Language of document : ECLI:EU:T:2005:291

ARRÊT DU TRIBUNAL (juge unique)

14 juillet 2005 (*)

« Fonctionnaires – Nomination – Classement en grade – Classement au grade supérieur de la carrière »

Dans l’affaire T-459/04,

Jorge Manuel Pinheiro de Jesus Ferreira, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par MG. Vandersanden, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. V. Joris et Mme M. Velardo, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de la Commission, du 18 mars 2004, portant classement définitif du requérant au grade A 5, échelon 3,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
(juge unique),

juge : M. S. Papasavvas,

greffier : M. I. Natsinas, administrateur, 

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 20 juin 2005,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1       L’article 31 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa rédaction applicable à la présente espèce (ci‑après le « statut »), dispose:

« 1. Les candidats ainsi choisis sont nommés :

- fonctionnaires de la catégorie A ou du cadre linguistique : au grade de base de leur catégorie ou de leur cadre,

[…]

2. Toutefois, l’autorité investie du pouvoir de nomination peut déroger aux dispositions visées ci‑avant dans les limites suivantes :

a) [...]

b) pour les autres grades [que les grades A 1, A 2, A 3 et LA 3], à raison :

- d’un tiers s’il s’agit de postes rendus disponibles,

- de la moitié s’il s’agit de postes nouvellement créés.

[...] »

2       Par décision du 1er septembre 1983, publiée aux Informations administratives n° 420, du 21 octobre 1983, la Commission a précisé les critères applicables à la nomination en grade et au classement en échelon lors du recrutement des fonctionnaires, en application de l’article 31, paragraphe 2, du statut. Cette décision a été modifiée le 7 février 1996 à la suite de l’arrêt du Tribunal du 5 octobre 1995, Alexopoulou/Commission (T‑17/95, RecFP p. I‑A‑227 et II‑683, ci‑après l’« arrêt Alexopoulou »).

3       L’article 2 de la décision du 1er septembre 1983, telle que modifiée, dispose notamment :

« L’autorité investie du pouvoir de nomination nomme le fonctionnaire stagiaire au grade de base de la carrière pour laquelle il est recruté.

Par exception à ce principe, l’autorité investie du pouvoir de nomination peut décider de nommer le fonctionnaire stagiaire au grade supérieur de la carrière, lorsque des besoins spécifiques du service exigent le recrutement d’un titulaire particulièrement qualifié ou lorsque la personne recrutée possède des qualifications exceptionnelles.

[...]

L’expérience professionnelle n’est décomptée qu’à partir de l’obtention du premier diplôme donnant accès, conformément à l’article 5 du statut, à la catégorie dans laquelle l’emploi est à pourvoir [...] »

 Antécédents du litige

4       Au cours des années académiques 1979/1980 et 1980/1981, le requérant a donné des cours d’introduction au droit et d’économie dans un établissement d’enseignement privé portugais.

5       En 1982, le requérant a obtenu une licence en droit de l’Université de Lisbonne.

6       De 1982 à 1984, il a enseigné l’introduction au droit et l’économie, dans des écoles secondaires, en tant que professeur possédant habilitations propres.

7       Du 12 mars 1984 au 1er février 1995, le requérant a été fonctionnaire de la carrière technique supérieure et a occupé divers postes à la direction des douanes du ministère de l’Économie et des Finances portugais.

8       Le 1er février 1995, à la suite d’un concours général, le requérant a été nommé fonctionnaire à la Commission au grade A 7. Il a été affecté à l’unité « Circulation des marchandises » de la direction générale (DG) « Douane et fiscalité indirecte ».

9       Du 16 avril 1997 au 1er décembre 2002, le requérant a été affecté à l’unité « Affaires juridiques et Contrôle de l’application des dispositions communautaires » de la même DG.

10     Le requérant est lauréat du concours général COM/A/2/01, organisé en 2001, pour la constitution d’une réserve de recrutement d’administrateurs principaux (A 4/A 5) dans le domaine douanier (JO 2001, C 24 A, p. 12).

11     À la suite de la publication de l’avis de vacance COM/2002/3652/F et par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci‑après l’« AIPN ») du 31 janvier 2003, prenant effet le 1er décembre 2002, le requérant a été affecté à la direction générale (DG) « Fiscalité et union douanière » de la Commission. Il a alors été classé provisoirement au grade A 5, échelon 2.

12     L’avis de vacance COM/2002/3652/F était rédigé ainsi :

« L’unité responsable du contrôle de l’application des dispositions communautaires en matière de fiscalité et de douane, ainsi que du traitement des questions juridiques se posant au niveau de la Direction Générale, cherche un(e) juriste dynamique, possédant d’excellentes capacités d’analyse et de synthèse pour les tâches suivantes : l’établissement et la gestion des critères de sélection dans le cadre du traitement des dossiers d’infractions concernant le secteur du droit douanier et des accises, la gestion du domaine responsable du traitement des plaintes introduites par les citoyens européens et les opérateurs économiques, l’assistance au Service juridique dans le cadre du contentieux devant la Cour […] »

13     Dans sa partie intitulée « qualifications particulières », cet avis précisait que :

« Le poste implique une connaissance approfondie du rôle de la politique douanière et fiscale dans le contexte des objectifs politiques de la Communauté, l’expérience de la gestion des infractions et des procédures et une excellente maîtrise du français et de l’anglais. La capacité de travailler dans des langues communautaires moins fréquemment utilisées serait un atout. »

14     Par décision du 18 mars 2004 (ci‑après la « décision attaquée »), annulant et remplaçant la décision du 31 janvier 2003, le requérant a été définitivement classé au grade A 5, échelon 3.

15     Le 8 juin 2004, le requérant a formé une réclamation contre la décision attaquée, dans laquelle il demandait, d’une part, le retrait de cette décision et, d’autre part, le constat de l’AIPN qu’elle aurait dû le recruter au grade A 4, échelon 4, avec effet au 1er décembre 2002 .

