Language of document : ECLI:EU:T:2011:348

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

12 juillet 2011 (*)

« FEOGA – Section ‘Garantie’ – Dépenses exclues du financement communautaire – Cultures arables »

Dans l’affaire T‑197/09,

République de Slovénie, représentée initialement par Mme Ž. Cilenšek Bončina, en qualité d’agent, puis par M. L. Bembič, en qualité d’agent, assisté de MJ. Sladič, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par M. T. van Rijn et Mme K. Banks, puis par MM. F. Jimeno Fernández et M. Žebre, et enfin par M. Jimeno Fernández et Mme B. Rous, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 2009/253/CE de la Commission, du 19 mars 2009, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie », et du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) (JO L 75, p. 15), en tant qu’elle concerne la République de Slovénie,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

composé de MM. N. J. Forwood, président, F. Dehousse (rapporteur) et A. Popescu, juges,

greffier : M. N. Rosner, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 1er février 2011,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        Le règlement (CEE) n° 3508/92 du Conseil, du 27 novembre 1992, établissant un système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d’aides communautaires (JO L 355, p. 1), lequel a été abrogé par l’article 153 du règlement (CE) n° 1782/2003 du Conseil, du 29 septembre 2003, établissant des règles communes pour les régimes de soutien direct dans le cadre de la politique agricole commune et établissant certains régimes de soutien en faveur des agriculteurs et modifiant les règlements (CEE) n° 2019/93, (CE) n° 1452/2001, (CE) n° 1453/2001, (CE) n° 1454/2001, (CE) n° 1868/94, (CE) n° 1251/1999, (CE) n° 1254/1999, (CE) n° 1673/2000, (CEE) n° 2358/71 et (CE) n° 2529/2001 (JO L 270, p. 1), continue de s’appliquer, aux termes des mêmes dispositions, aux demandes de paiements directs pour les années civiles précédant l’année 2005. Les règlements n° 3508/92 et n° 1782/2003 prévoient que chaque État membre crée un système intégré de gestion et de contrôle (ci-après le « SIGC ») relatif à certains régimes d’aides communautaires.

2        L’article 8 du règlement n° 3508/92, s’agissant des demandes de paiements directs pour les années civiles précédant l’année 2005, et l’article 23 du règlement n° 1782/2003, s’agissant des demandes de paiements directs pour les années civiles à compter de l’année 2005, prévoient que chaque État membre procède au contrôle administratif des demandes d’aides, complété par des contrôles sur place.

3        S’agissant de ces contrôles, l’article 15 du règlement (CE) n° 2419/2001 de la Commission, du 11 décembre 2001, portant modalités d’application du SIGC relatif à certains régimes d’aides communautaires établis par le règlement n° 3508/92 (JO L 327, p. 11), et l’article 23 du règlement (CE) n° 796/2004 de la Commission, du 21 avril 2004, portant modalités d’application de la conditionnalité, de la modulation et du SIGC prévus par le règlement n° 1782/2003 (JO L 141, p. 18), disposent, en termes substantiellement identiques, que les contrôles administratifs et les contrôles sur place sont effectués de façon à assurer la vérification efficace du respect des conditions d’octroi des aides.

4        Les documents de travail de la Commission des Communautés européennes AGRI/2254/2003 et AGRI/60363/2005-REV1 contiennent des instructions concernant les contrôles sur place des parcelles et du mesurage de celles-ci, opérés par les États membres conformément, respectivement, au règlement n° 2419/2001 et au règlement n° 796/2004. Il est précisé, dans l’introduction de ces instructions, que celles-ci soit découlent directement des dispositions applicables soit constituent des recommandations des services de la Commission aux États membres.

5        Enfin, la Commission, par le canal du Centre commun de recherche (CCR) situé à Ispra (Italie), a publié, le 14 janvier 2003, en complément des documents de travail mentionnés au point précédent, un document intitulé « Tolérances techniques pour les contrôles sur place » (Technical tolerances for on the spot checks) (ci-après le « document technique du CCR »). Le point 3 de ce document porte sur les instruments utilisés pour le mesurage des parcelles. Le point 3.3 a trait à la roue, au ruban et au topofil. Il y est indiqué que ces systèmes sont considérés comme des instruments d’appoint (backup tools), avant tout destinés au mesurage de longueurs. Ce document indique que l’utilisation de ces instruments devrait être restreinte aux mesures linéaires et qu’il n’est pas recommandé d’utiliser ces instruments pour la mesure de parcelles entières, principalement parce que la géométrie et la pente des terrains agricoles sont rarement régulières. Néanmoins, indique ce document, en cas de nécessité, une tolérance de 5 % peut être appliquée sur la surface de la parcelle mesurée de cette manière.

 Faits à l’origine du litige

6        Du 8 au 11 mars 2005, la Commission a réalisé un audit en Slovénie, dont le principal objectif était d’évaluer l’application des plans d’aide directe à partir de 2004. Après une première phase, administrative, de l’audit, les agents de la Commission ont effectué des contrôles sur place dans quatre exploitations agricoles de la région de Goriska (sud-ouest de la Slovénie), à défaut de pouvoir les effectuer dans la région de Pomurje (nord-est de la Slovénie), initialement choisie, mais enneigée, comme la majeure partie de la Slovénie, au moment de l’audit.

