Language of document : ECLI:EU:T:2014:89

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

27 février 2014 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale TEEN VOGUE – Marque nationale verbale antérieure VOGUE – Recevabilité – Qualification des conclusions – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Identité ou similitude des produits – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 – Refus partiel d’enregistrement »

Dans l’affaire T‑509/12,

Advance Magazine Publishers, Inc., établie à New York, New York (États-Unis), représentée par M. C. Aikens, barrister,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme V. Melgar, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Nanso Group Oy, établie à Nokia (Finlande), représentée par Me M. Tuominen, avocat,

ayant pour objet un recours contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 17 septembre 2012 (affaire R 147/2011‑4), relative à une procédure d’opposition entre le Nanso Group Oy et Advance Magazine Publishers, Inc.,

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. D. Gratsias, président, Mme M. Kancheva et M. C. Wetter (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 16 novembre 2012,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 28 février 2013,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 15 février 2013,

vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 14 mai 2013,

vu la modification de la composition des chambres du Tribunal,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 31 octobre 2003, la requérante, Advance Magazine Publishers, Inc., a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) no 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal TEEN VOGUE.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment de la classe 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Vêtements ; chaussures ; chapellerie ; pièces et parties constitutives pour tous les produits précités ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires no 52/2006, du 25 décembre 2006.

5        Le 23 mars 2007, l’intervenante, le Nanso Group Oy, a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement no 40/94 (devenu article 41 du règlement no 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur les marques antérieures suivantes :

–        la marque suédoise verbale VOGUE, enregistrée le 24 janvier 1969 sous le numéro 126124, désignant les produits relevant de la classe 25 et correspondant à la description suivante : « Vêtements, y compris bottes, chaussures et pantoufles » ;

–        la marque suédoise figurative enregistrée le 27 août 1934 sous le numéro 43934, pour des produits relevant de la classe 25, reproduite ci-après :

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–        la demande de marque finlandaise verbale VOGUE, déposée le 5 octobre 1998 sous la référence T 199803628, désignant des produits de la classe 25 ;

–        la dénomination commerciale auxiliaire déposée VO Gue.

7        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009].

8        Le 7 avril 2008, la requérante a présenté, au cours de la procédure d’opposition, une requête visant à ce que l’intervenante apportât la preuve de l’usage sérieux des marques antérieures invoquées à l’appui de l’opposition, au sens de l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement no 40/94 (devenu article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement no 207/2009), à la suite de quoi la division d’opposition l’a invitée à produire ladite preuve.

9        Le 9 octobre 2008, l’intervenante a fourni divers documents, afin de démontrer que les marques antérieures avaient fait l’objet d’un usage sérieux.

10      Le 16 novembre 2010, la division d’opposition a fait droit à l’opposition en refusant l’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits concernés.

11      Le 14 janvier 2011, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement no 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

12      Par décision du 17 septembre 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours et condamné la requérante à payer à l’intervenante la somme de 1 200 euros au titre des frais exposés dans le cadre des procédures d’opposition et de recours. Elle a considéré que c’était à juste titre que la division d’opposition avait accueilli l’opposition, un risque de confusion ne pouvant être exclu du fait de l’identité ou de la similitude des produits couverts par la marque demandée, à savoir les vêtements, les chaussures et la chapellerie, et de ceux protégés par la marque suédoise verbale antérieure VOGUE, marque dont elle a estimé, par ailleurs, que l’usage avait été suffisamment prouvé, mais seulement pour la bonneterie, ainsi que de la similitude moyenne des signes en conflit.

 Conclusions des parties

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter l’opposition dans la mesure où elle porte sur la chapellerie ainsi que les souliers, bottes, sandales, chemises, chemisiers, robes, jupes, vestes, pull-overs, costumes, gilets, pantalons, shorts, maillots de bain, manteaux, cravates, châles, foulards, bretelles et ceintures ;

–        condamner l’intervenante aux dépens.

