Language of document : ECLI:EU:T:2015:295

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

20 mai 2015 (*)

« Dumping – Importations d’acide oxalique originaire de l’Inde et de Chine – Droit antidumping définitif – Industrie communautaire – Détermination du préjudice – Article 9, paragraphe 4, article 14, paragraphe 1, et article 20, paragraphes 1 et 2, du règlement (CE) n° 1225/2009 – Obligation de motivation – Droit de présenter des observations – Article 20, paragraphe 5, du règlement n° 1225/2009 »

Dans l’affaire T‑310/12,

Yuanping Changyuan Chemicals Co. Ltd, établie à Yuan Ping (Chine), représentée par Me V. Akritidis, avocat,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par M. J.-P. Hix, en qualité d’agent, assisté initialement de Mme N. Chesaites, barrister, et Me G. Berrisch, avocat, puis de Me D. Geradin, avocat,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission européenne, représentée par M. M. França et Mme A. Stobiecka-Kuik, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation du règlement d’exécution (UE) n° 325/2012 du Conseil, du 12 avril 2012, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations d’acide oxalique originaire de l’Inde et de la République populaire de Chine (JO L 106, p. 1),

LE TRIBUNAL (deuxième chambre),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro (rapporteur), président, MM. S. Gervasoni et L. Madise, juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 15 juillet 2014,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

 Droit de l’OMC

1        L’article VI.1 de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) dispose que « [l]es parties contractantes reconnaissent que le dumping, qui permet l’introduction des produits d’un pays sur le marché d’un autre pays à un prix inférieur à leur valeur normale, est condamnable s’il cause ou menace de causer un dommage important à une branche de production établie d’une partie contractante ou s’il retarde de façon importante la création d’une branche de production nationale […] ».

2        L’accord sur la mise en œuvre de l’article VI du GATT de 1994 (JO L 336, p. 103, ci-après l’« accord antidumping ») figure à l’annexe 1 A de l’accord instituant l’Organisation mondiale du commerce (OMC) (JO 1994, L 336, p. 3).

3        L’article 1er de l’accord antidumping dispose :

« Une mesure antidumping sera appliquée dans les seules circonstances prévues à l’article VI du GATT [...] et à la suite d’enquêtes ouvertes et menées en conformité avec les dispositions du présent accord [...] »

4        Aux termes de l’article 3.1 de l’accord antidumping, « [l]a détermination de l’existence d’un dommage aux fins de l’article VI du GATT [...] se fondera sur des éléments de preuve positifs et comportera un examen objectif a) du volume des importations faisant l’objet d’un dumping et de l’effet des importations faisant l’objet d’un dumping sur les prix des produits similaires sur le marché intérieur, et b) de l’incidence de ces importations sur les producteurs nationaux de ces produits ».

5        L’article 3.4 de l’accord antidumping prévoit ce qui suit :

« L’examen de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping sur la branche de production nationale concernée comportera une évaluation de tous les facteurs et indices économiques pertinents qui influent sur la situation de cette branche, y compris les suivants : diminution effective et potentielle des ventes, des bénéfices, de la production, de la part de marché, de la productivité, du retour sur investissement, ou de l’utilisation des capacités ; facteurs qui influent sur les prix intérieurs ; importance de la marge de dumping ; effets négatifs, effectifs et potentiels, sur le flux de liquidités, les stocks, l’emploi, les salaires, la croissance, la capacité de se procurer des capitaux ou l’investissement [ ; c]ette liste n’est pas exhaustive, et un seul ni même plusieurs de ces facteurs ne constitueront pas nécessairement une base de jugement déterminante. »

6        L’article 4.1 de l’accord antidumping est ainsi libellé :

« Aux fins du présent accord, l’expression ‘branche de production nationale’ s’entendra de l’ensemble des producteurs nationaux de produits similaires ou de ceux d’entre eux dont les productions additionnées constituent une proportion majeure de la production nationale totale de ces produits […] »

7        L’article 4.3 de l’accord antidumping se lit comme suit :

« Dans les cas où deux pays ou plus sont parvenus […] à un degré d’intégration tel qu’ils présentent les caractéristiques d’un marché unique, unifié, la branche de production de l’ensemble de la zone d’intégration sera considérée comme constituant la branche de production nationale visée au paragraphe 1. »

8        Les articles 6.6, 6.8 et 6.9 de l’accord antidumping disposent :

« 6.6 Sauf dans les circonstances prévues au paragraphe 8, les autorités s’assureront au cours de l’enquête de l’exactitude des renseignements fournis par les parties intéressées sur lesquels leurs constatations sont fondées.

[…]

6.8 Dans les cas où une partie intéressée refusera de donner accès aux renseignements nécessaires ou ne les communiquera pas dans un délai raisonnable, ou entravera le déroulement de l’enquête de façon notable, des déterminations préliminaires et finales, positives ou négatives, pourront être établies sur la base des données de fait disponibles […]

6.9 Avant d’établir une détermination finale, les autorités informeront toutes les parties intéressées des faits essentiels examinés qui constitueront le fondement de la décision d’appliquer ou non des mesures définitives. Cette divulgation devrait avoir lieu suffisamment tôt pour que les parties puissent défendre leurs intérêts. »

9        L’article 9.1 de l’accord antidumping dispose :

« […] Il est souhaitable [...] que le droit [de dumping] soit moindre que la marge [de dumping] si ce droit moindre suffit à faire disparaître le dommage causé à la branche de production nationale. »

 Droit de l’Union européenne

10      La réglementation antidumping de base est constituée par le règlement (CE) n° 1225/2009 du Conseil, du 30 novembre 2009, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO L 343, p. 51, rectificatif JO 2010, L 7, p. 22, ci-après le « règlement de base »), lequel a remplacé le règlement (CE) n° 384/96 du Conseil, du 22 décembre 1995, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO 1996, L 56, p. 1), tel que modifié.

11      Selon l’article 1er, paragraphe 1, du règlement de base :

« Peut être soumis à un droit antidumping tout produit faisant l’objet d’un dumping lorsque sa mise en libre pratique dans [l’Union européenne] cause un préjudice. »

12      L’article 3, paragraphes 1 et 2, du règlement de base dispose :

« 1. Pour les besoins du présent règlement, le terme ‘préjudice’ s’entend, sauf indication contraire, d’un préjudice important causé à une industrie communautaire, d’une menace de préjudice important pour une industrie communautaire ou d’un retard sensible dans la création d’une industrie communautaire et est interprété conformément aux dispositions du présent article.

2. La détermination de l’existence d’un préjudice se fonde sur des éléments de preuve positifs et comporte un examen objectif :

a)       du volume des importations faisant l’objet d’un dumping et de l’effet de ces importations sur les prix des produits similaires sur le marché de [l’Union] ; et

b)       de l’incidence de ces importations sur l’industrie communautaire. »

13      Selon l’article 3, paragraphe 5, dudit règlement :

« L’examen de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping sur l’industrie communautaire concernée comporte une évaluation de tous les facteurs et indices économiques pertinents qui influent sur la situation de cette industrie, y compris le fait pour une industrie de ne pas encore avoir surmonté entièrement les effets de pratiques passées de dumping ou de subventionnement, l’importance de la marge de dumping effective, la diminution effective et potentielle des ventes, des bénéfices, de la production, de la part de marché, de la productivité, du rendement des investissements ou de l’utilisation des capacités ; les facteurs qui influent sur les prix dans [l’Union], les effets négatifs, effectifs et potentiels, sur les flux de liquidités, les stocks, l’emploi, les salaires, la croissance, l’aptitude à mobiliser les capitaux ou l’investissement. Cette liste n’est pas exhaustive et un seul ou plusieurs de ces facteurs ne constituent pas nécessairement une base de jugement déterminante. »

14      L’article 4, paragraphe 1, du règlement de base dispose :

« Aux fins du présent règlement, on entend par ‘industrie communautaire’ l’ensemble des producteurs communautaires de produits similaires ou ceux d’entre eux dont les productions additionnées constituent une proportion majeure au sens de l’article 5, paragraphe 4, de la production communautaire totale de ces produits […] »

15      L’article 5, paragraphe 4, du règlement de base précise :

« Une enquête n’est ouverte conformément au paragraphe 1 que s’il a été déterminé, en se fondant sur un examen du degré de soutien ou d’opposition à la plainte exprimé par les producteurs communautaires du produit similaire, que la plainte a été présentée par l’industrie communautaire ou en son nom. La plainte est réputée avoir été déposée par l’industrie communautaire ou en son nom si elle est soutenue par des producteurs communautaires dont les productions additionnées constituent plus de 50 % de la production totale du produit similaire par la partie de l’industrie communautaire exprimant son soutien ou son opposition à la plainte. Toutefois, il ne sera pas ouvert d’enquête lorsque les producteurs communautaires soutenant expressément la plainte représentent moins de 25 % de la production totale du produit similaire produit par l’industrie communautaire. »

16      L’article 6, paragraphes 1 et 8, du règlement de base dispose :

« 1. À la suite de l’ouverture de la procédure, la Commission, en coopération avec les États membres, commence l’enquête au niveau communautaire. Cette enquête porte simultanément sur le dumping et le préjudice. Aux fins d’une détermination représentative, une période d’enquête est choisie qui, en cas de dumping, couvre normalement une période d’une durée minimale de six mois immédiatement antérieure à l’ouverture de la procédure. Les renseignements relatifs à une période postérieure à la période d’enquête ne sont pas, normalement, pris en compte.

[…]

8. Sauf dans les circonstances prévues à l’article 18, l’exactitude des renseignements fournis par des parties intéressées et sur lesquels les conclusions sont fondées doit être vérifiée dans la mesure du possible. »

17      Selon l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base :

« […] Le montant du droit antidumping ne doit pas excéder la marge de dumping établie et devrait être inférieur à cette marge, si ce droit moindre suffit à éliminer le préjudice causé à l’industrie communautaire. »

18      L’article 14, paragraphe 1, du règlement de base se lit comme suit :

« Les droits antidumping, provisoires ou définitifs, sont imposés par voie de règlement et perçus par les États membres selon la forme, le taux et les autres éléments fixés par le règlement qui les impose. Ces droits sont aussi perçus indépendamment des droits de douane, taxes et autres charges normalement exigibles à l’importation. Aucun produit ne peut être soumis à la fois à des droits antidumping et à des droits compensateurs en vue de remédier à une même situation résultant d’un dumping ou de l’octroi d’une subvention à l’exportation. »

19      L’article 16, paragraphe 1, du règlement de base est ainsi libellé :

« Lorsqu’elle l’estime opportun, la Commission effectue des visites afin d’examiner les livres des importateurs, exportateurs, opérateurs commerciaux, agents, producteurs, associations et organisations professionnelles et de vérifier les renseignements fournis concernant le dumping et le préjudice. En l’absence d’une réponse appropriée en temps utile, une visite de vérification peut ne pas être effectuée. »

20      L’article 18, paragraphes 1 et 5, du règlement de base dispose :

« 1. Lorsqu’une partie intéressée refuse l’accès aux informations nécessaires ou ne les fournit pas dans les délais prévus par le présent règlement ou fait obstacle de façon significative à l’enquête, des conclusions préliminaires ou finales, positives ou négatives, peuvent être établies sur la base des données disponibles. S’il est constaté qu’une partie concernée a fourni un renseignement faux ou trompeur, ce renseignement n’est pas pris en considération et il peut être fait usage des données disponibles. Les parties intéressées doivent être informées des conséquences d’un défaut de coopération.

[…]

5. Si les conclusions, y compris celles qui concernent la valeur normale, sont fondées sur les dispositions du paragraphe 1, notamment sur les renseignements fournis dans la plainte, il faut, lorsque cela est possible et compte tenu des délais impartis pour l’enquête, vérifier ces renseignements par référence à d’autres sources indépendantes disponibles, telles que les listes de prix publiées, les statistiques d’importation officielles et les relevés douaniers ou par référence aux renseignements obtenus d’autres parties concernées au cours de l’enquête […] »

21      L’article 20 du règlement de base précise :

« 1. Les plaignants, importateurs et exportateurs ainsi que leurs associations représentatives et représentants du pays exportateur peuvent demander à être informés des détails sous-tendant les faits et considérations essentiels sur la base desquels des mesures provisoires ont été instituées. Les demandes d’information doivent être adressées par écrit immédiatement après l’institution des mesures provisoires et l’information doit être donnée par écrit aussitôt que possible.

2. Les parties mentionnées au paragraphe 1 peuvent demander une information finale sur les faits et considérations essentiels sur la base desquels il est envisagé de recommander l’institution de mesures définitives ou la clôture d’une enquête ou d’une procédure sans institution de mesures, une attention particulière devant être accordée à l’information sur les faits ou considérations différents de ceux utilisés pour les mesures provisoires.

[…]

4. […] L’information ne fait pas obstacle à toute décision ultérieure qui peut être prise par la Commission ou le Conseil et, lorsque cette décision se fonde sur des faits et considérations différents, ces derniers doivent être communiqués dès que possible.

5. Les observations faites après que l’information finale a été donnée ne peuvent être prises en considération que si elles sont reçues dans un délai que la Commission fixe dans chaque cas en tenant dûment compte de l’urgence de l’affaire, mais qui ne sera pas inférieur à dix jours. »

 Antécédents du litige

22      La requérante, Yuanping Changyuan Chemicals Co. Ltd, est une société établie à Yuan Ping (Chine), qui produit et exporte de l’acide oxalique.

23      Le 13 décembre 2010, le Conseil européen de l’industrie chimique (CEFIC) a déposé une plainte, au nom d’un producteur, Oxaquim SA, établi en Espagne et représentant plus de 25 % de la production totale d’acide oxalique dans l’Union européenne, au motif que l’acide oxalique produit en Chine et en Inde était exporté vers l’Union à des prix de dumping (considérant 2 du règlement attaqué ; considérant 2 du règlement provisoire).

24      Deux autres producteurs d’acide oxalique sont mentionnés dans la plainte : Clariant, une entreprise française pour laquelle l’acide oxalique constituait un sous-produit issu du processus de fabrication, et Borsod Chem-MCHZ (ci-après « Borsod »), une entreprise établie en République tchèque qui a cessé de produire de l’acide oxalique au plus tard en 2008.

25      Le 10 janvier 2011, la Commission a envoyé des courriers à Oxaquim et Clariant afin de connaître leur point de vue sur l’ouverture éventuelle d’une procédure antidumping. Oxaquim et Clariant ont confirmé qu’ils étaient des producteurs d’acide oxalique. Oxaquim s’est dit favorable à l’ouverture d’une procédure tandis que Clariant a adopté une position neutre.

