Language of document : ECLI:EU:T:2012:156

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

27 mars 2012 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative AJ AMICI JUNIOR – Marque nationale figurative antérieure AJ ARMANI JEANS – Marque nationale verbale antérieure ARMANI JUNIOR – Motif relatif de refus – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑420/10,

Giorgio Armani SpA, établie à Milan (Italie), représentée par Me M. Rapisardi, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Mannucci, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Annunziata Del Prete, demeurant à Naples (Italie), représentée par MR. Bocchini, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 8 juillet 2010 (affaire R 1360/2009‑2), relative à une procédure d’opposition entre Giorgio Armani SpA et Mme Annunziata Del Prete,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood (rapporteur), président, F. Dehousse et J. Schwarcz, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 17 septembre 2010,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 13 janvier 2011,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 6 janvier 2011,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 27 septembre 2007, l’intervenante, Mme Annunziata Del Prete, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif reproduit ci‑après :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 9, 25 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Appareils et instruments optiques, verres, montures, étuis, cordons et chaînettes pour lunettes ; lunettes de soleil et correctrices ; pince‑nez ; verres de contact et tous accessoires de lunettes compris dans cette classe » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie » ;

–        classe 35 : « Publicité ; gestion des affaires commerciales, en particulier services de franchisage ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 9/2008, du 25 février 2008.

5        Le 12 mai 2008, la requérante, Giorgio Armani SpA, a formé opposition au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque communautaire pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur les droits antérieurs suivants :

–        la marque italienne figurative enregistrée le 10 octobre 2003, sous le numéro 912114, notamment pour des appareils et instruments optiques relevant de la classe 9 au sens de l’arrangement de Nice, des vêtements, chaussures et chapellerie relevant de la classe 25 au sens de l’arrangement de Nice et des services de publicité et de gestion des affaires commerciales relevant de la classe 35 au sens de l’arrangement de Nice, reproduite ci-après :

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–        la marque italienne verbale ARMANI JUNIOR enregistrée le 20 mars 2006, sous le numéro 998554, notamment pour des vêtements, chaussures et chapellerie relevant de la classe 25 au sens de l’arrangement de Nice et des services de publicité et de gestion d’affaires commerciales relevant de la classe 35 au sens de l’arrangement de Nice.

7        Par décision du 20 août 2009, la division d’opposition a fait droit à l’opposition dans son intégralité. Cette décision a fait l’objet d’un recours auprès de l’OHMI, formé par l’intervenante le 12 novembre 2009 au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009.

8        Par décision du 8 juillet 2010 (ci-après la « décision attaquée »), la deuxième chambre de recours a fait droit au recours en annulant la décision de la division d’opposition et en autorisant l’enregistrement de la marque demandée.

9        La chambre de recours a estimé que les produits couverts par la marque demandée relevant des classes 9 et 25 au sens de l’arrangement de Nice ciblent, dans le territoire pertinent, à savoir l’Italie, le consommateur moyen raisonnablement attentif et avisé, qui est pourtant particulièrement attentif s’agissant des articles de mode. Les services relevant de la classe 35 ciblent un public de professionnels actifs dans divers secteurs commerciaux et prêtant une attention particulière lors de l’acquisition des services en cause. La chambre de recours a également souligné que la conclusion de la division d’opposition relative à l’identité des produits couverts par les signes en conflit n’était pas mise en cause par les parties.

10      En ce qui concerne la similitude des signes en conflit, la chambre de recours a considéré que le sigle AJ constitue, en raison de sa position et de sa taille, l’élément dominant au sein de la marque demandée, sans pour autant éclipser les éléments « amici junior » au sein de la marque demandée. Ainsi, le consommateur percevra les termes « amici junior » et « armani jeans », ces derniers occupant une place aussi importante que le sigle AJ au sein de la marque figurative antérieure, en tant qu’indicatifs de l’origine commerciale des produits et des services couverts par les signes en conflit. Compte tenu également des autres différences portant sur la représentation des signes en conflit, la chambre de recours a conclu que ces derniers présentent une faible similitude visuelle.