7        Par lettre du 12 octobre 2005, la Commission, considérant que les dépenses de la République de Slovénie n’avaient pas été effectuées conformément aux règles communautaires, a adressé à cet État membre la communication prévue à l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement (CE) n° 1663/95 de la Commission, du 7 juillet 1995, établissant les modalités d’application du règlement (CEE) n° 729/70 en ce qui concerne la procédure d’apurement des comptes du FEOGA, section « Garantie » (JO L 158, p. 6).

8        Le 8 juin 2006 s’est tenue à Bruxelles une réunion bilatérale entre la République de Slovénie et la Commission.

9        Par lettre du 19 avril 2007, la Commission a informé la République de Slovénie qu’elle maintenait sa position et projetait d’appliquer une correction financière forfaitaire de 5 %.

10      Par lettre du 4 juin 2007, la République de Slovénie a demandé l’ouverture d’une procédure devant l’organe de conciliation, conformément à l’article 16 du règlement (CE) n° 885/2006 de la Commission, du 21 juin 2006, portant modalités d’application du règlement (CE) n° 1290/2005 du Conseil en ce qui concerne l’agrément des organismes payeurs et autres entités ainsi que l’apurement des comptes du FEAGA et du Feader (JO L 171, p. 90).

11      Le 31 octobre 2007, l’organe de conciliation a adopté son rapport, dans lequel il a notamment invité la Commission à réviser sa proposition de correction.

12      La Commission a maintenu sa position, sur la base des motifs résumés dans le rapport de synthèse correspondant.

13      Le 19 mars 2009, la Commission a adopté la décision 2009/253/CE, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du FEOGA, section « Garantie », et du Fonds européen agricole de garantie (FEAGA) (JO L 75, p. 15, ci-après la « décision attaquée »). Dans cette décision, la Commission a écarté du financement communautaire, s’agissant de la République de Slovénie, un montant total de dépenses de 355 586 917,12 tolars slovènes (SIT, environ 1 481 612 euros), déclarées au titre des exercices financiers de 2005 et de 2006 (années de demandes 2004 et 2005), en raison de leur non-conformité aux règles communautaires.

 Procédure et conclusions des parties

14      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 20 mai 2009, la République de Slovénie a introduit le présent recours.

15      La République de Slovénie conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en tant qu’elle la concerne ;

–        condamner la Commission aux dépens ;

–        condamner la Commission à lui rembourser les frais exposés dans la présente procédure.

16      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la République de Slovénie aux dépens.

 En droit

17      La République de Slovénie invoque, comme moyens de recours, premièrement, la violation de l’article 15 du règlement n° 2419/2001 et de l’article 23 du règlement n° 796/2004 et, deuxièmement, la violation des principes « de bonne foi et de probité », de proportionnalité et d’égalité de traitement.

 Sur la motivation de la décision attaquée

18      Sans invoquer un défaut de motivation dans un moyen distinct, la République de Slovénie affirme que les défaillances que la Commission a constatées ne ressortent pas de la décision attaquée. Elle ajoute toutefois, immédiatement après, qu’il lui est possible de déduire les griefs de la Commission des documents que celle-ci a produits lors de la procédure précontentieuse.

19      À cet égard, il convient de relever que, dans l’annexe de la décision attaquée, la Commission motive la correction appliquée dans les termes suivants : « faiblesses dans les contrôles-clés : approche technique et instruments de contrôle inadéquats ». La décision attaquée n’est donc pas dépourvue de toute motivation quant aux défaillances constatées.

20      Par ailleurs, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la mesure de l’obligation de motiver consacrée par l’article 253 CE dépend de la nature de l’acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté (arrêts de la Cour du 22 juin 1993, Allemagne/Commission, C‑54/91, Rec. p. I‑3399, point 10, et du 14 avril 2005, Portugal/Commission, C‑335/03, Rec. p. I‑2955, point 83).

21      Dans le contexte particulier de l’élaboration des décisions relatives à l’apurement des comptes du FEOGA, la motivation d’une décision doit, selon la jurisprudence, être considérée comme suffisante dès lors que l’État destinataire a été étroitement associé au processus d’élaboration de cette décision et qu’il connaissait les raisons pour lesquelles la Commission estimait ne pas devoir mettre à la charge du FEOGA la somme litigieuse (arrêts de la Cour du 19 juin 2003, Espagne/Commission, C‑329/00, Rec. p. I‑6103, point 83, et Portugal/Commission, point 20 supra, point 84 ; arrêt du Tribunal du 4 septembre 2009, Autriche/Commission, T‑368/05, non publié au Recueil, point 149).

22      Or, il ressort du dossier, en particulier de la lettre de la Commission du 19 avril 2007 et du rapport de synthèse évoqué au point 12 ci-dessus, que la Commission a indiqué aux autorités slovènes, au cours de la procédure administrative, les griefs sur lesquels elle a fondé la décision attaquée.

23      Il résulte des constatations qui précèdent que la décision attaquée est motivée conformément à l’article 253 CE.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 15 du règlement n° 2419/2001 et de l’article 23 du règlement n° 796/2004

 Arguments des parties

24      Selon la République de Slovénie, la violation de l’article 15 du règlement n° 2419/2001 et de l’article 23 du règlement n° 796/2004 résulte d’une erreur de constatation des faits, elle-même causée par un audit effectué de manière incorrecte par la Commission.

25      La République de Slovénie conteste différents éléments de cet audit, notamment le choix d’une région atypique, la période d’exécution de l’audit, la sélection inappropriée de l’échantillon et le non-respect de la norme internationale d’audit ISA 530. Elle relève également que l’utilisation de la roue de mesure n’était pas interdite au cours de la période litigieuse.

