Language of document : ECLI:EU:T:2011:349

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

12 juillet 2011 (*)

« Référé – Concurrence – Décision de la Commission infligeant une amende – Garantie bancaire – Demande de sursis à exécution – Préjudice financier – Absence de circonstances exceptionnelles – Défaut d’urgence »

Dans l’affaire T‑422/10 R,

Emme Holding SpA, établie à Pescara (Italie), représentée par Mes G. Visconti, E. Vassallo di Castiglione, M. Siragusa, M. Beretta et P. Ferrari, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. B. Gencarelli, V. Bottka et P. Manzini, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande de sursis à l’exécution de l’article 2 de la décision C (2010) 4387 final de la Commission, du 30 juin 2010, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/38.344 – de précontrainte), ainsi qu’une demande de dispense de l’obligation de constituer une garantie bancaire pour éviter un recouvrement immédiat de l’amende infligée en vertu de l’article 2 de ladite décision,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents du litige

1        La requérante, Emme Holding SpA, est une société établie à Pescara (Italie).

2        Par la décision C (2010) 4387 final, du 30 juin 2010, relative à une procédure d’application de l’article 101 TFUE et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/38.344 – Acier de précontrainte) (ci-après la « décision attaquée »), la Commission européenne a infligé à la requérante une amende d’un montant de 3,249 millions d’euros sanctionnant sa participation à une entente dans le secteur de l’acier de précontrainte.

3        L’article 2 de la décision attaquée, notifiée le 7 juillet 2010, impose le paiement de l’amende dans un délai de trois mois à compter de la date de notification. La lettre de notification précise cependant que, en cas de recours contre la décision attaquée devant le Tribunal, la requérante est tenue de garantir le recouvrement de l’amende soit par la constitution d’une garantie bancaire, soit par le paiement à titre provisoire de l’amende.

4        Le 30 septembre 2010, la Commission a adopté la décision C (2010) 6676 final modifiant la décision attaquée.

 Procédure et conclusions des parties

5        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 15 septembre 2010, la requérante a formé un recours visant à l’annulation de la décision attaquée et, à titre subsidiaire, à réduire le montant de l’amende que la Commission lui a infligée.

6        Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 6 octobre 2010, la requérante a introduit une demande visant à obtenir le sursis à l’exécution de la décision attaquée. Elle conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        prononcer le sursis à l’exécution – jusqu’au prononcé de la décision du Tribunal dans l’affaire principale – de la décision attaquée, en ce qu’elle lui inflige le paiement d’une amende ;

–        la dispenser de l’obligation de constituer une garantie bancaire au titre du paiement de l’amende ;

–        lui permettre, à titre subsidiaire, le paiement provisoire échelonné de l’amende, en au moins cinq tranches annuelles de même montant, sans intérêts et sans obligation de constituer une garantie bancaire pour les montants correspondants ;

–        lui permettre, à titre encore plus subsidiaire, le paiement provisoire échelonné de l’amende, en au moins cinq tranches annuelles de même montant, majorées des intérêts et sans obligation de constituer une garantie bancaire pour les montants correspondants ;

–        ordonner toute autre mesure jugée nécessaire ;

–        condamner la Commission aux dépens.

7        Dans ses observations écrites, déposées au greffe du Tribunal le 8 novembre 2010, la Commission conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        rejeter la demande en référé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

8        Par décision du 29 octobre 2010, le Tribunal (première chambre) a informé les parties qui avaient introduit un recours contre la décision attaquée qu’elles disposaient de la possibilité d’adapter leurs moyens et leurs conclusions pour tenir compte des modifications apportées par la décision C (2010) 6676 final.

9        Le 6 décembre 2010, la requérante a présenté ses observations, en précisant les modalités d’un éventuel paiement échelonné de l’amende.

10      Le 18 janvier 2011, la Commission a présenté ses observations relatives aux modalités de paiement de l’amende, en rejetant le plan proposé par la requérante.

