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ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)

1er avril 2008 (*)

«Manquement d’État – Directive 2004/36/CE – Sécurité des aéronefs des pays tiers empruntant les aéroports communautaires – Non-transposition dans le délai prescrit»

Dans l’affaire C‑417/07,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 11 septembre 2007,

Commission des Communautés européennes, représentée par M. R. Vidal Puig, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Grand-Duché de Luxembourg, représenté par M. C. Schiltz, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

LA COUR (septième chambre),

composée de M. U. Lõhmus, président de chambre, MM. A. Ó Caoimh et A. Arabadjiev (rapporteur), juges,

avocat général: M. M. Poiares Maduro,

greffier: M. R. Grass,

vu la procédure écrite,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1        Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en ne prenant pas les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 2004/36/CE du Parlement européen et du Conseil, du 21 avril 2004, concernant la sécurité des aéronefs des pays tiers empruntant les aéroports communautaires (JO L 143, p. 76, ci-après la «directive»), ou, en tout état de cause, en ne communiquant pas lesdites dispositions à la Commission, le Grand-Duché de Luxembourg a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive.

2        L’article 11 de la directive prévoit que les États membres devaient mettre en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à celle-ci au plus tard le 30 avril 2006 et en informer immédiatement la Commission.

 La procédure précontentieuse

3        N’ayant pas été informée des dispositions adoptées par le Grand-Duché de Luxembourg pour assurer la transposition de la directive dans son ordre juridique interne dans le délai prescrit et ne disposant pas non plus d’autres éléments d’information lui permettant de conclure que ces dispositions avaient effectivement été mises en vigueur, la Commission a engagé la procédure en manquement prévue à l’article 226 CE.

4        Après avoir mis le Grand-Duché de Luxembourg en demeure de présenter ses observations, la Commission a, le 15 décembre 2006, émis un avis motivé invitant cet État membre à prendre les mesures nécessaires pour se conformer à cet avis dans un délai de deux mois à compter de la réception de celui-ci.

5        La réponse des autorités luxembourgeoises audit avis motivé ayant fait apparaître que les dispositions nécessaires à la transposition de la directive n’avaient pas encore été adoptées par ledit État membre, la Commission a décidé d’introduire le présent recours.

 Sur le recours

6        Dans son mémoire en défense, le Grand-Duché de Luxembourg reconnaît, en substance, ne pas avoir transposé la directive dans le délai imparti, tout en faisant état du processus législatif en cours aux fins de cette transposition. Il conclut néanmoins au rejet du recours, soutenant que, à l’issue du délai fixé dans l’avis motivé, la Commission disposait du calendrier de transposition qu’elle avait souhaité obtenir et qu’elle avait, «au moins tacitement», validé lors de la «réunion ‘paquet’» du 9 novembre 2006. Dans ces circonstances, la Commission ne saurait, conformément au principe de coopération loyale, intenter un recours en manquement à ce stade de la procédure.

7        À cet égard, il importe de rappeler que, dans le système établi par l’article 226 CE, la Commission dispose d’un pouvoir discrétionnaire pour intenter un tel recours et qu’il n’appartient pas à la Cour d’apprécier l’opportunité de l’exercice de celui-ci (arrêts du 6 juillet 2000, Commission/Belgique, C‑236/99, Rec. p. I–5657, point 28, et du 2 juin 2005, Commission/Luxembourg, C‑266/03, Rec. p. I–4805, point 35 et jurisprudence citée).

8        Il en résulte que le Grand-Duché de Luxembourg ne saurait justifier l’inobservation des obligations et des délais prescrits par la directive en invoquant un prétendu manque de coopération loyale de la Commission.

9        Par ailleurs, le Grand-Duché de Luxembourg fait valoir que l’intérêt de la poursuite de la procédure serait douteux, dans la mesure où il diligenterait les inspections sur le terrain en application des dispositions de la directive et alimenterait régulièrement la banque de données centralisée visée à l’article 2, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 768/2006 de la Commission, du 19 mai 2006, mettant en œuvre la directive 2004/36 en ce qui concerne la collecte et l’échange d’informations relatives à la sécurité des aéronefs empruntant les aéroports communautaires et à la gestion du système d’information (JO L 134, p. 16).

10      À cet égard, il suffit de rappeler, en premier lieu, que, selon une jurisprudence constante, les dispositions d’une directive doivent être mises en œuvre avec une force contraignante incontestable, avec la spécificité, la précision et la clarté requises afin qu’il soit satisfait à l’exigence de sécurité juridique (voir, notamment, arrêts du 17 mai 2001, Commission/Italie, C-159/99, Rec. p. I–4007, point 32; du 27 février 2003, Commission/Belgique, C‑415/01, Rec. p. I–2081, point 21, ainsi que du 27 avril 2006, Commission/Allemagne, C‑441/02, Rec. p. I‑3449, point 73 et jurisprudence citée).

11      Or, force est de constater que les actions matérielles partielles que le Grand-Duché de Luxembourg affirme avoir entreprises, ainsi qu’exposé au point 9 du présent arrêt, ne répondent pas aux impératifs de cette jurisprudence.

12      En second lieu, l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêts du 8 novembre 2001, Commission/Italie, C‑127/99, Rec. p. I–8305, point 38, et du 27 octobre 2005, Commission/Luxembourg, C‑23/05, Rec. p. I–9535, point 9).

13      Or, en l’espèce, il est constant que, à l’expiration du délai imparti dans l’avis motivé, le Grand-Duché de Luxembourg n’avait pas adopté les mesures nécessaires pour assurer la transposition de la directive dans son ordre juridique interne.

14      Dans ces conditions, le recours introduit par la Commission doit être considéré comme fondé.

15      Par conséquent, il convient de constater que, en n’ayant pas adopté, dans le délai prescrit, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive, le Grand-Duché de Luxembourg a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de celle-ci.

 Sur les dépens

16      Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation du Grand-Duché de Luxembourg et celui-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (septième chambre) déclare et arrête:

1)      En n’ayant pas adopté, dans le délai prescrit, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 2004/36/CE du Parlement européen et du Conseil, du 21 avril 2004, concernant la sécurité des aéronefs des pays tiers empruntant les aéroports communautaires, le Grand-Duché de Luxembourg a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de celle-ci.

2)      Le Grand-Duché de Luxembourg est condamné aux dépens.

Signatures


* Langue de procédure: le français.