Language of document : ECLI:EU:T:2015:97

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

12 février 2015 (*

« Politique étrangère et de sécurité commune – Gel des fonds – Droits de la défense – Obligation de motivation – Erreur manifeste d’appréciation – Droit à la vie – Droit de propriété – Droit au respect de la vie privée – Proportionnalité »

Dans l’affaire T‑579/11,

Tarif Akhras, demeurant à Homs (Syrie), représenté par M. S. Ashley, Mme S. Millar, MM. S. Jeffrey, A. Irvine, solicitors, D. Wyatt, QC, et R. Blakeley, barrister,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté initialement par MM. M. Bishop, F. Naert et Mme M.-M. Joséphidès, puis par M. Bishop et Mme Joséphidès, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par


Commission européenne, représentée initialement par MM. E. Paasivirta et F. Castillo de la Torre, puis par M. Castillo de la Torre et Mme D. Gauci, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 2011/522/PESC du Conseil, du 2 septembre 2011, modifiant la décision 2011/273/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO L 228, p. 16), du règlement (UE) n° 878/2011 du Conseil, du 2 septembre 2011, modifiant le règlement (UE) n° 442/2011 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO L 228, p. 1), de la décision 2011/628/PESC du Conseil, du 23 septembre 2011, modifiant la décision 2011/273/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO L 247, p. 17), du règlement (UE) n° 1011/2011 du Conseil, du 13 octobre 2011, modifiant le règlement (UE) n° 442/2011 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO L 269, p. 18), de la décision 2011/782/PESC du Conseil, du 1er décembre 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/273/PESC (JO L 319, p. 56), du règlement (UE) n° 36/2012 du Conseil, du 18 janvier 2012, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie et abrogeant le règlement (UE) n° 442/2011 (JO L 16, p. 1), de la décision d’exécution 2012/172/PESC du Conseil, du 23 mars 2012, mettant en œuvre la décision 2011/782 (JO L 87, p. 103), du règlement d’exécution (UE) n° 266/2012 du Conseil, du 23 mars 2012, mettant en œuvre l’article 32, paragraphe 1, du règlement n° 36/2012 (JO L 87, p. 45), de la décision 2012/739/PESC du Conseil, du 29 novembre 2012, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/782 (JO L 330, p. 21), de la décision d’exécution 2013/185/PESC du Conseil, du 22 avril 2013, mettant en œuvre la décision 2012/739 (JO L 111, p. 77), du règlement d’exécution (UE) n° 363/2013 du Conseil, du 22 avril 2013, mettant en œuvre le règlement n° 36/2012 (JO L 111, p. 1), de la décision 2013/255/PESC du Conseil, du 31 mai 2013, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO L 147, p. 14), de la décision d’exécution 2014/730/PESC du Conseil, du 20 octobre 2014, mettant en œuvre la décision 2013/255 (JO L 301, p. 36) et du règlement d’exécution (UE) n° 1105/2014 du Conseil, du 20 octobre 2014, mettant en œuvre le règlement n° 36/2012 (JO L 301, p. 7) pour autant que ces actes concernent le requérant,


LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. M. van der Woude, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. I. Ulloa Rubio (rapporteur), juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 21 mai 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le requérant, M. Tarif Akhras, est un homme d’affaires de nationalité syrienne. Il contrôle le groupe d’entreprises Akhras, a été pendant plusieurs années président de la chambre de commerce de la ville d’Homs, en Syrie, et est membre du conseil d’administration de la fédération des chambres de commerce syriennes.

2        Condamnant fermement la répression violente des manifestations pacifiques en Syrie et lançant un appel aux autorités syriennes pour qu’elles s’abstiennent de recourir à la force, le Conseil de l’Union européenne a adopté, le 9 mai 2011, la décision 2011/273/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO L 121, p. 11). Compte tenu de la gravité de la situation, le Conseil a institué un embargo sur les armes, une interdiction des exportations de matériel susceptible d’être utilisé à des fins de répression interne, des restrictions à l’admission dans l’Union européenne ainsi que le gel des fonds de certaines personnes et entités responsables de la répression violente exercée contre la population civile syrienne.

3        Les noms des personnes responsables de la répression violente exercée contre la population civile en Syrie ainsi que ceux des personnes, physiques ou morales, et des entités qui leur sont liées sont mentionnés dans l’annexe de la décision 2011/273. En vertu de l’article 5 de cette décision, le Conseil, statuant sur proposition d’un État membre ou du haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, peut modifier ladite annexe. Le nom du requérant ne figure pas dans cette annexe.

4        Étant donné que certaines des mesures restrictives prises à l’encontre de la République arabe syrienne entrent dans le champ d’application du traité FUE, le Conseil a adopté le règlement (UE) n° 442/2011, du 9 mai 2011, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO L 121, p. 1). Ce règlement est, pour l’essentiel, identique à la décision 2011/273, mais il prévoit des possibilités de déblocage des fonds gelés. La liste des personnes, des entités et des organismes reconnus comme étant soit responsables de la répression en cause, soit associés auxdits responsables, figurant à l’annexe II, est identique à celle figurant à l’annexe de la décision 2011/273. Le nom du requérant n’y figure donc pas. En vertu de l’article 14, paragraphes 1 et 4, dudit règlement, lorsque le Conseil décide d’appliquer à une personne, à une entité ou à un organisme les mesures restrictives visées, il modifie l’annexe II en conséquence et examine, par ailleurs, la liste y figurant à intervalles réguliers et au moins tous les douze mois.

5        Par la décision 2011/522/PESC, du 2 septembre 2011 (JO L 228, p. 16), le Conseil a modifié la décision 2011/273 afin d’y introduire de nouveaux critères d’inscription, en prévoyant que son champ d’application, y compris son annexe, englobait désormais « des personnes bénéficiant des politiques menées par le régime ou soutenant celui-ci et [des] personnes qui leur sont liées, dont la liste figure à l’annexe ». Le nom du requérant figure à la troisième ligne du tableau de l’annexe de ladite décision, ainsi que les motifs suivants :

« Fondateur du groupe Akhras (matières premières, commerce, transformation et logistique), Homs. Apporte un soutien économique au régime syrien. »

6        Le même jour, le Conseil a adopté le règlement (UE) n° 878/2011, modifiant le règlement n° 442/2011 (JO L 228, p. 1), par lequel le Conseil a introduit de nouveaux critères d’inscription, étendant ainsi le champ d’application de ce dernier règlement aux « personnes et entités bénéficiant de l’appui du régime ou le soutenant, ou des personnes et entités qui leur sont associées ». Le nom du requérant figure à l’annexe du règlement n° 878/2011, avec les mêmes motifs et informations que ceux mentionnés dans l’annexe de la décision 2011/522.

7        Le 3 septembre 2011, le Conseil a publié un avis à l’attention des personnes et entités auxquelles s’appliquent les mesures restrictives prévues par la décision 2011/522 et par le règlement n° 878/2011 (JO C 261, p. 4).

8        Par la décision 2011/628/PESC, du 23 septembre 2011, modifiant la décision 2011/273 (JO L 247, p. 17), le Conseil a modifié les données relatives à M. Akhras dans l’annexe I de la décision 2011/273, en ajoutant comme information d’identification : « Date de naissance : 1949 ; lieu de naissance : Homs, Syrie ».

9        Le 24 septembre 2011, le Conseil a publié un avis à l’attention des personnes et entités auxquelles s’appliquent les mesures restrictives prévues par la décision 2011/273, modifiée par la décision 2011/628 et par le règlement n° 442/2011, modifié par le règlement (UE) n° 950/2011 du Conseil concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO C 281, p. 17).

10      Le 13 octobre 2011, le Conseil a adopté le règlement (UE) n° 1011/2011, modifiant le règlement n° 442/2011 (JO L 269, p. 18). Le nom du requérant figure à la ligne 3 du tableau de l’annexe II dudit règlement, avec les mêmes informations et motifs que ceux mentionnés à l’annexe de la décision 2011/628.

11      Le 14 octobre 2011, un nouvel avis, à l’attention des personnes et entités auxquelles s’appliquent les mesures restrictives prévues par la décision 2011/273, modifiée par la décision 2011/684/PESC du Conseil, et par le règlement (UE) n° 1011/2011 du Conseil concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie, a été publié par le Conseil (JO C 303, p. 5).

12      Par la décision 2011/782/PESC, du 1er décembre 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/273 (JO L 319, p. 56), le Conseil a estimé, compte tenu de la gravité de la situation en Syrie, qu’il était nécessaire d’instituer des mesures restrictives supplémentaires telles que des restrictions en matière de financement d’entreprises ou de participation à certains projets d’infrastructures. Par souci de clarté, les mesures imposées par la décision 2011/273 et les mesures supplémentaires ont été regroupées dans un instrument juridique unique. Le nom du requérant figure à la ligne 53 du tableau de l’annexe I de ladite décision, avec les mêmes informations et motifs que ceux mentionnés dans l’annexe de la décision 2011/628.

