Language of document : ECLI:EU:T:2012:281

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

7 juin 2012 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Enregistrement international désignant la Communauté européenne – Marque verbale ALLERNIL – Demande de marque communautaire verbale ALLERNIL – Marque verbale nationale antérieure ALLERGODIL – Motif relatif de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Motivation – Article 75 du règlement n° 207/2009 »

Dans les affaires jointes T‑492/09 et T‑147/10,

Meda Pharma GmbH & Co. KG, établie à Bad Homburg vor der Höhe (Allemagne), représentée par Mes G. Würtenberger et R. Kunze, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par Mme B. Schmidt, puis par Mme D. Walicka, puis par M. G. Schneider, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Nycomed GmbH, établie à Constance (Allemagne), représentée initialement par MA. Ferchland, puis par Mes A. Ferchland et K. Trautmann, avocats,

ayant pour objet deux recours formés contre deux décisions de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 29 septembre 2009 (affaires R 1386/2007-4 et R 697/2007‑4), relatives à une procédure d’opposition entre Meda Pharma GmbH & Co. KG et Nycomed GmbH,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. L. Truchot, président, Mme M. E. Martins Ribeiro et M. H. Kanninen (rapporteur), juges,

greffier : Mme C. Heeren, administrateur,

vu les requêtes déposées au greffe du Tribunal les 7 décembre 2009 (affaire T-492/09) et 30 mars 2010 (affaire T-147/10),

vu les mémoires en réponse de l’OHMI déposés au greffe du Tribunal les 7 avril (affaire T-492/09) et 8 juillet 2010 (affaire T-147/10),

vu les mémoires en réponse de l’intervenante déposés au greffe du Tribunal les 24 mars (affaire T‑492/09) et 16 juin 2010 (affaire T‑147/10),

vu l’ordonnance du 13 octobre 2010 portant jonction des affaires T‑492/09 et T-147/10 aux fins de la procédure orale et de l’arrêt,

à la suite de l’audience du 12 janvier 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

 Affaire T‑492/09

1        Le 24 janvier 2005, l’intervenante, Nycomed GmbH, anciennement Altana Pharma AG, a obtenu, auprès du Bureau international de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, un enregistrement international désignant la Communauté européenne, pour le signe verbal ALLERNIL.

2        L’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) a reçu notification de l’enregistrement international de ce signe le 28 avril 2005.

3        Les produits pour lesquels la protection dudit signe a été demandée dans la Communauté relèvent de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Produits pharmaceutiques ».

4        L’enregistrement international a été publié au Bulletin des marques communautaires n° 2005/19, du 9 mai 2005.

5        Le 20 janvier 2006, la requérante, Meda Pharma GmbH & Co. KG, a formé opposition, au titre du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)], et notamment de son article 42 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à la demande d’extension pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque nationale verbale antérieure ALLERGODIL désignant les produits relevant de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice et correspondant à la description suivante : « Médicaments contre les pathologies d’origine allergique ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

