Language of document : ECLI:EU:T:2013:676

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

10 décembre 2013 (*)

« Recours en annulation – Aides d’État – Décision relative aux aides destinées à faciliter la fermeture des mines de charbon non compétitives – Annulation partielle – Indissociabilité – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑150/11,

Gobierno de Aragón (Espagne),

Principado de Asturias (Espagne),

Junta de Castilla y León (Espagne),

représentés par Mes C. Fernández Vicién, I. Moreno-Tapia Rivas, E. Echeverría Álvarez et M. López Garrido, avocats,


contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme A. Lo Monaco et M. F. Florindo Gijón, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission européenne, représentée par MM. É. Gippini Fournier, L. Flynn et C. Urraca Caviedes, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision 2010/787/UE du Conseil, du 10 décembre 2010, relative aux aides d’État destinées à faciliter la fermeture des mines de charbon qui ne sont pas compétitives (JO L 336, p. 24),

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro, président, MM. S. Gervasoni (rapporteur) et L. Madise, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        Les requérants, le Gobierno de Aragón, le Principado de Asturias et la Junta de Castilla y León, sont des collectivités publiques espagnoles dotées de compétences dans le domaine minier.

2        À l’expiration du traité CECA, le Conseil de l’Union européenne a adopté, en date du 23 juillet 2002, le règlement (CE) n° 1407/2002 concernant les aides d’État à l’industrie houillère (JO L 205, p. 1) qui reconnaissait l’importance stratégique du charbon en tant que source indigène d’énergie ainsi que sa contribution à la sécurité de l’approvisionnement à long terme de l’Union européenne et qui établissait, à cette fin, un régime d’aides d’État spécifique à ce secteur. Les aides accordées par les États membres selon ce règlement se divisaient en trois catégories : des aides à la réduction d’activité, des aides à l’accès à des réserves houillères, à savoir des aides à l’investissement initial et des aides à la production courante, ainsi que des aides à la couverture de charges exceptionnelles

3        Sous le régime du règlement n° 1407/2002, le secteur minier espagnol, composé de 29 mines produisant de la houille, a fait l’objet d’investissements considérables visant à maintenir l’activité des mines et à améliorer leur efficacité. Dans le cadre du plan national espagnol des réserves stratégiques de charbon pour la période de 2006 à 2012, ces mines ont été considérées comme une réserve stratégique. Ledit plan a souligné l’importance stratégique du charbon et la nécessité de continuer à soutenir le secteur minier houiller pour des raisons d’ordre social ou régional et afin de garantir la sécurité de l’approvisionnement en énergie, le charbon constituant la source indigène la plus importante d’énergie primaire. Le secteur minier espagnol a ainsi bénéficié, au titre du règlement n° 1407/2002, d’aides à l’investissement initial et à la production courante qui ont été considérées comme essentielles pour la viabilité de ce secteur.

4        Le règlement n° 1407/2002 ayant, conformément à son article 14, paragraphe 3, expiré le 31 décembre 2010, le Conseil a adopté, sur le fondement de l’article 107, paragraphe 3, sous e), TFUE, la décision 2010/787/UE, du 10 décembre 2010, relative aux aides d’État destinées à faciliter la fermeture des mines de charbon qui ne sont pas compétitives (JO L 336, p. 24).

5        La décision 2010/787 est fondée sur la considération selon laquelle l’octroi indéfini d’aides à des mines de charbon qui ne sont pas compétitives n’est plus justifié eu égard à la part minime de la houille subventionnée dans la palette énergétique globale et à la politique de l’Union encourageant les sources d’énergie renouvelable (considérants 2 et 3 de la décision 2010/787). Cette décision marque le passage pour le secteur houiller de l’application des règles spécifiques au secteur en matière d’aides d’État à l’application des règles générales applicables à tous les secteurs (considérant 6 de la décision 2010/787).