26      S’agissant, premièrement, du choix d’une région atypique, la République de Slovénie fait valoir qu’elle est divisée en douze régions, au nombre desquelles figure la région de Goriska, dans laquelle les agents de la Commission ont réalisé leur audit. Alors que les régions de Pomurje et Podravje seraient deux régions typiquement agricoles aux fins des paiements directs « surfaces », puisque leurs terres agricoles seraient composées, à 81 % pour la première région et à 55 % pour la seconde région, de terres arables et de jardins potagers, cette proportion ne serait que de 8 % pour la région de Goriska. Pour l’année 2004, 36 % des paiements directs seraient revenus à la région de Pomurje et 27,93 % à celle de Podravje, contre seulement 1,08 % à celle de Goriska. Le choix de cette dernière région pour réaliser l’audit serait donc en contradiction avec l’article 19 du règlement n° 2419/2001, car la Commission aurait sélectionné une région qui a reçu une part négligeable du total des aides et non une des deux régions qui ont reçu, chacune, près du tiers de celles-ci.

27      De plus, en raison du nombre élevé de cultures permanentes de vergers et de vignobles dans la région de Goriska, le remembrement n’y aurait pas été effectué de manière cohérente. Pour cette raison, les surfaces agricoles dans cette région auraient, pour l’essentiel, des formes plus irrégulières. Du point de vue de l’évaluation des risques, la région choisie serait donc totalement inadéquate.

28      S’agissant, deuxièmement, de la période d’exécution de l’audit, les documents de travail AGRI/2254/2003 et AGRI/60363/2005-REV1 de la Commission, prévoiraient que les contrôles sur place doivent être effectués au moment opportun afin de s’assurer de façon certaine de l’identification de l’étendue des parcelles et de la récolte et de vérifier le respect des conditions d’octroi des aides. Il y aurait lieu d’effectuer les contrôles des surfaces avant les récoltes ou immédiatement après.

29      Or, lors de l’audit de la Commission, plus de cinq mois se seraient écoulés depuis la récolte, ce qui signifierait que les parcelles mesurées avaient déjà été labourées. Or, un décalage de la bordure du champ labouré pouvait modifier de manière significative les mesures de la parcelle concernée. La République de Slovénie conteste également le motif avancé par la Commission selon lequel il s’agirait de parcelles en jachère ou de pâturages permanents. Elle affirme, au contraire, que neuf des dix surfaces contrôlées étaient des terres arables déjà labourées. Ce labourage précoce serait rendu possible par les particularités géographiques et météorologiques de la région de Goriska. Les agents de la Commission auraient donc effectué leurs contrôles en violation du point 4 du document de travail AGRI/2254/2003 de la Commission. Ces règles, édictées par la Commission, lui seraient aussi applicables, de sorte que son audit serait inopérant et qu’il lui serait interdit de tenir compte de ses résultats et de les extrapoler à l’ensemble du territoire de la Slovénie.

30      S’agissant, troisièmement, de la sélection inappropriée de l’échantillon, l’article 19 du règlement n° 2419/2001 imposerait aux États membres des exigences précises en ce qui concerne le mode de sélection des échantillons, pour que les contrôles sur place puissent être considérés comme réguliers. D’une part, il faudrait un nombre suffisant d’exploitations et, d’autre part, la sélection devrait être faite sur la base d’un échantillonnage aléatoire.

31      Or, l’échantillon choisi par la Commission n’aurait pas un caractère suffisamment aléatoire et serait également trop petit quant au nombre d’exploitations agricoles inspectées, au nombre d’unités constituant l’échantillon et au nombre d’inspecteurs nationaux contrôlés.

32      S’agissant, quatrièmement, de la norme internationale d’audit ISA 530, la Commission ne l’aurait pas respectée. La référence à des « cas graves de parcelles surmesurées » dans la lettre de la Commission du 19 septembre 2005, aurait dû amener les agents de la Commission à augmenter la taille de l’échantillon, afin d’atteindre un degré plus élevé de fiabilité de ce dernier. En effet, comme les résultats au niveau de l’échantillon seraient extrapolés et serviraient de base pour établir la correction financière à un montant forfaitaire, une erreur minime sur un échantillon pourrait avoir d’importantes conséquences financières en se répercutant sur l’ensemble des exploitations agricoles visées.

33      En ce qui concerne les deux cas les plus manifestes d’écart de mesures constatés par la Commission lors de son contrôle sur place, il faudrait les considérer comme des incidents isolés survenus dans des circonstances particulières. Ils constitueraient ainsi une erreur occasionnelle au sens de la norme internationale d’audit ISA 530. En effet, les deux parcelles en cause auraient été contrôlées par un seul et même inspecteur slovène. Dans le premier cas, cet inspecteur n’aurait, pour des raisons incompréhensibles, pas décompté la partie de la parcelle manifestement inéligible aux paiements directs. Dans le second cas, le père très âgé du propriétaire n’aurait pas pu dire exactement où passait la limite de la parcelle un an auparavant. Les agents de la Commission ayant effectué leur audit trop tardivement et ayant procédé au mesurage avec une roue de mesure, ils n’auraient pas dû inclure la parcelle dans l’échantillon.

34      La République de Slovénie est donc convaincue que les écarts entre les mesures prises par les agents de la Commission et les mesures nationales ne résultent pas d’une erreur systémique, mais du travail incorrect d’un seul et même inspecteur slovène, inspecteur dont l’exclusion des contrôles en 2005 aurait garanti que les erreurs survenues en 2004 ne se reproduisent pas.

