Language of document : ECLI:EU:C:2024:416

Édition provisoire

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. ATHANASIOS RANTOS

présentées le 16 mai 2024 (1)

Affaire C184/23

Finanzamt T

contre

S

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances, Allemagne)]

« Renvoi préjudiciel – Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Sixième directive 77/388/CEE – Article 2, point 1, et article 4, paragraphe 4, second alinéa – Champ d’application de la TVA – Assujettis – Faculté pour les États membres de considérer comme un seul assujetti des entités indépendantes du point de vue juridique mais étroitement liées entre elles sur les plans financier, économique et de l’organisation (“groupement TVA”) – Prestations effectuées à titre onéreux entre membres du groupement TVA – Imposition de ces prestations – Bénéficiaire de la prestation non autorisé à déduire la TVA – Risque de pertes fiscales »






I.      Introduction

1.        Les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux entre des personnes faisant partie d’un groupement TVA (2) (dites « opérations internes » au groupement TVA) relèvent-elles du champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et, le cas échéant, sont-elles soumises à cette taxe ? La réponse à cette question est-elle différente dans l’hypothèse où le bénéficiaire de la livraison ou de la prestation n’est pas (ou n’est que partiellement) autorisé à déduire la taxe en amont ?

2.        Telles sont, en substance, les questions que la Cour doit traiter dans la présente affaire ayant pour objet une demande de décision préjudicielle introduite par le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances, Allemagne) portant sur l’interprétation de l’article 2, point 1, et de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme (3).

3.        Cette demande de décision préjudicielle a été présentée dans le cadre d’un litige ayant déjà donné lieu à une première demande préjudicielle à laquelle la Cour a répondu dans l’arrêt du 1er décembre 2022, Finanzamt T (Prestations internes d’un groupement TVA) (C‑269/20, ci-après l’« arrêt Finanzamt T I », EU:C:2022:944). C’est à la suite de ce dernier arrêt, ainsi que de celui rendu le même jour dans l’affaire Norddeutsche Gesellschaft für Diakonie (C‑141/20, ci-après l’« arrêt Diakonie », EU:C:2022:943) que la juridiction de renvoi a nourri les doutes qui l’ont amenée à introduire la présente demande de décision préjudicielle.

4.        La présente affaire offre donc l’occasion à la Cour, d’une part, de fournir davantage de clarifications sur le régime juridique applicable au groupement TVA, qui a déjà fait l’objet d’une jurisprudence abondante, et, d’autre part, de préciser également la portée de ces deux arrêts.

II.    Le cadre juridique

A.      Le droit de l’Union

5.        La sixième directive a été abrogée et remplacée, à compter du 1er janvier 2007, par la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (4) (ci-après la « directive TVA »). Toutefois, compte tenu de la date des faits en cause dans le litige au principal, celui-ci demeure régi par la sixième directive.

6.        L’article 2 de la sixième directive disposait :

« Sont soumis à la [TVA] :

1.      les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel ;

[...] »

7.        L’article 4, paragraphes 1 et 4, de la sixième directive prévoyait :

« 1.      Est considéré comme assujetti quiconque accomplit, d’une façon indépendante et quel qu’en soit le lieu, une des activités économiques mentionnées au paragraphe 2, quels que soient les buts ou les résultats de cette activité.

[...]

4.      Le terme “d’une façon indépendante” utilisé au paragraphe 1 exclut de la taxation les salariés et autres personnes dans la mesure où ils sont liés à leur employeur par un contrat de louage de travail ou par tout autre rapport juridique créant des liens de subordination en ce qui concerne les conditions de travail et de rémunération et la responsabilité de l’employeur.

Sous réserve de la consultation prévue à l’article 29, chaque État membre a la faculté de considérer comme un seul assujetti les personnes établies à l’intérieur du pays qui sont indépendantes du point de vue juridique, mais qui sont étroitement liées entre elles sur les plans financier, économique et de l’organisation. »

B.      Le droit allemand

8.        L’article 2, paragraphe 2, de l’Umsatzsteuergesetz (loi relative à la taxe sur le chiffre d’affaires, ci-après l’« UStG »), dans sa version applicable au litige au principal, est libellé comme suit :

« L’activité industrielle, commerciale, artisanale ou professionnelle n’est pas exercée d'une façon indépendante :

[...]

2.      lorsque l’architecture globale des liens effectifs montre qu’une personne morale est intégrée sur les plans financier, économique et de l’organisation à l’entreprise de l’entité faîtière (unité fiscale). Les effets de l’unité fiscale se limitent aux prestations internes entre les branches de l’entreprise sises dans le pays. Ces branches doivent être traitées comme une seule entreprise. [...]

[...] »

III. Le litige au principal, les questions préjudicielles et la procédure devant la Cour

9.        Les faits de l’affaire au principal sont identiques à ceux exposés dans l’arrêt Finanzamt T I (5). Pour les besoins de la présente procédure, ils peuvent être résumés comme suit.

10.      S, une fondation allemande de droit public, est l’organe faîtier d’un département de médecine universitaire et de la société U-GmbH (ci-après « U-GmbH »). Cette fondation est assujettie à la TVA pour les services de soins qu’elle fournit à titre onéreux, mais n’est pas considérée comme assujettie pour les activités de formation qu’elle accomplit dans le cadre de l’exercice de ses prérogatives de puissance publique. Toutefois, les services de médecine sont exonérés de la TVA conformément à la sixième directive.

11.      Pour l’exercice fiscal de l’année 2005, U-GmbH a fourni à S, entre autres,  des services de nettoyage. Ces services ont été fournis pour l’ensemble du complexe immobilier du département de médecine universitaire dont font partie les chambres des patients, les couloirs, les salles d’opérations, les salles de cours et les laboratoires.

12.      L’espace hospitalier, en tant que tel, pour autant qu’il est dédié aux soins prodigués aux patients, relève du domaine des activités économiques accomplies par S, pour lesquelles celle-ci est assujettie à la TVA alors que les salles de cours, les laboratoires et les autres locaux sont utilisés pour la formation des étudiants, activité que cette fondation effectuerait dans l’exercice de ses prérogatives de puissance publique et pour laquelle elle ne serait pas considérée comme étant assujettie à cette taxe.

13.      La proportion de la surface du complexe immobilier en question, pour laquelle des services de nettoyage ont été fournis pour les activités exercées par S en tant qu’autorité publique, s’élevait à 7,6 % de la surface totale de ce complexe immobilier. Pour ces services, U‑GmbH a reçu de la part de S une rémunération s’élevant à un montant total de 76 085,48 euros.

14.      À la suite d’un contrôle, l’administration fiscale a rectifié l’avis de taxation de S pour l’exercice fiscal en cause, en considérant que les établissements de celle-ci formaient une entreprise unique pour laquelle une seule déclaration de TVA devait être établie et, partant, qu’un seul avis de taxation devait être émis.

15.      En outre, selon l’administration fiscale, les services de nettoyage, dont S a bénéficié au titre des activités relevant de ses prérogatives de puissance publique, lui auraient été fournis par U-GmbH dans le cadre de l’unité fiscale (Organschaft) que ces entités composaient, au sens de l’article 2, paragraphe 2, point 2, de l’UStG, qui vise à mettre en œuvre, en droit allemand, la faculté, prévue à l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive, de considérer les membres d’un groupement TVA comme constituant un seul assujetti.