 En droit

11      Il ressort d’une lecture combinée des articles 278 TFUE et 279 TFUE, d’une part, et de l’article 256, paragraphe 1, TFUE, d’autre part, que le juge des référés peut, s’il estime que les circonstances l’exigent, ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant le Tribunal ou prescrire les mesures provisoires nécessaires.

12      L’article 104, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal dispose que les demandes en référé doivent spécifier l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue l’octroi de la mesure provisoire à laquelle elles concluent. Ainsi, le sursis à exécution et les autres mesures provisoires peuvent être accordés par le juge des référés s’il est établi que leur octroi est justifié à première vue en fait et en droit (fumus boni juris) et qu’ils sont urgents en ce sens qu’il est nécessaire, pour éviter un préjudice grave et irréparable aux intérêts de la partie qui sollicite les mesures provisoires, qu’ils soient prononcés et produisent leurs effets dès avant la décision sur le recours principal. Le juge des référés procède également, le cas échéant, à la mise en balance des intérêts en présence (ordonnance du président de la Cour du 23 février 2001, Autriche/Conseil, C‑445/00 R, Rec. p. I‑1461, point 73). Ces conditions sont cumulatives, de sorte que les mesures provisoires doivent être rejetées dès lors que l’une d’elles fait défaut [ordonnance du président de la Cour du 14 octobre 1996, SCK et FNK/Commission, C‑268/96 P(R), Rec. p. I‑4971, point 30].

13      En outre, dans le cadre de cet examen d’ensemble, le juge des référés dispose d’un large pouvoir d’appréciation et reste libre de déterminer, au regard des particularités de l’espèce, la manière dont ces différentes conditions doivent être vérifiées ainsi que l’ordre de cet examen, dès lors qu’aucune règle de droit ne lui impose un schéma d’analyse préétabli pour apprécier la nécessité de statuer provisoirement [ordonnances du président de la Cour du 19 juillet 1995, Commission/Atlantic Container Line e.a., C‑149/95 P(R), Rec. p. I‑2165, point 23, et du 3 avril 2007, Vischim/Commission, C‑459/06 P(R), non publiée au Recueil, point 25].

14      Eu égard aux éléments du dossier, le juge des référés estime qu’il dispose de toutes les informations nécessaires pour statuer sur la présente demande en référé, sans qu’il soit utile d’entendre, au préalable, les parties en leurs explications orales.

15      Dans les circonstances du cas d’espèce, il convient d’examiner d’abord si la condition relative à l’urgence est remplie.

16      Selon une jurisprudence constante, le caractère urgent d’une demande en référé doit s’apprécier par rapport à la nécessité de statuer provisoirement, afin d’éviter qu’un préjudice grave et irréparable ne soit occasionné à la partie qui sollicite les mesures provisoires (ordonnance du président de la Cour du 18 octobre 1991, Abertal e.a./Commission, C‑213/91 R, Rec. p. I‑5109, point 18 ; ordonnances du président du Tribunal du 19 décembre 2001, Government of Gibraltar/Commission, T‑195/01 R et T‑207/01 R, Rec. p. II‑3915, point 95, et du 3 décembre 2002, Neue Erba Lautex/Commission, T‑181/02 R, Rec. p. II‑5081, point 82). Cependant, il n’est pas suffisant d’alléguer que l’exécution de l’acte dont le sursis est sollicité est imminente, mais il appartient à cette partie d’apporter la preuve sérieuse qu’elle ne saurait attendre l’issue de la procédure relative au recours principal, sans avoir à subir un préjudice de cette nature (ordonnance du président du Tribunal du 25 juin 2002, B/Commission, T‑34/02 R, Rec. p. II‑2803, point 85). Si l’imminence du préjudice ne doit pas être établie avec une certitude absolue, sa réalisation doit néanmoins, en particulier lorsqu’elle dépend de plusieurs facteurs, être prévisible avec un degré de probabilité suffisant. La partie qui sollicite les mesures provisoires demeure tenue de prouver les faits qui sont censés fonder la perspective d’un préjudice grave et irréparable [ordonnance du président de la Cour du 14 décembre 1999, HFB e.a./Commission, C‑335/99 P(R), Rec. p. I‑8705, point 67, et ordonnance Neue Erba Lautex/Commission, précitée, point 83].