13      Le 2 décembre 2011, le Conseil a publié un avis à l’attention des personnes et entités auxquelles s’appliquent les mesures restrictives prévues notamment dans la décision 2011/782 et dans le règlement n° 442/2011, mis en œuvre par le règlement d’exécution (UE) n° 1244/2011 du Conseil, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO C 351, p. 14).

14      Le règlement (UE) n° 36/2012, du Conseil, du 18 janvier 2012, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie et abrogeant le règlement n° 442/2011 (JO L 16, p. 1), prévoit de nouvelles mesures restrictives et modifie la liste des personnes et des entités visées. Le nom du requérant figure à la ligne 53 de l’annexe II dudit règlement, avec les mêmes informations et motifs que ceux mentionnés dans l’annexe de la décision 2011/628.

15      Par la décision d’exécution 2012/172/PESC, du 23 mars 2012, mettant en œuvre la décision 2011/782 (JO L 87, p. 103), le Conseil a ajouté à l’annexe de cette dernière décision, en ce qui concerne le requérant, des informations relatives à son numéro de passeport et a corrigé sa date de naissance (« Né le 2 juin 1951 à Homs, Syrie. Passeport syrien n° 0000092405 »). En ce qui concerne les motifs de l’inscription de son nom sur l’annexe en cause, le Conseil les a formulés comme suit :

« Homme d’affaires important bénéficiant du régime et soutenant celui-ci. Fondateur du groupe Akhras (matières premières, commerce, transformation et logistique) et ancien président de la chambre de commerce d’Homs. Relations professionnelles étroites avec la famille du président Al-Assad. Membre du conseil d’administration de la fédération des chambres de commerce syriennes. A fourni des locaux industriels et d’habitation pour servir de camps de détention improvisés, ainsi qu’un appui logistique au régime (autobus et véhicules de transport de chars). »

16      Le même jour, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) n° 266/2012, mettant en œuvre l’article 32, paragraphe 1, du règlement n° 36/2012 (JO L 87, p. 45). Le nom du requérant figure à l’annexe dudit règlement, avec les mêmes motifs et informations que ceux mentionnés dans l’annexe de la décision d’exécution 2012/172.

17      Le 24 mars 2012, le Conseil a publié un avis à l’attention des personnes et entités auxquelles s’appliquent les mesures restrictives prévues par la décision 2011/782, mise en œuvre par la décision d’exécution 2012/172, et par le règlement n° 36/2012, mis en œuvre par le règlement d’exécution n° 266/2012 (JO, C 88, p. 9).

18      Par la décision 2012/739/PESC du Conseil, du 29 novembre 2012, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/782 (JO L 330, p. 21), les mesures restrictives en cause ont été regroupées dans un instrument juridique unique. Le nom du requérant figure à la ligne 50 du tableau de l’annexe I de ladite décision, avec les mêmes informations et motifs que ceux mentionnés dans l’annexe de la décision d’exécution 2012/172.

19      Le 30 novembre 2012, le Conseil a publié un avis à l’attention des personnes et entités auxquelles s’appliquent les mesures restrictives prévues dans la décision 2012/739 et dans le règlement n° 36/2012, mis en œuvre par le règlement d’exécution (UE) n° 1117/2012 du Conseil, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie (JO C 370, p. 6).

20      La décision d’exécution 2013/185/PESC du Conseil, du 22 avril 2013, mettant en œuvre la décision 2012/739 (JO L 111, p. 77), vise à mettre à jour la liste des personnes et des entités faisant l’objet de mesures restrictives qui figure à l’annexe I de ladite décision. Le nom du requérant figure à la ligne 48 de cette annexe I avec les mêmes informations et motifs que ceux mentionnés dans l’annexe de la décision d’exécution 2012/172.

21      Le règlement d’exécution (UE) n° 363/2013 du Conseil, du 22 avril 2013, mettant en œuvre le règlement n° 36/2012 (JO L 111, p. 1), comporte les mêmes informations et motifs que ceux mentionnés dans l’annexe de la décision d’exécution 2012/172 en ce qui concerne le requérant.

22      Le 23 avril 2013, le Conseil a publié un avis à l’attention des personnes et entités auxquelles s’appliquent les mesures restrictives prévues par la décision 2012/739, mise en œuvre par la décision d’exécution 2013/185 et par le règlement n° 36/2012, mis en œuvre par le règlement d’exécution n° 363/2013 (JO C 115, p. 5).

23      Le 31 mai 2013, le Conseil a adopté la décision 2013/255/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie (JO L 147, p. 14). Le nom du requérant figure à la ligne 48 de l’annexe I de ladite décision, avec les mêmes informations et motifs que ceux mentionnés dans l’annexe de la décision d’exécution 2012/172.

24      Le 1er juin 2013, le Conseil a publié un avis à l’attention des personnes et entités auxquelles s’appliquent les mesures restrictives prévues par la décision 2013/255 et par le règlement n° 36/2012 (JO C 155, p. 1).

25      Le 20 octobre 2014, le Conseil a adopté la décision d’exécution 2014/730/PESC mettant en œuvre la décision 2013/255 (JO L 301, p. 36). Le nom du requérant figure désormais à la ligne 50 de l’annexe I de la décision 2013/255. En ce qui concerne les motifs de l’inscription de son nom sur l’annexe en cause, le Conseil les a formulés comme suit :

« Homme d'affaires important bénéficiant du régime et soutenant celui-ci. Fondateur du groupe Akhras (matières premières, commerce, transformation et logistique) et ancien président de la Chambre de commerce de Homs. Relations professionnelles étroites avec la famille du président Assad. Membre du conseil d'administration de la fédération des chambres de commerce syriennes. A fourni un soutien logistique au régime (autobus et véhicules de transport de chars). »

26      Le même jour, le Conseil a adopté le règlement d’exécution (UE) n° 1105/2014, mettant en œuvre le règlement n° 36/2012 (JO L 301, p. 7). Le nom du requérant figure à la ligne 50 de l’annexe dudit règlement, avec les mêmes motifs et informations que ceux mentionnés dans l’annexe de la décision d’exécution 2014/730.

27      Le 21 octobre 2014, le Conseil a publié un avis à l’attention des personnes qui font l’objet des mesures restrictives prévues par la décision 2013/255 et par le règlement n° 36/2012 (JO C 373, p. 7).

 Procédure et conclusions des parties

28      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 novembre 2011, le requérant a introduit un recours en annulation à l’encontre de la décision 2011/522, du règlement n° 878/2011, de la décision 2011/628 et du règlement n° 1011/2011 dans la mesure où son nom a été inscrit sur les listes des personnes et entités auxquelles s’appliquent les mesures restrictives instituées par ces actes.

29      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le même jour, le requérant a introduit une demande en référé en vue d’obtenir la suspension immédiate de l’application de la décision 2011/522, du règlement n° 878/2011, de la décision 2011/628 et du règlement n° 1011/2011, conformément à l’article 105, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal ou, à titre subsidiaire, la suspension desdits actes après l’examen des observations du Conseil. La demande visait aussi la publication par le Conseil, au moyen d’un communiqué de presse et d’un avis publié au Journal officiel, de la suspension des actes précités dans les 24 heures suivant la signification de l’ordonnance du Tribunal. Par ordonnance de 12 décembre 2011, le président du Tribunal a rejeté cette demande.

30      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le même jour, le requérant a introduit une demande de procédure accélérée au titre de l’article 76 bis du règlement de procédure.

31      Par décision du 20 janvier 2012, le Tribunal n’a pas fait droit à cette demande.

32      Dans son mémoire déposé au greffe du Tribunal le 3 février 2012, le requérant a adapté ses conclusions en sollicitant l’annulation de la décision 2011/782 ainsi que du règlement n° 36/2012, dans la mesure où ils le concernent. Dans ses observations sur ce mémoire déposées au greffe du Tribunal le 6 mars 2012, le Conseil a pris acte de la demande du requérant.

33      Par ordonnance du président de la sixième chambre du Tribunal du 29 mars 2012, il a été fait droit à la demande d’intervention de la Commission européenne au soutien des conclusions du Conseil, déposée au greffe du Tribunal le 10 février 2012.

34      Dans son mémoire déposé au greffe du Tribunal le 1er juin 2012, le requérant a adapté ses conclusions en sollicitant également l’annulation de la décision d’exécution 2012/172 ainsi que du règlement d’exécution n° 266/2012, pour autant que ces actes le concernent. Il demande également à ce que les effets de l’annulation soient immédiats, indépendamment de l’épuisement du délai de recours.