11      S’agissant de la comparaison des signes en conflit sur le plan phonétique, la chambre de recours a estimé que ceux-ci n’ont que le sigle AJ en commun, leurs autres syllabes étant différentes malgré certains sons vocaliques ou consonantiques communs. Il en résulterait une similitude phonétique limitée.

12      S’agissant de la comparaison des signes en conflit sur le plan conceptuel, la chambre de recours a relevé que les dénominations auxquelles renvoient les sigles AJ évoquent des concepts tout à fait différents, à plus forte raison par rapport aux produits de la classe 35, pour lesquels les termes « jeans » et « junior » n’ont pas de caractère évocateur.

13      Sur la base de ces considérations, la chambre de recours a conclu que les différences visuelles, phonétiques et conceptuelles parmi les signes en conflit l’emportent sur les similitudes visuelles et phonétiques dues au sigle AJ que les marques en question ont en commun. Ainsi, les différences caractérisant les marques en conflit ont pour conséquence que le consommateur de référence, qui prête une attention particulière lors de l’acquisition des produits ou des services cités au point 3 ci-dessus, ne croira pas que ces produits ou ces services proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Cette appréciation n’est pas remise en cause, selon la chambre de recours, par le fait que les produits et les services couverts par les signes en conflit sont identiques.

14      Ces conclusions seraient d’autant plus justifiées au regard de la marque ARMANI JUNIOR, qui aurait encore moins de points communs avec la marque demandée.

15      Quant au caractère distinctif élevé résultant de la renommée des marques antérieures, la chambre de recours a observé que la renommée en question serait liée au nom Armani, point principal de différenciation visuelle, phonétique et conceptuelle parmi les signes en conflit. En outre, l’opposition ayant été fondée exclusivement sur l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, la chambre de recours ne pourrait pas examiner si les conditions d’application de l’article 8, paragraphe 5, du même règlement étaient réunies.

 Conclusions des parties

16      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        accueillir l’opposition ;

–        rejeter la demande de marque communautaire ;

–        ordonner à l’OHMI d’exécuter la décision de refuser l’enregistrement de la marque demandée ;

–        condamner l’OHMI et Mme del Prete aux dépens de l’ensemble de la procédure ;

–        liquider les dépens encourus par elle au titre de l’article 91, sous b), du règlement de procédure du Tribunal.

17      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

18      À l’appui de son recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

19      Il convient de relever d’emblée que, dans le cadre d’un recours introduit devant le juge de l’Union contre la décision d’une chambre de recours de l’OHMI, ce dernier est tenu, conformément à l’article 65, paragraphe 6, du règlement n° 207/2009, de prendre les mesures que comporte l’exécution de l’arrêt du juge de l’Union. Dès lors, il n’appartient pas au Tribunal d’adresser des injonctions à l’OHMI, auquel il incombe de tirer les conséquences du dispositif et des motifs des arrêts du juge de l’Union. Partant, le quatrième chef de conclusion de la requérante, tendant à ce que le Tribunal ordonne à l’OHMI d’exécuter la décision de refuser l’enregistrement de la marque demandée, est irrecevable.

20      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

21      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

22      En ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, l’appréciation globale du risque de confusion doit être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [voir arrêt du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips-Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, Rec. p. II‑4335, point 47, et la jurisprudence citée].

23      L’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants. Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant. Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci. En outre, le fait qu’un élément ne soit pas négligeable ne signifie pas qu’il soit dominant, de même que le fait qu’un élément ne soit pas dominant n’implique nullement qu’il soit négligeable [voir arrêt du Tribunal du 3 septembre 2010, Companhia Muller de Bebidas/OHMI – Missiato Industria e Comercio (61 A NOSSA ALEGRIA), T‑472/08, non encore publié au Recueil, point 48, et la jurisprudence citée].

24      En l’espèce, la requérante fait valoir que, en raison de sa taille, le sigle AJ est visuellement dominant au sein de la marque demandée, les termes courants « amici » et « junior » n’y ajoutant rien de distinctif et pouvant être associés aux marques de la requérante. En outre, l’intervenante chercherait par sa demande à tirer indûment profit des marques célèbres de la requérante en présentant son signe comme faisant partie de la même famille de marques. Cette notoriété accroîtrait le risque de confusion entre les deux signes.

