Language of document : ECLI:EU:T:2004:195

Arrêt du Tribunal

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)
30 juin 2004 (1)

« Marque communautaire – Procédure d'opposition – Demande de marque communautaire verbale M+M EUROdATA – Marque verbale antérieure EURODATA TV – Motif relatif de refus –  Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l'affaire T-317/01,

M+M Gesellschaft für Unternehmensberatung und Informationssysteme mbH, établie à Francfort-sur-le-Main (Allemagne), représentée par Me M. Treis, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme S. Laitinen et M. U. Pfleghar, en qualité d'agents,

partie défenderesse,

partie défenderesse,

l'autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l'OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

l'autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l'OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Mediametrie SA, établie à Paris (France), représentée initialement par Me D. Dupuis-Latour, puis par Me S. Szilvasi, avocats,

partie intervenante,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l'OHMI du 2 octobre 2001 dans l'affaire R 698/2000-1, relative à une procédure d'opposition entre Mediametrie SA et M+M Gesellschaft für Unternehmensberatung und Informationssysteme mbH,



LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),



composé de MM. J. Pirrung, président, A. W. H. Meij et N. J.  Forwood, juges,

greffier : Mme D. Christensen, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 16 décembre 2003,

rend le présent



Arrêt




Antécédents du litige

1
Le 29 novembre 1996, la requérante a présenté, en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié, une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (ci-après l’ « Office »).

2
La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe M+M EUROdATA.

3
Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 9, 16, 35, 41 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune des classes, à la description suivante :

« logiciels informatiques », relevant de la classe 9 ;

« publications et périodiques traitant des recherches dans le commerce alimentaire », relevant de la classe 16 ;

« recherche de marché, analyse de marché et recherches commerciales, services de conseil aux entreprises dans le domaine du marketing et de la distribution », relevant de la classe 35 ;

« séminaires et autres manifestations de formation continue en marketing et en distribution », relevant de la classe 41 ;

« services d’une banque de données », relevant de la classe 42.

4
Le 29 juin 1998, la demande de marque a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 46/98.

5
Le 29 septembre 1998, l’intervenante a formé une opposition, en vertu de l’article 42, paragraphe 1, du règlement n° 40/94, à l’encontre de l’enregistrement de cette marque.

6
L’opposition était fondée sur la marque EURODATA TV ayant fait l’objet des enregistrements suivants:

enregistrement irlandais n° 201 060, en date du 1er juillet 1996 ;

enregistrement français n° 92 414 002, en date du 7 avril 1992 ;

enregistrement international n° 591 515, en date du 25 septembre 1992 et avec effet au Benelux, en Espagne, en Italie et au Portugal.

7
L’opposition était dirigée contre l’enregistrement de la marque demandée pour les services visés par la demande de marque et dénommés « recherche de marché, analyse de marché et recherches commerciales, services de conseil aux entreprises dans le domaine du marketing et de la distribution; séminaires et autres manifestations de formation continue en marketing et en distribution ».

8
L’opposition était fondée sur une partie seulement des services couverts par les enregistrements français et international, à savoir les services suivants : « Compilation et fourniture d’informations commerciales, et plus particulièrement enquêtes et sondages d’opinion dans le domaine audiovisuel », relevant de la classe 35.

9
L’opposition était également fondée sur les services suivants, couverts par l’enregistrement irlandais : « Compilation et fourniture d’informations commerciales; enquêtes commerciales ; services de publicité; conseil et assistance auprès d’entreprises industrielles ou commerciales; préparation et fourniture de statistiques commerciales ; études de marketing; recherche et analyse de marché », relevant de la classe 35.

10
À l’appui de son opposition, l’intervenante a invoqué le motif relatif de refus visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

11
Estimant qu’il n’y avait pas de risque de confusion, la division d’opposition a, par décision du 20 avril 2000, rejeté l’opposition et condamné l’intervenante aux dépens.

12
Le 16 juin 2000, l’intervenante a formé un recours contre cette décision au titre de l’article 59 du règlement nº 40/94.

