Language of document : ECLI:EU:T:2014:194

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

9 avril 2014(*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale OCTASA – Marques nationales verbales antérieures PENTASA – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑501/12,

Farmaceutisk Laboratorium Ferring A/S, établie à Copenhague (Danemark), représentée initialement par Mme I. Fowler, solicitor, Mes A. Renck et J. Fuhrmann, avocats, puis par Mme Fowler, Mes Renck et D. Slopek, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. P. Bullock, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Tillotts Pharma AG, établie à Ziefen (Suisse), représentée par M. T. Alkin, barrister,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la quatrième chambre de recours de l’OHMI du 6 septembre 2012 (affaire R 1214/2011-4), relative à une procédure d’opposition entre le Farmaceutisk Laboratorium Ferring A/S et Tillotts Pharma AG,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. A. Dittrich (rapporteur), président, J. Schwarcz et Mme V. Tomljenović, juges,

greffier : Mme J. Weychert, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 19 novembre 2012,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 14 février 2013,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 27 février 2013,

vu la modification de la composition des chambres du Tribunal,

à la suite de l’audience du 28 novembre 2013,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 20 mars 2009, l’intervenante, Tillotts Pharma AG, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal OCTASA.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 5 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, après la limitation intervenue au cours de la procédure devant l’OHMI, à la description suivante : « Produits et substances pour prévenir et traiter les maladies et troubles du système gastro-intestinal ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 21/2009 du 8 juin 2009.

5        Le 8 septembre 2009, le requérant, le Farmaceutisk Laboratorium Ferring A/S, a formé opposition au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur les marques nationales verbales antérieures PENTASA suivantes :

–        enregistrement autrichien n° 102370 du 4 novembre 1983 désignant, notamment, des « produits pharmaceutiques » compris dans la classe 5 ;

–        enregistrement hongrois n° 136836 du 30 juillet 1993 désignant des « produits pharmaceutiques et principes actifs » compris dans la classe 5 ;

–        enregistrement italien référencé 40977 C/81 du 22 décembre 1981 désignant, notamment, des « produits pharmaceutiques » compris dans la classe 5 ;

–        enregistrement polonais n° 71634 du 31 janvier 1985 désignant des « médicaments pour le traitement des affections auto-immunes » compris dans la classe 5 ;

–        enregistrement slovaque n° 175482 du 18 août 1995 désignant des « produits et substances pharmaceutiques » compris dans la classe 5 ;

–        enregistrement suédois n° 173377 du 29 août 1980 désignant, notamment, des « préparations pharmaceutiques » comprises dans la classe 5 ;

–        enregistrement français n° 1699236 du 15 octobre 1991 désignant, notamment, des « préparations pharmaceutiques » comprises dans la classe 5 ;

–        enregistrement irlandais n° 107207 du 15 décembre 1982 désignant des « produits et substances pharmaceutiques et médicinaux » compris dans la classe 5 ;

–        enregistrement tchèque n° 182567 du 23 janvier 1995 désignant des « produits et substances pharmaceutiques » compris dans la classe 5.

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

8        Le 5 juillet 2010, l’intervenante a demandé à ce que soit rapportée la preuve de l’usage sérieux des marques antérieures.

9        Le 19 avril 2011, tout en rejetant la demande de preuve de l’usage sérieux comme irrecevable, la division d’opposition a rejeté l’opposition.

10      Le 7 juin 2011, le requérant a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

11      Par décision du 6 septembre 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la quatrième chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours. Elle a estimé, en substance, que le requérant avait avancé lui-même que le produit pour lequel il utilisait intensivement et depuis de nombreuses années les marques antérieures PENTASA était un produit pharmaceutique prescrit pour le traitement de maladies du système gastro-intestinal contenant de la mésalazine comme principe actif et que le suffixe « asa » compris dans les signes en conflit serait descriptif par rapport audit principe actif, qui serait également connu sous les dénominations 5-aminosalicylic acid et 5-ASA. Tenant compte du caractère descriptif du suffixe « asa », la chambre de recours a conclu à l’absence de similitude entre les marques PENTASA et OCTASA. Elle a donc considéré qu’une des conditions nécessaires pour constater un risque de confusion faisait défaut.

 Conclusions des parties

12      Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner conjointement l’OHMI et l’intervenante aux dépens.