16     La réclamation a été examinée le 7 juillet 2004 lors d’une réunion interservices, en présence du requérant.

17     La réclamation a été rejetée par décision de l’AIPN le 18 août 2004 (ci‑après la « décision de rejet »).

 Procédure et conclusions des parties

18     Par requête déposée au greffe du Tribunal le 22 novembre 2004, le requérant a formé le présent recours. Le 25 février 2005, la Commission a déposé son mémoire en défense.

19     Le Tribunal (deuxième chambre) a décidé, en application de l’article 47, paragraphe 1, de son règlement de procédure, qu’un deuxième échange de mémoires n’était pas nécessaire en l’espèce.

20     En application des dispositions de l’article 14, paragraphe 2, et de l’article 51, paragraphe 2, de son règlement de procédure, le Tribunal (deuxième chambre) a décidé d’attribuer l’affaire à M. S. Papasavvas, statuant en qualité de juge unique. En outre, il a été décidé d’ouvrir la procédure orale et de demander à la Commission de produire certains documents. La Commission a déféré à cette demande dans le délai imparti.

21     Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales du Tribunal lors de l’audience publique du 20 juin 2005.

22     Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–       déclarer le recours recevable ;

–       annuler la décision attaquée ;

–       condamner la Commission au paiement de la différence entre la rémunération correspondant au classement au grade A 5, échelon 3, et la rémunération correspondant au grade supérieur, augmentée d’un intérêt de retard de 5,75 % par an à compter du 1er décembre 2002 ;

–       condamner la Commission aux dépens.

23     La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–       rejeter le recours comme non fondé ;

–       statuer sur les dépens comme de droit.

 En droit

24     À l’appui de ses conclusions en annulation, le requérant invoque quatre moyens, tirés, premièrement, d’une erreur manifeste d’appréciation dans l’application de l’article 31 du statut, dans la mesure où l’AIPN a décidé qu’il n’était pas un titulaire particulièrement qualifié recruté dans le cadre des besoins spécifiques du service, deuxièmement, d’une erreur manifeste d’appréciation dans l’application de l’article 31 du statut, dans la mesure où l’AIPN a décidé qu’il ne possédait pas des qualifications exceptionnelles, troisièmement, d’une violation des droits de la défense et, quatrièmement, d’une violation de l’obligation de motivation.

 Sur les deux premiers moyens, tirés d’une erreur manifeste d’appréciation dans l’application de l’article 31, paragraphe 2, du statut

 Observations liminaires

25     À tire liminaire, il convient de rappeler que l’article 31, paragraphe 2, du statut prévoit la possibilité de déroger au principe selon lequel tout fonctionnaire est recruté au grade de base de sa catégorie. Selon une jurisprudence constante, la décision de classement, fondée sur l’article 31, paragraphe 2, du statut, relève d’un large pouvoir d’appréciation de l’administration. Dans le cadre du contrôle qu’il exerce en la matière, le Tribunal ne saurait substituer son appréciation à celle de l’AIPN (voir arrêt de la Cour du 29 juin 1994, Klinke/Cour de justice, C‑298/93 P, Rec. p. I‑3009, point 31). Il doit se limiter à vérifier s’il n’y a pas eu violation des formes substantielles, si l’AIPN n’a pas fondé sa décision sur des faits matériels inexacts ou incomplets ou si la décision n’est pas entachée d’un détournement de pouvoir, d’une erreur manifeste d’appréciation ou d’une insuffisance de motivation (ordonnance du 13 février 1998, Alexopoulou/Commission, T‑195/96, RecFP p. I‑A‑51 et II‑117, point 39, ci-après l’« ordonnance Alexopoulou », confirmée par arrêt de la Cour du 1er juillet 1999, Alexopoulou/Commission, C‑155/98 P, Rec. p. I‑4069).

26     Le Tribunal a également jugé que l’AIPN est tenue, en présence de circonstances particulières, de procéder à une appréciation concrète de l’application éventuelle de l’article 31, paragraphe 2, du statut, une telle obligation s’imposant notamment lorsque les besoins spécifiques du service exigent le recrutement d’un titulaire particulièrement qualifié ou lorsque la personne recrutée possède des qualifications exceptionnelles et demande à bénéficier de ces dispositions (arrêt Alexopoulou, précité, point 21). Dès lors que l’AIPN a effectivement procédé à l’appréciation concrète des qualifications et de l’expérience professionnelle d’une personne au regard des critères de l’article 31 du statut, et sous réserve des conditions de classement qu’elle s’est éventuellement imposées lors de l’avis de vacance, elle peut décider librement, en tenant compte de l’intérêt du service, s’il y a lieu d’octroyer un classement au grade supérieur (ordonnance Alexopoulou, point 38, et arrêt du Tribunal du 11 juillet 2002, Wasmeier/Commission, T‑381/00, RecFP p. I‑A‑125 et II‑677, point 56).

27     C’est à la lumière de ces principes qu’il convient d’examiner le bien-fondé des deux premiers moyens relatifs à l’appréciation portée par l’AIPN sur chacune des deux circonstances susvisées.

 Sur le premier moyen, tiré de l’erreur manifeste d’appréciation dans l’application de l’article 31 du statut, dans la mesure où l’AIPN a décidé que le requérant n’était pas un titulaire particulièrement qualifié recruté dans le cadre des besoins spécifiques du service

–       Arguments des parties

28     Le requérant considère que son classement est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation dans la mesure où, d’une part, il ressort de l’avis de vacance que les services avaient des besoins spécifiques, exigeant le recrutement d’un titulaire particulièrement qualifié et, d’autre part, il possède les qualifications particulières exigées par cet avis.

