Language of document : ECLI:EU:T:2009:458

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

19 novembre 2009 (*)

« Marque communautaire – Enregistrement international désignant la Communauté européenne – Marque verbale CLEARWIFI – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) n° 207/2009] »

Dans l’affaire T‑399/08,

Clearwire Corp., établie à Kirkland, Washington (États-Unis), représentée par MG. Konrad, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. J.  Crespo Carrillo, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 30 juin 2008 (affaire R 706/2008‑1), concernant l’enregistrement international désignant la Communauté européenne du signe CLEARWIFI,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),

composé de Mmes I. Pelikánová, président, K. Jürimäe (rapporteur) et M. S. Soldevila Fragoso, juges,

greffier : M. N. Rosner, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 18 septembre 2008,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 15 janvier 2009,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 14 août 2007, la requérante, Clearwire Corp., a obtenu, auprès de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI), pour la marque verbale CLEARWIFI, un enregistrement international désignant la Communauté européenne.

2        Le 27 septembre 2007, l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) a reçu notification, de la part de l’OMPI, de l’enregistrement international de ladite marque.

3        Les services pour lesquels la protection de cette marque a été demandée dans la Communauté relèvent de la classe 38 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Services de télécommunication, à savoir fourniture d’accès haut débit à des réseaux informatiques et de communication, ainsi que transmission électronique de signaux vocaux, vidéo et de données par le biais de réseaux informatiques et de communication ».

4        Par décision du 29 février 2008, l’examinateur a refusé la protection de la marque en cause dans la Communauté en application de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [devenu article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

5        Le 29 avril 2008, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, en vertu des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009) contre la décision de l’examinateur. La requérante demandait à la chambre de recours, premièrement, de limiter la liste des services pour lesquels la protection de la marque était demandée à ceux ayant une forme numérique, deuxièmement, d’annuler la décision de l’examinateur et, troisièmement, d’étendre la protection demandée à la liste de services telle que limitée.

6        Par décision du 30 juin 2008 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a considéré, d’une part, que la marque en cause était dépourvue de caractère distinctif et, d’autre part, qu’elle était descriptive des services pour lesquels la protection était demandée. Partant, elle a rejeté le recours. S’agissant plus précisément du caractère descriptif de la marque en cause, en premier lieu, la chambre de recours a estimé qu’elle n’était pas compétente s’agissant de la limitation de la liste des services couverts par un enregistrement international et que, en tout état de cause, le fait que les services pour lesquels la protection était demandée soient numérisés était sans incidence en l’espèce. En second lieu, la chambre de recours a constaté que la marque en cause était susceptible d’être perçue par les particuliers ou les entreprises de la Communauté ayant besoin d’accéder à des réseaux informatiques et de communication tels que l’internet comme une indication de la destination des services visés, à savoir offrir des connexions sans fil, ainsi que de la qualité desdits services, à savoir l’absence de perturbations.

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

8        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

9        À l’appui de son recours, la requérante invoque deux moyens, le premier tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, le second tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du même règlement.

 Arguments des parties concernant le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94

10      En premier lieu, la requérante soutient que, d’une part, contrairement à ce qui a été affirmé par la chambre de recours, il est peu probable que le public pertinent soit le plus large possible dans tous les États membres et, d’autre part, le signe en cause étant composé d’éléments appartenant à la langue anglaise, le public pertinent est nécessairement anglophone. En outre, la requérante soutient que le public pertinent est familier des offres des services en cause comportant le terme « wifi » et qu’il est donc apte à distinguer l’indication de l’origine commerciale des services en question de leur description.

11      En deuxième lieu, la requérante conteste la signification donnée par la chambre de recours au signe CLEARWIFI, à savoir celle d’un accès sans fil à l’internet, sans « contamination » ou perturbations, car elle reposerait sur une définition erronée des termes « wifi » et « clear ». Le signe CLEARWIFI n’aurait pas de signification précise, il s’agirait d’un néologisme vague, évoquant par exemple un service de réseau facile à utiliser. En outre, contrairement à ce qu’avance la chambre de recours, l’existence ou l’absence de perturbations ne serait pas une qualité des services en cause, mais du matériel permettant d’utiliser la technologie wifi.