13      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner le requérant aux dépens.

 En droit

14      À l’appui du recours, le requérant soulève deux moyens, tirés respectivement d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), et de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

15      Il convient d’examiner le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

16      Le requérant fait valoir, en substance, qu’il existe un risque de confusion entre les marques en conflit par rapport aux produits concernés. La prémisse de la chambre de recours selon laquelle le suffixe « asa » est descriptif et largement utilisé pour les produits en cause serait erronée et ne serait pas étayée. Par une décomposition artificielle de chacun des signes en deux éléments verbaux, à savoir, d’une part, « pent » et « asa » et, d’autre part, « oct » et « asa », la chambre de recours aurait méconnu que lesdits signes sont globalement similaires sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

17      L’OHMI et l’intervenante sont, en substance, d’avis que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur dans la comparaison des signes qui seraient visuellement, phonétiquement et conceptuellement dissemblables. Le consommateur prêterait généralement une plus grande attention au début d’une marque qu’à sa fin et, en l’espèce, il serait clair que les débuts des signes, à savoir « pen » et « oc », n’ont rien en commun. Compte tenu des éléments de preuve apportés par le requérant lui-même lors de la procédure administrative, la chambre de recours aurait été fondée à conclure que le suffixe « asa » sera perçu comme descriptif par le public pertinent.

18      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

19      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

20      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

21      Par ailleurs, afin de constater l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, il n’est pas nécessaire de constater que ce risque existe pour la totalité du public visé. Il suffit qu’il existe pour une partie non négligeable dudit public [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 10 novembre 2011, Esprit International/OHMI – Marc O’Polo International (Représentation d’une lettre sur une poche), T‑22/10, non publié au Recueil, points 120 et 121, et la jurisprudence citée].

 Sur le public pertinent et son degré d’attention

22      Selon la jurisprudence, dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du Tribunal du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec. p. II‑449, point 42, et la jurisprudence citée].

23      Il ressort également de la jurisprudence que le public pertinent est constitué de consommateurs susceptibles d’utiliser tant les produits de la marque antérieure que ceux de la marque demandée. Or, en règle générale, lorsque les produits de l’une de ces marques sont inclus dans la désignation plus large de l’autre marque, le public pertinent est défini par référence au libellé le plus spécifique [voir arrêt du Tribunal du 12 juillet 2012, Pharmazeutische Fabrik Evers/OHMI – Ozone Laboratories Pharma (HYPOCHOL), T‑517/10, non publié au Recueil, point 19, et la jurisprudence citée].

24      Par ailleurs, il est de jurisprudence constante que, lorsque les produits en cause sont des médicaments, le public pertinent est constitué, d’une part, des professionnels de la médecine et, d’autre part, des patients en tant que consommateurs finaux desdits produits. D’une part, les professionnels de la médecine font preuve d’un degré élevé d’attention lors de la prescription de médicaments. D’autre part, s’agissant des consommateurs finaux, dans les cas où des produits pharmaceutiques sont vendus sans ordonnance, il y a lieu de supposer que ces produits intéressent les consommateurs qui sont censés être raisonnablement bien informés, attentifs et avisés, dès lors que ces produits affectent leur état de santé, et que ces consommateurs sont moins susceptibles de confondre les diverses versions desdits produits. En outre, même dans l’hypothèse où une ordonnance médicale serait obligatoire, les consommateurs sont susceptibles de faire preuve d’un degré d’attention élevé lors de la prescription des produits en cause, eu égard au fait que ce sont des produits pharmaceutiques [voir arrêt du Tribunal du 21 octobre 2008, Aventis Pharma/OHMI – Nycomed (PRAZOL), T‑95/07, non publié au Recueil, points 27 et 29, et la jurisprudence citée].

25      En l’espèce, il convient, à titre liminaire, d’approuver le constat de la chambre de recours, non contesté par le requérant, selon lequel le territoire pertinent est celui des États membres concernés par les marques antérieures, à savoir l’Autriche, la Hongrie, l’Italie, la Pologne, la Slovaquie, la Suède, la France, l’Irlande et la République tchèque.