13
Par décision du 2 octobre 2001 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours a annulé la décision de la division d’opposition et renvoyé l’affaire devant celle-ci pour suite à donner à la demande s’agissant des produits et des services pour lesquels l’enregistrement n’avait pas été refusé, à savoir les « logiciels informatiques », relevant de la classe 9, les « publications et périodiques traitant des recherches dans le commerce alimentaire », relevant de la classe 16, et les « services d’une banque de données », relevant de la classe 42. Elle a également condamné la requérante aux dépens exposés au cours des procédures d’opposition et de recours.

14
Les motifs de la décision attaquée peuvent être résumés comme suit.

15
En ce qui concerne les services en cause, la chambre de recours a considéré qu’ils étaient en partie identiques et en partie très similaires (voir respectivement les points 19 et 20 de la décision attaquée).

16
En ce qui concerne les signes en cause, la chambre de recours a estimé, tout d’abord, que les signes « EUROdATA » et « EURODATA » étaient identiques, le public ne prêtant pas attention à la différence entre les caractères minuscules et les caractères majuscules. Ensuite, elle a considéré que, si elle attribuait au terme « eurodata » un caractère distinctif, il fallait alors considérer que les signes en cause étaient similaires au point de créer une confusion, et si elle décidait, au contraire, que ce terme était pour l’essentiel dépourvu de caractère distinctif, l’accent serait mis en priorité sur les autres éléments des signes, en particulier sur l’élément « M+M », de sorte que les signes devraient être considérés comme étant différents (point 13 de la décision attaquée).

17
À cet égard, la chambre de recours a estimé que le mot « eurodata » n’était pas entièrement dépourvu de caractère distinctif. En effet, il est, selon elle, peu probable que le consommateur concerné soit en mesure de déceler précisément ce que ce terme désigne. Les recherches effectuées sur l’internet par la requérante révéleraient qu’un large éventail d’activités commerciales, sans aucun lien, est associé au mot « eurodata », et montreraient ainsi que celui-ci est loin d’être clairement défini. De plus, la chambre de recours a estimé que ce mot serait perçu comme l’un des éléments caractéristiques de la marque antérieure et de la marque demandée et qu’il n’était donc pas possible de comparer celles-ci en faisant abstraction de ce mot (points 14 et 15 de la décision attaquée).

18
Compte tenu de ce qui précède, la chambre de recours a estimé, d’une part, que la marque demandée était constituée de deux termes distinctifs, dont le terme « eurodata » était prédominant, et, d’autre part, que la marque antérieure ne contenait qu’un seul élément distinctif, EURODATA, l’abréviation « TV » étant descriptive. La chambre de recours en a conclu que le public penserait que les marques en cause proviennent de la même source commerciale (points 16 à 18 de la décision attaquée).


Procédure

19
Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 décembre 2001, la requérante a introduit le présent recours, en langue allemande.

20
Les autres parties ne s’étant pas opposées, dans le délai prévu, à ce que l’allemand soit la langue de procédure devant le Tribunal, celui-ci a désigné l’allemand comme langue de la présente procédure.

21
L’Office et l’intervenante ont déposé leur mémoire en réponse au greffe du Tribunal respectivement le 25 avril 2003 et le 16 mai 2003.


Conclusions des parties

22
La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler la décision attaquée ;

condamner l’Office aux dépens exposés par la requérante.

23
Lors de l’audience, la requérante a précisé que ses conclusions ne tendaient à l’annulation de la décision attaquée que dans la mesure où celle-ci a annulé la partie de la décision de la division d’opposition qui lui était favorable.

24
L’Office conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner la requérante aux dépens.

25
L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

confirmer la décision attaquée ;

rejeter le recours dans son ensemble ;

condamner la requérante au paiement des dépens exposés par l’intervenante.


En droit

Arguments des parties

26
À l’appui de son recours, la requérante invoque un moyen unique, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, en ce que la chambre de recours aurait retenu à tort l’existence d’un risque de confusion.

27
S’agissant des signes en cause, la requérante soutient, d’abord, que la marque antérieure est constituée exclusivement d’éléments descriptifs.

