre de recours.

69      Par ailleurs, même à supposer que la partie anglophone du public pertinent associe la marque demandée VIMEO au terme « vidéo », lorsque celle-ci est utilisée pour des services de partage de vidéos en ligne, quod non, il n’en reste pas moins que l’impression d’ensemble produite par les marques en question peut conduire ledit public à croire que les produits et services en cause proviennent, à tout le moins, d’entreprises économiquement liées. En effet, même si ladite association était avérée, elle ne suffit pas à remettre en cause l’existence d’un risque de confusion compte tenu de l’importance des similitudes visuelle et phonétique des marques en cause et de celles des produits et services en cause.

70      De même, l’allégation selon laquelle la jurisprudence invoquée par la chambre de recours ne serait pas pertinente, ne remet pas en cause l’appréciation reprise au point 67 ci-dessus. En effet, chaque cas portant sur l’existence d’un risque de confusion doit être apprécié selon ses propres mérites. Or, en l’espèce, compte tenu des similitudes visuelle et phonétique entre les signes en cause et des similitudes entre les produits et services désignés, il convient de reconnaître l’existence d’un risque de confusion entre les marques en cause.

71      Même s’il devait être considéré que la jurisprudence invoquée par la chambre de recours n’était pas pertinente, il n’en reste pas moins que l’appréciation globale des marques et des produits et services révèle l’existence d’un risque de confusion pour le public pertinent.

72      Aucun des griefs invoqués par la requérante n’étant fondé, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

73      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

74      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Vimeo LLC est condamnée aux dépens.

Prek

Labucka

Kreuschitz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 23 octobre 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.