Language of document : ECLI:EU:T:2012:362

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

11 juillet 2012 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire figurative natural beauty – Motif absolu de refus – Caractère descriptif – Article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑559/10,

Laboratoire Garnier et Cie, établi à Paris (France), représenté initialement par Mes R. Dissmann et A. Steegmann, puis par Me Dissmann, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme V. Melgar, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 23 septembre 2010 (affaire R 971/2010‑1), concernant l’enregistrement du signe figuratif natural beauty comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. L. Truchot, président, Mme M. E. Martins Ribeiro et M. A. Popescu (rapporteur), juges,

greffier : Mme J. Weychert, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 7 décembre 2010,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 21 janvier 2011,

à la suite de l’audience du 16 avril 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 17 avril 2009, la requérante, le Laboratoire Garnier et Cie, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 3 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Cosmétiques ; produits de soins du corps et de beauté ».

4        Par décision du 30 mars 2010, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement sur le fondement des dispositions combinées de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), et de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, dès lors que ladite marque, considérée globalement, était descriptive et dépourvue de caractère distinctif. Il a relevé que les produits étaient des produits cosmétiques destinés à des consommateurs moyens et que, le signe demandé étant composé de mots anglais, le public pertinent était anglophone. Il a considéré que la marque demandée présentait un caractère descriptif dans la mesure où, notamment, elle informait immédiatement le consommateur que les produits en cause étaient des cosmétiques ayant un effet positif, à savoir la capacité de préserver sa beauté naturelle. L’examinateur a également estimé que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif. Étant donné la signification clairement descriptive de la marque demandée, l’impact de celle-ci sur le public concerné serait essentiellement descriptif, éclipsant ainsi toute impression selon laquelle la marque demandée pourrait indiquer l’origine commerciale des produits. En outre, la stylisation de la marque demandée étant négligeable, elle ne doterait pas ladite marque, prise dans son ensemble, d’un caractère distinctif. Enfin, le fait que le signe demandé ou d’autres marques descriptives seraient effectivement utilisés pour des cosmétiques serait sans conséquence et ne rendrait pas le signe demandé distinctif.

5        Le 28 mai 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de l’examinateur.

6        Par décision du 23 septembre 2010 (ci-après la « décision attaquée »), notifiée le 7 octobre 2010, la première chambre de recours a rejeté le recours. Elle a considéré, en substance, d’abord, que la marque demandée était composée de deux mots ayant une signification claire en anglais et que l’expression « natural beauty » pouvait servir à décrire le fait que les produits en cause aidaient le consommateur à préserver sa beauté naturelle, de sorte que ladite expression communiquait des informations évidentes et directes sur la qualité des produits. En outre, la chambre de recours a estimé que la stylisation du signe demandé était minimale et ne pouvait modifier la conclusion selon laquelle ce signe était descriptif. Elle a conclu à une relation suffisamment directe et spécifique entre la marque demandée et les produits en cause pour que le motif de refus visé à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 soit applicable. Par ailleurs, la chambre de recours a considéré que, le message véhiculé par le signe demandé étant si évident et la stylisation des termes descriptifs le composant étant négligeable, ledit signe ne serait pas perçu, par le public pertinent, comme une marque distinctive pour les produits en cause. De surcroît, eu égard aux produits visés, la chambre de recours a estimé que le signe demandé serait utilisé tant à l’oral qu’à l’écrit et que l’absence de caractère distinctif était encore plus évidente et frappante sur le plan phonétique que sur le plan visuel. Elle a conclu que la marque demandée était également dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens de la procédure, en ce compris les dépens engagés dans le cadre du présent recours.

8        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

9        Au soutien de sa demande en annulation de la décision attaquée, la requérante invoque deux moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 et, le second, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

10      Il convient d’examiner le premier moyen.

11      La requérante prétend, en substance, que la marque demandée n’est pas descriptive dans la mesure où elle ne serait pas composée exclusivement d’indications descriptives, mais comporterait également une certaine stylisation.