26      Le 26 janvier 2011, la Commission européenne a publié un avis d’ouverture d’une procédure antidumping concernant les importations d’acide oxalique originaire de l’Inde et de la République populaire de Chine (JO C 24, p. 8) (considérant 1 du règlement provisoire).

27      Au point 5 de l’avis d’ouverture, la Commission a indiqué qu’elle avait conclu, après consultation du comité consultatif, que la plainte avait été déposée par l’industrie de l’Union ou en son nom et qu’il existait des éléments de preuve suffisants pour justifier l’ouverture d’une procédure.

28      Par lettre du 26 janvier 2011, la Commission a informé Oxaquim de l’ouverture de la procédure antidumping. Cette lettre contenait en annexe un questionnaire et une copie de l’avis d’ouverture. La Commission a prié Oxaquim de renvoyer le questionnaire dûment rempli au plus tard le 4 mars 2011. Elle a ajouté qu’une réponse au questionnaire n’était pas obligatoire, mais que l’absence de réponse dans le délai fixé serait considérée comme un défaut de coopération.

29      Par deux lettres en date du 2 février 2011, la Commission a également informé Clariant et Borsod de l’ouverture de la procédure antidumping. Une copie de l’avis d’ouverture était annexée à ces lettres. Par ailleurs, en faisant référence à l’avis d’ouverture, la Commission a indiqué que tous les producteurs de l’Union et toutes les associations de producteurs de l’Union étaient invités à prendre contact avec la Commission au plus tard 15 jours après la date de publication de l’avis afin de demander un questionnaire. De plus, la Commission a relevé qu’il était possible pour ces producteurs de faire connaître leurs points de vue, de soumettre des informations et de fournir des éléments de preuve jusqu’au 4 mars 2011.

30      Par la suite, Oxaquim a coopéré avec la Commission et a répondu au questionnaire détaillé de celle-ci. Clariant et Borsod n’ont pas coopéré.

31      Le 19 octobre 2011, la Commission a adopté le règlement (UE) n° 1043/2011, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations d’acide oxalique originaire de l’Inde et de la République populaire de Chine (JO L 275, p. 1, ci-après le « règlement provisoire »). Le règlement, publié le 20 octobre 2011, a institué un droit antidumping provisoire et individuel de 14,6 % à l’égard de la requérante.

32      Il ressort du considérant 9 du règlement provisoire que l’enquête relative au dumping et au préjudice a couvert la période comprise entre le 1er janvier et le 31 décembre 2010 (ci-après la « période d’enquête ») et que l’examen des tendances pertinentes aux fins de l’évaluation du préjudice a couvert la période comprise entre le 1er janvier 2007 et la fin de la période d’enquête (ci-après la « période considérée »).

33      Au considérant 50 du règlement provisoire, la Commission a conclu que l’industrie de l’Union, au sens de l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base, était composée d’Oxaquim et de Clariant.

34      Pour ce qui est des données utilisées pour l’analyse du préjudice, il ressort du considérant 70 du règlement provisoire que la Commission a établi une distinction entre les indicateurs macroéconomiques et les indicateurs microéconomiques. Elle a analysé les indicateurs macroéconomiques pour la période considérée sur la base des données se rapportant aux trois producteurs, à savoir Oxaquim, Clariant et Borsod (considérants 72, 74 et 76 du règlement provisoire), alors que les indicateurs microéconomiques ont été évalués sur la base des informations vérifiées tirées du questionnaire soumis par Oxaquim (considérant 83 du règlement provisoire).

35      Le 20 octobre 2011, la Commission a communiqué ses conclusions provisoires à la requérante.

36      Par courriel adressé à la Commission le 10 novembre 2011, la requérante a, en faisant référence aux conclusions provisoires, soulevé cinq questions. Parmi ces questions, premièrement, la requérante a contesté l’inclusion, dans les indicateurs macroéconomiques, des données concernant le troisième producteur, qui avait cessé ses activités en 2008, dès lors que, selon elle, il ne faisait pas partie de l’industrie de l’Union. Deuxièmement, elle a voulu savoir de quelle manière le droit de douane normal de 6,5 % avait été inclus dans les calculs du préjudice.

37      Par courriel du 15 novembre 2011, la Commission a répondu à ces questions. Premièrement, elle a indiqué, au sujet du troisième opérateur pris en compte au titre des indicateurs macroéconomiques, que « [l]es données concernant un troisième producteur de l’[Union] ayant cessé ses activités en 2008 [étaient] incluses dans les macro-indicateurs » et que, « à cet égard, [la requérante devait] noter que cette question qui [était] examinée aux considérants 50 et 51 des conclusions provisoires [serait] clarifiée à un stade ultérieur de la procédure ». Elle a précisé que, « [p]our ce qui [était] des données individuelles des deux producteurs de l’Union, [la requérante devait] noter que ces chiffres ne [pouvaient] pas être divulgués pour des raisons de confidentialité ». Deuxièmement, s’agissant de la prise en compte du droit de douane normal de 6,5 %, la Commission a invité la requérante à soulever ce point dans le cadre de ses observations formelles.

38      Dans sa réponse du 21 novembre 2011 aux conclusions provisoires, premièrement, la requérante a, notamment, fait observer que les données relatives à la production, aux capacités totales, aux volumes des ventes et à la part de marché de l’industrie de l’Union, mentionnées aux considérants 72 et 76 à 78 ainsi que dans les tableaux 4 et 5 du règlement provisoire, comprenaient des données afférentes aux années 2007 et 2008 provenant d’une société qui ne faisait pas partie de l’industrie de l’Union. Il en allait de même s’agissant des données relatives à l’emploi, à la productivité et aux salaires, mentionnées aux considérations 79 à 81 et au tableau 6 du règlement provisoire. En outre, elle a indiqué que les indicateurs microéconomiques du préjudice, mentionnés aux tableaux 7 à 12 du règlement provisoire, se rapportant uniquement à Oxaquim, affichaient des tendances positives. Deuxièmement, la requérante s’est plainte de ce que le calcul de la marge de préjudice ne tenait pas compte du droit de douane normal de 6,5 % applicable aux importations d’acide oxalique. Troisièmement, la requérante a demandé à la Commission d’expliquer les modalités de détermination de la marge bénéficiaire de 8 % ou d’appliquer une marge bénéficiaire de 5 %, comme il serait de pratique courante en présence de produits chimiques de base. Ce point serait particulièrement important, étant donné que les profits de l’industrie de l’Union étaient déjà de 7,2 %. Enfin, elle a demandé une audition afin d’aborder ces questions.

39      Cette audition, en présence des services de la Commission et du conseiller juridique de la requérante, s’est tenue le 7 décembre 2011.

40      Le 2 février 2012, la Commission a communiqué à la requérante et aux autres parties intéressées le document d’information finale par courrier recommandé, et leur a demandé de transmettre leurs observations éventuelles le 13 février 2012 au plus tard.

41      Le 3 février 2012, la Commission a également envoyé le document d’information finale par courriel à la requérante et aux autres parties intéressées. Toutefois, l’adresse électronique du conseiller juridique de la requérante a, par erreur, été mal transcrite et ce courriel n’est pas parvenu à la requérante.

42      Le 7 février 2012, le conseiller juridique de la requérante a envoyé un courriel à la Commission pour l’informer de ce qu’il venait de recevoir le document d’information finale par la voie postale et a demandé une prorogation du délai de réponse jusqu’au 17 février 2012.

43      Par courriel du 8 février 2012, la Commission a d’abord refusé une prorogation du délai. Le 10 février 2012, la requérante a réitéré sa demande en faisant référence au délai minimal de dix jours prévu par l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base pour présenter des observations sur l’information finale. Par courriel du même jour, la Commission a accordé à titre exceptionnel une prorogation du délai jusqu’au 14 février 2012 à 10 heures.

44      Par courriel du 13 février 2012, la requérante a demandé à pouvoir consulter le dossier de la Commission dans la matinée du 14 février et remettre ses observations sur le document d’information finale à la fermeture des bureaux le même jour. La Commission a répondu le jour même en accordant cette brève prorogation du délai.

45      S’agissant du contenu du document d’information finale, la Commission a, aux considérants 57 et 69 de ce document, expliqué que, contrairement à ce qui était indiqué aux considérants 50 et 51 du règlement provisoire, l’industrie de l’Union était constituée de trois producteurs et qu’il était justifié d’inclure toutes les données du producteur qui avait cessé la production d’acide oxalique en 2008 aux fins de l’analyse du préjudice. Au considérant 58 de ce document, elle a précisé que ce producteur avait indiqué avoir mis un terme à ses activités de fabrication du produit en cause pour des « raisons internes » sans fournir d’autre explication et qu’un producteur-exportateur avait confirmé cette explication.

46      Par ailleurs, au considérant 66 du document d’information finale, la Commission a exposé ce qui suit :

« Un producteur-exportateur a fait valoir que la Commission avait omis d’inclure un ajustement de 6,5 %, correspondant au droit de douane normal, dans le calcul de la marge de préjudice. Étant donné que le droit de douane était sous-estimé pour certaines importations fournies à un client de l’[Union] sur la base ‘rendus droits acquittés’, cette allégation a été jugée partiellement fondée et les marges de préjudice ont été recalculées en conséquence. Toutefois, ces corrections n’ont pas eu d’incidence significative sur les mesures définitives proposées […] »

47      Enfin, au considérant 88 du document d’information finale, la Commission a conclu que la marge de préjudice de la requérante s’élevait à 19,5 % et la marge de dumping à 14,6 %.

48      Le 14 février 2012, la requérante a présenté ses observations sur le document d’information finale. Elle a, notamment, fait observer qu’Oxaquim était le seul producteur constituant l’industrie de l’Union. Clariant devrait être exclu de la définition de l’industrie de l’Union, car il n’avait pas coopéré à la procédure. Borsod, dont le nom n’était mentionné ni dans le règlement provisoire ni dans le document d’information finale, devrait également être exclu, parce qu’il n’avait pas non plus coopéré et qu’il n’était pas un producteur d’acide oxalique. Par ailleurs, la requérante a souligné que les indicateurs macroéconomiques n’étaient pas fiables, dès lors qu’ils étaient fondés sur une industrie de l’Union mal définie. De plus, elle a réitéré que les indicateurs microéconomiques du préjudice, ne concernant qu’Oxaquim, affichaient une tendance positive. La requérante a également critiqué le fait qu’aucune explication n’avait été fournie au sujet de la marge bénéficiaire visée, évaluée à 8 %, et que la Commission n’avait pas correctement examiné la prise en compte du droit de douane de 6,5 %. À cet égard, la requérante a remarqué que la référence faite par la Commission au considérant 66 du document d’information finale à « certaines importations fournies à un client de l’[Union] sur la base ‘rendus droits acquittés’ » était incompréhensible et que, en tout état de cause, ladite référence ne s’appliquait pas à elle, dès lors qu’aucune de ses ventes n’était effectuée sur la base « rendus droits acquittés ». Elle a souligné que le droit de douane de 6,5 % devait être ajouté à ses prix caf (coût, assurance et fret) lors de chaque transaction, à défaut de quoi une comparaison équitable avec les prix départ usine de l’industrie de l’Union ne serait pas possible. Enfin, la requérante a demandé une audition en présence du conseiller-auditeur.

49      Le 22 février 2012, une audition a eu lieu en présence de la requérante et des services de la Commission au cours de laquelle la requérante a réitéré plusieurs observations concernant, premièrement, le non-respect par la Commission du délai minimal de dix jours pour la réponse au document d’information finale, deuxièmement, la composition de l’industrie de l’Union et notamment la fiabilité des indicateurs macroéconomiques, troisièmement, la profitabilité de l’industrie de l’Union et, en particulier, la marge bénéficiaire de 8 % et, quatrièmement, le droit de douane de 6,5 %.

50      Au cours de l’audition, en ce qui concerne la première observation de la requérante, la Commission a répondu que, selon sa pratique, le point de départ du délai de dix jours était la date de délivrance du document d’information finale. Étant donné qu’elle avait expédié ce document le 2 février et que le 12 février avait été un dimanche, elle avait fixé le délai pour présenter des observations au 13 février. Elle a ajouté que, d’un point de vue pratique, la requérante avait été en mesure de présenter ses observations en temps utile.

51      Pour ce qui est de la deuxième observation de la requérante, la Commission a d’abord affirmé que l’analyse macroéconomique du préjudice était fondée sur l’ensemble des producteurs de l’Union. Elle a considéré que cette approche était la meilleure façon d’obtenir une vision précise de l’évolution du marché durant la période considérée et que l’inclusion de tous les producteurs permettait d’analyser l’ensemble de l’industrie de l’Union, conformément aux exigences du règlement de base. Ensuite, elle a relevé l’importance de la distinction entre les indicateurs microéconomiques et les indicateurs macroéconomiques. Elle a exposé qu’elle utilisait les chiffres spécifiques des sociétés coopérant à l’enquête pour l’analyse microéconomique, alors que, pour l’analyse de la situation générale, des données macroéconomiques fiables seraient habituellement disponibles au niveau des associations. Plus particulièrement, la Commission a confirmé que les données macroéconomiques utilisées concernant Clariant et Borsod ressortaient de la plainte déposée par le CEFIC le 13 décembre 2010. Elle a ajouté que des résumés non confidentiels étaient disponibles dans le dossier public et que des fourchettes étaient indiquées dans le règlement provisoire.

52      S’agissant de la troisième observation de la requérante, la Commission a contesté l’allégation de la requérante selon laquelle la profitabilité de l’industrie de l’Union avait été de 7,2 % durant la période d’enquête. Comme la requérante n’était pas en possession de toutes les données nécessaires, son calcul ne pourrait pas être correct. La Commission a précisé qu’elle ne pouvait pas divulguer plus de données sans enfreindre les règles de confidentialité.

53      Quant à la quatrième observation de la requérante, la Commission a affirmé que le droit de douane de 6,5 % était inclus dans l’ajustement fixe de 56,81 euros par tonne. Elle a précisé que ce montant constituait une moyenne des droits de douane et des autres coûts postérieurs à l’importation, calculée sur la base des données reçues des importateurs qui avaient coopéré, et qu’elle acceptait de revérifier son calcul.