14      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité du recours

15      Il convient de préciser que le recours de la requérante, tendant au rejet de l’opposition pour certains produits déterminés, vise, en réalité, à ce que le Tribunal prenne la décision que, selon la requérante, la chambre de recours aurait dû prendre lorsqu’elle a été saisie. En effet, il ressort de l’article 64, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement no 207/2009 que la chambre de recours peut, après avoir annulé la décision attaquée devant elle, exercer les compétences de l’instance de l’OHMI ayant pris cette décision, en l’occurrence statuer sur l’opposition et la rejeter. Par conséquent, cette mesure figure parmi celles pouvant être prises par le Tribunal au titre de son pouvoir de réformation, consacré par l’article 65, paragraphe 3, du règlement no 207/2009 [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 8 juillet 2004, MFE Marienfelde/OHMI − Vétoquinol (HIPOVITON), T‑334/01, Rec. p. II‑2787, point 19 ; du 12 septembre 2007, Koipe/OHMI – Aceites del Sur (La Española), T‑363/04, Rec. p. II‑3355, points 29 et 30, et du 6 septembre 2013, Eurocool Logistik/OHMI – Lenger (EUROCOOL), T‑599/10, point 25, et la jurisprudence citée].

16      Toutefois, ledit recours ne comportant, hormis la demande de condamnation de l’intervenante aux dépens, qu’un chef de conclusions, il convient de juger que, par ce dernier, la requérante demande nécessairement, non seulement la réformation de la décision attaquée, mais aussi l’annulation de cette dernière [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 7 novembre 2013, Budziewska/OHMI – Puma (Félin bondissant), T‑666/11, point 18, et la jurisprudence citée], ce qui, au demeurant, se déduit de la présentation du moyen unique de la requérante, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

17      Le recours ainsi défini est donc recevable.

 Considérations liminaires

18      Il importe de relever que, ainsi que cela résulte de la décision attaquée, la chambre de recours, à l’instar de la division d’opposition, a fondé le rejet de la demande d’enregistrement de la marque demandée pour les vêtements, les chaussures et la chapellerie, relevant de la classe 25, sur l’existence d’un risque de confusion entre la marque demandée et la marque suédois verbale antérieure VOGUE, les autres marques antérieures n’ayant pas été retenues à l’appui dudit rejet.

19      Il s’ensuit que c’est au vu de la seule marque suédoise verbale antérieure VOGUE qu’il y a lieu d’apprécier le présent recours.

 Sur la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009

20      Dans le cadre de son moyen unique, la requérante soutient que le risque de confusion entre la marque demandée et la marque suédoise verbale antérieure VOGUE ne s’étend pas à d’autres produits que la bonneterie. Elle considère que la chambre de recours a commis une erreur dans sa comparaison de l’impression d’ensemble produite, d’une part, par la marque demandée et, d’autre part, par la marque suédoise verbale antérieure VOGUE, en n’accordant pas une considération suffisante à l’élément « teen », alors qu’il s’agit de l’élément verbal qui figure en première position dans la marque demandée et que la partie initiale d’une marque revêt une importance particulière dans l’impression globale produite par cette marque. Selon la requérante, cet élément apporte une importante différence visuelle par rapport à la marque suédoise verbale antérieure VOGUE et, d’un point de vue phonétique, s’en distingue par une syllabe supplémentaire. Il ne pourrait être soutenu que l’élément « vogue » domine, à lui seul, la marque demandée, d’autant plus que, aucune des marques en conflit n’ayant de signification en suédois, elles ne peuvent être considérées comme similaires sur le plan conceptuel. La marque suédoise verbale antérieure VOGUE étant, aux dires mêmes de la chambre de recours, dotée d’un pouvoir distinctif normal, aucun risque supplémentaire de confusion ne résulterait d’un caractère distinctif supérieur à la normale de l’élément « vogue ». Quant à la comparaison des produits en cause, la chambre de recours n’aurait pas tenu compte de tous les facteurs pertinents caractérisant leurs rapports mutuels. Elle soutient que les articles de bonneterie sont différents des articles de chapellerie en raison de leurs fonctions distinctes ainsi que des textiles et matériaux différents qui sont employés pour leur composition. Les points de vente ou rayons des grands magasins dans lesquels ils sont commercialisés seraient également différents. Ces produits ne seraient pas non plus complémentaires, les uns n’étant pas importants ou nécessaires pour l’utilisation des autres, ni en concurrence, les uns ne pouvant remplacer les autres. Concernant la comparaison entre les articles de bonneterie et les chaussures, la requérante concède que ces articles sont en partie identiques dans la mesure où les premiers englobent les chaussettes et d’autres sous-vêtements se portant aux pieds, mais elle fait observer qu’il n’en est pas ainsi des souliers, des bottes et des sandales. De plus, les matières employées, à savoir des tissus composés de mailles dans le premier cas et du cuir ou du similicuir dans le second cas, seraient distinctes et, ici encore, lesdits produits ne seraient pas en concurrence. Même lorsqu’ils sont vendus dans un même magasin, ils seraient commercialisés dans des rayons différents. Ces produits ne seraient pas en concurrence, pas plus que ne le seraient les articles de bonneterie à l’égard de tous les autres types de vêtements compris dans la classe 25.