28
Ensuite, la requérante fait valoir, quant à la comparaison visuelle et phonétique des signes en cause, que l’élément « M+M » ne figure que dans la marque demandée et caractérise celle-ci nettement plus que l’élément « eurodata ». Conceptuellement, les signes seraient différents dès lors que l’élément « M+M » représente le nom de la requérante, tandis que l’élément « TV » renvoie à l’activité commerciale de l’intervenante.

29
S’agissant des services en cause, la requérante fait valoir, pour ce qui est de ceux visés par la demande de marque et relevant de la classe 35, qu’il ressort de leur désignation qu’ils n’ont trait qu’au marketing et à la diffusion de données. Or, feraient majoritairement appel à de tels services des personnes actives dans le commerce alimentaire. En outre, il ressortirait des listes des services protégés par la marque antérieure qu’ils sont exclusivement proposés dans le domaine des médias, ainsi que le montrerait le nom de l’intervenante. Enfin, la nature des données collectées par les services en cause serait différente.

30
La requérante ajoute que, si l’on concluait à une similitude des services en cause, l’intervenante pourrait interdire dans toute la Communauté l’utilisation d’autres marques contenant l’élément « eurodata » et concernant la collecte de données.

31
Pour ce qui est des services visés par la demande de marque et relevant de la classe 41, la requérante soutient que le fait qu’ils relèvent d’une classe autre que celle dont relèvent les services protégés par la marque antérieure est au moins un indice de ce qu’il n’existe une similitude entre les services en cause que dans des cas exceptionnels. Or, on ne serait pas en présence d’un cas exceptionnel, dans la mesure où les premiers services relèvent de la formation professionnelle, tandis que les seconds concernent l’obtention et la mise à disposition de données.

32
La requérante ajoute que l’argumentation de la chambre de recours conduirait en dernière analyse à reconnaître qu’une marque protégée pour des services proposés dans un certain domaine et relevant de la classe 35 est automatiquement protégée pour des services proposés dans ce même domaine, mais relevant de la formation professionnelle.

33
L’Office soutient, s’agissant des signes en cause, d’abord, que l’élément « eurodata » n’est pas dépourvu de caractère distinctif et constitue, en outre, l’élément dominant de ces signes. Par ailleurs, il rappelle que la marque antérieure consiste dans le signe EURODATA TV et non pas dans l’élément isolé « eurodata ».

34
Ensuite, l’Office fait valoir que les signes en cause sont similaires sur le plan visuel, du fait qu’ils comprennent chacun l’élément « eurodata » ainsi qu’un autre élément verbal bref. Selon l’Office, si l’élément « M+M » est distinctif, il ne fait pas passer l’élément « eurodata » au second plan.

35
Sur le plan phonétique, les signes en cause seraient similaires en raison de la répétition complète du terme « eurodata », vocable long et facile à prononcer, qui dominerait dans la prononciation et dans la sonorité des signes.

36
En ce qui concerne la similitude conceptuelle, l’Office soutient que les consommateurs moyens concentrent leur attention sur l’élément « eurodata » et que l’ajout de l’élément « M+M » n’a pas d’incidence particulière sur l’impression d’ensemble des signes en cause.

37
S’agissant des services en cause, l’Office affirme, pour ce qui est de ceux relevant de la classe 35, que leur comparaison doit être fondée exclusivement sur leur désignation. Or, celle-ci ne justifierait pas les limitations avancées par la requérante, mais montrerait que les services sont adressés au même public.

38
Pour ce qui est des services visés par la demande de marque et relevant de la classe 41, l’Office fait valoir que «le marketing et la distribution», thèmes de ces services de formation professionnelle, couvrent un domaine très vaste, englobant également les services de « préparation et fourniture de statistiques commerciales » relevant de la classe 35 et protégés par la marque antérieure. Il serait donc probable que le public croie que les premiers services constituent une extension de l’activité commerciale de l’intervenante.