8        Le 25 juin 2007, la division d’opposition a rejeté l’opposition.

9        Le 27 août 2007, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009), contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 29 septembre 2009 (ci-après la « première décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Notamment, elle a considéré que les produits en conflit étaient identiques, dans la mesure où les « médicaments contre les pathologies d’origine allergique », pour lesquels la marque opposée était protégée, faisaient partie des « produits pharmaceutiques » visés par la demande. Elle a ajouté que, les produits en conflit étant des médicaments, ils s’adressaient à un public spécialisé, mais aussi, en partie, aux patients eux-mêmes, dont le niveau d’attention était accru. Selon la chambre de recours, l’appréciation du risque de confusion devait être fondée sur le public en Allemagne, la marque antérieure étant protégée dans cet État membre. Elle a indiqué que, sur le plan visuel, les signes en conflit étaient deux signes verbaux qui différaient par le nombre de lettres, et donc par leur longueur, et qui coïncidaient en leur partie initiale « aller » ainsi qu’en leur terminaison « il », mais que cela ne saurait contribuer à rendre les signes similaires, dans la mesure où la suite de lettres serait comprise comme une référence descriptive à l’effet thérapeutique des produits en cause, de sorte que les signes, dans leur ensemble, présentaient une similitude uniquement faible. La chambre de recours a estimé que, sur le plan phonétique, les signes différaient par leur nombre de syllabes, ainsi que par le rythme vocal qui en résultait, et que la syllabe additionnelle « go » serait clairement perçue. Elle a ajouté que la coïncidence au niveau des deux premières syllabes était dépourvue de pertinence pour la comparaison phonétique et que, si les prononciations des dernières syllabes « nil » et « dil » étaient légèrement similaires, la similitude phonétique devait être jugée faible dans son ensemble. S’agissant de la comparaison conceptuelle, la chambre de recours a considéré qu’elle n’était pas possible, étant donné que, considérés chacun dans son ensemble, les deux signes étaient des vocables de fantaisie. Elle a conclu que l’appréciation globale excluait un risque de confusion entre les deux signes en conflit.

 Affaire T‑147/10

11      Le 8 octobre 2004, l’intervenante a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’OHMI, en vertu du règlement n° 40/94.

12      La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal ALLERNIL.

13      Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice et correspondent à la description suivante : « Produits pharmaceutiques ».

14      La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 2005/223, du 6 juin 2005.

15      Le 6 septembre 2005, la requérante a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 13 ci-dessus.

16      L’opposition était fondée sur la marque nationale verbale antérieure ALLERGODIL désignant les produits relevant de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice et correspondant à la description suivante : « Médicaments contre les pathologies d’origine allergique ».

17      Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

18      Le 28 mars 2007, la division d’opposition a rejeté l’opposition.

19      Le 8 mai 2007, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94, contre la décision de la division d’opposition.

20      Par décision du 29 septembre 2009 (ci-après la « seconde décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 10 ci-dessus pour la première décision attaquée.

 Conclusions des parties

21      Dans les deux affaires, la requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

22      Également dans les deux affaires, l’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

23      À l’appui de chacun de ses deux recours, la requérante invoque deux moyens, le premier tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et le second tiré de la violation de l’article 75 du même règlement.

 Sur le moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

24      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), iii) et iv), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre, les marques qui ont fait l’objet d’un enregistrement international ayant effet dans un État membre et dans la Communauté, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

25      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent

26      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêts du Tribunal du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec. p. II‑449, point 42, et la jurisprudence citée, et du 15 décembre 2010, Novartis/OHMI – Sanochemia Pharmazeutika (TOLPOSAN), T‑331/09, non encore publié au Recueil, point 23].

27      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que les marques antérieures étant protégées en Allemagne, l’appréciation du risque de confusion devait être fondée sur le public de ce pays. Elle a ajouté que le public pertinent était composé d’un public spécialisé (médecins et personnel médical spécialisé) ainsi que, en partie, des patients eux-mêmes, c’est-à-dire tous les consommateurs. Elle a ajouté que le niveau d’attention du public pertinent sera accru, qu’il s’agisse du public spécialisé ou des patients, étant donné que les produits en cause sont des médicaments.

28      La requérante conteste les décisions attaquées en soutenant que le public pertinent inclut le consommateur moyen qui ne fera pas preuve, selon elle, d’un degré élevé d’attention. Elle invoque l’arrêt de la Cour du 26 avril 2007, Alcon/OHMI (C‑412/05 P, Rec. p. I‑3569, points 56 et suivants) pour faire valoir en substance que, même si des intermédiaires peuvent influencer le choix du consommateur final, il est peu probable que ce dernier se souviendra des différences qui ne tiennent qu’à une seule syllabe.