6        La décision 2010/787 prévoit, dès lors, que les aides d’État au secteur houiller ne peuvent être autorisées que jusqu’en 2018, et ce seulement si les unités de production de charbon auxquelles une aide est accordée sont définitivement fermées à cette échéance. Ces aides doivent ainsi s’inscrire dans un plan de fermeture des mines de charbon non compétitives bénéficiaires de l’aide dont l’échéance est fixée au plus tard au 31 décembre 2018, être dégressives et être strictement limitées aux unités de production de charbon qui sont irrévocablement appelées à fermer (considérants 5 et 7 de la décision 2010/787 et articles 2 et 3 de cette même décision).

7        L’article 3 de la décision 2010/787, inséré dans le chapitre 2 de ladite décision consacré à la « compatibilité de l’aide », porte spécifiquement sur les « [a]ide[s] à la fermeture ». Aux termes de cette disposition :

« 1. Les aides à une entreprise qui sont destinées expressément à la couverture des pertes à la production courante des unités de production de charbon ne peuvent être considérées comme compatibles avec le marché intérieur que si elles satisfont aux conditions suivantes :

a) l’exploitation des unités de production de charbon concernées doit s’inscrire dans un plan de fermeture dont l’échéance est fixée au plus tard au 31 décembre 2018 ;

b) les unités de production de charbon concernées doivent fermer définitivement conformément au plan de fermeture ;

c) l’aide notifiée ne doit pas excéder l’écart entre le coût de production prévisible et la recette prévisible pour un exercice charbonnier. L’aide effectivement versée doit faire l’objet d’une régularisation annuelle sur la base des coûts et des recettes réels, au plus tard avant la fin de l’exercice charbonnier qui suit celui pour lequel l’aide a été octroyée ;

d) le montant de l’aide par tonne équivalent-charbon ne doit pas conduire à des prix au lieu d’utilisation pour le charbon de l’Union inférieurs à ceux pratiqués pour les charbons de qualité similaire en provenance de pays tiers ;

e) les unités de production de charbon concernées doivent avoir été en activité le 31 décembre 2009 ;

f) le montant global des aides à la fermeture accordées par un État membre doit suivre une courbe descendante : pour la fin de 2013, la réduction de l’aide octroyée en 2011 ne doit pas être inférieure à 25 %, pour la fin de 2015, elle ne doit pas être inférieure à [40 %, pour la fin de 2016, elle ne doit pas être inférieure à] 60  % et pour la fin de 2017, elle ne doit pas être inférieure à 75 % ;

g) le montant global des aides à la fermeture octroyées à l’industrie houillère par un État membre ne doit pas dépasser, pour aucune année postérieure à 2010, le volume des aides que cet État membre a octroyées et qui ont été autorisées par la Commission, conformément aux articles 4 et 5 du règlement (CE) n° 1407/2002, pour l’année 2010 ;

h) Les États membres établissent un plan de mesures à prendre visant à atténuer les impacts sur l’environnement de la production du charbon par les unités de production auxquelles l’aide est octroyée en vertu du présent article, par exemple dans le domaine de l’efficacité énergétique, des énergies renouvelables ou de la capture et du stockage du carbone.

2. L’inclusion des dispositions constituant des aides d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, [TFUE] dans un plan visé au paragraphe 1, point h), est sans préjudice aux obligations de notification et de suspension imposées aux États membres en ce qui concerne de telles dispositions par l’article 108, paragraphe 3, [TFUE] et à la compatibilité de telles dispositions avec le marché intérieur.

