Language of document : ECLI:EU:T:2010:162

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

27 avril 2010 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire représentant une bouteille émerisée blanche – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Absence de caractère distinctif acquis par l’usage – Article 7, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 3, du règlement (CE) n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), et paragraphe 3, du règlement (CE) n° 207/2009] – Obligation de motivation – Droits de la défense – Article 73 du règlement n° 40/94 (devenu article 75 du règlement n° 207/2009) »

Dans l’affaire T‑109/08,

Freixenet, SA, établie à Sant Sadurní d’Anoia (Espagne), représentée par Mes F. de Visscher, E. Cornu et D. Moreau, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 30 octobre 2007 (affaire R 97/2001‑1), concernant une demande d’enregistrement du signe représentant une bouteille émerisée blanche comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. J. Azizi, président, Mme E. Cremona et M. S. Frimodt Nielsen (rapporteur), juges,

greffier : Mme  T. Weiler, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 28 février 2008,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 11 juillet 2008,

à la suite de l’audience du 30 octobre 2009,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 1er avril 1996, la requérante, Freixenet, SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)], concernant la représentation suivante :

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2        Dans la demande de marque, la requérante :

–        indique que la marque demandée relève de la catégorie « autre », c’est-à-dire qu’il ne s’agit pas d’une marque verbale, figurative ou tridimensionnelle, et qu’elle consiste en la forme de présentation d’un produit ;

–        revendique une couleur, à savoir la couleur « dorée mate » ;

–        décrit la marque de la façon suivante : il s’agit d’une « bouteille émerisée blanche qui, lorsqu’elle est remplie de vin, prend une apparence dorée mate comme si elle était givrée » ;

–        annexe une déclaration dans laquelle elle affirme que « la marque ne vise pas à obtenir la protection privée et exclusive de la forme de la bouteille, mais bien de l’aspect spécifique de sa surface ».

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 33 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Vins mousseux ».

4        Par décision du 29 novembre 2000, l’examinateur a rejeté la demande de marque au motif que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif et que les preuves rapportées par la requérante ne permettaient pas de conclure à l’existence d’un caractère distinctif de la marque acquis par l’usage, au sens de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 (devenu article 7, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009).

5        Par décision du 11 février 2004, rendue dans l’affaire R 97/2001-4, la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours formé par la requérante contre la décision de l’examinateur.

6        Par arrêt du 4 octobre 2006, Freixenet/OHMI (Forme d’une bouteille émerisée blanche) (T‑190/04, non publié au Recueil), le Tribunal a annulé cette décision en jugeant que la chambre de recours avait violé l’article 73 du règlement n° 40/94 (devenu article 75 du règlement n° 207/2009) et le principe du respect des droits de la défense.

7        Par décision du 12 décembre 2006, le présidium des chambres de recours a renvoyé l’affaire à la première chambre de recours.

8        Par lettre du 18 juin 2007, en considération du fait que le Tribunal a reproché à la quatrième chambre de recours d’avoir fondé sa décision sur des preuves qui n’avaient pas été préalablement portées à la connaissance de la requérante, la première chambre de recours a transmis à cette dernière les illustrations des bouteilles qui étaient citées dans la décision de la quatrième chambre de recours annulée par le Tribunal ainsi que les adresses des liens Internet cités dans la décision de l’examinateur du 29 novembre 2000.

9        Par lettre du 9 août 2007, la requérante a présenté ses observations sur les informations précitées.

10      Par décision du 30 octobre 2007 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        décider que la demande de marque communautaire n° 32532 satisfait aux conditions pour être publiée conformément à l’article 40 du règlement n° 40/94 (devenu article 39 du règlement n° 207/2009) ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      La requérante invoque trois moyens à l’appui de son recours. Le premier moyen est pris de la violation de l’article 73 du règlement n° 40/94. Les deuxième et troisième moyens sont tirés de la violation, respectivement, de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009] et de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94.

 Sur la violation de l’article 73 du règlement n° 40/94

 Sur la violation de l’obligation de motivation

–       Arguments des parties

14      La requérante fait valoir que la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation, dès lors que la chambre de recours se fonde, pour apprécier le caractère distinctif intrinsèque de la marque demandée, sur des considérations de fait qui ne seraient pas assorties d’un renvoi à des éléments précis du dossier. En particulier, la chambre de recours aurait dû indiquer dans la décision attaquée quels éléments du dossier permettraient de vérifier que les bouteilles de vins mousseux auxquelles elle se réfère étaient bien présentes sur le marché le 1er avril 1996, date à laquelle la demande d’enregistrement a été déposée.

15      L’OHMI soutient que la chambre de recours ne s’appuie que sur des faits connus de tous, à savoir qu’il existe de nombreuses formes de présentation pour le vin et que, en règle générale, le choix d’une bouteille se fait par référence à l’étiquette apposée sur celle-ci. Ce raisonnement se suffirait à lui-même. Un examen comparatif au regard des bouteilles utilisées par les concurrents de la requérante ne serait donc pas nécessaire.

–       Appréciation du Tribunal

16      En vertu de l’article 73, première phrase, du règlement n° 40/94 (devenu article 75, première phrase, du règlement n° 207/2009), l’OHMI est tenu de motiver ses décisions. Cette motivation a le double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge communautaire d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision [voir arrêt du Tribunal du 15 mars 2006, Develey/OHMI (Forme d’une bouteille en plastique), T‑129/04, Rec. p. II‑811, point 18, et la jurisprudence citée].

17      À cet égard, lorsque la chambre de recours conclut à l’absence de caractère distinctif intrinsèque de la marque demandée, elle peut fonder son analyse sur des faits résultant de l’expérience pratique généralement acquise de la commercialisation de produits de large consommation, lesquels sont susceptibles d’être connus de toute personne et sont notamment connus des consommateurs de ces produits. Dans un tel cas, la chambre de recours n’est pas tenue de présenter des exemples d’une telle expérience pratique (voir arrêt Forme d’une bouteille en plastique, point 16 supra, point 19, et la jurisprudence citée).

18      En l’espèce, la chambre de recours s’est appuyée sur l’expérience pratique pour apprécier le caractère distinctif intrinsèque de la marque demandée. Au point 28 de la décision attaquée, la chambre de recours indique ainsi que l’expérience pratique permet de considérer que la couleur d’une bouteille sera toujours influencée par la couleur du liquide qu’elle contient à moins que la bouteille ne soit suffisamment foncée pour dissimuler son contenu. De même, au point 34 de la décision attaquée, la chambre de recours relève que « l’expérience montre que le véritable élément qui permet d’établir dans la pratique un lien entre un vin mousseux et son fabricant n’est pas tant l’aspect superficiel de la bouteille, mais bien l’étiquette qu’elle porte, sur le devant, bien visible, pour permettre au consommateur d’identifier clairement le vin mousseux recherché ». Elle poursuit en relevant que, « [e]n principe, l’aspect formel se prête mal à informer le consommateur (à moins qu’il ne sache pas lire) concernant l’origine de la bouteille et son contenu ».

19      Il y a d’ailleurs lieu de noter que la chambre de recours étaye cette « maxime fondée sur l’expérience » en relevant, au point 35 de la décision attaquée, qu’il ressort de documents présentés par la requérante (annexe 10 de la lettre du 17 mars 2000 et écrit du 29 mars 2001 exposant les motifs du recours devant la quatrième chambre de recours) que la bouteille qu’elle commercialise n’apparaît jamais nue, c’est-à-dire sans être assortie d’une étiquette. La chambre de recours poursuit, au point 36 de la décision attaquée, en faisant observer qu’elle se réfère également à la jurisprudence communautaire relative aux marques tridimensionnelles et aux pratiques observables sur le marché pertinent. Enfin, au point 37 de la décision attaquée, la chambre de recours conclut son analyse en relevant que l’expérience quotidienne confirme l’idée que la « véritable marque du vin mousseux » est représentée par l’étiquette qui porte les inscriptions, tandis que le dessin, la forme et la finition de la bouteille ne font que compléter l’ensemble d’un point de vue esthétique, et que la couleur, dans le cas d’espèce, ne fait que refléter celle du produit contenu dans la bouteille. La chambre de recours souligne qu’« il en est ainsi, au regard de l’expérience quotidienne, avec tout vin mousseux ».

20      En conséquence, lorsqu’elle ne se réfère pas de manière précise à des éléments du dossier, la chambre de recours se réfère de manière expresse à l’expérience pratique généralement acquise de la commercialisation de produits de large consommation. Ces références à l’expérience pratique figurent au nombre des motifs énoncés par la chambre de recours pour conclure que la marque demandée est dépourvue de caractère distinctif au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. La chambre de recours n’avait pas, sur ce point, à fournir des références précises à des éléments du dossier.

21      C’est donc à tort que la requérante soutient que la chambre de recours a méconnu l’article 73, première phrase, du règlement n° 40/94 en ne fournissant pas des références précises à des éléments du dossier quand elle évoque l’expérience pratique. La première branche du premier moyen, relative à la violation de l’obligation de motivation, doit ainsi être rejetée.

22      Enfin, et sans que cela remette en cause la conclusion qui précède, il convient de relever que, au point 37 de la décision attaquée, la chambre de recours étaye sa thèse selon laquelle l’expérience quotidienne confirme l’idée que la véritable marque du vin mousseux est représentée par l’étiquette en relevant que « [l]es illustrations citées dans la décision de la quatrième chambre de recours, envoyées à la [requérante], et celles que la [requérante] a elle-même pu trouver au cours de ses recherches, en constituent la meilleure preuve ».

23      Sur ce point, la requérante fait valoir à juste titre que, dans la décision attaquée, la chambre de recours n’indique pas en quoi ces illustrations permettent d’identifier des bouteilles présentes sur le marché au 1er avril 1996, date de la demande d’enregistrement à prendre en considération pour l’appréciation du caractère distinctif de la marque demandée. Il n’en demeure pas moins que toutes ces illustrations confirment bien l’idée selon laquelle la véritable marque du vin mousseux est représentée par l’étiquette et non par la forme de son conditionnement, ce qui constitue la motivation avancée par la chambre de recours pour fonder la décision attaquée.

 Sur la violation du droit d’être entendu

–       Arguments des parties

24      La requérante souligne que le droit d’être entendu consacré par l’article 73, seconde phrase, et par l’article 38, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 (devenus article 75, seconde phrase, et article 37, paragraphe 3, du règlement n° 207/2009) qui comporte une disposition similaire, porte tant sur les motifs de fait que sur ceux de droit, ainsi que sur les éléments de preuve. Dans le cas où la chambre de recours recueille d’office des éléments de fait destinés à fonder sa décision, elle devrait obligatoirement les communiquer aux parties afin que celles-ci puissent faire connaître leurs observations. Si la chambre de recours entend ne plus tenir compte d’éléments qui étaient jusqu’alors opposés à la requérante et qu’elle décide de fonder sa décision sur d’autres éléments de fait ou de droit, elle devrait également l’indiquer au préalable à la partie concernée, de manière que celle-ci puisse adapter sa défense en conséquence.