35      Dans leurs observations sur ce mémoire déposées au greffe du Tribunal, respectivement, le 20 juin et le 3 juillet 2012, la Commission et le Conseil ne se sont pas opposés à la demande du requérant visant à étendre l’objet de son recours en annulation.

36      Dans son mémoire déposé au greffe du Tribunal le 11 février 2013, le requérant a adapté ses conclusions en sollicitant également l’annulation de la décision 2012/739, pour autant que cet acte le concerne, ainsi que l’inclusion au dossier d’une lettre du Conseil du 30 novembre 2012, l’informant du maintien de son nom sur les listes annexées aux actes contestés. Dans leurs observations sur ce mémoire, déposées au greffe du Tribunal, respectivement, le 20 février et le 13 mars 2013, la Commission et le Conseil ont pris acte de la demande du requérant.

37      Dans son mémoire déposé au greffe du Tribunal le 19 juin 2013, le requérant a adapté ses conclusions en sollicitant également l’annulation de la décision d’exécution 2013/185, du règlement d’exécution n° 363/2013 et de la décision 2013/255, ainsi que l’inapplicabilité de l’article 27, paragraphe 1, et de l’article 28, paragraphe 1, de la décision 2013/255. Par lettre reçue au greffe du Tribunal le 12 août 2013, la Commission n’a formulé aucune observation sur ce mémoire. Dans ses observations sur ce mémoire déposées au greffe du Tribunal le 3 septembre 2013, le Conseil a indiqué qu’il ne s’opposait pas à la demande d’adaptation, mais que la demande de déclaration d’inapplicabilité de l’article 27, paragraphe 1, et de l’article 28, paragraphe 1, de la décision 2013/255 devait être rejetée pour les raisons exposées dans ses observations du 3 juillet 2012.

38      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la septième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

39      Par lettre reçue le 16 octobre 2013, le requérant a demandé le renvoi de l’affaire devant la grande chambre.

40      Par décision du 21 novembre 2013, la septième chambre a refusé le renvoi de l’affaire à la grande chambre.

41      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure, a invité le Conseil à répondre à certaines questions écrites et à fournir, le cas échéant, certains documents. Le Conseil a déféré à ces demandes.

42      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 21 mai 2014.

43      Par ordonnance du président de la septième chambre du Tribunal du 11 novembre 2014, le Tribunal a ordonné la réouverture de la procédure orale.

44      Dans son mémoire déposé au greffe du Tribunal le 27 octobre 2014, le requérant a adapté ses conclusions en sollicitant l’annulation de la décision d’exécution 2014/730 ainsi que du règlement d’exécution n° 1105/2014, dans la mesure où ils le concernent. Dans leurs observations sur ce mémoire déposées au greffe du Tribunal respectivement le 27 novembre et le 4 décembre 2014, la Commission et le Conseil ont pris acte de la demande du requérant.

45      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision 2011/522, le règlement n° 878/2011, la décision 2011/628, le règlement n° 1011/2011, la décision 2011/782, le règlement n° 36/2012, la décision d’exécution 2012/172, le règlement d’exécution n° 266/2012, la décision 2012/739, la décision d’exécution 2013/185, le règlement d’exécution n° 363/2013, la décision 2013/255, la décision d’exécution 2014/730 et le règlement d’exécution n° 1105/2014, pour autant que ces actes le concernent ;

–        constater que l’article 4, paragraphe 1, de la décision 2011/273, tel que modifié, ne lui est pas applicable ;

–        constater que l’article 5, paragraphe 1, du règlement n° 442/2011, tel que modifié, ne lui est pas applicable ;

–        constater que l’article 27, paragraphe 1, et l’article 28, paragraphe 1, de la décision 2013/255 ne lui sont pas applicables ;

–        condamner le Conseil aux dépens.

46      Le Conseil, soutenu par la Commission, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

47      Au soutien de son recours, le requérant invoque trois moyens. Le premier moyen est tiré d’une erreur manifeste d’appréciation, le deuxième, d’une violation des droits fondamentaux du requérant, notamment de son droit à la vie, de son droit à une vie privée et familiale et de son droit de propriété, et, le troisième, de la violation des formes substantielles et des droits de la défense.

48      Il convient d’examiner, tout d’abord, la recevabilité des deuxième, troisième et quatrième chefs de conclusions du requérant.

 Sur la recevabilité des deuxième, troisième et quatrième chefs de conclusions du requérant

49      Par les deuxième, troisième et quatrième chefs de conclusions, le requérant demande que le Tribunal constate que l’article 4, paragraphe 1, de la décision 2011/273 (tel que modifié), l’article 5, paragraphe 1, du règlement n° 442/2011 (tel que modifié), l’article 27, paragraphe 1, et l’article 28, paragraphe 1, de la décision 2013/255 sont inapplicables à son égard.

50      Il convient tout d’abord de constater que de telles demandes de la part du requérant impliquent une constatation ou une déclaration de la part du Tribunal (voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 15 décembre 2005, Infront WM/Commission, T‑33/01, Rec. 2005 p. II‑5897, point 171).

51      Or, une demande visant à obtenir une décision déclaratoire doit être rejetée pour cause d’incompétence manifeste. En effet, il ressort d’une jurisprudence constante que le Tribunal n’est pas compétent, dans le cadre du contrôle de légalité fondé sur l’article 263 TFUE, pour prononcer des arrêts déclaratoires (voir, en ce sens, ordonnance de la Cour du 25 novembre 2008, TEA/Commission, C‑500/07 P, non publiée au Recueil, point 33, et arrêt du Tribunal du 4 février 2009, Omya/Commission, T‑145/06, Rec. 2009 p. II‑145, point 23).

52      Il y a donc lieu de rejeter les deuxième, troisième et quatrième chefs de conclusions du requérant comme irrecevables.

 Sur le troisième moyen, relatif à la violation des formes substantielles et des droits de la défense

53      Le requérant soulève trois branches dans le troisième moyen. La première branche est tirée de l’absence de notification individuelle, malgré la possibilité pour le Conseil d’obtenir son adresse personnelle. La deuxième branche est fondée sur l’absence de motivation adéquate, précise et suffisante de l’inscription de son nom dans les annexes des actes en litige, en raison du caractère vague et imprécis des informations fournies. Le requérant fait notamment valoir que les motifs initiaux de cette inscription n’étaient ni suffisants ni appropriés. Par ailleurs, selon le requérant, le fait que le Conseil ait modifié les motifs de l’inscription de son nom sur les listes en cause est un indice fort selon lequel l’inscription initiale n’était pas suffisamment motivée. La dernière branche est tirée de l’insuffisance des informations et des éléments de preuve fournis pour lui permettre de formuler des observations pertinentes et utiles afin de sauvegarder son droit à une procédure équitable. À ce titre, le requérant fait valoir que le Conseil n’a déféré que tardivement à l’obligation de lui communiquer le contenu du dossier.

54      Le Conseil, soutenu par la Commission, conteste les arguments du requérant.

55      Pour justifier l’inscription du nom du requérant dans les actes en litige, le Conseil s’est fondé sur deux motivations différentes. En effet, cette motivation a été substantiellement modifiée à partir du 23 mars 2012 (voir point 15 ci-dessus). Il convient dès lors d’examiner le premier moyen séparément à l’égard, d’une part, des actes adoptés avant cette date (voir points 5 à 14 ci-dessus) (ci-après les « actes attaqués antérieurs au 23 mars 2012 ») et, d’autre part, des actes adoptés après cette date (voir points 15 à 23 ci-dessus) (ci-après les « autres actes attaqués »).

 Sur les actes attaqués antérieurs au 23 mars 2012

56      Concernant les actes adoptés avant le 23 mars 2012, le Tribunal examinera d’abord la deuxième branche du troisième moyen, tirée d’une violation de l’obligation de motivation.

57      Il convient, tout d’abord, de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver un acte faisant grief, qui constitue un corollaire du principe du respect des droits de la défense, a pour but, d’une part, de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si l’acte est bien fondé ou s’il est éventuellement entaché d’un vice permettant d’en contester la validité devant le juge de l’Union et, d’autre part, de permettre à ce dernier d’exercer son contrôle sur la légalité de cet acte (voir arrêt du Tribunal du 13 septembre 2013, Makhlouf/Conseil, T‑383/11, non encore publié au Recueil, point 60, et la jurisprudence citée).

58      Selon une jurisprudence également constante, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle (voir arrêt Makhlouf/Conseil, précité, point 61, et la jurisprudence citée).

59      Dans la mesure où la personne ou l’entité concernée ne dispose pas d’un droit d’audition préalable à l’adoption d’une décision initiale de gel de fonds et de ressources économiques, le respect de l’obligation de motivation est d’autant plus important, puisqu’il constitue l’unique garantie permettant à l’intéressé, à tout le moins après l’adoption de cette décision, de se prévaloir utilement des voies de recours à sa disposition pour contester la légalité de ladite décision (voir arrêt Makhlouf/Conseil, précité, point 62, et la jurisprudence citée).