3. Si les unités de production de charbon auxquelles une aide est accordée en vertu du paragraphe 1 ne sont pas fermées à la date fixée par le plan de fermeture tel qu’il a été autorisé par la Commission, l’État membre concerné est tenu de récupérer toute l’aide octroyée sur l’entièreté de la période couverte par le plan de fermeture. »

8        L’article 7 de la décision 2010/787, inséré dans un chapitre 3 intitulé « Procédures », fixe les « [i]nformations à fournir par les États membres ». Ses paragraphes 2 et 3 sont rédigés comme suit :

« 2. Les États membres, qui envisagent d’octroyer des aides à la fermeture visées à l’article 3, notifient à la Commission, un plan de fermeture des unités de production de charbon concernées. Le plan contient au minimum les informations suivantes :

a) l’identification des unités de production de charbon ;

b) pour chaque unité de production de charbon, les coûts de production réels ou estimés, par exercice charbonnier ;

c) la production de charbon estimée, par exercice charbonnier, des unités de production de charbon qui font partie du plan de fermeture;

d) le montant estimé des aides à la fermeture, par exercice charbonnier.

3. Les États membres notifient à la Commission toute modification du plan de fermeture. »

 Procédure et conclusions des parties

9        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 14 mars 2011, les requérants ont introduit le présent recours.

10      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 5 mai 2011, la Commission européenne a demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions du Conseil. Par ordonnance du 30 juin 2011, le président de la huitième chambre du Tribunal a admis l’intervention de la Commission.

11      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 30 mai 2011, le Conseil a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. Le 18 juillet 2011, les requérants ont déposé leurs observations sur cette exception d’irrecevabilité.

12      Le 19 août 2011, la Commission a déposé un mémoire en intervention limité aux questions de recevabilité. Les requérants ont déposé leurs observations sur celui-ci dans les délais impartis.

13      Suite au renouvellement partiel du Tribunal, l’affaire a été attribuée à un nouveau juge rapporteur. Celui-ci a ensuite été affecté à la deuxième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

14      Les requérants concluent, en substance, à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’article 3, paragraphe 1, sous a), b) et f), l’article 3, paragraphe 3, et l’article 7, paragraphes 2 et 3, de la décision 2010/787 (ci-après, pris ensemble, les « dispositions attaquées ») ;

–        rejeter l’exception d’irrecevabilité soulevée par le Conseil, soutenu par la Commission, et déclarer le recours recevable ;

–        condamner le Conseil aux dépens de l’instance à l’exception de ceux liés à la demande d’intervention de la Commission et condamner celle-ci aux dépens liés à ladite demande.

15      Le Conseil, soutenu par la Commission, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ;

–        condamner les requérants aux dépens.

 En droit

16      En vertu de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure, si une partie le demande, le Tribunal peut statuer sur l’irrecevabilité sans engager le débat au fond. Conformément au paragraphe 3 du même article, la suite de la procédure est orale, sauf décision contraire du Tribunal. En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide qu’il n’y a pas lieu d’ouvrir la procédure orale.

17      Le Conseil, soutenu par la Commission, excipe de l’irrecevabilité du présent recours aux motifs, d’une part, que les dispositions attaquées ne sont pas dissociables du reste de la décision 2010/787 et, d’autre part, que les requérants n’ont pas qualité pour agir au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

18      À l’appui de la première fin de non-recevoir, le Conseil, soutenu par la Commission, fait valoir que les dispositions attaquées sont indissociables du reste de la décision 2010/787. En effet, cette dernière serait fondée sur la considération, énoncée à ses considérants 2 à 5, selon laquelle les aides à la production de charbon non compétitive ne sont plus justifiées et seules les aides à la fermeture des mines de charbon non compétitives peuvent encore être déclarées compatibles avec le marché intérieur. Or, selon le Conseil, soutenu par la Commission, les dispositions attaquées, en ce qu’elles fixent les conditions d’autorisation de ces aides, constituent le cœur même de la décision 2010/787, de sorte que leur annulation entraînerait une dénaturation de sa substance et de ses objectifs. Les requérants, qui seraient placés dans une situation moins favorable en cas d’annulation totale de la décision 2010/787, tenteraient ainsi d’assouplir l’encadrement de l’octroi d’aides à l’industrie houillère par la suppression de toute référence, dans la décision 2010/787, à la fermeture des mines. La Commission ajoute que, par leur demande d’annulation partielle de la décision 2010/787, les requérants cherchent en réalité à faire réécrire cette décision en substituant aux choix politiques du Conseil d’autres options qui leur paraissent préférables.