17      Un préjudice d’ordre financier ne peut, sauf circonstances exceptionnelles, être regardé comme irréparable ou même difficilement réparable, dès lors qu’il peut, en règle générale, faire l’objet d’une compensation financière ultérieure [ordonnance du président de la Cour du 11 avril 2001, Commission/Cambridge Healthcare Supplies, C‑471/00 P(R), Rec. p. I‑2865, point 113, et ordonnance du président du Tribunal du 15 juin 2001, Bactria/Commission, T‑339/00 R, Rec. p. II‑1721, point 94]. Toutefois, une mesure provisoire se justifie s’il apparaît que, en l’absence de cette mesure, la partie qui sollicite les mesures provisoires se trouverait dans une situation susceptible de mettre en péril son existence avant l’intervention de la décision mettant fin à la procédure principale (ordonnance Neue Erba Lautex/Commission, précitée, point 84).

18      Il s’ensuit que, afin de prouver qu’elle encourt un préjudice grave et irréparable, la requérante est tenue de démontrer au juge des référés qu’il n’existe aucune autre solution que l’adoption, à titre exceptionnel, de mesures provisoires (voir, en ce sens, ordonnance du président du Tribunal du 12 mai 2010, Reagens/Commission, T‑30/10 R, non publiée au Recueil, point 33).

19      En l’espèce, il est constant que, dans la lettre par laquelle la Commission a notifié la décision attaquée à la requérante, elle a informé cette dernière qu’elle disposait de trois mois, à compter de la notification, pour payer l’amende. Cependant, la Commission a précisé que, si la requérante décidait d’introduire un recours visant à contester la légalité de cette décision devant le Tribunal, elle recouvrerait provisoirement l’amende ou exigerait la constitution d’une garantie bancaire couvrant le montant de la dette principale ainsi que les intérêts qui seraient dus.

20      Dans la mesure où il incombe à la requérante de démontrer au juge des référés qu’elle a exploré, sans succès, toutes les possibilités offertes lui permettant d’éviter la survenance d’un préjudice grave et irréparable et, dès lors, que seules les mesures provisoires sollicitées sont de nature à atteindre cet objectif, il découle de la lettre de notification que la requérante se devait, à tout le moins, d’examiner non seulement sa capacité à payer ladite amende, mais également à constituer une garantie bancaire.

21      Le contrôle de la satisfaction de la condition relative à l’urgence par le juge des référés consistant à vérifier la preuve de l’inexistence d’une autre solution que l’adoption de mesures provisoires, il convient, en l’espèce, d’examiner, premièrement, si la requérante a établi, à suffisance de droit, qu’il lui est impossible de recourir à une garantie bancaire et, deuxièmement, si, dans la mesure où cette impossibilité serait avérée, qu’il lui est impossible de payer le montant de l’amende infligée par la Commission dans la décision attaquée.

 Sur l’impossibilité de recourir à une garantie bancaire

22      En ce qui concerne l’impossibilité de recourir à une garantie bancaire, il convient de rappeler, d’une part, que la possibilité d’exiger la constitution d’une garantie bancaire correspond à une ligne de conduite générale et raisonnable de la Commission (ordonnance du président du Tribunal du 5 août 2003, IRO/Commission, T‑79/03 R, Rec. p. II‑3027, point 25) et, d’autre part, que la partie qui sollicite les mesures provisoires ne peut être dispensée de l’obligation de recourir à la constitution d’une garantie bancaire comme condition du non-recouvrement immédiat d’une amende infligée par la Commission qu’en présence de circonstances exceptionnelles [ordonnances du président de la Cour du 15 décembre 2000, Cho Yang Shipping/Commission, C‑361/00 P(R), Rec. p. I‑11657, point 88, et du 23 mars 2001, FEG/Commission, C‑7/01 P(R), Rec. p. I‑2559, point 44 ; ordonnance Reagens/Commission, précitée, point 42].

