Language of document : ECLI:EU:T:2015:122

ARRÊT DU TRIBUNAL (chambre des pourvois)

27 février 2015 (*)

« Pourvoi – Fonction publique – Fonctionnaires – Rémunération – Indemnité de dépaysement – Naturalisation – Article 4, paragraphe 1, sous a) et b), de l’annexe VII du statut – Répétition de l’indu – Article 85, premier alinéa, du statut »

Dans l’affaire T‑430/13 P,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (troisième chambre) du 26 juin 2013, Achab/CESE (F‑21/12, RecFP, EU:F:2013:95), et tendant à l’annulation de cet arrêt,

Comité économique et social européen (CESE), représenté initialement par Mme M. Arsène, puis par Mme M. Pascua Mateo et M. L. Camarena Januzec, en qualité d’agents, assistés de Mes D. Waelbroeck et A. Duron, avocats,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant

Mohammed Achab, fonctionnaire du CESE, demeurant à Bruxelles (Belgique), représenté par Me N. Lhoëst, avocat,

partie défenderesse en première instance,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois),

composé de M. M. Jaeger, président, Mme M. E. Martins Ribeiro (rapporteur) et M. M. van der Woude, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend le présent

Arrêt

1        Par son pourvoi introduit au titre de l’article 9 de l’annexe I du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le requérant, le Comité économique et social européen (CESE), demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de la fonction publique de l’Union européenne (troisième chambre) du 26 juin 2013, Achab/CESE (F‑21/12, RecFP, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:F:2013:95), par lequel celui-ci a annulé la décision du CESE du 9 juin 2011, en ce qu’elle a ordonné la répétition des indemnités de dépaysement versées à M. Mohammed Achab (ci-après le « défendeur ») à partir du 1er juillet 2010, a rejeté le recours pour le surplus, a condamné le CESE à supporter ses propres dépens ainsi que la moitié de ceux du requérant en première instance et condamné ce dernier à supporter la moitié de ses propres dépens.

 Cadre juridique

2        Selon l’article 28, sous a), du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), « [n]ul ne peut être nommé fonctionnaire […] s’il n’est ressortissant d’un des États membres de l’Union, sauf dérogation accordée par l’autorité investie du pouvoir de nomination ».

3        Aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut, l’indemnité de dépaysement est accordée :

« a)      au fonctionnaire :

–        qui n’a pas et n’a jamais eu la nationalité de l’État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation et

–        qui n’a pas, de façon habituelle, pendant la période de cinq années expirant six mois avant son entrée en fonctions, habité ou exercé son activité professionnelle principale sur le territoire européen dudit État. Pour l’application de cette disposition, les situations résultant de services effectués pour un autre État ou une organisation internationale ne sont pas à prendre en considération.

b)      au fonctionnaire qui, ayant ou ayant eu la nationalité de l’État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation, a, de façon habituelle, pendant la période de dix années expirant lors de son entrée en service, habité hors du territoire européen dudit État pour une raison autre que l’exercice de fonctions dans un service d’un État ou dans une organisation internationale. »

4        L’article 85, premier alinéa, du statut prévoit :

« Toute somme indûment perçue donne lieu à répétition si le bénéficiaire a eu connaissance de l’irrégularité du versement ou si celle-ci était si évidente qu’il ne pouvait manquer d’en avoir connaissance. »

 Faits à l’origine du litige

5        Les faits qui sont à l’origine du litige sont énoncés aux points 7 à 12 de l’arrêt attaqué dans les termes suivants :

« 7      Le requérant est arrivé en Belgique de Tanger (Maroc) le 20 novembre 1977 et est inscrit comme résidant à Bruxelles depuis le 13 décembre 1977. Le 19 janvier 1981, le requérant a été engagé comme cuisinier par le CESE sous le statut d’agent local. Le 1er avril 1983, il a été nommé, par dérogation prévue à l’article 28 du statut, fonctionnaire stagiaire et, le 1er octobre 1983, il a été titularisé.

8      Depuis son entrée en fonctions au CESE, le requérant a bénéficié de l’indemnité de dépaysement.

9      Le 15 juin 2010, le requérant a obtenu la nationalité belge par naturalisation.

10      Par une note datée du 9 juin 2011, le CESE a informé le requérant que, [à la] suite [de] sa naturalisation, son dossier avait été réexaminé et qu’il ressortait de ce réexamen qu’il ne remplissait plus les conditions pour bénéficier de l’indemnité de dépaysement. Pour justifier sa décision, le CESE a indiqué que le requérant résidait en Belgique depuis trois ans avant son entrée en fonctions au CESE en tant qu’agent local. La note faisait état, en substance, de ce que le CESE en avait déduit que, conformément à l’article 4, paragraphe 1, sous b), de l’annexe VII du statut, le requérant ne pouvait continuer à prétendre à l’indemnité de dépaysement, car, tout en ayant la nationalité belge, il n’avait pas résidé pendant les dix années précédant son entrée en fonctions hors du territoire belge. Cette note précisait enfin que les indemnités de dépaysement perçues depuis le 1er juillet 2010 seraient récupérées.

11      Le 9 septembre 2011, le requérant a introduit une réclamation dirigée contre la décision du 9 juin 2011 et ses fiches de rémunération mettant en application cette décision.