 Règlement attaqué

54      Le 12 avril 2012, le Conseil de l’Union européenne a adopté le règlement d’exécution (UE) n° 325/2012, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations d’acide oxalique originaire de l’Inde et de la République populaire de Chine (JO L 106, p. 1, ci-après le « règlement attaqué »).

55      S’agissant de la définition de l’industrie de l’Union, le Conseil a constaté, au considérant 57 du règlement attaqué, d’une part, que, « contrairement à ce qui [était] indiqué aux considérants 50 et 51 du règlement provisoire, l’Union comptait trois producteurs du produit concerné au cours de la période considérée », que « ceux-ci constituaient l’industrie de l’Union au sens de l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base » et qu’ils « représentaient 100 % de la production de l’Union », et, d’autre part, que « l’argument selon lequel les chiffres relatifs au producteur n’ayant pas coopéré et au troisième producteur de l’Union ayant mis un terme à ses activités en 2008 [n’auraient pas dû] être pris en considération [était] rejeté, car il [était] légitime d’inclure tous les chiffres connus concernant la période considérée aux fins de l’analyse du préjudice, afin d’obtenir une représentation aussi fidèle que possible de la situation économique de l’industrie de l’Union conformément aux dispositions de l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base ».

56      Au considérant 58 du règlement attaqué, le Conseil a observé que les raisons pour lesquelles le troisième producteur avait cessé de fabriquer le produit en cause avaient été prises en considération lors de l’enquête et que « [cette] société [avait] simplement invoqué le fait qu’elle avait mis un terme à ses activités de fabrication du produit similaire pour des ‘raisons internes’ sans fournir d’autres explications ». De plus, le Conseil a relevé qu’un producteur-exportateur avait confirmé cette explication, contredisant ainsi les informations fournies par le plaignant selon lesquelles la décision de cesser de produire de l’acide oxalique était due aux pratiques de dumping. Le Conseil a ajouté que, « [n]éanmoins, le producteur-exportateur n’[avait] fourni aucune information divergente en ce qui concerne les chiffres de production allégués pour ce troisième producteur de l’Union » et que, « [p]ar conséquent, cet aspect ne [venait] pas contredire le fait que les données relatives à ce troisième producteur de l’Union […] [auraient pu] être utilisées dans le cadre de l’enquête en cours ».

57      En ce qui concerne le calcul de la marge de préjudice, le Conseil a relevé, au considérant 66 du règlement attaqué, que, « [c]omme indiqué au considérant 144 du règlement provisoire, […] les prix à l’exportation moyens des producteurs-exportateurs ayant coopéré en RPC et en Inde [avaient] été dûment ajustés pour tenir compte des coûts d’importation et des droits de douane ». Dans ce contexte, le Conseil a précisé :

« Un producteur-exportateur a cependant fait valoir que la Commission avait omis d’inclure un ajustement de 6,5 %, correspondant au droit de douane normal, dans le calcul de la marge de préjudice. Cette allégation a été jugée fondée et les marges de préjudice ont été recalculées en conséquence pour ce producteur exportateur, ainsi que pour les autres producteurs-exportateurs ayant coopéré. Toutefois, ces corrections n’ont eu aucune incidence sur les mesures définitives proposées […] »

58      Au considérant 73, le Conseil a conclu, en confirmant l’évaluation des indicateurs de préjudice opérée aux considérants 94 à 98 du règlement provisoire, que l’industrie de l’Union avait subi un préjudice important au sens de l’article 3, paragraphe 5, du règlement de base.

59      Au considérant 87 du règlement attaqué, le Conseil a fixé la marge de préjudice de la requérante à 18,7 %.

60      Enfin, l’article 1er, paragraphe 2, du règlement attaqué institue un droit antidumping définitif et individuel de 14,6 % à l’égard de la requérante. Ce taux correspond à la marge de dumping définitive de la requérante, telle que définie aux considérants 54 et 87 du règlement attaqué.

 Procédure et conclusions des parties

61      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 12 juillet 2012, la requérante a introduit le présent recours.

62      Le 19 juillet 2012, le Conseil a reçu notification de la requête.

63      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 5 septembre 2012, la Commission a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions du Conseil. Les parties ne se sont pas opposées à cette demande.

64      Le Conseil a transmis le mémoire en défense au greffe du Tribunal par télécopie le vendredi 28 septembre 2012. Le lundi 1er octobre 2012, le Conseil a déposé l’original à la poste belge et l’a expédié par courrier recommandé.

65      L’original du mémoire en défense du Conseil est parvenu au greffe du Tribunal le 10 octobre 2012, soit en dehors du délai prévu par l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure du Tribunal.

66      Dans ses lettres des 11 octobre et 9 novembre 2012, le Conseil a soutenu qu’il avait agi avec toute la diligence requise et que le retard dans l’acheminement de l’original du mémoire en défense était dû à une erreur des services postaux.

67      Le 19 novembre 2012, la huitième chambre du Tribunal a décidé que, eu égard à l’existence d’un cas de force majeure, il convenait de verser le mémoire en défense au dossier.

68      Dans la réplique, déposée au greffe du Tribunal le 8 janvier 2013, la requérante a conclu à ce qu’il plaise au Tribunal de rejeter le mémoire en défense en vertu de l’article 45 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne. Par ailleurs, elle a fait observer qu’il appartenait au Tribunal de décider s’il conviendrait, ou non, de clôturer la procédure écrite et de rendre un arrêt par défaut.

69      Dans la duplique, déposée au greffe du Tribunal le 7 mars 2013, le Conseil a demandé le rejet de ces conclusions.

70      Par ordonnance du 26 novembre 2012, le président de la huitième chambre du Tribunal a fait droit à la demande d’intervention.

71      Le 7 janvier 2013, la Commission a déposé un mémoire en intervention.

72      Le 8 mars 2013, la requérante a déposé un mémoire en réponse au mémoire en intervention de la Commission.

73      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la deuxième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

74      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (deuxième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale. Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, il a transmis aux parties une question pour réponse orale lors de l’audience.

75      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal à l’audience du 15 juillet 2014.

76      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler le règlement attaqué dans la mesure où il la concerne ;

–        condamner le Conseil aux dépens ;

–        condamner la Commission aux dépens occasionnés par son intervention.

77      Le Conseil et la Commission concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

78      Au soutien du recours, la requérante invoque quatre moyens. Le premier moyen est tiré de la violation de l’article 3 et de l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base, en ce que le Conseil aurait commis une erreur dans la définition de l’industrie de l’Union. Le deuxième moyen est tiré de la violation de l’article 3, paragraphes 2 et 5, du règlement de base, en ce que le Conseil aurait commis une erreur manifeste dans l’appréciation du préjudice causé à l’industrie de l’Union. Le troisième moyen est tiré d’une violation de l’article 9, paragraphe 4, de l’article 14, paragraphe 1, et de l’article 20, paragraphes 1 et 2, du règlement de base, en ce que le Conseil n’aurait pas procédé à une évaluation appropriée et en ce que sa décision ne serait pas suffisamment motivée. Enfin, le quatrième moyen est tiré d’une violation de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base ainsi que d’une violation des principes de non-discrimination et de bonne administration, en ce que la Commission n’aurait pas respecté le droit de la requérante de présenter des observations écrites sur l’information finale dans un délai minimal de dix jours. À titre liminaire, la requérante demande au Tribunal de considérer la nécessité de rendre un arrêt par défaut en raison du dépôt tardif du mémoire en défense.

 Sur la nécessité de rendre un arrêt par défaut

79      La requérante soutient qu’il incombe au Tribunal de décider s’il convient, ou non, de rendre un arrêt par défaut, le Conseil ayant présenté le mémoire en défense tardivement sans pouvoir valablement invoquer l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure.

80      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 122 du règlement de procédure, « [s]i le défendeur […] ne répond pas à la requête dans les formes et le délai prescrits, le requérant peut demander au Tribunal de lui adjuger ses conclusions ». Toutefois, selon l’article 45, second alinéa, du statut de la Cour, « aucune déchéance tirée de l’expiration des délais ne peut être opposée lorsque l’intéressé établit l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure ».

81      En premier lieu, il est constant que le mémoire en défense n’a pas été déposé dans le délai imparti.

82      À cet égard, il convient de relever que, en vertu de l’article 46, paragraphe 1, du règlement de procédure, la partie défenderesse doit présenter un mémoire en défense dans les deux mois qui suivent la signification de la requête. L’article 102, paragraphe 2, du règlement de procédure prévoit par ailleurs que les délais de procédure sont augmentés d’un délai de distance forfaitaire de dix jours. Étant donné que la requête a été notifiée au Conseil le 19 juillet 2012, le délai de présentation du mémoire en défense a expiré le 1er octobre 2012.

83      En l’espèce, le mémoire en défense a été transmis au greffe du Tribunal par télécopieur le 28 septembre 2012, avant l’expiration du délai. Toutefois, en application de l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure, la date à laquelle une copie de l’original signé d’un acte de procédure parvient au greffe du Tribunal par télécopieur n’est prise en considération, aux fins du respect des délais de procédure, que si l’original signé de l’acte est déposé à ce greffe au plus tard dix jours après la réception de la télécopie.

84      L’original signé du mémoire en défense est parvenu au greffe du Tribunal le 10 octobre 2012, soit 12 jours après le dépôt de la télécopie. Dans ces conditions, la date de dépôt du mémoire en défense par télécopie ne peut pas être prise en compte aux fins du respect du délai de recours. Il s’ensuit que seule la date de dépôt de l’original signé, à savoir le 10 octobre 2012, doit être prise en compte aux fins du respect du délai en cause. Celui-ci ayant expiré le 1er octobre 2012, le mémoire en défense était tardif.

85      En second lieu, la requérante fait valoir que le dépôt tardif du mémoire en défense n’est pas dû à l’existence d’un cas fortuit ou de force majeure. En effet, selon la requérante, le Conseil a négligé de s’enquérir du moment du dépôt des documents originaux et n’a pris connaissance de leur dépôt tardif que par l’intermédiaire du greffe lui-même. À l’appui de son argumentation, la requérante fait notamment référence à l’ordonnance de la Cour du 8 novembre 2007, Belgique/Commission (C‑242/07 P, Rec. p. I‑9757), à l’arrêt de la Cour du 22 septembre 2011, Bell & Ross/OHMI (C‑426/10 P, Rec. p. I‑8849), et à l’ordonnance du Tribunal du 12 décembre 2011, AO/Commission (T‑365/11 P, non encore publiée au Recueil).

86      Il résulte de la jurisprudence que l’application stricte des règles de procédure répond à l’exigence de sécurité juridique et à la nécessité d’éviter toute discrimination ou tout traitement arbitraire dans l’administration de la justice. Conformément à l’article 45, second alinéa, du statut de la Cour, il ne peut être dérogé aux délais de procédure que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles, de cas fortuit ou de force majeure (voir, en ce sens, ordonnance Belgique/Commission, point 85 supra, point 16 ; arrêt Bell & Ross/OHMI, point 85 supra, point 43, et ordonnance AO/Commission, point 85 supra, point 31).

87      La Cour a jugé que les notions de force majeure et de cas fortuit comportaient un élément objectif, relatif aux circonstances anormales et étrangères à l’opérateur, et un élément subjectif tenant à l’obligation, pour l’intéressé, de se prémunir contre les conséquences de l’événement anormal en prenant des mesures appropriées sans consentir des sacrifices excessifs. En particulier, l’opérateur doit surveiller soigneusement le déroulement de la procédure entamée et, notamment, faire preuve de diligence afin de respecter les délais prévus (arrêt de la Cour du 15 décembre 1994, Bayer/Commission, C‑195/91 P, Rec. p. I‑5619, point 32 ; ordonnance Belgique/Commission, point 85 supra, point 17).

88      Tout d’abord, dans l’appréciation des circonstances de l’espèce, il convient de noter que la jurisprudence citée par la requérante concerne le caractère tardif d’une requête introductive d’instance, pour l’introduction de laquelle le délai fixé aux fins de la sécurité juridique n’est, par nature, pas prorogeable, et non d’un mémoire en défense, en cause en l’espèce, pour le dépôt duquel le délai « peut, dans des circonstances exceptionnelles, être prorogé par le président à la demande motivée du défendeur », en vertu de l’article 46, paragraphe 3, du règlement de procédure.

89      Ensuite, il y a lieu de relever que, en l’espèce, le Conseil a transmis le mémoire en défense au Tribunal par télécopie le vendredi 28 septembre 2012 après-midi. Le jour ouvrable suivant, le lundi 1er octobre, le Conseil a déposé l’original à la poste belge en tant que courrier recommandé. Le Conseil a donc agi avec toute la diligence requise pour permettre, dans des circonstances ordinaires, l’arrivée de l’original au greffe du Tribunal au plus tard dix jours après la réception de la télécopie. Si l’original du mémoire en défense n’est arrivé que le 10 octobre 2012, ce retard dans l’acheminement était dû à des circonstances anormales, indépendantes des services du Conseil. Ainsi qu’il ressort de la lettre du 31 octobre 2012 de la poste belge, le retard de livraison était dû à une erreur de ses services. La poste belge a notamment indiqué qu’elle avait par erreur dirigé l’envoi vers l’Italie, d’où il a été réexpédié vers le Luxembourg.

90      En outre, le Conseil n’est pas empêché d’invoquer le dysfonctionnement exceptionnel des services de la poste belge en tant que cas de force majeure, dans la mesure où, s’il s’était renseigné avant l’expiration du délai de dix jours auprès de la poste ou du greffe sur le dépôt des documents originaux, il n’aurait pas pu éviter leur arrivée tardive.

91      D’une part, l’original avait déjà été envoyé vers une destination erronée par la poste et le Conseil n’aurait pas pu le remplacer par une autre version signée du mémoire afin d’envoyer celle-ci en temps utile au greffe du Tribunal. En effet, l’original de l’acte au sens de l’article 43, paragraphe 6, du règlement de procédure n’est que l’acte dont la copie a été envoyée par télécopie, ainsi qu’il ressort d’ailleurs du point 7 des instructions pratiques aux parties devant le tribunal (JO 2012, L 68, p. 23), aux termes duquel « [l]’original signé doit être expédié sans retard, immédiatement après l’envoi de la copie, sans y apporter de corrections ou modifications, mêmes mineures », en sorte que, « [e]n cas de divergence entre l’original signé et la copie précédemment déposée, seule la date du dépôt de l’original signé est prise en considération » [voir, en ce sens et par analogie, ordonnance du Tribunal du 3 octobre 2012, Tecnimed/OHMI – Ecobrands (ZAPPER-CLICK), T‑360/10, non encore publiée au Recueil, point 37].