39
L’Office ajoute qu’il ressort de la règle 2, paragraphe 4, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1), que la classification des produits et des services au sens de l’arrangement de Nice est effectuée à des fins exclusivement administratives.

40
S’agissant du public pertinent en vue de l’appréciation du risque de confusion, l’Office a fait valoir à l’audience que ce ne sont pas seulement des entreprises qui seraient intéressées par les services en cause, surtout pour ce qui est des services de formation professionnelle relevant de la classe 41.

41
L’intervenante fait valoir que le terme « eurodata » est distinctif, puisqu’il n’est ni nécessaire ni descriptif pour les services revendiqués et qu’il constitue un néologisme.

42
Quant au caractère distinctif de la marque EURODATA TV, l’intervenante a souligné à l’audience que plusieurs offices nationaux de marques ont accepté de l’enregistrer, ainsi qu’il ressort des enregistrements invoqués à l’appui de l’opposition.

43
Quant aux signes en cause, l’intervenante affirme qu’ils présentent des ressemblances dans leur impression d’ensemble, en raison de l’imitation du terme « eurodata », et ce dans leurs aspects tant visuels que phonétiques et conceptuels. Pour ce qui est de l’aspect visuel, l’intervenante précise que les signes comportent chacun l’élément « eurodata » et un deuxième élément de deux lettres. Phonétiquement, les ressemblances l’emporteraient du fait de l’imitation du terme « eurodata ». Conceptuellement, les deux signes seraient également identiques.

44
Quant aux services en cause, l’intervenante fait valoir qu’ils sont identiques ou similaires.

45
Pour ce qui est du public pertinent en vue de l’appréciation du risque de confusion, l’intervenante a rejoint, à l’audience, la position prise par l’Office.

46
Enfin, l’intervenante a relevé à l’audience que, si les caractères de la marque demandée sont de la même taille, la requérante aurait sollicité, en 1993, l’enregistrement en tant que marque allemande du signe M+M EUROdATA comprenant un élément « eurodata » en caractères beaucoup plus petits que ceux de l’élément « M+M ». De ce fait, la requérante aurait elle-même reconnu que l’élément « eurodata » était distinctif.

Appréciation du Tribunal

47
Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée.

48
Selon une jurisprudence constante de la Cour et du Tribunal, le risque de confusion doit être apprécié globalement, par rapport à la perception du public pertinent et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des marques et celle des produits ou services désignés [arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BERVERLY HILLS) , T‑162/01, non encore publié au Recueil, points 31 à 33, et la jurisprudence citée). L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [arrêt du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips-Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, non encore publié au Recueil, point 47, et la jurisprudence citée].

49
C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu, d’abord, de déterminer le public à prendre en compte pour l’appréciation du risque de confusion et, ensuite, de procéder à la comparaison, d’une part, des services en cause et, d’autre part, des signes en cause.

Sur le public pertinent

50
La chambre de recours n’a pas examiné la question de savoir quel est le public pertinent en vue de l’appréciation du risque de confusion.

51
À cet égard, il convient de constater qu’il ressort de la désignation des services en cause qu’ils sont destinés non pas au consommateur moyen, mais à un public professionnel (voir les termes « de marché », « commerciales », « entreprises », « marketing » et « distribution » cités au point 7 ci-dessus, le terme « commerciales » cité au point 8 ci-dessus, et les termes « commerciales », « industrielles », « marketing » et « de marché » cités au point 9 ci-dessus).

52
Il y a lieu de relever que ce public professionnel est susceptible, lors du choix de services, d’être particulièrement intéressé et attentif aux signes en cause.

53
L’argument de la requérante selon lequel le public pertinent est un public spécialisé, cherchant des prestations de services spécifiques, ne saurait cependant être accepté. Certes, le caractère professionnel du public en cause implique un certain degré de spécialisation. Toutefois, si les termes repris au point 51 ci-dessus montrent que le public ciblé est composé de professionnels, on ne saurait conclure que ceux-ci sont tous des spécialistes dans les domaines respectifs visés par les services en cause et qu’il s’agit donc d’un public particulièrement restreint.