60      Partant, la motivation d’un acte du Conseil imposant une mesure de gel de fonds et de ressources économiques doit identifier les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles celui-ci considère, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire d’appréciation, que l’intéressé doit faire l’objet d’une telle mesure (voir arrêt Makhlouf/Conseil, précité, point 63, et la jurisprudence citée).

61      Cependant, l’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires peuvent avoir à recevoir des explications (voir arrêt Makhlouf/Conseil, précité, point 64, et la jurisprudence citée).

62      Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêts du Tribunal du 8 septembre 2010, Deltafina/Commission, T‑29/05, Rec. p. II‑4077, point 319, et Makhlouf/Conseil, précité, point 65, et la jurisprudence citée).

63      En particulier, un acte faisant grief est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir arrêt Makhlouf/Conseil, précité, point 66, et la jurisprudence citée).

64      En l’espèce et en premier lieu, s’agissant de la connaissance par le requérant du contexte général dans lesquelles les mesures restrictives en cause ont été imposées, il convient de relever que les trois premiers considérants de la décision 2011/273, telle que modifiée par la décision 2011/522, exposent clairement les motifs généraux de l’adoption des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie par l’Union, en indiquant ce qui suit :

« 1      Le 29 avril 2011, l’Union européenne a exprimé sa profonde préoccupation face à la situation actuelle en Syrie et au déploiement d’unités militaires et de forces de sécurité dans un certain nombre de villes du pays.

2      L’Union condamne fermement la répression violente, y compris par l’usage des tirs à balles réelles, des manifestations pacifiques en divers endroits dans toute la Syrie, qui s’est traduite par la mort de plusieurs manifestants, par des blessés et par des détentions arbitraires. Elle lance un appel aux autorités syriennes pour qu’elles s’abstiennent de recourir à la répression.

3      Compte tenu de la gravité de la situation, il convient d’instituer des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et des personnes responsables de la répression violente exercée contre la population civile syrienne. »

65      De plus, selon l’article 4 de la décision 2011/273 tel que modifié par la décision 2011/522, « sont gelés tous les fonds et ressources économiques qui appartiennent à des personnes responsables de la répression violente exercée contre la population en Syrie, à des personnes et entités bénéficiant des politiques menées par le régime ou soutenant celui-ci et aux personnes et entités qui leur sont liés, dont la liste figure à l’annexe, de même que tous les fonds et ressources qu’elles possèdent, détiennent ou contrôlent ».

66      Il ressort de la jurisprudence qu’il peut être présumé que le contexte général auquel font référence les actes attaqués antérieurs au 23 mars 2012 était connu des personnalités importantes de la société syrienne (voir, en ce sens, arrêt Makhlouf/Conseil, précité). Or, en l’espèce, le requérant est, ainsi qu’il ressort des pièces du dossier et de ses propres déclarations, un homme d’affaires important en Syrie.

67      En outre, contrairement à ce que le requérant soutient, les critères généraux en cause ne sont ni vagues ni imprécis. En effet, même si ces critères laissent une certaine marge d’appréciation au Conseil en ce qui concerne leur application, ils ne sont pas arbitraires dans la mesure où ils se limitent à viser les personnes responsables de la répression contre la population civile en Syrie, les personnes et entités bénéficiant des politiques menées par le régime syrien et les personnes et entités qui soutiennent financièrement ou logistiquement ledit régime, ainsi que les personnes et entités qui leur sont liées.

68      En deuxième lieu, s’agissant du contexte spécifique de l’inscription du nom du requérant sur les listes annexées aux actes attaqués antérieurs au 23 mars 2012, le Conseil s’est fondé sur les deux motifs suivants: « Fondateur du groupe Akhras (matières premières, commerce, transformation et logistique), Homs » et « Apporte un soutien économique au régime syrien ».

69      Concernant le premier motif, il convient de relever qu’il vient uniquement décrire la qualité de requérant. En effet, le fait d’être le fondateur d’un groupe industriel n’implique pas nécessairement ou automatiquement que le requérant remplisse les critères généraux précisés au point 67 ci-dessus. Dès lors, l’indication que le requérant est le fondateur d’un groupe industriel syrien ne saurait constituer une circonstance de nature à motiver de manière suffisante et spécifique les actes attaqués antérieurs au 23 mars 2012.

70      Concernant le second motif, il convient de constater que, en l’espèce, le Conseil s’est contenté de reprendre l’un des critères permettant de justifier l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause, à savoir le critère relatif au soutien au régime en place, tel qu’introduit par la décision 2011/522 (voir point 5 ci-dessus). Cette stricte reprise, sans autre information permettant de la confirmer, ne saurait constituer une motivation suffisante de la part du Conseil.

71      Il ressort de ce qui précède que le Conseil n’a pas satisfait à l’obligation de motivation lui incombant en vertu de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE.

72      Il convient dès lors d’accueillir le troisième moyen et d’annuler, pour défaut de motivation, les actes attaqués antérieurs au 23 mars 2012, pour autant que ces actes concernent le requérant. Il n’est dès lors plus nécessaire d’examiner les autres moyens en tant qu’ils sont avancés à l’appui du recours contre ces actes.

73      Les actes attaqués antérieurs au 23 mars 2012 ayant été modifiés ou abrogés par la décision d’exécution 2012/172 (voir point 15 ci-dessus) et le règlement d’exécution n° 266/2012 (voir point 16 ci-dessus), il n’y a pas lieu de se prononcer sur les effets de l’annulation dans le temps.

 Sur les autres actes attaqués

–       Sur la première branche, relative à l’absence de notification individuelle

74      Le requérant fait valoir que le Conseil a violé les formes substantielles en ne lui notifiant pas les autres actes attaqués, alors que cette obligation est imposée par le cadre réglementaire et par la jurisprudence du Tribunal.

75      Le requérant conteste également l’argument du Conseil selon lequel la notification ne pouvait être envoyée à son adresse professionnelle, afin d’éviter qu’elle ne soit ouverte par un subordonné. Selon le requérant, une telle interprétation serait toutefois moins préjudiciable que la découverte du fait que son nom est inscrit sur les listes en cause par l’intermédiaire de la télévision syrienne.

76       À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence constante, le respect des droits de la défense, qui est consacré à l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, comporte le droit d’être entendu et le droit d’accès au dossier dans le respect des intérêts légitimes de la confidentialité (arrêt de la Cour du 18 juillet 2013, Commission e.a./Kadi, C‑584/10 P, C‑593/10 P et C‑595/10 P, non encore publié au Recueil, ci-après l’« arrêt Kadi II », point 99 et la jurisprudence citée).

77      Quant au droit à une protection juridictionnelle effective, qui est affirmé à l’article 47 de la charte des droits fondamentaux, il exige que l’intéressé puisse connaître les motifs sur lesquels est fondée la décision prise à son égard soit par la lecture de la décision elle-même, soit par une communication de ces motifs faite à sa demande, afin de lui permettre de défendre ses droits dans les meilleures conditions possibles et de décider en pleine connaissance de cause s’il est utile de saisir le juge compétent ainsi que pour mettre ce dernier pleinement en mesure d’exercer le contrôle de la légalité de la décision en cause (voir, en ce sens, arrêt Kadi II, point 100, et la jurisprudence citée).

78      L’article 52, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux admet toutefois des limitations à l’exercice des droits consacrés par celle-ci, pour autant que la limitation concernée respecte le contenu essentiel du droit fondamental en cause et que, dans le respect du principe de proportionnalité, elle soit nécessaire et réponde effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union (voir arrêt Kadi II, point 101, et la jurisprudence citée).

79      En outre, l’existence d’une violation des droits de la défense et du droit à une protection juridictionnelle effective doit être appréciée en fonction des circonstances spécifiques de chaque cas d’espèce, notamment de la nature de l’acte en cause, du contexte de son adoption et des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêt Kadi II, point 102).

80      S’agissant des droits de la défense d’une personne ayant fait l’objet de mesures restrictives, le juge de l’Union distingue, d’une part, l’inscription initiale du nom d’une personne ou d’une entité sur une liste imposant des mesures restrictives et, d’autre part, le maintien du nom de cette personne ou de cette entité sur ladite liste par des décisions ultérieures.

81      Ainsi, s’agissant des actes consistant à maintenir le nom de la personne concernée sur la liste en cause, comme c’est le cas en l’espèce, l’autorité compétente de l’Union est tenue de communiquer à cette personne, préalablement à l’adoption de cette décision, les éléments dont dispose cette autorité à son égard pour fonder sa décision, et ce afin que cette personne puisse défendre ses droits (voir, en ce sens, arrêt Kadi II, points 111 et 112).

