Language of document : ECLI:EU:T:2011:576

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

6 octobre 2011(*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale BLAST – Marques communautaire et Benelux verbales antérieures BLAST – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009  – Caractère faiblement distinctif des marques antérieures »

Dans l’affaire T‑425/09,

Honda Motor Co. Ltd, établie à Tokyo (Japon), représentée par Me M. Graf, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. M. Ahlgren, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Hendrik Blok, demeurant à Oudenaarde (Belgique),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 16 juillet 2009 (affaire R 1097/2008-1), relative à une procédure d’opposition entre M. Hendrik Blok et Honda Motor Co. Ltd,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. A. Dittrich (rapporteur), président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. M. Prek, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 14 octobre 2009,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 27 janvier 2010,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 18 avril 2006, la requérante, Honda Motor Co. Ltd, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal BLAST.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 7 et 12 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 7 : « Moteurs hors-bord ; et leurs pièces structurelles et accessoires » ;

–        classe 12 : « Bateaux ; et leurs pièces structurelles et accessoires ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 40/2006, du 2 octobre 2006.

5        Le 29 décembre 2006, M. Hendrik Blok a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour une partie des produits couverts par celle-ci, à savoir les « moteurs hors-bord ; et leurs pièces structurelles et accessoires » relevant de la classe 7.

6        L’opposition était fondée sur les droits antérieurs suivants :

–        enregistrement communautaire n° 4706644 de la marque verbale BLAST désignant notamment les produits relevant de la classe 7 et correspondant à la description suivante : « systèmes d’échappement et pièces décoratives pour systèmes d’échappement pour voitures et motocyclettes » ;

–        enregistrement Benelux n°785875 de la marque verbale BLAST désignant notamment les produits relevant de la classe 7 et correspondant à la description suivante : « systèmes d’échappement et pièces décoratives pour systèmes d’échappement pour voitures et motocyclettes ».

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

8        Le 28 mai 2008, la division d’opposition a fait droit à l’opposition.

9        Le 24 juillet 2008, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009), contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 16 juillet 2009 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. En particulier, elle a considéré que l’identité des marques en conflit, alliée à la similitude entre les produits concernés, était suffisante pour créer un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, dans l’esprit du public pertinent, bien que le niveau d’attention de ce public soit élevé.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      La requérante invoque un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

14      La requérante fait valoir, d’une part, que les produits désignés par les marques en conflit ne sont pas similaires et, d’autre part, que le degré du caractère distinctif des marques antérieures et, partant, le degré de protection dont elles bénéficient ne sont que minimaux, ce qui ne permettrait pas de conclure à l’existence d’un risque de confusion.

15      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), i) et ii), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marques antérieures les marques communautaires et les marques enregistrées auprès de l’Office Benelux de la propriété intellectuelle, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

16      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

17      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

18      En l’espèce, la requérante ne conteste pas l’appréciation du public pertinent effectuée par l’OHMI dans la décision attaquée, selon laquelle, les moteurs hors‑bord et leurs pièces structurelles et accessoires, désignés par la marque demandée, et les systèmes d’échappement et pièces décoratives pour systèmes d’échappement pour voitures et motocyclettes, désignés par les marques antérieures, s’adressent non seulement à des professionnels mais également au grand public. Que l’acheteur soit un professionnel ou un particulier, les produits en question exigent que ce dernier ait une connaissance plus au moins détaillée des produits concernés et, par conséquent, que sont niveau d’attention soit élevé. En outre, les marques antérieures étant issues d’un enregistrement communautaire et d’un enregistrement Benelux, le public pertinent réside au Benelux.

 Sur la comparaison des produits

19      Selon une jurisprudence constante, afin d’apprécier la similitude entre les produits ou les services en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du Tribunal du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec. p. II‑2579, point 37, et la jurisprudence citée].

20      La requérante soutient que les produits désignés par la marque demandée, à savoir les « [m]oteurs hors-bord ; et leurs pièces structurelles et accessoires », ne sont pas semblables à ceux désignés par les marques antérieures, à savoir les « systèmes d’échappement et pièces décoratives pour systèmes d’échappement pour voitures et motocyclettes », étant donné, d’une part, qu’un système d’échappement ne ferait pas partie du moteur et, d’autre part, qu’à la différence des bateaux, les voitures et motocyclettes n’utiliseraient pas de moteurs hors-bord. Les produits désignés par les marques antérieures seraient donc conçus pour des voitures et des motocyclettes, tandis que les produits désignés par la marque demandée seraient destinés aux bateaux.

21      À titre liminaire, il y a lieu de relever que de par leur nature technique il existe une certaine connexité fonctionnelle entre les produits en cause, dans la mesure où tant les moteurs hors-bord que les systèmes d’échappement sont directement impliqués dans le fonctionnement d’un moteur à combustion interne et, de ce fait, dans la propulsion d’un véhicule. Il convient de préciser, à cet égard, que les moteurs hors-bord sont nécessairement munis d’un système d’échappement.