12      En troisième lieu, la requérante fait valoir l’absence d’un lien suffisamment direct et spécifique entre le signe en cause et les services en question. Ainsi, la chambre de recours n’aurait pas démontré la raison pour laquelle la seule signification du signe CLEARWIFI perçue sans réfléchir par les consommateurs devrait être un « accès sans contamination à l’internet ». En outre, le signe CLEARWIFI ne permettrait pas aux consommateurs potentiels d’identifier immédiatement et précisément les éléments d’un service de télécommunication spécifique ou l’une de ses caractéristiques.

13      En quatrième lieu, la requérante fait valoir que l’emploi des éléments verbaux « clear » et « wifi » pour exprimer l’idée d’un accès « non contaminé » à l’internet ne constitue pas un usage normal, du point de vue du public pertinent, au regard des services en question. À cet égard, la requérante fait valoir que la chambre de recours aurait dû, conformément à la jurisprudence de la Cour, apprécier si le signe en question constituait, aux yeux des milieux intéressés, une description des caractéristiques des services concernés, ou s’il était raisonnable d’envisager que cela soit le cas à l’avenir.

14      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal concernant le premier moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94

15      Aux termes de l’article 146, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 (devenu article 151, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009), tout enregistrement international désignant la Communauté produit, à compter de la date d’enregistrement visée à l’article 3, paragraphe 4, du protocole relatif à l’arrangement de Madrid concernant l’enregistrement international des marques, adopté à Madrid le 27 juin 1989 (JO 2003, L 296, p. 22), les mêmes effets qu’une demande de marque communautaire. L’article 149, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 (devenu article 154, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009) dispose que tout enregistrement international désignant la Communauté est subordonné à un examen relatif aux motifs absolus de refus, suivant la même procédure que pour les demandes de marque communautaire.

16      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, sont refusées à l’enregistrement les marques composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, « pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ».

17      Cette disposition fait obstacle à ce que les signes ou les indications qu’elle vise soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque. Elle poursuit ainsi un but d’intérêt général, lequel exige que de tels signes ou indications puissent être librement utilisés par tous [arrêt de la Cour du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, Rec. p. I‑12447, point 31 ; arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Ellos/OHMI (ELLOS), T‑219/00, Rec. p. II‑753, point 27, et du 22 mai 2008, Radio Regenbogen Hörfunk in Baden/OHMI (RadioCom), T‑254/06, non publié au Recueil, point 26].

18      En outre, des signes ou des indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques du produit ou du service pour lequel l’enregistrement a été demandé sont, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, réputés incapables d’exercer la fonction de la marque (arrêt OHMI/Wrigley, point 17 supra, point 30), à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque demandée désigne de faire ultérieurement le même choix, si l’expérience s’avère positive, ou, de faire un autre choix si elle s’avère négative (arrêts ELLOS, point 17 supra, point 28, et RadioCom, point 17 supra, point 27).

19      En effet, les signes et les indications visés par cette disposition sont ceux qui peuvent servir, dans le cadre d’un usage normal du point de vue du public concerné, pour désigner, soit directement, soit par la mention d’une de ses caractéristiques essentielles, le produit ou le service pour lequel l’enregistrement est demandé [arrêt de la Cour du 20 septembre 2001, Procter & Gamble/OHMI, C‑383/99 P, Rec. p. I‑6251, point 39 ; arrêts du Tribunal du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec. p. II‑2383, point 24, et RadioCom, point 17 supra, point 28].

20      Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94, il faut qu’il présente avec les produits ou les services en cause un lien suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description de ces produits ou de ces services ou de l’une de leurs caractéristiques (voir, en ce sens, arrêts PAPERLAB, point 19 supra, point 25, et RadioCom, point 17 supra, point 29).