26      Ensuite, il y a lieu de relever que, selon le constat de la chambre de recours au point 16 de la décision attaquée, le public pertinent se compose de professionnels du domaine médical et de patients en tant qu’utilisateurs finals « des produits en cause ». Quant aux « produits en cause », il ressort du point 17 de cette même décision que, dans le cadre de la comparaison des produits, la chambre de recours a conclu à une identité des produits en cause, étant donné que les marques antérieures PENTASA étaient enregistrées pour des produits pharmaceutiques en général ou en termes plus spécifiques qui incluaient les « produits et substances pour prévenir et traiter les maladies et troubles du système gastro-intestinal » visés par la marque demandée.

27      Dans le cadre de son examen du caractère descriptif du suffixe « asa », la chambre de recours a conclu, en substance, aux points 19 et 21 de la décision attaquée, que le produit pour lequel le requérant utilisait intensivement et depuis de nombreuses années les marques antérieures PENTASA concernait un produit pharmaceutique prescrit pour le traitement des maladies du système gastro-intestinal ayant la mésalazine comme principe actif. Pour les produits pharmaceutiques « pertinents », qui ne seraient délivrés que sur prescription médicale, le suffixe « asa » de la marque antérieure, décrivant une partie de leur principe actif, serait descriptif. Tel serait également le cas du suffixe « asa » dans la marque demandée, étant donné que le fonctionnement des produits pharmaceutiques destinés au traitement du système gastro-intestinal visés par cette marque dépendrait du principe actif 5‑ASA.

28      Lors de l’audience, le requérant a, en substance, soutenu que la chambre de recours a ainsi examiné le caractère descriptif du suffixe « asa » du point de vue des consommateurs d’une catégorie de produits trop restreinte. S’agissant des produits visés par les marques antérieures PENTASA, la demande de preuve d’usage sérieux aurait été rejetée. Le public pertinent inclurait donc les consommateurs de produits pharmaceutiques en général et non seulement les consommateurs de médicaments ayant la mésalazine comme principe actif. La marque demandée non plus ne concernerait pas seulement les consommateurs de médicaments contenant de la mésalazine comme principe actif, mais les consommateurs de produits visant à soigner des « maladies et troubles du système gastro-intestinal » en général. Étant donné que tous les troubles du système gastro-intestinal ne seraient pas nécessairement des maladies graves, il existerait un grand groupe de consommateurs qui ne ferait pas preuve d’un degré d’attention élevé. Selon le requérant, les produits par rapport auxquels il convient de déterminer le public pertinent en l’espèce ne sont pas tous soumis à des prescriptions médicales.

29      Premièrement, il y a lieu d’observer que la catégorie de produits par rapport à laquelle la chambre de recours a déterminé le public concerné ne ressort pas clairement de la décision attaquée. En effet, au point 16 de ladite décision, la chambre de recours a seulement constaté que le public concerné se composait de professionnels du domaine médical et de patients en tant qu’utilisateurs finals « des produits en cause ». Au point 17 de cette même décision, la chambre de recours semble avoir estimé que les « produits en cause » étaient, en ce qui concerne les marques antérieures PENTASA, les produits pharmaceutiques en général ou en termes plus spécifiques et, en ce qui concerne la marque demandée OCTASA, des « produits et substances pour prévenir et traiter les maladies et troubles du système gastro-intestinal » en général. Toutefois, aux points 19 et 21 de la décision attaquée, la chambre de recours semble avoir considéré que seuls les produits pharmaceutiques visant à traiter les maladies du système gastro-intestinal, contenant de la mésalazine comme principe actif et nécessitant une prescription médicale, étaient pertinents.

30      Le niveau d’attention qui a été attribué au public pertinent par la chambre de recours ne ressort pas non plus clairement de la décision attaquée. En effet, la chambre de recours s’est abstenue de développer les conséquences de ses constats selon lesquels le public pertinent se composait de professionnels du domaine médical et de patients en tant qu’utilisateurs finals des produits en cause et selon lesquels les produits pharmaceutique « pertinents » n’étaient délivrés que sur prescription médicale.

31      Deuxièmement, il importe de rappeler que la demande de preuve d’usage sérieux concernant les marques antérieures a été rejetée comme irrecevable par la division d’opposition et que ce résultat n’a pas été remis en cause devant la chambre de recours. En conséquence, à l’exception de la marque antérieure polonaise (enregistrement n° 71634), les marques antérieures visent toutes les produits pharmaceutiques en général. Ces produits incluent les « produits et substances pour prévenir et traiter les maladies et troubles du système gastro-intestinal » en général, qui sont visés par la marque demandée. En conséquence, pour ce qui concerne la comparaison entre les marques antérieures, à l’exception de la marque antérieure polonaise, d’une part, et la marque demandée, d’autre part, par rapport aux produits visés, en vertu de la jurisprudence citée au point 23 ci-dessus, le public pertinent est composé des professionnels du secteur médical ainsi que des consommateurs de « produits et substances pour prévenir et traiter les maladies et troubles du système gastro-intestinal » en général.