54
En ce qui concerne l’argument avancé tant par l’Office que par l’intervenante, selon lequel ce ne sont pas seulement des entreprises qui seront intéressées par les services en cause, surtout pour ce qui est des services de formation, il suffit de relever que, même en l’admettant, il n’en reste pas moins, au regard des termes utilisés pour désigner lesdits services, cités au point 51 ci-dessus, que les personnes visées seront également des professionnels.

Sur les services en cause

55
En l’espèce, l’opposition se fonde sur une marque antérieure enregistrée pour des services relevant tous de la classe 35 et est dirigée contre l’enregistrement de la marque demandée pour des services relevant, d’une part, de la classe 35 et, d’autre part, de la classe 41 (voir points 7 à 9 ci-dessus). Dès lors, il convient de procéder à deux comparaisons, l’une en prenant en compte les services visés par la demande de marque et relevant de la classe 35 et l’autre en prenant en compte les services visés par cette demande et relevant de la classe 41.

    Sur les services visés par la demande de marque et relevant de la classe 35

56
La chambre de recours a conclu que les services visés par la demande de marque et relevant de la classe 35, d’une part, et les services protégés par la marque antérieure relevant de cette même classe, d’autre part, sont identiques.

57
À cet égard, il convient de relever qu’il ressort de la désignation des services en cause, reproduite aux points 3, 8 et 9 ci-dessus, que les services relevant de la classe 35 et protégés par la marque antérieure correspondent aux services relevant de cette même classe et visés par la demande de marque. Force est donc de constater l’existence d’une identité entre les services en cause de part et d’autre.

58
Les arguments avancés par la requérante et tirés des domaines différents dans lesquels les services en cause sont proposés et de la nature différente des données qu’ils visent ne sont pas de nature à modifier cette constatation. En effet, la chambre de recours a considéré à juste titre, au point 19 de la décision attaquée, qu’elle devait se référer à la liste des services enregistrés au titre de chaque signe en cause. Or, premièrement, la désignation des services visés par la demande de marque et relevant de la classe 35 ne permet pas de conclure que ceux-ci concernent uniquement le commerce alimentaire. Deuxièmement, la désignation des services protégés par la marque antérieure ne permet pas de conclure que ceux-ci concernent uniquement le domaine des médias. Troisièmement, les désignations des services en cause ne permettent pas de conclure que la nature des données qu’ils visent est différente. Il convient de souligner à ce propos que l’utilisation envisagée, dans un secteur ou sur un marché déterminé, d’une marque dont l’enregistrement est demandé ne saurait être prise en compte dès lors que cet enregistrement n’est pas susceptible de comporter une limitation en ce sens.

59
Par ailleurs, l’argument selon lequel une éventuelle reconnaissance d’une similitude entre les services en cause permettrait à l’intervenante d’interdire dans toute la Communauté l’utilisation d’autres marques contenant l’élément « eurodata » et concernant la collecte de données est dénué de pertinence dans le cadre de l’appréciation de la similitude desdits services.

    Sur les services visés par la demande de marque et relevant de la classe 41

60
La chambre de recours a conclu que les services visés par la demande de marque et relevant de la classe 41, d’une part, et les services protégés par la marque antérieure relevant de la classe 35, d’autre part, étaient très similaires.

61
À cet égard, il convient de relever, ainsi que la requérante le fait observer, qu’il ressort de la désignation des services visés par la demande de marque et relevant de la classe 41 qu’ils se rattachent à la formation professionnelle et que leur nature est donc différente des services protégés par la marque antérieure.

62
Toutefois, il ressort également de la désignation de ces services de formation qu’ils ont trait au domaine du marketing et de la distribution. Or, ainsi qu’il est observé de manière convaincante tant au point 20 de la décision attaquée que par l’Office, les services intitulés « compilation et fourniture d’informations commerciales », « enquêtes commerciales », « services de publicité », « études de marketing » et « recherche et analyse de marché », protégés par la marque antérieure, relèvent également du domaine du marketing et de la distribution, dans la mesure où, «dans le monde commercial contemporain, aucune opération de marketing ne peut porter ses fruits sans l’aide de ces services». Dès lors, si les services en cause étaient désignés par des signes similaires, les professionnels connaissant déjà les services protégés par la marque antérieure supposeraient très vraisemblablement que les services visés par la demande de marque ne constituent qu’une nouvelle branche d’activité de l’entreprise prestataire des premiers services.

