Language of document : ECLI:EU:T:2020:372

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

17 août 2020 (*)

« Procédure – Taxation des dépens »

Dans l’affaire T‑194/13 DEP II,

United Parcel Service, Inc., établie à Atlanta, Géorgie (États-Unis), représentée par M. A. Ryan, solicitor, et par Me W. Knibbeler, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. N. Khan, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

soutenue par

FedEx Corp., établie à Memphis, Tennessee (États‑Unis), représentée par Mme F. Carlin, barrister, M. G. Bushell, solicitor, et par Me N. Niejahr, avocat,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande de taxation des dépens à rembourser par United Parcel Service, Inc., à FedEx Corporation à la suite de l’arrêt du 7 mars 2017, United Parcel Service/Commission (T‑194/13, EU:T:217:144),

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme V. Tomljenović (rapporteure), présidente, M. F. Schalin et Mme P. Škvařilová‑Pelzl, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        United Parcel Service, Inc. (ci-après « UPS » ou la « requérante »), et TNT Express NV (ci-après « TNT ») opèrent à l’échelle mondiale dans le secteur des services spécialisés de transport et de logistique.

2        Le 15 juin 2012, UPS a notifié à la Commission européenne son projet d’acquisition de TNT (ci-après la « concentration »), en application de l’article 4 du règlement (CE) no 139/2004 du Conseil, du 20 janvier 2004, relatif au contrôle des concentrations entre entreprises (JO 2004, L 24, p. 1, ci-après le « règlement sur les concentrations »), tel que mis en œuvre par le règlement (CE) no 802/2004 de la Commission, du 7 avril 2004, concernant la mise en œuvre du règlement no 139/2004 (JO 2004, L 133, p. 1).

3        Par la concentration, UPS envisageait d’acquérir le contrôle de l’ensemble de TNT, au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement sur les concentrations, par une offre publique d’achat de droit néerlandais.

4        Par décision C(2013) 431, du 30 janvier 2013, la Commission a déclaré que la concentration notifiée était incompatible avec le marché intérieur et avec l’accord EEE (affaire COMP/M.6570 – UPS/TNT Express) (ci-après la « décision attaquée »).

5        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 avril 2013, enregistrée sous le numéro T‑194/13, UPS a introduit un recours en annulation contre la décision attaquée.

6        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 17 juin 2013, FedEx Corp. (ci‑après « FedEx » ou l’« intervenante ») a demandé à intervenir à l’appui des conclusions de la Commission. Par ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 21 octobre 2013, FedEx a été admise à intervenir au litige, au soutien des conclusions de la Commission.

7        Par arrêt du 7 mars 2017, United Parcel Service/Commission (T‑194/13, EU:T:217:144), le Tribunal a annulé la décision attaquée et, s’agissant des dépens, a notamment condamné la Commission, outre ses propres dépens, à supporter les dépens d’UPS. FedEx a été condamnée à supporter ses propres dépens.

8        Par ordonnance du 18 octobre 2017, United Parcel Service/Commission (T‑194/13 OST, non publiée, EU:T:2017:742), dans le cadre d’une procédure en rapport avec une omission à statuer, le Tribunal a modifié les points de son arrêt du 7 mars 2017, United Parcel Service/Commission (T‑194/13, EU:T:217:144), relatifs à la récupération des dépens. Il a notamment ordonné, d’une part, à la Commission de supporter, outre ses propres dépens, les dépens de la requérante exposés dans le cadre de la procédure au principal, sauf ceux qui étaient liés à l’intervention et, d’autre part, à FedEx de supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par UPS, en lien avec l’intervention.

9        Par requête déposée au greffe de la Cour le 16 mai 2017, la Commission a formé un pourvoi contre l’arrêt du Tribunal du 7 mars 2017, United Parcel Service/Commission (T‑194/13, EU:T:2017:144). Par son arrêt du 16 janvier 2019, Commission/UPS (C‑265/17 P, EU:C:2019:23), la Cour a rejeté le pourvoi et condamné la Commission aux dépens.

10      FedEx n’est pas intervenue au soutien de la Commission dans le cadre du pourvoi.

11      Par lettre du 26 mars 2019, UPS a notamment demandé à FedEx le remboursement des dépens afférents à son intervention dans l’affaire au principal T‑194/13 pour un montant de 372 108,74 euros.