82      En l’espèce, l’article 21 de la décision 2011/782, l’article 15, paragraphe 3, du règlement nº 36/2012 et l’article 30, paragraphe 2, de la décision 2013/255 prévoient en substance que le Conseil doit communiquer sa décision à la personne ou à l’entité concernée, y compris les motifs de l’inscription ou du maintien de son nom sur les listes en cause, soit directement, si son adresse est connue, soit par la publication d’un avis, en lui donnant la possibilité de présenter des observations.

83      À ce titre, il convient de rappeler que le Conseil n’est pas libre de choisir arbitrairement le mode de communication de ses décisions aux personnes intéressées. Il ressort en effet du point 61 de l’arrêt du 23 avril 2013, Gbagbo e.a./Conseil (C‑478/11 P à C‑482/11 P, non encore publié au Recueil), que la Cour a entendu permettre une communication indirecte des actes dont l’annulation est demandée par la publication d’un avis au Journal officiel dans les seuls cas où il est impossible pour le Conseil de procéder à une notification.

84      En l’espèce, concernant la décision d’exécution 2012/172 et le règlement d’exécution n° 266/2012, il convient de constater qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que le Conseil disposait de l’adresse personnelle du requérant et qu’il ne pouvait donc pas notifier individuellement à ce dernier le maintien de son nom sur les listes en cause par lesdits actes.

85      De plus, c’est à tort que le requérant fait valoir que le Conseil aurait dû notifier le maintien de son nom sur les listes en cause à son adresse professionnelle. En effet, compte tenu du fait que les mesures restrictives interviennent dans des domaines présentant, le plus souvent, un haut degré de sensibilité, il convient de constater que les conséquences de telles mesures seraient plus dommageables si la notification de l’inscription ou du maintien du nom du requérant sur de telles listes était effectuée à son adresse professionnelle, et était donc susceptible d’être reçue par des tiers, que si elle était effectuée à son adresse personnelle ou à celle de son conseil.

86      Il ressort des dispositions des autres actes attaqués et de la jurisprudence rappelées ci-dessus que la notification pouvait valablement se faire par le biais d’un avis publié au Journal officiel. Ainsi qu’il a été rappelé au point 17, le Conseil a publié un avis au Journal officiel concernant la décision d’exécution 2012/172 et le règlement d’exécution n° 266/2012, le 24 mars 2012.

87      Dès lors, dans la mesure où le Conseil ne disposait pas de l’adresse personnelle du requérant à la date d’adoption de la décision d’exécution 2012/172 et du règlement d’exécution n° 266/2012, il ne saurait lui être reproché d’avoir violé son obligation de notification concernant lesdits actes.

88      Concernant la décision 2012/739, la décision d’exécution 2013/185, le règlement d’exécution n° 363/2013, la décision 2013/255, la décision d’exécution 2014/730 et le règlement d’exécution n° 1105/2014, il ressort des pièces du dossier que le Conseil a fait parvenir plusieurs notifications de ces actes respectivement en date du 30 novembre 2012, du 13 mai, du 13 juin 2013 et 22 juillet 2014, l’informant du maintien de son nom sur les listes annexées aux actes en cause à l’adresse du conseil du requérant et non à l’adresse personnelle de ce dernier en Syrie. Cette notification à l’adresse du conseil est contraire aux dispositions rappelées au point 82 ci-dessus.

89      Toutefois, il convient de noter que l’absence de notification individuelle des actes attaqués, si elle a une incidence sur le moment auquel le délai de recours a commencé à courir, ne justifie pas, à elle seule, l’annulation des actes en question. À cet égard, le requérant n’invoque pas d’arguments tendant à démontrer que, dans le cas d’espèce, cette absence a eu pour conséquence une atteinte à ses droits qui justifierait l’annulation de ces derniers pour autant qu’ils le concernent (voir, en ce sens, arrêt du 6 septembre 2013, Bank Melli Iran/Conseil, T‑35/10 et T‑7/11, Rec, EU:T:2013:397, points 112 et 113). De plus, l’existence d’une telle atteinte ne ressort pas des éléments du dossier. Enfin, il convient de constater que le requérant a été en mesure d’adapter ses conclusions en demandant également l’annulation des actes susmentionnés. Par conséquent, l’absence de notification des actes maintenant l’inscription du nom du requérant ne constitue pas une violation de ses droits de la défense.

90      Il s’ensuit que la première branche du troisième moyen n’est pas fondée.

–       Sur la troisième branche, relative à la violation des droits de la défense

91      En substance, le requérant fait valoir que le Conseil a violé son droit à une protection juridictionnelle effective en ne lui communiquant pas le dossier administratif le concernant. À ce titre, le requérant considère qu’il n’était pas en mesure d’être informé des éléments susceptibles d’être retenus à sa charge et de se défendre. Il reproche notamment au Conseil de ne pas s’être acquitté spontanément de cette obligation.

92      Ainsi qu’il a été rappelé au point 77 ci-dessus, le droit à une protection juridictionnelle effective est un droit garanti par la charte des droits fondamentaux et comprend notamment le droit pour le requérant de connaître les motifs sur lesquels est fondée la décision prise à son égard.

93      Toutefois, contrairement à ce que soutient le requérant, il convient de souligner que ce n’est que sur demande de l’intéressé que le Conseil est tenu de lui donner accès aux documents administratifs non confidentiels concernant la mesure en cause (arrêt de la Cour du 16 novembre 2011, Bank Melli Iran/Conseil, C‑548/09 P, Rec. p. I‑11381, point 92).

94      En l’espèce, une telle possibilité est expressément prévue à cet effet par le cadre réglementaire. Ainsi, il convient de relever que l’article 21, paragraphes 2 et 3, de la décision 2011/782, l’article 32, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 36/2012 et l’article 30, paragraphes 2 et 3, de la décision 2013/255 prévoient, d’une part, que le Conseil informe les personnes de l’inscription de leur nom sur les listes en cause et des motifs la fondant et, d’autre part, que, si des observations sont formulées, ou si de nouveaux éléments de preuve substantiels sont présentés, le Conseil revoie sa décision et en informe la personne ou l’entité concernée. Toutefois, le délai dans lequel le Conseil doit répondre à de telles observations n’est pas spécifiquement prévu.

95      Il ressort des pièces du dossier que le Conseil a communiqué au requérant, par sa lettre du 21 décembre 2011, les éléments de son dossier qui, selon lui, justifiaient le maintien de l’inscription du nom de ce dernier sur les listes de personnes et entités visées par les mesures restrictives en cause. Cette communication a permis au requérant de réagir à la position du Conseil et à faire valoir son point de vue. En effet, le requérant a fait plusieurs fois usage de cette procédure, notamment par l’envoi de lettres les 16 janvier et 6 mars 2012, dans lesquelles il contestait le maintien de son nom sur les listes annexées aux autres actes attaqués, formulait certaines observations et demandait au Conseil de lui transmettre les éléments de preuve justifiant ce maintien. Le Conseil a accusé réception de ces observations par sa lettre du 16 mars 2012 et a fait savoir au requérant qu’elles ne suscitaient pas de réaction de sa part autre qu’un renvoi à son mémoire en défense dans la présente affaire. Le Conseil a également précisé, le 27 mars suivant, que le requérant avait bien reçu accès aux pièces du dossier.

96      Par conséquent, s’il est vrai que les réactions du Conseil aux observations et demandes du requérant sont particulièrement succinctes, il n’en demeure pas moins que le requérant a eu accès aux éléments sommaires dont disposait le Conseil et qu’il a pu faire valoir son point de vue. Il n’y a donc pas lieu de considérer que le Conseil a violé le droit à une protection juridictionnelle effective du requérant. Dès lors, il y a lieu de rejeter la troisième branche du troisième moyen.

–       Sur la deuxième branche, relative au défaut de motivation

97      Le requérant fait valoir que le Conseil devait lui fournir des raisons précises et détaillées et non se contenter de faire référence à des indications vagues et générales. De même, le requérant reproche au Conseil de n’avoir pas établi en quoi son comportement était susceptible de motiver l’inscription de son nom sur les listes en cause.

98      Ainsi qu’il a été rappelé aux points 57 à 63 ci-dessus, l’obligation de motivation constitue une obligation substantielle à la charge du Conseil dont le non-respect est susceptible d’entraîner l’annulation des autres actes attaqués.

99      En l’espèce, premièrement, les motifs généraux de l’adoption par l’Union des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie sont les mêmes que ceux rappelés au point 64 ci-dessus.

100    Ainsi qu’il a été démontré aux points 66 et 67 ci-dessus, le requérant ne pouvait ignorer le contexte général auquel font référence les autres actes attaqués.