16.      L’administration fiscale a considéré que les services de nettoyage fournis pour les activités relevant de la puissance publique étaient, dès lors, non imposables, et qu’ils auraient été effectués à des fins étrangères à l’entreprise et auraient donné lieu en faveur de S à une « prestation de services à titre gratuit, assimilée à une prestation de services à titre onéreux » (6).

17.      Eu égard à ces éléments, l’administration fiscale a estimé, en tenant compte de la proportion, à hauteur de 7,6 % de la surface du complexe immobilier en question, affectée aux activités accomplies par S dans l’exercice de ses prérogatives de puissance publique, que la somme correspondant au nettoyage de cette proportion de la surface, par U-GmbH, s’élevait à 5 782,50 euros. Après déduction d’une majoration au titre des bénéfices, évaluée à 525,66 euros, l’administration fiscale a fixé à 5 257 euros la base d’imposition pour la fourniture d’une « prestation de services à titre gratuit » et, ainsi, une TVA majorée de 841,12 euros.

18.      Le rejet de la réclamation administrative formée par S contre cet avis de taxation rectificatif a fait l’objet d’un recours devant le Finanzgericht (tribunal des finances, Allemagne), qui a accueilli ce recours.

19.      L’administration fiscale a formé un pourvoi en « Revision » contre ce jugement devant le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances), la juridiction de renvoi qui a posé à la Cour la demande de décision préjudicielle ayant donné lieu à l’arrêt Finanzamt T I.

20.      La juridiction de renvoi estime qu’une demande de décision préjudicielle est à nouveau nécessaire dans le litige dont elle est actuellement saisie.

21.      En effet, selon cette juridiction, à la suite de l’arrêt Diakonie, et en particulier à la lumière du raisonnement contenu aux points 77 à 80 de cet arrêt, une incertitude subsisterait quant à la question de savoir si l’existence d’un regroupement de plusieurs personnes considéré comme un seul assujetti, conformément à l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive, a pour conséquence que les prestations fournies à titre onéreux entre ces personnes ne relèvent pas du champ d’application de la TVA en vertu de l’article 2, point 1, de cette directive. Ni l’arrêt Diakonie ni la jurisprudence de la Cour ne fourniraient une réponse claire quant au caractère imposable des opérations internes.

22.      Ladite juridiction considère également que des doutes existent quant à la question de savoir si les opérations internes dans le cadre d’un groupement TVA ne devraient pas, en tout état de cause, relever du champ d’application de la TVA, lorsque le bénéficiaire de la prestation n’est pas, ou n’est que partiellement, autorisé à déduire la TVA en amont, faute de quoi il existerait un risque de pertes fiscales. Ces doutes découleraient des arrêts Finanzamt T I et Diakonie  dans lesquels la Cour a jugé que l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive ne s’oppose à l’organisation d’un groupement TVA tel que celui en cause en droit allemand, dans lequel l’organe faîtier est désigné comme assujetti unique, qu’à la condition que cela n’entraîne pas un risque de pertes fiscales.

23.      Dans ces conditions, le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)      Le regroupement de plusieurs personnes en un seul assujetti, conformément à l’article 4, paragraphe 4, [second] alinéa, de la [sixième directive] a-t-il pour effet que les prestations de services effectuées à titre onéreux entre ces personnes ne relèvent pas du champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) conformément à l’article 2, point 1, de cette directive ?

2)      Les prestations fournies à titre onéreux entre ces personnes relèvent-elles en tout état de cause du champ d’application de la TVA lorsque le bénéficiaire de la prestation n’est pas (ou n’est que partiellement) autorisé à déduire la taxe en amont, à défaut de quoi il existe un risque de pertes fiscales ? »

24.      Des observations écrites ont été soumises à la Cour par S, le gouvernement allemand ainsi que la Commission européenne.

IV.    Analyse

25.      Par ses deux questions préjudicielles, qu’il convient, à mon avis, de traiter conjointement, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 2, point 1, et l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive doivent être interprétés en ce sens que les prestations de services effectuées à titre onéreux entre des personnes faisant partie d’un groupement TVA – conformément à la dernière disposition – ne relèvent pas du champ d’application de la TVA et cela, en tout état de cause, dans le cas où le bénéficiaire de la prestation ne serait pas (ou ne serait que partiellement) autorisé à déduire la taxe en amont, ce qui entraînerait un risque de pertes fiscales.

26.      Les deux questions préjudicielles posées dans la présente affaire visent donc à vérifier si les opérations internes entre les membres d’un groupement TVA doivent être considérées comme des opérations soumises à la TVA. À cet égard, la Cour n’a pas eu encore l’occasion de se prononcer de manière explicite sur cette question.

27.      La juridiction de renvoi affirme que les doutes à l’origine de ces deux questions préjudicielles découlent de deux arrêts prononcés récemment par la Cour, à savoir les arrêts Finanzamt T I et Diakonie. Elle précise également que, selon sa jurisprudence, les opérations internes entre membres d’un groupement TVA ne sont pas imposables.

28.      Il résulte cependant de la lecture de la demande de décision préjudicielle que cette juridiction tend à considérer que, en droit de l’Union, ces opérations internes devraient être considérées comme soumises à la TVA. En revanche, les trois parties ayant déposé des observations devant la Cour soutiennent, quant à elles, la thèse inverse selon laquelle de telles opérations internes ne relèvent pas du champ d’application de la TVA.

29.      La réponse aux deux questions préjudicielles posées dans la présente affaire implique de clarifier l’interaction entre, d’une part, l’article 2, point 1, de la sixième directive qui, sous l’empire de celle-ci, déterminait le champ d’application de la TVA et, d’autre part, l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de cette directive, qui permettait à chaque État membre d’autoriser les opérateurs économiques établis sur le territoire de cet État membre de constituer un groupement TVA (7). La détermination de l’interaction entre ces deux dispositions présuppose leur interprétation.

30.      Dans ce contexte, il y a lieu de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante de la Cour, afin d’interpréter des dispositions du droit de l’Union, il convient de tenir compte non seulement des termes de celles-ci, mais également de leur contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elles font partie (8).

31.      En outre, il découle des exigences tant de l’application uniforme du droit de l’Union que du principe d’égalité que les termes de dispositions du droit de l’Union, telles que les dispositions pertinentes dans la présente affaire, qui ne comportent aucun renvoi exprès au droit des États membres pour déterminer leur sens et leur portée doivent normalement trouver, dans toute l’Union européenne, une interprétation autonome et uniforme (9).

A.      Sur l’interprétation littérale des dispositions pertinentes

32.      La juridiction de renvoi estime que le libellé des dispositions pertinentes dans la présente affaire plaide en faveur du caractère imposable des opérations internes. Cela ressortirait de la circonstance que l’article 2, point 1, de la sixième directive n’opère pas de distinction, s’agissant du caractère imposable, entre les opérations internes au groupement TVA et les services fournis à titre onéreux à des tiers. Selon cette juridiction, l’interprétation de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de cette directive, autoriserait, en revanche, tant l’hypothèse du caractère imposable que celle du caractère non imposable des opérations internes.