32      Troisièmement, en vertu de la jurisprudence citée au point 24 ci-dessus, il y a lieu de constater que le niveau d’attention du public pertinent est, en l’espèce, généralement élevé. En effet, les « produits et substances pour prévenir et traiter les maladies et troubles du système gastro-intestinal » relèvent tous de la catégorie générale des produits pharmaceutiques. Même si certains « troubles du système gastro-intestinal » devaient être considérés comme n’étant pas des maladies particulièrement graves, ainsi que l’a fait valoir le requérant, il y aurait toutefois lieu de considérer que l’attention des consommateurs qui achètent des médicaments pour soigner ces maladies est plus élevée que la moyenne.

 Sur la comparaison des signes

33      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

34      En l’espèce, aux points 19 à 24 de la décision attaquée, la chambre de recours a conclu, en substance, que le requérant avait avancé lui-même que le produit pour lequel il utilisait intensivement et depuis de nombreuses années les marques antérieures PENTASA était un produit pharmaceutique prescrit pour le traitement de maladies du système gastro-intestinal contenant de la mésalazine comme principe actif et que le suffixe « asa » compris dans les signes en conflit était descriptif par rapport audit principe actif, qui était également connu sous les dénominations 5-aminosalicylic acid et 5-ASA. Le suffixe « asa » serait donc descriptif pour « les produits pharmaceutiques pertinents ». Les marques PENTASA et OCTASA coïncideraient par l’élément descriptif « asa » qui, dans les deux marques, constituerait la dernière partie. Les marques différeraient par leurs premières parties, à savoir les éléments « pent » et « oct ». Elles seraient donc différentes sur les plans visuel et phonétique. Sur le plan conceptuel, en grec, l’élément « penta » de la marque antérieure signifierait cinq et l’élément « octa » de la marque demandée signifierait huit. À cet égard, les marques seraient conceptuellement différentes. Le simple fait que les marques coïncideraient par l’élément descriptif « asa » ne pourrait pas rendre les marques similaires d’un point de vue conceptuel.

35      Selon le requérant, les signes sont similaires sur les plans visuel, phonétique et conceptuel. Il conteste notamment le fait que le suffixe « asa » compris dans les deux marques soit descriptif.

 Sur le caractère descriptif du suffixe « asa »

36      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, un signe est descriptif s’il présente avec les produits ou les services en cause un rapport suffisamment direct et concret de nature à permettre au public concerné de percevoir immédiatement, et sans autre réflexion, une description d’une des caractéristiques des produits et des services en cause [voir arrêt du Tribunal du 17 octobre 2012, MIP Metro/OHMI – J. C. Ribeiro (MISS B), T‑485/10, non publié au Recueil, point 29, et la jurisprudence citée].

37      Par ailleurs, il ressort de la jurisprudence que la perception conceptuelle d’un élément verbal d’une marque peut varier entre les professionnels du secteur médical et les patients (voir, en ce sens, arrêt RESPICUR, point 22 supra, point 58 et 59) ainsi qu’entre les publics de différents États membres [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 10 octobre 2006, Armacell/OHMI – nmc (ARMAFOAM), T‑172/05, Rec. p. II‑4061, point 60].

38      En l’espèce, il est constant entre les parties que le principe actif des produits pharmaceutiques pour lesquels le requérant utilise ses marques antérieures PENTASA est la mésalazine. Ainsi que le requérant l’a souligné lors de l’audience, sans être contredit sur ce point par les autres parties, il y a lieu de relever que mésalazine est la seule dénomination du principe actif qui figure sur les emballages des produits vendus sous la marque PENTASA qui ont été produits devant l’OHMI au cours de la procédure administrative.