29     Le requérant fait valoir qu’il résulte de l’avis de vacance que l’AIPN cherchait à recruter un juriste dynamique, possédant d’excellentes capacités d’analyse et de synthèse pour des tâches tenant à l’établissement et la gestion des critères de sélection dans le cadre du traitement des dossiers d’infractions concernant le secteur du droit douanier et des accises, la gestion du domaine responsable du traitement des plaintes introduites par les citoyens européens et les opérateurs économiques et l’assistance au service juridique dans le cadre du contentieux devant la Cour de justice.

30     Le requérant souligne, en outre, que cet avis présente une spécificité prouvant qu’il s’agit d’un poste pour lequel les services avaient besoin d’un fonctionnaire particulièrement qualifié, dans la mesure où il contient des exigences spécifiques relatives à des qualifications particulières. Ces dernières se rapportent notamment à la connaissance approfondie du rôle de la politique douanière et fiscale, à une expérience de la gestion des infractions et des procédures, à une excellente maîtrise du français et de l’anglais ainsi qu’à la capacité de travailler dans des langues communautaires moins fréquemment utilisées. Or, le requérant fait observer qu’il possède ces qualifications particulières et rappelle qu’elles correspondent exactement aux fonctions qu’il a exercées pendant les sept dernières années. Il estime que c’est la raison pour laquelle il a été immédiatement recruté, conformément à la note de la DG « Fiscalité et union douanière » du 11 novembre 2002. Ce recrutement immédiat indiquerait qu’il est un titulaire particulièrement qualifié pour remplir les besoins spécifiques du service. Partant, le requérant considère que l’erreur manifeste d’appréciation est avérée dans la mesure où il a été recruté à un poste dont l’avis de vacance exigeait des qualifications particulières.

31     Le requérant estime, par ailleurs, que la décision de rejet est contradictoire avec les déclarations du chef d’unité qui l’a recruté ainsi qu’avec la réalité du marché de l’emploi. À cet égard, le requérant fait noter, tout d’abord, que ledit chef d’unité a affirmé, lors de la réunion interservices du 7 juillet 2004, que, pour ce poste, qui exigeait des qualifications exceptionnelles particulières, il n’avait trouvé aucune autre personne qui était en mesure de satisfaire à ces qualifications et que seul le requérant avait exactement les qualifications particulières exigées en vue de remplir les besoins spécifiques du service, énumérés dans la publication de l’avis de vacance. Le requérant fait observer, en outre, qu’il est difficile, tant au sein de la Commission que sur le marché de l’emploi, de recruter une personne possédant les qualifications exigées par l’avis de vacance, et notamment les qualifications particulières.

32     Ensuite, le requérant relève, d’une part, que les exigences visées par la partie « qualifications particulières » de l’avis de vacance sont exceptionnelles lorsqu’elles sont, comme en l’espèce, exigées cumulativement et, d’autre part, qu’un titulaire particulièrement qualifié est de nature à les posséder. Il note que ces exigences sont toutes obligatoires dans la mesure où seule la condition relative aux langues moins utilisées constitue un atout. Il rappelle également que de telles qualifications doivent être exceptionnelles par rapport à la qualification moyenne des lauréats de procédures de sélection et particulières en ce sens qu’elles sont difficiles à trouver sur le marché du travail. Le requérant relève aussi que l’évaluation du caractère exceptionnel des qualifications d’un fonctionnaire nouvellement recruté ne peut pas être effectuée dans l’abstrait, mais doit se faire au regard du poste pour lequel le recrutement a eu lieu (arrêt du Tribunal du 17 décembre 2003, Chawdhry/Commission, T‑133/02, RecFP p. I‑A‑329 et II‑1617, points 92 et 102).

33     Partant, le requérant considère que l’AIPN a commis une erreur manifeste d’appréciation dans son classement en grade dans la mesure où aucun lauréat de la procédure de sélection n’était particulièrement qualifié au regard des qualifications particulières de l’avis de vacance et que ces exigences cumulatives étaient difficiles à trouver sur le marché de l’emploi.

34     Le requérant souligne, enfin, que les avis de vacance antérieurs à la suite desquels il a été nommé ne contenaient pas l’exigence de qualifications particulières.

35     La Commission rappelle tout d’abord la jurisprudence en matière de classement en grade. Elle signale ensuite qu’elle a demandé, préalablement à la consultation interservices et dans le cadre de l’instruction de la réclamation, des informations à la DG « Fiscalité et union douanière », mais que cette dernière ne lui a fourni aucune réponse. Elle fait observer, en outre, que les appréciations favorables exprimées par le chef d’unité du requérant lors de la réunion interservices ne démontrent pas l’illégalité de la décision attaquée. Elle estime que seule l’AIPN, qui a accès à l’ensemble des profils des lauréats de concours, est en mesure de porter un jugement sur le caractère exceptionnel d’une personne nouvellement recrutée. Elle prend appui à cet égard sur l’arrêt du Tribunal du 26 octobre 2004, Brendel/Commission (T‑55/03, non encore publié au Recueil, point 115).

36     S’agissant des qualifications particulières exigées dans l’avis de vacance, la Commission fait noter que cet avis portait sur les deux grades A 5 et A 4. Elle réfute donc que la mention de qualifications particulières donne lieu automatiquement au classement dans le grade supérieur (A 4) de la carrière A 5-A 4. De plus, selon la Commission, l’adéquation entre les qualifications du requérant et celles exigées par l’avis de vacance démontre uniquement la qualification requise du requérant pour le poste à pourvoir (arrêt Brendel/Commission, précité, points 113 et 114).

37     En outre, la Commission estime que la possession des qualifications particulières indiquées dans l’avis de vacance ne saurait donner lieu ipso facto au classement systématique dans le grade supérieur si l’intérêt du service ne le justifie pas (ordonnance Alexopoulou, précitée, points 36 et 38 ; arrêts Wasmeier/Commission, précité, point 56, et Brendel/Commission, précité, point 112). Par ailleurs, elle relève qu’aucun élément du dossier n’indique qu’elle courait le risque de se passer des services du requérant et que, pour éviter ce risque, elle aurait dû le classer au grade A 4.