33.      À cet égard, en ce qui concerne, en premier lieu, l’article 2 de la sixième directive, cette disposition, comme rappelé précédemment, établit le champ d’application de la TVA (10). Elle prévoit, notamment, à son point 1, que sont soumises à la TVA les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel.

34.      En outre, il ressort d’une jurisprudence constante, « qu’une prestation n’est taxable que s’il existe entre le prestataire et le bénéficiaire un rapport juridique au cours duquel des prestations réciproques sont échangées », la rétribution perçue par le prestataire constituant la contre-valeur effective du service fourni au bénéficiaire (11).

35.      Il résulte donc explicitement du libellé de l’article 2, point 1, de la sixième directive que, pour pouvoir relever du champ d’application de la TVA, la livraison de biens ou la prestation de services en cause doit être effectuée par « un assujetti ». Il s’ensuit, a contrario, que, si une livraison de biens ou une prestation de services est effectuée par une personne qui n’est pas qualifiée d’« assujetti », cette livraison ou cette prestation n’est pas soumise à la TVA. La détermination de la portée de la notion d’« assujetti » est, partant, d’une importance cruciale aux fins de la détermination du caractère imposable ou non de certaines opérations (12).

36.      La notion d’« assujetti » est définie, de manière générale, à l’article 4, paragraphe 1, de la sixième directive, aux termes duquel est considéré comme assujetti quiconque accomplit « d’une façon indépendante » une des activités économiques mentionnées au paragraphe 2 de cet article, quels que soient les buts ou les résultats de cette activité.

37.      À cet égard, il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’il importe, pour assurer une application uniforme de la sixième directive, que la notion d’« assujetti » définie sous le titre IV de celle-ci reçoive une interprétation autonome et uniforme (13).

38.      En ce qui concerne, en second lieu, l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive (14), il résulte de son libellé que cette disposition permet à chaque État membre de considérer plusieurs entités comme un seul assujetti lorsque celles-ci sont établies sur le territoire de ce même État membre et que, bien qu’elles soient indépendantes du point de vue juridique, elles sont étroitement liées entre elles sur les plans financier, économique et de l’organisation. Cet article, selon son libellé, ne soumet pas son application à d’autres conditions et ne prévoit pas non plus la possibilité, pour les États membres, d’imposer d’autres conditions aux opérateurs économiques pour pouvoir constituer un groupement TVA (15).

39.      Selon une jurisprudence constante, la mise en œuvre du régime prévu à l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive implique que la réglementation nationale prise sur le fondement de cette disposition autorise les entités présentant des liens sur les plans financier, économique et de l’organisation à cesser d’être considérées comme des assujettis distincts à la TVA pour être considérées comme un assujetti unique. Ainsi, lorsqu’il est fait application, par un État membre, de cette disposition, la ou les entités subordonnées au sens de ladite disposition ne peuvent être considérées comme un ou des assujettis au sens de l’article 4, paragraphe 1, de la sixième directive (16).

40.      Il en résulte, toujours selon cette jurisprudence constante, que l’assimilation à un assujetti unique en vertu de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive exclut que les membres du groupement TVA continuent à souscrire séparément des déclarations de TVA et continuent à être identifiés, dans et hors de leur groupe, comme des assujettis, dès lors que seul l’assujetti unique est habilité à souscrire lesdites déclarations. Cette disposition suppose donc nécessairement, lorsqu’il en est fait application par un État membre, que la réglementation nationale de transposition fasse en sorte que l’assujetti soit unique et qu’un seul numéro de TVA soit octroyé pour le groupe (17).

41.      Il résulte donc de la jurisprudence de la Cour que je viens de rappeler que lorsque plusieurs personnes, juridiquement indépendantes, forment un groupement TVA, au sens de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive, ces personnes cessent d’être considérées comme des assujettis distincts et constituent ensemble, aux fins de la TVA, un assujetti unique. Cet assujetti unique sera, soit le groupement TVA lui-même, soit – si la législation nationale pertinente le prévoit et ainsi que la Cour l’a clarifié dans les arrêts Finanzamt T I et Diakonie – un de ses membres, à savoir l’organe faîtier de ce groupement lorsque cet organe est en mesure d’imposer sa volonté aux autres entités faisant partie dudit groupement et à condition que sa désignation comme assujetti unique à la TVA n’entraîne pas un risque de pertes fiscales (18).

42.      Il découle du fait qu’un groupement TVA soit considéré comme un assujetti unique, en vertu de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive, que les prestations de services fournies par un tiers en faveur d’un membre du groupement TVA doivent être considérées, aux fins de la TVA, comme ayant été fournies en faveur non pas de ce membre, mais du groupement TVA dans son ensemble auquel ledit membre appartient (19) et vice versa (20).

43.      L’analyse littérale des deux dispositions pertinentes effectuée, à la lumière de la jurisprudence de la Cour, aux points 38 à 40 des présentes conclusions, permet de déterminer l’interaction entre ces deux dispositions.

44.      Cette analyse montre, d’une part, que, aux termes de l’article 2, point 1, de la sixième directive, afin qu’une livraison de biens ou une prestation de services puisse relever du champ d’application de la TVA, elle doit être effectuée par un « assujetti ». D’autre part, elle montre également que le groupement TVA est un assujetti unique et que les entités appartenant à ce groupement TVA cessent d’être considérées, à titre individuel, comme des assujettis distincts. Or, la coordination nécessaire entre ces deux constatations plaide en faveur d’une interprétation combinée desdites deux dispositions en ce sens que les opérations internes, à savoir les prestations fournies à titre onéreux entre les membres d’un groupement TVA, ne relèvent pas du champ d’application de la TVA.

45.      En effet, la solution contraire, selon laquelle des prestations fournies par un membre du groupement TVA à un autre membre du même groupement TVA (ou au groupement TVA en tant que tel), constitueraient des opérations soumises à la TVA aux termes de l’article 2, point 1, de la sixième directive supposerait que ce membre soit un assujetti conformément à cette disposition, ce qui est incompatible avec la nature d’assujetti unique du groupement TVA, telle qu’elle ressort du libellé de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de cette directive ainsi que de la jurisprudence constante de la Cour mentionnée aux points 38 à 40 des présentes conclusions.

46.      La constitution d’un groupement TVA déclenche l’obligation fiscale du groupement et met fin à celle, distincte, de chacun de ses membres assujettis avant l’adhésion audit groupement et le traitement fiscal des opérations réalisées par le groupement, tant entre des entités situées en son sein qu’avec des tiers, est comparable au traitement fiscal d’un assujetti unique opérant individuellement (21).