25      En l’espèce, la position de l’OHMI aurait évolué en ce qui concerne certains éléments de preuve. En effet, après que le Tribunal a reproché à la quatrième chambre de recours d’avoir fondé sa décision sur des illustrations qui n’avaient pas été préalablement soumises à la requérante et qui étaient extraites de sites Internet qui ne lui étaient pas accessibles, la première chambre de recours aurait communiqué ces éléments à celle-ci le 18 juin 2007. Dans ses observations du 9 août 2007, la requérante aurait relevé que deux sites Internet cités par l’examinateur ne lui étaient toujours pas accessibles. De plus, les illustrations communiquées par la chambre de recours ne se rapporteraient pas à la période antérieure au 1er avril 1996, date à laquelle la demande d’enregistrement de la marque aurait été déposée, et certaines de ces illustrations ne permettraient pas d’identifier les bouteilles reproduites. En conséquence, la chambre de recours aurait décidé de renoncer à utiliser le contenu de sites Internet commençant par www.eurogood-drinks.com (point 22 de la décision attaquée).

26      Dans ce contexte, la requérante fait valoir que la chambre de recours a opéré, dans la décision attaquée, une nouvelle appréciation du caractère distinctif de la marque demandée. La chambre de recours se serait écartée des éléments de fait qui avaient été opposés à la requérante dans la lettre du 18 juin 2007 sans lui donner la possibilité de formuler ses observations sur la thèse finalement retenue, ne fût-ce qu’à l’occasion d’une audience au titre de l’article 75 du règlement n° 40/94 (devenu article 77 du règlement n° 207/2009) comme la requérante l’aurait demandé dans ses observations du 9 août 2007. Selon la requérante, les considérations factuelles à propos desquelles elle n’a pas eu la possibilité de présenter des observations sont les suivantes :

–        « le consommateur est habitué à observer une large variété de types de bouteilles pour vins mousseux, caractérisées par une infinité de couleurs et finitions [ ; t]ant la couleur du verre de la bouteille que l’aspect de sa superficie (brillant, mat, en partie brillant et en partie mat, recouvert d’un matériau réflecteur, ou constitué d’autres finitions – telle qu’une couche fine de poussière blanche pour simuler l’ancienneté ou la présentation dans des mailles de fer –) ne vont pas représenter pour un consommateur raisonnablement attentif une indication de l’origine commerciale du produit, en l’espèce du vin mousseux » (point 32 de la décision attaquée) ;

–        « [u]n consommateur raisonnablement attentif ne se fonde généralement pas sur des aspects aussi ‘fantaisistes’ et variables pour choisir un vin mousseux, tels que la couleur du verre, sa finition brillante ou mate, la poussière artificielle, les mailles de fer, etc[ ; l]’expérience montre que le véritable élément qui permet d’établir, dans la pratique, un lien entre un vin mousseux et son fabricant n’est pas tant l’aspect superficiel de la bouteille, mais bien l’étiquette qu’elle porte, sur le devant, bien visible, pour permettre au consommateur d’identifier clairement le vin mousseux recherché [ ; l]e comportement habituel de l’immense majorité des consommateurs de vins en tout point de la Communauté consiste à choisir leur marque de vin en fonction de l’étiquette – qui les informe au sujet du fabricant – et rares sont ceux qui le font en regardant la couleur du verre ou sa finition superficielle [ ; e]n principe, l’aspect formel se prête mal à informer le consommateur (à moins que celui-ci ne sache pas lire) concernant l’origine de la bouteille et son contenu [… ;] d’une manière générale, les consommateurs n’identifient pas l’origine commerciale ou industrielle d’un produit sur la base de son aspect formel » (point 34 de la décision attaquée) ;

–        « [e]n d’autres termes, la véritable marque du vin mousseux est représentée par l’étiquette qui porte les inscriptions, tandis que le dessin, la forme et la finition de la bouteille ne font que compléter l’ensemble d’un point de vue esthétique » (point 37 de la décision attaquée) ;

–        « la forme de présentation des vins mousseux, représentée dans la demande, ne remplit pas une fonction distinctive, car l’acheteur de vins mousseux ne prête pas attention à l’aspect de la bouteille (brillant, mat, de couleur verte, rouge, bleue, incolore, etc.) » (point 41 de la décision attaquée) ;

–        « la chambre [de recours] est uniquement en mesure de conclure que les chiffres relatifs aux ventes concernent en réalité la marque CARTA NEVADA, ou tout au moins une bouteille entièrement habillée » (point 50 de la décision attaquée) ;

–        « [e]n d’autres termes, les éléments distinctifs de la marque objet de la demande d’enregistrement et de celle dont l’usage a été démontré présentent manifestement de grandes différences [ ; l]a chambre [de recours] n’ignore pas l’existence de la pratique des marques consistant à revêtir un produit donné de plusieurs marques [ ; c]ependant, si plusieurs marques sont appliquées sur un même produit, mais qu’à aucun moment ce produit n’apparaît revêtu que d’une seule de ces marques, il y a lieu d’y voir un indice clair que la prétendue marque ne fonctionne pas comme telle dans la pratique » (point 54 de la décision attaquée).

27      L’OHMI relève que la chambre de recours fonde la décision attaquée sur des éléments de faits notoires, connus de la requérante, concernant en particulier la variété des modes de présentation des conditionnements de vins mousseux. Au surplus, ces faits notoires seraient établis par les pièces communiquées à la requérante dans la lettre du 18 juin 2007. La requérante aurait donc, en toute hypothèse, eu l’opportunité de présenter ses observations sur ces éléments de fait. La même conclusion vaudrait pour les éléments de droit qui fondent la décision attaquée.

–       Appréciation du Tribunal

28      En vertu de l’article 73, seconde phrase, du règlement n° 40/94, les décisions de l’OHMI ne peuvent être fondées que sur des motifs sur lesquels les parties ont pu prendre position. Cette disposition porte tant sur les motifs de fait que sur ceux de droit, ainsi que sur les éléments de preuve (arrêt Forme d’une bouteille émerisée blanche, point 6 supra, point 28).

29      Par ailleurs, le respect des droits de la défense constitue un principe général du droit communautaire, en vertu duquel les destinataires des décisions des autorités publiques qui affectent de manière sensible leurs intérêts doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue (voir arrêt Forme d’une bouteille émerisée blanche, point 6 supra, point 29, et la jurisprudence citée).

30      Conformément à ce principe, une chambre de recours de l’OHMI ne peut fonder sa décision que sur des éléments de fait ou de droit sur lesquels les parties ont pu présenter leurs observations. Par conséquent, dans le cas où la chambre de recours recueille d’office des éléments de fait destinés à servir de fondement à sa décision, elle doit obligatoirement les communiquer aux parties afin que celles-ci puissent faire connaître leurs observations (arrêt de la Cour du 21 octobre 2004, KWS Saat/OHMI, C‑447/02 P, Rec. p. I‑10107, points 42 et 43, et arrêt Forme d’une bouteille émerisée blanche, point 6 supra, point 30).

31      Si le droit d’être entendu, tel que consacré par l’article 73, seconde phrase, du règlement n° 40/94, s’étend à tous les éléments de fait ou de droit ainsi qu’aux éléments de preuve qui constituent le fondement de l’acte décisionnel, il ne s’applique toutefois pas à la position finale que l’administration entend adopter [arrêt du Tribunal du 20 avril 2005, Krüger/OHMI – Calpis (CALPICO), T‑273/02, Rec. p. II‑1271, points 64 et 65, et la jurisprudence citée].

32      En l’espèce, la requérante fait grief à l’OHMI d’avoir méconnu son droit d’être entendue en ce que l’OHMI aurait modifié son analyse à la suite des observations qu’elle a présentées le 9 août 2007 concernant la lettre du 18 juin 2007 relative à différentes illustrations de bouteilles citées au point 23 de la décision de la quatrième chambre de recours du 11 février 2004 annulée par le Tribunal ou imprimées à partir des liens Internet cités par l’examinateur dans sa décision du 29 novembre 2000. Ces illustrations et les observations présentées à ce propos par la requérante sont évoquées aux points 13 à 16 de la décision attaquée.

33      À cet égard, il n’est pas contesté que la chambre de recours a renoncé à utiliser dans la décision attaquée le contenu des liens Internet qui commencent par www.eurogood, auxquels la requérante n’a pas pu accéder (point 22 de la décision attaquée). Cette renonciation est intervenue à la suite des observations de la requérante du 9 août 2007 sur la lettre du 18 juin 2007 (point 15.A.a de la décision attaquée).

34      Cette renonciation ne couvre toutefois qu’une partie des éléments communiqués pour observations à la requérante et il existe d’autres éléments étayant l’appréciation retenue dans la décision attaquée, qu’il s’agisse de faits notoires ou du contenu des échanges intervenus entre la requérante et l’OHMI.

35      En effet, premièrement, il importe de relever que, dans le cadre de la procédure d’examen de la marque demandée, l’examinateur a indiqué à la requérante, par lettre du 19 novembre 1998, que la marque demandée revêtait l’aspect habituel d’une bouteille de vin mousseux et, de ce fait, était dépourvue de tout caractère distinctif en application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

36      Dans sa réponse du 17 mars 2000, la requérante a présenté ses observations sur l’appréciation de l’examinateur et les conséquences juridiques de celles-ci au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. À cette occasion, la requérante a communiqué à l’OHMI plusieurs documents destinés à attester le fait que la marque demandée présenterait une certaine originalité par rapport aux autres formes de bouteilles utilisées pour le vin mousseux.

37      Par décision du 29 novembre 2000, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement de la marque en considérant que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif intrinsèque au motif que l’apparence de la bouteille dont la requérante a demandé l’enregistrement en tant que marque ne permettait pas aux consommateurs de déterminer l’origine commerciale des produits ni de les distinguer des produits concurrents, puisqu’elle ne diffère pas dans une large mesure des autres bouteilles en verre transparent habituellement utilisées pour la commercialisation des vins mousseux. L’examinateur a également indiqué à la requérante qu’était proposée sur le marché une large variété de types de bouteilles, qui diffèrent par leurs matériaux et leurs couleurs (bouteilles dorées, noires, argentées, opaques, brillantes, mates, etc.) et l’a invitée à consulter trois sites Internet pour prendre connaissance de quelques-unes de ces bouteilles.

38      Dans son recours formé le 22 janvier 2001 contre cette décision, la requérante a contesté l’appréciation de l’examinateur selon laquelle la marque demandée revêt l’apparence habituelle que présentent les vins mousseux. Selon la requérante, cette affirmation serait dépourvue de motivation. Elle a indiqué que l’examinateur aurait dû donner d’autres exemples de bouteilles afin d’étayer cette appréciation et de lui permettre ainsi de présenter des observations. De plus, la requérante a relevé que deux des trois sites Internet cités par l’examinateur n’étaient pas accessibles et que le troisième site ne contenait pas d’information pertinente.