12      Le CESE n’ayant pas répondu à la réclamation introduite par le requérant, celle-ci doit être regardée, conformément aux dispositions de l’article 90, paragraphe 2, du statut, comme ayant fait l’objet d’une décision implicite de rejet le 9 janvier 2012 […] »

 Procédure en première instance et arrêt attaqué

6        Par requête déposée au greffe du Tribunal de la fonction publique le 15 février 2012, le requérant en première instance a introduit un recours visant l’annulation de la décision du CESE du 9 juin 2011, lui supprimant le bénéfice de l’indemnité de dépaysement avec effet au 1er juillet 2010 et procédant au recouvrement de l’indemnité de dépaysement perçue depuis cette date ainsi que, pour autant que de besoin, de la décision du CESE du 9 janvier 2012 de rejet de la réclamation. Le requérant en première instance demandait la condamnation du CESE à lui rembourser l’indemnité de dépaysement récupérée à partir du 1er juillet 2010 ainsi qu’à payer l’indemnité de dépaysement qui n’a plus été réglée à partir du 9 juin 2011, le tout augmenté des intérêts moratoires au taux de la Banque centrale européenne (BCE), augmenté de deux points. Enfin, le requérant en première instance a sollicité la condamnation du CESE aux dépens.

7        Le CESE a conclu, en première instance, à ce que le Tribunal de la fonction publique rejette le recours et condamne le requérant en première instance aux dépens.

8        Le Tribunal de la fonction publique a, à titre liminaire, considéré que les conclusions en annulation dirigées par le requérant en première instance contre la décision du CESE du 9 janvier 2012 de rejet de la réclamation avaient pour effet de le saisir à nouveau de la décision du 9 juin 2011.

9        Le requérant en première instance invoquait quatre moyens au soutien de son recours.

10      En premier lieu, le Tribunal de la fonction publique a rejeté, aux points 20 à 24 de l’arrêt attaqué, le moyen tiré de la violation de l’obligation de motivation. Le Tribunal de la fonction publique a estimé, en substance, qu’il ressortait de la décision attaquée, premièrement, que le requérant en première instance ne remplissait plus les conditions prévues à l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut pour prétendre à l’indemnité de dépaysement, deuxièmement, qu’il ne remplissait pas davantage les conditions pour y prétendre en vertu de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de ladite annexe et, troisièmement, qu’il pouvait être déduit de l’obligation pour l’administration de recouvrer toute somme indûment perçue que le CESE, estimant que le requérant en première instance ne remplissait plus les conditions pour bénéficier de l’indemnité de dépaysement depuis sa naturalisation, devait procéder à la répétition des sommes indûment perçues par ce dernier depuis le 1er juillet 2010. Le Tribunal de la fonction publique a donc conclu que le CESE n’avait commis aucune violation de l’obligation de motivation.

11      En deuxième lieu, le Tribunal de la fonction publique a rejeté le moyen tiré de la violation de l’article 4, paragraphe 1, sous a) et b), de l’annexe VII du statut. Le Tribunal de la fonction publique a considéré, au point 27 de l’arrêt attaqué, que l’acquisition par le requérant en première instance de la nationalité belge par naturalisation pouvait être considérée comme un événement susceptible de modifier de façon substantielle sa situation, la nationalité de la personne concernée constituant l’un des paramètres à prendre en compte pour l’application de l’article 4, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut. Il a donc estimé que le CESE n’avait commis aucune erreur en considérant que le changement de nationalité du requérant en première instance constituait un fait justifiant un réexamen de sa situation. Le Tribunal de la fonction publique a ainsi constaté, au point 28 de l’arrêt attaqué, que le requérant en première instance ayant acquis la nationalité de l’État sur le territoire duquel était situé le lieu de son affectation, c’est à juste titre que l’administration avait estimé qu’il ne remplissait plus la première condition prévue par l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut pour bénéficier de l’indemnité de dépaysement.

12      Par ailleurs, le Tribunal de la fonction publique a jugé, au point 34 de l’arrêt attaqué que le CESE avait à juste titre refusé au requérant en première instance le bénéfice de l’indemnité de dépaysement sur le fondement de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de l’annexe VII du statut, dès lors que celui-ci était déjà présent depuis trois années sur le territoire belge avant son entrée en fonctions.

13      En troisième lieu, le Tribunal de la fonction publique a rejeté le moyen tiré de la violation de l’article 1er quinquies du statut, en considérant, au point 39 de l’arrêt attaqué, que le principe d’égalité de traitement n’avait pas été violé, dans la mesure où le requérant en première instance ne se trouvait pas dans une situation de droit comparable à celle d’un fonctionnaire, certes affecté comme lui depuis trente ans en Belgique, mais n’ayant pas la nationalité belge.

14      En quatrième lieu, le Tribunal de la fonction publique a considéré que le moyen tiré de la violation de l’article 85, premier alinéa, du statut et de la tardiveté de la récupération était fondé.

15      À cet égard, le Tribunal de la fonction publique a rappelé, au point 43 de l’arrêt attaqué, que l’article 85, premier alinéa, du statut prévoit que toute somme indûment perçue peut être récupérée par l’administration dans deux cas de figure, à savoir lorsque le bénéficiaire a eu connaissance de l’irrégularité du versement ou lorsque cette irrégularité était si évidente qu’il ne pouvait manquer d’en avoir connaissance.