12      Par lettre du 4 avril 2019, FedEx a répondu qu’elle considérait que les dépens réclamés étaient insuffisamment étayés et qu’ils n’avaient pas été nécessairement exposés en lien avec l’intervention. Par conséquent, elle a demandé à UPS de réévaluer les dépens demandés.

13      UPS a précisé sa demande par sa lettre du 18 juillet 2019, en incluant des relevés du temps consacré par ses conseils juridiques à chaque phase de la procédure d’intervention, ainsi que les tarifs horaires moyens appliqués et une description du travail accompli.

14      Par lettre du 6 décembre 2019, UPS a rappelé à FedEx le contenu de sa lettre du 18 juillet 2019 et réitéré sa demande de paiement des dépens qu’elle avait encourus en lien avec l’intervention. Dans cette lettre, UPS a également indiqué son intention de saisir le Tribunal si les parties ne pouvaient pas trouver un accord sur la récupération des dépens.

15      Le 13 décembre 2019, FedEx a exprimé son refus définitif de supporter les dépens demandés.

 Procédure et conclusions des parties

16      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 9 janvier 2020, la requérante a introduit, au titre de l’article 170, paragraphe 5, du règlement de procédure du Tribunal, la présente demande de taxation de dépens.

17      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de fixer à 372 108,74 euros le montant de ses dépens en lien avec l’intervention dans le cadre de la procédure ayant donné lieu à l’arrêt du 7 mars 2017, United Parcel Service/Commission (T‑194/13, EU: T:2017:144) qu’elle pouvait récupérer auprès de FedEx.

18      En annexe à sa requête, elle a fourni les relevés détaillés du temps consacré par ses conseils juridiques et économiques, pour chaque phase de la procédure, ainsi que les tarifs horaires appliqués par lesdits conseils et une description du travail accompli par ceux-ci.

19      Le même jour, la requérante a saisi le Tribunal d’une demande de taxation de dépens contre la Commission, enregistrée sous le numéro T‑194/13 DEP, par laquelle elle a demandé à ce que les dépens exposés dans le cadre de la procédure au principal, qu’elle pouvait récupérer auprès de la Commission, à l’exception de ceux liés à l’intervention, soient fixés à un montant de 1 175 284,41 euros.

20      Dans ses observations déposées au greffe du Tribunal le 27 février 2020, l’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter la demande de taxation des dépens de la requérante ; et

–        fixer les montants récupérables, sur le fondement de sa jurisprudence constante et compte tenu des particularités de l’affaire, à un montant n’excédant pas 20 000 euros.

 En droit

21      Aux termes de l’article 170, paragraphes 1 à 3, du règlement de procédure, lorsqu’il y a contestation sur les dépens récupérables, le Tribunal statue par voie d’ordonnance non susceptible de recours à la demande de la partie intéressée, après avoir mis la partie concernée par la demande en mesure de présenter ses observations.

22      Selon l’article 140, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme des dépens récupérables les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération d’un agent, conseil ou avocat. Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités, d’une part, à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et, d’autre part, à ceux qui ont été indispensables à ces fins (ordonnances du 24 janvier 2002, Groupe Origny/Commission, T‑38/95 DEP, EU:T:2002:13, point 28, et du 6 mars 2003, Nan Ya Plastics et Far Eastern Textiles/Conseil, T‑226/00 DEP et T‑227/00 DEP, EU:T:2003:61, point 33).

23      Dans sa demande de taxation des dépens, la requérante soutient que les dépens relatifs à la procédure devant le Tribunal dans l’affaire T‑194/13, liés à l’intervention de FedEx et encourus entre le 17 juin 2013, date de la demande de l’intervention, et le 7 mars 2017, date de l’arrêt du Tribunal, dont elle demande le remboursement à l’intervenante, s’élèvent à 372 108,74 euros. Plus précisément ces dépens sont ventilés comme suit:

–        356 224,36 euros au titre des honoraires d’avocats, correspondant à 889,2 heures de travail liées à l’intervention, calculés sur la base de différents tarifs horaires compris entre 205 et 835 euros ;

–        15 884,38 euros au titre des honoraires d’économistes, correspondant à 23,75 heures de travail liées à la préparation de l’audience en lien avec l’intervention, calculés sur la base de différents tarifs horaires compris entre 663 euros et 773,5 euros.