39      Dans sa décision du 11 février 2004, la quatrième chambre de recours a repris le raisonnement de l’examinateur. Elle a indiqué qu’une bouteille pouvait « jouer le rôle » d’une marque si celle-ci se distinguait clairement et facilement des autres formes de bouteilles disponibles sur le marché. À cet égard, la chambre de recours relève, dans ladite décision, qu’elle a pu vérifier d’office que les entreprises productrices de vins mousseux, dans de nombreux pays de l’Union européenne, utilisent différentes sortes de bouteilles. Ces bouteilles sont citées au point 23 de ladite décision. Au regard de la grande variété de bouteilles auxquelles le consommateur est confronté au moment de choisir un vin mousseux, la chambre de recours a considéré qu’il était impossible de conclure que le verre émerisé blanc qui, lorsqu’il est rempli de cava, présente une couleur dorée constitue une caractéristique suffisamment spécifique et frappante pour différencier clairement la bouteille objet de la demande des autres bouteilles commercialisées sur le marché des vins mousseux, ce qui la prive d’un caractère distinctif intrinsèque. Le point 23 de la décision de la quatrième chambre de recours est rédigé comme suit :

« La chambre de recours a pu vérifier qu’en plus de la bouteille ‘classique’, c’est-à-dire la bouteille en verre transparent de couleur verte, les entreprises productrices de vins mousseux au sein de l’Union européenne (cava, champagne, sekt, spumante) utilisent également des bouteilles en verre transparent blanches, qui, lorsqu’elles sont remplies de boisson, prennent une couleur différente, ou bien des bouteilles en verre opaque de différentes couleurs, ou en verre de couleur translucide, certains d’entre eux émerisés. En guise d’exemples, citons les bouteilles suivantes :

–        les bouteilles en verre transparent (vins mousseux finlandais ‘Rose Kavaljeeri’ et ‘Elysée Arena’ ; allemand ‘Henkell Trocknen Rose’, ‘Layat Cabinett trocken’ ; français ‘Ayala Brut Rosé’, ‘Cattier Brut Rosé’, ‘Alfred Gratien, Cuvée Paradis Rosé Brut’, ‘Bernard Massard, Cuvée de l’Écusson Rosé’, ‘Champagne Demoiselle, Vranken, Rosé Brut Grande Cuvée’, ‘Champagne Louis de Sacy Brut’ ; autrichien ‘Kattus Frizzante Rosé’; espagnol ‘Cava Topacio de Castellblanca’),

–        les bouteilles en verre noir (vins mousseux français ‘Coteaux Champenois Ambonnay Rouge, Les Cruôts, A. Soutiran’, ‘Veuve Clicquot Rosé Réserve 1969’, ‘Bouzy Rouge Delbeck’, ‘Perrier-Jouët, Blason de France Brut’, ‘Champagne Gardet Rosé’, ‘Bollinger Grande Année 1995’, ‘Champagne Laurent-Perrier, Cuvée Rosé Brut’, ‘Champagne Henri Abelé, Le sourire de Reims’, ‘Brut Rosé de Henri Abelé’; autrichien ‘Hochriegl’ ; italien ‘Sergio Mionetto, Edizione Brut’ et espagnol ‘Delapierre Brut’),

–        les bouteilles en verre bleu clair translucide (vins mousseux français ‘Champagne Louis de Sacy, Eden Park’, ‘Pommery POP’; espagnol ‘Codorníu Rondel Extreme Brut’), bleu foncé opaque (français ‘Champagne Delbeck, Cuvée Origines 1995’, ‘Champagne Henri Abelé, Le sourire de Reims Rosé’), bleu cobalt (français, ‘Champagne Piper Heidsieck Brut Rosé’ ; autrichien ‘Hochriegl, Großer Jahrgang 1998’),

–        les bouteilles en verre marron clair translucide (vins mousseux français ‘Champagne de Castellane, Cuvée Florens 1990’ ; espagnol ‘Cava Topacio de Castellblanch’),

–        les bouteilles couleur argentée (vin mousseux autrichien ‘Hochriegl Chardonnay’),

–        les bouteilles en verre translucide (vins mousseux espagnol ‘Cava Cristal de Castellblanch’ et ‘Delapierre Glacé Semiseco’); finlandais ‘Kulta Kavaljeeri’, ‘Elysée Artic’ ; allemand ‘Sektkellerei Deidesheim, Gewürztraminer trocken’ ; français ‘Champagne A. Soutiran, Perle Noire Brut’ , ‘Champagne Vranken, Demoiselle, Premiers Crus Millésime 1996’,

–        les bouteilles de couleur dorée opaque (vin mousseux autrichien ‘Hochriegl Chardonnay’). »

40      À la suite de l’annulation de cette décision par le Tribunal et de la réattribution de l’affaire à la première chambre de recours, celle-ci a décidé de communiquer à la requérante, par lettre du 18 juin 2007, une copie des illustrations des bouteilles que la quatrième chambre de recours avait citées dans sa décision, ainsi que deux adresses de sites Internet (www.eurofood-drinks.com/kattusE.htm et www.eurofood-drinks.com/Millenium.htm) cités par l’examinateur, afin que la requérante puisse présenter ses observations sur ces illustrations. Ces illustrations sont à prendre comme des exemples de bouteilles auxquelles le consommateur, qui souhaiterait acheter un vin mousseux, est susceptible d’être confronté.

41      Par lettre du 9 août 2007, la requérante a présenté ses observations sur les illustrations de bouteilles communiquées par la première chambre de recours. En premier lieu, la requérante a indiqué que les adresses des sites Internet visés dans la lettre du 18 juin 2007 ne lui étaient pas accessibles et que les informations qui en étaient tirées ne pourraient donc pas servir à refuser l’enregistrement. En deuxième lieu, s’agissant des illustrations communiquées le 18 juin 2007, qu’il s’agisse des copies imprimées à partir des liens Internet ou des exemples de bouteilles mentionnées dans la décision de la quatrième chambre de recours annulée par le Tribunal, la requérante a relevé qu’il lui était difficile d’identifier certaines bouteilles en raison de la mauvaise qualité des images transmises. En troisième lieu, la requérante a souligné qu’il n’était pas établi que les bouteilles produites par l’OHMI aient été antérieures au 1er avril 1996, date de la demande d’enregistrement de marque communautaire, ni qu’elles aient présenté une couleur dorée et une teinte mate ou émerisée ressemblant à celles de la marque demandée.

42      En parallèle, la requérante a communiqué en annexe à ses observations des photographies en format A 4 de plusieurs bouteilles dont une illustration avait été communiquée par la première chambre de recours dans sa lettre du 18 juin 2007. Ces photographies permettent de mieux distinguer les bouteilles en question.

43      Deuxièmement, il convient de souligner que, ainsi qu’il a été indiqué aux points 17 et 18 ci-dessus, les motifs retenus dans la décision attaquée pour apprécier le caractère distinctif de la marque demandée reposent principalement sur les déductions faites de l’expérience pratique et non sur les illustrations mentionnées au point 23 de la décision de la quatrième chambre de recours à propos desquelles la requérante a pu faire part de ses observations conformément à l’article 73, seconde phrase, du règlement n° 40/94.

44      En substance, la première chambre de recours considère qu’il importe peu que la requérante soit ou non la seule à commercialiser ses produits dans un conditionnement dépoli, le consommateur concerné étant habitué à observer une large variété de types de bouteilles pour vins mousseux, caractérisées par une infinité de couleurs et de finitions. Or, pour ce consommateur, l’élément essentiel permettant d’identifier l’origine du produit serait l’étiquette apposée sur la bouteille de vin mousseux plutôt que la forme de la bouteille ou son aspect extérieur. Cela serait corroboré par le fait qu’il n’existerait aucun exemple de bouteille qui soit commercialisée à l’état nu, c’est-à-dire sans étiquette contenant des éléments verbaux (points 32 à 37 de la décision attaquée).

45      Cette appréciation représente la position finale adoptée par l’OHMI et n’avait donc pas en principe à être soumise pour observations à la requérante (voir la jurisprudence citée au point 31 ci-dessus). À la différence des illustrations de bouteilles évoquées au point 23 de la décision de la quatrième chambre de recours annulée par le Tribunal, cette appréciation ne repose pas sur des éléments de fait recueillis d’office par la chambre de recours. Cette appréciation s’insère dans le prolongement de l’argumentation évoquée par l’examinateur le 19 novembre 1998, indiquant à la requérante que la marque demandée revêtait l’aspect habituel d’une bouteille de vin mousseux et était de ce fait dépourvue de tout caractère distinctif en application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. À la suite de cette indication, la requérante a fait valoir, dans ses observations, l’originalité de la marque demandée. À cet égard, la première chambre de recours indique, dans la décision attaquée, que, quelle que soit cette originalité, il ne peut être fait abstraction du fait que le consommateur porte plus d’attention à l’étiquette du produit qu’à son conditionnement.

46      Il convient de relever à ce propos que les déductions faites de l’expérience pratique – à savoir l’importance de l’étiquette apposée sur un vin mousseux en tant qu’élément permettant d’établir l’origine du produit pour le consommateur concerné et la variété des présentations – peuvent être présumées connues de tous et, notamment, de la requérante. Elles appartiennent à la catégorie des faits notoires, dont l’exactitude n’a pas à être établie par l’OHMI (arrêt de la Cour du 22 juin 2006, Storck/OHMI, C‑25/05 P, Rec. p. I‑5719, points 50 et 51). Cette argumentation développée à titre principal par la chambre de recours dans la décision attaquée s’inscrit dans le contexte des discussions intervenues entre la requérante et l’OHMI en ce qui concerne les éléments à prendre en considération pour établir le caractère distinctif de la marque demandée.

47      En effet, chacune des considérations factuelles exposées aux points 32, 34, 37, 41, 50 et 54 de la décision attaquée, citées par la requérante (voir point 26 ci-dessus), exprime l’idée que l’étiquette constitue l’élément de référence pour le consommateur de vin mousseux, lequel ne se fonde pas sur les autres éléments, tels la couleur du verre de la bouteille ou l’aspect de sa superficie, qui peuvent varier considérablement d’une bouteille à l’autre. Cette idée constitue l’élément central du raisonnement de l’OHMI et n’est qu’une constatation résultant de l’expérience pratique. Cette idée ne pouvait être ignorée de la requérante, comme l’atteste par ailleurs le fait que tous les éléments qu’elle a communiqués à l’OHMI dans le cadre de la procédure montrent à suffisance que la bouteille et son étiquette (ou un marquage correspondant) ne font qu’un. La requérante était donc parfaitement en mesure de réfuter l’idée retenue par l’examinateur, puis par la première chambre de recours, pour établir l’absence de caractère distinctif de la marque demandée. Elle pouvait ainsi faire valoir que ce n’était pas l’étiquette, mais le conditionnement du vin mousseux, qui était habituellement pris en considération par le consommateur concerné dans le choix de ce produit.

48      En dernier lieu, force est de constater que la requérante a bien eu l’occasion de faire valoir ses observations sur les illustrations des bouteilles citées au point 23 de la décision de la quatrième chambre de recours, à propos desquelles elle n’avait pas eu l’occasion de se prononcer initialement, ce qui avait entraîné l’annulation de cette décision au motif d’une violation de son droit d’être entendue. La requérante n’est donc pas fondée à invoquer à cet égard la violation de l’article 73, seconde phrase, du règlement n° 40/94. Les seuls éléments auxquels la première chambre de recours a renoncé dans la décision attaquée sont ceux qui sont tirés des deux sites Internet qui n’étaient pas accessibles à la requérante.

49      Il résulte de ce qui précède que la requérante a été entendue conformément à l’article 73, seconde phrase, du règlement n° 40/94, dans la mesure où elle a pu prendre position sur les raisons pour lesquelles l’OHMI envisageait de rejeter la demande d’enregistrement de la marque en ce qu’elle ne présenterait pas le caractère distinctif requis à cet égard.