38     Enfin, la Commission souligne que la liste du concours COM/A/2/01 comporte 17 lauréats et que huit d’entre eux, dont le profil était hautement pertinent pour l’emploi en cause, étaient encore disponibles lors du recrutement du requérant.

–       Appréciation du Tribunal

39     À titre liminaire, il convient de rappeler que la possibilité de classer au grade supérieur de sa catégorie un candidat particulièrement qualifié en raison des besoins spécifiques du service a pour finalité de permettre à l’institution concernée en sa qualité d’employeur de s’attacher les services d’une personne qui risque, dans le contexte du marché du travail, de faire l’objet de sollicitations nombreuses d’autres employeurs potentiels et donc de lui échapper (arrêt Brendel/Commission, précité, point 112).

40     À cet égard, le Tribunal relève, en premier lieu, que l’avis de vacance COM/2002/3652/F indiquait que le poste était classé aux grades A 4/A 5. Ce fait démontre que les besoins du service pouvaient se satisfaire d’un fonctionnaire de grade A 5 (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 6 juillet 1999, Forvass/Commission, T‑203/97, RecFP p. I‑A‑129 et II‑705, point 48, et Brendel/Commission, précité, point 113).

41     En second lieu, contrairement à ce que soutient le requérant, le Tribunal constate qu’il ne ressort pas de l’avis de vacance qu’il existait des besoins spécifiques du service exigeant le recrutement d’un titulaire particulièrement qualifié. En effet, la référence, dans la partie générale de cet avis, à un juriste dynamique, possédant d’excellentes capacités d’analyse et de synthèse, implique uniquement que la personne recherchée dispose des qualités décrites (voir, en ce sens, arrêt Chawdhry/Commission, précité, point 92).

42     Le Tribunal estime que la même conclusion s’impose s’agissant des qualités visées dans la partie « qualifications particulières », qui complètent celles de la partie générale. Il y a d’ailleurs lieu de relever que ces « qualifications particulières » correspondent à des exigences inhérentes aux institutions européennes, qui ont déjà, par nature, des besoins particuliers (connaissance de plusieurs langues, spécialisation dans différents domaines, etc.) (arrêt du Tribunal du 5 novembre 1997, Barnett/Commission, T‑12/97, RecFP p. I‑A‑313 et II‑863, point 54). Cette mention ne constitue donc pas une spécificité de l’avis en cause et la circonstance que les avis antérieurs invoqués par le requérant ne contenaient pas de partie « qualifications particulières » établit seulement que les exigences de ces postes étaient moindres.

43     En troisième lieu, s’agissant des éléments avancés par le requérant concernant le fait que sa qualification correspond aux exigences de l’avis de vacance et, notamment, à celles de la partie « qualifications particulières », force est de constater qu’une telle adéquation prouve uniquement la qualification requise du requérant pour le poste à pourvoir. Une conclusion identique s’impose s’agissant du fait qu’il a été recruté immédiatement ou du fait qu’il a exercé des fonctions correspondant à ces exigences pendant sept ans. Ces éléments n’établissent donc pas l’existence de besoins spécifiques du service (voir, en ce sens, arrêt Brendel/Commission, précité, point 114).

44     En tout état de cause, même en présence de tels besoins spécifiques, le requérant ne saurait, comme en l’espèce, invoquer l’illégalité de son classement en grade en faisant valoir qu’il répond aux exigences du poste et qu’il est un titulaire particulièrement qualifié. En effet, les fonctionnaires nouvellement recrutés, même s’ils réunissent les conditions pour pouvoir être classés au grade supérieur, n’ont pas pour autant un droit subjectif à un tel classement (ordonnance Alexopoulou, précitée, point 43, et arrêt Chawdhry/Commission, précité, point 44).

45     En quatrième lieu, s’agissant de la prétendue difficulté à recruter des titulaires répondant aux exigences de l’avis de vacance, et notamment de ses « qualifications particulières », le Tribunal constate qu’il ressort des fiches de classement versées au dossier que les profils des lauréats du concours COM/A/2/01 étaient tout aussi pertinents que celui du requérant par rapport au poste en cause. La liste de réserve de ce concours comportait 17 lauréats, dont onze étaient disponibles à la date de recrutement du requérant. Parmi eux, huit ont été recrutés ensuite. Ce constat suffit pour rejeter les arguments du requérant relatifs à la prétendue difficulté de recrutement, ainsi que les déclarations de son chef d’unité, selon lesquelles il n’aurait pas trouvé d’autres personnes et que seul le requérant avait les qualifications requises. À cet égard, comme l’a à juste titre souligné la Commission, le Tribunal relève que seule l’AIPN a accès à l’ensemble des profils des lauréats de concours. Elle est donc la seule en mesure de porter un jugement sur la rareté du profil d’un candidat et la disponibilité d’autres lauréats. Les déclarations du chef d’unité du requérant ne sont donc pas susceptibles, à elles seules, de démontrer une pénurie.

46     Par ailleurs, il y a lieu de relever que la référence à des « qualifications particulières » dans l’avis de vacance, même exigées cumulativement, implique que la personne recherchée devait disposer de ces qualifications spécifiques, mais n’implique pas qu’elles étaient particulières en ce sens qu’elles étaient difficiles à trouver sur le marché du travail (arrêt Chawdhry/Commission, précité, point 92).

47     Dès lors, il n’est pas établi qu’il existait, au moment de la prise de fonctions du requérant, une pénurie de candidats répondant aux exigences de l’avis de vacance COM/2002/3652/F.