21      Il n’est d’ailleurs pas nécessaire que les signes ou les indications composant la marque visés à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 soient effectivement utilisés, au moment de la demande d’enregistrement, à des fins descriptives de produits ou de services, tels que ceux pour lesquels la demande a été présentée, ou de leurs caractéristiques. Il suffit, comme l’indique la lettre même de cette disposition, que ces signes et ces indications puissent être utilisés à de telles fins. Un signe verbal doit ainsi se voir opposer un refus d’enregistrement en application de ladite disposition si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés [voir, en ce sens, arrêt OHMI/Wrigley, point 17 supra, point 32 ; arrêts du Tribunal du 20 juillet 2004, Lissotschenko et Hentze/OHMI (LIMO), T‑311/02, Rec. p. II‑2957, point 32, et RadioCom, point 17 supra, point 32].

22      En outre, pour qu’une marque constituée d’un néologisme ou d’un mot résultant d’une combinaison d’éléments soit considérée comme descriptive au sens de cette disposition, il ne suffit pas qu’un éventuel caractère descriptif soit constaté pour chacun de ces éléments. Un tel caractère doit être constaté pour le néologisme ou le mot lui-même. Une telle marque est descriptive des caractéristiques de ces produits ou de ces services, sauf s’il existe un écart perceptible entre le néologisme ou le mot et la simple somme des éléments qui le composent. Cela suppose que, en raison du caractère inhabituel de la combinaison par rapport auxdits produits ou services, le néologisme ou le mot crée une impression suffisamment éloignée de celle produite par la simple réunion des indications apportées par les éléments qui le composent, de sorte qu’il prime la somme desdits éléments. À cet égard, l’analyse du terme en cause au vu des règles lexicales et grammaticales appropriées est également pertinente [voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 19 avril 2007, OHMI/Celltech, C‑273/05 P, Rec. p. I‑2883, points 76 à 79, et arrêt du Tribunal du 2 avril 2008, Eurocopter/OHMI (STEADYCONTROL), T‑181/07, non publié au Recueil, points 36 et 37].

23      Enfin, le caractère descriptif d’un signe doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public concerné [arrêts du Tribunal du 7 juin 2005, Münchener Rückversicherungs-Gesellschaft/OHMI (MunichFinancialServices), T‑316/03, Rec. p. II‑1951, point 26, et RadioCom, point 17 supra, point 33].

24      C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner le présent moyen.

–       Sur la définition du public pertinent

25      Il convient de déterminer si, en l’espèce, la chambre de recours a correctement défini le public pertinent, ce que la requérante conteste.

26      À cet égard, il y a lieu de relever que les services relevant de la classe 38 pour lesquels la protection du signe CLEARWIFI a été demandée ont trait, d’une part, à l’accès à haut débit à des réseaux informatiques et de communication et, d’autre part, à la transmission électronique de signaux vocaux, vidéo et de données par le biais de tels réseaux. Or, l’utilisation de tels services est devenue une activité habituelle pour une très large majorité des entreprises et des consommateurs européens, et cela indépendamment des connaissances linguistiques de ces derniers.

27      Néanmoins, étant donné que le signe verbal CLEARWIFI est composé de deux termes issus de la langue anglaise, à savoir le mot « clear » et l’abréviation « wifi », et que l’utilisation d’expressions anglaises est fréquente dans les domaines électroniques et des télécommunications, dont relèvent les services visés, il y a lieu de tenir compte, en particulier, des consommateurs moyens anglophones ou ayant une connaissance élémentaire de la langue anglaise, normalement informés et avisés (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 26, et arrêt ELLOS, point 17 supra, point 30).

28      Partant, si la chambre de recours a constaté, à juste titre, au point 11 de la décision attaquée, que, « [e]n l’espèce, les services sont destinés à des particuliers ou [à] des entreprises de la Communauté ayant besoin d’accéder à des réseaux informatiques et de communication, tels que l’internet », c’est à tort qu’elle s’est bornée à en déduire qu’il convenait de prendre comme référence, afin de déterminer le caractère distinctif de la marque, « le public le plus large possible dans tous les États membres », sans préciser que les services en question sont destinés à un public anglophone ou ayant une connaissance élémentaire de la langue anglaise. Toutefois, afin de déterminer les conséquences de cette définition imprécise du public pertinent sur la légalité de la décision attaquée, il convient d’examiner le bien-fondé de l’appréciation de la chambre de recours relative au caractère descriptif de la marque en cause.