23      L’existence de telles circonstances exceptionnelles peut, en principe, être considérée comme établie lorsque la partie qui demande à être dispensée de l’obligation de constituer une garantie bancaire apporte la preuve qu’il lui est objectivement impossible de constituer une telle garantie (voir ordonnance IRO/Commission, précitée, point 26, et la jurisprudence citée) ou que sa constitution mettrait en péril son existence (voir, en ce sens, ordonnances du président du Tribunal du 21 décembre 1994, Buchmann/Commission, T‑295/94 R, Rec. p. II‑1265, point 24, et du 28 juin 2000, Cho Yang Shipping/Commission, T‑191/98 R II, Rec. p. II‑2551, point 43).

24      À cet égard, il y a lieu de relever que, afin de prouver qu’il lui serait impossible de constituer une garantie bancaire, la requérante n’a produit qu’un seul courrier électronique, en date du 5 octobre 2010, par lequel une compagnie d’assurances a manifesté, en des termes généraux et succincts, sans joindre aucun document explicatif, son refus d’octroyer la garantie sollicitée. En outre, la requérante soutient s’être vu également opposée un refus de la part d’une autre compagnie d’assurance, sans toutefois qu’aucun document joint à la requête puisse l’attester.

25      Or, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la pertinence des lettres de refus d’octroi d’une garantie bancaire doit être évaluée à la lumière de la situation économique objective de la partie qui sollicite les mesures provisoires indépendamment du nombre de ces lettres (ordonnance du président du Tribunal du 13 juillet 2006, Romana Tabacchi/Commission, T‑11/06 R, Rec. p. II‑2491, point 102 ; voir également, en ce sens, ordonnance Cho Yang Shipping/Commission, précitée, point 43).

26      Par ailleurs, il est également de jurisprudence constante que, pour apprécier si une entreprise est en mesure de constituer une garantie bancaire, il convient de tenir compte du groupe d’entreprises dont elle fait partie, pour ce qui est de la possibilité de fournir les sûretés que des banques pourraient réclamer [ordonnances du président de la Cour du 7 mars 1995, Transacciones Marítimas e.a./Commission, C‑12/95 P, Rec. p. I‑467, point 12, et du 30 avril 2010, Ziegler/Commission, C‑113/09 P(R), non publiée au Recueil, point 44 ; voir également ordonnance du président du Tribunal du 7 décembre 2001, Lior/Commission, T‑192/01 R, Rec. p. II‑3657, point 54, et la jurisprudence citée]. Une telle exigence tient, d’une part, à l’intérêt public qui s’attache à l’exécution des décisions de la Commission et à la sauvegarde des intérêts financiers de l’Union européenne et, d’autre part, aux avantages qui peuvent découler, pour ses actionnaires, des éventuels comportements anticoncurrentiels d’une société (voir ordonnance Ziegler/Commission, précitée, point 45, et la jurisprudence citée).

27      Cette approche repose sur l’idée que les intérêts objectifs de l’entreprise concernée ne présentent pas un caractère autonome par rapport à ceux des personnes, physiques ou morales, qui la contrôlent et que le caractère grave et irréparable du dommage allégué doit donc être apprécié au niveau du groupe que ces personnes composent. Cette coïncidence des intérêts justifie en particulier que l’intérêt de l’entreprise concernée à survivre ne soit pas apprécié indépendamment de l’intérêt que ceux qui la contrôlent portent à sa pérennité [ordonnance du président de la Cour du 14 décembre 1999, DSR‑Senator Lines/Commission, C‑364/99 P(R), Rec. p. I‑8733, point 50].

28      À cet égard, il convient de rappeler que le juge des référés a appliqué la jurisprudence relative aux groupes à des situations diverses, notamment aux sociétés unipersonnelles (ordonnance du président du Tribunal du 11 octobre 2007, MB Immobilien et MB System/Commission, T‑120/07 R, non publiée au Recueil, point 40), aux sociétés appartenant à deux personnes physiques (ordonnance Romana Tabacchi/Commission, précitée, point 102) ainsi qu’aux actionnaires minoritaires d’une société (ordonnance du président du Tribunal du 7 mai 2010, Almamet/Commission, T‑410/09 R, non publiée au Recueil, point 57, et du 24 janvier 2011, Rubinetterie Teorema/Commission, T‑370/10 R, non publiée au Recueil, points 39 à 42). Le fondement de cette application large de la jurisprudence relative aux groupes, qui englobe aussi les petites et moyennes entreprises, réside dans l’impossibilité de reconnaître un caractère autonome aux intérêts d’une société par rapport à ceux des personnes physiques ou morales qui la contrôlent (ordonnance Rubinetterie Teorema/Commission, précitée, point 41).