19      Les requérants contestent cette argumentation du Conseil et de la Commission au motif que les dispositions attaquées sont détachables du reste de la décision 2010/787. En effet, premièrement, les dispositions attaquées ne constitueraient pas le cœur de la décision 2010/787, dont l’essence consisterait en la nécessité de maintenir un cadre juridique permettant de continuer à concéder des aides aux mines de charbon indigène afin qu’elles deviennent compétitives. Lesdites dispositions constitueraient de simples conditions sous lesquelles lesdites mines peuvent recevoir des aides. Deuxièmement, une annulation partielle rendrait la décision 2010/787 cohérente et compatible avec le régime antérieur, tel qu’issu en dernier lieu du règlement n° 1407/2002, étant précisé que le contexte factuel illustrerait également la nécessité de maintenir l’octroi d’aides à la production houillère. Troisièmement, ladite décision pourrait subsister sans les dispositions attaquées. Les requérants ajoutent, dans leurs observations sur le mémoire en intervention limité aux questions de recevabilité de la Commission, que leur demande d’annulation partielle ne tend pas, contrairement à ce qu’avance la Commission, à une réécriture de la décision 2010/787 dès lors qu’ils ne demandent pas l’adoption d’autres mesures ou l’inclusion de questions nouvelles dans cette décision, mais se limitent à demander l’élimination des dispositions illégales.

20      Il convient de rappeler que, ainsi que cela ressort d’une jurisprudence bien établie, l’annulation partielle d’un acte de l’Union n’est possible que dans la mesure où les éléments dont l’annulation est demandée sont détachables du reste de l’acte (arrêts de la Cour du 10 décembre 2002, Commission/Conseil, C‑29/99, Rec. p. I‑11221, point 45, et du 24 mai 2005, France/Parlement et Conseil, C‑244/03, Rec. p. I‑4021, point 12). La Cour a, de même, itérativement jugé qu’il n’était pas satisfait à cette exigence de séparabilité lorsque l’annulation partielle d’un acte aurait pour effet de modifier la substance de celui-ci (arrêts de la Cour du 31 mars 1998, France e.a./Commission, C‑68/94 et C‑30/95, Rec. p. I‑1375, point 257 ; Commission/Conseil, précité, point 46, et France/Parlement et Conseil, précité, point 13).

21      En l’espèce, il est constant que les requérants demandent l’annulation des seules dispositions attaquées. Dans ces conditions, il y a lieu d’examiner si lesdites dispositions sont, eu égard à leur portée, détachables du reste de la décision 2010/787, en vérifiant si leur annulation modifierait l’esprit et la substance de ladite décision (voir, en ce sens et par analogie, arrêt de la Cour du 27 juin 2006, Parlement/Conseil, C‑540/03, Rec. p. I‑5769, point 29).

22      À cet égard, en premier lieu, il convient de relever qu’en adoptant la décision 2010/787, le Conseil a instauré un régime d’autorisation des aides à l’industrie houillère dont la raison d’être diffère substantiellement de celle du règlement n° 1407/2002, en ce que ce nouveau régime limite les aides susceptibles d’être autorisées à celles visant à faciliter la fermeture des mines de charbon indigènes qui ne sont pas compétitives. Ainsi, contrairement à ce que font valoir les requérants dans leurs observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par le Conseil, la décision 2010/787 n’a pas pour objet d’établir un cadre juridique pour l’octroi d’aides aux mines de charbon indigènes afin de les rendre compétitives, mais d’établir un cadre juridique spécifique pour l’octroi d’aides à la fermeture des mines de charbon non compétitives.