–       Sur la perception du signe verbal CLEARWIFI par le public pertinent

29      À titre liminaire, il y a lieu de relever que le signe verbal CLEARWIFI, qui se compose d’un substantif (« wifi ») et d’un adjectif qualificatif (« clear »), n’est pas inhabituel dans sa structure. En effet, il ne présente pas d’écart par rapport aux règles syntaxiques ou lexicales de la langue anglaise, auxquelles il est au contraire conforme. En conséquence, il ne sera pas perçu comme inhabituel par le consommateur concerné [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 20 mars 2002, DaimlerChrysler/OHMI (CARCARD), T‑356/00, Rec. p. II‑1963, point 29].

30      S’agissant de la signification du terme « wifi », il y a lieu de relever que ce dernier est communément utilisé pour désigner une technologie permettant de connecter sans fil des ordinateurs et divers appareils électroniques non seulement entre eux, mais également à des points d’accès au réseau Internet.

31      S’agissant du terme « clear », il est constant que ce dernier reçoit en anglais diverses acceptions, telles que notamment celles énoncées au point 12 de la décision attaquée, à savoir, en tant qu’adjectif, « pure » (pur), « free from complication » (sans complication), « without defect » (sans défaut), « not coded » (non codé), « obvious » (évident) ou, en tant qu’adverbe, « plainly » (nettement) ou « wholly » (totalement).

32      Il convient par conséquent de s’interroger, s’agissant de la signification de la marque en cause prise dans son ensemble, sur le point de savoir si l’application de l’adjectif qualificatif « clear » au nom « wifi » est susceptible, ainsi que l’affirme la chambre de recours au point 13 de la décision attaquée, d’être perçue par le public pertinent comme une référence à une technologie sans fil « non contaminée », c’est-à-dire offrant un accès clair, sans perturbations, par exemple à l’internet, ayant la « capacité de résister à une interférence extérieure ou [possédant] même un rapport signal/bruit favorable ».

33      À cet égard, la requérante conteste la signification donnée par la chambre de recours au terme « clear », au motif que ni l’expression « sans perturbations » ni l’expression « sans contamination » ne sont applicables aux connexions sans fil de type wifi, en particulier pour ce qui est de la transmission de données sous forme numérique. La première ne pourrait pas être utilisée dans le cadre d’un usage normal comme signification du terme « clear ». La seconde ne trouverait à s’appliquer qu’en présence de substances, ce qui exclurait toute application aux ondes radio sur lesquelles repose le fonctionnement de la technologie wifi.

34      Or, il convient de relever tout d’abord que, s’agissant de l’emploi de l’expression « sans contamination », la chambre de recours a justement précisé, au point 13 de la décision attaquée, que cette expression ne devait pas être comprise comme s’appliquant uniquement à l’air, pour indiquer sa pureté, ou à l’eau, pour indiquer qu’elle n’est pas polluée, mais devait être entendue dans un sens « légèrement métaphorique » indiquant plus largement l’absence de perturbations.

35      S’agissant ensuite de l’emploi de l’expression « sans perturbations » à l’égard d’une connexion sans fil de type wifi, il y a lieu de constater qu’une telle connexion repose sur l’emploi d’ondes radio susceptibles de subir des interférences résultant de la présence d’autres ondes radio. Il est constant que de telles interférences se traduisent, dans le cas de la technologie wifi, par un signal faible ou intermittent pouvant entraîner des déconnexions involontaires. Il en découle qu’une connexion wifi soumise à de telles interférences est susceptible d’être perçue par le public pertinent, qui n’est pas uniquement composé, tel que cela ressort du point 26 ci-dessus, de spécialistes des connexions sans fil de type wifi, comme étant perturbée.

36      Dans ces circonstances, l’absence de perturbations désigne dès lors une qualité de ladite connexion. Il s’ensuit que, contrairement à ce que soutient la requérante, le signe verbal CLEARWIFI n’a pas une signification simplement vague ou évocatrice, mais peut être perçu par le public pertinent comme désignant une technologie, le wifi, permettant de connecter sans fil des ordinateurs et divers appareils électroniques entre eux ou à des points d’accès au réseau Internet, capable de résister à des interférences extérieures.