21      L’OHMI et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

22      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

23      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

24      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

25      En l’espèce, il y a lieu, au préalable, d’approuver l’appréciation de la chambre de recours, au demeurant non contestée par la requérante, selon laquelle le public pertinent par rapport auquel le risque de confusion doit être analysé est le grand public en Suède.

 Sur la comparaison des produits

26      Il y a lieu d’indiquer que la chambre de recours a considéré à bon droit, au point 27 de la décision attaquée, que les produits protégés par la marque suédoise verbale antérieure VOGUE, dont l’usage sérieux avait été démontré pour les articles de bonneterie, constituaient des vêtements et étaient donc identiques aux « vêtements » visés par la marque demandée.

27      La chambre de recours a estimé, par ailleurs, que les articles de bonneterie, les chaussures et les articles de chapellerie étaient similaires, ce que conteste la requérante.

28      Selon une jurisprudence constante, pour apprécier la similitude entre les produits en cause, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre eux. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire. D’autres facteurs peuvent également être pris en compte, tels que les canaux de distribution des produits concernés [voir arrêt du Tribunal du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T‑443/05, Rec. p. II‑2579, point 37, et la jurisprudence citée].

29      Pour fonder sa conclusion quant à la similitude entre les articles de bonneterie, d’une part, et les chaussures et articles de chapellerie, d’autre part, la chambre de recours a relevé que ces articles partageaient généralement « leur nature et leur finalité d’utilisation qui consiste à couvrir et [à] protéger des parties du corps humain ». Elle a également relevé des similitudes dans les canaux de distribution de ces produits, le fait qu’ils étaient soumis à l’influence de la mode et que le public pertinent avait tendance à les assortir, ce qui traduisait leur caractère complémentaire (point 27 de la décision attaquée).

30      Concernant, tout d’abord, la similitude entre les articles de bonneterie et ceux de chapellerie, il échet de souligner que, si les différents produits en cause ne s’adressent pas dans leur ensemble au même public, ils ont néanmoins pour destination commune l’habillement à la mode des personnes. Ainsi, les produits en cause, du point de vue du public pertinent, appartiennent à une même famille de produits, à savoir les articles d’habillement à la mode. Dès lors qu’un grand nombre d’entreprises de mode commercialisent sous une même marque des articles d’habillement de styles différents, il n’est pas exclu que le public pertinent perçoive les différents produits en cause comme provenant d’une même entreprise [voir, en ce sens, s’agissant de vêtements de dessus et de sous-vêtements pour dames, d’une part, et, notamment, de chapellerie pour garçons et adolescents, d’autre part, arrêt du Tribunal du 16 novembre 2011, Chabou/OHMI – Chalou (CHABOU), T‑323/10, non publié au Recueil, point 34].