48     Partant, le requérant n’a pas démontré que l’AIPN a usé de son pouvoir de manière manifestement erronée en considérant que les besoins du service ne justifiaient pas de le classer au grade supérieur. Il s’ensuit que le premier moyen n’est pas fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation dans l’application de l’article 31 du statut, dans la mesure où l’AIPN a décidé que le requérant ne possédait pas de qualifications exceptionnelles

–       Arguments des parties

49     Le requérant fait valoir, en premier lieu, son expérience professionnelle de plus de 20 ans, se répartissant entre une année et demie dans l’enseignement en droit et en économie, plus de treize années dans des domaines spécifiques du droit douanier, des accises et de la fiscalité et plus de cinq années dans l’exercice des fonctions indiquées dans l’avis de vacance. Le requérant souligne également ses diverses responsabilités au sein de la douane portugaise avant son entrée à la Commission.

50     Il fait remarquer, en second lieu, que les deux rapports de notation antérieurs à son recrutement dans la carrière A 5/A 4 font état d’un niveau d’appréciation « exceptionnel » concernant la compétence liée aux connaissances nécessaires à la fonction et au rendement lié à la régularité et au respect des priorités. Le requérant souligne que ces rapports ont été établis par les services qui ont été, par ailleurs, en charge de l’évaluation de la conformité de son profil professionnel avec les exigences et les qualifications particulières de l’avis de vacance.

51     En troisième lieu, au-delà du niveau exceptionnel de ses qualifications (en général), le requérant estime posséder également « des qualifications exceptionnelles en ce qui concerne les qualifications particulières nécessaires pour les exigences de recrutement d’un titulaire particulièrement qualifié découlant des besoins spécifiques du service ». À cet égard, il fait état de sa connaissance approfondie du rôle de la politique douanière et fiscale dans le contexte des objectifs politiques de la Communauté, de son expérience de la gestion des infractions et des procédures ainsi que de son excellente maîtrise du français, de l’anglais et d’autres langues communautaires moins utilisées, telles que le portugais, l’espagnol et l’italien.

52     La Commission rétorque, tout d’abord, que le requérant se borne à faire état des étapes de sa carrière sans apporter de preuve d’une erreur manifeste d’appréciation. Ensuite, au regard de la durée de l’expérience du requérant, de ses rapports de notation et de ses connaissances linguistiques, la Commission réfute que le profil du requérant soit exceptionnel par rapport à celui d’autres lauréats de concours comparables, et notamment celui dont le requérant est lauréat.

53     La Commission souligne qu’un lauréat du concours COM/A/2/01 a été classé au grade A 4. Ce lauréat possède un profil académique exceptionnel (deux diplômes universitaires après des études de longue durée), une carrière exceptionnelle dans son administration nationale et une expérience professionnelle d’une durée exceptionnelle de 25 ans. La Commission précise qu’il a été recruté au grade supérieur en raison de ses qualifications exceptionnelles et non en raison des besoins spécifiques du service.

54     Enfin, la Commission observe que, même à supposer que le requérant ait des qualités exceptionnelles, il ne pourrait pas obtenir le classement dans le grade supérieur dans la mesure où l’intérêt du service ne l’exige pas.

–       Appréciation du Tribunal

55     À titre liminaire, le Tribunal rappelle que les qualifications exceptionnelles visées par l’article 31, paragraphe 2, du statut doivent être appréciées non pas au regard de la population dans son ensemble, mais par rapport au profil moyen des lauréats de concours, qui constituent déjà une population très sévèrement sélectionnée conformément aux exigences de l’article 27 du statut (arrêt du Tribunal du 3 octobre 2002, Platte/Commission, T‑6/02, RecFP p. I‑A-189 et II‑973, point 38). Cette comparaison ne doit cependant pas s’effectuer par rapport aux lauréats de tous les concours ou procédures de sélection, mais par rapport aux lauréats de concours ou procédures de sélection comparables à celle par laquelle le requérant a été recruté en l’espèce. En revanche, la comparaison ne doit pas se limiter aux seuls lauréats de la même procédure de sélection (arrêt Chawdhry/Commission, précité, point 76). En toute hypothèse, une expérience professionnelle déterminée ou des qualifications académiques spécifiques ne peuvent doter la personne qui les possède d’un droit à être nommée au grade supérieur de la carrière concernée (voir, en ce sens, arrêts Barnett/Commission, précité, point 50, et Platte/Commission, précité, point 38).

56     S’agissant, tout d’abord, du profil académique du requérant, le Tribunal relève, même si le requérant n’invoque pas d’erreur sur ce point, qu’aucun élément du dossier ne permet de conclure au caractère exceptionnel de sa formation par rapport à d’autres lauréats. En effet, la possession d’une licence constitue un minimum pour l’accès à un poste de grade A.

57     S’agissant, ensuite, des arguments liés à l’expérience professionnelle du requérant, le Tribunal constate, au regard de sa fiche de classement, qu’il avait une expérience de 20 ans, 1 mois et 15 jours entre la date d’obtention du diplôme permettant l’accès à la catégorie d’emploi visée par l’avis de vacance et son recrutement. En outre, il y a lieu de noter que l’AIPN n’a pas commis d’erreur de fait et a correctement pris en compte les diverses fonctions occupées par le requérant au cours de sa carrière. Par ailleurs, les fiches de classement des lauréats du concours COM/A/2/01 indiquent que, hormis le requérant, sur cinq lauréats recrutés au grade A 5, avant ou à la même date que lui, un avait une expérience de plus de seize ans, deux avaient une expérience comprise entre 18 et 20 ans, deux avaient une expérience de plus de 20 ans, et pour l’un d’entre eux, de 28 ans. Ces fiches démontrent aussi que la qualité de l’expérience professionnelle des autres lauréats est comparable à celle du requérant, notamment dans le domaine douanier.

58     Il s’ensuit qu’aucun élément ne permet d’établir que la durée et la qualité de l’expérience du requérant sont exceptionnelles par rapport à d’autres lauréats de concours comparables.