37      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel, étant donné que, pour des raisons techniques, un signal numérique transmis par ondes radio ne peut pas, en soi, être perturbé, le passage de la transmission analogique à la transmission numérique ne permet pas d’envisager raisonnablement l’emploi à l’avenir du terme « clear » associé au terme « wifi ». En effet, à supposer même que les informations transmises le soient à l’avenir sous forme exclusivement numérique, il n’en demeure pas moins que la connexion wifi est susceptible d’être perturbée par des interférences se traduisant par des déconnexions involontaires, qui seront perçues par le public pertinent comme l’indication d’une connexion perturbée (voir point 36 ci-dessus). Par conséquent, il y a lieu de rejeter cet argument comme étant non fondé.

38      Par ailleurs, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel l’OHMI aurait dû, conformément à la jurisprudence de la Cour, apprécier si le signe en question constituait, aux yeux des milieux intéressés, une description des caractéristiques des services concernés, ou s’il était raisonnable d’envisager que cela soit le cas à l’avenir, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence citée au point 20 ci-dessus, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, un signe verbal doit se voir opposer un refus d’enregistrement si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne une caractéristique des produits ou des services concernés. Or, force est de constater, ainsi que cela ressort du point 36 ci-dessus, que la chambre de recours a à juste titre estimé que le signe CLEARWIFI était susceptible d’être perçu par le public pertinent comme une description de la destination et de la qualité des services concernés.

39      S’agissant de l’argument de la requérante selon lequel la notion d’accès sans perturbations n’est pas de nature à décrire les services pour lesquels la protection de la marque est demandée, au motif que l’appréciation de l’existence ou de l’absence de telles perturbations doit se faire non par rapport aux services en question, mais par rapport au matériel permettant d’utiliser la technologie wifi, force est de constater que, au regard de la conclusion tirée au point 36 ci-dessus, il repose sur une prémisse erronée. Partant, il y a lieu de le rejeter comme non fondé.

40      Il reste à établir s’il existe, du point de vue du public pertinent, un lien suffisamment direct et concret entre le signe en cause et les services visés.

–       Sur l’existence d’un lien suffisamment direct et concret avec les services visés

41      Il convient de relever que la chambre de recours a estimé, au point 15 de la décision attaquée, que « la marque décrit la destination des services, à savoir, offrir des connexions sans fil, et leur qualité, à savoir, sans perturbations ».

42      À cet égard, premièrement, la requérante fait valoir que l’OHMI n’a pas démontré pourquoi la seule signification du signe CLEARWIFI susceptible d’être perçue sans réfléchir par les consommateurs devrait être celle d’un « accès sans contamination à l’internet », alors que, d’une part, ledit signe n’a pas de signification directe et que, d’autre part, comme le reconnaît l’OHMI, le mot « clear » possède plusieurs significations. Deuxièmement, la requérante soutient que le signe CLEARWIFI ne permet pas aux consommateurs potentiels d’identifier immédiatement et précisément les éléments d’un service de télécommunication spécifique ou l’une de ses caractéristiques. Il en découlerait que le lien entre la marque et les services susceptibles d’être proposés par un fournisseur d’accès sans fil est trop vague et indéterminé pour conférer à cette marque un caractère descriptif par rapport auxdits services.

43      S’agissant, en premier lieu, de la perception du signe par le public pertinent, il ressort du point 36 ci-dessus que c’est à juste titre que la chambre de recours a estimé que ce dernier est susceptible de percevoir le signe CLEARWIFI comme désignant une technologie sans fil qui offre un accès clair, sans perturbations, par exemple à l’internet.

44      Certes, ainsi que le soutient la requérante, la chambre de recours n’a pas précisé la raison pour laquelle cette dernière signification prévaudrait sur toute autre signification dans l’esprit du public pertinent. Cependant, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante (voir point 21 ci-dessus), aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, un signe verbal doit se voir opposer un refus d’enregistrement si, en au moins une de ses significations potentielles, il désigne, comme c’est le cas en l’espèce, une caractéristique des produits ou des services concernés. Partant, il convient de rejeter le présent argument comme étant non fondé.