31      Eu égard à ce qui précède, la destination similaire des produits concernés et la circonstance qu’ils appartiennent à une même famille de produits renforcent la probabilité qu’ils soient distribués par les mêmes canaux et proposés à la vente dans les mêmes magasins. S’il est exact, ainsi que le souligne la requérante, que ces produits ne sont pas nécessairement commercialisés dans les mêmes magasins ou dans des départements identiques de grands magasins, il n’en demeure pas moins qu’ils sont distribués par des grossistes du secteur du textile et vendus dans des magasins de mode ainsi que dans des grands magasins qui proposent des articles d’habillement à la mode. Sans préjudice de l’analyse du risque de confusion opérée aux points 48 et 49 ci-après, il convient d’observer que ces circonstances sont, elles aussi, de nature à renforcer le sentiment, auprès du public pertinent, que les produits concernés proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement (arrêt CHABOU, précité, point 37).

32      Concernant, ensuite, la similitude entre les articles de bonneterie et les chaussures, il convient, d’emblée, de relever qu’il existe une complémentarité marquée entre les articles de bonneterie destinés à couvrir les jambes et les pieds, en particulier les bas, chaussettes et collants, et les chaussures, le consommateur moyen desdits produits de bonneterie associant fréquemment le choix de ces articles avec celui des chaussures, qu’il est susceptible d’associer aux vêtements en cause. C’est donc à bon droit que la chambre de recours a souligné, au point 27 de la décision attaquée, le souhait du public pertinent d’assortir ces produits. Il ressort également de la jurisprudence concernant la similitude entre les vêtements, en général, et les chaussures, que les liens suffisamment étroits que présentent les finalités respectives de ces produits, décelables notamment dans le fait qu’ils appartiennent à une même classe, et l’éventualité concrète qu’ils puissent être produits par les mêmes opérateurs ou vendus ensemble permettent de conclure que ces produits peuvent être associés dans l’esprit du public pertinent [arrêt du Tribunal du 13 juillet 2004, AVEX/OHMI – Ahlers (a), T‑115/02, Rec. p. II‑2907, point 26]. Pour les raisons exposées en début de point, cette considération vaut à plus forte raison s’agissant de la bonneterie.

33      Concernant, enfin, plus largement, la similitude entre les articles de bonneterie, d’une part, et les articles de chapellerie et les chaussures pris dans leur ensemble, d’autre part, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les vêtements, les chaussures et les produits de la chapellerie, compris dans la classe 25, obéissent à une finalité commune, puisqu’ils sont fabriqués pour couvrir le corps humain, le cacher, le protéger et le parer [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 10 septembre 2008, Tsakiris-Mallas/OHMI – Late Editions (exé), T‑96/06, non publié au Recueil, point 30, et du 24 mars 2010, 2nine/OHMI – Pacific Sunwear of California (nollie), T‑364/08, non publié au Recueil, point 33].

34      C’est donc à bon droit que, nonobstant le fait que des textiles et matériaux différents entrent dans la composition de ces produits et qu’ils soient parfois commercialisés dans des points de vente différents, la chambre de recours les a considérés comme similaires au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

35      Les produits en cause sont donc, pour partie, identiques et, pour partie, similaires.

 Sur la comparaison des signes

36      Les signes en conflit sont des marques verbales, la marque suédoise verbale antérieure étant composée du seul mot « vogue », tandis que la marque demandée est composée des mots « teen » et « vogue ».

37      Il convient de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

38      En l’espèce, la chambre de recours a conclu à des similitudes visuelle et phonétique moyennes des signes en conflit, tout en excluant une similitude conceptuelle, au motif qu’aucun des termes en cause n’avait de signification en suédois.