29      En l’espèce, aux points 35 et 44 de la demande en référé, la requérante déclare être une « petite entreprise » avec un « actionnariat familial ». En outre, il convient de relever que la requérante reconnaît elle-même son appartenance à un groupe, au point 44 de ses observations aux observations de la Commission. Il peut également être déduit du bilan 2009, annexé à la demande en référé, que la requérante contrôle le capital de Trafilerie Meridionali Srl et celui de Steel Tiger KFT. L’appartenance de la requérante à un groupe découle, en outre, d’un rapport technique, annexé à la demande en référé et préparé par un tiers, M. R., spécialiste en gestion d’entreprise, selon lequel « il gruppo é inquadrabile quale realtà di medio piccole dimensioni » (le groupe a une dimension de petite à moyenne taille).

30      Il s’ensuit que, afin d’établir si la requérante a, à suffisance de droit, démontré qu’il lui serait impossible de fournir une garantie bancaire, le juge des référés doit également prendre en compte la capacité contributive de son actionnariat.

31      Or, la demande en référé ne contient aucune indication quant aux actionnaires, personnes physiques ou morales, de la requérante. À ce propos, il convient de relever que la requérante se limite, respectivement, au point 35 de la demande en référé et au point 37 de ses observations sur les observations de la Commission, à soutenir être « une entreprise familiale, dont les associés ne disposent pas d’autres ressources significatives qui pourraient être investies dans l’entreprise » et que « [s]es actionnaires […] ne sont pas en mesure d’effectuer de tels versements, en raison de leurs faibles disponibilités financières ».

32      Il y a lieu d’observer que la seule affirmation de la requérante quant aux ressources financières de son actionnariat ne saurait suffire à la production d’une image fidèle et globale de sa situation financière dans le cadre de l’examen que le juge des référés est amené à effectuer. En effet, selon une jurisprudence bien établie, la requérante aurait dû, à cette fin, fournir des indications concrètes et précises, étayées par des documents détaillés certifiés (voir, en ce sens, ordonnances du président du Tribunal du 14 décembre 2007, Portugal/Commission, T‑387/07 R, non publiée au Recueil, points 30 et 31 ; du 18 mars 2008, Aer Lingus Group/Commission, T‑411/07 R, Rec. p. II‑411, points 118 et 122, et du 13 juillet 2009, Sniace/Commission, T‑238/09 R, non publiée au Recueil, points 25 et 26).

33      Par ailleurs, ces indications concrètes et précises auraient dû ressortir du texte même de la demande en référé [ordonnances Ziegler/Commission, précitée, point 13, et Reagens/Commission, précitée, point 50].

34      Force est de constater que la requérante n’a pas pris en compte, dans son analyse visant à démontrer son incapacité à constituer une garantie bancaire, les possibilités de soutien financier qu’aurait pu offrir son actionnariat. Plus particulièrement, la requérante n’a fourni aucune explication quant à l’absence d’intérêt de son actionnariat à assurer sa pérennité, en participant aux efforts en vue de la constitution d’une telle garantie, ni produit aucune preuve de son éventuelle incapacité contributive.

35      Il s’ensuit que la requérante a fourni des informations incomplètes quant à sa situation financière, ne permettant pas au juge des référés de disposer d’une image fidèle et globale de cette situation nécessaire à l’exercice de son contrôle. La réalité de la prétendue impossibilité objective de constituer une garantie bancaire ne saurait donc être établie.