50      C’est donc à tort que la requérante soutient que la chambre de recours a méconnu l’article 73, seconde phrase, du règlement n° 40/94 en ne l’invitant pas à présenter ses observations sur des faits notoires qu’elle ne pouvait pas ignorer et qui constituent la position finale de l’OHMI ou sur les illustrations des bouteilles citées au point 23 de la décision de la quatrième chambre de recours. Il ressort de ce qui précède que la seconde branche du premier moyen, relative à la violation du droit d’être entendu, doit être rejetée.

51      Lors de l’audience, il a été demandé à la requérante d’indiquer en quoi sa position procédurale serait concrètement affectée par le fait qu’elle estime ne pas avoir eu l’occasion de se prononcer sur les observations de l’OHMI déduites de l’expérience pratique. En réponse aux questions posées par le Tribunal, la requérante a repris le contenu de son argumentation relative au caractère distinctif de la marque demandée, notamment en ce qui concerne la date à prendre en considération pour son appréciation. Cette argumentation est examinée ci-après et permet d’envisager de manière exhaustive tous les arguments qui ont été ou qui auraient pu être présentés par la requérante au stade de la procédure devant l’OHMI.

 Sur la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94

 Arguments des parties

52      La requérante fait valoir que la chambre de recours a violé l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 en considérant que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif. En effet, la requérante aurait établi le caractère spécifique de sa marque lors du dépôt de la demande et la chambre de recours n’aurait aucunement démontré que le consommateur concerné ne pouvait pas distinguer la bouteille de la requérante des formes de bouteilles habituellement présentes sur le marché au 1er avril 1996, seule date pertinente pour l’appréciation du caractère distinctif. L’affaire étant en état d’être jugée, la décision attaquée devrait dont être annulée et réformée.

53      Au soutien de cette argumentation, premièrement, la requérante allègue que la marque demandée consiste en la « forme d’un produit ou de son conditionnement », conformément à l’article 4 du règlement n° 40/94. La demande de marque combinerait la forme d’une bouteille champenoise, une couleur dorée totalement inhabituelle au moment de la demande et l’aspect émerisé ou mat de la bouteille. Une déclaration jointe à la demande d’enregistrement préciserait également que la requérante n’entend pas obtenir la « protection privative et exclusive de la forme de l’emballage, mais de l’aspect spécifique de sa surface ». Dès lors, en indiquant, au point 25 de la décision attaquée, que la forme de la bouteille ne serait pas demandée, la chambre de recours commettrait une erreur, en ne tenant ainsi pas compte des éléments constitutifs de la marque demandée.

54      Deuxièmement, la requérante précise que, au moment du dépôt de sa demande, la présentation d’une bouteille champenoise de couleur dorée mate était originale et se démarquait des présentations habituelles. À cette époque, les vins mousseux auraient été traditionnellement présentés dans des bouteilles de couleur vert foncé ou brun foncé d’aspect brillant ou très rarement transparent, et, en tout état de cause, jamais émerisé ou mat. Au soutien de son argumentation, la requérante se réfère aux illustrations de différentes bouteilles de vins mousseux de divers producteurs et aux articles de magazines espagnols spécialisés relatifs aux vins mousseux figurant en annexe à la requête. La marque demandée se distinguerait donc clairement, par son aspect spécifique, des autres vins mousseux. L’étendue très limitée des produits visés dans la demande d’enregistrement constituerait d’ailleurs un facteur en faveur de la reconnaissance du caractère distinctif du signe demandé dès lors que celui-ci serait inhabituel dans ce secteur.

55      Troisièmement, la requérante fait valoir que les éléments suivants permettent d’établir que les consommateurs de vins mousseux et les producteurs concurrents identifient immédiatement ses bouteilles dorées mates émerisées et les distinguent des autres vins mousseux sur le marché sans même avoir à examiner l’étiquette de ce vin mousseux, et ce uniquement en raison de l’aspect original de la bouteille :

–        les certificats des chambres de commerce de 30 villes espagnoles attestant qu’en 1970 l’aspect de la bouteille dorée émerisée vendue sous la dénomination « carta nevada » est spécifique à la requérante ;

–        un acte notarié faisant état du fait que la bouteille dorée émerisée de la requérante portant la marque CARTA NEVADA a été présentée au musée des arts décoratifs lors de l’exposition Diseño Industrial en España, organisée en 1998 par le musée national Centre d’art Reine Sofia ;

–        le fait que les tribunaux espagnols ont protégé l’aspect spécifique de la bouteille dorée mate, qui fait l’objet de plusieurs marques espagnoles, à l’encontre d’usages faits par des concurrents de la requérante ;

–        les transactions entre la requérante et neuf producteurs espagnols, lesquels reconnaîtraient le droit exclusif de la requérante sur la marque espagnole en cause dans ces transactions ;

–        le rapport d’analyse de la marque demandée réalisé par un expert en théorie de l’information, qui indique que « [l]a série CARTA NEVADA est présentée en bouteilles qui diffèrent des autres bouteilles de cava : conservant les caractéristiques standard de forme et de taille, elle varie par la couleur et la texture du verre, qui a dans cette série une couleur claire et mate ou émerisée – lorsqu’elle est remplie de vin de cava, elle acquiert une couleur dorée [ ; c]ette différence dans la clarté de couleur et dans la brillance du verre de la bouteille est clairement perceptible et a distingué la série de [la requérante] des autres cavas dont les bouteilles sont foncées et brillantes » ;

–        l’enquête réalisée en France le 22 mars 2007, qui indique que plus de 60 % des personnes interrogées considèrent la bouteille de la requérante comme vraiment différente ou plutôt différente des autres bouteilles et que plus de 65 % d’entre elles considèrent qu’elle se distingue suffisamment des autres bouteilles ; à cet égard, ce serait à tort que la chambre de recours considérerait, au point 59 de la décision attaquée, que cette étude ne constituerait pas une preuve du caractère distinctif de la marque demandée, au motif que la bouteille a été montrée au public « habillée », dès lors que cette enquête indique que le public interrogé était invité à ne pas tenir compte de l’étiquette figurant sur la bouteille.

56      Quatrièmement, la requérante fait valoir que les illustrations de bouteilles de vins mousseux produites par l’examinateur ou communiquées par la première chambre de recours le 18 juin 2007, même celles écartées ensuite des débats au point 22 de la décision attaquée, ne présentent pas une apparence mate émerisée. De même, il ne serait pas établi que ces illustrations correspondent à des produits existant sur le marché avant le 1er avril 1996, date de la demande d’enregistrement. Dès lors, la chambre de recours ne pourrait pas alléguer, au point 32 de la décision attaquée, que les illustrations de bouteilles produites par la requérante ou recueillies par l’OHMI pourraient, sur la base de l’expérience, être jugées représentatives de l’offre sur le marché. La chambre de recours aurait dû préciser quelles étaient les pièces du dossier sur lesquelles elle se fondait sur ce point pour définir ce qui était « représentatif » à la date du 1er avril 1996, seule date à prendre en considération. L’utilisation de l’indicatif présent par la chambre de recours indiquerait d’ailleurs que celle-ci s’est fondée sur la situation actuelle ou sur des supputations injustifiées et non pas sur la situation existant à la date du dépôt de la demande d’enregistrement.

57      Cinquièmement, la requérante soutient que l’OHMI ne peut se contenter de dénégations vagues et générales pour réfuter l’existence d’un caractère distinctif. En l’espèce, il incomberait à l’OHMI de réfuter concrètement tous les éléments présentés par la requérante. Aucune pièce du dossier ne viendrait ainsi étayer l’affirmation de la chambre de recours, faite au point 34 de la décision attaquée, en ce qui concerne le contenu de l’expérience pratique dont il est fait état. En indiquant que « le véritable élément qui permet d’établir, dans la pratique, un lien entre un vin mousseux et son fabricant n’est pas tant l’aspect superficiel de la bouteille, mais bien l’étiquette qu’elle porte, sur le devant, bien visible, pour permettre au consommateur d’identifier clairement le vin mousseux recherché », la chambre de recours méconnaîtrait le fait que les vins mousseux sont des produits de grande consommation, qui s’adressent au consommateur moyen et qui sont vendus dans les rayonnages des grandes surfaces. L’attention du consommateur moyen serait donc surtout retenue par l’apparence extérieure et globale du produit (la forme de la bouteille, sa couleur, son apparence générale) et, si le consommateur porte aussi son attention sur l’étiquette, cette attention faiblirait d’autant plus que s’imposerait un autre élément distinctif. En l’espèce, la requérante souligne que, au 1er avril 1996, l’apparence dorée mate émerisée qui caractérise la bouteille de forme champenoise demandée présentait un aspect spécifique, très différent de l’aspect habituel d’une bouteille de vin mousseux, qui constitue en soi un caractère distinctif intrinsèque que le consommateur moyen est parfaitement apte à percevoir. La requérante souligne d’ailleurs que rendre une bouteille mate ou émerisée est une opération industrielle coûteuse qui est effectuée pour distinguer le produit de celui des autres producteurs. Le marché des vins mousseux se caractériserait par une forte concurrence et les producteurs seraient confrontés à l’impératif technique de conditionnement pour la commercialisation de leurs produits et soumis au nécessaire étiquetage de ceux-ci. Dans ces conditions, les producteurs seraient fortement incités à rendre leurs produits identifiables par rapport à ceux de leurs concurrents, notamment quant à leur apparence, afin d’attirer l’attention des consommateurs.

58      En outre, la circonstance que la marque demandée ne possède pas d’inscription ou ne comporte pas d’élément verbal, mais qu’elle apparaisse de manière « nue », ne permettrait pas de lui dénier un caractère distinctif. Ce serait donc en vain que la chambre de recours fonderait son appréciation, au point 34 de la décision attaquée, sur la circonstance « qu’il n’existe aucun antécédent d’entreprises vinicoles ayant offert du vin au public dans des bouteilles sans inscription, en faisant uniquement ou principalement confiance à l’aspect formel de la bouteille en tant qu’indicateur de l’origine industrielle ou commerciale de ce produit ». En effet, de nombreuses marques de formes de bouteilles ou de conditionnements auraient été admises alors même que ces formes n’étaient revêtues d’aucune étiquette ni d’inscription. Le règlement n° 40/94 ne soumettrait pas l’enregistrement d’une marque constituée de la forme de présentation d’un produit ou de la forme de son conditionnement à l’exigence de la présence d’inscriptions ou d’éléments verbaux. Il serait donc habituel qu’une marque, qu’il s’agisse d’une marque de forme, d’une marque figurative ou même d’une marque verbale, soit accompagnée, dans le cadre de son usage sur le produit concerné, d’autres marques ou d’autres éléments graphiques ou verbaux.

59      La requérante soutient également que la chambre de recours se contredit en considérant qu’il y a lieu d’avoir égard aux pratiques sur le marché et en reconnaissant au moins implicitement, à la fin du point 34 de la décision attaquée, qu’il n’était pas commun, au 1er avril 1996, de commercialiser des vins mousseux dans une bouteille « nue » qui se différenciait des autres présentations par son apparence, tout en déniant à cette présentation inhabituelle un caractère distinctif. En tout état de cause, le fait d’invoquer la diversité des couleurs et des présentations des bouteilles de vin indiquerait bien qu’il y a une grande diversité de signes à la disposition des concurrents.