–       Sur la comparaison visuelle

39      En premier lieu, il convient de constater, comme l’a fait la chambre de recours au point 29 de la décision attaquée, que, s’il est vrai que la marque demandée comporte deux mots, à la différence de la marque suédoise verbale antérieure, qui n’en comprend qu’un, il n’en demeure pas moins que la marque suédoise verbale antérieure demandée est entièrement englobée dans la marque demandée. Le mot « vogue », présent dans les signes en conflit, est, dans le cas de la marque suédoise verbale antérieure, le seul que pourra lire le public pertinent et, dans le cas de la marque demandée, le dernier mot qu’il aura lu. De plus, alors que le mot « teen » a quatre lettres, cinq lettres composent le mot « vogue ». Il résulte de ce qui précède que, s’agissant de la marque demandée, au regard de la comparaison visuelle, l’élément « teen » n’a pas plus d’importance que l’élément « vogue ».

40      En second lieu, concernant l’invocation, par la requérante, de la jurisprudence selon laquelle le début d’un signe revêt une importance particulière dans l’impression globale que ce signe produit [arrêts du Tribunal du 16 mars 2005, L’Oréal/OHMI – Revlon (FLEXI AIR), T‑112/03, Rec. p. II‑949, points 64 et 65, et du 16 décembre 2008, Focus Magazin Verlag/OHMI – Editorial Planeta (FOCUS Radio), T‑357/07, non publié au Recueil, point 36], il y a lieu de rappeler que cette considération ne saurait valoir dans tous les cas et ne saurait, en tout état de cause, infirmer le principe selon lequel l’examen de la similitude des marques doit prendre en compte l’impression d’ensemble produite par ces marques, dès lors que le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à l’examen de ses différents détails [voir arrêt du Tribunal du 16 mai 2007, Trek Bicycle/OHMI – Audi (ALLTREK), T‑158/05, non publié au Recueil, point 70, et la jurisprudence citée]. Ainsi, malgré la présence d’un premier élément différenciant la marque demandée de la marque antérieure, celles-ci peuvent présenter une certaine similitude visuelle en raison de la présence d’un élément commun [arrêts du Tribunal du 25 novembre 2003, Oriental Kitchen/OHMI – Mou Dybfrost (KIAP MOU), T‑286/02, Rec. p. II‑4953, points 39 à 44 ; du 8 mars 2005, Leder & Schuh/OHMI – Schuhpark Fascies (JELLO Schuhpark), T‑32/03, non publié au Recueil, points 38 à 47, et du 14 avril 2011, Lancôme/OHMI – Focus Magazin Verlag (ACNO FOCUS), T‑466/08, Rec. p. II‑1831, points 56 à 63].

41      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a conclu à la similitude moyenne des signes sur le plan visuel, en raison de la présence de l’élément « vogue », commun auxdits signes.

–       Sur la comparaison phonétique

42      La chambre de recours a également conclu à une similitude phonétique moyenne des signes en conflit, leur élément commun « vogue » se prononçant de la même façon dans les deux cas.

43      Il importe, d’abord, d’indiquer que la présence de l’élément « teen » dans la marque demandée concourt assurément à différencier phonétiquement les deux signes en conflit, ainsi que le souligne la requérante. Néanmoins, il ne saurait être soutenu que l’élément « teen », compte tenu de sa brièveté, prévaut, à cet égard, sur l’élément « vogue », commun aux deux signes. Il peut, dès lors, être considéré qu’il existe une certaine similitude phonétique entre les deux signes pris dans leur ensemble [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 11 décembre 2008, Tomorrow Focus/OHMI – Information Builders (Tomorrow Focus), T‑90/06, non publié au Recueil, point 34, et ACNO FOCUS, précité, point 64]. C’est donc à tort que la requérante soutient que la chambre de recours a commis une erreur d’appréciation en estimant que, d’un point de vue phonétique, les signes en conflit présentaient une similitude moyenne.