22      Le fait que les moteurs hors-bord désignés par la marque demandée et les systèmes d’échappement se rattachent à des catégories différentes de véhicules et qu’il n’existe donc pas de lien de complémentarité directe entre eux, n’a pas pour conséquence d’exclure le rapport de similitude entre ces produits, mais uniquement de réduire le degré de celle-ci.

23      Le rapport de similitude entre ces produits est, en revanche, renforcé par la proximité de leurs canaux de distribution et, plus particulièrement, par le fait notoire, qui est souligné à juste titre par la chambre de recours au point 24 de la décision attaquée et qui n’est pas contesté par la requérante, que certaines sociétés qui produisent des voitures et des motocyclettes, fabriquent également des moteurs hors-bord destinés aux bateaux.

24      Par conséquent, il y a lieu de retenir la conclusion de la chambre de recours selon laquelle il existe une certaine similitude entre les produits désignés par la marque demandée et ceux désignés par les marques antérieures, même si le degré d’une telle similitude est faible.

 Sur la comparaison des signes

25      Il est constant entre les parties que les signes en conflit sont identiques, ainsi que l’a retenu, à bon droit, la chambre de recours.

 Sur le risque de confusion

26      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 17, et arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 74].

27      En l’espèce, les signes en conflit sont identiques.

28      La requérante soutient néanmoins que les marques antérieures ne sont dotées que d’un caractère distinctif faible, et qu’elles sont descriptives pour les produits concernés, dans la mesure où le mot « blast », pris en tant que substantif, signifie en anglais « une explosion ou la vague destructrice d’air hautement comprimé se propageant vers l’extérieur » et par rapport aux produits en cause, il peut être compris comme signifiant simplement que les gaz de combustion sont rejetés dans l’atmosphère par le système d’échappement « with a blast » (dans une explosion). Par conséquent, il ne saurait être conclu qu’à l’absence de risque de confusion en raison de l’interdépendance des facteurs qui doivent être pris en considération.

29      À cet égard, il y a lieu de constater, tout d’abord, comme la chambre de recours l’a fait à juste titre au point 31 de la décision attaquée, qu’aucun élément ne permet de considérer que le public pertinent, dans les pays dans lesquels l’anglais n’est pas une langue officielle, connaît la signification du mot « blast » et qu’il est en mesure de comprendre le rapport entre ce mot et les systèmes d’échappement. Il en résulte que l’allégation visant à établir le caractère descriptif de ce mot par rapport aux produits concernés n’est pas étayée. Cette constatation ne saurait être remise en cause par la simple affirmation de la requérante selon laquelle le terme « blast » ferait partie du vocabulaire de base de la langue anglaise, qui serait parlée et comprise dans toute l’Union européenne, y compris au Benelux. Une telle affirmation ne repose sur aucun élément de preuve concret susceptible de démontrer, de manière claire et convaincante, la compréhension du rapport conceptuel entre le terme « blast » et le fonctionnement des systèmes d’échappement par le public pertinent, au Benelux et dans les autres États membres de l’Union dans lesquels l’anglais n’est pas une langue officielle.

30      Ensuite, à supposer même que la marque antérieure revête un caractère faiblement distinctif, cela n’empêcherait pas de constater l’existence d’un risque de confusion en l’espèce. En effet, si le caractère distinctif de la marque antérieure doit être pris en compte pour apprécier le risque de confusion, il n’est qu’un élément parmi d’autres intervenant lors de cette appréciation. Ainsi, même en présence d’une marque antérieure à caractère distinctif faible, il y a lieu de considérer qu’il peut exister un risque de confusion, notamment, en raison de l’identité des signes et de la similitude des produits ou des services visés.

31      Or, en l’espèce, il convient de rappeler, tout d’abord que les signes en conflit sont identiques et que c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu à l’existence d’une certaine similitude entre les produits désignés par la marque demandée et ceux désignés par les marques antérieures (voir point 24 ci-dessus). Force est de constater, ensuite, que, dans le cadre de l’interdépendance des facteurs pris en compte, le faible degré de similitude entre les produits concernés est, en l’espèce, compensé par l’identité des signes en conflit.

32      Dans ces circonstances, il y a lieu de conclure, conformément à la jurisprudence citée au point 26 ci-dessus, qu’il existe, en l’espèce, un risque de confusion entre la marque demandée et les marques antérieures.

33       Il résulte de tout ce qui précède, que le moyen unique de la requérante, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et, partant, le recours dans son intégralité, doivent être rejetés.

 Sur les dépens

34      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Honda Motor Co. Ltd est condamnée aux dépens.

Dittrich

Wiszniewska-Białecka

Prek

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 6 octobre 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.