25      Sur le plan phonétique, la requérante soutient que les sigles AJ sont prononcés en italien comme « a i lunga », si bien que les deux signes auraient leurs quatre premières syllabes en commun.

26      Dans ce contexte, le sigle AJ, qui, pour le chef du public pertinent, renverrait directement aux différentes marques Armani, définirait l’impression d’ensemble produite par les deux signes, si bien que le recours aux termes « amici junior » et « armani jeans » afin de définir la signification dudit sigle ne serait pas déterminant. La reconnaissance étendue de ce sigle accroîtrait son caractère distinctif et amènerait le consommateur moyen à associer les produits de l’intervenante à ceux de la requérante.

27      L’OHMI conteste les appréciations de la requérante et fait valoir que les similitudes visuelle et phonétique entre les signes en conflit sont faibles et que ces derniers sont différents sur le plan conceptuel, si bien qu’un risque de confusion devait être exclu. L’intervenante, pour sa part, conclut à l’absence de similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle entre les signes en conflit.

28      En l’espèce, comme le relève la chambre de recours (voir point 10 ci-dessus), le sigle AJ occupe visuellement une position dominante au sein de la marque demandée, alors que, contrairement à ce que fait valoir la requérante, les termes « amici junior » ne sont pas négligeables au sein de celle-ci. En outre, le sigle AJ occupe visuellement, en raison de la taille de sa police au sein de la marque antérieure, une place au moins aussi importante que les termes « armani jeans ». Cette appréciation n’est pas infirmée par le fait que le sigle en question est représenté en caractères d’imprimerie ordinaires, puisque les termes « armani jeans » sont représentés de la même manière. En outre, la stylisation du sigle AJ au sein de la marque demandée est proche de celle utilisée pour le sigle AJ au sein de la marque figurative antérieure. De surcroît, dans les deux représentations le côté gauche de la lettre majuscule « A » est plus mince que le côté droit, ladite lettre reposant sur une « base » formée par deux traits.

29      Il convient d’ajouter que l’existence d’une similitude entre deux marques ne présuppose pas que leur composante commune constitue l’élément dominant dans l’impression d’ensemble produite par la marque demandée. Il est suffisant à cet égard que ladite composante commune ne soit pas négligeable (arrêt de la Cour du 2 septembre 2010, Klein Trademark Trust/OHMI, C‑254/09 P, non encore publié au Recueil, point 56), ce qui est certainement le cas du sigle AJ au sein de la marque demandée et de la marque figurative antérieure. Ainsi, compte tenu de la taille du sigle AJ au sein de la marque demandée et du poids inférieur mais non négligeable des termes « amici junior », il y a lieu de conclure, contrairement à ce qu’a considéré la chambre de recours et le fait valoir l’OHMI, que les deux signes présentent une similitude visuelle moyenne et non une faible similitude.

30      Sur le plan phonétique, il y a lieu de relever que, quelle que soit la prononciation du sigle AJ, qui sera majoritairement retenue par le public pertinent (« a dzei », selon la chambre de recours, ou « a i lunga », selon la requérante), les lettres « A » et « J » sont présentes non seulement au sein du sigle en cause, mais aussi au début de chacun des mots qui l’accompagnent au sein de la marque demandée et de la marque figurative antérieure. Néanmoins, ainsi que l’a estimé la chambre de recours et le fait valoir l’OHMI, les différences phonétiques entre les termes « armani jeans », d’une part, et « amici junior », d’autre part, concernent toutes les syllabes à l’exception de la première syllabe des mots « armani » et « amici ». Il en résulte, comme la chambre de recours l’a relevé, qu’il existe une similitude phonétique, quoique faible, entre les signes en conflit.

31      Sur le plan conceptuel, la requérante ne formule pas d’argumentation à l’encontre de l’appréciation de la chambre de recours, selon laquelle les termes « amici junior » évoquent un concept différent de celui évoqué par les termes « armani jeans ».

32      S’agissant de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de relever que, comme il résulte du point 33 de la décision attaquée, la requérante a invoqué devant la chambre de recours la renommée des « marques ARMANI », dont feraient partie les marques antérieures. Cet argument est également avancé par la requérante devant le Tribunal tant dans le cadre de l’appréciation de la similitude visuelle que dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion.