39      Afin d’établir que le suffixe « asa » était descriptif par rapport à ce principe actif, la chambre de recours a constaté, au point 19 de la décision attaquée, que le requérant avançait lui-même que le produit pour lequel il utilisait intensivement et depuis de nombreuses années les marques antérieures PENTASA était un produit pharmaceutique prescrit pour le traitement des maladies du système gastro-intestinal contenant de la mésalazine comme principe actif. L’intervenante aurait fait valoir et démontré que les dénominations générales utilisées en tant que synonymes de mésalazine étaient mésalamine, 5‑aminosalicylic acid (acide 5‑aminosalicylique) ou 5‑ASA. Cela serait confirmé par les publications produites par le requérant en tant que documents prouvant la renommée. Ensuite, au point 20 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que l’intervenante a fait valoir que, hormis celui commercialisé sous les marques PENTASA, d’autres produits pharmaceutiques ayant la même indication thérapeutique et le même principe actif 5-ASA étaient commercialisés par l’intervenante et des tiers sous des noms incluant la combinaison de lettres « asa ». Cet argument serait étayé par les données d’IMS Health produites par le requérant. Au point 21 de la décision attaquée, la chambre de recours a enfin conclu qu’il s’ensuivait que, pour tous les produits pharmaceutiques « pertinents », qui ne seraient délivrés que sur prescription médicale, le suffixe « asa » de la marque antérieure, décrivant une partie de son principe actif, serait descriptif. Tel serait également le cas du suffixe « asa » dans la marque demandée, étant donné que cette marque viserait des produits pharmaceutiques destinés au traitement du système gastro-intestinal dont le fonctionnement dépendrait du principe actif 5-ASA.

40      Force est de constater que la chambre de recours n’a ainsi pas établi le caractère descriptif du suffixe « asa » du point de vue des utilisateurs finals des produits en cause dans les différents États membres concernés, ni même du point de vue de la partie desdits utilisateurs qui est susceptible d’utiliser des médicaments pour le traitement des maladies du système gastro-intestinal contenant de la mésalazine comme principe actif.

41      À cet égard, il importe de relever, à titre liminaire, que, en réponse à une question du Tribunal lors de l’audience, l’OHMI a admis, en substance, que les éléments de preuve sur lesquels la chambre de recours s’était appuyée dans la décision attaquée afin d’établir le caractère descriptif du suffixe « asa » concernaient essentiellement la perception des professionnels du secteur médical, et non celle des utilisateurs finals.

42      Ensuite, il convient d’observer, d’une part, que, selon la jurisprudence, la définition du public pertinent doit se faire par rapport aux produits tels que décrits dans la liste des produits visés par les marques en cause (voir, en ce sens, arrêt Représentation d’une lettre sur une poche, point 21 supra, points 36 à 39, et la jurisprudence citée). En conséquence, le caractère descriptif du suffixe « asa » doit, en l’espèce, être apprécié du point de vue des consommateurs des produits pour lesquels les marques litigieuses sont enregistrées, et non pas de celui des consommateurs des produits pour lesquels ces marques sont effectivement utilisées.

43      Ainsi qu’il a été constaté au point 31 ci-dessus, en l’espèce, le public pertinent est composé des professionnels du secteur médical ainsi que des utilisateurs finals des « produits et substances pour prévenir et traiter les maladies et troubles du système gastro-intestinal » en général.

44      Or, dès lors que la chambre de recours s’est limitée à constater que le suffixe « asa » était descriptif par rapport à un produit pharmaceutique visant à soigner des maladies et troubles du système gastro-intestinal et contenant de la mésalazine comme principe actif, elle n’a pas établi le caractère descriptif dudit suffixe du point de vue des utilisateurs finals des produits pharmaceutiques visant à soigner des maladies et troubles du système gastro-intestinal en général. Son approche est donc contraire au principe énoncé au point 42 ci-dessus.

45      D’autre part, à titre surabondant, force est de constater que la chambre de recours n’a même pas établi le caractère descriptif du suffixe « asa » du point de vue de la partie des utilisateurs finals des produits en cause qui est susceptible d’utiliser des médicaments pour le traitement de maladies du système gastro-intestinal contenant de la « mésalazine » comme principe actif.

46      En premier lieu, les éléments sur lesquels la chambre de recours s’est appuyée dans la décision attaquée ne démontrent ni que les utilisateurs finals de ces produits dans tous les États membres concernés connaissent la dénomination 5‑aminosalicylic acid ou son acronyme 5‑ASA ni qu’ils les associent au principe actif mésalazine.