63
Il s’ensuit qu’il existe un lien étroit dans la destination des services en cause et qu’ils revêtent un caractère complémentaire. Il convient donc de conclure qu’ils sont similaires [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Institut für Lernsysteme/OHMI – Educational Services (ELS), T‑388/00, Rec. p. II-4301, point 56].

64
Cette conclusion n’est pas infirmée par l’argument de la requérante tiré de ce que les services en cause relèvent de classes différentes dans l’arrangement de Nice. En effet, ainsi que l’Office l’a fait observer, la règle 2, paragraphe 4, du règlement n° 2868/95 prévoit que « [d]es […] services […] ne peuvent être considérés comme étant différents au motif qu’ils figurent dans des classes différentes de [la] classification [de Nice] ».

65
Enfin, l’argument de la requérante selon lequel l’argumentation de la chambre de recours conduirait en dernière analyse à ce qu’une marque protégée pour des services relevant de la classe 35 soit automatiquement protégée pour des services de formation dans le même domaine est dénué de pertinence dans le cadre de l’appréciation de la similitude entre les services.

Sur les signes en cause

66
La chambre de recours a conclu que le public pensera que les signes en cause proviennent de la même source commerciale.

67
Aux fins de déterminer le bien-fondé de cette conclusion, il y a lieu de procéder à la comparaison des signes en cause sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

68
Il convient d’effectuer les comparaisons visuelle et phonétique conjointement.

69
À cet égard, il y a lieu de constater, d’abord, que les parties n’ont pas contesté la considération de la chambre de recours selon laquelle l’élément « M+M » de la marque demandée revêt un caractère distinctif (point 16 de la décision attaquée).

70
La chambre de recours a ensuite estimé que l’élément « eurodata » est prédominant dans la marque demandée et que, bien que l’élément « M+M » possède incontestablement un caractère distinctif, il ne permet pas de détourner l’attention de l’élément « eurodata » au point de modifier suffisamment la façon dont le public percevra cette marque. En effet, selon la chambre de recours, d’une part, l’élément « eurodata » est facile à prononcer et à mémoriser et, d’autre part, cet élément est plus long et a plus d’impact que l’élément « M+M », qui est plutôt laconique (points 16 et 18 de la décision attaquée).

71
À cet égard, il y a lieu de relever, d’une part, que l’élément « M+M », désignation brève, est, à tout le moins, aussi facile à prononcer et à mémoriser que l’élément « eurodata ». Il convient d’ajouter, à cet égard, que la requérante a affirmé avec pertinence que les marques comportant de brèves combinaisons de lettres sont extrêmement répandues. D’autre part, c’est précisément parce que l’élément « M+M » est laconique et plus bref que l’élément « eurodata » qu’il est, à tout le moins, aussi susceptible que ce dernier d’attirer l’attention du public, et ce d’autant plus qu’il est le premier élément de la marque demandée et qu’il s’agit d’un public professionnel.

72
De surcroît, s’il est constant que l’élément « TV », figurant dans la marque antérieure, est descriptif, il ne saurait être ignoré dans le cadre de la comparaison visuelle et phonétique des signes en cause. Or, aussi brefs qu’ils soient, les éléments « M+M » et « TV » sont très différents. De plus, le premier est placé au début du signe et le dernier est placé à la fin du signe. Ainsi, l’existence dans les signes en cause d’autres éléments verbaux aboutit à ce que l’impression globale fournie par chaque signe est différente (voir, en ce sens, arrêt GIORGIO BEVERLY HILLS, précité, point 43).