35      Cinquièmement, la République de Slovénie fait valoir que, en tout état de cause, l’utilisation d’une roue de mesure n’était pas interdite durant la période concernée.

36      D’une part, la République de Slovénie déduit des termes du rapport de l’organe de conciliation que la position de la Commission, fondée sur le document technique du CCR, était que l’utilisation de la roue de mesure n’aurait été inappropriée que si deux conditions cumulatives avaient été réunies : la forme irrégulière des parcelles et la présence des parcelles dans une zone boisée ou montagneuse. Or, les dix parcelles contrôlées, certes de formes irrégulières, ne se seraient pas trouvées dans une zone boisée ou montagneuse.

37      D’autre part, le document technique du CCR (point 3.3), n’aurait pas interdit, mais simplement déconseillé, l’utilisation d’une roue de mesure. Ce ne serait qu’en 2007, donc postérieurement aux mesures litigieuses, que la documentation technique, partiellement modifiée, aurait « fortement découragé » l’utilisation de la roue de mesure.

38      La Commission conteste les arguments de la République de Slovénie.

 Appréciation du Tribunal

39      À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le FEOGA ne finance que les interventions effectuées conformément aux dispositions communautaires dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles et qu’il appartient à la Commission, aux fins de prouver l’existence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles, non de démontrer d’une façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par elles, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces chiffres. Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes du FEOGA, et que c’est à lui qu’il incombe, en conséquence, de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission (voir arrêts de la Cour du 8 mai 2003, Espagne/Commission, C‑349/97, Rec. p. I‑3851, points 45 à 47 et 49 ; du 4 mars 2004, Allemagne/Commission, C‑344/01, Rec. p. I‑2081, point 58, et la jurisprudence citée ; du 24 février 2005, Grèce/Commission, C‑300/02, Rec. p. I‑1341, points 32 à 36, et la jurisprudence citée, et du 17 mars 2005, Grèce/Commission, C‑285/03, non publié au Recueil, point 43).

40      L’État membre concerné, pour sa part, ne saurait infirmer les constatations de la Commission sans étayer ses propres allégations par des éléments établissant l’existence d’un système de contrôle fiable et opérationnel. Dès lors qu’il ne parvient pas à démontrer que les constatations de la Commission sont inexactes, celles-ci constituent des éléments susceptibles de faire naître des doutes sérieux quant à la mise en place d’un ensemble adéquat et efficace de mesures de surveillance et de contrôle (arrêts de la Cour du 28 octobre 1999, Italie/Commission, C‑253/97, Rec. p. I‑7529, point 7 ; du 8 mai 2003, Espagne/Commission, point 39 supra, point 48, et du 24 février 2005, Grèce/Commission, point 39 supra, point 35).

41      En l’espèce, il ressort tant de la lettre de la Commission du 19 avril 2007 que du rapport de synthèse que les mesures effectuées par la Commission en Slovénie ont révélé des écarts de superficie par rapport aux résultats obtenus par les services de contrôle nationaux et que ces écarts découlent, selon la Commission, d’une « approche incorrecte du contrôle » et de l’« utilisation de méthodes et d’instruments incorrects » par la République de Slovénie. La Commission a constaté, en outre, l’ajout systématique et erroné par les inspecteurs slovènes d’une marge de 4 % à toutes les mesures effectuées à la roue.

42      Il convient donc d’examiner les trois constatations générales de la Commission relatives à l’« approche incorrecte du contrôle » (points 43 à 48 ci-après), à l’« utilisation de méthodes et d’instruments incorrects » (points 49 à 53 ci-après) et à l’ajout d’une marge de 4 % à toutes les mesures effectuées à la roue (point 54 ci-après), ainsi que les arguments avancés par la République de Slovénie pour contester plus spécifiquement les mesures effectuées par la Commission lors de son contrôle sur place.

–       Sur l’« approche incorrecte du contrôle »

43      Sur l’« approche incorrecte du contrôle », la Commission a fait valoir que, bien que les instructions des organes slovènes aient indiqué la manière dont il convenait de tenir compte du caractère accidenté et de la forme du terrain et comment il convenait de diviser les parcelles agricoles de formes irrégulières en formes géométriques plus simples, il avait été constaté que les inspecteurs slovènes n’avaient pas procédé à la mesure des parcelles conformément aux instructions. La Commission a, en outre, indiqué qu’il avait été établi dans un cas que, lors des contrôles sur place initiaux, l’inspecteur slovène n’avait pas exclu certaines parties des parcelles qui étaient inéligibles aux paiements directs (lettre du 19 avril 2007, point 1, deuxième alinéa, premier tiret, rapport de synthèse, point 1.1.1, troisième alinéa, premier tiret).

44      En réponse à ces considérations, la République de Slovénie fait valoir qu’en réalité l’absence d’exclusion d’une surface inéligible relevée par la Commission avait été le fait d’un seul inspecteur slovène. Ainsi, l’appréciation de la Commission comporterait une généralisation abusive « aux inspecteurs slovènes » d’une erreur n’impliquant qu’un seul inspecteur, lequel aurait été écarté des contrôles pour l’année suivante. Cet inspecteur aurait, pour des raisons incompréhensibles, omis de décompter un verger inéligible dans le cadre d’une terre arable éligible. Cette erreur aurait été si grossière qu’elle aurait dû être considérée comme non représentative par les agents de la Commission et, de ce fait, non prise en considération par ceux-ci.