47.      Il s’ensuit qu’une personne qui, en raison de son appartenance à un groupement TVA, cesse d’être considérée comme un assujetti à la TVA ne saurait être considérée comme effectuant à titre individuel une livraison de biens ou une prestation de services imposable, ni à l’extérieur du groupement, à savoir à des tiers, ni à l’intérieur du groupement TVA auquel elle appartient, à savoir à d’autres membres du même groupement. À l’extérieur, la livraison de biens ou la prestation de services sera considérée, aux fins de la TVA, comme effectuée par l’assujetti unique, à savoir, en principe, le groupement TVA lui-même, qui sera redevable de la taxe y afférente (22). À l’intérieur du groupement, les opérations internes réalisées entre les membres du groupement sont réputées être réalisées par le groupement pour son propre compte et, par conséquent, n’existent pas du point de vue de la TVA (23). En effet, en tant qu’opérations (réciproques) entre entités faisant partie d’un assujetti unique, elle constituent, aux fins de la TVA, des « flux internes » non taxables, à la différence des opérations taxées réalisées avec des tiers (24).

48.      Une telle interprétation des dispositions pertinentes, ainsi qu’il ressort de leur analyse littérale, est par ailleurs conforme, d’une part, à celle contenue dans les lignes directrices résultant de la 119réunion du comité de la TVA du 22 novembre 2021 (25) qui, bien que dépourvues de valeur contraignante, constituent, toutefois, selon la jurisprudence de la Cour, une aide à l’interprétation de la sixième directive (26). D’autre part, elle est également conforme à l’interprétation contenue dans la communication de la Commission de 2009 concernant les groupements TVA (27).

49.      Partant, il convient ensuite de vérifier si l’interprétation des dispositions pertinentes résultant de l’analyse littérale de celles-ci, à la lumière de la jurisprudence de la Cour, est confirmée par leur interprétation contextuelle et téléologique.

B.      Sur l’interprétation contextuelle des dispositions pertinentes

1.      Sur l’analyse contextuelle

50.      La juridiction de renvoi estime que l’analyse contextuelle des dispositions pertinentes plaide également en faveur du caractère imposable des opérations internes. En effet, les membres du groupement TVA réaliseraient leurs opérations internes dans le cadre d’une « activité économique indépendante » aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de la sixième directive. La réponse fournie par la Cour à la quatrième question préjudicielle posée dans l’arrêt Diakonie confirmerait cette analyse.

51.      Pour répondre aux doutes exposés par la juridiction de renvoi sur le plan contextuel, il convient de se pencher sur la question de la relation entre, d’une part, la condition relative à l’accomplissement d’une activité économique « d’une façon indépendante », à laquelle se réfère la définition générale d’un assujetti prévue à l’article 4, paragraphe 1, de la sixième directive et, d’autre part, le régime du groupement TVA tel qu’il découle de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de cette directive.

52.      À cet égard, d’un point de vue contextuel, il convient, tout d’abord de relever que, dans la sixième directive, l’article 4 constitue le seul article du titre IV de celle-ci, intitulé « Assujettis ». Pour ce qui est de la structure de cet article, son premier paragraphe contient la définition générale d’un assujetti alors que, comme le met en exergue la Commission à juste titre, les autres dispositions circonscrivent et spécifient cette notion générale en incluant ou en excluant certains cas.

53.      S’agissant, en particulier, de la condition selon laquelle l’activité économique doit être accomplie « d’une façon indépendante », sa portée est précisée à l’article 4, paragraphe 4, premier alinéa, de la sixième directive en vertu duquel les termes « d’une façon indépendante » excluent de soumettre à la TVA les salariés et d’autres personnes dans la mesure où elles sont liés à leur employeur par un contrat de louage de travail « ou par tout autre rapport juridique créant des liens de subordination en ce qui concerne les conditions de travail et de rémunération ainsi que la responsabilité de l’employeur ».

54.      Il ressort ensuite de la jurisprudence de la Cour que, en ce qui concerne le contexte de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de cette directive, il ne ressort ni de cette disposition ni du système instauré par ladite directive que celle-ci constitue une disposition dérogatoire ou particulière qui devrait être interprétée de manière stricte. Ainsi, la condition relative à l’existence d’un lien étroit sur le plan financier ne saurait être interprétée de manière stricte (28).

55.      En outre, la Cour a explicitement jugé que l’interprétation autonome et uniforme de la notion d’« assujetti », mentionnée au point 37 des présentes conclusions, s’impose également pour cette disposition malgré le caractère facultatif, pour les États membres, du régime que cette disposition prévoit, afin d’éviter, lorsqu’il est mis en œuvre, des divergences dans l’application de ce régime d’un État membre à l’autre (29).

56.      En ce qui concerne la spécification de la notion générale d’« assujetti » (dans le sens indiqué au point 52 des présentes conclusions) qui est effectuée à l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive, consiste en la prévision explicite selon laquelle – ainsi qu’il découle de l’analyse littérale développée ci-dessus – si les conditions requises par cette disposition sont remplies, un groupement TVA constitue, en vertu d’une fictio iuris, un assujetti unique à la TVA. Ce « mécanisme » présuppose que cet assujetti unique se substitue aux membres pris individuellement en tant qu’assujetti TVA, et cela en dépit de la question de savoir si ces membres exercent ou non d’une façon indépendante une activité économique aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de la sixième directive.

57.      À cet égard, il convient de relever que, dans sa jurisprudence, la Cour a déjà eu l’occasion de relever que la condition relative à l’accomplissement d’une activité économique « d’une façon indépendante » pour être qualifié d’assujetti aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de la sixième directive constitue une question juridique distincte de celle de la configuration du groupement TVA en tant qu’assujetti unique et que ces deux questions ne sont pas nécessairement liées entre elles. C’est, d’ailleurs, dans un tel contexte que s’inscrit, selon moi, la réponse à la quatrième question préjudicielle donnée par la Cour dans l’arrêt Diakonie qui a suscité les doutes de la juridiction de renvoi. J’examinerai ainsi, tout d’abord, la jurisprudence susmentionnée avant d’analyser, ensuite, la partie pertinente de l’arrêt Diakonie.

2.      Sur la jurisprudence concernant la relation entre la condition relative à l’accomplissement d’une activité économique « d’une façon indépendante » et le régime du groupement TVA

58.      La première question préjudicielle posée à la Cour dans le cadre de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Skandia (30) concernait la question de savoir si des prestations de services fournies par un établissement principal établi dans un pays tiers à sa succursale établie dans un État membre constituaient des opérations soumises à la TVA lorsque cette succursale est membre d’un groupement TVA.

59.      En règle générale, selon la jurisprudence de la Cour, un établissement principal et une succursale constituent un seul et même assujetti à la TVA, à moins qu’il ne soit établi que la succursale exerce une activité économique indépendante (31).

60.      Dans ce contexte, la Cour a ainsi, tout d’abord, analysé si, en l’espèce, la succursale opérait ou non de façon indépendante. Elle a constaté que cela n’était pas le cas et que cette succursale ne pouvait donc pas avoir, elle-même, la qualité d’assujetti au sens de la directive TVA (32).

61.      Néanmoins, la Cour a jugé que, dès lors que ladite succursale appartenait à un groupement TVA et formait ainsi avec les autres membres de ce groupement un seul assujetti, différent de l’établissement principal, aux fins de la TVA, les services fournis par l’établissement principal à sa succursale – non indépendante – membre d’un groupement TVA ne pouvaient être considérés comme étant fournis à celle-ci, mais devaient être regardés comme étant fournis au groupement TVA et constituaient partant des opérations soumises à la TVA (33).