29      À cet égard, il ressort de la jurisprudence que, d’une part, les professionnels de la médecine font preuve d’un degré élevé d’attention lors de la prescription de médicaments. Il en ressort, d’autre part, que, s’agissant des consommateurs finaux, dans les cas où des produits pharmaceutiques sont vendus sans ordonnance, il y a lieu de supposer que ces produits intéressent les consommateurs qui sont censés être raisonnablement bien informés, attentifs et avisés, dès lors que ces produits affectent leur état de santé, et que ces consommateurs sont moins susceptibles de confondre les diverses versions desdits produits. En outre, même dans l’hypothèse où une ordonnance médicale serait obligatoire, les consommateurs sont susceptibles de faire preuve d’un degré d’attention élevé lors de la prescription des produits en cause, eu égard au fait que ce sont des produits pharmaceutiques. Ainsi les médicaments, délivrés sous ordonnance médicale ou non, peuvent être regardés comme bénéficiant d’un degré d’attention accru de la part des consommateurs normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés [voir arrêt TOLPOSAN, point 26 supra, point 26, et la jurisprudence citée, et arrêt du Tribunal du 14 juillet 2011, ratiopharm/OHMI – Nycomed (ZUFAL), T‑222/10, non publié au Recueil, point 20].

30      Dès lors, il convient de considérer que, en l’espèce, le public pertinent, qu’il s’agisse du public spécialisé ou du consommateur moyen que sont les patients, est susceptible de faire preuve d’un niveau d’attention supérieur à la moyenne, comme l’a estimé à juste titre la chambre de recours.

31      L’arrêt Alcon/OHMI, point 28 supra, invoqué par la requérante n’est pas de nature à remettre en cause une telle conclusion. La Cour a considéré, dans ledit arrêt (point 61), que le rôle assuré par des intermédiaires, fussent-ils des professionnels de santé dont l’intervention préalable était requise pour la vente desdits produits aux consommateurs finaux, devait être partiellement mis en balance avec le degré d’attention élevé dont ces consommateurs étaient susceptibles de faire preuve, eu égard au fait que les produits en cause étaient des produits pharmaceutiques, lors de la prescription de ceux-ci et, partant, avec la capacité desdits consommateurs à conduire ces professionnels à tenir compte de leur perception des signes en cause et, en particulier, de leurs exigences ou préférences.

 Sur la comparaison des produits

32      Il n’est pas contesté entre les parties que les produits concernés sont identiques. Comme l’a relevé à juste titre la chambre de recours, les « médicaments contre les pathologies d’origine allergique », pour lesquels la marque opposée est protégée, font partie des « produits pharmaceutiques » visés par la marque demandée.

 Sur la comparaison des signes

33      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

34      La requérante critique l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle l’élément « allerg » affaiblirait le caractère distinctif de la marque antérieure dès lors qu’il pourrait évoquer le mot allemand « Allergie ». Selon la requérante, la segmentation après la lettre « g » n’a pas de sens pour le signe ALLERGODIL, dès lors que, toujours selon elle, personne ne prononcera ce signe de la manière suivante : « allerg-odil ». Cette segmentation serait en outre contraire au principe conduisant à prendre en compte l’impression d’ensemble produite par la combinaison des éléments qui composent les signes. La requérante invoque à cet égard l’arrêt du Tribunal du 14 octobre 2009, Ferrero/OHMI – Tirol Milch (TiMi KiNDERJOGHURT) (T‑140/08, Rec. p. II‑3941, point 68). Selon la requérante, le signe ALLERGODIL présente un caractère distinctif normal. À l’audience, la requérante a ajouté que la chambre de recours n’avait pas prouvé en quoi l’élément « allerg » pouvait évoquer le mot allemand « Allergie ».

35      À cet égard, il importe de relever que l’approche suivie par la chambre de recours dans la présente affaire n’est pas contraire à ce que le Tribunal a jugé dans l’arrêt TiMi KiNDERJOGHURT, point 34 supra. Il résulte, en effet, du point 68 de ce dernier que, s’il convient de tenir compte de l’impression d’ensemble produite par la combinaison des éléments qui composent les signes, cette prise en compte n’est pas incompatible avec un examen successif desdits éléments.