47      En effet, premièrement, pour autant que la chambre de recours a constaté que l’intervenante avait démontré que les dénominations générales utilisées en tant que synonymes de mésalazine étaient mésalamine, 5‑aminosalicylic acid (acide 5‑aminosalicylique) ou 5‑ASA, il ressort du dossier de l’OHMI que, lors de la procédure administrative, l’intervenante a produit des extraits en anglais de deux encyclopédies en ligne, à savoir Wikipedia et The free dictionary (http://medical‑dictionary.thefreedictionary.com), dont il découle notamment que 5‑aminosalicylic acid est un synonyme du principe actif mésalazine et que 5‑ASA en constitue un acronyme. Or, ces extraits ne concernent que la partie anglophone des utilisateurs finals des médicaments visant le traitement des maladies du système gastro-intestinal et contenant de la mésalazine comme principe actif. Ils ne démontrent pas que les utilisateurs finals non anglophones desdits médicaments connaissent la dénomination 5‑aminosalicylic acid ou son acronyme 5‑ASA ou qu’ils les associent au principe actif mésalazine. En outre, il n’y a pas lieu de considérer que les dénominations 5‑aminosalicylic acid ou 5‑ASA font partie des mots anglais élémentaires susceptibles d’être connus également par les consommateurs n’ayant pas une connaissance approfondie de l’anglais.

48      Par ailleurs, il est de jurisprudence constante qu’un extrait de Wikipedia constitue une information incertaine, dès lors qu’il est tiré d’une encyclopédie collective établie sur Internet, dont le contenu est modifiable à tout moment et, dans certains cas, par tout visiteur, même anonyme [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 10 février 2010, O2 (Germany)/OHMI (Homezone), T‑344/07, Rec. p. II‑153, point 46, et du 16 novembre 2011, Dorma/OHMI – Puertas Doorsa (doorsa FÁBRICA DE PUERTAS AUTOMÁTICAS), T‑500/10, non publié au Recueil, point 55].

49      Deuxièmement, pour autant que la chambre de recours a considéré que le fait que les dénominations générales utilisées en tant que synonymes de mésalazine étaient mésalamine, 5‑aminosalicylic acid (acide 5‑aminosalicylique) ou 5‑ASA était confirmé par les publications produites par le requérant en tant que documents prouvant la renommée, il ressort du dossier de l’OHMI, qu’elle s’est appuyée sur une sélection d’articles parus dans des revues médicales et scientifiques. Or, il n’y a pas lieu de considérer que les utilisateurs finals des médicaments visant le traitement des maladies du système gastro-intestinal et contenant de la mésalazine comme principe actif lisent ces publications qui s’adressent aux professionnels du secteur médical. En tout état de cause, il convient de relever que ces publications sont uniquement rédigées en anglais et en français. Elles ne démontrent pas que les utilisateurs finals des médicaments visant le traitement des maladies du système gastro-intestinal et contenant de la mésalazine comme principe actif qui ne sont ni anglophones ni francophones connaissent la dénomination 5‑aminosalicylic acid ou son acronyme 5‑ASA ou qu’ils les associent au principe actif mésalazine.

50      En deuxième lieu, même en admettant que les utilisateurs finals des médicaments visant le traitement des maladies du système gastro-intestinal et contenant de la mésalazine comme principe actif dans l’ensemble des États membres concernés connaissent la dénomination 5‑aminosalicylic acid ou son acronyme 5‑ASA et qu’ils les associent au principe actif mésalazine, il convient toutefois de considérer que cela ne permettrait pas de conclure que ces utilisateurs finals comprendront le suffixe « asa » immédiatement, et sans autre réflexion, comme une description dudit principe actif. En effet, premièrement, le suffixe « asa » diffère de l’acronyme 5‑ASA en ce que le chiffre 5 et le tiret font défaut. Or, ces deux éléments contribuent à ce que 5‑ASA puisse être compris comme l’acronyme d’une formule chimique et donc comme une référence à un principe actif médical. En revanche, en l’absence de ces deux éléments, il est peu probable que l’utilisateur final perçoive le seul suffixe « asa » comme une telle référence. Deuxièmement, il importe d’observer que le suffixe « asa » fait partie de marques composées chacune d’un mot unique, à savoir « pentasa » et « octasa ». Ainsi, l’éventuelle signification descriptive dudit suffixe est rendue plus difficilement compréhensible pour l’utilisateur final, étant donné que ledit utilisateur devra, tout d’abord, décomposer les marques, constituées chacune d’un seul mot, en sous-parties. Troisièmement, afin d’identifier le suffixe « asa » comme une description du principe actif mésalazine, l’utilisateur final devra donc décomposer les marques PENTASA ou OCTASA en sous-parties, associer « asa » et 5‑ASA, reconnaître 5‑ASA comme étant l’acronyme de 5‑aminosalicyllic acid et, enfin, savoir que 5-aminosalicyllic acid est un synonyme de mésalazine. Il y a donc lieu de considérer qu’un raisonnement complexe en plusieurs étapes est nécessaire afin de comprendre le suffixe « asa » comme une référence à la mésalazine, qui est la seule dénomination du principe actif qui figure sur les emballages des produits vendus sous la marque PENTASA qui ont été produits devant l’OHMI au cours de la procédure administrative.