73
Il y a lieu de conclure que les circonstances évoquées aux deux points précédents, prises ensemble, suffisent à écarter les éventuelles similitudes créées par la présence de l’élément « EUROdATA » dans la marque demandée et l’élément « EURODATA » dans la marque antérieure.

74
Il s’ensuit que les signes en cause ne sont similaires ni sur le plan visuel ni sur le plan phonétique.

75
Dans ces conditions, il n’est pas nécessaire d’examiner la considération de la chambre de recours selon laquelle l’élément « eurodata » revêt un caractère distinctif. En effet, même à la supposer exacte, elle n’est pas de nature à écarter les circonstances qui sont à la base de la conclusion tirée au point précédent.

76
Si les comparaisons visuelle et phonétique des signes en cause permettent déjà de conclure que, en l’espèce, ils ne sont pas similaires, il convient néanmoins de les examiner sur le plan conceptuel, d’autant plus que la comparaison conceptuelle n’a pas été exposée de manière explicite dans la décision attaquée.

77
À cet égard, il convient de relever, s’agissant de la marque antérieure, que la considération de la chambre de recours selon laquelle l’élément « TV » est descriptif des services protégés par cette marque n’a pas été contestée. Le Tribunal se rallie à cette considération et ajoute que la signification de cet élément est donc nécessairement claire et déterminée dans l’esprit du public pertinent.

78
S’agissant de la marque demandée, il y a lieu de relever que, dans l’esprit du public pertinent, l’élément distinctif « M+M » n’a pas de signification claire et déterminée, et renvoie purement et simplement au nom de la requérante. Cet élément a donc une signification totalement différente de celle de l’élément « TV » contenu dans la marque antérieure. Dès lors, il n’existe pas de similitude sur le plan sémantique entre ces deux éléments.

79
Concernant, par ailleurs, l’argument de l’Office selon lequel les consommateurs concentreraient leur attention sur l’élément « eurodata » et l’ajout de l’élément « M+M » n’aurait pas d’incidence particulière sur l’impression d’ensemble des signes en cause, il suffit de relever, comme il a déjà été indiqué ci-dessus, que le public pertinent est composé de professionnels, dont l’attention se focalisera, à tout le moins, avec la même intensité sur l’élément « M+M » que sur l’élément « eurodata » figurant dans la marque demandée.

80
Il y a donc lieu de conclure que les signes en cause ne sont pas similaires sur le plan conceptuel.

81
Cette conclusion n’est pas infirmée par l’argument de l’intervenante selon lequel plusieurs offices nationaux de marques ont accepté d’enregistrer sa marque EURODATA TV. En effet, la présente affaire ne porte pas sur le caractère enregistrable du signe EURODATA TV, mais uniquement sur la question de savoir s’il existe un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 entre la marque demandée et la marque antérieure.

82
Enfin, quant à l’argument de l’intervenante tiré de la marque allemande prétendument demandée par la requérante en 1993, il convient de relever que cet argument est dénué de pertinence par rapport à la marque demandée en l’espèce.

83
Il résulte de tout ce qui précède que c’est à tort que la chambre de recours a considéré que le public pensera que les signes en cause proviennent de la même source commerciale.

Sur le risque de confusion

84
La chambre de recours n’a pas explicité sa conclusion concernant le risque de confusion entre les signes en cause. Elle s’est bornée à considérer que, si elle attribue au terme « eurodata » un caractère distinctif, ce qu’elle a fait ensuite dans la décision attaquée, il faut alors considérer que ces signes sont similaires au point de créer une confusion, du fait de l’existence d’une similitude élevée sur les plans phonétique, visuel et peut-être même conceptuel pour des services identiques ou similaires.

85
Ainsi qu’il a été exposé ci-dessus, les services en cause sont en partie identiques et en partie similaires. Toutefois, même s’il existe une identité ou une similarité entre les services en cause, les différences visuelles, phonétiques et conceptuelles entre les signes en cause constituent des motifs suffisants pour écarter l’existence d’un risque de confusion dans la perception du public ciblé (voir, en ce sens, arrêt GIORGIO BEVERLY HILLS, précité, point 52). En effet, lorsque le public ciblé aura à sa disposition des services désignés par la marque demandée, qui présente des dissemblances visuelles, phonétiques et conceptuelles avec la marque antérieure, il n’attribuera pas la même origine commerciale aux services en question. Par conséquent, il n’existe pas de risque que le public ciblé établisse un lien entre les services désignés par chacune des deux marques.