60      La requérante critique aussi l’affirmation de la chambre de recours, faite aux points 26 à 32 de la décision attaquée, selon laquelle la couleur dorée demandée dépend du contenu de la bouteille dès lors que cette couleur n’est obtenue que si la bouteille est remplie d’un vin de couleur jaunâtre qui, grâce à l’aspect émerisé du verre, lui donnerait une teinte dorée mate. Cette considération serait étrangère à l’appréciation du caractère distinctif d’une marque. Ce qui importerait tiendrait plutôt à la perception de la marque demandée par le public pertinent et non au procédé utilisé pour conférer cette apparence. De plus, ce ne serait pas parce qu’un emballage se modifie par l’usage qui est fait du produit que cet emballage ou ce conditionnement ne pourrait présenter, pour le consommateur, un caractère distinctif qui le guidera lors de son achat. Cette appréciation de la chambre de recours serait incorrecte et contraire à la possibilité reconnue par le règlement n° 40/94 de protéger une marque consistant dans la forme de présentation d’un produit ou d’un conditionnement.

61      L’OHMI conteste cette argumentation en se référant à la décision attaquée et aux éléments du dossier.

 Appréciation du Tribunal

62      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif sont refusées à l’enregistrement.

63      Le caractère distinctif d’une marque au sens de cette disposition signifie que cette marque permet d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement a été demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux d’autres entreprises (arrêts de la Cour du 29 avril 2004, Procter & Gamble/OHMI, C‑473/01 P et C‑474/01 P, Rec. p. I‑5173, point 32, et du 21 octobre 2004, OHMI/Erpo Möbelwerk, C‑64/02 P, Rec. p. I‑10031, point 42).

64      Ce caractère distinctif doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement a été demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (arrêts Procter & Gamble/OHMI, point 63 supra, point 33, et Storck/OHMI, point 46 supra, point 25).

65      Selon une jurisprudence constante, les critères d’appréciation du caractère distinctif des marques constituées par l’apparence du produit lui-même ne sont pas différents de ceux applicables aux autres catégories de marques. Cependant, il convient de tenir compte, dans le cadre de l’application de ces critères, du fait que la perception du consommateur moyen n’est pas nécessairement la même dans le cas d’une marque constituée par l’apparence du produit lui-même, que dans le cas d’une marque verbale ou figurative, qui consiste en un signe indépendant de l’apparence des produits qu’elle désigne. En effet, les consommateurs moyens n’ont pas pour habitude de présumer l’origine commerciale des produits en se fondant sur leur forme ou celle de leur emballage, en l’absence de tout élément graphique ou textuel, et il pourrait donc s’avérer plus difficile d’établir le caractère distinctif d’une telle marque que celui d’une marque verbale ou figurative (voir, s’agissant des marques tridimensionnelles, arrêts de la Cour du 7 octobre 2004, Mag Instrument/OHMI, C‑136/02 P, Rec. p. I‑9165, point 30 ; Storck/OHMI, point 46 supra, points 26 et 27, et du 4 octobre 2007, Henkel/OHMI, C‑144/06 P, Rec. p. I‑8109, point 36).

66      Dans ces conditions, seule une marque qui, de manière significative, diverge de la norme ou des habitudes du secteur et, de ce fait, est susceptible de remplir sa fonction essentielle d’origine n’est pas dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 (arrêts de la Cour du 12 janvier 2006, Deutsche SiSi-Werke/OHMI, C‑173/04 P, Rec. p. I‑551, point 31 ; Storck/OHMI, point 46 supra, point 28, et Henkel/OHMI, point 65 supra, point 37).

67      Enfin, la nouveauté ou l’originalité ne sont pas des critères pertinents pour l’appréciation du caractère distinctif d’une marque, de sorte que, pour qu’une marque puisse être enregistrée, il ne suffit pas qu’elle soit originale, mais il faut qu’elle se différencie substantiellement des formes de base du produit en cause, communément utilisées dans le commerce, et qu’elle n’apparaisse pas comme une simple variante de ces formes [arrêts du Tribunal du 30 avril 2003, Axions et Belce/OHMI (Forme de cigare de couleur brune et forme de lingot doré), T‑324/01 et T‑110/02, Rec. p. II‑1897, point 44, et du 31 mai 2006, De Waele/OHMI (Forme d’une saucisse), T‑15/05, Rec. p. II‑1511, point 38].

68      Dans la décision attaquée, la chambre de recours conclut à l’absence de caractère distinctif de la marque demandée au regard de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 en relevant que :

–        les vins mousseux sont des produits de consommation courante ; le public pertinent est composé du grand public de la Communauté européenne telle que composée de quinze États membres avant le 1er mai 2004 (point 23 de la décision attaquée) ;

–        étant entendu que la demande de marque ne porte pas sur la forme de la bouteille, cette demande se compose de deux éléments, à savoir l’aspect « givré » donné par le dépolissage du verre et la couleur dorée ; cette couleur dorée n’est pas en soi un élément distinctif, puisqu’il ne s’agit que d’une propriété du contenu de la bouteille (le vin mousseux) ; cette couleur ne permet donc pas à elle seule d’identifier une origine commerciale (point 29 de la décision attaquée) ; l’aspect « givré » ou mat de la bouteille n’est pas non plus distinctif ; il importe peu que la requérante soit ou non la seule à commercialiser ses produits dans un conditionnement dépoli ; le consommateur est habitué à observer une large variété de types de bouteilles pour vins mousseux, caractérisées par une infinité de couleurs et de finitions ; or, pour ce consommateur, l’élément essentiel permettant d’identifier l’origine du produit est l’étiquette qui recouvre la bouteille de vin mousseux plutôt que la forme de la bouteille ou son aspect extérieur ; cela est corroboré par le fait qu’il n’existe aucun exemple de bouteille qui soit commercialisée à l’état nu, c’est-à-dire sans étiquette contenant des éléments verbaux (points 32 à 37 de la décision attaquée) ;

–        l’OHMI n’est pas lié par une décision d’enregistrement de l’Office espagnol des brevets et des marques (points 38 et 39 de la décision attaquée).

69      En premier lieu, il convient de relever qu’il n’est pas contesté que les produits en cause sont des produits de consommation courante et que le public visé est composé du grand public des quinze États membres qui constituaient la Communauté au moment du dépôt de la demande d’enregistrement.

70      En deuxième lieu, la requérante critique l’affirmation de la chambre de recours, figurant au point 25 de la décision attaquée, selon laquelle « la forme de la bouteille demeure en marge de la [demande] selon la déclaration faite en ce sens par la [requérante] ». Selon elle, en considérant que la forme de la bouteille n’était pas comprise dans la marque demandée, la chambre de recours aurait commis une erreur d’appréciation (voir point 52 ci-dessus).

71      À cet égard, il convient de rappeler que la marque demandée est décrite de la manière suivante, ainsi qu’il est également précisé au point 25 de la décision attaquée : « bouteille émerisée blanche qui, lorsqu’elle est remplie de vin, prend une apparence dorée mate comme si elle était givrée ». Une déclaration de la requérante annexée à la demande d’enregistrement de ladite marque indique que « la marque ne vise pas à obtenir la protection privée et exclusive de la forme de la bouteille, mais bien de l’aspect spécifique de sa surface » (voir également point 2 de la décision attaquée).

72      Du fait de cette déclaration, c’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que l’aspect de la bouteille pour laquelle une demande de marque avait été déposée consistait en la combinaison de deux caractéristiques, à savoir une texture émerisée donnant un aspect extérieur « givré » à la surface d’une bouteille et la couleur dorée.

73      Ainsi, la forme de la bouteille importe peu et, ainsi que l’OHMI l’a relevé lors de l’audience, si la marque demandée était enregistrée, la requérante serait à même de s’opposer à ce qu’un concurrent utilise un conditionnement émerisé de couleur dorée, quelle que soit la forme de la bouteille utilisée pour le conditionnement.

74      La chambre de recours n’a donc pas commis d’erreur en examinant l’aspect « émerisé » de la bouteille ainsi que la couleur « dorée » pour évaluer le caractère distinctif de la marque demandée au regard des produits en cause et en considération du public pertinent.

75      En troisième lieu, s’agissant de l’appréciation proprement dite du caractère distinctif de la marque demandée, il convient de relever que, si la chambre de recours reconnaît l’effet invoqué dans la demande, à savoir le fait que, lorsque la bouteille émerisée blanche est remplie de vin, elle prend une apparence dorée mate comme si elle était givrée, elle considère néanmoins qu’un tel effet n’indique nullement que les consommateurs de vins mousseux de la Communauté sont à même de déterminer l’origine commerciale particulière de cette bouteille (points 29, 30, 32 et 33 de la décision attaquée). La chambre de recours estime que la couleur et le matage du verre de la bouteille ne peuvent pas « fonctionner comme marque » pour le vin mousseux.

76      Dans ce contexte, la requérante invoque le caractère original de la marque demandée (voir point 54 ci-dessus), lequel n’est pas contesté en tant que tel par la chambre de recours dans la décision attaquée. Une telle originalité ne suffirait toutefois pas pour établir le caractère distinctif de la marque demandée en ce qui concerne les produits concernés et le public pertinent.

77      En effet, pour étayer son appréciation selon laquelle la couleur et le matage du verre de la bouteille ne peuvent pas « fonctionner comme marque » pour le vin mousseux, la chambre de recours relève qu’« un consommateur raisonnablement attentif ne se fonde généralement pas sur des aspects aussi ‘fantaisistes’ et variables pour choisir un vin mousseux, tels que la couleur du verre, sa finition brillante ou mate, la poussière artificielle, les mailles de fer, etc. » et qu’il ressort de l’expérience que « le véritable élément qui permet d’établir, dans la pratique, un lien entre un vin mousseux et son fabricant n’est pas l’aspect superficiel de la bouteille, mais bien l’étiquette qu’elle porte, sur le devant, bien visible, pour permettre au consommateur d’identifier clairement le vin mousseux recherché ». Selon la chambre de recours, « le comportement habituel de l’immense majorité des consommateurs de vins en tout point de la Communauté consiste à choisir leur marque de vin en fonction de l’étiquette – qui les informe au sujet du fabricant – et rares sont ceux qui le font en regardant la couleur du verre ou sa finition superficielle » (point 34 de la décision attaquée).

78      La chambre de recours relève également qu’« il n’existe aucun antécédent d’entreprises vinicoles ayant offert du vin au public dans des bouteilles sans inscriptions, en faisant uniquement ou principalement confiance à l’aspect formel de la bouteille en tant qu’indicateur de l’origine industrielle ou commerciale du produit » (point 34 de la décision attaquée). Elle souligne aussi que la bouteille commercialisée par la requérante n’apparaît jamais nue, c’est-à-dire sans une étiquette de couleur dorée portant, en lettres noires, la marque FREIXENET ou l’expression « carta nevada » (points 35 et 37 de la décision attaquée). Ces caractéristiques ne seraient pas seulement propres à cette bouteille, mais pourraient également être observées sur toutes les bouteilles dont une illustration a été communiquée pour observation à la requérante dans le cadre de la procédure d’examen (point 37 de la décision attaquée).

79      Ces deux appréciations factuelles tirées, d’une part, du fait qu’aucune bouteille n’est vendue sans étiquette ni mention équivalente et, d’autre part, du fait que la requérante elle-même utilise la marque FREIXENET sur la bouteille dont elle demande l’enregistrement en tant que marque, ne sont pas contestées en tant que telles par la requérante. Elles permettent de confirmer l’idée tirée de l’expérience pratique, selon laquelle la couleur et le matage du verre de la bouteille ne peuvent pas « fonctionner comme marque » pour le vin mousseux en ce qui concerne le public pertinent.