59     S’agissant, en outre, de l’argument tiré du rapport de notation pour la période du 1er juillet 1997 au 30 juin 1999, reporté pour la période 1999-2001, le Tribunal relève que des appréciations de niveau « exceptionnel » ont été accordées pour deux rubriques, dont une concerne les connaissances liées à la fonction et les connaissances générales pour la catégorie A. Toutefois, elles sont compensées par celles faisant état d’un niveau « supérieur » (pour six rubriques) ou « normal » (pour deux rubriques). Dès lors, ces appréciations ne démontrent pas que le profil du requérant est exceptionnel.

60     S’agissant, enfin, de l’argument tiré de ce que le requérant posséderait des qualifications exceptionnelles correspondant aux qualifications particulières exigées par l’avis de vacance, il y a lieu de rappeler que cette adéquation prouve uniquement que le requérant correspondait aux exigences du poste pour lequel il a été recruté (voir point 43 ci-dessus) sans pour autant établir que ses qualifications sont exceptionnelles.

61     Dès lors, l’AIPN n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en considérant que les qualifications du requérant n’étaient pas exceptionnelles. Le deuxième moyen est donc non fondé.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation des droits de la défense

62     Ce moyen comporte deux branches, tirées, d’une part, d’une violation du droit d’être entendu et, d’autre part, de l’omission de communiquer certains documents.

 Sur la première branche, tirée d’une violation du droit d’être entendu

–       Arguments des parties

63     Le requérant estime que l’AIPN a violé ses droits de la défense et notamment le droit d’être entendu. Il fait ainsi valoir qu’il résulte de la jurisprudence (arrêts de la Cour du 29 juin 1994, Fiskano/Commission, C‑135/92, Rec. p. I‑2885, point 39, et du 21 septembre 2000, Mediocurso/Commission, C‑462/98 P, Rec. p. I‑7183, point 43) et notamment de l’arrêt de la Cour du 24 octobre 1996, Commission/Lisrestal e.a. (C‑32/95 P, Rec. p. I‑5373, point 21) que les destinataires de décisions qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue avant qu’elles ne soient prises, et ce même si elles ne constituent pas une sanction.

64     Selon le requérant, le critère qui détermine le droit d’être entendu n’est pas la qualification de la décision à intervenir en tant que sanction mais son effet sur les intérêts des personnes individuellement et directement concernées par ces décisions. Il estime que l’étendue de ce droit est mise en lumière par l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO 2000, C 364, p. 1), relatif au droit à une bonne administration.

65     La Commission rétorque que la jurisprudence en matière de fonction publique est plus pertinente que celle citée par le requérant. Elle imposerait d’évaluer la portée des droits de la défense par rapport à la nature de la procédure en cause (arrêts de la Cour du 12 novembre 1996, Ojha/Commission, C‑294/95 P, Rec. p. I‑5863, et du 29 avril 2004, Parlement/Reynolds, C‑111/02 P, Rec. p. I‑5475). La Commission estime que le contenu des droits de la défense est plus ample dans le cadre des procédures disciplinaires que dans celles visant au classement dans le grade supérieur. Enfin, la participation du requérant à la réunion interservices est, selon la Commission, une garantie suffisante des droits de la défense.

–       Appréciation du Tribunal

66     Il y a lieu de rappeler, tout d’abord, que, selon une jurisprudence constante, le respect des droits de la défense dans toute procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief constitue un principe fondamental de droit communautaire qui doit être observé même en l’absence d’une disposition expresse prévue à cette fin par la réglementation concernant la procédure en cause (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 6 mai 1997, Quijano/Commission, T‑169/95, RecFP p. I‑A‑91 et II‑273, point 44 ; du 15 juin 2000, F/Commission, T‑211/98, RecFP p. I‑A‑107 et II‑471, point 28, et du 23 avril 2002, Campolargo/Commission, T‑372/00, RecFP p. I‑A-49 et II‑223, points 30 à 39). Ce principe, qui exige normalement que l’intéressé soit entendu par l’autorité compétente avant l’adoption de l’acte faisant grief, s’applique tant en matière disciplinaire que dans les autres matières relevant de la fonction publique communautaire (arrêt Campolargo/Commission, précité, point 31).

67     Cependant, le Tribunal constate que la procédure ayant abouti, en l’espèce, à la décision de classement définitif du requérant ne constitue pas une procédure ouverte à son encontre. Au contraire, il s’agit d’une procédure pouvant éventuellement aboutir à une situation plus favorable pour lui, à savoir le classement au grade supérieur, sans toutefois que celui-ci ait un droit subjectif à l’être. Par conséquent, le principe qui exige que l’intéressé soit entendu n’est pas applicable en l’espèce. Ainsi que le requérant l’a reconnu lors de l’audience, l’AIPN n’avait donc pas l’obligation de l’entendre avant l’adoption de la décision attaquée.

68     En tout état de cause, le Tribunal relève, d’une part, que le requérant a pu utilement présenter son point de vue lors de la réunion interservices et, d’autre part, que la Commission a pu prendre en compte ses observations ainsi que celles de son chef d’unité en vue de l’adoption de la décision statuant sur la réclamation. Le fait qu’aucun procès-verbal de cette réunion n’ait été établi est sans influence à cet égard. La première branche est donc inopérante et, en tout état de cause, non fondée.

 Sur la deuxième branche, tirée de l’omission de communiquer certains documents

–       Arguments des parties

69     Le requérant reproche à l’AIPN de ne pas lui avoir fourni tous les documents, notamment les appréciations comparatives, qui ont conduit au classement dans le grade A 4 pour d’autres personnes, afin qu’il puisse exercer ses droits de la défense dans le cadre de la procédure qui a conduit à la décision attaquée. Selon le requérant, le respect des droits de la défense exige non seulement que la partie intéressée soit mise en mesure de faire connaître utilement son point de vue sur la pertinence des faits, mais également qu’elle puisse prendre position sur les documents retenus par l’institution communautaire (arrêts de la Cour du 21 novembre 1991, Technische Universität München, C‑269/90, Rec. p. I‑5469, point 25, et Mediocurso/Commission, précité, points 36 et 37). Or, le requérant estime que l’AIPN a examiné ou aurait dû examiner les décisions de classement antérieures afin de s’assurer que la décision attaquée ne viole pas le principe de non-discrimination (arrêts de la Cour du 12 juillet 2001, Jippes e.a., C‑189/01, Rec. p. I‑5689, point 129, et du 8 janvier 2002, Denkavit, C‑507/99, Rec. p. I‑169, point 44).