24      Dans ses observations, FedEx a fait valoir, en substance, que la requérante n’avait pas suffisamment justifié que les dépens réclamés avaient été exposés aux fins de l’intervention et que, par ailleurs, ils ne pouvaient pas être considérés comme ayant été nécessairement exposés en lien avec cette dernière.

 Sur les honoraires des avocats

25      S’agissant des honoraires des avocats, il importe de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le juge de l’Union n’est pas habilité à taxer les honoraires dus par les parties à leurs propres avocats, mais à déterminer le montant à concurrence duquel ces rémunérations peuvent être récupérées auprès de la partie condamnée aux dépens. En statuant sur la demande de taxation des dépens, le juge de l’Union n’a pas à prendre en considération un tarif national fixant les honoraires des avocats ni un éventuel accord conclu à cet égard entre la partie intéressée et ses agents ou conseils (voir ordonnance du 17 mars 2016, Norma Lebensmittelfilialbetrieb/OHMI, T‑229/14 DEP, non publiée, EU:T:2016:177, point 10 et jurisprudence citée).

26      Il est également de jurisprudence constante que, à défaut de dispositions de nature tarifaire dans le droit de l’Union, le juge doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit de l’Union ainsi que des difficultés de la cause, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu nécessiter de la part des agents ou conseils qui sont intervenus et des intérêts économiques que le litige a représenté pour les parties (voir ordonnances du 31 janvier 2012, Commission/Kallianos, C‑323/06 P‑DEP, non publiée, EU:C:2012:49, point 13, et du 29 novembre 2016, Brune/Commission, T‑513/16 DEP, non publiée, EU:T:2016:709, point 29 et jurisprudence citée).

27      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’apprécier le montant des dépens récupérables en l’espèce, au titre des honoraires d’avocats.

28      En l’espèce, la requérante a demandé le remboursement des honoraires d’une équipe de 20 professionnels, au sein d’un cabinet d’avocats comprenant des avocats associés, des avocats seniors, des avocats juniors et des stagiaires, pour le travail que celle-ci avait effectué entre le 30 janvier 2013 et le 7 mars 2017.

29      À l’appui de sa demande, la requérante a présenté un décompte indiquant le nombre d’heures consacrées par chacun des membres de l’équipe sur trois périodes spécifiques au cours de la procédure devant le Tribunal, accompagné d’une brève description des tâches accomplies. Ce décompte peut se résumer comme suit :

–        pour la période allant de juin 2013 à mai 2014, un volume total de 498,4 heures de travail aurait été consacré à la préparation des versions non confidentielles des pièces de procédure et des annexes auxquelles l’intervenante devait avoir accès ;

–        durant la période comprise entre août et septembre 2014, un volume total de 195,4 heures de travail aurait été consacré à la rédaction des observations sur le mémoire en intervention ; et

–        pour la préparation de l’audience du 6 avril 2016 et la participation à cette dernière, un volume total de 195,4 heures sont réclamées du fait de l’intervention de FedEx, lesquelles correspondent à un tiers de l’ensemble des heures consacrées par les avocats de la requérante à la préparation de ladite audience et à la participation à celle-ci.

30      Il y a lieu d’examiner si, au regard de l’objet et de la nature du litige, de son importance, sous l’angle du droit de l’Union, de la complexité et des difficultés de la cause, de l’intérêt économique que le litige a représenté pour les parties, ainsi que de l’ampleur du travail effectué, l’évaluation des dépens réclamés au titre des honoraires d’avocats est justifiée.

31      En premier lieu, en ce qui concerne la nature et l’objet du litige, son importance sous l’angle du droit de l’Union et les difficultés de la cause, il y a lieu de relever que le recours concernait l’application de l’article 4 du règlement sur les concentrations.

32      Plus particulièrement, le recours tendait à l’annulation d’une décision de la Commission, adoptée à l’issue d’une procédure d’examen approfondie, déclarant la concentration incompatible avec le marché intérieur et l’accord EEE.

33      Outre les difficultés inhérentes à la matière du contrôle des concentrations, qui nécessite une analyse prospective du marché de référence, la décision attaquée présentait la particularité d’interdire la réalisation de l’opération envisagée, au motif qu’elle allait créer une entrave significative à une concurrence effective dans plusieurs États membres.