92      D’autre part, si le Conseil avait envoyé une seconde version du mémoire en défense, la date du dépôt de celle-ci aurait dû être prise en compte. Étant donné que le Conseil a expédié l’original du mémoire en défense le 1er octobre 2012, à savoir le jour de l’expiration du délai pour le dépôt du mémoire en défense, il n’aurait pas pu déposer une seconde version de ce mémoire avant l’expiration de ce délai.

93      Eu égard à l’expiration du délai le 1er octobre 2012, le Conseil n’aurait pas non plus pu demander, en temps utile, une prorogation du délai afin d’éviter que l’original soit déposé au greffe du Tribunal hors délai.

94      Il résulte de ce qui précède que le Conseil n’a pas pu respecter le délai pour le dépôt du mémoire en défense en raison de l’existence d’un cas de force majeure. Par conséquent, il y avait lieu de traiter le mémoire en défense comme s’il n’avait pas été déposé tardivement. Les conditions d’un arrêt par défaut ne sont donc pas réunies.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 3 et de l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base, en ce que le Conseil aurait commis une erreur dans la définition de l’industrie de l’Union

95      La requérante fait valoir que le Conseil a violé l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base en incluant à tort les sociétés Clariant et Borsod dans la définition de l’industrie de l’Union. Elle prétend que lesdites sociétés auraient dû être exclues, au motif qu’elles n’avaient pas coopéré à l’enquête et, pour ce qui est de Borsod, au motif que cette société avait cessé sa production du produit similaire avant la période d’enquête. En outre, l’évaluation du préjudice présentée dans le règlement attaqué serait entachée d’une erreur, dans la mesure où elle reposerait, en violation de l’article 3, paragraphes 1 et 2, du règlement de base, sur des données relatives à une industrie de l’Union mal définie.

96      Force est de constater que, en substance, ce moyen repose sur l’allégation selon laquelle les institutions devraient exclure de la définition de l’industrie de l’Union, aux fins de l’analyse du préjudice, d’une part, les producteurs qui n’ont pas coopéré à l’enquête et, d’autre part, les producteurs qui ont fabriqué le produit similaire durant la période considérée, mais non pendant ou après la période d’enquête.

97      À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que, selon l’article 3, paragraphe 1, du règlement de base, « le terme ‘préjudice’ s’entend, sauf indication contraire, d’un préjudice important causé à une industrie [de l’Union] » et que l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base définit l’industrie [de l’Union] soit comme l’« ensemble des producteurs [de l’Union] de produits similaires », soit comme « ceux d’entre eux dont les productions additionnées constituent une proportion majeure au sens de l’article 5, paragraphe 4, de la production totale [de l’Union] de ces produits [similaires] », étant entendu que, dans les deux cas, peuvent être exclus de l’industrie de l’Union les producteurs relevant des situations prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous a), du même règlement.

98      Il doit être rappelé également que, dans le domaine de la politique commerciale commune, et tout particulièrement en matière de mesures de défense commerciale, les institutions de l’Union disposent d’un large pouvoir d’appréciation en raison de la complexité des situations économiques, politiques et juridiques qu’elles doivent examiner (voir arrêts de la Cour du 3 septembre 2009, Moser Baer India/Conseil, C‑535/06 P, Rec. p. I‑7051, point 85, et la jurisprudence citée, et du 28 novembre 2013, CHEMK et KF/Conseil, C‑13/12 P, non encore publié au Recueil, point 61).

99      En particulier, les institutions disposent d’un large pouvoir d’appréciation en ce qui concerne le choix entre les deux branches de l’alternative prévue par l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base.

100    De plus, selon une jurisprudence constante, le juge de l’Union ne peut intervenir dans l’appréciation réservée aux autorités de l’Union, mais doit limiter son contrôle à vérifier le respect des règles de procédure, l’exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits ou l’absence de détournement de pouvoir (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 28 septembre 1995, Ferchimex/Conseil, T‑164/94, Rec. p. II‑2681, point 67 ; du 28 octobre 1999, EFMA/Conseil, T‑210/95, Rec. p. II‑3291, point 57, et du 14 mars 2007, Aluminium Silicon Mill Products/Conseil, T‑107/04, Rec. p. II‑669, point 43).

101    En l’espèce, le Conseil a constaté, au considérant 57 du règlement attaqué, que l’Union comptait trois producteurs du produit similaire au cours de la période considérée qui constituaient l’industrie de l’Union et représentaient 100 % de la production de l’Union. Dès lors, le Conseil a choisi de définir, dans le cadre de la détermination du préjudice, l’industrie de l’Union par le biais de la première branche de l’alternative visée à l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base.

102    S’agissant de l’inclusion dans la définition de l’industrie de l’Union d’un producteur n’ayant pas coopéré et du producteur ayant mis un terme à sa production avant la période d’enquête, le Conseil a estimé, également au considérant 57 du règlement attaqué, qu’il était « légitime d’inclure tous les chiffres connus concernant la période considérée aux fins de l’analyse du préjudice, afin d’obtenir une représentation aussi fidèle que possible de la situation économique de l’industrie de l’Union, conformément aux dispositions de l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base ».

103    En premier lieu, s’agissant de la question de l’inclusion dans l’industrie de l’Union, aux fins de l’analyse du préjudice, de producteurs n’ayant pas coopéré, force est de constater, tout d’abord, qu’il ne ressort pas du libellé de l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base que la notion de l’industrie de l’Union ne recouvre que les producteurs de l’Union ayant participé à l’enquête (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 28 octobre 2004, Shanghai Teraoka Electronic/Conseil, T‑35/01, Rec. p. II‑3663, point 257). Plus particulièrement, le libellé de cette disposition ne subordonne pas à la coopération de tous les producteurs de l’Union la possibilité pour les institutions de définir l’industrie de l’Union comme l’ensemble des producteurs de l’Union du produit similaire.

104    Ensuite, il convient de relever que la notion d’« industrie de l’Union », telle qu’elle est retenue aux fins de déterminer le préjudice, ne doit pas nécessairement être constituée des mêmes producteurs de l’Union que ceux composant l’industrie de l’Union dont il a été tenu compte pour établir si la plainte initiale ou la demande de réexamen bénéficiait d’un soutien suffisant, conformément à l’article 5, paragraphe 4, du règlement de base. En effet, dans la seconde branche de l’alternative visée par l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base, l’industrie de l’Union ne peut, eu égard au libellé de l’article 5, paragraphe 4, de ce règlement, comprendre que les producteurs de l’Union qui soutiennent la plainte ou la demande, alors que, dans la première branche de l’alternative visée à l’article 4, paragraphe 1, dudit règlement, elle peut inclure l’ensemble des producteurs de l’Union, indépendamment du fait qu’ils aient ou non apporté un tel soutien.

105    Pour ce qui est, d’une part, de l’ouverture de la procédure, l’article 5, paragraphe 4, du règlement de base prévoit qu’« [u]ne enquête n’est ouverte […] que s’il a été déterminé, en se fondant sur un examen du degré de soutien ou d’opposition à la plainte exprimé par les producteurs [de l’Union] du produit similaire, que la plainte a été présentée par l’industrie [de l’Union] ou en son nom ». S’agissant, d’autre part, de la définition de l’industrie de l’Union aux fins de la détermination du préjudice, il importe de garder à l’esprit que cette définition est effectuée par les institutions après l’ouverture de la procédure et ne vise pas à vérifier si le degré de soutien à la plainte justifie ou non l’ouverture de l’enquête.

106    Plus particulièrement, lorsque l’industrie de l’Union est définie dans le cadre de la détermination du préjudice conformément à la première branche de l’alternative visée à l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base comme l’« ensemble des producteurs [de l’Union] de produits similaires », cette définition sert de base à un examen de la situation économique de tous les producteurs concernés. Il s’ensuit que, non seulement en vertu de son libellé, mais également selon son économie, la première branche de l’alternative visée à l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base n’empêche pas l’inclusion dans la définition de l’industrie de l’Union des producteurs qui ne soutiennent pas la plainte ou ne coopèrent pas à l’enquête.

107    Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argumentation de la requérante selon laquelle il découle de l’arrêt du Tribunal du 4 mars 2010, Brosmann Footwear (HK) e.a./Conseil (T‑401/06, Rec. p. II‑671, point 108), que les producteurs de l’Union qui n’ont pas coopéré au cours de l’enquête sont à exclure de la définition de l’industrie de l’Union. À cet égard, il suffit de constater que cet arrêt a été annulé par l’arrêt de la Cour du 2 février 2012, Brosmann Footwear (HK) e.a./Conseil (C‑249/10 P, non encore publié au Recueil).

108    En second lieu, l’argumentation de la requérante selon laquelle les institutions devraient exclure, aux fins de l’analyse du préjudice, le producteur qui a fabriqué le produit similaire durant la période considérée, mais non pendant ou après la période d’enquête, ne saurait être accueillie.

109    Premièrement, il y a lieu de rappeler que l’article 6, paragraphe 1, du règlement de base dispose que l’enquête « porte simultanément sur le dumping et le préjudice ». Il précise également que, « [a]ux fins d’une détermination représentative, une période d’enquête est choisie qui, en cas de dumping, couvre normalement une période d’une durée minimale de six mois immédiatement antérieure à l’ouverture de la procédure » et que « [l]es renseignements relatifs à une période postérieure à la période d’enquête ne sont pas, normalement, pris en compte ».

110    Deuxièmement, ainsi qu’il a été indiqué au point 98 ci-dessus, les institutions disposent d’un large pouvoir d’appréciation pour évaluer les situations économiques complexes. Tel est notamment le cas en ce qui concerne la détermination de la période à prendre en considération aux fins de la constatation du préjudice dans le cadre d’une procédure antidumping (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 28 novembre 1989, Epichirisseon Metalleftikon, Viomichanikon kai Naftiliakon e.a./Conseil, C‑121/86, Rec. p. 3919, point 20, et du 7 mai 1991, Nakajima/Conseil, C‑69/89, Rec. p. I‑2069, point 86). Ainsi, le Conseil peut déterminer le préjudice subi par l’industrie de l’Union sur une période plus longue que celle couverte par l’enquête sur l’existence de pratiques de dumping (voir, en ce sens, arrêt Nakajima/Conseil, précité, point 87).

111    En l’espèce, en vertu du considérant 9 du règlement provisoire, confirmé au considérant 3 du règlement attaqué, la période d’enquête a couvert la période comprise entre le 1er janvier et le 31 décembre 2010 et la période considérée a couvert la période comprise entre le 1er janvier 2007 et la fin de la période d’enquête.

112    Ainsi qu’il ressort des considérants 71 et 73 du règlement attaqué qui ont confirmé, entre autres, les considérants 69 à 98 du règlement provisoire, les institutions ont analysé la plupart des facteurs de préjudice, au sens de l’article 3, paragraphe 5, du règlement de base, par rapport à la période considérée, y compris la période d’enquête. En particulier, il est énoncé au considérant 69 du règlement provisoire que « l’examen de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping sur l’industrie de l’Union a comporté une évaluation de tous les facteurs et indices économiques pertinents relatifs à la situation de cette industrie de 2007 à la fin de la période d’enquête ». Seule la sous-cotation a été examinée en se référant uniquement à la période d’enquête (voir considérants 67 et 68 du règlement provisoire, confirmés au considérant 67 du règlement attaqué).

113    S’agissant de Borsod, le troisième producteur de l’Union, les parties sont en désaccord sur la date à laquelle ce producteur a cessé de fabriquer le produit similaire. Lors de l’audience, la requérante a confirmé que l’arrêt de la production était déjà intervenu en 2007, alors que la Commission a maintenu que, selon les informations reçues de Borsod, c’était uniquement en 2008. En tout état de cause, il est constant que ce producteur a mis un terme à sa production durant la période considérée et avant le début de la période d’enquête. Dans ce contexte, il convient de rappeler que le Conseil a estimé aux considérants 57 et 68 du règlement attaqué qu’il était légitime d’inclure tous les chiffres connus relatifs à la période considérée aux fins de la détermination de la situation économique de l’industrie de l’Union.

114    À cet égard, force est de constater que l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base ne contient aucune précision concernant la période durant laquelle un producteur de l’Union doit avoir fabriqué le produit similaire afin d’être inclus dans l’industrie de l’Union aux fins de l’évaluation du préjudice.

115    Par ailleurs, l’inclusion de toutes les données disponibles relatives à la période considérée, y compris celles concernant des producteurs ayant mis un terme à leur production durant cette période, afin d’obtenir une représentation fiable de la situation économique de l’industrie de l’Union, est compatible avec l’objectif de la première branche de l’alternative visée à l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base, qui est de permettre une analyse fondée sur l’ensemble de l’industrie de l’Union.

116    La requérante fait, toutefois, valoir que, en vertu du règlement de base, le préjudice est évalué pendant la période d’enquête et que, si la période considérée doit déterminer les tendances, elle ne peut pas remplacer ou supplanter la période d’enquête en importance. Elle soutient que les entreprises qui ont mis un terme à leur production avant la période d’enquête ne sont pas des producteurs et, partant, ne peuvent pas faire partie de l’industrie de l’Union, à défaut de quoi la structure antérieure de l’industrie de l’Union prévaudrait sur sa situation actuelle.

117    Cette argumentation ne saurait être retenue. La prise en compte de la structure antérieure de l’industrie de l’Union est nécessaire afin de pouvoir analyser précisément son évolution et notamment l’impact des importations faisant l’objet d’un dumping. En particulier, le fait qu’un producteur cesse ses activités durant la période considérée fait partie de l’évolution de l’industrie et peut donc être pris en considération. L’inclusion dans l’analyse du préjudice des producteurs qui ont mis fin à leur production au cours de cette période permet d’ailleurs de prendre en compte, le cas échéant, la situation des producteurs de l’Union qui ont été touchés par le dumping à un point tel qu’ils ont dû cesser leur production.

118    Eu égard à ce qui précède, les institutions n’ont pas outrepassé les limites de leur pouvoir d’appréciation en incluant Borsod et Clariant dans la définition de l’industrie de l’Union.

119    Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’argument de la requérante, tiré d’une prétendue pratique constante antérieure des institutions selon laquelle, d’une part, un degré élevé de coopération à l’enquête serait exigé des producteurs de l’Union afin de leur permettre d’être inclus dans l’industrie de l’Union et, d’autre part, les fabricants qui cessent définitivement leur production au cours ou après la fin de la période d’enquête ne seraient pas inclus dans la définition de l’industrie de l’Union.