62.      La Cour a par la suite confirmé cette jurisprudence dans l’affaire Danske Bank (34) dans laquelle elle a appliqué le même principe à une situation qu’on pourrait définir d’« inverse » dans laquelle c’était l’établissement principal qui faisait partie d’un groupement TVA.

63.      Cette jurisprudence montre que si l’accomplissement d’une activité économique « d’une façon indépendante » est, selon les termes mêmes de l’article 4, paragraphe 1, de la sixième directive une condition nécessaire afin qu’une personne puisse être qualifiée d’assujetti, cela n’empêche pas qu’une entité qui ne remplit pas cette condition puisse néanmoins relever du champ d’application de la TVA dès lors qu’elle appartient à un groupement TVA et qu’elle fait, ainsi, partie d’un assujetti unique aux termes de l’article 4, paragraphe 4, de cette directive.

64.      La question du respect de la condition relative à l’accomplissement d’une activité économique « d’une façon indépendante », énoncée à l’article 4, paragraphe 1, de ladite directive et les conséquences juridiques découlant de l’appartenance à un groupement TVA constituent ainsi deux questions juridiques distinctes n’ayant pas nécessairement de lien entre elles. Par conséquent, le respect ou le non-respect de ladite condition n’a aucune incidence sur ces conséquences.

3.      Sur la réponse de la Cour à la quatrième question préjudicielle dans larrêt Diakonie 

65.      C’est dans ce contexte d’interaction, voire de tension, entre la condition relative au caractère indépendant de l’activité économique aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de la sixième directive et le régime juridique du groupement TVA qu’il convient d’examiner la quatrième question préjudicielle analysée par la Cour dans l’arrêt Diakonie.

66.      Cette question a été posée à la Cour dans une situation dans laquelle la législation nationale en cause (toujours la législation allemande) prévoyait que l’assujetti unique à la TVA ne soit pas le groupement TVA en tant que tel, mais un membre de celui-ci, à savoir son organe faîtier auquel l’ensemble du chiffre d’affaires réalisé par les entités faisant partie du groupement TVA est attribué et qui est redevable de la TVA correspondant à la totalité de ce chiffre d’affaires (35).

67.      En outre, selon cette législation nationale, les activités économiques et professionnelles des entités intégrées à l’organe faîtier de l’unité fiscale dont ces entités faisaient partie n’étaient pas considérées comme étant exercées de manière indépendante (36) en raison du rapport d’autorité et de subordination (désormais) qualifiée d’« intégration assortie de droits d’intervention » entre l’organe faîtier et les autres entités (37).

68.      Dans ce contexte la juridiction de renvoi (la même que celle dans la présente affaire) avait notamment posé une question sur la possibilité de considérer par catégorisation, à savoir « en bloc », comme non indépendantes aux fins de l’article 4, paragraphe 1, de la sixième directive les entités faisant partie du groupement TVA en raison de cette relation de subordination.

69.      Cette juridiction avait demandé en particulier si l’article 4, paragraphe 1, et paragraphe 4, premier alinéa (38), de la sixième directive permettaient à un État membre de considérer, par catégorisation, une personne comme non indépendante, au sens de l’article 4, paragraphe 1, de cette directive, lorsque cette personne fait partie d’un groupement TVA dans lequel l’organe faîtier était en mesure de faire respecter sa volonté à l’égard de ladite personne et d’empêcher ainsi celle-ci de former une volonté divergente.

70.      C’est dans ce contexte que la Cour a jugé que l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive, lu en combinaison avec l’article 4, paragraphe 1, premier alinéa, de cette directive, devait être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’un État membre qualifie, par catégorisation, des entités données comme étant non indépendantes, lorsque ces entités sont intégrées sur les plans financier, économique et de l’organisation à l’organe faîtier d’un groupement TVA.

71.      En d’autres termes, la Cour a jugé que la circonstance qu’une entité soit membre d’un groupement TVA ne peut pas être considérée comme impliquant automatiquement que cette entité n’accomplit pas des activités économiques « d’une façon indépendante » aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de la sixième directive.

72.      L’arrêt Diakonie confirme donc, conformément à la jurisprudence mentionnée aux point 58 à 64 des présentes conclusions, que la condition relative à l’accomplissement d’une activité économique de façon indépendante au sens de l’article 4, paragraphe 1, de cette directive et les conséquences découlant de l’appartenance d’une entité à un groupement TVA sont des questions juridiques distinctes et que cette appartenance n’a aucune incidence sur la définition d’une activité économique indépendante aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de ladite directive.

73.      L’arrêt Diakonie ne remet donc aucunement en question la configuration du groupement TVA comme un assujetti unique, en vertu des considérations et de la jurisprudence mentionnées aux points 38 à 42 des présentes conclusions, jurisprudence à laquelle cet arrêt se réfère explicitement. Il s’ensuit que ledit arrêt ne saurait remettre en cause les conséquences de cette configuration telles qu’indiquées aux points 43 à 47 des présentes conclusions au regard de la qualification d’assujetti à la TVA du groupement TVA et de ses membres, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur du groupement même (39).

74.      Par ailleurs, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Diakonie, la Cour ne devait pas traiter, et n’a donc pas tranché, la question de savoir si les opérations internes au groupement TVA étaient soumises ou non à la TVA.

75.      Compte tenu de l’analyse contextuelle qui précède et de la jurisprudence pertinente susmentionnée, même si des personnes appartenant à un groupe TVA accomplissent des activités économiques « d’une façon indépendante » au sens de l’article 4, paragraphe 1, de la sixième directive, cela n’a aucune incidence sur la circonstance que, du fait de leur appartenance à un groupement TVA, ces personnes constituent ensemble, aux fins de la TVA, un seul assujetti et cessent ainsi d’être considérées comme des assujettis distincts aux fins de la TVA et cela tant dans les relations externes que dans les relations internes au groupement TVA.

76.      Il s’ensuit que, contrairement à ce qu’envisage la juridiction de renvoi, le fait que les membres du groupement TVA réalisent leurs opérations internes dans le cadre d’une « activité économique indépendante » aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de la sixième directive ne soutient pas la thèse du caractère imposable de ces opérations internes et ne saurait remettre en discussion l’interprétation des dispositions pertinentes figurant aux points 43 à 47 des présentes conclusions.

C.      Sur l’interprétation téléologique des dispositions pertinentes

77.      La juridiction de renvoi estime que les objectifs poursuivis par l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive ne devraient pas exiger une non‑taxation des opérations internes. La simplification procédurale visant à ce que, en raison de la constitution du groupement TVA, il n’est plus nécessaire de déposer plusieurs déclarations de revenus, ne devrait pas avoir d’influence sur l’exigibilité de la taxe, de sorte que les opérations internes seraient imposables à la TVA. Si la simplification précitée a, en revanche, une nature matérielle, cela serait compréhensible lorsque le membre du groupement qui bénéficie de l’opération interne est autorisé à déduire la TVA en amont de sorte que la dette fiscale et le droit à déduction de la TVA payée en amont se compensent. Toutefois, une non‑taxation générale des opérations internes, s’appliquant également lorsque le membre du groupement qui bénéficie de l’opération interne n’a pas le droit de déduire la TVA en amont, entraînerait des pertes fiscales et, en définitive, non pas une simplification administrative, mais une absence d’imposition. L’objectif de prévenir certains abus ne justifierait pas non plus de ne pas taxer les opérations internes. Au contraire, il pourrait être considéré comme abusif que les membres du groupement, qui n’ont pas le droit de déduire la TVA, reçoivent un avantage fiscal.