16      Le Tribunal de la fonction publique a jugé, aux points 44 à 50 de l’arrêt attaqué :

« 44      En ce qui concerne la première de ces hypothèses, il appartient à l’administration de prouver que le bénéficiaire avait une connaissance effective du caractère irrégulier du paiement. À cet égard, force est de constater qu’en l’espèce le CESE n’a pas apporté une telle preuve. Il s’ensuit que la première des deux conditions alternatives visées à l’article 85, premier alinéa, n’est pas remplie.

45      En ce qui concerne la seconde hypothèse, il résulte de la jurisprudence que l’irrégularité en cause n’échappe pas à un fonctionnaire normalement diligent. Sur ce point, il convient de tenir compte, dans chaque espèce, de la capacité du fonctionnaire concerné à procéder aux vérifications nécessaires (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 17 janvier 1989, Stempels/Commission, 310/87, points 10 et 11).

46      Partant, il y a lieu de vérifier si, dans la présente espèce, l’irrégularité du versement de l’indemnité de dépaysement prévue par l’article 4, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut, pendant une période de presque un an à partir de l’acquisition par le requérant de la nationalité de son lieu d’affectation, était à ce point évidente que l’intéressé aurait dû en avoir connaissance en faisant preuve d’une diligence normale.

47      À cet égard, le Tribunal relève que l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, énonçant que l’indemnité de dépaysement est accordée au fonctionnaire ‘qui n’a pas et n’a jamais eu la nationalité de l’État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation’, est dénué de toute ambiguïté. En effet, il en résulte clairement que l’indemnité en cause ne bénéficie pas à un fonctionnaire possédant la nationalité de l’État du lieu d’affectation (arrêt du Tribunal de première instance du 24 février 1994, Stahlschmidt/Parlement, T‑38/93, point 21).

48      En revanche, le Tribunal estime que le requérant, fonctionnaire de grade AST 5, recruté comme cuisinier et n’exerçant donc pas des tâches juridiques ou administratives, pouvait légitimement penser que sa naturalisation ne portait pas à conséquence, dès lors que, par le passé, la circonstance qu’il ait résidé trois ans en Belgique avant d’entrer en fonctions n’avait pas été considérée par le CESE comme un obstacle à ce que lui soit reconnu le bénéfice de l’indemnité de dépaysement, et qu’il pouvait continuer à obtenir l’indemnité de dépaysement après sa naturalisation.

49      Certes, le requérant n’a pas immédiatement informé le CESE de son changement de nationalité, de sorte que celui-ci a continué à lui verser une indemnité de dépaysement à laquelle il n’avait plus droit, mais dès lors que le CESE n’a jamais effectué de communication à destination de son personnel afin d’attirer l’attention de celui-ci sur les conséquences d’une naturalisation, cette circonstance ne saurait être reprochée au requérant qui, légitimement, pouvait penser que sa naturalisation ne portait pas à conséquence.

50      Il résulte de ce qui précède que les conditions relatives à la répétition de l’indu n’étant pas remplies, il convient d’annuler la décision attaquée uniquement pour autant qu’elle ordonne la répétition des indemnités de dépaysement versées au requérant à partir du 1er juillet 2010. Il convient pour le surplus de rejeter les conclusions en annulation ainsi que, par voie de conséquence, les conclusions pécuniaires dès lors que celles-ci ont pour prémisse l’illégalité du refus du CESE de maintenir le versement de l’indemnité de dépaysement au bénéfice du requérant. »

17      S’agissant des dépens, le Tribunal de la fonction publique a rappelé que les conclusions du requérant en première instance n’avaient été que partiellement accueillies. Toutefois, il a observé que le CESE n’avait pas répondu à la réclamation du requérant en première instance, laissant ce dernier dans le doute quant au caractère bien fondé de celle-ci. Il a donc condamné le CESE à supporter ses propres dépens ainsi que la moitié de ceux exposés par le requérant en première instance.

 Sur le pourvoi

 Procédure et conclusions des parties

18      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 19 août 2013, le CESE a formé le présent pourvoi. Le 12 novembre 2013, le défendeur a déposé un mémoire en réponse. Le 15 janvier 2014, le CESE a déposé un mémoire en réplique. Le 12 mars 2014, le défendeur a déposé un mémoire en duplique.

19      Le CESE conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’arrêt attaqué, en ce qu’il annule la décision du CESE du 9 juin 2011 concernant la répétition de l’indemnité de dépaysement versée au défendeur à partir du 1er juillet 2010 et ordonne au CESE de supporter ses propres dépens et la moitié de ceux exposés par le défendeur ;

–        faire droit aux conclusions présentées par le CESE, à savoir rejeter le recours comme entièrement non fondé ;

–        condamner le défendeur aux dépens de la présente instance et de celle devant le Tribunal de la fonction publique.

20      Le défendeur conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le pourvoi comme irrecevable ou à tout le moins non fondé ;

–        condamner le CESE aux entiers dépens.