45      Force est cependant de relever que, contrairement à ce que prétend la République de Slovénie, une telle erreur, constatée à l’occasion de contrôles sur place effectués dans un lieu choisi aléatoirement quant à l’identité de l’inspecteur, pouvait constituer un indice parmi d’autres de nature à contribuer à l’émergence d’un doute dans l’esprit des agents de la Commission sur la qualité des contrôles opérés au niveau national.

46      Par ailleurs, il convient de relever que, au-delà de la constatation de cette erreur, la Commission a fait état, dans la lettre du 19 avril 2007 et dans son rapport de synthèse, d’une préoccupation, plus large, concernant le non-respect des instructions slovènes relatives aux règles de mesurage proprement dit des parcelles (prise en compte des accidents de terrains et découpage des parcelles irrégulières en formes géométriques simples).

47       La République de Slovénie n’oppose aucun argument particulier à cette préoccupation, au-delà de celui concernant la prétendue non-­représentativité des contrôles sur place du fait qu’ils n’auraient concerné qu’un seul inspecteur. Dès lors, cela pouvait également constituer un élément de nature à contribuer à l’émergence d’un doute sur la qualité des contrôles opérés au niveau national. Une fois l’erreur constatée lors de contrôles opérés de manière aléatoire, la République de Slovénie ne pouvait, eu égard à la jurisprudence citée au point 40 ci-dessus, se contenter de demander à la Commission d’exclure que cette erreur puisse être plus générale.

48      Il découle des considérations qui précèdent que la République de Slovénie ne parvient pas à remettre en cause la première constatation générale de la Commission, relative à une « approche incorrecte du contrôle ».

–       Sur l’« utilisation de méthodes et d’instruments incorrects »

49      Concernant l’« utilisation de méthodes et d’instruments incorrects », la Commission a relevé que, en 2004 et en 2005, la méthode de mesure la plus souvent utilisée était la roue de mesure et le planimètre sur écran et que cette méthode reposait, dans certains cas, sur des orthophotographies périmées (lettre du 19 avril 2007, point 1, deuxième alinéa, deuxième tiret, rapport de synthèse, point 1.1.1, troisième alinéa, deuxième tiret). La Commission a indiqué que ces instruments n’étaient pas appropriés pour garantir la conformité de l’ensemble des mesures à l’article 15 du règlement n° 2419/2001 et à l’article 23 du règlement n° 796/2004.

50      La République de Slovénie ne conteste ni la constatation de la Commission relative à l’utilisation d’orthophotographies périmées ni celle relative à l’utilisation de la roue de mesure. Elle fait toutefois valoir que la roue de mesure n’était pas un instrument de mesure interdit.

51      Sur ce dernier point, il ressort du document technique du CCR (point 3.3), dont la requérante disposait à l’époque et dont elle ne conteste nullement la valeur probante en tant que document technique de référence pour l’utilisation de la roue de mesure à l’époque des faits, que la roue est considérée comme un instrument d’appoint (backup tool), avant tout destiné au mesurage de longueurs. Il ressort également de ce document que l’utilisation de la roue devrait être limitée aux mesures linéaires et qu’elle n’est pas appropriée à la mesure des parcelles entières, principalement parce que la géométrie et la pente des terrains agricoles sont rarement régulières. Néanmoins, indique ce document, en cas de nécessité, une tolérance de 5 % peut être appliquée sur la surface de la parcelle mesurée de cette manière.

52      Il résulte donc du document technique du CCR que, à l’époque des faits, si l’emploi de la roue n’était certes pas exclu en cas de nécessité, un emploi de cet instrument en tant qu’instrument de mesure ordinaire était, en revanche, considéré comme impropre à garantir la vérification efficace du respect des conditions d’octroi des aides qui était exigée des États membres en vertu de l’article 15 du règlement n° 2419/2001 et de l’article 23 du règlement n° 796/2004. Or, il n’a pas été contesté, que ce soit dans le cadre de la procédure écrite ou en réponse aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience, que la roue de mesure, loin d’être un instrument d’appoint avant tout réservé aux mesures linéaires et utilisé pour les surfaces seulement en cas de nécessité, était l’instrument ordinaire des inspecteurs slovènes pour le contrôle de la surface des parcelles agricoles déclarées. Quant à l’argument de la République de Slovénie selon lequel l’interdiction d’utiliser la roue n’aurait existé qu’aux deux conditions cumulatives que la parcelle mesurée soit d’une forme irrégulière et qu’elle se situe dans une région boisée ou montagneuse, il ne trouve aucun soutien dans le document technique du CCR.

53      Il s’ensuit que la République de Slovénie ne parvient pas à remettre en cause la deuxième constatation générale de la Commission, relative à l’« utilisation de méthodes et d’instruments incorrects ».

–       Sur l’ajout systématique d’une marge de 4 % aux mesures effectuées à la roue

54      Pour ce qui est de l’ajout systématique, par les inspecteurs slovènes, d’une marge de 4 % à leurs mesures effectuées à la roue, il suffit de relever que la République de Slovénie convient de la réalité de cette pratique au niveau national et admet son caractère erroné.

55      Il ressort des considérations qui précèdent que les constatations générales de la Commission, relatives, respectivement, à l’« approche incorrecte du contrôle », à l’« utilisation de méthodes et d’instruments incorrects » et à l’ajout d’une marge de 4 % à toutes les mesures effectuées à la roue, ne sont soit pas sérieusement remises en cause dans le présent recours, soit pas contestées.