33      À cet égard, il y a lieu de rappeler que la renommée d’une marque est un élément qui doit être pris en compte pour apprécier si la similitude entre les signes ou entre les produits et les services est suffisante pour donner lieu à un risque de confusion [arrêt du Tribunal du 27 octobre 2005, Éditions Albert René/OHMI – Orange (MOBILIX), T‑336/03, Rec. p. II‑4667, point 84]. En effet, la renommée d’une marque antérieure peut contribuer au caractère distinctif élevé de celle-ci et, dès lors, augmenter le risque de confusion entre cette marque et une marque demandée [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 4 novembre 2003, Díaz/OHMI – Granjas Castelló (CASTILLO), T‑85/02, Rec. p. II‑4835, point 44].

34      Ainsi qu’il résulte du point 33 de la décision attaquée, la chambre de recours a estimé, tout en déclarant ne pas avoir examiné le matériel probatoire soumis par la requérante à cet égard, que le caractère distinctif élevé des marques antérieures invoquées à l’appui de l’opposition est lié à l’élément « armani », qui constitue le principal élément de différenciation visuelle, phonétique et conceptuelle des marques en conflit. Toutefois, la chambre de recours n’a pas exposé sur quel fondement elle a pu arriver à cette conclusion. Or, un tel exposé était d’autant plus essentiel que, comme il résulte du même point de la décision attaquée, la requérante a fait valoir la renommée des marques invoquées à l’appui de l’opposition dans leur ensemble et non en tant qu’elles comportent le terme « armani ».

35      Dans ces conditions, et compte tenu de l’erreur constatée s’agissant du degré de similitude visuelle entre la marque demandée et la marque figurative antérieure, la décision attaquée doit être annulée.

36      S’agissant des deuxième et troisième chefs de conclusion de la requérante, tenant à la réformation de la décision attaquée, il convient de relever que, bien que l’article 65, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009 habilite le Tribunal à réformer les décisions des chambres de recours, cette possibilité est, en principe, limitée aux situations dans lesquelles l’affaire est en état d’être jugée [arrêt du Tribunal du 10 juin 2008, Gabel Industria Tessile/OHMI – Creaciones Garel (GABEL), T‑85/07, Rec. p. II‑823, point 28]. En l’espèce, le fait que la chambre de recours n’ait pas examiné le matériel probatoire présenté par la requérante au soutien de son argument relatif à la renommée des marques invoquées à l’appui de l’opposition impliquerait que le Tribunal apprécie pour la première fois ledit matériel. Or, un tel exercice n’est pas couvert par l’article 65, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009.

 Sur les dépens

37      La requérante demande au Tribunal de condamner l’OHMI et l’intervenante aux dépens de l’ensemble de la procédure. Elle demande également à ce que soient liquidés en sa faveur les dépens de la procédure devant le Tribunal.

38      S’agissant de la première demande, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 136, paragraphe 2, du règlement de procédure, les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure devant la chambre de recours sont considérés comme dépens récupérables. Il n’en va toutefois pas de même des frais exposés aux fins de la procédure devant la division d’opposition. Partant, la demande de la requérante tendant à ce que l’OHMI et l’intervenante soient condamnés aux dépens de l’ensemble de la procédure doit être déclarée irrecevable dans la mesure où cette demande vise également la procédure d’opposition.

39      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens. L’OHMI et l’intervenante ayant succombé, il y a lieu de les condamner à supporter, outre leurs propres dépens, les dépens de la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 8 juillet 2010 (affaire R 1360/2009‑2) est annulée.

2)      L’OHMI et Mme Annunziata Del Prete supporteront chacun la moitié des dépens exposés par Giorgio Armani SpA devant la chambre de recours.

3)      L’OHMI et Mme Del Prete supporteront chacun, outre leurs propres dépens, la moitié des dépens exposés par Giorgio Armani devant le Tribunal.

Forwood

Dehousse

Schwarcz

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 mars 2012.

Signatures


* Langue de procédure : l’italien.