80      À cet égard, force est de constater que cette idée, comme les appréciations factuelles faites pour l’étayer, ne sont pas remises en cause par les arguments avancés sur ce point par la requérante.

81      Tout d’abord, la requérante affirme qu’elle a produit des preuves permettant de démontrer que les consommateurs de vins mousseux et les producteurs concurrents identifient immédiatement ses bouteilles dorées mates et les distinguent des autres vins mousseux sans avoir à examiner l’étiquette (voir point 55 ci-dessus). Or, il convient de relever que ces preuves ne concernent pas le caractère distinctif intrinsèque de la marque demandée, mais le caractère distinctif acquis par l’usage. En tout état de cause, elles ne permettent pas d’établir ce qu’affirme la requérante : les certificats des chambres de commerce concernent une bouteille vendue sous les dénominations « freixenet » et « carta nevada », ce qui tend à confirmer la position défendue par l’OHMI s’agissant de l’importance de l’étiquette ; la présentation de la bouteille dorée émerisée à l’occasion d’une exposition consacrée au design industriel ne permet pas de présumer le comportement d’un consommateur lorsqu’il choisit un vin mousseux et comportait les dénominations « freixenet » et « carta nevada » ; les jugements des tribunaux espagnols et les transactions entre la requérante et les producteurs espagnols ne font pas application du règlement n° 40/94, mais concernent une marque espagnole qui n’est pas pertinente dans le cadre de la présente affaire (voir point 84 ci-après) ; le rapport d’analyse de la marque demandée précise qu’il envisage des bouteilles de la série « carta nevada » de la requérante, lesquelles comportent une étiquette et une corolle portant les dénominations précitées ; dans le cadre de l’enquête réalisée en France en 2007, il a été demandé aux personnes interrogées de ne pas prendre en considération l’étiquette, alors qu’elles pourraient pourtant y être incitées dans une situation normale d’achat. À cet égard, il convient de rappeler que l’aspect original de la marque demandée n’est pas contesté. Ce qui l’est tient au fait que la grande majorité des consommateurs ne le perçoit pas comme un élément utile pour déterminer l’origine du vin mousseux concerné, mais préfère se référer à l’étiquette.

82      En ce qui concerne l’argument pris du fait qu’aucune des illustrations de bouteilles de vins mousseux évoquées dans la décision attaquée ne renverrait à une bouteille commercialisée à l’époque où l’enregistrement de la marque a été demandé (voir point 56 ci-dessus), il suffit de relever que cet argument est inopérant dès lors que la chambre de recours souligne à juste titre, dans la décision attaquée, qu’« il n’existe aucun antécédent d’entreprises vinicoles ayant offert du vin au public dans des bouteilles sans inscriptions, en faisant uniquement ou principalement confiance à l’aspect formel de la bouteille en tant qu’indicateur de l’origine industrielle ou commerciale du produit ». De même, il n’est pas contesté que la requérante a toujours vendu ses bouteilles avec une étiquette sans jamais utiliser l’emballage nu dont elle demande désormais la protection. Il ne pourrait donc être reproché à la chambre de recours de s’être fondée, aux fins d’illustrer ce qu’elle considère comme étant l’expérience pratique, sur les différents éléments qui étaient à sa disposition. En effet, en tout état de cause, à supposer même que la requérante ait été la première à utiliser le conditionnement pour lequel l’enregistrement de la marque a été demandé, il n’en demeure pas moins que l’originalité de ce conditionnement ne suffirait pas, puisque le consommateur tient compte, et ce quelle que soit l’époque, d’un autre élément pour se décider lors de l’achat, compte tenu notamment de la grande variété de présentations proposée dans les magasins.

83      En ce qui concerne les critiques formulées par la requérante à l’égard de l’idée selon laquelle aucune bouteille n’est vendue sans étiquette ou marquage permettant au consommateur d’en déterminer l’origine commerciale (voir points 57 à 59 ci-dessus), ces critiques visent essentiellement à indiquer que la marque demandée est originale, ce qui ne suffit pas pour établir le caractère distinctif.

84      En quatrième lieu, c’est à juste titre que la chambre de recours indique, aux points 38 et 39 de la décision attaquée, que l’OHMI n’est pas lié par la décision de l’Office espagnol des brevets et des marques permettant, en application du droit espagnol, l’enregistrement d’une marque identique à la marque demandée. En effet, le régime communautaire des marques est un système autonome, constitué d’un ensemble de règles et poursuivant des objectifs qui lui sont spécifiques, son application étant indépendante de tout système national. Les enregistrements existant dans les États membres ne constituent qu’un fait qui peut être pris en considération dans le contexte de l’enregistrement d’une marque communautaire, et la marque demandée doit être appréciée sur le fondement de la réglementation communautaire pertinente. Il s’ensuit que l’OHMI n’est tenu ni de faire siennes les exigences et l’appréciation de l’autorité compétente en matière de marques du pays d’origine, ni d’enregistrer la marque demandée du fait de l’existence d’une décision d’enregistrement de l’Office espagnol des brevets et des marques (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 25 octobre 2007, Develey/OHMI, C‑238/06 P, Rec. p. I‑9375, points 71 à 73).

85      Il résulte de ce qui précède que c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif. Le deuxième moyen doit donc être rejeté.

 Sur la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94

 Arguments des parties

86      La requérante fait valoir qu’elle a produit plusieurs pièces, dont des données relatives aux ventes et aux investissements publicitaires et des études de marché, afin de démontrer que la marque demandée a acquis un caractère distinctif par l’usage fait dans toute la Communauté.

87      S’agissant des données relatives aux ventes et aux investissements publicitaires, la requérante relève que la chambre de recours indique au point 50 de la décision attaquée que ces données se rapportent à des bouteilles commercialisées sous la dénomination « carta nevada », ce qui ne lui permettrait pas d’établir qu’elles concernent le signe demandé. La requérante fait observer à ce propos qu’elle a toujours indiqué que la dénomination « carta nevada » correspondait aux bouteilles champenoises dorées émerisées présentant un aspect mat caractéristique. Elle se réfère à cet égard à un acte notarié relatif à la présentation de la bouteille dans une exposition, au rapport d’analyse de la marque, aux certificats de 30 chambres de commerce espagnoles et au jugement d’une juridiction espagnole du 20 octobre 1997 relatif à sa marque espagnole. La chambre de recours ne tiendrait donc pas compte de ces éléments du dossier dans le cadre de son appréciation. La requérante critique également le point 54 de la décision attaquée, dans lequel il est indiqué que, même s’il existe une pratique commerciale consistant à appliquer sur un même produit plus d’une marque (à savoir, en l’espèce, l’aspect émerisé doré mat de la bouteille et les dénominations « freixenet » et « carta nevada »), le fait qu’à aucun moment le produit n’apparaisse revêtu d’une seule marque ferait supposer que la bouteille nue, même si elle présente un aspect particulier, ne permettrait pas au consommateur d’associer le produit à la requérante. Selon la requérante, l’acquisition du caractère distinctif par l’usage n’exige pas que la marque en cause soit utilisée isolément sans pouvoir être combinée à d’autres éléments graphiques ou verbaux liés à d’autres marques. Une telle interprétation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 priverait cette disposition de tout effet utile s’agissant notamment des marques consistant en la présentation d’un produit. Une telle exigence serait également contraire à la législation communautaire relative à l’étiquetage des vins mousseux.

88      S’agissant de l’étude de marché relative à l’Espagne, au Danemark, à la Suède, aux Pays-Bas et au Portugal, la requérante soutient que c’est à tort que la chambre de recours a considéré que cette étude n’était pas probante parce qu’elle ne couvrait que cinq des quinze États membres constituant la Communauté au 1er avril 1996 (point 56 de la décision attaquée). La chambre de recours omettrait de considérer globalement les éléments de preuve et ne tiendrait pas compte des données relatives aux ventes et aux investissements publicitaires fournies pour l’ensemble de la Communauté. L’OHMI ne pourrait d’ailleurs pas exiger du demandeur qu’il apporte la preuve de l’acquisition du caractère distinctif de la marque par l’usage dans la majorité des États membres, dès lors que ces enquêtes sont longues et coûteuses et qu’elles servent avant tout à indiquer l’existence d’une tendance. De même, ce serait à tort que la chambre de recours reproche à cette étude de marché d’établir la situation du marché en 1999, alors qu’elle aurait dû concerner la période à laquelle la demande d’enregistrement a été déposée, en avril 1996 (point 57 de la décision attaquée). Il ne s’agirait là que d’une conséquence de la négligence de l’OHMI, qui ne se serait pas prononcé rapidement sur la demande d’enregistrement du 1er avril 1996 : l’examinateur n’aurait présenté ses premières objections que le 19 novembre 1998, soit plus de deux ans et demi après le dépôt de la demande de marque, et sa décision ne serait intervenue que le 29 novembre 2000.

89      S’agissant des résultats de l’étude de marché relative aux cinq pays précités, la chambre de recours aurait reconnu que la marque demandée était perçue comme distinctive par les deux tiers des personnes interrogées en Espagne, ce qui constituerait une partie substantielle du public concerné. Il y aurait lieu sur ce point de tenir compte de l’augmentation de la population dans ce pays en période estivale du fait de l’afflux de touristes provenant d’autres États membres de l’Union, lesquels seraient confrontés à la marque de la requérante sur leur lieu de vacances. Par ailleurs, ce serait en vain que la chambre de recours tenterait de minimiser les résultats de l’étude en insistant seulement sur le faible pourcentage des personnes interrogées qui associerait la marque demandée avec la requérante dans d’autres États membres, comme le Portugal. Cette interprétation serait trop sévère par rapport aux dispositions du règlement n° 40/94 étant donné que ce qui importerait ne tiendrait pas nécessairement au fait de permettre au public pertinent d’identifier le fabricant des produits, mais plutôt au fait de lui permettre de distinguer les produits en cause des produits d’autres entreprises de sorte qu’il croie que tous les produits désignés par la marque ont été fabriqués sous le contrôle du titulaire de cette marque sans que l’identité de ce dernier soit pour autant connue. Pour ce qui est du Portugal, dont la situation serait évoquée au point 58 de la décision attaquée, 43,3 % des personnes interrogées associeraient l’aspect émerisé doré de la bouteille présentée directement avec la requérante ou considéreraient tout au moins que cet aspect serait différent des autres bouteilles présentes sur le marché.

90      En ce qui concerne l’enquête réalisée pour la France, la requérante souligne que pour plus de 60 % des personnes interrogées la bouteille présentée est différente des autres bouteilles de vins et que plus de 65 % de ces personnes considèrent que cette bouteille se distingue des autres bouteilles de vins, alors que, en France, la commercialisation de ce produit est limitée et soumise à une vive concurrence exercée par des champagnes et d’autres vins mousseux français. Ce serait donc à tort que la chambre de recours considérerait, au point 59 de la décision attaquée, que cette enquête ne démontre pas le caractère distinctif acquis par l’usage de la marque demandée au motif qu’il n’y aurait pas de preuve que les personnes interrogées aient été exposées à la « bouteille nue ». En effet, dans le cadre de cette enquête, les questions posées auraient clairement invité la personne interrogée à ne pas tenir compte de l’étiquette de la bouteille (voir les questions figurant aux pages 34 et 35 de l’enquête). La perception du public aurait bien été évaluée par rapport à l’aspect de cette bouteille telle que demandée et en faisant abstraction des autres éléments distinctifs qui pourraient accompagner son usage.