45      S’agissant, en second lieu, du lien entre le signe verbal CLEARWIFI et les services pour lesquels la protection de la marque est demandée, premièrement, il y a lieu de constater qu’il est fait référence dans la liste desdits services, d’une part, à la fourniture d’accès à haut débit à des réseaux informatiques et de communication et, d’autre part, à la transmission électronique de signaux vocaux, vidéo et de données par le biais de réseaux informatiques et de communication. Deuxièmement, il convient également de rappeler que le signe CLEARWIFI peut être perçu par le public pertinent comme désignant une connexion sans fil et sans perturbations, par exemple, à l’internet (voir point 43 ci-dessus).

46      À cet égard, il convient de relever que le public pertinent établira sans difficulté un lien entre le signe CLEARWIFI et un service de télécommunication spécifique, à savoir l’accès à l’internet, ainsi qu’entre ledit signe et l’une de ses caractéristiques, à savoir l’absence de perturbations. En effet, force est de constater que, du point de vue du public pertinent, l’internet constitue le principal réseau informatique et de communication permettant la transmission électronique de signaux vocaux, vidéo et de données. La circonstance que l’accès audit service soit réalisé avec ou sans fil est sans incidence sur le caractère direct et concret du lien susceptible d’être établi par le public pertinent entre le signe en question et les services pour lesquels la protection de la marque est demandée.

47      Il y a cependant lieu de souligner que le public pertinent, qui n’est pas composé uniquement de spécialistes en informatique, sera enclin à assimiler l’accès au réseau Internet via une connexion de type wifi à un accès à haut débit audit réseau. Or, force est de constater qu’il ressort de la liste des services pour lesquels la protection du signe en cause est demandée que lesdits services sont relatifs non seulement à l’accès à haut débit à des réseaux informatiques et de communication, mais également à la transmission électronique de messages vocaux, vidéo et de données par l’intermédiaire de réseaux informatiques et de communication, ces derniers n’impliquant pas nécessairement le recours à un accès à haut débit.

48      Cette circonstance n’est toutefois pas de nature à affecter la légalité de la décision attaquée dans la mesure où le fait qu’un signe verbal soit descriptif par rapport à une partie seulement des produits ou des services relevant d’une catégorie mentionnée en tant que telle dans la demande d’enregistrement n’empêche pas que ce signe verbal soit refusé à l’enregistrement [arrêt du Tribunal du 20 novembre 2007, Tegometall International/OHMI – Wuppermann (TEK), T‑458/05, Rec. p. II‑4721, point 94].

49      S’agissant de l’affirmation de la requérante selon laquelle le public pertinent est familier des offres promotionnelles relatives à ces services comportant le terme « wifi », il convient de constater que, à supposer même que tel soit effectivement le cas, cela ne serait pas de nature à affaiblir le lien susceptible d’être établi par le public pertinent entre le signe CLEARWIFI et les services visés, dans la mesure où, dans les offres promotionnelles en question, le terme « wifi » est précisément utilisé pour décrire la destination des services en cause.

50      Partant, c’est à bon droit que la chambre de recours a estimé que la marque CLEARWIFI était susceptible d’être perçue par le public pertinent comme une indication de la qualité et de la destination des services en question.

51      Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que la marque CLEARWIFI était descriptive des caractéristiques des produits et des services désignés, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94.

52      Dès lors, il y a lieu de rejeter le premier moyen comme étant non fondé.

53      Dans ces conditions, il n’y a pas lieu d’examiner le second moyen, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. En effet, selon une jurisprudence bien établie, il suffit qu’un des motifs absolus de refus énumérés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 s’applique pour qu’un signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire [arrêt de la Cour du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec. p. I‑7561, point 29, et arrêt du Tribunal du 6 novembre 2007, RheinfelsQuellen H. Hövelmann/OHMI (VOM URSPRUNG HER VOLLKOMMEN), T‑28/06, Rec. p. II‑4413, point 43].

54      Le recours doit par conséquent être rejeté.

 Sur les dépens

55      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

56      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté

2)      Clearwire Corp. est condamnée aux dépens

Pelikánová

Jürimäe

Soldevila Fragoso

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 19 novembre 2009.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.