101    Deuxièmement, concernant les motifs spécifiques de l’inscription, il convient de rappeler que le Conseil a modifié par deux fois le contenu de la motivation de l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause.

102    Dans la décision d’exécution 2012/172, le règlement d’exécution n° 266/2012, la décision 2012/739, la décision d’exécution 2013/185, le règlement d’exécution n° 363/2013 et la décision 2013/255, ladite motivation se fondait sur les cinq motifs suivants : « Homme d’affaires important bénéficiant du régime et soutenant celui-ci », « Fondateur du groupe Akhras (matières premières, commerce, transformation et logistique) et ancien président de la Chambre de commerce d’Homs », « Relations professionnelles étroites avec la famille du président Al-Assad », « Membre du conseil d’administration de la fédération des chambres de commerce syriennes » et « A fourni des locaux industriels et d’habitation pour servir de camps de détention improvisés, ainsi qu’un appui logistique au régime (autobus et véhicules de transport de chars) ».

103    Dans la décision d’exécution 2014/730 et le règlement d’exécution n° 1105/2014, ladite motivation se fonde désormais sur les cinq motifs suivants : « Homme d’affaires important bénéficiant du régime et soutenant celui-ci », « Fondateur du groupe Akhras (matières premières, commerce, transformation et logistique) et ancien président de la Chambre de commerce d’Homs », « Relations professionnelles étroites avec la famille du président Al-Assad », « Membre du conseil d’administration de la fédération des chambres de commerce syriennes » et « A fourni un soutien logistique au régime (autobus et véhicules de transport de chars) »

104    Il convient de constater que, concernant les deux motivations mentionnées aux points 102 et 103 ci-dessus, lesquelles sont quasi identiques, les cinq motifs invoqués sont suffisamment clairs et précis au sens de la jurisprudence dans la mesure où le requérant a la possibilité de contester chacun d’eux. En effet, ils font état des importantes fonctions que le requérant occupe dans le monde des affaires syrien, de ses liens avec le responsable principal de la répression en Syrie et du type de soutien que le requérant est censé avoir fourni au régime. Le requérant a donc eu l’opportunité de comprendre les raisons pour lesquelles son nom avait été inscrit sur les listes en cause et d’en contester soit la réalité, soit la pertinence, ainsi qu’il ressort de son argumentation dans le cadre du premier moyen.

105    Par conséquent, la motivation retenue par le Conseil suffit à satisfaire l’obligation de motivation lui incombant en vertu de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE.

106    Dès lors, la deuxième branche du troisième moyen doit être rejetée, et partant, ce moyen dans son ensemble, en ce qu’il concerne les autres actes attaqués.

 Sur le premier moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation

107    En substance, le requérant se fonde sur deux arguments pour faire valoir que le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation. D’une part, il considère que le Conseil n’a apporté aucune preuve quant au fait qu’il apporte un soutien économique au régime. D’autre part, il fait valoir que le Conseil n’a pas démontré qu’il remplissait les critères de fond justifiant l’inscription de son nom sur les listes annexées aux autres actes attaqués.

108    Avant d’examiner ces arguments, il convient de préciser la charge de la preuve qui incombait au Conseil pour justifier l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause.

 Sur la charge de la preuve

109    Il ressort des considérants 3 et 4 de la décision 2011/782, à laquelle fait référence le règlement n° 36/2012, que, les mesures restrictives adoptées dans la décision 2011/273 n’ayant pas permis de mettre fin à la répression du régime syrien contre la population civile syrienne, le Conseil a considéré qu’il y avait lieu d’appliquer lesdites mesures à d’autres personnes et entités profitant du régime ou appuyant celui-ci, en particulier à celles qui finançaient le régime ou qui lui apportaient un soutien logistique, notamment à son appareil de sécurité, ou qui compromettaient les efforts visant à assurer une transition pacifique vers la démocratie (voir point 12 ci-dessus). Ainsi, la décision 2011/782 a confirmé l’extension des mesures restrictives issue de la décision 2011/522 aux principaux entrepreneurs syriens, le Conseil considérant que les dirigeants des principales entreprises syriennes pouvaient être qualifiés de personnes associées au régime syrien, les activités commerciales desdites entreprises ne pouvant prospérer à moins de bénéficier des faveurs dudit régime et de lui apporter en retour un certain soutien. En procédant de la sorte, le Conseil a entendu faire application d’une présomption de soutien au régime syrien à l’encontre des dirigeants des principales entreprises de Syrie.

110    En l’espèce, il ressort des pièces du dossier que le Conseil a fait application, à l’égard du requérant, d’une présomption de soutien au régime syrien notamment en raison de ses qualités d’ancien président de la chambre de commerce de Homs et de membre du conseil d’administration de la fédération des chambres de commerce syriennes.

111    Il importe de vérifier si, en procédant de la sorte, le Conseil a commis une erreur de droit quant à la charge de la preuve qui lui incombait.

112    Premièrement, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, les institutions peuvent faire usage de présomptions qui reflètent la possibilité pour l’administration ayant la charge de la preuve de tirer des conclusions en se fondant sur les règles d’expérience commune découlant du déroulement normal des choses (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 13 septembre 2013, Anbouba/Conseil, T-563/11, non publié au Recueil, point 35).

113    Deuxièmement, s’agissant de décisions en matière de gel des fonds, selon la jurisprudence, l’utilisation de présomptions n’est pas exclue dès lors que celles-ci ont été prévues par les autres actes attaqués et qu’elles répondent à l’objectif de la réglementation en cause (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 13 mars 2012, Tay Za/Conseil, C‑376/10 P, non encore publié au Recueil, point 69).

114    Eu égard à ces principes, il convient d’examiner si la présomption instaurée en l’espèce par le Conseil répond à l’objectif de la réglementation en cause, si elle est proportionnée au but poursuivi par ce dernier, si elle est réfragable et si elle préserve les droits de la défense du requérant.

115    Tout d’abord, il ressort des considérants 2 et 3 de la décision 2011/782 que le Conseil a pour objectif de mettre fin à la répression exercée par le président syrien Bachar Al-Assad et son régime contre leur propre population. Afin d’atteindre cet objectif, le Conseil a décidé d’appliquer des mesures restrictives de nature conservatoire à toutes les personnes et entités profitant du régime ou soutenant celui-ci, en particulier à celles qui financent le régime ou lui apportent un soutien logistique, en présumant que les dirigeants des principales entreprises de Syrie pouvaient être qualifiés de personnes associées au régime syrien. Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que des considérations impérieuses touchant à la sûreté ou à la conduite des relations internationales de l’Union et de ses États membres peuvent s’opposer à la communication de certains éléments de preuve aux intéressés (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, C‑402/05 P et C‑415/05 P, Rec. p. I‑6351, point 342). Compte tenu de l’importance et de la nature des objectifs poursuivis, la présomption utilisée par le Conseil, qui permet en principe de répondre auxdits objectifs, apparaît comme proportionnée.

116    Ensuite, compte tenu de la nature autoritaire du régime syrien et du contrôle étroit exercé par l’État sur l’économie syrienne, le Conseil pouvait prendre en compte, à juste titre, comme constituant une règle d’expérience commune le fait que les activités des principaux hommes d’affaires de Syrie, actifs dans de nombreux secteurs, n’avaient pas pu prospérer à moins que ceux-ci n’aient bénéficié des faveurs dudit régime et que ce dernier leur ait apporté en retour un certain soutien.

117    Enfin, il convient de constater que cette présomption est réfragable. En effet, ainsi qu’il l’a été rappelé au point 82 ci-dessus, l’article 21 de la décision 2011/782 et l’article 15, paragraphe 3, du règlement nº 36/2012 prévoient que le Conseil communique sa décision à la personne ou à l’entité concernée, y compris les motifs de l’inscription de son nom sur les listes en cause, soit directement, si son adresse est connue, soit par la publication d’un avis, en lui donnant la possibilité de présenter des observations. Les personnes visées par les mesures restrictives demeurent ainsi libres de réfuter ladite présomption. À ce titre, elles peuvent notamment démontrer soit qu’elles n’appartiennent pas à la catégorie des principaux hommes d’affaires de Syrie, soit qu’elles se sont publiquement distanciées du régime ou qu’elles l’ont publiquement condamné.

118    En outre, ainsi qu’il a été démontré aux points 74 à 106, les autres actes attaqués ont été adoptés dans le respect des droits de la défense du requérant.

119    Dès lors, il ressort de ce qui précède que le Conseil n’a pas commis d’erreur de droit en considérant qu’il pouvait s’acquitter de sa charge de la preuve en se fondant sur la présomption que les principaux hommes d’affaires apportaient un soutien économique au régime syrien.