91      Par ailleurs, la requérante souligne que le caractère distinctif de la marque demandée a été reconnu par plusieurs offices d’enregistrement nationaux, dont l’Office espagnol des brevets et des marques qui a conclu que cette marque ne se heurtait à aucun des motifs absolus de refus d’enregistrement visés dans la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), lesquels sont repris dans le règlement n° 40/94.

92      En ce qui concerne la portée territoriale de l’usage requis au titre de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, la requérante fait valoir que le territoire communautaire doit être considéré comme un territoire unique et non pas comme la simple addition des territoires de chaque État membre. De plus, la marque demandée étant constituée par la présentation d’un produit, il n’existerait pas d’obstacle linguistique à son enregistrement. Il suffirait dès lors d’établir l’existence d’un caractère distinctif dans une partie significative de la Communauté, ce qui serait le cas en l’espèce. Il serait excessif et inexact d’exiger, comme le ferait la chambre de recours dans la décision attaquée, qu’une marque consistant en la présentation du produit ait acquis un caractère distinctif par l’usage dans chaque État membre.

93      L’OHMI conteste cette argumentation en se référant à la décision attaquée et aux éléments du dossier.

 Appréciation du Tribunal

94      En vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement nº 40/94, le motif absolu de refus visé à l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement ne s’oppose pas à l’enregistrement d’une marque si celle-ci, pour les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé, a acquis un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait.

95      Il ressort de la jurisprudence que l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage de la marque exige qu’au moins une fraction significative du public pertinent identifie, grâce à la marque, les produits ou les services concernés comme provenant d’une entreprise déterminée [voir arrêt du Tribunal du 12 septembre 2007, Glaverbel/OHMI (Texture d’une surface de verre), T‑141/06, non publié au Recueil, point 32, et la jurisprudence citée].

96      Les circonstances dans lesquelles la condition liée à l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage peut être regardée comme satisfaite ne sauraient être uniquement établies à partir de données générales et abstraites. Aux fins de cette appréciation, il convient de tenir compte de facteurs tels que, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de l’usage de cette marque, l’importance des investissements faits par l’entreprise pour la promouvoir, la proportion des milieux intéressés qui identifie le produit comme provenant d’une entreprise déterminée grâce à la marque ainsi que les déclarations de chambres de commerce et d’industrie ou d’autres associations professionnelles. Si, sur la base de tels éléments, les milieux intéressés ou, à tout le moins, une fraction significative de ceux-ci, identifient, grâce à la marque, le produit comme provenant d’une entreprise déterminée, il doit en être conclu que la condition exigée par l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 pour l’enregistrement de la marque est remplie (voir arrêt Texture d’une surface de verre, point 95 supra, points 32 et 33, et la jurisprudence citée).

97      En ce qui concerne la portée territoriale de l’acquisition du caractère distinctif, la jurisprudence indique qu’une marque ne peut être enregistrée, en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, que si la preuve est rapportée qu’elle a acquis, par l’usage qui en a été fait, un caractère distinctif dans la partie de la Communauté dans laquelle elle n’avait pas un tel caractère au sens du paragraphe 1, sous b), du même article (arrêt Storck/OHMI, point 46 supra, point 83, et arrêt Texture d’une surface de verre, point 95 supra, point 35).

98      Dans le cas des marques non verbales, il y a lieu de présumer que l’appréciation du caractère distinctif est la même dans toute la Communauté, à moins qu’il n’existe des indices concrets en sens contraire (voir arrêt Texture d’une surface de verre, point 95 supra, point 36, et la jurisprudence citée).

99      En ce qui concerne le moment où l’acquisition du caractère distinctif doit intervenir, celle-ci doit avoir eu lieu antérieurement au dépôt de la demande de marque [arrêt du Tribunal du 12 décembre 2002, eCopy/OHMI (ECOPY), T‑247/01, Rec. p. II‑5301, point 36].

100    Dans la décision attaquée, la chambre de recours conclut à l’absence de caractère distinctif par l’usage au regard de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 en relevant que :

–        la preuve de l’acquisition du caractère distinctif devait être rapportée pour la période antérieure à la date de dépôt (1er avril 1996), sur l’ensemble de la Communauté telle que composée de quinze États membres avant le 1er mai 2004 (point 44 de la décision attaquée) ;

–        la requérante n’a pas apporté à suffisance de droit la preuve de l’acquisition du caractère distinctif de la marque demandée ; à l’exception de deux pièces (une déclaration notariée concernant l’exposition de la bouteille de la requérante dans un musée et une cassette vidéo contenant des annonces publicitaires), les documents produits ne rapportent pas la preuve que les chiffres de ventes concernent bien la marque demandée ; il convient donc de présumer que la marque demandée a été et reste utilisée en combinaison avec des éléments additionnels tels qu’une collerette et une étiquette sur lesquelles sont écrits en caractères lisibles les mots « freixenet » et « carta nevada » (points 52 et 53 de la décision attaquée) ;

–        les produits commercialisés ont un aspect global très différent de la marque demandée ; il n’est pas contesté que plusieurs marques puissent coexister sur un même produit, mais, lorsque, à aucun moment, ce produit n’apparaît revêtu d’une seule de ces marques, il y a lieu d’y voir un indice clair que la prétendue marque ne « fonctionne pas » comme telle dans la pratique (point 54 de la décision attaquée) ;

–        la valeur probatoire de l’étude de marché effectuée en Espagne, en Suède, aux Pays-Bas, au Portugal et au Danemark est limitée ; d’une part, cette étude de marché n’évoque pas la perception de la marque demandée dans un certain nombre d’États membres parmi les plus importants d’un point de vue quantitatif ; d’autre part, cette étude a été réalisée trois années après le dépôt de la marque demandée ; enfin, les résultats de l’étude ont pu être influencés par le fait que la forme de la bouteille (de type « champenoise ») était présentée aux personnes interrogées, de sorte que celles-ci étaient naturellement inclinées à percevoir la représentation de la bouteille de la requérante comme une bouteille de vin mousseux ; hormis en Espagne, les résultats ne démontrent pas une reconnaissance de la marque demandée sur les marchés précités (points 56 à 58 de la décision attaquée) ;

–        la même conclusion vaut pour la France, où l’étude de marché a été réalisée plus de dix années après la date de dépôt, de sorte que les résultats de cette étude ne sauraient refléter de manière fidèle et fiable la perception de la marque demandée au jour de son dépôt (point 59 de la décision attaquée).

101    En premier lieu, s’agissant des données relatives aux ventes et aux investissements publicitaires effectués de 1993 à 1997 dans chacun des quinze États membres qui composaient la Communauté à cette époque, il convient de relever que ces données visent sans distinction la bouteille émerisée blanche vendue sous la dénomination « carta nevada » et la bouteille émerisée noire vendue sous la dénomination « cordon negro ». Ces deux produits sont commercialisés par la requérante et comportent également la dénomination « freixenet ».

102    En réponse à une question posée par le Tribunal, la requérante a indiqué lors de l’audience que ces données relatives aux ventes et aux investissements publicitaires, figurant dans l’annexe III.1 de la requête, se référaient, en réalité, uniquement aux bouteilles portant la dénomination « carta nevada » et non à celles qui portent la dénomination « cordon negro ».

103    À supposer même qu’une telle clarification, ignorée de la chambre de recours lorsqu’elle s’est prononcée dans la décision attaquée, soit prise en considération, il n’en demeure pas moins que les données produites par la requérante ne sont pas suffisamment probantes pour établir l’acquisition d’un caractère distinctif par l’usage au regard de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94.

104    En effet, l’examen de ces données permet de constater que moins de 300 000 bouteilles émerisées dorées revêtues de la dénomination « carta nevada » ont été vendues chaque année de 1993 à 1997 en Italie ou en France, tout comme en Irlande, au Portugal, en Grèce, en Autriche, en Belgique, en Finlande ou au Luxembourg, ce qui représente neuf États membres sur les quinze États concernés. Ce nombre de 300 000 bouteilles émerisées dorées vendues par an sous la dénomination « carta nevada » n’est dépassé qu’aux Pays-Bas, au Danemark (plus de 500 000 bouteilles en 1997), en Suède (plus de 1 million de bouteilles en 1997), au Royaume-Uni (plus de 1,5 million de bouteilles en 1997) et en Allemagne (plus de 32 millions de bouteilles en 1997). Il existe ainsi des différences significatives entre des États membres, comme l’Italie, la France ou le Portugal où les ventes sont très faibles, et l’Allemagne où les ventes paraissent particulièrement importantes d’une manière atypique par rapport à tous les autres pays pour lesquels des données sont disponibles.

105    En toute hypothèse, ainsi que la requérante l’a confirmé lors de l’audience en réponse à une question posée par le Tribunal, ces données ne permettent pas de déterminer la part de marché du produit en cause dans chacun des quinze États membres et son importance relative par rapport aux produits des concurrents de la requérante.

106    En outre, il importe de relever – comme le fait d’ailleurs la chambre de recours aux points 50 à 53 de la décision attaquée – que les données précitées concernent un produit sur lequel figurent trois marques : la marque demandée, à savoir l’aspect émerisé doré mat de la bouteille, mais aussi les dénominations « freixenet » et « carta nevada ». À cet égard, l’expression « l’usage qui en a été fait » utilisée dans l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 doit être comprise comme se référant seulement à un usage de la marque aux fins de l’identification par les milieux intéressés du produit ou du service comme provenant d’une entreprise déterminée. Une telle identification, et donc l’acquisition d’un caractère distinctif, peut résulter aussi bien de l’usage, en tant que partie d’une marque enregistrée, d’un élément de celle-ci que de l’usage d’une marque distincte en combinaison avec une marque enregistrée. Dans les deux cas, il suffit que, en conséquence de cet usage, les milieux intéressés perçoivent effectivement le produit ou le service, désigné par la seule marque dont l’enregistrement a été demandé, comme provenant d’une entreprise déterminée [voir, par analogie, arrêt de la Cour du 7 juillet 2005, Nestlé, C‑353/03, Rec. p. I‑6135, points 29 et 30]. Or, les données relatives aux ventes et aux investissements publicitaires d’un produit commercialisé avec les trois marques précitées ne sont pas utiles pour établir en quoi une bouteille d’aspect émerisé doré mat est perçue, en tant que telle et indépendamment des marques dont elle est accompagnée dans la publicité et lors de la vente des produits, en conséquence de cet usage, par les milieux intéressés comme un signe distinctif, en tant que tel, de l’origine du produit concerné.

107    Dès lors, faute d’éléments permettant de comprendre en quoi les milieux intéressés perçoivent effectivement le produit, désigné par la seule marque dont l’enregistrement a été demandé, comme provenant de la requérante, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré, au point 54 de la décision attaquée, que, même s’il n’est pas contesté que plusieurs marques peuvent coexister sur un même produit, lorsque, à aucun moment, ce produit n’apparaît revêtu d’une seule des trois marques précitées, à savoir en l’espèce la marque demandée, il y avait lieu d’y voir un indice clair que la marque dont l’enregistrement a été demandé « ne fonctionne pas » comme telle en pratique.