 En droit

21      Le CESE invoque cinq moyens au soutien de son pourvoi. Le premier moyen est tiré d’une erreur de droit en ce que le Tribunal de la fonction publique a considéré que les conditions relatives à la répétition de l’indu n’étaient pas remplies et que le défendeur n’avait pas à reverser l’indemnité de dépaysement qui lui avait été versée à partir du 1er juillet 2010. Le deuxième moyen est tiré d’une erreur de droit en ce que l’arrêt attaqué contribue à l’enrichissement sans cause du défendeur. Le troisième moyen est tiré d’une erreur manifeste d’appréciation en ce que le Tribunal de la fonction publique a considéré que le CESE n’avait jamais effectué de communication à destination de son personnel afin d’attirer l’attention de celui-ci sur les conséquences d’une naturalisation. Le quatrième moyen est tiré d’une erreur de droit en ce que le Tribunal de la fonction publique a enfreint les principes selon lesquels, d’une part, les dispositions financières sont d’application stricte et, d’autre part, les dispositions d’exception doivent être interprétées limitativement et restrictivement. Le cinquième moyen est tiré de la violation de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique, en ce que le CESE a été condamné à supporter ses propres dépens ainsi que la moitié de ceux du défendeur.

 Sur le premier moyen, tiré d’une erreur de droit en ce que le Tribunal de la fonction publique a considéré que les conditions relatives à la répétition de l’indu n’étaient pas remplies et que le défendeur n’avait pas à reverser l’indemnité de dépaysement qui lui avait été versée à partir du 1er juillet 2010

22      Le CESE invoque trois griefs, le premier, tiré du fait que le Tribunal de la fonction publique n’a pris en compte ni l’ancienneté ni l’évolution des fonctions et du grade du défendeur, le deuxième, tiré de ce que le Tribunal de la fonction publique a introduit un nouveau critère, à savoir celui du non-exercice de tâches juridiques ou administratives, et le troisième, tiré de la constatation de l’absence d’ambiguïté de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut sans en tirer de conséquence.

23      S’agissant du premier grief, le CESE prétend que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en ne prenant en compte ni l’ancienneté ni l’évolution des fonctions et du grade du défendeur au cours de la période s’écoulant de 1983 à 2010 qui, s’il avait été engagé en qualité de commis, et non de cuisinier ainsi qu’il ressort de l’arrêt attaqué, occupait les fonctions d’huissier chargé de la distribution du courrier lors de son départ à la retraite, le 31 juillet 2012, en sorte qu’il aurait évolué dans sa carrière. Or, selon la jurisprudence, l’ancienneté serait un critère plus pertinent que le grade et les fonctions occupées.

24      En ce que le CESE conteste les éléments factuels concernant la situation personnelle du défendeur, il convient de rappeler qu’il résulte de l’article 256, paragraphe 1, TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice que le pourvoi est limité aux seules questions de droit et doit être fondé sur des moyens tirés de l’incompétence du Tribunal de la fonction publique, d’irrégularités de procédure portant atteinte aux intérêts du requérant ou de la violation du droit de l’Union par le Tribunal de la fonction publique (voir, en ce sens, ordonnance du 14 juillet 2005, Gouvras/Commission, C‑420/04 P, Rec, EU:C:2005:482, point 48 et jurisprudence citée).

25      Il résulte en outre d’une jurisprudence constante que le Tribunal de la fonction publique est seul compétent, d’une part, pour constater les faits, sauf dans les cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et, d’autre part, pour apprécier ces faits. L’appréciation des faits constitue, sous réserve du cas de dénaturation des éléments de preuve produits devant le Tribunal de la fonction publique, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle du Tribunal (voir, en ce sens, ordonnance Gouvras/Commission, point 24 supra, EU:C:2005:482, point 49 et jurisprudence citée).

26      Or, alors que, dans sa requête devant le Tribunal de la fonction publique, le défendeur mentionnait sa qualité de cuisinier, le CESE n’a pas estimé utile de contredire ce dernier en invoquant le fait qu’il avait été engagé en qualité de commis de cuisine et qu’il était, en fin de carrière, huissier chargé de la distribution du courrier. Le CESE ne saurait donc, dans le cadre du présent pourvoi, se prévaloir de faits qu’il n’a pas invoqués devant le Tribunal alors qu’il aurait pu le faire. Il résulte ainsi de ce qui précède que le CESE ne saurait prétendre, dans le cadre du pourvoi, ainsi qu’il le fait dans la réplique, que l’invocation de ces éléments factuels serait rendue nécessaire afin de répondre à des arguments nouveaux qui figuraient uniquement dans l’arrêt attaqué.

27      Il s’ensuit que les nouveaux éléments factuels sur lesquels le CESE entend se fonder doivent être déclarés irrecevables.

28      S’agissant du grief selon lequel le Tribunal de la fonction publique aurait pris uniquement en considération le grade et les fonctions du défendeur lors de son recrutement en 1983 en tant que fonctionnaire stagiaire et non pas son ancienneté, il convient de rappeler la jurisprudence relative aux critères pris en considération dans le cadre de l’application de l’article 85, premier alinéa, du statut.