36      En ce qui concerne le risque de mise en péril de l’existence de la requérante du seul fait de la constitution d’une garantie bancaire, il suffit de relever que, dans la mesure où celle-ci a fourni des informations incomplètes quant à sa situation financière, ne permettant pas au juge des référés de disposer d’une image fidèle et globale de cette situation, ce dernier ne peut pas non plus conclure à l’existence de circonstances exceptionnelles à cet égard.

37      En tout état de cause, il convient de constater que la requérante n’a pas démontré à suffisance de droit que la seule constitution de la garantie bancaire pourrait compromettre son existence. En effet, au point 32 de la demande en référé, la requérante fait valoir que la constitution d’une garantie bancaire entraînerait sans aucun doute le retrait ou la réduction des lignes de crédit octroyées par les banques. Or, il découle du plan de financement conclu entre la requérante et les banques et, notamment, des articles 6 et 10 dudit plan, que les banques ont la faculté de résilier l’accord dans le cas où la requérante ne respecte pas certains paramètres financiers et que certains événements propres à avoir une incidence négative sur la situation patrimoniale, financière et économique de la requérante entraînent la perte du bénéfice des termes du contrat ainsi que l’obligation d’un remboursement immédiat. S’agissant de la perte du bénéfice des termes du contrat, il suffit de relever que, en l’absence de renseignements sur la situation globale du groupe de la requérante et la capacité contributive de son actionnariat, le juge des référés ne saurait conclure à un risque de mise en péril de l’existence de la requérante du seul fait de la constitution d’une garantie bancaire. En ce qui concerne la résiliation du plan de financement par les banques en cas de non-respect des paramètres financiers établis à l’article 6 du plan de financement, il y a lieu d’observer que, en cas le non-respect de ces derniers, l’exercice par les banques de leur droit de résiliation n’est qu’une simple faculté, de sorte qu’une telle résiliation n’apparaît que potentielle. Il en découle que la requérante n’a pas apporté la preuve de l’imminence du préjudice, laquelle, bien qu’elle ne doive pas être établie avec une certitude absolue, doit être prévisible avec un degré de probabilité suffisante, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

 Sur l’impossibilité de payer le montant de l’amende

38      À titre liminaire, il convient de rappeler que la question de la possibilité pour la requérante de constituer ou non une garantie bancaire constitue indéniablement un élément essentiel, qui devait ressortir du corps même de la demande en référé (ordonnance Reagens/Commission, précitée, point 52).

39      Or, en l’espèce, cette possibilité n’a pas fait l’objet d’un examen sérieux et complet par la requérante à la date de l’introduction de la demande en référé.

40      Dès lors, il n’est pas nécessaire d’examiner la demande de dispense de paiement de l’amende dans la mesure où, en ne recherchant pas si elle pouvait éviter la survenance d’un préjudice grave et irréparable par la constitution d’une garantie bancaire, la requérante n’a pas démontré que seules les mesures provisoires sollicitées étaient de nature à éviter un tel préjudice. La vérification de l’impossibilité de paiement de l’amende infligée par la Commission dans la décision attaquée ne serait en effet justifiée que si la demande de dispense de l’obligation de constituer une garantie bancaire avait été accueillie.

41      En ce qui concerne, enfin, les troisième et quatrième chefs de conclusions, formulés à titre subsidiaire, la requérante demande, en substance, au juge des référés qu’il lui soit permis d’effectuer un paiement provisoire échelonné de l’amende. La requérante justifie la nécessité de ces mesures par son incapacité à payer ladite amende. Cependant, au regard de ce qui précède, force est de constater que, en ne fournissant pas des informations complètes quant à sa situation financière, la requérante n’a pas apporté la preuve d’une telle incapacité. Dès lors, il y a également lieu de rejeter les mesures sollicitées à titre subsidiaire par la requérante.

42      Il résulte de tout ce qui précède que la demande en référé doit être rejetée pour défaut d’urgence, sans qu’il soit besoin de vérifier si les autres conditions d’octroi des mesures provisoires sollicitées, notamment celle de l’existence d’un fumus boni juris, sont remplies.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      La demande en référé est rejetée.

2)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 12 juillet 2011.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’italien.