120    À cet égard, il suffit de rappeler que, selon la jurisprudence, lorsque les institutions de l’Union disposent d’une marge d’appréciation pour le choix des moyens nécessaires à la réalisation de leur politique, les opérateurs économiques ne sont pas justifiés à placer leur confiance légitime dans le maintien du moyen initialement choisi, lequel peut être modifié par ces institutions dans le cadre de l’exercice de leur compétence (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 7 mai 1987, Minebea/Conseil, 260/84, Rec. p. 1975, point 28, et du 10 mars 1992, Canon/Conseil, C‑171/87, Rec. p. I‑1237, point 41). Dès lors, les institutions peuvent, dans l’exercice de leur pouvoir d’appréciation, changer d’approche concernant l’inclusion des producteurs dans l’industrie de l’Union.

121    En outre, l’argument de la requérante tiré de ce que les institutions auraient dû informer les intéressés sur les raisons de la modification de la pratique constante antérieure concernant l’inclusion des producteurs n’ayant pas coopéré dans l’industrie de l’Union ne saurait davantage prospérer. Lors de l’audition du 22 février 2012, le conseiller-auditeur a déjà fait observer que, depuis des années, il était de pratique habituelle pour les institutions d’utiliser des données des producteurs n’ayant pas coopéré dans l’analyse du préjudice. De plus, au stade du mémoire en défense, le Conseil a indiqué plusieurs règlements dans lesquels les institutions ont inclus dans l’industrie de l’Union des producteurs qui n’avaient pas coopéré au cours de l’enquête. Enfin, lors de l’audience, le Conseil a précisé que la pratique des institutions avait changé en septembre 2010 afin de tenir compte du droit de l’OMC et notamment du rapport du groupe spécial intitulé « Communautés européennes – Mesure antidumping visant le saumon d’élevage en provenance de Norvège » (WT/DS337/R), du 16 novembre 2007, qui aurait critiqué leur pratique antérieure d’exclure, de la définition de l’industrie de l’Union, les producteurs n’ayant pas coopéré. Or, en tout état de cause, le Conseil n’était pas tenu de justifier, dans le règlement attaqué adopté en avril 2012, la modification d’une pratique, intervenue déjà en septembre 2010.

122    Eu égard aux développements qui précèdent, il convient de conclure que le Conseil n’a pas violé l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base en incluant Clariant et Borsod dans la définition de l’industrie de l’Union. L’allégation de la requérante selon laquelle l’évaluation du préjudice était entachée d’erreur, reposant, en violation de l’article 3, paragraphes 1 et 2, du règlement de base, sur des données relatives à une industrie de l’Union mal définie, n’est, partant, pas non plus fondée. Le présent moyen doit donc être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 3, paragraphes 2 et 5, du règlement de base, en ce que le Conseil aurait commis une erreur manifeste dans l’appréciation du préjudice causé à l’industrie de l’Union

123    La requérante fait valoir que, même à supposer que la définition de l’industrie de l’Union soit exacte, les institutions ont commis une erreur manifeste dans l’appréciation du préjudice causé à l’industrie de l’Union en analysant les facteurs économiques de façon sélective à partir de deux séries distinctes de données, à savoir les indicateurs macroéconomiques analysés en tenant compte des données des trois producteurs et les indicateurs microéconomiques évalués uniquement sur la base des données fournies par le seul producteur de l’Union ayant coopéré, en violation de l’article 3, paragraphes 2 et 5, du règlement de base, interprété d’une manière conforme au droit de l’OMC.

124    Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 1er, paragraphe 1, du règlement de base, un droit antidumping ne peut viser un produit faisant l’objet d’un dumping que si sa mise en libre pratique dans l’Union cause un préjudice, le terme « préjudice » étant entendu, en application de l’article 3, paragraphe 1, du même règlement, comme un préjudice important causé à une industrie de l’Union, une menace de préjudice important pour une industrie de l’Union ou un retard sensible dans la création d’une industrie de l’Union.

125    Conformément à l’article 3, paragraphe 2, du règlement de base, « la détermination de l’existence d’un préjudice se fonde sur des éléments de preuve positifs et comporte un examen objectif : […] b) de l’incidence [des importations faisant l’objet d’un dumping] sur l’industrie de [l’Union] ».

126    Il y a également lieu de rappeler que l’article 3, paragraphe 5, du règlement de base prévoit que l’examen de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping sur l’industrie de l’Union concernée comporte une évaluation de tous les facteurs et indices économiques pertinents qui influent sur la situation de cette industrie. Cet article contient une liste non exhaustive des différents facteurs pouvant être pris en considération.

127    Selon une jurisprudence bien établie, la détermination du préjudice suppose l’appréciation de questions économiques complexes. Dans cet exercice, les institutions de l’Union disposent d’une large marge d’appréciation [arrêt Nakajima/Conseil, point 110 supra, point 86 ; arrêts du Tribunal Aluminium Silicon Mill Products/Conseil, point 100 supra, point 43, et du 18 septembre 2012, Since Hardware (Guangzhou)/Conseil, T‑156/11, non encore publié au Recueil, point 135].

128    Le juge de l’Union doit donc limiter son contrôle à la vérification du respect des règles de procédure, de l’exactitude matérielle des faits retenus pour opérer le choix contesté, de l’absence d’erreur manifeste dans l’appréciation de ces faits et de l’absence de détournement de pouvoir [voir arrêt Since Hardware (Guangzhou)/Conseil, point 127 supra, point 136, et la jurisprudence citée].

129    Par ailleurs, il appartient à la requérante de produire les éléments de preuve permettant au Tribunal de constater que le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation dans l’évaluation du préjudice [voir arrêt Since Hardware (Guangzhou)/Conseil, point 127 supra, point 137, et la jurisprudence citée].

130    Ainsi qu’il a été rappelé par la Cour dans l’arrêt du 27 septembre 2007, Ikea Wholesale (C‑351/04, Rec. p. I‑7723, points 61 et 62), l’article 3, paragraphe 5, du règlement de base donne aux autorités de l’Union un pouvoir discrétionnaire dans l’examen et l’évaluation des différents indices mentionnés dans cette disposition. En outre, cette disposition exige seulement que soient examinés « les facteurs et indices économiques pertinents qui influent sur la situation de [l’industrie de l’Union] ».

131    C’est donc dans l’exercice de leur pouvoir d’appréciation que les institutions sont appelées à analyser les indices susmentionnés et à retenir parmi les éléments d’appréciation, énumérés à cette fin dans la disposition susvisée, ceux qu’elles jugent pertinents dans chaque cas d’espèce [arrêt de la Cour du 10 mars 1992, Sharp Corporation/Conseil, C‑179/87, Rec. p. I‑1635, point 46, et arrêt Since Hardware (Guangzhou)/Conseil, point 127 supra, point 139].

132    Au considérant 71 du règlement attaqué, le Conseil a confirmé le considérant 69 du règlement provisoire qui expose que, « [c]onformément à l’article 3, paragraphe 5, du règlement de base, l’examen de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping sur l’industrie de l’Union a comporté une évaluation de tous les facteurs et indices économiques pertinents relatifs à la situation de cette industrie de 2007 à la fin de la période d’enquête ».

133    Ainsi qu’il ressort du considérant 70 du règlement provisoire, également confirmé au considérant 71 du règlement attaqué, « [l]es indicateurs macroéconomiques (production, capacités, utilisation des capacités, volumes des ventes, part de marché, emploi, productivité, salaires et importance des marges de dumping) ont été analysés au niveau de l’industrie de l’Union, tandis que les indicateurs microéconomiques (stocks, prix de vente, rentabilité, flux de liquidités, rendement des investissements, aptitude à mobiliser des capitaux et investissements, coûts de production) ont été évalués sur la base des informations tirées du questionnaire dûment vérifié soumis par le seul producteur de l’Union ayant coopéré ».

134    Premièrement, la requérante estime que les institutions auraient dû utiliser de façon cohérente soit les données macroéconomiques, soit les données microéconomiques pour la détermination de tous les facteurs et elle avance que, d’un point de vue statistique, il ne serait pas valable de mélanger et de combiner deux séries incohérentes de données pour constater un préjudice. Cette pratique serait contraire à l’article 3, paragraphes 2 et 5, du règlement de base, car elle ne permettrait pas de procéder à un examen objectif du préjudice, fondé sur des éléments de preuve positifs, en raison d’incohérences manifestes entre les données et de contradictions importantes entre les facteurs macroéconomiques et les facteurs microéconomiques. À cet égard, la requérante affirme, notamment, que tous les indicateurs microéconomiques démontraient une tendance positive, alors que seuls certains indicateurs macroéconomiques affichaient une tendance à la baisse.

135    Cet argument ne saurait prospérer. D’une part, il convient de relever que l’article 3, paragraphe 5, du règlement de base précise qu’« un seul ou plusieurs de[s facteurs économiquement pertinents] ne constituent pas nécessairement une base de jugement déterminante » lors de l’examen de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping sur l’industrie de l’Union concernée. D’autre part, si l’examen des institutions doit mener à la conclusion que le préjudice causé à l’industrie de l’Union est important, il n’est pas exigé que tous les facteurs et indices économiques pertinents démontrent une tendance négative (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 25 octobre 2011, CHEMK et KF/Conseil, T‑190/08, Rec. p. II‑7359, point 114). Dès lors, l’existence d’une tendance positive des indicateurs de préjudice microéconomiques n’empêche pas, en soi, les institutions de conclure à l’existence d’un préjudice.

136    Ainsi, il ressort du considérant 73 du règlement attaqué, qui a confirmé les considérants 95 à 98 du règlement provisoire, que les institutions ont conclu, après l’évaluation des indicateurs analysés, que, au total, les indicateurs négatifs l’emportaient sur les indicateurs positifs, en sorte que l’industrie de l’Union avait subi un préjudice au sens de l’article 3 du règlement de base. Les institutions ont non seulement fondé leur appréciation sur certaines tendances à la baisse ressortant des facteurs macroéconomiques, mentionnés aux considérants 96 et 97 du règlement provisoire, comme la diminution du volume des ventes, de l’emploi, de la capacité de production et de la part de marché, mais ont également tenu compte, lors de l’examen des incidences des importations faisant l’objet d’un dumping, du niveau important de sous-cotation des prix (voir les considérants 65, 68 et 104 du règlement provisoire, confirmés aux considérants 67 et 77 du règlement attaqué). En outre, elles ont pris en considération la rentabilité d’Oxaquim. À cet égard, le Conseil a estimé, ainsi qu’il ressort du considérant 75 du règlement attaqué, que la légère amélioration de la rentabilité ne contredisait pas la conclusion selon laquelle la rentabilité était demeurée très faible dans l’ensemble. Enfin, il ressort des considérants 93 et 94 du règlement provisoire, confirmés au considérant 71 du règlement attaqué, que le rendement des investissements d’Oxaquim est resté négatif tout au long de la période considérée.

137    Deuxièmement, la requérante soutient qu’il découle de l’article 3, paragraphes 2 et 5, du règlement de base, interprété de manière conforme au droit de l’OMC, que le Conseil n’a pas rempli l’obligation d’examen objectif qui lui incombait lors de la détermination du préjudice. Plus particulièrement, la requérante observe que l’article 3, paragraphes 2 et 5, du règlement de base transpose l’article 3, paragraphes 1 et 4, de l’accord antidumping dans l’ordre juridique de l’Union et rappelle, en faisant notamment référence à l’arrêt Nakajima/Conseil, point 110 supra, que, selon une jurisprudence bien établie, les dispositions du règlement de base doivent être interprétées à la lumière de cet accord. Elle soutient, en outre, que les rapports de l’organe de règlement des différends de l’OMC portant sur l’interprétation de l’accord antidumping pourraient également donner un éclairage sur l’interprétation correcte du règlement de base.

138    À cet égard, la requérante fait, notamment, référence aux observations concernant l’obligation de procéder, conformément à l’article 3, paragraphe 1, de l’accord antidumping, à un examen objectif des preuves relatives au préjudice faites, d’une part, par l’organe d’appel aux points 193 et 204 à 206 de son rapport intitulé « États-Unis – Mesures antidumping appliquées à certains produits en acier laminés à chaud en provenance du Japon » (WT/DS 184/AB/R), du 24 juillet 2001, adopté par l’organe de règlement des différends de l’OMC le 23 août 2001, et, d’autre part, par le groupe spécial aux points 7.326 et 7.328 de son rapport intitulé « Mexique – Droits antidumping sur les tubes et tuyaux en acier en provenance du Guatemala » (WT/DS331/R), du 8 juin 2007, adopté par l’organe de règlement des différends le 24 juillet 2007, qui démontreraient la nécessité de fonder l’analyse sur une série de données cohérentes.

139    Cet argument de la requérante ne saurait davantage prospérer.

140    Certes, en vertu d’une jurisprudence constante, les dispositions du règlement de base doivent être interprétées, dans la mesure du possible, à la lumière des dispositions correspondantes de l’accord antidumping (arrêt de la Cour du 19 décembre 2013, Transnational Company Kazchrome et ENRC Marketing/Conseil, C‑10/12 P, non encore publié au Recueil, point 54). Néanmoins, il suffit de constater que les passages des rapports cités par la requérante ne sont nullement susceptibles d’étayer son raisonnement.