78.      Afin de répondre aux doutes exprimés par la juridiction de renvoi, il convient de déterminer la logique, à savoir la justification du mécanisme du groupement TVA, tel que prévu par l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive.

79.      À cet égard il convient de rappeler que, s’agissant des objectifs poursuivis par l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive, la Cour a relevé qu’il ressort des motifs de la proposition de la Commission ayant conduit à l’adoption de cette directive [COM(73) 950 final] que le législateur de l’Union, en adoptant cette disposition, a voulu permettre aux États membres de ne pas lier systématiquement la qualité d’assujetti à la notion d’« indépendance purement juridique », soit dans un souci de simplification administrative, soit pour éviter certains abus tels que le fractionnement d’une entreprise entre plusieurs assujettis dans le but de bénéficier d’un régime particulier (40).

80.      La juridiction de renvoi se réfère explicitement à cette jurisprudence de la Cour, mais se concentre exclusivement sur les objectifs de simplification administrative et de prévention des abus. Toutefois, ainsi qu’il ressort du point précèdent, le mécanisme du groupement TVA vise d’abord à permettre aux États membres de ne pas lier systématiquement la qualité d’assujetti à la notion d’« indépendance purement juridique ». Il s’agit ainsi explicitement d’un instrument qui autorise les États membres à distinguer la question de l’assujettissement à la TVA de celle relative à l’organisation juridique des entreprises.

81.      A cet égard, il convient de relever que l’obligation de payer la TVA peut avoir, et a effectivement, un impact sur la structure et le fonctionnement des acteurs économiques (41). En effet, elle est susceptible d’influencer les choix organisationnels des entreprises. Ainsi, une entreprise peut être amenée à choisir soit d’internaliser certaines livraisons de biens ou prestations de services au sein d’une unité opérationnelle interne à l’entreprise elle-même, soit de les externaliser à une entité juridiquement distincte, mais appartenant au groupe (par exemple, une société de production ou de services) (42). Dès lors, la question de savoir si les activités d’un acteur économique sont internalisées ou externalisées (au sein du groupe) peut ne pas dépendre uniquement de considérations opérationnelles ou économiques, mais peut devoir également tenir compte des conséquences découlant de l’obligation de payer la TVA.

82.      Cependant, en principe, il ne devrait pas être pertinent de tenir compte, aux fins de la TVA, de la circonstance qu’une partie de l’activité d’une entreprise est externalisée à une entité distincte (potentiellement un contribuable distinct) faisant partie du groupe ou qu’elle est effectuée par une unité opérationnelle interne d’une entreprise plus grande. En effet, c’est l’activité et non la forme juridique qui caractérise l’assujetti à la TVA (43).

83.      Le recours au mécanisme du groupement TVA permet ainsi aux États membres de réduire l’influence de la taxe sur la façon dont les entreprises s’organisent. Le mécanisme du groupement TVA promeut donc la neutralité fiscale « organisationnelle » en permettant l’établissement de structures commerciales appropriées sans inconvénients sous l’angle de l’obligation de payer la TVA (44). Cependant, sous réserve des considérations exposées au point 85 des présentes conclusions, cette fonction suppose que les opérations internes au groupement ne sont pas imposables. Ce n’est, en effet, que si le régime fiscal relatif à la TVA est le même dans le cas d’une internalisation ou d’une externalisation (au sein du groupe) des livraisons et des prestations que la neutralité fiscale « organisationnelle » susmentionnée peut être garantie.

84.      La constatation que l’objectif de garantir la neutralité fiscale « organisationnelle » soit la fonction fondamentale et originaire du mécanisme du groupement TVA découle non seulement des termes de la jurisprudence de la Cour citée au point 78 des présentes conclusions, mais également de la genèse de la disposition qui le prévoit. La notion de groupement TVA a, en effet, été introduite dans le droit de l’Union par la deuxième directive 67/228/CEE (45), sur la base de la réglementation allemande relative à l’« Organschaft » (46) dont, ainsi que le rappelle également la juridiction de renvoi (47), le noyau dur était le caractère non imposable des opérations internes afin d’éviter le cumul de taxes. Elle a, par la suite, évolué à l’occasion des modifications successives apportées par la sixième directive et, enfin, par la directive TVA (48).

85.      Or, ainsi que l’a relevé la juridiction de renvoi, la fonction consistant à garantir la neutralité fiscale « organisationnelle » a perdu une partie de son importance à la suite de l’introduction de la faculté de déduire la TVA en amont. En effet, en présence de cette faculté, la dette fiscale et le droit à déduction de la TVA payée en amont se compensent, de sorte que, dans le cas où une telle déduction est possible, le régime du groupement TVA n’a pas de portée matérielle et sa justification réside fondamentalement dans la simplification administrative de nature procédurale. À cet égard, il convient de relever que cette simplification administrative est également favorable à l’autorité fiscale, car elle lui permet d’éviter un certain nombre de contrôles.

86.      L’objectif de garantir la neutralité fiscale « organisationnelle » de ce régime vaut toujours pleinement pour les entreprises qui n’ont pas le droit de déduire la TVA en amont. En effet, pour ces entreprises, si l’État membre en cause a fait usage de la faculté de constituer des groupements TVA – et à condition que les opérations internes ne soient pas imposables –, il est indifférent que les livraisons de biens ou les prestations de services soient effectuées par ces entreprises elles-mêmes ou par l’intermédiaire d’une entreprise contrôlée. Dans les deux cas, ces livraisons de biens ou prestations de services ne seront pas grevées de la TVA (49). C’est donc pour ces entreprises précisément que la justification par la garantie de la neutralité fiscale « organisationnelle » demeure valable. Partant, pour lesdites entreprises, le mécanisme du groupement TVA n’a pas simplement une portée procédurale, en tant que simplification administrative, mais conserve une portée matérielle (50).

87.      Dans ce contexte, il est pertinent de rappeler que dans l’arrêt du 9 avril 2013, Commission/Irlande (C‑85/11, EU:C:2013:217), la grande chambre de la Cour a explicitement considéré qu’aucun élément, notamment au regard des objectifs de la disposition de la directive TVA prévoyant le groupement TVA, amenait à considérer que des personnes non assujetties qui ne peuvent donc pas facturer de TVA ne pourraient être incluses dans un groupement TVA (51).

88.      En ce qui concerne, enfin, le risque de prétendues pertes fiscales mentionnées par la juridiction de renvoi, je relève ce qui suit.