36      Ce faisant, la chambre de recours a pu constater à juste titre et de toute évidence que, dans le contexte des produits concernés par les signes en cause, l’élément « aller » ou « allerg » pouvait évoquer le mot allemand « Allergie », sans même être tenu de prouver plus amplement ou de retenir que le public pertinent devrait prononcer le signe ALLERGODIL de la manière suivante : « allerg-odil ».

37      S’agissant de la comparaison des signes, la chambre de recours a, en ce qui concerne la similitude visuelle, estimé que les signes en cause différaient par le nombre de lettres et donc par leur longueur. Bien qu’ils coïncident en leur partie initiale « aller » et en leur terminaison « il », cela ne saurait, selon elle, contribuer à les rendre similaires, dès lors que les lettres initiales « aller » seront comprises comme une référence descriptive à leur effet thérapeutique, de sorte que les signes, dans leur ensemble, présentent une similitude uniquement faible.

38      La requérante conteste les décisions attaquées en ce que, si la chambre de recours a certes procédé à une correcte césure des signes en mettant en évidence la partie « aller », commune aux signes concernés, cette partie serait toutefois le génitif du mot allemand « alle », ainsi que le nom d’un affluent de la Weser, et non un indicatif descriptif d’un effet curatif. La similitude de la première partie des signes, à savoir « aller », aurait dû conduire à admettre un haut degré de similitude visuelle, d’autant que le public accorderait en général un degré d’attention plus élevé au début des mots.

39      À cet égard, comme l’indique à juste titre l’OHMI, soutenu par l’intervenante, la chambre de recours a correctement relevé le nombre différent de lettres et de syllabes des signes en cause, ainsi que la différence de longueur entre les mots qui en résultent. Les signes en cause diffèrent donc sur cet aspect, même s’ils coïncident en leur partie initiale « aller » ainsi qu’en leur terminaison « il ».

40      La chambre de recours n’a pas commis une erreur d’appréciation en concluant à une similitude visuelle faible des signes en cause. En effet, même si la partie initiale des deux signes est identique, il apparaît peu vraisemblable que, dans un contexte de médicaments contre les pathologies d’origine allergique, le consommateur pense au génitif du mot « alle » ou à un cours d’eau, affluent de la Weser. La suite des premières lettres « a », « l », « l », « e » et « r », ainsi que « g » pour les marques antérieures, peut être davantage comprise comme une référence descriptive à l’effet thérapeutique des produits en rapport avec les signes en cause, ces lettres pouvant évoquer le mot allemand « Allergie ».

41      En ce qui concerne la similitude phonétique, la chambre de recours a considéré que les signes différaient par leur nombre de syllabes, ainsi que par le rythme vocal qui en résultait, et que la syllabe additionnelle « go » serait clairement perçue. Elle a ajouté que la coïncidence au niveau des deux premières syllabes était dépourvue de pertinence, que celles-ci seraient comprises comme une référence à la destination des médicaments en cause et que la similitude phonétique devait être considérée comme faible.

42      La requérante considère que, si la chambre de recours a attribué un caractère descriptif aux syllabes « aller », c’est uniquement pour nier le haut degré de similitude des signes en cause ; à supposer même que ces syllabes soient descriptives, ce que la requérante conteste, cela relèverait de la question relative au caractère distinctif des marques.

43      À cet égard, comme l’indiquent à juste titre l’OHMI et l’intervenante, la syllabe additionnelle « go » est frappante et crée une réelle différence entre les deux signes. La chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant que le nombre de syllabes (trois dans ALLERNIL et quatre dans ALLERGODIL) et le rythme vocal des deux signes en cause différaient, rendant faible la similitude phonétique de ceux-ci.

44      En ce qui concerne la similitude conceptuelle, la chambre de recours a retenu que la comparaison des deux signes n’était pas possible, ceux-ci étant des vocables fantaisistes.

45      La requérante considère également que les deux signes sont des termes fantaisistes, mais soutient qu’il y a une incohérence dans le raisonnement de la chambre de recours. Celle-ci ayant conclu, au stade des comparaisons phonétique et visuelle, que la partie « aller » avait un caractère descriptif, elle aurait dû aussi conclure, dans le cadre de la comparaison conceptuelle, que les signes en cause se composaient tous les deux également de cette même partie descriptive « aller ».