51      En troisième lieu, le constat de la chambre de recours au point 20 de la décision attaquée, selon lequel d’autres produits pharmaceutiques ayant la même indication thérapeutique et le même principe actif 5-ASA étaient commercialisés par l’intervenante et des tiers sous des noms incluant la combinaison de lettres « asa », ne permet pas non plus d’établir que le suffixe « asa » est descriptif du point de vue des utilisateurs finals des médicaments visant le traitement des maladies du système gastro-intestinal et contenant de la mésalazine comme principe actif dans l’ensemble des États membres concernés. En effet, d’une part, le requérant soutient, à juste titre, qu’aucune preuve n’a été soumise au cours de la procédure administrative que ces autres produits sont commercialisés dans tous les États membres concernés par les marques antérieures. Plus précisément, il avance, sans être contredit sur ce point par les autres parties, que son opposition est fondée, entre autres, sur des marques enregistrées en Autriche, en Hongrie, en Pologne, en Slovaquie, en Suède, en Irlande et en République Tchèque et que aucune preuve n’a été apportée que des marques similaires sont utilisés dans ces pays. D’autre part, à lui seul, le fait que d’autres produits pharmaceutiques ayant la même indication thérapeutique et le même principe actif 5-ASA soient commercialisés sous des noms incluant la combinaison de lettres « asa » ne saurait permettre de conclure que les utilisateurs finals des médicaments visant le traitement des maladies du système gastro-intestinal et contenant de la mésalazine comme principe actif comprendront la combinaison de lettres « asa » immédiatement, et sans autre réflexion, comme une référence audit principe actif.

52      En quatrième lieu, contrairement à ce qu’allèguent l’OHMI et l’intervenante, la nécessité d’une prescription médicale ne permet pas non plus d’établir que le suffixe « asa » est descriptif du point de vue des utilisateurs finals des médicaments visant le traitement des maladies du système gastro-intestinal et contenant la mésalazine comme principe actif. En effet, il n’a pas été établi, en l’espèce, que les professionnels du secteur médical dans l’ensemble des États membres concernés utilisent la dénomination 5‑aminosalicylic acid, l’acronyme 5‑ASA ou bien l’élément « asa » avec leurs patients lorsqu’ils leur prescrivent des médicaments visant le traitement des maladies du système gastro-intestinal et contenant de la mésalazine comme principe actif.

53      En cinquième lieu, contrairement à ce que l’intervenante a soutenu lors de l’audience, en l’espèce, le niveau d’attention élevé des utilisateurs finals des médicaments visant le traitement des maladies du système gastro-intestinal et contenant de la mésalazine comme principe actif ne permet pas non plus de conclure que le suffixe « asa » est descriptif du point de vue de ces utilisateurs finals dans l’ensemble des États membres concernés. En effet, dès lors qu’il n’a pas été établi que lesdits utilisateurs finals connaissent la dénomination 5‑aminosalicylic acid ou son acronyme 5‑ASA, même un niveau d’attention élevé ne leur permettra pas de comprendre ledit suffixe immédiatement, et sans autre réflexion, comme une référence audit principe actif.