34      Qui plus est, l’appréciation de la Commission reposait sur un modèle économétrique censé permettre d’anticiper les effets de la concentration sur les prix des différents marchés nationaux. Ce modèle était contesté par la requérante, en raison notamment de la non communication, par la Commission, de la version dudit modèle sur laquelle elle s’était fondée dans la décision attaquée.

35      Il s’agissait donc d’un recours de nature complexe qui, de plus, portait sur des questions de principe importantes pour le droit de l’Union, notamment en ce qui concernait la charge de la preuve pesant sur la Commission lorsqu’elle s’appuyait sur des modèles économétriques afin d’interdire une concentration.

36      En deuxième lieu, il importe de reconnaître que l’affaire mettait en jeu des intérêts économiques importants pour la requérante. D’une part, la valeur de l’opération notifiée à la Commission était estimée, à l’époque, à un montant de 5,2 milliards d’euros. D’autre part, en raison du refus opposé par la Commission à la réalisation de la concentration envisagée, la requérante était exposée au risque d’une acquisition de la société cible par une société concurrente.

37      S’agissant, en troisième lieu, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu imposer aux conseils de la requérante en lien avec l’intervention, il y a lieu de relever les considérations qui suivent.

38      Il importe de rappeler que, selon une jurisprudence constante, s’il est certes loisible à la requérante de confier la défense de ses intérêts simultanément à plusieurs conseils, de manière à s’assurer les services d’avocats expérimentés, tout en confiant les travaux de plus grande ampleur à des avocats pratiquant des honoraires moins élevés, il appartient cependant au Tribunal de tenir compte principalement du nombre total d’heures de travail pouvant apparaître comme objectivement indispensables aux fins de la procédure contentieuse, indépendamment du nombre d’avocats entre lesquels les prestations effectuées ont pu être réparties (ordonnances du 6 mars 2003, Nan Ya Plastics et Far Eastern Textiles/Conseil, T‑226/00 DEP et T‑227/00 DEP, EU:T:2003:61, point 44 ; du 29 octobre 2004, Schneider Electric/Commission, T‑77/02 DEP, non publiée, EU:T:2004:321, point 58, et du 29 mars 2007, T‑28/02 DEP, First Data e.a./Commission, non publiée, EU:T:2007:101, point 29).

39      En outre, force est de rappeler que l’intervenante a été condamnée à supporter les seuls dépens de la requérante liés à son intervention. À cet égard, il convient de tenir compte de ce que, en règle générale, la tâche procédurale d’une partie principale est sensiblement facilitée dans le cas d’une réponse à une intervention. Une intervention étant, par nature, subordonnée à l’action principale, le fait d’y répondre ne saurait, dès lors, présenter autant de difficultés que l’action principale, sauf dans des cas exceptionnels (ordonnance du 29 mars 2007, First Data e.a./Commission, T-28/02 DEP, non publiée, EU:T:2007:101, point 32).

40      En l’espèce, l’intervenante était l’un des concurrents directs de la requérante sur certains segments du marché de référence. Elle s’était opposée à la concentration proposée dans le cadre de la procédure administrative. Si, certes, les raisons fondant cette opposition devaient être connues par les représentants de la requérante, qui l’avaient également assistée lors de la procédure administrative, il n’en reste pas moins que l’intervention d’un concurrent aussi important que FedEx au soutien de la Commission méritait une attention toute particulière desdits représentants. En outre, dans le cadre de l’intervention de son concurrent direct, qui impliquait l’accès de celui-ci au dossier de l’affaire devant le Tribunal, la requérante avait non seulement le droit, mais aussi le devoir, de préserver les informations de nature confidentielle et commercialement sensibles la concernant.

41      Par ailleurs, il convient de relever que la possibilité pour le juge de l’Union d’apprécier la valeur du travail effectué par les représentants des parties dépend de la précision des informations fournies (ordonnance du 29 octobre 2004, Schneider Electric/Commission, T‑77/02 DEP, non publiée, EU:T:2004:321, point 59).

42      S’agissant, premièrement, des tâches liées à la préparation des versions non confidentielles des pièces de procédure auxquelles FedEx devait avoir accès en tant qu’intervenante, il ressort du décompte présenté par la requérante qu’un total de 498,4 heures de travail y étaient consacrées, dont 9,7 heures par deux avocats associés, 81 heures par deux avocats seniors et 407,7 heures par des avocats juniors et des stagiaires.