29      Il résulte d’une jurisprudence constante que la condition relative au caractère évident de l’irrégularité est remplie lorsqu’il s’agit d’une irrégularité qui n’échappe pas à un fonctionnaire diligent. À cet égard, il convient de tenir compte, dans chaque espèce, de la capacité du fonctionnaire concerné à procéder aux vérifications nécessaires (arrêt du 24 février 1994, Stahlschmidt/Parlement, T‑38/93, RecFP, EU:T:1994:23, point 19 ; voir, en ce sens, arrêts du 11 juillet 1979, Broe/Commission, 252/78, Rec, EU:C:1979:186, points 13 et 14 ; du 17 janvier 1989, Stempels/Commission, 310/87, Rec, EU:C:1989:9, points 10 et 11 ; ordonnance Gouvras/Commission, point 24 supra, EU:C:2005:482, point 59 ; arrêt du 28 février 1991, Kormeier/Commission, T‑124/89, Rec, EU:T:1991:12, points 17 et 18).

30      Par ailleurs, l’expression « si évidente » figurant dans l’article 85, premier alinéa, du statut ne signifie pas que le fonctionnaire bénéficiant de paiements indus est dispensé de tout effort de réflexion ou de contrôle. Au contraire, une restitution est due dès lors qu’il s’agit d’une erreur qui n’échapperait pas à un fonctionnaire normalement diligent qui est censé connaître les règles régissant son traitement (voir arrêt du 27 février 1996, Galtieri/Parlement, T‑235/94, RecFP, EU:T:1996:22, point 46 et jurisprudence citée).

31      Enfin, les éléments pris en considération par le juge de l’Union, à cet égard, concernent le niveau de responsabilité du fonctionnaire, son grade et son ancienneté, le degré de clarté des dispositions statutaires définissant les conditions d’octroi de l’indemnité ainsi que l’importance des modifications intervenues dans sa situation personnelle ou familiale, lorsque le versement de la somme litigieuse est lié à l’appréciation, par l’administration, d’une telle situation. Ainsi, un fonctionnaire de grade relativement élevé et comptant une grande ancienneté dans la fonction publique de l’Union devrait être capable de se rendre compte de l’irrégularité dont il bénéficie (voir arrêt du 5 novembre 2002, Ronsse/Commission, T‑205/01, RecFP, EU:T:2002:269, point 47 et jurisprudence citée ; arrêt du 2 mars 2004, Di Marzio/Commission, T‑14/03, RecFP, EU:T:2004:59, point 91).

32      Il ressort de cette jurisprudence que, contrairement à ce que prétend le CESE, la condition relative au caractère évident de l’irrégularité du versement, dont l’intéressé ne pouvait manquer d’avoir connaissance, ne saurait être examinée sous l’angle de la prééminence du critère de l’ancienneté au regard d’autres critères tels que le grade ou les fonctions occupées, mais doit l’être à la lumière d’un faisceau d’éléments permettant de déterminer le degré de connaissance que l’intéressé aurait dû avoir du caractère irrégulier du versement effectué.

33      Or, en l’occurrence, il ressort du point 48 de l’arrêt attaqué que le Tribunal de la fonction publique a pris en considération l’ensemble des éléments factuels qui ont déterminé la constatation à laquelle il a abouti selon laquelle les dispositions de l’article 85, premier alinéa, du statut étaient applicables.

34      Certes, il est exact que la notion d’ancienneté ne figure pas audit point.

35      Cependant, l’argumentation du CESE selon laquelle le critère de l’ancienneté n’aurait pas été pris en considération par le Tribunal de la fonction publique ne saurait être accueillie.

36      En effet, nonobstant les termes ambigus de la rédaction du point 48 de l’arrêt attaqué et l’absence de toute référence à la jurisprudence mentionnée au point 31 ci-dessus, il convient de relever que, en faisant référence à la notion de « passé », celui-ci a nécessairement fait allusion au fait qu’il prenait en considération l’ancienneté du défendeur.

37      Par ailleurs, s’agissant de l’évolution de la carrière du défendeur, le CESE ne saurait faire grief au Tribunal de la fonction publique d’avoir présumé qu’il était cuisinier depuis l’origine, dès lors qu’il n’a fourni aucune précision à cet égard, ne contestant d’ailleurs pas la qualité de cuisinier dont s’était prévalu le défendeur dans sa requête devant le Tribunal de la fonction publique.

38      Le CESE prétend, également, en se fondant sur certains précédents jurisprudentiels, que, en jugeant ainsi, le Tribunal de la fonction publique se serait écarté de la jurisprudence antérieure.

39      Une telle argumentation ne saurait être accueillie.

40      À cet égard, il convient de constater que, contrairement à ce que prétend le CESE, ainsi qu’il ressort notamment du point 92 de l’arrêt Di Marzio/Commission, point 31 supra (EU:T:2004:59), les faits dans l’affaire à l’origine de cet arrêt se distinguent foncièrement de ceux de la présente affaire dans la mesure où Mme Di Marzio, qui connaissait son lieu d’affectation, à savoir Bruxelles, et qui, nonobstant son installation en France, n’avait obtenu aucune autorisation préalable de résider dans ce dernier État, aurait nécessairement dû s’interroger sur le maintien, notamment, de son indemnité de dépaysement. Il s’ensuivait, selon le Tribunal, que Mme Di Marzio aurait dû interroger l’administration afin qu’elle effectue les vérifications nécessaires. Le Tribunal a encore ajouté que cette démarche s’imposait d’autant plus que la requérante avait déjà été affectée à Bruxelles et était donc clairement informée des conséquences de cette affectation sur son droit à ladite indemnité. Certes, si l’ancienneté a été reconnue comme étant un critère plus pertinent que le grade et les fonctions, le Tribunal a toutefois précisé, au point 95 dudit arrêt, que cette plus grande pertinence s’expliquait en l’occurrence par les « circonstances de l’espèce ».