70     Le requérant rappelle que, lors du classement en grade, l’AIPN doit faire une comparaison entre la personne et les lauréats de concours ou procédures de sélection comparables (arrêt Chawdhry/Commission, précité, point 76). Or, le requérant fait noter qu’il ressort de la décision de rejet que la décision attaquée a été prise sur la base de la proposition du comité de classement qui « a arrêté sa position en se fondant exclusivement sur des documents fournis par le réclamant lui‑même et qui figurent, partant, dans son dossier personnel ». Cela signifie, selon le requérant, que, soit la comparaison n’a pas eu lieu, soit la Commission s’est basée sur des documents secrets qui ne lui ont pas été transmis.

71     La Commission estime qu’il n’est pas indispensable de fournir des données ou des statistiques concernant d’autres candidats, aux fins de l’obligation de motivation et donc du respect des droits de la défense. Il suffit que l’AIPN indique au fonctionnaire concerné le motif individuel et pertinent justifiant la décision prise à son égard. La Commission rappelle que la motivation peut se limiter à l’indication de ce que l’examen de la situation du requérant au regard de l’article 31, paragraphe 2, du statut a été effectué et à l’exposé de l’appréciation portée sur les qualifications et le poste pour lequel il a été recruté (arrêts Chawdhry/Commission, précité, points 119 à 121, et Brendel/Commission, précité, points 76, 123 et 124).

72     Enfin, la Commission estime que la violation des droits de la défense est démentie dans la mesure où le requérant a pu faire valoir les préjudices qu’il prétend avoir subi, notamment dans le cadre de sa réclamation, sans avoir eu accès aux documents prétendument nécessaires à sa défense .

–       Appréciation du Tribunal

73     Il y a lieu de rappeler que l’AIPN n’est pas tenue, dans le cadre de l’obligation de motivation, de fournir au requérant des données concernant le classement d’autres fonctionnaires ou des statistiques y relatives. De telles données détaillées ne sont pas pertinentes pour vérifier la régularité de l’évaluation des qualifications du requérant, compte tenu de la nature spécifique de cette évaluation et de sa limitation au cas d’espèce. Par conséquent, l’AIPN n’est pas tenue de les exposer pour satisfaire à l’obligation de motiver la décision attaquée (arrêts Chawdhry/Commission, précité, points 119 à 122, et Brendel/Commission, précité, points 123 et 124).

74     Or, si l’AIPN n’est pas tenue de fournir, dans le cadre de son obligation de motivation, des informations portant sur le classement d’autres fonctionnaires au grade A 4, il ne saurait, pour des raisons identiques, lui être reproché de ne pas les avoir fournies au requérant dans le cadre de la procédure ayant abouti à la décision attaquée ou à la décision de rejet.

75     Partant, en ne lui communiquant pas les documents relatifs au classement d’autres fonctionnaires, l’AIPN n’a pas violé les droits de la défense du requérant. En tout état de cause, force est de constater que ce dernier a eu accès, au cours de la procédure devant le Tribunal, aux fiches et aux décisions de classement des autres lauréats du concours COM/A/2/01.

76     S’agissant, enfin, des allégations du requérant selon lesquelles, soit la comparaison avec les qualifications d’autres lauréats de procédures de sélection n’a pas eu lieu, soit l’AIPN s’est basée sur des documents secrets qui ne lui ont pas été transmis, le Tribunal considère que ces deux allégations ne sont pas fondées. En ce qui concerne la première, il ressort de la décision de rejet que l’AIPN a effectué la comparaison avec les qualifications d’autres lauréats de procédures de sélection comparables. En ce qui concerne la seconde, le requérant n’a pas apporté d’élément démontrant que l’AIPN a basé sa décision sur des documents secrets. En tout état de cause, l’AIPN n’était pas tenue de lui communiquer des documents relatifs aux évaluations comparatives qu’elle a effectuées (point 74 ci-dessus).

77     Partant, la deuxième branche n’est pas fondée et le troisième moyen doit, par conséquent, être rejeté dans son ensemble.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

 Arguments des parties

78     Le requérant estime que la décision attaquée est dépourvue de toute motivation quant aux raisons pour lesquelles l’AIPN a refusé de le classer au grade A 4. Or, le requérant rappelle que la motivation d’une décision faisant grief doit permettre au juge communautaire d’exercer son contrôle sur sa légalité et de fournir à l’intéressé les indications nécessaires pour savoir si la décision est bien fondée (arrêts de la Cour du 20 novembre 1997, Commission/V, C‑188/96, Rec. p. I‑6561, point 26, et du 23 septembre 2004, Hectors/Parlement, C‑150/03 P, non encore publié au Recueil). En outre, le requérant fait observer que la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne consacre, en son article 41, l’obligation pour l’administration de motiver ses décisions.

79     Le requérant critique, en outre, la décision de rejet en ce qu’elle ne contient aucune motivation concernant les déclarations du chef d’unité. Il souligne aussi l’absence de motivation concernant le fait que sa compétence et son rendement ont été jugés exceptionnels dans les rapports de notation. Le refus de considérer le classement en grade à la lumière du critère des besoins spécifiques du service est également, selon le requérant, non motivé.