43      À cet égard, il y a lieu de rappeler que FedEx a été admise à intervenir au soutien des conclusions de la Commission par ordonnance du président de la quatrième chambre du Tribunal du 21 octobre 2013, laquelle a également ordonné la communication à l’intervenante des versions non confidentielles de toutes les pièces de procédure distribuées ou à distribuer aux parties. Par conséquent, la requérante a dû préparer des versions non confidentielles des mémoires qui ont été envoyées à l’intervenante, notamment, de la requête de 50 pages, de la réplique de 27 pages, du mémoire en défense de 60 pages et de la duplique de 26 pages. En outre, elle a dû préparer des versions non confidentielles des annexes à la requête, qui comptaient notamment 469 pages (Annexe A. 1), 364 pages (Annexe A. 3), 9 pages (Annexe A. 6), 27 pages (Annexe A. 9), 32 pages (Annexe A. 10), 26 pages (Annexe A. 11), 7 pages (Annexe A. 12), 14 pages (Annexe A. 13), 18 pages (Annexe A. 14), 189 pages (Annexe A. 16), 232 pages (Annexe A. 17), 401 pages (Annexe A. 18), 1 page (Annexe A. 19), 18 pages (Annexe A. 32) et 7 pages (Annexe A. 40).

44      Si, certes, le volume des documents que la requérante a dû analyser afin d’identifier les informations confidentielles à occulter était très important, un volume total de 498,4 heures de travail, qui équivalent à plus de 60 journées individuelles de travail de 8 heures, est néanmoins excessif, compte tenu notamment du fait que les représentants de la requérante, l’ayant également représentée dans la procédure administrative, étaient déjà familiarisés avec le dossier en question. En outre, ainsi que l’a relevé à juste titre l’intervenante, la participation à ce type d’activités de deux avocats associés, pour un total de 9,7 heures et de deux avocats seniors, pour un total de 81 heures, ne fût-ce qu’aux seules fins de supervision, n’est pas entièrement indispensable.

45      Deuxièmement, s’agissant de la rédaction des observations sur l’admission de l’intervention ainsi que des observations sur le mémoire en intervention, la requérante allègue qu’un total de 195,4 heures de travail y a été consacré, dont 53 heures par deux avocats associés, 16,5 heures par un avocat senior et 125,9 heures par des avocats juniors.

46      À cet égard, il y a lieu de rappeler que la requérante a présenté des observations sur la demande en intervention de FedEx, dans lesquelles elle a fait valoir des objections contre cette intervention. Ce document comptait quatre pages. La requérante a également présenté des observations sur le mémoire en intervention. Dans ce document, qui comptait, au total, 22 pages, l’intervenante s’est concentrée sur trois des cinq moyens abordés par la Commission dans son mémoire en défense, qu’elle a développés. Elle a notamment développé des arguments spécifiques par rapport à sa position concurrentielle et les a étayés par trois rapports économiques qui n’avaient pas été présentés dans le cadre de la procédure administrative et qui demandaient une attention particulière. Le mémoire en intervention comportait treize annexes, dont neuf documents confidentiels incluant les trois rapports économiques d’experts susmentionnés (annexes I.4, I.5, et I.8).

47      Les observations de la requérante sur le mémoire en intervention de FedEx ont été présentées sur 17 pages, avec cinq annexes composées, la première, d’une page du calendrier de la phase II de la procédure administrative (annexe JA.1), la deuxième, d’une analyse économique effectuée par la Commission en 2012-2013 et d’un article (annexe JA.2), la troisième, d’un résumé de 10 pages de la décision publiée au Journal officiel (annexe JA.3), la quatrième, de la transcription de présentations d’une société de conseil financier à des investisseurs, des 9 et 10 octobre 2012, qui avaient été communiquées en annexe à la requête (annexe A 3, réponse à la communication des griefs) et qui constituaient un document de 88 pages (annexe JA.4) et, la cinquième, d’une présentation de FedEx de 28 pages (annexe JA.5).

48      Certes, les observations sur le mémoire en intervention de FedEx étaient de nature technique et complexe. En effet, la requérante devait notamment contester les arguments de l’intervenante liés à l’analyse des effets nets de la concentration sur les prix effectuée par la Commission, ceux concernant les éventuels gains d’efficacité liés à la concentration, ceux relatifs à la proximité de FedEx en tant que concurrent et ceux concernant les plans d’expansion de cette dernière.