 Sur le bien-fondé de l’inscription du nom du requérant sur les listes en cause

120    Le requérant fait valoir que les critères de fond justifiant son inclusion sur les listes annexées aux autres actes attaqués, notamment, son prétendu soutien économique au régime syrien, ne sont pas satisfaits. Tout d’abord, selon lui, il n’est pas responsable de la répression, il ne bénéficie pas du régime ni ne le soutient et il n’est associé à aucune personne responsable de la répression ou bénéficiant du régime. Le requérant soutient que le régime a, au contraire, entravé son développement économique. À cet égard, il considère notamment que son éviction de la chambre de commerce d’Homs est la preuve qu’il ne soutient pas le régime.

121    En outre, le requérant soutient qu’il n’est aucunement lié à une personne responsable de la répression, bénéficiant du régime ou le soutenant. À ce titre, le fait que la fille de son cousin soit l’épouse de l’actuel président syrien constituerait un lien trop éloigné avec les dirigeants syriens pour qu’il puisse être considéré comme leur étant lié. De plus, il n’entretiendrait plus de relations suivies avec son cousin depuis environ 25 ans.

122    Enfin, le requérant conteste l’affirmation du Conseil selon laquelle il aurait fourni au régime des locaux pour servir de camps de détention improvisés ou loué des autobus et des véhicules de transports de chars.

123    Le requérant en déduit que le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation dans l’analyse juridique des critères justifiant l’inscription de son nom sur les listes en cause.

124    Le Conseil, soutenu par la Commission, conteste les arguments du requérant.

125    À titre liminaire, il convient de rappeler que l’effectivité du contrôle juridictionnel garantie par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux exige notamment que, au titre du contrôle de la légalité des motifs sur lesquels est fondée la décision d’inscrire ou de maintenir le nom d’une personne déterminée sur les listes, le juge de l’Union s’assure que cette décision repose sur une base factuelle suffisamment solide. Cela implique une vérification des faits allégués dans l’exposé des motifs qui soutien ladite décision, de sorte que le contrôle juridictionnel ne soit pas limité à l’appréciation de la vraisemblance abstraite des motifs invoqués, mais porte sur le point de savoir si ces motifs, ou, à tout le moins, l’un d’eux, considéré comme suffisant en soi pour soutenir cette même décision, sont étayés (arrêt Kadi II, point 119).

126    Toutefois, ainsi qu’il a été rappelé aux points 109 à 119 ci-dessus, s’agissant de décisions en matière de gel des fonds, selon la jurisprudence, l’utilisation de présomptions n’est pas exclue dès lors que celles-ci ont été prévues par les autres actes attaqués et qu’elles répondent à l’objectif de la réglementation en cause (arrêt Tay Za/Conseil, précité, point 69)

127    En l’espèce, les autres actes attaqués mentionnent notamment que le requérant est l’ancien président de la chambre de commerce d’Homs et qu’il entretient des relations professionnelles étroites avec la famille du président Al-Assad. Il est également membre du conseil d’administration de la fédération des chambres de commerce syriennes. Ainsi que le relève, à juste titre, le Conseil, le requérant est un homme d’affaires important qui fait partie de la classe économique dirigeante en Syrie. La condition d’homme d’affaires et ses postes de direction dans les réseaux d’entrepreneurs syriens tels que les chambres de commerce, ainsi que son rôle de représentation des entrepreneurs syriens, est un fait indéniable que, par ailleurs, le requérant ne conteste pas.

128    Ces éléments permettaient ainsi au Conseil de présumer, conformément aux principes évoqués ci-dessus (voir points 109 à 119), que le requérant apportait un soutien au régime ou en bénéficiait. Il convient donc d’examiner si le requérant a mis en avant des arguments susceptibles de réfuter cette présomption.

129    Premièrement, le requérant affirme que le journal qu’il a fondé en 2008 a été arrêté définitivement en juillet 2011, après intervention du ministre de l’Information syrien. Toutefois, le requérant ne démontre pas en quoi cette fermeture a eu une influence sur la prospérité de ses affaires ni en quoi le journal qu’il possédait pouvait être considéré comme un journal d’opposition au régime. En outre, quand bien même ce journal n’aurait guère été favorable au régime, sa fermeture ne semble avoir eu aucune incidence sur les affaires du requérant, suggérant que celui-ci pouvait se permettre une certaine liberté de ton à l’égard du régime.

130    Deuxièmement, le requérant fait valoir que le contrat de bail qu’il avait signé avec le port de Tartous (Syrie) a été brutalement résilié en 2003 sur ordre du ministère de la Défense. Néanmoins, le requérant ne saurait se fonder sur un évènement unique, datant d’une dizaine d’années, pour démontrer qu’il ne tirait pas bénéfice du régime. À ce titre, le requérant ne démontre pas qu’il s’est vu refuser des contrats ultérieurs, que d’autres contrats auxquels il était partie aient été résiliés ou les conséquences à long terme de cette résiliation.

131    Troisièmement, le requérant soutient qu’il n’a pas été réélu à la présidence de la chambre de commerce de Homs, car le pouvoir en place aurait appuyé un autre candidat. Toutefois le requérant n’a pas précisé si cette éviction était intervenue contre son gré ou s’il s’y était opposé. Par ailleurs, le requérant ne produit aucun document à l’appui de ses affirmations.

132    En outre, il ressort des pièces du dossier que le requérant est toujours membre du conseil d’administration de la fédération des chambres de commerce de Syrie. Or, sa fonction au sein d’un tel organisme, dont le but est notamment de promouvoir l’économie syrienne et le développement de ses entreprises, ne peut s’expliquer que par une certaine proximité avec le régime en place, comme en témoigne la circonstance, évoquée par le requérant lui-même, que les positions dirigeantes au sein des chambres de commerce dépendent de l’aval du pouvoir en place.

133    Dès lors, le requérant n’a apporté aucun élément susceptible de renverser la présomption appliquée par le Conseil.

134    Dans la mesure où, conformément à la jurisprudence rappelée au point 125 ci-dessus, il suffit qu’un seul des motifs fondant les autres actes attaqués soit valable pour justifier la légalité de ces actes et où, en l’espèce, au moins deux des cinq motifs invoqués par le Conseil (voir points 129 à 132 ci-dessus) sont justifiés, il n’y a plus lieu de se prononcer sur le bien-fondé des trois autres motifs invoqués par le Conseil.

135    Partant, il y a lieu de rejeter le premier moyen en tant qu’il est présenté à l’encontre des autres actes attaqués.

 Sur le deuxième moyen, relatif à la violation des droits fondamentaux et notamment du droit à la vie, du droit à une vie familiale et du droit de propriété ainsi qu’à la violation du principe de proportionnalité

136    Premièrement, le requérant soutient que, lorsqu’une mesure de gel de fonds est adoptée sans aucune garantie réelle permettant à la partie requérante d’exposer sa cause aux autorités compétentes, une telle mesure est considérée comme une atteinte disproportionnée aux droits fondamentaux au respect de la propriété et de la vie privée.

137    Deuxièmement, le requérant soutient que l’inclusion de son nom sur les listes annexées aux autres actes attaqués aurait eu des conséquences « désastreuses » pour lui et ses proches, qui auraient fait l’objet de menaces de mort, d’actes de violence et de tentatives d’assassinat. Ces actes trouveraient leur cause dans sa désignation dans les autres actes attaqués et menaceraient sa vie et celle de sa famille. Ce risque pour la vie devrait forcer le Conseil à faire preuve d’un haut degré de vigilance et de transparence à l’heure de présenter au Tribunal des preuves particulièrement convaincantes afin de justifier sa désignation dans les autres actes attaqués. La seule désignation causée par la proposition d’un État membre ne saurait être valide. De plus, le Conseil n’aurait pris aucune mesure d’ordre administratif pour protéger le droit à la vie du requérant, malgré les communications au Conseil adressées par ce dernier relatives aux menaces et aux actes violents subis. L’adoption de telles mesures serait, selon le requérant, la conséquence de l’obligation de réviser les décisions lorsque des observations sont formulées ou que de nouveaux éléments de preuve substantielle sont présentés. À ce titre, le requérant considère que le Conseil doit être considéré comme responsable des conséquences de l’inscription de son nom sur les listes en cause.

138    Troisièmement, la désignation du requérant aurait détruit sa réputation personnelle ainsi que celle de son groupe d’entreprises.

139    Quatrièmement, le requérant considère que les mesures de gel de fonds portent atteinte à son droit de propriété dans la mesure où il n’a plus accès à une part importante de ses biens. Selon lui, il en est de même concernant sa liberté d’aller et venir.

140    Cinquièmement, le requérant soutient que la violation du principe de proportionnalité résulte du fait qu’il n’a pas bénéficié d’une occasion adéquate d’exposer sa cause aux autorités compétentes, étant donné que le Conseil ne lui a pas fourni les informations ou les éléments de preuve sur lesquels il s’est fondé ou dont il a tenu compte aux fins de son inscription, et qu’il ne l’a pas mis en position de formuler des observations « effectives ».