80     Par ailleurs, le requérant estime que la décision de rejet ignore la réunion interservices et ne reproduit pas la mention des qualifications particulières de l’avis de vacance. Le requérant affirme également que la motivation relative à l’appréciation de son profil par rapport aux besoins spécifiques du service est laconique. Il relève que l’AIPN se limite à déclarer que « la spécificité des compétences du requérant ne constitue pas une circonstance exceptionnelle par rapport à un profil de lauréat de haut niveau » et « [qu’elle] ne rencontre pas de difficultés particulières à recruter des personnes ayant une formation et une expérience professionnelle comparables à celles [du requérant] ».

81     Enfin, le requérant fait référence à la réponse de la Commission du 23 juillet 2003 à sa réclamation concernant son classement, lors de son recrutement en 1995. Le requérant fait noter qu’il ressort de cette réponse que la Commission n’avait pas établi de conditions particulières in abstracto dans le cadre de l’avis de vacance COM/2046/94, à la suite duquel il avait été engagé. Il souligne que tel n’est pas le cas de l’avis de vacance COM/2002/3652/F, qui contient, dans son libellé, un champ mentionnant des conditions particulières. Or, le requérant considère que, en l’espèce, l’AIPN a ignoré que des conditions particulières de recrutement étaient exigées.

82     La Commission rappelle la jurisprudence relative à la motivation des décisions de classement. Elle estime que la connaissance d’éléments relatifs à d’autres candidats ainsi que de statistiques est inutile pour comprendre la logique suivie par l’AIPN, dans la mesure où celle‑ci se prononce par rapport à une catégorie de personnes déjà sélectionnées en fonction de critères rigoureux et qui, venant de différents pays, possèdent des expériences professionnelles différenciées. La Commission rappelle à cet égard les prescriptions de l’article 27 du statut.

83     S’agissant du laconisme de la motivation, la Commission fait remarquer qu’il ressort de la décision de rejet que les motifs du refus sont suffisamment clairs et estime avoir procédé, dans le cadre de la réclamation, à une nouvelle appréciation de l’application, à l’égard du requérant, de l’article 31, paragraphe 2, du statut. Elle fait noter que cette appréciation a abouti à la décision de rejet. La Commission relève, à cet égard, que la motivation de la décision de rejet est identique à celle qui a été jugée suffisante par le Tribunal dans l’arrêt Platte/Commission, précité (points 39 à 42). Elle rappelle également la motivation concernant son appréciation des besoins spécifiques du service.

 Appréciation du Tribunal

84     À titre liminaire, le Tribunal rappelle qu’une décision de classement présente certaines analogies avec une décision de promotion. Ces analogies justifient de transposer, aux décisions portant classement en grade, les principes régissant l’obligation de motivation des décisions en matière de promotion. À cet égard, il est de jurisprudence constante, d’une part, que l’obligation peut être utilement remplie au stade de la décision statuant sur la réclamation et, d’autre part, qu’il suffit que la motivation concerne la réunion des conditions légales auxquelles le statut subordonne la régularité de la procédure de promotion, la révélation de l’appréciation comparative que l’AIPN a effectuée, en particulier, n’étant pas exigée. Il suffit que l’AIPN indique au fonctionnaire concerné le motif individuel et pertinent justifiant la décision prise à son égard (arrêts du Tribunal du 14 juin 2001, McAuley/Conseil, T‑230/99, RecFP p. I‑A‑127 et II‑583, point 52, et Brendel/Commission, précité, point 120).

85     En l’espèce, il y a tout d’abord lieu de constater que la décision attaquée ne contient aucune motivation. Toutefois, le Tribunal observe que la décision de rejet est suffisamment motivée et expose clairement les raisons pour lesquelles l’AIPN a considéré qu’un classement au grade A 5 était approprié. En effet, il ressort de cette décision qu’une appréciation concrète de l’application éventuelle de l’article 31, paragraphe 2, du statut a été effectuée au regard de la situation individuelle du requérant. À cet égard, la décision de rejet fournit une motivation correcte et pertinente du refus de le classer au grade supérieur sur la base des deux circonstances permettant de déroger au principe de l’article 31, paragraphe 1, du statut.

86     En outre, la procédure devant le Tribunal et, notamment, les documents versés au dossier ont permis au requérant de connaître avec suffisamment de clarté le raisonnement suivi par l’AIPN (arrêt Brendel/Commission, précité, point 122).

87     En tout état de cause, eu égard au niveau de motivation exigé par la jurisprudence précitée, les lacunes dénoncées par le requérant (points 79 à 81 ci-dessus) ne sauraient être constitutives d’une violation de l’obligation de motivation.

88     Enfin, contrairement à ce qui a été évoqué lors de l’audience, le fait que la fiche de classement du requérant comporte une référence à l’article 32 du statut n’est pas contradictoire avec la motivation relative à l’application de l’article 31, paragraphe 2, du statut dans la mesure où cette référence se rapporte à la proposition du comité de classement d’appliquer des dispositions plus favorables dans le classement en échelon du requérant. En outre, ce n’est qu’au cas où le comité de classement aurait proposé de le classer au grade supérieur que sa fiche aurait comporté la mention de l’article 31, paragraphe 2.

89     Il résulte de tout ce qui précède que l’AIPN n’a pas violé l’obligation de motivation. Le quatrième moyen n’est donc pas fondé.

90     Par conséquent, les conclusions en annulation doivent être rejetées. Il n’y a dès lors plus lieu à statuer sur la demande du requérant visant au paiement de la différence entre la rémunération correspondant au classement au grade A 5, échelon 3, et la rémunération correspondant au grade supérieur. Le recours doit donc être rejeté dans son ensemble.

 Sur les dépens

91     Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, en vertu de l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci. En l’espèce, le requérant ayant succombé, il y a lieu pour chaque partie de supporter ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (juge unique)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Chaque partie supportera ses propres dépens.

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 14 juillet 2005

Le greffier

 

Le juge


H. Jung

 

S. Papasavvas


* Langue de procédure : le français.