141    En effet, aux points 204 à 206 de son rapport intitulé « États-Unis – Mesures antidumping appliquées à certains produits en acier laminés à chaud en provenance du Japon », l’organe d’appel a insisté sur la nécessité d’examiner la branche de production nationale concernée dans son ensemble, y compris les producteurs qui avaient des résultats médiocres et ceux qui enregistraient de bons résultats. Au point 204 du rapport, il est, notamment, exposé :

« [L]orsque les autorités chargées de l’enquête entreprennent l’examen d’une partie d’une branche de production nationale, elles devraient, en principe, examiner, de la même manière, toutes les autres parties qui composent cette branche, et examiner aussi la branche de production dans son ensemble. […] À n’examiner que les parties d’une branche de production qui obtiennent des résultats médiocres, même si l’ensemble de la branche de production nationale fait aussi l’objet d’un examen, on risque de donner une impression trompeuse des données relatives à la branche de production dans son ensemble, et de ne pas tenir compte d’évolutions positives qui se produisent dans d’autres parties de la branche de production. […] Nous relevons que la réciproque peut aussi être vraie – examiner seulement les parties d’une branche de production qui obtiennent de bons résultats peut amener à sous-estimer l’importance de la dégradation des résultats obtenus dans d’autres parties de la branche de production. »

142    De même, le groupe spécial a évoqué, aux points 7.326 à 7.328 de son rapport intitulé « Mexique – Droits antidumping sur les tubes et tuyaux en acier en provenance du Guatemala », la nécessité d’utiliser un ensemble de données cohérent qui reflétait l’activité des producteurs composant la production nationale. Au point 7.326 du rapport, le groupe spécial a observé :

« Nous sommes d’avis qu’une fois qu’elle a déterminé quelles sont les entités qui forment la branche de production nationale sur laquelle reposera son analyse du dommage, l’autorité chargée de l’enquête doit chercher à obtenir et utiliser un ensemble de données cohérent qui reflète l’activité de ces entités. Nous comprenons que, dans la pratique, l’autorité chargée de l’enquête puisse ouvrir l’enquête en disposant de renseignements partiels, qu’elle pourrait compléter par la suite au cours de l’enquête. L’autorité chargée de l’enquête pourrait aussi être aux prises avec des données incomplètes et problématiques fournies par un ou plusieurs producteurs nationaux. En pareil cas, elle devrait demander des renseignements additionnels ou, si cela n’est pas possible, avoir recours à une méthode d’estimation raisonnable qui donnerait des résultats conformes à la situation de la branche de production nationale […] »

143    Or, le fait que, comme en l’espèce, les indicateurs macroéconomiques affichent une tendance différente de celle de certains indicateurs microéconomiques ne saurait constituer une incohérence des données indiquant que les institutions doivent limiter leur analyse soit aux données macroéconomiques, soit aux données microéconomiques.

144    Au contraire, tout d’abord, il résulte de l’article 3.4 de l’accord antidumping et de l’article 3, paragraphe 5, du règlement de base que l’examen de l’incidence des importations faisant l’objet d’un dumping comporte une évaluation de tous les facteurs et indices économiques pertinents si bien que les autorités menant l’enquête sont tenues d’évaluer les données macroéconomiques et microéconomiques.

145    Ensuite, au point 7.328 de son rapport intitulé « Mexique – Droits antidumping sur les tubes et tuyaux en acier en provenance du Guatemala », le groupe spécial a notamment expliqué :

« En bref, l’examen d’une partie seulement de la branche de production, telle que celle-ci a été définie par l’autorité chargée de l’enquête, n’est pas un examen objectif des éléments de preuve positifs, puisqu’il n’est pas représentatif de la situation générale de la branche de production nationale. L’utilisation d’un ensemble de données cohérent et représentatif reflétera mieux la situation de la branche de production nationale aux fins de l’analyse du dommage. »

146    Il en va de même, en l’espèce, de l’ensemble des données macroéconomiques et microéconomiques reflétant mieux la situation générale de l’industrie de l’Union.

147    Enfin, le fait que les indicateurs macroéconomiques ont été analysés au niveau de l’industrie de l’Union, tandis que les indicateurs microéconomiques ont été évalués uniquement sur la base des chiffres d’Oxaquim, les autres producteurs de l’Union n’ayant pas fourni de données à cet égard, ne permet pas non plus de considérer que l’ensemble des données utilisé par les institutions était incohérent. En effet, l’objectif d’obtenir une vision de l’industrie de l’Union aussi précise et détaillée que possible ne pourrait être atteint si les institutions étaient obligées d’écarter parmi toutes les données disponibles soit les données macroéconomiques, soit les données microéconomiques, au motif que ces dernières n’étaient pas disponibles pour tous les producteurs de l’industrie de l’Union.

148    Troisièmement, la requérante fait valoir que les institutions se sont fondées, pour analyser les facteurs de préjudice macroéconomiques, sur des données macroéconomiques non vérifiées alors que les données microéconomiques ont été vérifiées dans les locaux de l’unique producteur de l’Union ayant coopéré. Par ailleurs, elle doute qu’il soit possible d’obtenir des données macroéconomiques fiables sans la pleine coopération des producteurs concernés. En effet, Clariant n’aurait communiqué que des informations partielles et n’aurait pas été disponible pour leur vérification, tandis que Borsod n’aurait pas coopéré du tout.

149    Cet argument doit également être rejeté.

150    Il convient de relever que, en vertu de l’article 6, paragraphe 8, du règlement de base, dans le cadre de l’enquête sur le dumping et le préjudice qu’elle est tenue de mener, la Commission doit vérifier, dans la mesure du possible, l’exactitude des renseignements fournis par les parties intéressées et sur lesquels les conclusions sont fondées, sauf dans les circonstances prévues à l’article 18 dudit règlement. En outre, aux termes de l’article 16, paragraphe 1, du règlement de base, lorsqu’elle l’estime opportun, la Commission effectue des visites afin d’examiner les livres des importateurs, des exportateurs, des opérateurs commerciaux, des agents, des producteurs, des associations et des organisations professionnelles et de vérifier les renseignements fournis concernant le dumping et le préjudice.

151    Ainsi, si la Commission est tenue de vérifier l’exactitude des renseignements fournis par les parties intéressées et sur lesquels ses conclusions sont fondées (voir article 6, paragraphe 8, du règlement de base), elle ne l’est que dans la mesure du possible et cette obligation suppose que ces parties coopèrent avec la Commission, au sens de l’article 18 du règlement de base. Selon cette dernière disposition, lorsqu’une partie intéressée refuse l’accès aux informations nécessaires ou ne les fournit pas dans les délais prévus au règlement de base ou fait obstacle de façon significative à l’enquête, des conclusions préliminaires ou finales, positives ou négatives, peuvent être établies sur la base des données disponibles. Pour les cas où ces conclusions sont fondées sur de telles données, notamment sur les renseignements fournis dans la plainte, l’article 18, paragraphe 5, du règlement de base prévoit qu’« il faut, lorsque cela est possible […] vérifier ces renseignements par référence à d’autres sources indépendantes disponibles […] ou par référence aux renseignements obtenus d’autres parties concernées au cours de l’enquête ».

152    Toutefois, le règlement de base ne confère pas à la Commission des pouvoirs d’enquête lui permettant de contraindre les producteurs ou exportateurs visés par une plainte à participer à l’enquête ou à produire des renseignements (arrêt du Tribunal du 12 octobre 1999, Acme/Conseil, T‑48/96, Rec. p. II‑3089, point 42). Dans ces conditions, le Conseil et la Commission dépendent de la coopération volontaire des parties pour leur fournir les informations nécessaires dans les délais impartis (arrêt EFMA/Conseil, point 100 supra, point 71).

153    En l’espèce, il ressort du considérant 70 du règlement provisoire que les indicateurs microéconomiques ont été évalués sur la base des informations tirées du questionnaire « dûment vérifié » soumis par le producteur de l’Union ayant coopéré.

154    En revanche, le règlement provisoire et le règlement attaqué ne contiennent que certains éléments d’information relatifs à la source d’une partie des données macroéconomiques.

155    Ainsi, le considérant 51 du règlement provisoire indique, notamment, que « [t]outes les informations disponibles relatives aux deux producteurs Oxaquim […] et Clariant, y compris celles figurant dans la plainte et les données recueillies auprès du plaignant avant et après l’ouverture de l’enquête, ont été utilisées pour établir la production totale de l’Union ».

156    Ensuite, au considérant 58 du règlement attaqué, lorsque le Conseil mentionne qu’un producteur-exportateur a confirmé que « la décision [du troisième producteur de l’Union] de cesser de produire de l’acide oxalique n’était pas due aux prétendues pratiques de dumping », contredisant ainsi « les informations fournies par le plaignant dans la version non confidentielle de la plainte », il relève que, « [n]éanmoins, le producteur-exportateur n’a fourni aucune information divergente en ce qui concerne les chiffres de production allégués pour ce troisième producteur de l’Union » et considère que, « [p]ar conséquent, cet aspect ne vient pas contredire le fait que les données relatives à ce troisième producteur de l’Union […] pourraient être utilisées dans le cadre de l’enquête en cours ».

157    Par ailleurs, ainsi qu’il ressort du dossier, il convient de rappeler que, au cours de l’audition du 22 février 2012, tenue en présence de la requérante et des services de la Commission, la Commission a exposé qu’elle utilisait les chiffres spécifiques des sociétés coopérant à l’enquête pour l’analyse microéconomique, alors que, pour l’analyse de la situation générale, des données macroéconomiques fiables étaient habituellement disponibles au niveau des associations. En particulier, la Commission a confirmé que les données macroéconomiques utilisées pour Clariant et Borsod ressortaient de la plainte et que des résumés non confidentiels étaient disponibles dans le dossier public.

158    En effet, l’annexe 3 de la plainte déposée par le CEFIC contient une série de tableaux concernant les indicateurs de préjudice, y compris des données macroéconomiques concernant Clariant et Borsod couvrant la période entre 2006 et le premier semestre de 2010. Toutefois, elle ne comporte, notamment, pas de données sur la capacité de production de Clariant et Borsod.

159    En outre, alors que la Commission a indiqué au considérant 125 du règlement provisoire qu’« un des deux producteurs de l’Union[, à savoir Clariant,] ne s’[était] pas opposé à l’ouverture de l’enquête, mais n’[avait] fourni aucune information complémentaire et n’[avait] pas coopéré à cette enquête », le Conseil mentionne dans le mémoire en défense que Clariant a répondu au questionnaire de la Commission sur la qualité pour agir et a fourni des données sur sa production totale, ses ventes dans l’Union et sa capacité pour 2010 et que ces données semblaient correspondre aux données sur les ventes transmises par le CEFIC dans la plainte.

160    Enfin, le Conseil a précisé, lors de l’audience, que Clariant a fourni, dans ses réponses au questionnaire, certaines données confidentielles qui ne figuraient pas dans le dossier non confidentiel de l’enquête. Il a ajouté que toutes les informations ont fait l’objet d’une double vérification, en tenant compte d’autres sources disponibles et notamment des renseignements obtenus du plaignant.

161    Au vu de ces éléments, d’une part, il convient de constater que, si les renseignements fournis par les institutions relatifs aux sources et à la vérification des données macroéconomiques auraient pu être plus précis, cette circonstance ne suffit cependant pas, en elle-même, pour conclure à une erreur d’appréciation lors de l’évaluation de la fiabilité de ces données. Il en est de même de l’argument de la requérante selon lequel la Commission a indiqué la source des données macroéconomiques uniquement à un stade très avancé de l’enquête, à savoir au cours de l’audition mentionnée au point 157 ci-dessus. En effet, même à supposer que cette information ait été tardive, cela n’implique pas que les institutions ont fondé leur analyse sur des données non fiables.

162    D’autre part, il convient d’examiner si les institutions ont respecté les exigences du règlement de base concernant la vérification des données utilisées lors de l’appréciation de l’existence d’un préjudice.

163    S’agissant des données soumises par Oxaquim, étant donné que ce producteur a coopéré à l’enquête, les institutions étaient en principe tenues de vérifier ces données, conformément à l’article 6, paragraphe 8, du règlement de base. Il est constant que ses données microéconomiques ont été dûment vérifiées.

164    En outre, il est constant que ni Clariant ni Borsod n’ont coopéré à l’enquête, au sens de l’article 18 du règlement de base. Dès lors, la Commission n’était pas en mesure d’effectuer des visites de vérification auprès de ces deux producteurs. Il s’ensuit également que l’obligation de vérifier l’exactitude des renseignements fournis par les parties intéressées, prévue par l’article 6, paragraphe 8, du règlement de base, ne s’applique pas d’emblée aux données fournies par Clariant.

165    S’agissant de l’utilisation des données fournies dans la plainte, il doit être rappelé que l’article 18, paragraphe 5, du règlement de base prévoit la possibilité de recourir à de telles données lorsqu’une partie intéressée ne coopère pas à l’enquête. Dans la mesure où la requérante fait grief aux institutions d’avoir manqué de vérifier ces données, il convient de réitérer que Clariant et Borsod n’ont pas coopéré et que, conformément aux principes rappelés aux points 150 à 152 ci-dessus, la Commission ne pouvait pas contraindre ces producteurs à fournir des renseignements ou à lui permettre de procéder à des vérifications.

166    Il résulte néanmoins du dossier que, si, en raison du défaut de coopération de la part de Clariant et Borsod, il n’était pas possible, pour les institutions, d’évaluer avec certitude la fiabilité des données macroéconomiques, il n’en demeure pas moins que les institutions n’ont été saisies d’aucun élément concret les amenant à douter de l’exactitude des données macroéconomiques. Au contraire, ainsi qu’il a été rappelé au point 156 ci-dessus, si un producteur-exportateur avait contredit les informations fournies dans la plainte relatives aux raisons pour lesquelles le troisième producteur de l’Union avait cessé de fabriquer le produit similaire, il n’avait cependant pas fourni des informations divergentes concernant les chiffres de production pour ce troisième producteur. Il convient de relever, au demeurant, que la requérante n’a fourni aucun indice concret susceptible de remettre en cause la fiabilité de ces données, que ce soit au cours de l’enquête ou devant le Tribunal.

167    Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 9, paragraphe 4, de l’article 14, paragraphe 1, et de l’article 20, paragraphes 1 et 2, du règlement de base, en ce que le Conseil n’aurait pas procédé à une évaluation appropriée et en ce que sa décision ne serait pas suffisamment motivée

168    Le présent moyen, portant sur les exigences posées par le règlement de base aux fins du calcul de la marge de préjudice, comporte quatre branches. La première branche est tirée de la violation de l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base. La deuxième branche est tirée de la violation de l’article 14, paragraphe 1, du règlement de base. La troisième branche est tirée de la violation de l’article 20, paragraphes 1 et 2, du règlement de base et la quatrième branche de la violation de l’obligation de motivation.

169    Dans le cadre du présent recours, il apparaît opportun d’analyser d’abord cette dernière branche, par laquelle la requérante fait valoir que, en violation de l’article 296 TFUE, le règlement attaqué n’est pas suffisamment motivé en ce qui concerne le respect de l’exigence de percevoir les droits antidumping indépendamment des droits de douane, prévue par l’article 14, paragraphe 1, du règlement de base, et le respect de la « règle du droit moindre », prévue par l’article 9, paragraphe 4, du règlement de base.