89.      Premièrement, il n’est pas pertinent d’invoquer les arrêts Finanzamt T I et Diakonie, et leurs points 50 et 57 respectivement, pour étayer la thèse du caractère imposable des opérations internes entre membres d’un groupement TVA concernant un risque de pertes fiscales. En effet, d’une part, dans ces arrêts, la Cour n’a aucunement examiné la question du caractère imposable des opérations internes. D’autre part, à la lecture desdits arrêts, il est, en revanche, clair que la référence de la Cour à un risque de pertes fiscales, loin d’être une référence de caractère générale, était limitée à la question de l’attribution du rôle d’assujetti unique, dans le cadre de la législation nationale en cause, à l’organe faîtier du groupement TVA et non pas au groupement TVA en tant que tel. La Cour a estimé que c’est justement une telle attribution qui ne devait pas entraîner de risque de pertes fiscales. Il en résulte que c’est seulement si, en application du droit national, une telle attribution conduit au même résultat que si le groupement TVA, en tant que tel, était considéré comme l’assujetti unique à la TVA – et que donc il n’y a pas de risques que des recettes fiscales liées à des prestations fournies et reçues par des membres du groupement ne soient pas couvertes – qu’il serait possible d’attribuer la qualité d’assujetti unique à l’organe faîtier du groupement. Force est de constater que ce raisonnement n’a aucun lien avec la question du caractère imposable des opérations internes au groupement TVA.

90.      Deuxièmement, je relève que, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Commission/Irlande susmentionné, afin de prouver le manquement qu’elle reprochait à l’État membre en cause, la Commission avait soulevé des arguments tirés du risque de pertes fiscales découlant de la possibilité pour des personnes non assujetties d’intégrer un groupement TVA, et que ces arguments correspondaient, en substance, aux doutes soulevés par la juridiction de renvoi (52). La Cour ne les a cependant pas accueillis et a rejeté le recours formé par la Commission, ce qui démontre qu’elle a déjà considéré comme non pertinente cette ligne d’argumentation.

91.      Troisièmement, je doute que, en réalité, le risque des pertes fiscales envisagées par la juridiction de renvoi existe effectivement. En effet, pour illustrer ses doutes quant à l’existence de ce risque de pertes fiscales, cette juridiction fait une comparaison entre deux créances fiscales qui se rapportent à la situation juridique sans et avec unité fiscale conformément à l’article 4, paragraphe 4, de la sixième directive (53). Toutefois, à la lumière des points 81 à 83 et 86 des présentes conclusions, le membre du groupement qui bénéficie de l’opération interne et qui n’a pas le droit de déduire la TVA pourrait, en réalité, choisir d’« internaliser », dans le cadre d’une unité organisationnelle interne à l’entreprise, la livraison de biens ou la prestation de services reçue par les membres du groupement TVA de sorte que le résultat de l’opération, du point de vue de la TVA, serait, en tout cas, identique. Ainsi, par exemple, en l’occurrence, l’hôpital en cause dans l’affaire au principal pourrait toujours faire réaliser les services de nettoyage par une unité interne plutôt que de les « externaliser » à une entité juridique faisant partie du groupement TVA. Du point de vue de la TVA, rien ne changerait. Cet hôpital serait plutôt incité à opter pour cette solution afin de ne pas devoir verser la TVA, s’il n’y avait pas de mécanisme de groupement TVA sans imposition des prestations internes. Dans un tel cas, toutefois, la neutralité fiscale « organisationnelle » susmentionnée ne serait pas garantie.

92.      Dans cette perspective, s’il n’y a pas d’avantage fiscal pour les membres du groupement qui n’ont pas le droit de déduire la TVA, les doutes de la juridiction de renvoi concernant l’objectif du régime du groupement TVA de prévenir certains abus ne sont pas justifiés.

93.      Il ressort de toutes les considérations qui précèdent que, contrairement à ce qu’estime la juridiction de renvoi, les objectifs poursuivis par l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, lu en combinaison avec l’article 2, point 1, de la sixième directive ne s’opposent pas à une interprétation de ces dispositions en ce sens que les opérations internes au groupement TVA ne sont pas imposables à la TVA.

V.      Conclusion

94.      Au vu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre aux questions préjudicielles posées par le Bundesfinanzhof (Cour fédérale des finances, Allemagne) de la manière suivante :

L’article 2, point 1, et l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée : assiette uniforme, telle que modifiée par la directive 2000/65/CE du Conseil, du 17 octobre 2000,

doivent être interprétés en ce sens que :

les prestations de services effectuées à titre onéreux entre des personnes faisant partie d’un groupement formé par des personnes indépendantes du point de vue juridique, mais étroitement liées entre elles sur les plans financier, économique et de l’organisation, conformément à l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive 77/388, telle que modifiée par la directive 2000/65, ne relèvent pas du champ d’application de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), même lorsque le bénéficiaire de la prestation n’est pas (ou n’est que partiellement) autorisé à déduire la TVA en amont.


1      Langue originale : le français.


2      Groupement formé par des personnes indépendantes du point de vue juridique, mais étroitement liées entre elles sur les plans financier, économique et de l’organisation (ci-après le « groupement TVA »).


3      JO 1977, L 145, p. 1, telle que modifiée par la directive 2000/65/CE du Conseil, du 17 octobre 2000 (JO 2000, L 269, p. 44) (ci-après la « sixième directive »).


4      JO 2006, L 347, p. 1.


5      Voir points 11 à 19 de cet arrêt.


6      Conformément à l’article 3, paragraphe 9a, point 2, de l’UStG, lu à la lumière de l’article 6, paragraphe 2, sous b), de la sixième directive.


7      Ces deux dispositions correspondent désormais, respectivement, à l’article 2, paragraphe 1, sous a) et c), et à l’article 11 de la directive TVA.


8      Voir, notamment, arrêts Finanzamt T I, point 35 et Diakonie, point 43.


9      Voir, en ce sens, arrêt du 25 avril 2013, Commission/Suède (C‑480/10, EU:C:2013:263, point 33 et jurisprudence citée).


10      L’article 2 de la sixième directive constitue le seul article du titre II de celle-ci, intitulé « Champ d’application ».


11      Arrêt du 24 janvier 2019, Morgan Stanley & Co International (C‑165/17, EU:C:2019:58, point 37 et jurisprudence citée).


12      Voir, en ce sens, conclusions de l’avocate générale Kokott dans l’affaire Latvijas Informācijas un komunikācijas tehnoloģijas asociācija (C‑87/23, EU:C:2024:222, point 2).


13      Voir, en ce sens, par analogie, arrêt du 25 avril 2013, Commission/Suède (C‑480/10, EU:C:2013:263, point 34).


14      L’article 4 de la sixième directive constitue le seul article du titre VI de celle-ci, intitulé « Assujettis ».


15      Voir arrêts Finanzamt T I, point 38, et Diakonie, point 44 ainsi que jurisprudence citée.


16      Voir arrêts Finanzamt T I, point 39, et Diakonie, point 45 ainsi que jurisprudence citée. Mise en italique par mes soins.


17      Voir arrêts Finanzamt T I, point 40, et Diakonie, point 46 ainsi que jurisprudence citée.


18      Voir, en ce sens, arrêts Finanzamt T I, point 53, et Diakonie, point 60. À cet égard, voir, également, point 89 des présentes conclusions.