108    Cette interprétation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 ne prive pas cette disposition de tout effet utile comme l’allègue la requérante (voir point 87 ci-dessus), mais revient seulement à l’appliquer aux données de l’espèce. De même, une telle interprétation n’est pas remise en cause par le fait que la requérante invoque la « législation communautaire relative à l’étiquetage des vins mousseux » (voir point 87 ci-dessus). En effet, cette référence à ladite législation n’est pas assortie de la moindre précision et ne permet pas, en toute hypothèse, de comprendre en quoi elle serait de nature à remettre en cause la solution retenue par la chambre de recours dans la décision attaquée.

109    En deuxième lieu, s’agissant des études de marché, il convient de relever que celles-ci ne concernent pas tous les États membres de la Communauté avant l’élargissement de celle-ci intervenu en 2004. La première étude de marché ne concerne que l’Espagne, la Suède, les Pays-Bas, le Portugal et le Danemark. La seconde étude de marché ne concerne que la France.

110    Ces études de marché examinent l’acquisition du caractère distinctif par l’usage à une période postérieure à la date du dépôt de la demande, le 1er avril 1996, à savoir au cours de l’été 1999 pour la première étude de marché et en mars 2007 pour la seconde étude de marché.

111    Cette constatation, qui est faite par la chambre de recours aux points 58 et 59 de la décision attaquée, est parfaitement fondée et n’est pas remise en cause par l’allégation de la requérante selon laquelle ce retard serait imputable à la prétendue négligence de l’OHMI (voir point 88 ci-dessus), qui aurait tardé à se prononcer sur la demande d’enregistrement déposée le 1er avril 1996.

112    En effet, l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94 ne prévoit pas un droit autonome à l’enregistrement d’une marque. Il comporte une exception aux motifs de refus édictés à l’article 7, paragraphe 1, sous b) à d), du règlement n° 40/94 [devenu article 7, paragraphe 1, sous b) à d), du règlement n° 207/2009]. Sa portée doit dès lors être interprétée en fonction de ces motifs de refus (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 7 septembre 2006, Bovemij Verzekeringen, C‑108/05, Rec. p. I‑7605, point 21). C’est à la requérante qu’il appartient de produire des données pertinentes à même d’établir l’acquisition du caractère distinctif par l’usage, et ce à une période antérieure au dépôt de la demande d’enregistrement. Le moment auquel intervient la prise de position de l’OHMI sur cette demande est sans incidence sur cette charge de la preuve, dans la mesure où la requérante n’expose pas, en l’espèce, en quoi ce délai d’intervention pourrait être de nature à l’avoir privée de toute possibilité de produire des données adéquates pour établir l’acquisition du caractère distinctif par l’usage dans la Communauté.

113    De plus, il ne peut être contesté que neuf des quinze États membres qui composaient la Communauté au moment du dépôt de la demande d’enregistrement ne sont pas couverts par les études de marché présentées par la requérante.

114    Or, comme le fait valoir à bon droit l’OHMI dans le mémoire en réponse, l’impression que peut créer le signe demandé, qui consiste en un traitement appliqué aux produits eux-mêmes, dans l’esprit du consommateur est a priori susceptible d’être la même dans l’ensemble de la Communauté, ce qui pouvait faciliter la réalisation d’études de marché pour établir l’acquisition du caractère distinctif par l’usage dans la partie de la Communauté où ce caractère fait défaut au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

115    En outre, il ne peut être fait grief à la chambre de recours de n’avoir pas examiné globalement toutes les preuves disponibles (voir point 88 ci-dessus). En effet, la chambre de recours expose à suffisance, dans la décision attaquée, le fait que l’étude de marché réalisée pour l’Espagne, le Danemark, la Suède, les Pays-Bas et le Portugal a été effectuée en montrant aux personnes interrogées une bouteille nue identique à celle qui fait l’objet de la demande d’enregistrement. Dans la décision attaquée, la chambre de recours relève également que cette bouteille est effectivement reconnue comme étant associée à la requérante par une large majorité (près de deux tiers) du public pertinent en Espagne. Cette proportion du public pertinent n’est toutefois plus que de 29 % aux Pays-Bas (184 sur 625 personnes interrogées) et de 7 % au Portugal (44 sur 625 personnes interrogées). La question relative à l’identification de la marque de la bouteille n’a pas été posée en ce qui concerne les personnes interrogées au Danemark et en Suède (point 58 de la décision attaquée).

116    Ces données sont reprises de l’étude de marché et ne sont pas dénaturées. La requérante tente d’en critiquer un aspect en relevant que l’étude indiquerait que 43,3 % des personnes interrogées au Portugal identifieraient l’aspect émerisé doré de la bouteille présentée directement à la requérante ou considéreraient que cet aspect serait différent des autres bouteilles présentes sur le marché (voir point 89 ci-dessus). Or, en réalité, les résultats de l’étude de marché sont les suivants :

–        59,4 % des personnes interrogées identifient la bouteille émerisée blanche comme une bouteille de cava ou de champagne (371 sur 625 personnes interrogées ; résultat de la question 1) ;

–        24,3 % des personnes ayant identifié la bouteille émerisée blanche comme une bouteille de cava ou de champagne estiment en connaître la marque (90 sur les 371 personnes précitées ; résultat de la question 2) ;

–        48,9 % des personnes estimant connaître la marque de la bouteille émerisée blanche identifient correctement la requérante (soit 44 sur les 90 personnes précitées, ce qui correspond à 7 % des 625 personnes interrogées, comme la chambre de recours l’a relevé dans la décision attaquée ; résultat de la question 3.a) ;

–        75,7 % des personnes ayant identifié la bouteille émerisée blanche comme une bouteille de cava ou de champagne estiment ne pas en connaître la marque (281 sur les 371 personnes citées ci-dessus ; résultat de la question 2) ;

–        41,6 % des personnes estimant ne pas connaître la marque de la bouteille émerisée blanche indiquent que l’apparence de cette bouteille est différente de l’apparence des autres bouteilles commercialisées sur le marché (soit 117 sur les 281 personnes citées ci‑dessus ; résultat de la question 3.b).

117    Le pourcentage évoqué par la requérante prend donc en considération les 44 personnes qui ont correctement identifié la bouteille émerisée blanche comme étant celle de la requérante et les 117 personnes qui, même si elles estimaient ne pas connaître la marque de la bouteille, indiquaient néanmoins que son aspect était différent de celui des autres bouteilles commercialisées sur le marché. Pour arriver au pourcentage de 43,3 %, la requérante ne prend pas en considération l’ensemble des 625 personnes interrogées, mais seulement les 371 personnes interrogées qui ont identifié la bouteille émerisée blanche comme une bouteille de cava ou de champagne. Ce pourcentage repose donc sur une partie seulement des personnes interrogées et, en toute hypothèse, les 117 personnes qui sont prises en considération par la requérante ont donné une réponse qui est sans incidence pour ce qui est de la question de savoir si la bouteille émerisée blanche qui fait l’objet de la marque demandée a acquis un caractère distinctif par l’usage au Portugal. Ainsi qu’il a été indiqué dans le cadre du deuxième moyen, l’originalité ne suffit pas pour établir le caractère distinctif de la marque demandée pour le public pertinent. En outre, la réponse fournie par ces 117 personnes n’atteste pas leur connaissance de l’entreprise à l’origine du produit en cause.

118    Par ailleurs, la requérante n’indique pas en quoi les résultats de l’étude de marché relative à l’Espagne, au Danemark, à la Suède, aux Pays-Bas et au Portugal pris en considération par la chambre de recours dans la décision attaquée, relatifs à la perception du public dans ces pays d’une bouteille identique à celle qui fait l’objet de la demande, seraient susceptibles d’être remis en cause par les données relatives aux ventes et aux investissements publicitaires, lesquelles ne concernent pas une telle bouteille.

119    De même, il convient de relever que l’étude de marché réalisée en France en mars 2007 ne concernait pas une bouteille identique à celle qui fait l’objet de la demande, mais bien une bouteille comportant également les dénominations « freixenet » et « carta nevada ». Certes, il était demandé aux personnes interrogées de ne pas tenir compte de l’étiquette (voir point 90 ci-dessus), mais les questions posées se limitaient à demander si la bouteille en cause était « différente » des quatre autres bouteilles figurant sur la photo en cause, alors qu’il aurait été plus pertinent, comme la chambre de recours le relève à juste titre au point 59 de la décision attaquée, de demander au consommateur s’il choisit un vin mousseux en regardant l’« aspect formel » de la bouteille. En effet, lorsqu’il réalisera l’acte d’achat en magasin, il n’existera aucune instruction lui demandant de ne pas tenir compte de l’étiquette apposée sur le produit.

120    En troisième lieu, il ne peut être reproché à la chambre de recours de n’avoir pas tenu compte des prises de position adoptées par les offices des marques nationaux (voir point 91 ci-dessus), lesquels ne font pas application du règlement n° 40/94 (voir point 84 ci-dessus).

121    De même, en ce qui concerne la portée territoriale de l’usage requis au titre de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94, la requérante ne peut alléguer, comme elle l’a fait lors de l’audience en invoquant l’arrêt de la Cour du 6 octobre 2009, PAGO International (C‑301/07, non encore publié au Recueil), que le fait que la marque demandée ait acquis un caractère distinctif en Espagne, seul territoire pour lequel la chambre de recours relève, dans la décision attaquée, que la bouteille émerisée blanche est effectivement reconnue comme étant associée à la requérante par une large majorité (près de deux tiers) du public pertinent, suffit à satisfaire cette condition.

122    En effet, ainsi que le relève la requérante, la marque demandée étant constituée par la présentation d’un produit, il n’existerait pas d’obstacle linguistique à son enregistrement et c’est donc, en principe, dans toute la partie de la Communauté où le caractère distinctif intrinsèque fait défaut qu’il convient d’établir l’acquisition du caractère distinctif par l’usage pour que cette marque puisse être enregistrable en vertu de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94.

123    En l’absence de preuves suffisamment probantes pour quatorze des quinze États membres concernés, l’acquisition du caractère distinctif par l’usage en Espagne ne peut donc être considéré comme suffisant pour obtenir l’enregistrement d’une marque communautaire, laquelle a un caractère unitaire et produit ses effets dans l’ensemble de la Communauté. La requérante ne peut se prévaloir à cet effet et par analogie de l’arrêt PAGO International, point 121 supra, qui concerne une demande de décision préjudicielle portant sur l’article 9, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 [devenu article 9, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009] et la question de la protection conférée au titre de la renommée à une marque communautaire déjà enregistrée.

124    Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que les preuves fournies par la requérante étaient insuffisantes pour démontrer le caractère distinctif acquis par l’usage du signe demandé.

125    Il y a donc lieu de rejeter le troisième moyen et, partant, le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

126    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

127    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Freixenet, SA est condamnée aux dépens.

Azizi

Cremona

Frimodt Nielsen

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 avril 2010.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Conclusions des parties

En droit

Sur la violation de l’article 73 du règlement n° 40/94

Sur la violation de l’obligation de motivation

– Arguments des parties

– Appréciation du Tribunal

Sur la violation du droit d’être entendu

– Arguments des parties

– Appréciation du Tribunal

Sur la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur la violation de l’article 7, paragraphe 3, du règlement n° 40/94

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur les dépens


* Langue de procédure : le français.