49      Toutefois, il convient de relever, d’emblée et à l’instar de l’intervenante, que les avocats de la requérante disposaient déjà d’une connaissance approfondie du dossier en cause, après l’avoir représentée dans la procédure administrative, introduit le recours au principal et répondu au mémoire en défense. Cela a été de nature, non seulement à faciliter leur travail, mais également à réduire le temps qu’ils ont dû consacrer à la réponse à l’intervention (voir, en ce sens, ordonnance du 9 septembre 2015, Smurfit Kappa Group/Commission, T‑304/08 DEP, non publiée, EU:T:2015:707, point 79 et jurisprudence citée).

50      Dans ces circonstances, le fait de consacrer 195,4 heures de travail, dont 25 % par des avocats associés, à la préparation et la rédaction de ces observations, aussi complexes qu’elles soient sur le plan technique, est excessif, compte tenu notamment du fait que ce type d’arguments avaient déjà été traités, au moins en partie, par les représentants de la requérante dans le cadre de la procédure administrative et en réponse au mémoire en défense de la Commission.

51      S’agissant, troisièmement, du travail consacré par les avocats de la requérante à répondre à l’intervention lors de la phase orale de la procédure, la requérante fait valoir qu’un tiers des dépens liés à la préparation de l’audience et à la participation à cette dernière ont été causés par l’intervention de FedEx. À cet égard, elle soutient avoir dû consacrer un certain temps à préparer des observations orales en réponse aux écritures de l’intervenante, à laquelle un temps de plaidoirie relativement important aurait été accordé. En outre, la requérante soutient que ses avocats ont dû consacrer du temps pour traiter la demande de l’intervenante visant à ce que l’audience se tienne à huis clos.

52      Ainsi, il découle du décompte présenté par la requérante qu’un total de 195,4 heures aurait été consacré à la préparation de l’audience et à la participation à celle-ci.

53      Force est de constater que la requérante n’a pas indiqué le nombre d’heures dédiées à la préparation de l’audience et à la participation à cette dernière qui aurait été spécifiquement lié à l’intervention de FedEx. En effet, la requérante reconnaît elle-même avoir procédé à une estimation, sur la base du nombre total d’heures que ses représentants auraient consacré à la phase orale de la procédure. Or, une telle explication lacunaire ne saurait permettre au juge d’apprécier la valeur du travail effectué, au sens de la jurisprudence citée au point 41 ci-dessus.

54      Il est constant que, lors de l’audience, un temps de plaidoiries a effectivement été accordé à l’intervenante, laquelle a aussi dû répondre à des questions du Tribunal et que la requérante a également dû réagir aux plaidoiries et aux réponses de celle-ci. Toutefois, ainsi que le soutient à juste titre l’intervenante, la description fournie par la requérante n’est pas suffisamment précise pour pouvoir déterminer quelles activités décrites dans le relevé étaient spécifiquement liées à l’intervention.

55      Selon le procès-verbal de l’audience du 6 avril 2016, celle-ci a commencé à 10 h 08 et s’est terminée à 17 h 27, avec une pause entre 12 h 30 et 14 heures. En outre, il y est indiqué que la requérante, la Commission et l’intervenante ont chacune été entendues en leurs plaidoiries et que, par la suite, chacune des trois parties a répondu aux questions du Tribunal. Par ailleurs, il y est précisé que l’audience s’est tenue à huis clos et que, en vertu d’un accord entre les parties, seules les personnes ayant signé une convention de confidentialité ont pu y participer. À cet égard, il y a lieu de relever que, le 18 mars 2016, le Tribunal a demandé aux trois parties leurs observations sur la possibilité de tenir l’audience à huis clos et leur a imparti un délai pour la présentation desdites observations au 31 mars 2016. La décision du Tribunal sur la tenue de l’audience à huis clos a été communiquée aux parties le 5 avril 2016.