86
Cette conclusion est corroborée par le fait que, ainsi qu’il a été relevé aux points 51 et 52 ci-dessus, les destinataires des services en cause sont tous des professionnels, susceptibles d’être particulièrement intéressés et attentifs aux signes en cause.

87
Il résulte de ce qui précède que, ayant implicitement considéré qu’il y avait un risque de confusion et ayant, sur cette base, annulé la décision de la division d’opposition portant rejet de l’opposition, la chambre de recours a méconnu l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

88
Par conséquent, le moyen unique tiré d’une violation de cette disposition doit être accueilli et la décision attaquée doit être annulée.

89
À cet égard, il y a lieu de rappeler, toutefois, ainsi qu’il est indiqué au point 13 ci-dessus, que la chambre de recours ne s’est pas bornée à annuler la décision de la division d’opposition, mais a également renvoyé l’affaire devant celle-ci pour suite à donner à la demande de marque au titre des produits et services relevant des classes 9, 16 et 42. Cependant, l’opposition dans la présente affaire vise uniquement les services mentionnés dans la demande de marque et relevant des classes 35 et 41. Les produits et services relevant des classes 9, 16 et 42 ne faisaient donc pas partie de l’objet du litige devant la division d’opposition, ni, partant, de l’objet du litige devant la chambre de recours. En effet, il ressort de la décision attaquée que l’intervenante n’a demandé à la chambre de recours que d’infirmer la décision de la division d’opposition et de rejeter la demande pour les services visés par l’acte d’opposition (point 8 de la décision attaquée), et qui relèvent des classes 35 et 41 au sens de l’arrangement de Nice.

90
Dans ces conditions, il convient de qualifier la décision par laquelle la chambre de recours a renvoyé l’affaire devant la division d’opposition pour suite à donner à la demande de marque au titre des produits et services relevant des classes 9, 16 et 42 de simple confirmation de ce qu’il y a lieu, pour l’Office, de poursuivre, pour ce qui concerne ces produits et services, la procédure d’enregistrement de la marque demandée. Par conséquent, il n’y a pas lieu d’annuler la décision attaquée sur ce point ainsi précisé. Une telle confirmation n’est d’ailleurs pas contradictoire avec la partie de la décision de la division d’opposition qui était favorable à la requérante au sens des conclusions présentées par celle-ci, telles qu’elles ont été précisées lors de l’audience (voir point 23 ci-dessus).

91
Il résulte de tout ce qui précède que la décision attaquée doit être annulée, sauf en ce qu’elle renvoie l’affaire devant la division d’opposition pour suite à donner à la demande de marque au titre des produits et services visés par celle-ci et relevant des classes 9, 16 et 42.


Sur les dépens

92
Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

93
En l’espèce, tant l’Office que l’intervenante ont succombé, dans la mesure où il y a lieu d’annuler la décision attaquée. Par ailleurs, la requérante a conclu à ce que l’Office soit condamné aux dépens exposés par elle.

94
Dans ces circonstances, il y a lieu d’ordonner que l’Office supportera les dépens exposés par la requérante et que l’intervenante supportera ses propres dépens.


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)
La décision de la première chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) du 2 octobre 2001 dans l’affaire R 698/2000-1 est annulée, sauf en ce qu’elle renvoie l’affaire devant la division d’opposition pour suite à donner à la demande de marque au titre des produits et services visés par celle-ci et relevant des classes 9, 16 et 42.

2)
L’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) est condamné aux dépens exposés par la requérante.

3)
L’intervenante supportera ses propres dépens.

Pirrung

Meij

Forwood

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 juin 2004.

Le greffier

Le président

H. Jung

J. Pirrung


1
Langue de procédure: l'allemand.