170    Tout d’abord, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’autorité de l’Union, auteur de l’acte incriminé, de façon à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et au juge de l’Union d’exercer son contrôle (arrêt de la Cour du 7 mai 1987, NTN Toyo Bearing e.a./Conseil, 240/84, Rec. p. 1809, point 31, et arrêt Acme/Conseil, point 152 supra, point 141).

171    Il n’est toutefois pas exigé que la motivation du règlement spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée non seulement au regard de son libellé, mais également de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 26 juin 1986, Nicolet Instrument, 203/85, Rec. p. 2049, point 10 ; arrêt du Tribunal du 30 avril 1998, Cityflyer Express/Commission, T‑16/96, Rec. p. II‑757, point 65).

172    Dès lors qu’un règlement instituant, comme en l’espèce, des droits antidumping définitifs entre dans le cadre systématique d’un ensemble de mesures, il ne saurait être exigé que sa motivation spécifie les différents éléments de fait et de droit, parfois très nombreux et complexes, qui en font l’objet, ni que les institutions prennent position sur tous les arguments invoqués par les intéressés. Il suffit au contraire que l’auteur de l’acte expose les faits et considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie du règlement contesté (arrêt du Tribunal du 13 septembre 2010, Whirlpool Europe/Conseil, T‑314/06, Rec. p. II‑5005, point 114).

173    Il convient d’ajouter que la motivation du règlement attaqué doit être appréciée en tenant compte notamment des informations qui ont été communiquées à la requérante et des observations qu’elle a soumises durant la procédure administrative (arrêt du Tribunal du 4 mars 2010, Foshan City Nanhai Golden Step Industrial/Conseil, T‑410/06, Rec. p. II‑879, point 127).

174    Par ailleurs, la motivation d’un acte doit figurer dans le corps même de celui-ci et ne saurait, sauf circonstances exceptionnelles en cas d’insuffisance de motivation, résulter des explications écrites ou orales données ultérieurement, alors qu’il fait déjà l’objet d’un recours devant le juge de l’Union (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 15 juin 2005, Corsica Ferries France/Commission, T‑349/03, Rec. p. II‑2197, point 287, et la jurisprudence citée ; du 17 février 2011, Zhejiang Xinshiji Foods et Hubei Xinshiji Foods/Conseil, T‑122/09, non publié au Recueil, point 92, et du 16 septembre 2011, Kadio Morokro/Conseil, T‑316/11, non publié au Recueil, point 34).

175    En outre, il y a lieu de relever que, lorsque les institutions disposent d’un large pouvoir d’appréciation, le respect des garanties conférées par l’ordre juridique de l’Union dans les procédures administratives revêt une importance d’autant plus fondamentale. Parmi ces garanties figurent, notamment, l’obligation pour l’institution compétente d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce, le droit de l’intéressé de faire connaître son point de vue ainsi que celui de voir motiver la décision de façon suffisante. C’est seulement ainsi que le juge de l’Union peut vérifier si les éléments de fait et de droit dont dépend l’exercice du pouvoir d’appréciation ont été réunis (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, Rec. p. I‑5469, point 14 ; arrêts du Tribunal du 13 juillet 2006, Shandong Reipu Biochemicals/Conseil, T‑413/03, Rec. p. II‑2243, point 63, et Zhejiang Xinshiji Foods et Hubei Xinshiji Foods/Conseil, point 174 supra, point 75).

176    En premier lieu, s’agissant du calcul de l’ajustement des prix à l’exportation, la requérante observe que le règlement attaqué se borne à indiquer que le droit de douane normal de 6,5 % a été inclus dans le calcul de la marge de préjudice. Elle soutient que c’est dans le mémoire en défense que le Conseil l’a informée pour la première fois de la manière dont ce droit de douane et les coûts postérieurs à l’importation avaient été inclus dans le calcul de la marge de préjudice et, en particulier, de ce que le montant fixe des coûts postérieurs à l’importation avait été fixé à 10 euros par tonne.

177    Pour ce qui est du contexte de la motivation en cause, il importe de rappeler que, au considérant 66 du document d’information finale, la Commission a exposé qu’« [u]n producteur-exportateur [avait] fait valoir que la Commission avait omis d’inclure un ajustement de 6,5 %, correspondant au droit de douane normal, dans le calcul de la marge de préjudice », que, « [é]tant donné que le droit de douane était sous-estimé pour certaines importations fournies à un client de l’[Union] sur la base ‘rendus droits acquittés’, cette allégation [avait] été jugée partiellement fondée » et que « les marges de préjudice [avaient] été recalculées en conséquence ». Il ressort également de ce document que la Commission a tenu compte d’un montant fixe de 56,81 euros par tonne pour couvrir les coûts postérieurs à l’importation et les droits de douane.

178    Dans ses observations sur le document d’information finale du 14 février 2012, la requérante a remarqué que la référence à « certaines importations fournies à un client de l’[Union] sur la base ‘rendus droits acquittés’ » était incompréhensible et, en tout état de cause, qu’elle ne s’appliquait pas à elle, car aucune de ses ventes n’étaient effectuées sur la base « rendus droits acquittés ». Elle a souligné que le droit de douane de 6,5 % devait être ajouté à ses prix caf lors de chaque transaction.

179    Le 22 février 2012, lors de l’audition devant la Commission, la requérante a tout d’abord affirmé que le fait de savoir si le taux de 6,5 % était inclus dans l’ajustement de 56,81 euros n’était pas clair et a ensuite insisté pour que l’élément « droit de douane » de l’ajustement soit exprimé sous la forme d’un taux de 6,5 % du prix caf afin de refléter le montant des droits de douane payé sur les deux types de produits (DSN et DSR) qui étaient vendus à des prix différents dans l’Union. Au cours de cette audition, la Commission a cependant affirmé que le droit de douane de 6,5 % était inclus dans l’ajustement fixe de 56,81 euros par tonne, que ce montant constituait une moyenne des droits de douane et des autres coûts postérieurs à l’importation, calculée sur la base des données reçues des importateurs qui avaient coopéré, et qu’elle acceptait de revérifier son calcul.

180    En ce qui concerne le libellé même de la motivation en cause, il y a lieu de rappeler que, aux termes du considérant 66 du règlement attaqué :

« Un producteur-exportateur a […] fait valoir que la Commission avait omis d’inclure un ajustement de 6,5 %, correspondant au droit de douane normal, dans le calcul de la marge de préjudice. Cette allégation a été jugée fondée et les marges de préjudice ont été recalculées en conséquence pour ce producteur-exportateur. Toutefois, ces corrections n’ont eu aucune incidence sur les mesures définitives proposées […] »

181    L’allégation concernant l’omission d’inclure un ajustement de 6,5 % dans le calcul de la marge de préjudice est également mentionnée au considérant 83 du règlement attaqué. Selon ce considérant, « [c]et argument a été jugé partiellement correct compte tenu du fait que, pour certaines importations qui avaient été livrées à la clientèle de l’Union […] après dédouanement, le taux de droit avait été sous-estimé ».

182    Alors que, au considérant 88 du document d’information finale, la Commission avait conclu que la marge de préjudice de la requérante s’élevait à 19,5 %, au considérant 87 du règlement attaqué, le Conseil a fixé la marge de préjudice de la requérante à 18,7 %.

183    Dans la mesure où le Conseil soutient à cet égard que la méthode de la prise en compte des droits de douane découlait non seulement du considérant 66 du règlement attaqué, mais également de l’ajustement de la marge de préjudice de la requérante, passée de 19,5 % dans le document d’information finale à 18,7 % dans le règlement attaqué, force est de constater que cette motivation permet de conclure que l’allégation de la requérante tenant à l’omission d’inclure un ajustement de 6,5 % au titre du droit de douane normal dans le calcul de la marge de préjudice avait été prise en compte et que le calcul initial avait été modifié. Toutefois, puisque, aux termes du considérant 66 du règlement attaqué, ladite allégation « a été jugée fondée » alors que, en vertu du considérant 83 dudit règlement, qui se réfère à la même allégation, cet « argument a été jugé partiellement correct », la requérante ne pouvait pas être certaine que son allégation avait été acceptée dans son intégralité.

184    Par ailleurs, il ne ressort pas clairement de la motivation du règlement attaqué que le Conseil a accepté l’argumentation de la requérante selon laquelle il fallait exprimer le droit de douane sous la forme d’un pourcentage du prix caf afin de refléter le montant des droits de douane payé sur les deux types de produits (DSN et DSR) qui étaient vendus à des prix différents dans l’Union. Même si la marge de préjudice a été modifiée en sa faveur, la requérante ne pouvait toujours pas conclure que les institutions avaient adopté la méthode de calcul qu’elle avait proposée.

185    Or, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 174 ci-dessus, sauf circonstances exceptionnelles, dont le Conseil n’a, en l’espèce, ni établi ni même invoqué l’existence, le mémoire en défense, dans lequel le Conseil a expliqué les modalités de la prise en compte du droit de douane lors du calcul de la marge de préjudice, ne pouvait pas remédier aux insuffisances de la motivation du règlement attaqué.

186    En outre, en l’espèce, les informations manquantes ne résultaient pas du contexte de la procédure administrative (voir points 177 à 179 ci-dessus), la Commission ayant modifié les modalités du calcul de la marge de préjudice à la suite des commentaires que la requérante a formulés sur le document d’information finale et lors de l’audition du 22 février 2012, sans en informer la requérante.

187    Il ressort des développements qui précèdent qu’il convient de conclure que le Conseil n’a pas suffisamment motivé la manière dont le droit de douane de 6,5 % a été inclus dans le calcul de la marge de préjudice.

188    En second lieu, la requérante fait valoir que le règlement attaqué n’est pas suffisamment motivé concernant la base sur laquelle les institutions se sont fondées pour retenir la marge bénéficiaire visée de 8 % afin de déterminer le prix non préjudiciable de l’industrie de l’Union.

189    À titre liminaire, il convient de relever que le Tribunal a jugé, dans l’arrêt EFMA/Conseil, point 100 supra, point 60, que la marge bénéficiaire devant être retenue par le Conseil pour calculer le prix indicatif de nature à éliminer le préjudice en cause doit être limitée à la marge bénéficiaire que l’industrie de l’Union pourrait raisonnablement escompter dans des conditions normales de concurrence, en l’absence des importations faisant l’objet d’un dumping.

190    En appliquant ce critère, la Commission a affirmé, au considérant 142 du règlement provisoire, que « le bénéfice qui [aurait pu] être réalisé en l’absence d’importations faisant l’objet d’un dumping [correspondait] à 8 % du chiffre d’affaires » et que « cette marge bénéficiaire [aurait pu] être considérée comme le minimum souhaitable que l’industrie de l’Union aurait pu espérer atteindre en l’absence du dumping préjudiciable ».

191    Dans ses observations du 21 novembre 2011 sur le document d’information provisoire, la requérante a notamment demandé à la Commission d’expliquer la manière dont la marge de 8 % avait été calculée ou d’appliquer une marge bénéficiaire de 5 %, comme il serait de pratique courante en présence de produits chimiques de base, et a également relevé le fait qu’il s’agissait d’un point important compte tenu du fait que les profits de l’industrie de l’Union étaient déjà de 7,2 %. Elle a renouvelé cette demande dans ses observations sur le document d’information finale et lors de l’audition du 22 février 2012 devant la Commission. La Commission n’a toutefois fourni, au cours de l’enquête, aucune explication concernant les modalités de calcul de la marge bénéficiaire de 8 %, notamment ni dans le document d’information finale ni lors de l’audition du 22 février 2012.

192    S’agissant de la façon dont la marge bénéficiaire de 8 % a été motivée dans le règlement attaqué, il convient de relever que le considérant 84 de ce règlement se limite à faire référence au considérant 142 du règlement provisoire, sans fournir de précisions supplémentaires.

193    Premièrement, la requérante prétend que les institutions ont pour pratique établie de déterminer la marge bénéficiaire visée en remontant à une période passée représentative pendant laquelle aucun dumping préjudiciable n’a eu lieu. L’absence d’une motivation similaire dans le règlement attaqué permettrait de conclure, selon la requérante, que le Conseil a violé l’article 296 TFUE.

194    Il y a lieu de relever que le choix de la méthode de calcul du niveau d’élimination du préjudice relève de la liberté d’appréciation reconnue aux institutions s’agissant de la détermination du préjudice subi par l’industrie de l’Union et se justifie par les appréciations économiques complexes qui lui sont inhérentes (arrêt du Tribunal du 17 décembre 2008, HEG et Graphite India/Conseil, T‑462/04, Rec. p. II‑3685, point 161). Il n’en demeure pas moins que les institutions doivent respecter leur obligation de motivation résultant de l’article 296 TFUE, qui revêt, conformément à la jurisprudence citée au point 175 ci-dessus, une importance d’autant plus fondamentale lorsqu’elles disposent d’un large pouvoir d’appréciation. Plus particulièrement, la motivation aurait dû permettre de vérifier si les institutions s’étaient fondées sur des faits matériels exacts et si ces derniers n’avaient pas été appréciés d’une façon manifestement erronée.

195    Or, il résulte du considérant 84 du règlement attaqué, lu en combinaison avec le considérant 142 du règlement provisoire, que, en substance, le Conseil s’est limité à constater que les institutions avaient considéré une marge bénéficiaire de 8 % comme raisonnable. Certes, conformément à la jurisprudence rappelée au point 172 ci-dessus, la motivation d’un règlement instituant des droits antidumping ne doit pas nécessairement porter sur tous les aspects techniques des modalités du calcul de la marge bénéficiaire. En outre, ainsi qu’il ressort du considérant 76 du règlement attaqué, les institutions ont dû tenir compte des règles de confidentialité, notamment concernant les données fournies par Oxaquim. Toutefois, le règlement attaqué ne contient aucune information sur les considérations qui ont amené les institutions à estimer que le taux de 8 % était raisonnable, si bien qu’il est impossible de contrôler sur la base de la motivation du règlement attaqué de quelle manière les institutions ont exercé leur pouvoir d’appréciation.

196    Deuxièmement, les informations nécessaires ne ressortent pas non plus du contexte de la procédure administrative. En effet, malgré les demandes de la requérante, la Commission n’a pas, au cours de la procédure administrative, divulgué les considérations qui l’ont amenée à fixer la marge bénéficiaire à 8 %.

197    En substance, le Conseil fait cependant valoir que, au regard du contexte du règlement attaqué ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée, la motivation satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE. Il avance, notamment, que la marge bénéficiaire visée, utilisée dans les procédures précédentes concernant l’acide oxalique, était de notoriété publique, puisqu’elle était mentionnée dans les règlements publiés au Journal officiel de l’Union européenne.