19      Voir arrêts du 17 septembre 2014, Skandia America (USA), filial Sverige (C‑7/13, ci-après l’« arrêt Skandia », EU:C:2014:2225, point 29), et du 18 novembre 2020, Kaplan International colleges UK (C‑77/19, EU:C:2020:934, point 46).


20      Arrêt du 11 mars 2021, Danske Bank (C‑812/19, EU:C:2021:196, point 28).


21      Conclusions de l’avocat général Jääskinen dans l’affaire Commission/Irlande (C‑85/11, EU:C:2012:753, point 42) et dans l’affaire Commission/Suède (C‑480/10, EU:C:2012:751, point 40).


22      Voir, en ce sens, arrêts du 11 mars 2021, Danske Bank (C‑812/19, EU:C:2021:196, point 28), et Skandia, point 29.


23      Conclusions de l’avocat général Jääskinen dans l’affaire Commission/Irlande (C‑85/11, EU:C:2012:753, point 42) et dans l’affaire Commission/Suède (C‑480/10, EU:C:2012:751, point 40), ainsi que conclusions de l’avocat général Mengozzi dans les affaires jointes Larentia + Minerva et Marenave Schiffahrt (C‑108/14 et C‑109/14, EU:C:2015:212, point 49).


24      Voir, en ce sens, par analogie, arrêt du 24 janvier 2019, Morgan Stanley & Co International (C‑165/17, EU:C:2019:58, point 38).


25      Document B ‑ taxud.c.l (2022)2315070-1034, en particulier, p. 24, point 3.


26      Voir, par analogie, ordonnance du 29 octobre 2020, Weindel Logistik Service (C‑621/19, EU:C:2020:889, point 48).


27      Voir point 3.4.3 de la communication au Conseil et au Parlement européen concernant la possibilité de groupement TVA prévue à l’article 11 de la directive 2006/112/CE relative au système commun de [TVA] [COM(2009) 0325 final, du 2 juillet 2009].


28      Voir arrêts Finanzamt T I, point 42, et Diakonie, point 48 ainsi que jurisprudence citée.


29      Voir, en ce sens, par analogie, arrêt du 25 avril 2013, Commission/Suède (C‑480/10, EU:C:2013:263, point 34).


30      Dans cette affaire, la question préjudicielle posée à la Cour concernait l’interprétation de l’article 2, paragraphe 1, et les articles 9 et 11 de la directive TVA.


31      Voir arrêt du 24 janvier 2019, Morgan Stanley & Co International (C‑165/17, EU:C:2019:58, point 35).


32      Voir point 26 de l’arrêt Skandia.


33      Voir points 28, 30 et 31 de l’arrêt Skandia.


34      Arrêt du 11 mars 2021, Danske Bank (C‑812/19, EU:C:2021:196, points 17 à 35).


35      Voir points 21 et 22 de l’arrêt Diakonie.


36      Voir article 2, paragraphe 2, point 2, première phrase, de l’UStG. Voir, également, point 22 de l’arrêt Diakonie.


37      Voir point 20 de l’arrêt Diakonie. Pour un rappel des faits plus détaillé sur cette question, voir, également, points 85 et suiv. de la demande de décision préjudicielle dans cette affaire.


38      En l’occurrence, la juridiction de renvoi s’était demandée si la condition susmentionnée relative à la subordination des entités composant une unité fiscale (au sens de l’article 4, paragraphe 4, second alinéa, de la sixième directive), à l’organe faîtier de celle-ci, requise en droit allemand, aux fins d’apprécier l’existence d’une unité fiscale, pouvait trouver une justification dans une lecture combinée de l’article 4, paragraphe 1, et paragraphe 4, premier alinéa, de la sixième directive, en « assimilant » en quelque sorte les entités appartenant au groupement TVA à des employés aux termes de cette dernière disposition. Voir arrêt Diakonie, points 28 à 30.


39      La question de savoir si une entité membre du groupement TVA accomplit ou non de façon indépendante une activité économique pourrait, le cas échéant, avoir des conséquences dans le cadre des rapports internes existant au sein du groupement TVA en relation avec la charge fiscale respectivement supportée par chacun de ses membres. Voir, à cet égard, arrêt Diakonie, point 27.


40      Voir arrêts Finanzamt T I, point 43, et Diakonie, point 49 ainsi que jurisprudence citée.


41      Voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Jääskinen dans l’affaire Commission/Irlande (C‑85/11, EU:C:2012:753, point 49).


42      Voir, en ce sens, conclusions de l’avocate générale Kokott dans l’affaire Adient (C‑533/22, EU:C:2024:106, point 33).


43      Conclusions de l’avocat général Jääskinen dans l’affaire Commission/Irlande (C‑85/11, EU:C:2012:753, point 50).


44      Conclusions de l’avocat général Jääskinen dans l’affaire Commission/Irlande (C‑85/11, EU:C:2012:753, point 49) et, en ce sens, de l’avocate générale Kokott dans l’affaire Adient (C‑533/22, EU:C:2024:106, point 33).


45      Deuxième directive 67/228/CEE du Conseil, du 11 avril 1967, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Structure et modalités d’application du système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 71, p. 1303).


46      Ainsi, l’exposé des motifs relatifs à cette deuxième directive 67/228 énonçait ce qui suit : « The law currently in force in certain Member States treats persons who are independent from a juridical point of view, but organically interlinked by economic, financial or organization ties, as one single taxpayer, so that transactions among these persons do not constitute tax acts. In this view, firms forming an Organschaft are therefore, subject to the same fiscal conditions as an integrated firm which is one single juridical person ». Bulletin des Communautés européennes, Supplément 5/65, en particulier, p. 20 (disponible uniquement en langue anglaise).


47      Voir points 47 et suiv. de la décision de renvoi et, en particulier, point 54.


48      Pour un rappel de la genèse de la disposition du droit de l’Union relative au groupement TVA, voir conclusions de l’avocat général Jääskinen dans l’affaire Commission/Irlande (C‑85/11, EU:C:2012:753, points 29 à 36), ainsi que Pfeiffer, S., VAT Grouping from a European Perspective, IBFD Doctoral Series, vol. 34, 2015.


49      Voir, en ce sens, conclusions de l’avocate générale Kokott dans l’affaire Adient (C‑533/22, EU:C:2024:106, point 33, note en bas de page 13).


50      Voir, en ce sens, conclusions de l’avocate générale Kokott dans l’affaire Adient (C‑533/22, EU:C:2024:106, point 33, note en bas de page 13).


51      Voir, spécifiquement, en ce qui concerne l’article 11 de la directive TVA, point 50 de cet arrêt.


52      Arrêt du 9 avril 2013, Commission/Irlande (C‑85/11, EU:C:2013:217, point 24).


53      Ainsi, selon la juridiction de renvoi, dans le premier cas de figure de la comparaison (absence d’unité fiscale/caractère non imposable des opérations internes), il y aurait une créance fiscale qui ne donne pas lieu à une déduction de la taxe en amont. En revanche, dans le second cas de figure de l’analyse comparative (unité fiscale avec non taxation des opérations internes), la naissance d’une créance fiscale est d’emblée exclue. Voir points 31 et 32 de la décision de renvoi.