46      À cet égard, il convient d’indiquer que la chambre de recours a pu conclure à juste titre que la comparaison, sur le plan conceptuel, des deux signes en cause était impossible. En effet, il est constant que les deux signes en cause ont une signification fantaisiste, comme l’a relevé la chambre de recours. Toutefois, contrairement à ce que prétend la requérante, une telle conclusion ne saurait se révéler incompatible avec le fait que la chambre de recours a pu, par ailleurs, considérer une partie des deux signes comme ayant un caractère descriptif. En effet, cette considération ne porte que sur l’élément « aller » ou « allerg », alors que la conclusion sur la similitude conceptuelle vise les signes pris chacun dans son impression d’ensemble.

47      Il résulte de tout ce qui précède que, contrairement à ce que soutient la requérante, les signes en cause n’avaient pas un haut degré de similitude.

 Sur le risque de confusion

48      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 17, et du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 74].

49      La chambre de recours a considéré que l’appréciation globale excluait le risque de confusion, en dépit de l’identité des produits en cause, étant donné que l’élément verbal « aller » avait un caractère descriptif, non distinctif, et que les éléments identiques de la marque opposée et de la marque demandée se limitaient à la terminaison « il ».

50      La requérante soutient que, en cas d’identité de produits, il est nécessaire, pour exclure tout risque de confusion, que les signes présentent une plus grande différence que dans une situation où l’écart entre les produits est important. Or, dans les circonstances de l’espèce où l’identité des produits n’est pas contestée, la chambre de recours aurait dû conclure au risque de confusion, à l’instar de ce qui a été considéré dans la décision R 734/2008-1 de la première chambre de recours de l’OHMI, du 14 septembre 2009 (Alleris et Allernil). Selon la requérante, plusieurs décisions de l’OHMI démontrent que les décisions attaquées s’écartent de la pratique décisionnelle de l’OHMI, ce qui viole les principes d’égalité et de non-discrimination.

51      Il ressort de la jurisprudence que l’OHMI est tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union. Si, eu égard aux principes d’égalité de traitement et de bonne administration, l’OHMI doit prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, l’application de ces principes doit toutefois être conciliée avec le respect du principe de légalité. Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et, précisément, de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. C’est ainsi qu’un tel examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne relève pas d’un motif de refus [voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, C‑51/10 P, non encore publié au Recueil, points 73 à 77, et la jurisprudence citée, et arrêt du Tribunal du 22 novembre 2011, LG Electronics/OHMI (DIRECT DRIVE), T‑561/10, non publié au Recueil, point 31).

52      Or il apparaît que, dans la présente affaire, la chambre de recours a correctement pris en compte les circonstances de l’espèce. À cet égard, elle a, à juste titre, constaté l’identité des produits concernés en l’espèce, elle a aussi retenu une similitude très faible des signes en cause sur les plans phonétique et visuel et une impossibilité de comparaison de ces mêmes signes sur le plan conceptuel, comme il ressort des points 40, 41 et 46 ci-dessus. Dès lors, comme le soutient à juste titre l’OHMI, l’identité entre les produits désignés est compensée par un très faible degré de similitude entre les signes en cause et la chambre de recours a pu conclure à bon droit à l’absence de tout risque de confusion, d’autant que le degré d’attention du public est accru et qu’il n’est pas démontré que la marque antérieure présente un caractère distinctif élevé.