41      De la même manière, les faits de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 10 février 1994, White/Commission (T‑107/92, RecFP, EU:T:1994:17), qui concernait l’allocation de foyer sont différents, dans la mesure où le Tribunal a constaté, aux points 24, 38 et 39 dudit arrêt, que l’importance du dépassement des sommes perçues ne pouvait pas échapper à un fonctionnaire normalement diligent, ce d’autant plus qu’il n’avait pas contesté avoir eu connaissance des informations publiées par la Commission, de façon régulière, dans le bulletin d’informations administratives. Par ailleurs, le Tribunal a constaté que l’octroi du bénéfice de l’allocation de foyer accordée au requérant en raison de la faiblesse des revenus professionnels de son conjoint aurait exigé qu’il informe, sans délai et par écrit, les services compétents de toute augmentation de la rémunération de son conjoint (points 3 et 48 dudit arrêt).

42      Enfin, il ressort de l’arrêt du 28 octobre 1999, Cotrim/Cedefop (T‑180/98, RecFP, EU:T:1999:274), que le Tribunal a constaté que le remboursement de la quote-part de l’indemnité d’installation perçue à tort par la requérante dans l’affaire en cause se justifiait en raison d’une simple lecture de la disposition pertinente que cette dernière était censée connaître (point 33 dudit arrêt) et du fait que ladite requérante avait été informée, avant la résiliation de son contrat, qu’il lui serait demandé la restitution de l’indemnité d’installation si elle venait à quitter l’entité de l’Union qui l’employait avant l’échéance de son contrat.

43      Il résulte de l’examen de cette jurisprudence qu’il ne saurait être déduit l’existence d’une prééminence du critère de l’ancienneté sur les autres critères. Il en ressort, au contraire, l’exigence d’une prise en considération de l’ensemble des éléments, les circonstances de chacune des espèces pouvant justifier une prise en considération plus importante de certains critères par rapport à d’autres.

44      Il s’ensuit que le premier grief du CESE doit être rejeté.

45      Par un deuxième grief, le CESE reproche au Tribunal de la fonction publique d’avoir introduit un nouveau critère, à savoir celui du non-exercice de tâches juridiques ou administratives.

46      À cet égard, il suffit de constater que la nature des tâches exercées par le bénéficiaire d’une indemnité de dépaysement doit être prise en considération aux fins de déterminer si l’irrégularité dont a bénéficié l’intéressé pouvait lui échapper.

47      En effet, il y a lieu de rappeler que la Cour a jugé qu’il convenait de tenir compte, dans chaque espèce, de la capacité du fonctionnaire à procéder aux vérifications nécessaires (voir, en ce sens, arrêt Stempels/Commission, point 29 supra, EU:C:1989:9, points 10 et 11).

48      Ainsi, dans l’arrêt Broe/Commission, point 29 supra (EU:C:1979:186, point 14), la Cour a considéré que l’on pouvait attendre d’un fonctionnaire du rang de celui considéré qui, en outre, remplissait ses fonctions à la « division ‘Financement et contrôle’ du FEOGA », ce qui impliquait dans son chef des compétences comptables qui lui rendaient d’autant plus aisée la vérification, qu’il ait connaissance de l’irrégularité. De même, dans l’arrêt du 12 juillet 1990, Scheiber/Conseil (T‑111/89, Rec, EU:T:1990:46, point 46), le Tribunal a jugé qu’aucun élément du dossier ne permettait d’établir que le requérant possédait, en raison de sa formation ou de ses activités, des connaissances particulières quant au paiement et à la liquidation des pensions qui lui auraient permis de constater que l’irrégularité commise était si évidente qu’il ne pouvait pas manquer d’avoir connaissance de l’erreur commise. Par ailleurs, dans l’arrêt Stahlschmidt/Parlement, point 29 supra (EU:T:1994:23, point 21), le Tribunal a pris en considération le fait que le requérant était un fonctionnaire classé à un grade élevé. Enfin, dans l’arrêt du 1er février 1996, Chabert/Commission (T‑122/95, RecFP, EU:T:1996:12, point 41), le Tribunal a pris en considération l’ancienneté, la position relativement élevée du fonctionnaire ainsi que le fait que ce dernier avait été affecté presque exclusivement dans les services administratifs chargés de la gestion du personnel de l’institution.

49      Ainsi, en prenant en considération le fait que le défendeur n’exerçait pas de tâches juridiques ou administratives, le Tribunal de la fonction publique a opéré une constatation factuelle qui, en l’espèce, en liaison avec les autres éléments factuels qui avaient été mis à sa disposition, lui a permis de considérer que l’irrégularité commise n’était pas si évidente que le défendeur ne pouvait pas manquer d’en avoir connaissance. En revanche, il ne ressort pas de l’arrêt attaqué, ainsi que le prétend le CESE, que le Tribunal de la fonction publique a entendu exclure les fonctionnaires n’exerçant pas de tâches juridiques ou administratives de toute possibilité de répétition de l’indu à leur égard, ce qui serait contraire à la jurisprudence mentionnée aux points 29 à 31 ci-dessus.