198    Le Conseil ne cite néanmoins que deux règlements concernant les importations de fil continu texturé de polyester. Ainsi qu’il ressort du considérant 117 du règlement (CE) n° 2093/2002 du Conseil, du 26 novembre 2002, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations de fil continu texturé de polyester (PTY) originaire de l’Inde (JO L 323, p. 1), et du considérant 123 du règlement (CE) n° 1412/2002 de la Commission, du 29 juillet 2002, instituant un droit antidumping provisoire sur les importations de fil continu texturé de polyester originaire de l’Inde (JO L 205, p. 50), les institutions ont appliqué dans ces règlements une marge bénéficiaire de 8 %, en précisant que ce chiffre correspondait au bénéfice réalisé par l’industrie concernée en 1998 et en expliquant, notamment, que l’année 1998 avait été considérée comme une année de référence raisonnable, car les importations faisant l’objet d’un dumping n’avaient pas encore exercé d’effet à la baisse sur les prix de l’industrie de l’Union.

199    Toutefois, même à supposer que la requérante ait pu connaître les marges appliquées dans ces procédures, le Conseil n’explique pas comment la requérante aurait pu en tirer des conclusions sur la manière dont les institutions ont établi la marge bénéficiaire en l’espèce. Il convient donc de rejeter cet argument du Conseil.

200    Cette conclusion ne saurait être mise en cause par l’observation de la Commission, faite lors de l’audience, selon laquelle lesdits règlements ont été cités au motif que la production de fil continu texturé de polyester était, comme celle d’acide oxalique, à forte intensité de capital. En effet, cet argument n’a pas été mentionné durant la procédure administrative et ne figure pas non plus dans le règlement attaqué.

201    C’est dans le mémoire en défense que le Conseil allègue pour la première fois que, lors de la détermination de la marge bénéficiaire, les institutions ont tenu compte du fait que la production d’acide oxalique était à forte intensité de capital. Dans la duplique, le Conseil ajoute que les institutions n’ont pas appliqué automatiquement la marge bénéficiaire visée qu’elles avaient utilisée dans les procédures précédentes, mais qu’elles n’auraient utilisé la marge bénéficiaire visée de 8 % que lorsqu’elles ont confirmé que cette marge continuait d’être appropriée pour les producteurs d’acide oxalique.

202    Or, d’une part, il s’agit là d’informations nouvelles qui ne ressortent ni du règlement attaqué ni du contexte de la procédure administrative et qui, partant, ne sauraient, à l’instar de la jurisprudence mentionnée au point 174 ci-dessus, pallier les insuffisances de motivation du règlement attaqué. D’autre part, en tout état de cause, ces informations supplémentaires n’expliquent pas non plus à suffisance de droit l’exercice du pouvoir d’appréciation des institutions. En effet, lorsque le Conseil avance que les institutions ont vérifié que la marge bénéficiaire utilisée lors des procédures précédentes était toujours appropriée, en substance, il ne fait que réaffirmer à nouveau l’idée que la marge était raisonnable sans fournir d’explication pour cette appréciation. S’agissant de l’argument concernant la forte intensité de capital, invoqué par le Conseil, il n’a pas été démontré dans quelle mesure cette seule circonstance pourrait motiver le taux retenu de la marge bénéficiaire.

203    Dès lors, force est de constater que le Conseil n’a pas suffisamment motivé la détermination de la marge bénéficiaire.

204    Au vu de la motivation insuffisante de la marge bénéficiaire et de l’insuffisance de motivation concernant l’ajustement des prix à l’exportation relevée au point 187 ci-dessus, il y a lieu de considérer que la façon de déterminer la marge de préjudice dans son ensemble n’est pas suffisamment motivée, en sorte que le règlement attaqué est entaché d’une insuffisance de motivation, au sens de l’article 296 TFUE.

205    Il y a donc lieu d’accueillir la présente branche.

206    Dès lors que la quatrième branche du troisième moyen a été jugée fondée, il n’est plus nécessaire d’analyser les autres branches de ce moyen.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base ainsi que d’une violation des principes de non-discrimination et de bonne administration, en ce que la Commission n’aurait pas respecté le droit de la requérante de présenter des observations écrites sur l’information finale dans un délai minimal de dix jours

207    Le présent moyen comporte trois branches. La première branche est tirée de la violation de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base, la deuxième branche est tirée de la violation du principe de bonne administration et la troisième branche de la violation du principe de non-discrimination.

 Sur la première branche, tirée de la violation de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base

208    Dans le cadre de la présente branche, la requérante fait valoir que le règlement attaqué doit être annulé, au motif que la Commission ne lui a pas octroyé un délai de dix jours pour présenter des observations écrites sur l’information finale, ainsi que le prévoit l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base.

209    À titre liminaire, il y a lieu de souligner que l’article 20 du règlement de base prévoit des modalités relatives à l’exercice du droit des parties concernées, notamment des exportateurs, à être entendues, lequel constitue un droit fondamental reconnu par l’ordre juridique de l’Union et comporte le droit d’être informé des principaux faits et considérations sur la base desquels il est envisagé de recommander l’institution de droits antidumping définitifs (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 27 juin 1991, Al-Jubail Fertilizer/Conseil, C‑49/88, Rec. p. I‑3187, point 15, et arrêt Zhejiang Xinshiji Foods et Hubei Xinshiji Foods/Conseil, point 174 supra, point 76).

210    À cet égard, les entreprises concernées par une enquête précédant l’adoption d’un règlement antidumping doivent être mises en mesure, au cours de la procédure administrative, de faire connaître utilement leur point de vue sur la réalité et la pertinence des faits et circonstances allégués et sur les éléments de preuve retenus par la Commission à l’appui de son appréciation de l’existence d’une pratique de dumping et du préjudice qui en résulterait (voir, en ce sens, arrêts de la Cour Al-Jubail Fertilizer/Conseil, point 209 supra, point 17 ; du 16 février 2012, Conseil et Commission/Interpipe Niko Tube et Interpipe NTRP, C‑191/09 P et C‑200/09 P, non encore publié au Recueil, point 76, et arrêt Zhejiang Xinshiji Foods et Hubei Xinshiji Foods/Conseil, point 174 supra, point 77).

211    L’article 20 du règlement de base précise les exigences concrètes découlant des droits de la défense des entreprises concernées par une procédure antidumping. Plus particulièrement, l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base accorde aux entreprises ayant reçu l’information finale le droit de déposer d’éventuelles observations dans un délai fixé par la Commission qui ne peut être inférieur à dix jours.

212    En l’espèce, comme l’admet le Conseil, la requérante n’a disposé que de sept jours au lieu de dix pour faire des observations sur l’information finale. Il y a dès lors lieu de constater que la Commission a méconnu l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base.

213    Toutefois, le non-respect du délai de dix jours prévu à l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base ne saurait conduire à l’annulation du règlement attaqué que dans la mesure où il existe une possibilité que, en raison de cette irrégularité, la procédure antidumping ait pu aboutir à un résultat différent (arrêt de la Cour du 1er octobre 2009, Foshan Shunde Yongjian Housewares & Hardware/Conseil, C‑141/08 P, Rec. p. I‑9147, point 81).

214    Il convient, également, de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’il ne saurait être imposé à la requérante de démontrer que la décision de la Commission aurait eu un contenu différent, mais uniquement qu’une telle hypothèse n’est pas entièrement exclue, dès lors que la requérante aurait pu mieux assurer sa défense en l’absence de l’irrégularité procédurale (arrêt Foshan Shunde Yongjian Housewares & Hardware/Conseil, point 213 supra, point 94).

215    Tout d’abord, la requérante soutient, en substance, qu’il est possible que l’issue de l’enquête eût été différente si elle avait pu disposer de dix jours au lieu de sept pour présenter des observations écrites sur le document d’information finale, soit jusqu’au 17 février 2012 au lieu du 14 février 2012.

216    Cette argumentation ne saurait être accueillie.

217    En effet, la méconnaissance du délai de dix jours pour la présentation d’observations n’a pas empêché la requérante d’exprimer son point de vue sur le document d’information finale. Après avoir eu l’occasion de consulter le dossier de la Commission, la requérante a présenté ses observations sur le document d’information finale le 14 février 2012.

218    Par ailleurs, lors de l’audition du 22 février 2012, soit huit jours après le dépôt de ses observations et cinq jours après l’expiration du délai de dix jours, elle a encore une fois eu la possibilité de présenter ses arguments. Cependant, la requérante n’a fait que répéter les arguments qu’elle avait déjà avancés au cours de la procédure et dans les observations susmentionnées. Ainsi, même en bénéficiant de huit jours supplémentaires pour analyser le document d’information finale, la requérante n’a présenté aucun argument ni aucune information supplémentaire. La requérante ne peut donc pas prétendre que la violation de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base a affecté sa capacité à présenter des arguments et à exercer ses droits de la défense.

219    En outre, il convient de relever que l’allégation de la requérante selon laquelle la violation de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base est intervenue dans un contexte où l’examen des questions de principe essentielles, telles que le traitement du droit de douane normal, s’est poursuivi jusqu’à la dernière minute est inopérante, dans la mesure où il s’agit d’analyser si la méconnaisance du délai minimal en cause a pu influencer l’issue de la procédure antidumping.

220    Si, de plus, la requérante soutient que les éléments nouveaux révélés uniquement dans le mémoire en défense montrent que d’importantes informations auraient dû lui être communiquées, à l’égard desquelles son droit de présenter des observations aurait dû être respecté, il y a également lieu d’écarter cet argument, dès lors que le respect du délai de dix jours ne pouvait pas avoir d’incidence sur le manque d’information dont la requérante fait grief aux institutions. En effet, même si la requérante avait disposé de dix jours pour faire des observations sur le document d’information finale, elle n’aurait pas pu se prononcer sur des informations non encore divulguées.

221    Il résulte des développements qui précèdent que rien ne permet de considérer que, en raison de la méconnaissance du délai prévu par l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base, la procédure antidumping aurait pu aboutir à un résultat différent.

222    Dès lors, la première branche du quatrième moyen doit être rejetée.

 Sur la deuxième branche, tirée de la violation du principe de bonne administration

223    En substance, la requérante fait valoir que la méconnaissance du délai minimal, prévu par l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base, constitue également une violation du principe de bonne administration.

224    Dans ce contexte, il convient de relever que la possibilité, prévue par l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base, de présenter des observations dans un délai qui ne sera pas inférieur à dix jours peut être considérée comme une composante du droit à une bonne administration, comportant, en vertu de l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, notamment, « le droit de toute personne d’être entendue avant qu’une mesure individuelle qui l’affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ».

225    Cependant, tout comme lors de l’examen de la violation de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base, la prétendue violation du principe de bonne administration ne pourrait aboutir à l’annulation du règlement attaqué que dans la mesure où cette irrégularité aurait pu avoir une incidence sur le résultat de la procédure antidumping, affectant ainsi concrètement les droits de la défense de la requérante. Ainsi qu’il résulte des considérations exposées aux points 217 à 221 ci-dessus, rien ne permet cependant de considérer que la méconnaissance du délai minimal de dix jours a concrètement affecté les droits de la requérante.

226    La deuxième branche du quatrième moyen doit partant également être rejetée.

 Sur la troisième branche, tirée de la violation du principe de non-discrimination

227    La requérante allègue qu’elle a été victime d’une discrimination, dès lors que, à la différence des autres parties intéressées, elle n’a pas bénéficié du délai de dix jours pour présenter ses observations sur l’information finale.

228    À cet égard, il suffit de relever, en tout état de cause, que rien ne permet de considérer que cette circonstance a influencé l’issue de l’enquête, ainsi que cela a déjà été constaté aux points 217 à 221 ci-dessus. Il s’ensuit qu’une différence de traitement justifiant l’annulation du règlement attaqué fait, en l’espèce, défaut.

229    Dès lors, la présente branche doit être rejetée, ainsi que le moyen dans son ensemble.

230    Il résulte de ce qui précède que, la quatrième branche du troisième moyen étant fondée, le règlement attaqué doit être annulé pour insuffisance de motivation en ce qu’il concerne la requérante.

 Sur les dépens

231    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le Conseil ayant succombé dans ses conclusions, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la requérante, à l’exception des dépens occasionnés par l’intervention de la Commission.

232    En vertu de l’article 87, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement de procédure, les institutions qui sont intervenues à un litige supportent leurs dépens. Il s’ensuit que la Commission supportera ses propres dépens. Elle supportera, par ailleurs, les dépens exposés par la requérante en raison de son intervention.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le règlement d’exécution (UE) n° 325/2012 du Conseil, du 12 avril 2012, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations d’acide oxalique originaire de l’Inde et de la République populaire de Chine, est annulé dans la mesure où il concerne Yuanping Changyuan Chemicals Co. Ltd.

2)      Le Conseil de l’Union européenne supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par Yuanping Changyuan Chemicals Co., à l’exception des dépens occasionnés à cette dernière par l’intervention de la Commission européenne.

3)      La Commission supportera ses propres dépens ainsi que les dépens exposés par Yuanping Changyuan Chemicals Co. en raison de son intervention.

Martins Ribeiro

Gervasoni

Madise

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 20 mai 2015.

Signatures

Table des matières


Cadre juridique

Droit de l’OMC

Droit de l’Union européenne

Antécédents du litige

Règlement attaqué

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur la nécessité de rendre un arrêt par défaut

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 3 et de l’article 4, paragraphe 1, du règlement de base, en ce que le Conseil aurait commis une erreur dans la définition de l’industrie de l’Union

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 3, paragraphes 2 et 5, du règlement de base, en ce que le Conseil aurait commis une erreur manifeste dans l’appréciation du préjudice causé à l’industrie de l’Union

Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 9, paragraphe 4, de l’article 14, paragraphe 1, et de l’article 20, paragraphes 1 et 2, du règlement de base, en ce que le Conseil n’aurait pas procédé à une évaluation appropriée et en ce que sa décision ne serait pas suffisamment motivée

Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base ainsi que d’une violation des principes de non-discrimination et de bonne administration, en ce que la Commission n’aurait pas respecté le droit de la requérante de présenter des observations écrites sur l’information finale dans un délai minimal de dix jours

Sur la première branche, tirée de la violation de l’article 20, paragraphe 5, du règlement de base

Sur la deuxième branche, tirée de la violation du principe de bonne administration

Sur la troisième branche, tirée de la violation du principe de non-discrimination

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’anglais.