12      L’OHMI conteste le bien-fondé du raisonnement de la requérante.

13      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation de services, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ». En outre, l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 énonce que le « paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».

14      Selon une jurisprudence constante, l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 empêche que les signes ou indications visés par lui soient réservés à une seule entreprise en raison de leur enregistrement en tant que marque. Cette disposition poursuit ainsi un but d’intérêt général, lequel exige que de tels signes ou indications puissent être librement utilisés par tous [arrêt de la Cour du 23 octobre 2003, OHMI/Wrigley, C‑191/01 P, Rec. p. I‑12447, point 31 ; arrêts du Tribunal du 27 février 2002, Ellos/OHMI (ELLOS), T‑219/00, Rec. p. II‑753, point 27 ; du 27 novembre 2003, Quick/OHMI (Quick), T‑348/02, Rec. p. II‑5071, point 27, et du 9 juin 2010, Hoelzer/OHMI (SAFELOAD), T‑315/09, non publié au Recueil, point 13].

15      En outre, des signes ou des indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner des caractéristiques du produit ou du service pour lequel l’enregistrement est demandé sont, en vertu de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, réputés incapables d’exercer la fonction essentielle de la marque, à savoir celle d’identifier l’origine commerciale du produit ou du service, afin de permettre ainsi au consommateur qui acquiert le produit ou le service que la marque désigne de faire, lors d’une acquisition ultérieure, le même choix, si l’expérience s’avère positive, ou de faire un autre choix, si elle s’avère négative [voir arrêt du Tribunal du 12 juin 2007, MacLean-Fogg/OHMI (LOKTHREAD), T‑339/05, non publié au Recueil, point 28, et la jurisprudence citée ; voir, en ce sens, arrêt OHMI/Wrigley, précité, point 30].

16      Les signes et les indications visés par l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009 sont ceux qui peuvent servir, dans un usage normal du point de vue du public pertinent, pour désigner soit directement, soit par la mention d’une de ses caractéristiques essentielles, le produit ou le service pour lequel l’enregistrement est demandé [voir arrêts du Tribunal du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec. p. II‑2383, point 24, et la jurisprudence citée, et SAFELOAD, précité, point 15].

17      Il en résulte que, pour qu’un signe tombe sous le coup de l’interdiction énoncée par cette disposition, il faut qu’il présente avec les produits ou services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description des produits et des services en cause ou d’une de leurs caractéristiques (voir arrêts LOKTHREAD, précité, point 29, et SAFELOAD, précité, point 16, et la jurisprudence citée).

18      Il importe également de rappeler que l’appréciation du caractère descriptif d’un signe ne peut être opérée que, d’une part, par rapport à la compréhension qu’en a le public concerné et, d’autre part, par rapport aux produits ou aux services concernés (voir arrêt SAFELOAD, précité, point 17, et la jurisprudence citée).

19      En l’espèce, en ce qui concerne le public concerné, la chambre de recours a considéré, au point 11 de la décision attaquée, que l’examen du caractère descriptif devait être mené en prenant en considération le consommateur moyen de produits de consommation courante. Il convient de confirmer cette appréciation, laquelle n’est pas remise en cause par les parties.

20      Par ailleurs, la requérante ne conteste pas que les éléments verbaux de la marque demandée sont constitués de deux mots de la langue anglaise, « natural » et « beauty », ainsi que l’a relevé la chambre de recours au point 12 de la décision attaquée. Par conséquent, le public pertinent par rapport auquel il convient d’apprécier le motif absolu de refus est le consommateur moyen anglophone, comme la chambre de recours l’a estimé, à bon droit, au point 11 de la décision attaquée, sans être contredite par la requérante.

21      Il convient, dès lors, d’examiner si, comme l’a considéré la chambre de recours, la marque demandée présente, du point de vue du public pertinent, un rapport suffisamment direct et concret avec les produits pour lesquels l’enregistrement est demandé.