–       Sur la comparaison conceptuelle

44      La chambre de recours a rappelé, au point 31 de la décision attaquée, qu’aucun des deux éléments en cause (« teen » et « vogue ») ne revêtait de signification en suédois, ce qui n’est pas contesté. Pour autant, il lui appartenait également de vérifier si le grand public en Suède, largement anglophone, était à même de discerner le sens de ces deux éléments, ce qu’elle n’a pas fait. Les développements consacrés à cette question par l’OHMI dans le mémoire en réponse ne sauraient pallier l’absence d’analyse de la chambre de recours concernant les connaissances du grand public, en Suède, relatives à la langue anglaise. Il importe donc de vérifier si cet examen incomplet de la chambre de recours, qui n’est pas constitutif d’une insuffisance de motivation, puisqu’elle a bien indiqué les motifs pour lesquels elle estimait qu’il n’était pas possible de procéder à une comparaison des signes sur le plan conceptuel, mais d’une appréciation partiellement erronée concernant les aptitudes du public pertinent, est de nature à affecter la légalité de la décision attaquée.

45      En l’espèce, pour la partie dudit grand public maîtrisant la langue anglaise, le mot « vogue » aurait été compris comme un terme ayant trait à la mode, le mot « teen » désignant clairement les adolescents. Au demeurant, le mot « teenager » se traduit en suédois par un mot construit de manière semblable, à savoir « tonåring ». Il convient d’en déduire que l’expression « teen vogue » aurait été perçue comme une simple déclinaison de « vogue », la notion de « ce qui est à la mode pour les adolescents » procédant naturellement de « ce qui est à la mode ». Cette évidente similitude conceptuelle ne pouvait donc que renforcer la conclusion de la chambre de recours relative, d’abord, à la similitude des signes en conflit et, ensuite, au risque de confusion. Par suite, cette erreur quant aux compétences du public pertinent demeure sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, étant rappelé que, pour le public pertinent non anglophone, la conclusion de la chambre de recours quant à l’absence d’influence de la comparaison conceptuelle sur l’appréciation de la similitude des signes demeure exacte [voir arrêt du Tribunal du 16 septembre 2013, Gitana/OHMI – Teddy (GITANA), T‑569/11, point 67, et la jurisprudence citée].

–       Conclusion sur la comparaison des signes

46      La chambre de recours a donc, à bon droit, considéré que, pour le public pertinent, il existait des similitudes visuelle et phonétique des signes en conflit. En revanche, l’assertion selon laquelle aucune différence conceptuelle entre la marque suédoise verbale antérieure et la marque demandée ne pouvait être relevée, étant donné l’absence de signification en suédois des éléments composant lesdites marques, n’est exacte que pour le public pertinent non anglophone. Toutefois, la prise en considération du public pertinent anglophone n’aurait pu qu’aboutir à la conclusion d’une similitude conceptuelle des signes en conflit.

47      Partant, la requérante n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que les signes en conflit ont été regardés comme étant similaires. Il est, en effet, de jurisprudence constante que deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne les aspects visuel, phonétique et conceptuel [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 30, et la jurisprudence citée].

 Sur le risque de confusion

48      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 17, et arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 74].

49      Compte tenu des similitudes visuelle et phonétique des signes en conflit et eu égard au fait que les produits désignés par la marque suédoise verbale antérieure VOGUE, d’une part, et la marque demandée, d’autre part, sont, pour partie, identiques et, pour partie, similaires, c’est sans commettre d’erreur d’appréciation que la chambre de recours a conclu qu’il existait un risque de confusion entre celles-ci et, ainsi, a confirmé la décision de la division d’opposition refusant l’enregistrement de la marque demandée pour les « vêtements ; chaussures ; chapellerie ; pièces et parties constitutives pour tous les produits précités », relevant de la classe 25.

50      Le moyen unique de la requérante, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, avancé au soutien de ses conclusions tant en annulation qu’en réformation, n’étant pas fondé, il y a lieu de rejeter le recours dans son ensemble.

 Sur les dépens

51      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

52      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Advance Magazine Publishers, Inc. est condamnée aux dépens.

Gratsias

Kancheva

Wetter

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 27 février 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.