56      Or, les 195,4 heures de travail que, selon la requérante, ses avocats ont dû consacrer à la préparation de l’audience, au motif qu’il a fallu maîtriser les problèmes soulevés par les arguments présentés par FedEx dans son mémoire en intervention et préparer les éventuelles questions du Tribunal, sont excessives. En effet, au stade de la phase orale de la procédure, les avocats de la requérante avaient déjà eu l’occasion de se familiariser avec les arguments invoqués par FedEx, notamment afin d’y répondre dans le cadre de leurs observations sur le mémoire en intervention. En outre, la participation de FedEx à l’audience n’aurait eu qu’une incidence limitée sur la durée totale de l’audience, qui a été de 6 heures. Par ailleurs, à supposer que la tenue de l’audience à huis clos serait exclusivement imputable à l’intervenante, ce que la requérante n’a pas prouvé, la rédaction des observations d’une page, présentées à cet égard par la requérante le 31 mars 2016, ne saurait justifier qu’un nombre d’heures significatif lui ait été consacré, en particulier par des avocats expérimentés.

57      En quatrième lieu, en ce qui concerne les taux horaires appliqués par les avocats de la requérante, il ressort de la jurisprudence que des honoraires d’avocats élevés ne sauraient être appropriés que pour rémunérer les services d’un professionnel particulièrement expérimenté, capable de travailler de façon efficace et rapide (ordonnance du 28 juin 2004, Airtours/Commission, T‑342/99 DEP, EU:T:2004:192, point 52).

58      En l’espèce, les taux horaires appliqués par les avocats de la requérante étaient compris entre 205 euros de l’heure, pour les avocats les moins expérimentés, et 835 euros de l’heure, pour un avocat associé. À la lumière des taux horaires des 20 avocats impliqués, UPS avance un taux horaire moyen de 412 euros.

59      Or, force est premièrement de relever qu’un taux horaire de 835 euros pratiqués individuellement par certains des avocats d’UPS ne saurait être considéré, au titre des dépens récupérables, comme étant objectivement indispensable aux fins de la procédure contentieuse, même pour rémunérer les services d’un professionnel particulièrement expérimenté.

60      Deuxièmement, en présence d’une équipe de 20 avocats, il est approprié de prendre en compte un taux horaire moyen. Il convient ainsi de le fixer à hauteur de 400 euros, lequel taux a été jugé approprié pour des affaires de concurrence (voir, en ce sens, ordonnance du 25 octobre 2018, Socitrel et Companhia Previdente/Commission, T‑413/10 DEP, T‑414/10 DEP et T‑409/13 DEP, non publiée, EU:T:2018:751, point 99).

61      Troisièmement, comme l’intervenante l’a souligné à juste titre, il ne saurait être exclu, en l’absence d’indications très précises sur les tâches accomplies par l’équipe de 20 avocats en lien spécifiquement avec l’intervention qu’il ait pu y avoir une certaine duplication de leurs efforts.

62      Quatrièmement, s’il apparait qu’un taux horaire moyen de 400 euros est conforme à celui d’un professionnel particulièrement expérimenté, ces honoraires d’avocats élevés ne sauraient être appropriés que pour rémunérer les services d’un tel professionnel, capable de travailler de façon efficace et rapide (voir, en ce sens, ordonnance du 9 septembre 2015, Smurfit Kappa Group/Commission, T‑304/08 DEP, non publiée, EU:T:2015: 707, points 80 et 87). Dès lors, ainsi que l’affirme à juste titre l’intervenante, toute rémunération d’un tel niveau doit avoir pour contrepartie une évaluation stricte du nombre total d’heures de travail nécessaire.

63      Au vu des considérations qui précèdent, le Tribunal estime qu’il sera fait une juste appréciation des dépens récupérables par la requérante auprès de l’intervenante, au titre des honoraires des avocats encourus en lien avec l’intervention, en fixant leur montant à 56 000 euros.

 Sur les honoraires des économistes

64      La requérante demande le remboursement des honoraires des économistes qu’elle aurait engagés afin de préparer l’audience et en lien avec l’intervention. Ainsi, elle soutient que la participation d’experts économiques était en l’espèce justifiée par les hypothèses économiques et économétriques sur lesquelles la Commission avait fondé son analyse dans la décision attaquée et qui avaient été abordées par FedEx dans son intervention. À cet égard, elle estime qu’un tiers du temps que ces économistes ont consacré à la préparation de l’audience est imputable à l’intervention. Par ailleurs, elle précise que, parmi les deux sociétés de conseil économique qu’elle a engagées, une seule s’est occupée des moyens traités dans ladite intervention. Plus spécifiquement, elle réclame un montant de 15 884,38 euros au titre des honoraires des économistes, correspondant à un volume de 23,75 heures de travail de trois économistes appliquant différents tarifs horaires compris entre 663 euros et 773,5 euros.