–       Sur les arguments avancés par la République de Slovénie pour contester les mesures effectuées par la Commission lors de son contrôle sur place

56      S’agissant des mesures effectuées par la Commission lors de son contrôle sur place, il ressort de la lettre du 19 avril 2007 qu’elles ont révélé, sur les dix parcelles contrôlées, un écart de 8,65 % par rapport à la superficie déterminée lors de l’inspection slovène et de 3,9 % par rapport à la superficie déclarée. Des écarts variant de 5,8 à 33,3 % par rapport à la superficie acceptée comme éligible lors de l’inspection d’origine ont été observés pour cinq des sept parcelles mesurées.

57      La République de Slovénie soulève diverses contestations s’agissant de ces mesures. Elle conteste, essentiellement, la fiabilité et la représentativité des contrôles sur place et la possibilité d’extrapoler les résultats desdits contrôles au niveau national. Les parcelles contrôlées auraient été trop peu nombreuses, situées dans une région atypique et les contrôles auraient été opérés tardivement, sur des terres déjà labourées. La Commission n’aurait pas respecté certaines exigences en matière d’échantillonnage qui s’imposaient pourtant à elle.

58      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, l’extrapolation d’une constatation relative à des défaillances dans le système de contrôle d’un État membre de certaines régions à d’autres régions n’est pas interdite par principe, mais doit toujours être justifiée par les faits (arrêt du 4 mars 2004, Allemagne/Commission, point 39 supra, point 61). Comme l’a relevé le juge de l’Union (arrêts du Tribunal du 12 septembre 2007, Finlande/Commission, T‑230/04, non publié au Recueil, point 160, et Autriche/Commission, point 21 supra, point 199), il résulte des termes du document de la Commission VI/5330/97, du 23 décembre 1997, intitulé « Orientations concernant le calcul des conséquences financières lors de la préparation de la décision d’apurement des comptes du FEOGA-Garantie » (ci‑après les « Orientations »), que la pratique de la Commission consiste à appliquer le principe de l’extrapolation à l’ensemble du territoire d’un État membre, sauf dans la mesure où les faits indiquent que la portée des défaillances constatées est plus limitée.

59      Il convient également de rappeler que les données sur lesquelles la Commission s’appuie en décidant d’appliquer une telle extrapolation doivent constituer des éléments de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle peut éprouver à l’égard des contrôles ou des chiffres relatifs aux régions non contrôlées. Dans ce contexte, il appartient à l’État membre de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres, afin de démontrer que les doutes de la Commission n’étaient pas fondés. La simple référence au fait que la situation serait différente dans chaque région ne saurait suffire. L’État membre doit prouver concrètement que les systèmes de contrôle dans les régions non contrôlées n’étaient pas affectés par les mêmes défauts que ceux que la Commission avait constatés dans les régions contrôlées (voir, en ce sens, arrêts du 4 mars 2004, Allemagne/Commission, point 39 supra, points 64 et 65, et Finlande/Commission, point 58 supra, points 160 et 161).

60      Cependant, en l’espèce, force est de constater que la Commission n’a pas tant extrapolé des résultats de contrôles sur place opérés dans une région aux autres régions de la Slovénie, que simplement trouvé, dans ces résultats, une confirmation de ses constatations plus générales, valables pour l’ensemble du territoire slovène et relatives, en particulier, à l’« utilisation de méthodes et d’instruments incorrects ».

61      Comme le relève la Commission dans son mémoire en défense, les contrôles sur place n’ont été réalisés qu’en tant que seconde phase de la mission d’audit. Ces contrôles, certes opérés dans une seule région et sur un nombre limité de parcelles, n’ont fait que confirmer et illustrer les conclusions générales auxquelles la Commission était parvenue s’agissant des défauts affectant le système de contrôle slovène dans son ensemble.

62      La correction décidée par la Commission n’est pas une correction ponctuelle, calculée par extrapolation de résultats de vérifications effectuées sur un échantillon de dossiers individuels de demande d’aide [voir sixième alinéa, sous b), de l’annexe 2 des Orientations], mais une correction forfaitaire représentant le risque de perte pour le budget communautaire découlant d’irrégularités systémiques affectant le SIGC national (voir huitième alinéa de l’annexe 2 des Orientations).

63      Or, la République de Slovénie n’est pas parvenue à remettre en cause, que ce soit dans le cadre de la procédure écrite ou lors de l’audience, les constatations générales opérées par la Commission à l’égard du système de contrôle slovène dans son ensemble.

64      Il s’ensuit que les arguments de la République de Slovénie avancés à l’encontre de la fiabilité et de la représentativité des contrôles sur place ne sont pas, en tout état de cause, de nature à contredire la conclusion à laquelle la Commission est parvenue dans la décision attaquée.

65      Dans ces conditions et sans qu’il soit besoin d’examiner plus avant ces arguments, il convient de rejeter le présent moyen.

 Sur le second moyen, tiré de la violation des principes « de bonne foi et de probité », de proportionnalité et d’égalité de traitement

 Sur la violation du principe « de bonne foi et de probité »

–       Arguments des parties

66      La République de Slovénie fait valoir que, si l’utilisation de la roue de mesure était aussi litigieuse, la Commission aurait dû lui faire grief d’irrégularités liées aux instructions données aux inspecteurs nationaux. Or la Commission aurait considéré que ces instructions étaient appropriées et n’aurait pas fait de remarques sur celles-ci, bien qu’elles indiqueraient expressément que, pour le mesurage, les inspecteurs utilisent ordinairement la roue. En outre, la Commission aurait elle-même utilisé la roue de mesure lors des contrôles.