141    Le Conseil, soutenu par la Commission, conteste les arguments du requérant.

142    En premier lieu, concernant l’atteinte supposée au droit à la vie, il convient de constater que le requérant n’apporte aucun élément concret au soutien de cette affirmation ni quant au lien entre le risque d’atteinte au droit à la vie et son inscription sur les listes en cause. À ce titre, l’atteinte au droit à la vie dont se prévaut le requérant est principalement la conséquence de la situation en Syrie et non des actes de l’Union relatifs aux mesures restrictives prises à son égard.

143    En second lieu, il convient tout d’abord de rappeler que le principe de proportionnalité fait partie des principes généraux du droit de l’Union et exige que les moyens mis en œuvre par une disposition du droit de l’Union soient aptes à réaliser les objectifs légitimes poursuivis par la réglementation concernée et n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire pour les atteindre (arrêt Makhlouf/Conseil, précité, point 98). Par ailleurs, le droit de propriété fait partie des principes généraux du droit de l’Union et se trouve consacré par l’article 17 de la charte des droits fondamentaux. Enfin, en ce qui concerne le droit au respect de la vie privée, l’article 7 de la charte reconnaît le droit au respect de la vie privée et familiale (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 6 décembre 2012, O et S, C‑356/11 et C‑357/11, non encore publié au Recueil, point 76).

144    À ce titre, le respect des droits fondamentaux constitue une condition de la légalité des actes de l’Union. Or, selon une jurisprudence constante, ces droits fondamentaux ne jouissent pas, en droit de l’Union, d’une protection absolue, mais doivent être pris en considération au regard de leur fonction dans la société. Par conséquent, des restrictions peuvent être apportées à l’usage de ces droits, à condition que ces restrictions répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union et ne constituent pas, au regard du but poursuivi, une intervention démesurée et intolérable qui porterait atteinte à la substance même des droits ainsi garantis (arrêt Makhlouf/Conseil, précité, point 97).

145    Il a déjà été considéré que, lorsqu’un acte imposant des mesures restrictives a été adopté sans fournir aucune garantie réelle permettant à l’intéressé d’exposer sa cause aux autorités compétentes, l’imposition de telles mesures constitue une restriction injustifiée de son droit (voir, en en ce sens et par analogie, arrêt de la Cour du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, C‑402/05 P et C‑415/05 P, Rec. p. I‑6351, points 369 et 370).

146    En troisième lieu, il convient de rappeler que, si, selon une jurisprudence constante, le droit de propriété est garanti par l’article 17 de la charte des droits fondamentaux, il ne jouit pas, en droit de l’Union, d’une protection absolue, mais doit être pris en considération au regard de sa fonction dans la société. Par conséquent, des restrictions peuvent être apportées à l’usage de ce droit, à condition que ces restrictions répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union et ne constituent pas, au regard du but poursuivi, une intervention démesurée et intolérable qui porterait atteinte à la substance même du droit ainsi garanti (voir arrêt Makhlouf/Conseil, précité, point 97, et la jurisprudence citée).

147    En l’espèce, premièrement, il convient de constater que l’adoption de mesures restrictives à l’encontre du requérant revêt un caractère adéquat, dans la mesure où elle s’inscrit dans un objectif d’intérêt général aussi fondamental pour la communauté internationale que la protection des populations civiles. En effet, le gel de fonds, d’avoirs financiers et d’autres ressources économiques ainsi que l’interdiction d’entrée sur le territoire de l’Union concernant des personnes identifiées comme étant impliquées dans le soutien du régime syrien ne sauraient, en tant que tels, passer pour inadéquats (voir arrêt Makhlouf/Conseil, précité, point 100, et la jurisprudence citée).

148    Deuxièmement, les mesures en cause revêtent également un caractère nécessaire dès lors que les mesures alternatives et moins contraignantes, telles qu’un système d’autorisation préalable ou une obligation de justification a posteriori de l’usage des fonds versés, ne permettent pas d’atteindre aussi efficacement l’objectif poursuivi, à savoir la lutte contre le financement du régime syrien, notamment eu égard à la possibilité de contourner les restrictions imposées (voir arrêt Makhlouf/Conseil, précité, point 101, et la jurisprudence citée).

149    En outre, les autres actes attaqués comportant les mesures restrictives en cause ont été adoptés en respectant toutes les garanties permettant au requérant d’exercer ses droits de la défense, comme il a déjà été relevé ci-dessus dans l’analyse du troisième moyen.

150    Troisièmement, les autres actes attaqués prévoient la possibilité d’autoriser l’utilisation de fonds gelés pour faire face à des besoins essentiels ou satisfaire à certains engagements, d’accorder des autorisations spécifiques permettant de dégeler des fonds, d’autres avoirs financiers ou d’autres ressources économiques, et de réviser l’inscription sur les listes en cause périodiquement en vue d’assurer que les personnes et entités ne répondant plus aux critères pour y figurer en soient radiées (arrêt Makhlouf/Conseil, précité, point 105).

151    Quatrièmement, concernant l’atteinte au droit à la vie privée, les autres actes attaqués prévoient également que l’autorité compétente d’un État membre peut autoriser l’entrée sur son territoire, notamment pour des raisons urgentes d’ordre humanitaire, ce qui a pour effet de limiter l’atteinte portée au droit à la vie du requérant (arrêt du Tribunal du 12 mars 2014, Al-Assad/Conseil, T‑202/12, non encore publié au Recueil, point 119).

152    Cinquièmement, concernant l’atteinte à sa réputation, il suffit de constater que le requérant n’a apporté aucun élément concret au soutien de cette allégation, ni quant au lien de causalité qui existerait entre cette atteinte et son inscription sur les listes en cause. En outre, concernant l’atteinte à la réputation de son groupe industriel, il convient de rappeler que, si la Cour européenne des droits de l’homme a admis que le droit d’une personne à la protection de sa réputation est couvert par l’article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, en tant qu’élément du droit au respect de la vie privée, elle a également précisé qu’il existait une différence entre l’atteinte à la réputation d’une personne et l’atteinte à la réputation commerciale, cette dernière étant dépourvue de dimension morale (voir Cour eur. D. H., arrêt Uj c. Hongrie du 19 juillet 2011, § 22). Dès lors, c’est à tort que le requérant a invoqué une atteinte à la réputation de son entreprise.

153    Partant, étant donné l’importance primordiale de la protection des populations civiles en Syrie et des dérogations envisagées par les autres actes attaqués, les restrictions au droit de propriété et au droit au respect de la vie privée du requérant causées par ces actes ne sont pas disproportionnées au regard du but poursuivi.

154    Dès lors, il y a lieu de rejeter le présent moyen en tant qu’il est présentée à l’encontre des autres actes attaqués et, partant, le recours en tant qu’il vise à l’annulation de ces actes.

 Sur les dépens

155    L’article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure dispose que le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs de conclusions.

156    En l’espèce, le Conseil ayant succombé sur le chef de conclusions en annulation concernant les actes attaqués antérieurs au 23 mars 2012, pour autant que ces actes concernent le requérant, et le requérant ayant succombé sur le chef de conclusions en annulation concernant les autres actes attaqués, il sera fait une juste application de la disposition précitée en décidant que chaque partie supportera ses propres dépens.

157    Concernant les dépens afférents à la procédure en référé, le requérant supportera ses propres dépens ainsi que ceux du Conseil.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision 2011/522/PESC du Conseil, du 2 septembre 2011, modifiant la décision 2011/273/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie, le règlement (UE) n° 878/2011 du Conseil, du 2 septembre 2011, modifiant le règlement (UE) n° 442/2011 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie, la décision 2011/628/PESC du Conseil, du 23 septembre 2011, modifiant la décision 2011/273/PESC concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie, le règlement (UE) n° 1011/2011 du Conseil, du 13 octobre 2011, modifiant le règlement (UE) n° 442/2011 concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie, la décision 2011/782/PESC du Conseil, du 1er décembre 2011, concernant des mesures restrictives à l’encontre de la Syrie et abrogeant la décision 2011/273/PESC, et le règlement (UE) n° 36/2012 du Conseil, du 18 janvier 2012, concernant des mesures restrictives en raison de la situation en Syrie, et abrogeant le règlement (UE) n° 442/2011, sont annulés pour autant que ces actes concernent M. Tarif Akhras.

2)      Le surplus du recours est rejeté.

3)      Chaque partie supportera ses propres dépens dans le cadre de la présente instance.

4)      M. Akhras supportera ses propres dépens et ceux du Conseil de l’Union européenne dans le cadre de la procédure en référé.

Van der Woude

Wiszniewska-Białecka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 février 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.