23      En effet, tout d’abord, ainsi qu’il ressort de l’intitulé de la décision 2010/787, ne sont susceptibles d’être autorisées que les « aides d’État destinées à faciliter la fermeture des mines de charbon qui ne sont pas compétitives ». Ensuite, aux considérants 2 à 4 de la décision 2010/787, le Conseil indique que la politique de l’Union ne justifie plus l’octroi indéfini, en vue d’assurer l’approvisionnement de l’Union en énergie, des aides à des mines de charbon qui ne sont pas compétitives, de sorte que les catégories d’aide autorisées par le règlement n° 1407/2002 ne devraient pas être maintenues indéfiniment et que lesdites mines peuvent être contraintes à la fermeture. En outre, aux considérants 5 et 7 de la décision 2010/787, le Conseil, tout en énonçant que les États membres devraient pouvoir adopter des mesures pour atténuer les conséquences sociales et régionales liées à la fermeture des mines non compétitives (réduction progressive et ordonnée des activités dans le cadre d’un plan de fermeture irrévocable et/ou financement de frais exceptionnels), souligne que ce type d’aides devrait être dégressif et strictement limité aux unités de production de charbon qui sont irrévocablement appelées à fermer. Il ajoute, au considérant 6 de la décision 2010/787, que cette décision marque le passage, en ce qui concerne les aides d’État pour le secteur houiller, de l’application de règles spécifiques à l’application des règles générales. Enfin, l’article 2 de la décision 2010/787, intitulé « Principe » et figurant au chapitre consacré à la « compatibilité de l’aide », dispose que c’est seulement « [d]ans le contexte de la fermeture des mines non compétitives » que les aides à l’industrie houillère peuvent être considérées comme compatibles avec le marché intérieur, à la condition de satisfaire aux dispositions de la décision 2010/787.

24      En second lieu, s’agissant de la portée des dispositions attaquées, il convient d’observer, d’une part, que l’article 3 de la décision 2010/787 porte spécifiquement sur les aides à la fermeture. Ainsi, il expose, en son paragraphe 1, les conditions dans lesquelles les aides destinées à la couverture des pertes à la production courante des unités de production de charbon peuvent être considérées comme compatibles avec le marché intérieur (voir point 7 ci-dessus). En particulier, le paragraphe 1, sous a), b) et f), de cet article prévoit l’adoption d’un plan de fermeture dont l’échéance est fixée au plus tard au 31 décembre 2018, la fermeture définitive des unités de production de charbon concernées conformément audit plan de fermeture et le caractère dégressif du montant global des aides à la fermeture accordées. L’article 3, paragraphe 3, de la décision 2010/787 impose en outre aux États membres une obligation de récupérer l’aide lorsque les unités de production de charbon auxquelles l’aide est accordée en vertu du paragraphe 1 de cette même disposition ne sont pas fermées à la date fixée par le plan de fermeture tel qu’autorisé par la Commission.

25      D’autre part, l’article 7, paragraphes 2 et 3, de la décision 2010/787 dispose que les États membres, qui envisagent d’octroyer des aides à la fermeture conformément à l’article 3 de cette même décision, notifient à la Commission un plan de fermeture des unités de production de charbon concernées contenant les informations visées audit paragraphe 2, ainsi que toute modification dudit plan (voir point 8 ci-dessus).

26      Il en découle que les dispositions attaquées de la décision 2010/787 sont celles qui, conformément à l’objet de ladite décision, limitent spécifiquement l’octroi d’aides à la production houillère aux seules aides à la fermeture des mines de charbon non compétitives dès lors que ces dispositions subordonnent l’octroi d’aides, d’une part, à l’existence d’un plan de fermeture, à la fermeture effective des mines bénéficiaires de l’aide, à laquelle s’ajoute une obligation de récupération de l’aide lorsque les unités de production concernées n’ont pas été fermées à l’échéance fixée, et à la dégressivité des aides et, d’autre part, instaurent une obligation de notification dudit plan et des modifications de celui-ci à la Commission.

27      Partant, contrairement à ce que font valoir les requérants dans leurs observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par le Conseil, les dispositions attaquées sont intrinsèquement liées à la substance même de la décision 2010/787.