22      En l’espèce, il n’est pas contesté que les mots « natural » et « beauty » revêtent une signification claire en anglais.

23      En outre, au point 13 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré à bon droit que, eu égard aux produits visés, le public concerné percevra l’expression « natural beauty » comme une expression significative, pouvant décrire le fait que les produits visés aident le consommateur à préserver sa beauté naturelle, et communiquant, dès lors, des informations évidentes et directes sur la qualité des produits. Cette appréciation n’est pas remise en cause par la requérante, laquelle a confirmé, en outre, lors de l’audience, ne pas invoquer le fait que l’expression « natural beauty » constituerait une composition syntaxique inhabituelle en anglais.

24      En revanche, selon la requérante, c’est à tort que la chambre de recours a tenu pour négligeable l’élément figuratif. Elle fait valoir que la stylisation de la marque demandée distingue celle-ci des caractéristiques graphiques communes et que, partant, la marque demandée n’est pas composée exclusivement d’indications descriptives.

25      Or, force est de constater que, ainsi que la chambre de recours l’a estimé, à juste titre, au point 16 de la décision attaquée, la stylisation de la marque demandée se limite à l’ajout de quelques caractéristiques graphiques communes. À cet égard, la chambre de recours a considéré que l’utilisation d’une police de caractères ordinaire était banale, tandis que le fait que les deux mots étaient disposés l’un au-dessus l’autre et que la lettre « b » du terme « beauty » était légèrement plus grande que le reste de ce mot ne sauraient détourner l’attention du consommateur du message clair véhiculé par les termes descriptifs.

26      Il convient de relever que, en effet, les éléments graphiques de la marque demandée consistent, d’une part, en la présentation de l’élément « natural » placé au-dessus de l’élément « beauty » et, d’autre part, en l’utilisation d’une certaine police de caractères, la taille utilisée pour la lettre « b » étant différente de celle utilisée pour les autres lettres. Toutefois, il y a lieu de constater que ces éléments graphiques se limitent à la présentation des deux éléments verbaux et procèdent de méthodes graphiques courantes. La police de caractères appliquée est banale et, contrairement aux allégations de la requérante, la présentation, l’un au-dessus de l’autre, des deux éléments verbaux ne saurait être considérée comme étant inhabituelle. Par ailleurs, le fait que la taille de la lettre « b » est plus grande que celles des autres lettres du mot « beauty » est à peine perceptible, de même que la disposition du mot « natural » destinée à intégrer celui-ci, en quelque sorte, à l’élément « beauty ». Ces éléments graphiques ne sauraient donner l’impression d’un logo, comme le prétend à tort la requérante, et ces seuls faits ne sauraient conférer au signe demandé un caractère distinctif.

27      Eu égard à la sobriété des moyens graphiques utilisés, il y a lieu de considérer que, comme la chambre de recours l’a conclu, au point 16 de la décision attaquée, ces éléments graphiques banals ne sauraient détourner l’attention du public concerné du message descriptif, en l’espèce, résultant de l’expression « natural beauty ».

28      Il résulte de ce qui précède que c’est à bon droit que la chambre de recours a conclu au caractère descriptif de la marque demandée au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009.

29      Il s’ensuit qu’il y a lieu de rejeter le premier moyen comme étant non fondé.

30      S’agissant du second moyen, il convient de rappeler qu’il suffit que l’un des motifs absolus de refus qui sont énumérés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009 s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire [arrêt de la Cour du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec. p. I‑7561, point 29, et arrêt du Tribunal du 8 juillet 2008, Lancôme/OHMI – CMS Hasche Sigle (COLOR EDITION), T‑160/07, Rec. p. II‑1733, point 51]. Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu d’examiner le second moyen soulevé par la requérante, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

31      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le présent recours n’est pas fondé et doit être rejeté.

 Sur les dépens

32      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Le Laboratoire Garnier et Cie est condamné aux dépens.

Truchot

Martins Ribeiro

Popescu

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 juillet 2012.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.