53      Il résulte de tout ce qui précède que le premier moyen soulevé par la requérante n’est pas fondé.

 Sur le moyen tiré de la violation de l’article 75 du règlement n° 207/2009

54      Par son second moyen, la requérante considère la motivation des décisions attaquées incomplète.

55      Elle soutient que, si la chambre de recours avait tenu compte d’un certain nombre d’arguments qu’elle avait exposés devant elle, elle aurait dû conclure à l’existence du risque de confusion. Notamment, la chambre de recours n’aurait pas reconnu, contrairement à ce qui est retenu par la jurisprudence, l’importance des éléments composant le début des signes, ainsi que celle de la perception globale de ces signes par le consommateur. La requérante réitère que les décisions attaquées révèlent des contradictions, en ce que, dans le cadre de la comparaison conceptuelle, la chambre de recours estime que les signes sont fantaisistes, alors que, dans le cadre des comparaisons visuelle et phonétique, elle considère que l’élément « aller » renvoie à l’allergie. Les décisions attaquées n’apporteraient aucune précision sur le revirement qu’elles opéreraient par rapport à la décision R 339/2006-1 de la première chambre de recours, du 7 novembre 2006, (ALLERGODIL et ALLERGOSLIT) et ne seraient pas motivées non plus en ce qui concerne l’argument selon lequel il est courant, dans le domaine des médicaments, d’utiliser des éléments descriptifs et de décrire les signes de telle façon qu’ils permettent de connaître la composition et/ou l’indication du produit, au moyen d’une juxtaposition de principes actifs reconnaissables et/ou d’indications relatives à l’application.

56      En vertu de l’article 75, première phrase, du règlement n° 207/2009, les décisions de l’OHMI doivent être motivées. Selon la jurisprudence, cette obligation a la même portée que celle consacrée par l’article 253 CE et son objectif est de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision [arrêts du Tribunal du 3 décembre 2003, Audi/OHMI (TDI), T‑16/02, Rec. p. II‑5167, points 87 et 88 ; du 28 avril 2004, Sunrider/OHMI – Vitakraft-Werke Wührmann et Friesland Brands (VITATASTE et METABALANCE 44), T‑124/02 et T‑156/02, Rec. p. II‑1149, points 72 et 73, et du 9 juillet 2008, Reber/OHMI – Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli (Mozart), T‑304/06, Rec. p. II‑1927, point 43].

57      Toutefois, il ne saurait être exigé des chambres de recours de fournir un exposé qui suivrait exhaustivement et un par un tous les raisonnements articulés par les parties devant elles. La motivation peut donc être implicite à condition qu’elle permette aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles la décision de la chambre de recours a été adoptée et à la juridiction compétente de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle (voir arrêt Mozart, point 56 supra, point 55, et la jurisprudence citée).

58      En l’espèce, la chambre de recours a d’abord constaté l’identité des produits. Elle a ensuite comparé les signes en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, pour conclure à des similitudes très faibles visuellement et phonétiquement et à une impossibilité de comparaison conceptuelle. Elle a enfin conclu à l’absence de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Ce raisonnement permet pleinement aux parties de comprendre les raisons pour lesquelles les décisions attaquées ont été adoptées et au Tribunal de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle. Les décisions attaquées ne sont donc entachées d’aucun défaut de motivation.

59      La chambre de recours n’avait pas à apporter des précisions supplémentaires quant au prétendu revirement qu’elle aurait, selon la requérante, opéré par rapport à la décision de la première chambre de recours du 7 novembre 2006 (point 55 ci-dessus), dès lors qu’elle a, à suffisance de droit, motivé sa décision en prenant en compte toutes les circonstances de l’espèce.

60      Par ailleurs, si l’autorité compétente doit, dans le cadre de l’instruction d’une demande d’enregistrement et dans la mesure où elle dispose d’informations à cet égard, tenir compte des décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens, elle ne saurait être liée par celles-ci (ordonnance de la Cour du 12 février 2009, Bild digital et ZVS, C‑39/08 et C‑43/08, non publiée au Recueil, point 17).

61      Il y a donc lieu de rejeter le second moyen invoqué par la requérante comme non fondé.

62      Il résulte de tout ce qui précède que les recours doivent être rejetés.

 Sur les dépens

63      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Les recours sont rejetés.

2)      Meda Pharma GmbH & Co. KG est condamnée aux dépens dans les affaires T-492/09 et T-147/10.

Truchot

Martins Ribeiro

Kanninen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 juin 2012.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.