50      Il s’ensuit que le deuxième grief du CESE doit être rejeté.

51      Par un troisième grief, le CESE considère que le Tribunal de la fonction publique a commis une erreur de droit en considérant que l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut était « dénué de toute ambiguïté » (point 47 de l’arrêt attaqué), sans en tirer de conclusion en ce sens que le défendeur ne pouvait pas légitimement penser que sa naturalisation ne porterait pas à conséquence.

52      Il est certes exact que l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut est une disposition dénuée de toute ambiguïté.

53      Toutefois, la spécificité factuelle de l’affaire soumise au Tribunal de la fonction publique réside dans le fait que le fonctionnaire qui avait, lors de son engagement, la nationalité d’un pays tiers a, malgré sa résidence en Belgique dans les trois années précédant son engagement, bénéficié de l’indemnité de dépaysement au titre de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut et, du fait de l’acquisition de la nationalité de son État d’affectation, s’est vu refuser, au titre de l’article 4, paragraphe 1, sous b), de l’annexe VII du statut, le bénéfice de ladite indemnité au motif que, dans les dix années précédant son engagement, il avait habité en Belgique.

54      Alors que, ainsi que l’a relevé le Tribunal de la fonction publique au point 35 de l’arrêt attaqué, pour les fonctionnaires qui ne sont pas ressortissants de leur pays d’affectation, la perte ou le refus du bénéfice de l’indemnité de dépaysement n’intervient, selon une jurisprudence constante, que dans le cas où la résidence habituelle de l’intéressé dans le pays de son affectation future a duré pendant la totalité de la période quinquennale de référence, en revanche, pour les fonctionnaires possédant la nationalité du pays d’affectation, la circonstance d’y avoir maintenu ou établi leur résidence habituelle, ne fût-ce que pour une durée très brève au cours de la période décennale de référence, suffit pour entraîner la perte ou le refus du bénéfice de cette indemnité.

55      Bien que, ainsi que le Tribunal de la fonction publique l’a jugé au point 47 de l’arrêt attaqué, l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut soit dépourvu d’ambigüité, l’examen de la situation du défendeur nécessitait également l’interprétation de l’article 4, paragraphe 1, sous b) de ladite annexe.

56      Ainsi, dans la mesure où, même s’agissant d’un fonctionnaire normalement diligent, la période de trois ans de résidence en Belgique pendant la période de cinq ans précédant la date de son entrée en service ne l’avait pas empêché d’obtenir l’indemnité de dépaysement, cela pouvait légitimement lui faire présumer que cette même période ne serait pas un obstacle à l’octroi de cette même indemnité dès lors qu’il obtiendrait la nationalité de son État d’affectation.

57      Il résulte de ce qui précède que c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal de la fonction publique a jugé que, nonobstant l’absence d’ambigüité de l’article 4, paragraphe 1, sous a), de l’annexe VII du statut, l’irrégularité commise par le CESE n’était pas si évidente que le défendeur ne pouvait pas manquer d’en avoir connaissance.

58      Il convient, dès lors, de rejeter le troisième grief ainsi que le premier moyen.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une erreur de droit en ce que l’arrêt attaqué contribue à l’enrichissement sans cause du défendeur

59      Le CESE fait grief au Tribunal de la fonction publique, d’une part, d’avoir jugé que la décision de retrait de l’indemnité de dépaysement dont bénéficiait le défendeur était légale et, d’autre part, d’avoir annulé la décision attaquée en ce qu’elle ordonnait la répétition de ladite indemnité. Ce faisant, le Tribunal de la fonction publique aurait contribué à l’enrichissement sans cause du défendeur, alors même que ce dernier, en ayant tardé à signaler son comportement à l’administration quant au changement intervenu dans sa situation familiale ne saurait invoquer sa bonne foi en vue de restituer une allocation qu’il a indûment continué à percevoir.

60      À cet égard, il convient de rappeler que, selon les principes communs aux droits des États membres, une personne ayant subi une perte qui améliore le patrimoine d’une autre personne sans qu’il y ait un quelconque fondement juridique à cet enrichissement a, en règle générale, droit à une restitution, jusqu’à concurrence de cette perte, de la part de la personne enrichie. Ainsi, pour que cette action soit accueillie, il est essentiel que l’enrichissement soit dépourvu de toute base légale valable [arrêt du 16 décembre 2008, Masdar (UK)/Commission, C‑47/07 P, Rec, EU:C:2008:726, points 44 et 46].

61      Or, il suffit, à cet égard, de constater que l’enrichissement trouve, en l’espèce, précisément son fondement dans l’article 85, premier alinéa, du statut, en sorte que c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal de la fonction publique, ayant pu considérer que l’irrégularité du versement n’était pas évidente au point que le défendeur ne pouvait manquer d’en avoir connaissance, a, par conséquent, jugé que cette situation relevait de l’article 85, premier alinéa, du statut et qu’il n’y avait donc pas lieu à répétition de l’indemnité versée par erreur par le CESE.