67      Ce ne serait qu’au mois d’octobre 2005 que la République de Slovénie aurait appris que l’utilisation de la roue de mesure était litigieuse, de sorte qu’elle n’aurait pas pu utiliser un autre instrument pour ses contrôles en 2005. Cette situation serait contraire tant au principe « de bonne foi et de probité » qu’à la norme internationale d’audit ISA 260, selon laquelle l’auditeur doit faire en temps utile un rapport sur les éléments importants en matière de gestion, de manière à ce que les autorités compétentes puissent prendre les mesures appropriées.

68      La République de Slovénie soutient que la Commission, si elle avait exprimé ses réserves au plus tard juste après la réalisation de son audit au mois de mars 2005, lui aurait permis de prendre des mesures appropriées en temps utile et de garantir l’utilisation d’autres méthodes plus acceptables. La communication tardive de sa position par la Commission devrait, en tout état de cause, avoir pour conséquence une exclusion de la correction financière pour l’année 2005. La République de Slovénie invoque, à cet égard, l’arrêt du Tribunal du 17 juin 2009, Portugal/Commission (T‑50/07, non publié au Recueil).

69      La Commission conteste les arguments de la République de Slovénie.

–       Appréciation du Tribunal

70      Il convient de relever que, contrairement à ce que prétend la République de Slovénie, la Commission n’a, à aucun moment de la procédure, considéré que la roue de mesure était appropriée pour une utilisation comme instrument de contrôle ordinaire des surfaces agricoles.

71      À cet égard, s’agissant de l’allégation selon laquelle la Commission n’aurait pas réagi à la notification officielle de la législation nationale concernant les méthodes et les instruments utilisés par les inspecteurs nationaux, il suffit de rappeler que l’absence de réaction de la Commission ne saurait valoir approbation d’une mesure nationale contraire au droit communautaire (arrêts du Tribunal du 10 septembre 2008, Italie/Commission, T‑181/06, non publié au Recueil, point 135, et du 19 juin 2009, Espagne/Commission, T‑369/05, non publié au Recueil, point 69).

72      Par ailleurs, et ainsi qu’il a déjà été constaté au point 52 ci-dessus, il résulte du document technique du CCR que, si, à l’époque litigieuse, l’emploi de la roue n’était certes pas exclu en cas de nécessité, son emploi, comme en l’espèce, à titre d’instrument de mesure ordinaire était, en revanche, considéré comme impropre à garantir la vérification efficace du respect des conditions d’octroi des aides, exigée des États membres en vertu de l’article 15 du règlement n° 2419/2001 et de l’article 23 du règlement n° 796/2004.

73      Quant à l’argument de la requérante tiré de ce que la Commission aurait elle-même utilisé la roue de mesure lors des contrôles sur place, il ressort du dossier que cet argument n’est, en réalité, avancé qu’au sujet d’une seule des parcelles contrôlées, pour laquelle il n’était pas possible, au moment du contrôle sur place, d’obtenir un signal GPS [Global Positioning System (système de positionnement global par satellite)] Il ne saurait donc être déduit de cette circonstance une approbation par la Commission de l’utilisation de la roue de mesure au-delà du cas de nécessité prévu par le document technique du CCR, ni, en tout état de cause, une violation par la Commission du « principe de bonne foi et de probité ».

74      S’agissant, enfin, de la réaction prétendument tardive de la Commission, il convient de relever que la situation en l’espèce diffère de celle en cause dans l’affaire invoquée par la République de Slovénie et ayant donné lieu à l’arrêt du 17 juin 2009, Portugal/Commission, point 68 supra. En effet, dans cette affaire, la Commission avait omis, dans sa première communication à l’État membre en vertu de l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1663/95, de mentionner les résultats de certaines de ses vérifications et avait, donc, privé l’État membre, à ce stade de la procédure, d’une connaissance suffisante de ses réserves (arrêt du 17 juin 2009, Portugal/Commission, point 68 supra, points 65 à 72). Or, en l’espèce, la Commission a dûment fait état, dès la première communication en vertu de la disposition susvisée, adressée à l’État membre par lettre du 12 octobre 2005, de sa réserve tirée de l’utilisation par la République de Slovénie de la roue de mesure.

75      Au demeurant, quand bien même la Commission aurait été en mesure d’adresser à la République de Slovénie la communication au titre de l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1663/95 plus tôt qu’elle ne l’a fait, il n’en reste pas moins que, comme relevé au point 72 ci-dessus, la République de Slovénie ne pouvait, en tout état de cause, ignorer la contrariété aux exigences communautaires d’une utilisation de la roue de mesure comme instrument de mesure ordinaire des surfaces agricoles.

76      Dès lors et en tout état de cause, c’est en vain que la République de Slovénie tente de remettre en cause la légalité de la décision attaquée et de la correction financière décidée par la Commission en invoquant des manquements de cette institution au « principe de bonne foi et de probité ».

 Sur la violation du principe de proportionnalité

–       Arguments des parties

77      La République de Slovénie fait valoir, en substance, que la correction forfaitaire de 5 % appliquée par la Commission n’est pas conforme au principe de proportionnalité. L’audit de la Commission ne prouverait que le mesurage erroné des quelques parcelles inspectées, mais ne révélerait pas d’erreur systémique du contrôle national. Il y aurait donc disproportion entre l’irrégularité constatée et les conséquences qui en auraient été déduites.