65      À cet égard, l’intervenante fait valoir, en substance, que la requérante n’a pas démontré que les dépens réclamés au titre de l’engagement d’experts économiques pour la préparation de l’audience ont été nécessairement exposés en lien avec l’intervention.

66      Il convient de rappeler que, compte tenu de la nature essentiellement économique des appréciations effectuées par la Commission dans le cadre du contrôle des opérations de concentration, l’intervention de conseils d’experts économiques en complément du travail des conseils juridiques peut, parfois, être justifiée et entraîner ainsi des dépens susceptibles d’être récupérés en application de l’article 140, sous b), du règlement de procédure (voir ordonnance du 28 juin 2004, Airtours/Commission, T-342/99 DEP, EU:T:2004:192, point 55 ; voir également en ce sens, ordonnance du 19 décembre 2006, WestLB/Commission, T‑228/99 DEP, EU:T:2006:405, point 78 et jurisprudence citée).

67      Pour qu’il en soit ainsi, une telle participation de conseillers économiques doit être objectivement nécessaire aux fins de la procédure. Tel peut notamment être le cas lorsque l’expertise économique se révèle décisive pour le résultat du litige, de sorte que sa production par une partie a épargné au Tribunal la nécessité d’ordonner une expertise dans le cadre des pouvoirs d’instruction qu’il détient en vertu de l’article 91, sous e), du règlement de procédure (ordonnance du 19 décembre 2006, WestLB/Commission, T‑228/99 DEP, non publiée, EU:T:2006:405, point 79).

68      Plus spécifiquement, s’il ne saurait être exclu que le travail d’un expert économique puisse être nécessaire afin de répondre aux questions soulevées par l’intervention, il n’en reste pas moins que la partie qui demande le remboursement des honoraires y afférents, en tant que dépens récupérables, doit prouver qu’ils ont été exposés effectivement en lien avec ladite intervention, notamment du fait que les études économiques en question ont été présentées ou, à tout le moins, citées à l’appui des observations sur l’intervention (voir, en ce sens, ordonnance du 29 mars 2007, First Data e.a./Commission, T‑28/02 DEP, non publiée, EU:T:2007:101, points 40 et 41).

69      Si, certes, eu égard à la nature économique de la présente affaire et compte tenu de l’intervention de FedEx, qui était étayée par trois études économiques, l’engagement d’un expert économique aurait pu s’avérer nécessaire, il y a lieu de relever que dans le cadre des observations de la requérante sur le mémoire en intervention, aucune étude économique produite par les experts économiques dont elle réclame les honoraires n’a été présentée ni citée. De même, quand bien même des experts économiques, engagés par la requérante, auraient été présents lors de l’audience, elle n’a pas précisé comment les dépens au titre de leur participation lors de l’audience auraient été spécifiquement exposés en lien avec l’intervention. Par ailleurs, ainsi que le soutient à juste titre l’intervenante, ses allégations venaient étayer, en substance, les thèses soutenues par la Commission dans la décision attaquée et avaient déjà été débattues dans le cadre de la procédure administrative.

70      Ainsi, en l’absence de plus de précisions sur le travail effectivement réalisé par les économistes en lien avec l’intervention, il n’est pas possible pour le Tribunal de constater que les dépens réclamés à ce titre ont été effectivement encourus par la requérante du fait de ladite intervention et qu’ils étaient objectivement indispensables, aux fins de la procédure, notamment pour répondre aux arguments soulevés par l’intervenante.

71      Dans ces circonstances, le Tribunal doit rejeter, dans sa totalité, la demande de la requérante visant à obtenir le remboursement d’un montant de 15 884,38 euros au titre des honoraires d’économistes.

72      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, et en l’absence d’une demande de taxation des dépens afférents à la présente procédure de taxation, il sera fait une juste appréciation de l’intégralité des dépens que la requérante peut récupérer auprès de FedEx en les fixant à un montant total de 56 000 euros.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

ordonne :

Le montant total des dépens à rembourser par FedEx Corp. à United Parcel Service, Inc., est fixé à 56 000 euros (cinquante-six mille euros).

Fait à Luxembourg, le 17 août 2020.

Le greffier

 

Le président

E. Coulon

 

V. Tomljenović


*      Langue de procédure : l’anglais.