62      Il s’ensuit que le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation en ce que le Tribunal de la fonction publique a considéré que le CESE n’avait jamais effectué de communication à destination de son personnel afin d’attirer l’attention de celui-ci sur les conséquences d’une naturalisation

63      Le CESE fait grief au Tribunal de la fonction publique d’avoir motivé l’annulation de la décision du CESE ordonnant la répétition de l’indemnité de dépaysement versée à partir du 1er juillet 2010 en se fondant sur le fait qu’aucune communication à destination de son personnel n’avait été effectuée sur les conséquences d’une naturalisation. Outre qu’aucune base juridique n’existerait quant à l’obligation d’une telle communication, le CESE considère ainsi que le Tribunal de la fonction publique a ajouté une condition supplémentaire qui n’est prévue ni par le statut ni par la jurisprudence quant au recouvrement des sommes indues.

64      À cet égard, il ne saurait être considéré que le Tribunal de la fonction publique a ajouté une condition supplémentaire afin de pouvoir s’opposer à la répétition des sommes indues, mais se contente de constater que, eu égard aux circonstances de l’espèce, l’absence de communication à destination du personnel a pour conséquence qu’il ne peut pas être reproché au défendeur de ne pas avoir immédiatement informé le CESE de son changement de nationalité.

65      Par ailleurs, dans l’arrêt White/Commission, point 41 supra (EU:T:1994:17, point 39), le Tribunal avait déjà pris en considération le fait que les informations publiées par la Commission, de façon régulière, dans le bulletin d’informations administratives, auraient dû permettre au requérant dans cette affaire de prendre connaissance de l’irrégularité qu’il avait commise.

66      Il s’ensuit que, en prenant en considération l’absence de communication à destination du personnel quant à la nécessité de transmettre immédiatement tout changement de nationalité, le Tribunal de la fonction publique n’a commis aucune erreur de droit, en sorte que le troisième moyen doit être rejeté.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une erreur de droit en ce que le Tribunal de la fonction publique a enfreint les principes selon lesquels, d’une part, les dispositions financières sont d’application stricte et, d’autre part, les dispositions d’exception doivent être interprétées limitativement et restrictivement

67      Selon le requérant, en étendant les possibilités de non-répétition de l’indu, en raison d’une interprétation des conditions y afférentes en rupture avec la jurisprudence établie en la matière, le Tribunal de la fonction publique a violé, d’une part, le principe selon lequel les dispositions financières sont d’application stricte et, d’autre part, le principe selon lequel les dispositions d’exception doivent être interprétées limitativement et restrictivement.

68      À cet égard, il suffit de constater que l’examen des trois premiers moyens n’a pas permis de constater, contrairement à ce que fait valoir le CESE, que le Tribunal de la fonction publique a procédé à une interprétation en rupture avec la jurisprudence établie.

69      Dès lors que c’est sans commettre d’erreur de droit que le Tribunal de la fonction publique a constaté que les conditions mentionnées à l’article 85, premier alinéa, du statut étaient réunies, c’est à bon droit qu’il a garanti l’effet utile de cette disposition en faisant application de cette dernière au cas qui lui était soumis.

70      Il s’ensuit que le quatrième moyen doit être rejeté.

 Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal de la fonction publique

71      Le CESE prétend, en substance, que le Tribunal de la fonction publique a violé l’article 87, paragraphe 2, de son règlement de procédure en le condamnant à supporter ses propres dépens ainsi que la moitié de ceux du défendeur, alors même que les conclusions de ce dernier n’ont été accueillies qu’en ce qui concerne la violation de l’article 85, premier alinéa, du statut.

72      À cet égard, il convient de rappeler qu’il ressort de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe I du statut de la Cour qu’un pourvoi ne peut porter uniquement sur la charge et le montant des dépens. Il en résulte que, dans l’hypothèse où tous les autres moyens d’un pourvoi ont été rejetés, les conclusions concernant la prétendue irrégularité de la décision du Tribunal de la fonction publique sur les dépens doivent être rejetées comme irrecevables (ordonnance du 29 octobre 2009, Nijs/Cour des comptes, T‑375/08 P, EU:T:2009:423, point 71 ; voir également, par analogie, arrêt du 26 mai 2005, Tralli/BCE, C‑301/02 P, Rec, EU:C:2005:306, point 88 et jurisprudence citée).

73      Dans la mesure où tous les autres moyens du pourvoi formé par le CESE ont été rejetés, le dernier moyen, avancé au soutien du chef de conclusions dirigé contre la décision du Tribunal de la fonction publique relative à la charge des dépens, doit, par conséquent, être déclaré irrecevable.

74      Il y a lieu, dès lors, de rejeter le cinquième moyen ainsi que le pourvoi en sa totalité.

 Sur les dépens

75      Conformément à l’article 148, premier alinéa, du règlement de procédure du Tribunal, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, le Tribunal statue sur les dépens.

76      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 144 de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

77      Le CESE ayant succombé en ses conclusions et le défendeur ayant conclu en ce sens, le CESE supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par le défendeur dans le cadre de la présente instance.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (chambre des pourvois)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Le Comité économique et social européen (CESE) supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par M. Mohammed Achab dans le cadre de la présente instance.

Jaeger

Martins Ribeiro

Van der Woude

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 février 2015.

Signatures


* Langue de procédure : le français.