78      La Commission conteste la position de la République de Slovénie.

–       Appréciation du Tribunal

79      Il résulte des Orientations que les corrections financières sont calculées en fonction du niveau de manquement de l’État membre à ses obligations et compte tenu des conséquences qui en découlent pour les dépenses de l’Union.

80      En application de l’annexe 2 des Orientations, lorsque le niveau réel des dépenses irrégulières ne peut pas être déterminé, la Commission applique des corrections forfaitaires s’élevant à 2 %, 5 %, 10 % ou 25 % des dépenses déclarées, en fonction de l’ampleur du risque de perte.

81      En particulier, lorsque tous les contrôles-clés sont effectués, mais sans respecter, notamment, la rigueur préconisée par les règlements, il convient d’appliquer une correction à hauteur de 5 %, car il peut raisonnablement être conclu que ces contrôles n’offrent pas le niveau attendu de régularité des demandes et que le risque de pertes pour le FEOGA est significatif.

82      Il ressort également des Orientations que le taux de correction doit être appliqué à la part des fonds pour laquelle la dépense a constitué un risque. Lorsque la carence résulte de la non-adoption, par un État membre, d’un système de contrôle approprié, la correction doit être appliquée à toutes les dépenses relevant de la mesure concernée.

83      Par ailleurs, selon la jurisprudence, s’il appartient à la Commission de démontrer l’existence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles, il revient à l’État membre, une fois cette violation établie, de démontrer, le cas échéant, que la Commission a commis une erreur quant aux conséquences financières à en tirer (arrêt de la Cour du 7 octobre 2004, Espagne/Commission, C‑153/01, Rec. p. I‑9009, point 67).

84      En l’espèce, et ainsi qu’il a déjà été constaté dans le cadre de l’examen du premier moyen, la Commission n’a pas commis d’erreur en constatant des défaillances dans le système de contrôle de la République de Slovénie et, plus précisément, des défaillances dans les contrôles-clés au sens de l’annexe 2, quatorzième alinéa, premier tiret, des Orientations.

85      Il n’est pas sérieusement contesté que ces défaillances, en particulier celles relatives à l’utilisation de la roue de mesure comme instrument ordinaire et à l’ajout systématique d’une marge de 4 % aux mesures ainsi effectuées, ont affecté le système de contrôle slovène au niveau national. En outre, la République de Slovénie n’avance pas, devant le Tribunal, d’élément établissant que la Commission ne pouvait pas conclure à l’existence d’un risque significatif de pertes pour le FEOGA. À cet égard, l’allégation, avancée lors de l’audience, selon laquelle l’ajout d’une marge de 4 % à toutes les mesures effectuées à la roue aurait été sans incidence financière significative sur les paiement directs est irrecevable au regard de l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal et, en tout état de cause, non étayée.

86      Il découle des considérations qui précèdent que le grief soulevé par la République de Slovénie, tiré de la violation du principe de proportionnalité, doit être rejeté comme non fondé.

 Sur la violation du principe d’égalité de traitement

–       Arguments des parties

87      La République de Slovénie relève que, en raison du mode de mise en œuvre de l’audit en 2005, elle a subi une inégalité de traitement par rapport aux autres États membres. En effet, dans son rapport du 31 octobre 2007, l’organe de conciliation aurait relevé que l’audit avait indubitablement été limité par rapport à des audits comparables effectués dans les autres États membres. La République de Slovénie ne disposant pas des données sur la sélection de l’échantillon des exploitations agricoles contrôlées par la Commission dans les autres États membres, elle propose au Tribunal, en application de l’article 24 du statut de la Cour de justice et de l’article 49 du règlement de procédure, d’exiger de la Commission qu’elle produise les données comparables ou de demander à l’organe de conciliation de communiquer les données qui l’ont conduit à de telles conclusions.

88      La Commission conteste les arguments de la République de Slovénie.

–       Appréciation du Tribunal

89      Selon une jurisprudence constante, le principe d’égalité de traitement exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié (arrêt de la Cour du 14 avril 2005, Belgique/Commission, C‑110/03, Rec. p. I‑2801, point 71).

90      Il convient de rappeler que les contrôles sur place opérés par la Commission n’ont fait que confirmer les constatations plus générales, en soi suffisantes, faites par cette institution à l’égard du système de contrôle slovène dans son ensemble.

91      Or, la République de Slovénie n’est parvenue à démontrer ni l’inexactitude de ces constatations de la Commission, ni l’absence d’incidence des non­-conformités constatées sur le budget communautaire, ni la violation du principe de proportionnalité. Elle n’allègue pas non plus de violation du principe de l’égalité de traitement s’agissant de ces constatations.

92      Dans ces conditions, le prétendu caractère limité des contrôles sur place réalisés par la Commission en l’espèce, par rapport à ceux opérés dans d’autres États membres, ne saurait avoir pour effet d’entacher d’illégalité la décision attaquée.

93      Il s’ensuit que le grief de la République de Slovénie tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement doit être rejeté, sans qu’il y ait lieu de faire droit à sa demande visant la production, par la Commission ou par l’organe de conciliation, de données sur la sélection de l’échantillon par les agents de la Commission dans les autres États membres.

94      Aucun des moyens invoqués par la République de Slovénie n’étant fondé, il convient de rejeter le présent recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

95      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

96      La République de Slovénie ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La République de Slovénie supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

Forwood

Dehousse

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 juillet 2011.

Signatures


* Langue de procédure : le slovène.