28      Dans ces conditions, l’annulation partielle de la décision 2010/787, telle que demandée par les requérants, conduirait à substituer à ladite décision, selon laquelle les aides d’État au secteur houiller ne pourront être autorisées que jusqu’en 2018, et ce seulement si les unités de production bénéficiaires de l’aide sont définitivement fermées à cette échéance, une décision différente aux termes de laquelle de telles aides pourraient être autorisées sans limite dans le temps et dans des conditions sensiblement plus larges que celles retenues dans la décision 2010/787.

29      Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de conclure que les dispositions attaquées ne sont pas détachables du reste de la décision 2010/787.

30      Cette conclusion n’est pas remise en cause par les autres arguments des requérants.

31      Premièrement, les requérants se prévalent du contexte factuel et d’une exigence de continuité du régime d’aides dont bénéficieraient, depuis le traité CECA, puis le règlement n° 1407/2002, les mines de charbon. Ils reprochent en substance au Conseil, d’une part, de ne pas avoir, lors de l’adoption de la décision 2010/787, assuré de cohérence avec le régime antérieur des aides aux mines de charbon et avec l’objectif de garantir l’approvisionnement énergétique de l’Union et, d’autre part, d’avoir conditionné l’octroi d’aides à la fermeture des mines de charbon bénéficiaires de l’aide. La fermeture des mines ne constituerait pas le cœur de la décision 2010/787, dès lors que cette mesure ne serait pas cohérente avec la politique énergétique de l’Union. Par conséquent, il conviendrait, selon les requérants, de supprimer la condition de fermeture des mines de charbon énoncée dans la décision 2010/787.

32      Or, sans même qu’il soit besoin d’examiner si le Conseil était tenu d’assurer une cohérence avec le régime issu, en dernier lieu, du règlement n° 1407/2002, il suffit de constater que cet argument des requérants, qui a trait, au demeurant, au bien-fondé de la décision 2010/787, n’est pas de nature à établir le caractère détachable des dispositions attaquées du reste de la décision 2010/787. Au contraire, cet argument démontre que si le présent recours était accueilli, la décision qui subsisterait serait entièrement différente de la décision 2010/787, tant dans ses finalités que dans ses modalités, en prévoyant l’octroi, pour une période indéterminée, d’aides aux mines de charbon non compétitives.

33      Deuxièmement, les requérants font valoir que la décision 2010/787 peut subsister et « serait parfaitement applicable » sans les dispositions attaquées.

34      Or, il suffit d’observer que, à supposer même que la décision puisse subsister et être appliquée sans lesdites dispositions, il n’en demeure pas moins que, ainsi que cela a été relevé au point 28 ci-dessus, la décision qui résulterait d’une annulation partielle des dispositions attaquées serait substantiellement différente de celle adoptée par le Conseil. Partant, cet argument n’est pas susceptible de démontrer que les dispositions attaquées sont détachables du reste de la décision 2010/787.

35      À la lumière de ce qui précède, il convient d’accueillir la première fin de non-recevoir soulevée par le Conseil, soutenu par la Commission, et de rejeter le recours comme irrecevable, sans qu’il soit besoin d’examiner la seconde fin de non-recevoir opposée par le Conseil, soutenu par la Commission, et tirée de l’absence de qualité pour agir des requérants.

 Sur les dépens

36      Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Les requérants ayant succombé, il y a lieu de les condamner à supporter, outre leurs propres dépens, ceux exposés par le Conseil, conformément aux conclusions de ce dernier.

37      Conformément à l’article 87, paragraphe 4, du règlement de procédure, la Commission supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)      Le Gobierno de Aragón (Espagne), le Principado de Asturias (Espagne) et la Junta de Castilla y León (Espagne) supporteront, outre leurs propres dépens, ceux exposés par le Conseil de l’Union européenne.

3)      La Commission européenne supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 10 décembre 2013.

Le greffier

 

       Le président

E.  Coulon

 

       M. E. Martins Ribeiro


* Langue de procédure : l’espagnol.