54      En sixième lieu, contrairement à ce que prétend l’intervenante, les preuves contenues dans le dossier de l’OHMI ne donnent pas lieu à une « présomption raisonnable » selon laquelle le suffixe « asa » serait descriptif également du point de vue des utilisateurs finals des médicaments visant le traitement des maladies du système gastro-intestinal et contenant de la mésalazine comme principe actif dans l’ensemble des États membres concernés. Au vue des observations qui précèdent, il y a lieu de considérer que rien dans le dossier de l’OHMI ne permet de conclure à une telle présomption. L’arrêt du Tribunal du 31 janvier 2013, K2 Sports Europe/OHMI – Karhu Sport Iberica (SPORT) (T‑54/12, non publié au Recueil, point 28), invoqué par l’intervenante à l’appui de son argumentation, ne saurait remettre en cause cette conclusion. Dans cet arrêt, le Tribunal a entériné l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle l’élément « sport » était descriptif ou, à tout le moins, hautement allusif dans le secteur de l’habillement, pour les articles de gymnastique et de sport et pour les produits en cuir, les sacs et les accessoires vestimentaires (point 29). Cette conclusion était fondée notamment sur le fait que, dans cette affaire, la requérante ne contestait pas que le terme « sport » était un terme anglais élémentaire qui serait compris par le consommateur moyen sur l’ensemble des territoires pertinents (point 26), qu’elle n’avait fourni aucune indication quant au territoire d’un État membre où l’élément « sport » serait distinctif ou quant aux produits pour lesquels il ne serait pas descriptif (point 28), ainsi que sur la jurisprudence antérieure du Tribunal (point 29). Or, force est de constater que ce raisonnement n’est pas transposable au cas d’espèce, notamment du fait que ni « asa », ni 5‑aminosalicylic acid, ni 5‑ASA ne font partie des mots et des expressions anglais élémentaires susceptibles d’être connus également par les consommateurs n’ayant pas une connaissance approfondie de l’anglais.

55      Enfin, il y a lieu de constater que les observations faites aux points 49 à 53 ci-dessus par rapport aux utilisateurs finals des médicaments visant le traitement des maladies du système gastro-intestinal et contenant de la mésalazine comme principe actif s’appliquent, à plus forte raison, au groupe plus large des utilisateurs finals des produits en cause. Les éléments sur lesquels la chambre de recours s’est appuyée dans la décision attaquée ne permettent pas d’établir que le suffixe « asa » est descriptif du point de vue des utilisateurs finals des « produits et substances pour prévenir et traiter les maladies et troubles du système gastro-intestinal » en général.

 Sur la comparaison des signes sur les plans visuel et phonétique

56      Il convient d’examiner si, eu égard aux observations qui précèdent, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle les signes en conflit ne sont pas similaires sur les plans visuel et phonétique est correcte en ce qui concerne les utilisateurs finals des produits en cause.

57      À cet égard, il y a lieu de constater que les premières parties des marques en conflit, à savoir « pen » et « oc », ne sont pas similaires. Par contre, leurs dernières parties, à savoir « tasa », sont identiques.

58      Il est, certes, vrai que la partie initiale des marques verbales peut être susceptible de retenir l’attention du consommateur davantage que les parties suivantes. Toutefois, cette considération ne saurait valoir dans tous les cas. Elle ne saurait, en tout état de cause, remettre en cause le principe, exprimé par la jurisprudence citée au point 33 ci-dessus, selon lequel l’examen de la similitude des marques doit prendre en compte l’impression d’ensemble produite par ces marques, dès lors que le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à l’examen de ses différents détails (voir arrêt ARMAFOAM, point 37 supra, point 65, et la jurisprudence citée).

59      En l’espèce, il y a lieu de considérer que les différences entre les premières parties des signes en conflit, à savoir « pen » et « oc », ne sont pas de nature, en dépit de leur position en début de marque, à supprimer une certaine similitude visuelle et phonétique dans l’impression d’ensemble produite par lesdits signes dans la perception des utilisateurs finals des produits en cause, pour lesquels le caractère descriptif du suffixe « asa » n’a pas été établi. Cette similitude résulte, d’une part, du fait que les marques en conflit sont d’une longueur similaire sur le plan visuel, à savoir respectivement six et sept lettres, et d’une longueur identique sur le plan phonétique, à savoir trois syllabes chacune. D’autre part, elle résulte du fait que ces marques sont rigoureusement identiques en ce qui concerne leurs dernières parties, à savoir « tasa », qui consistent en quatre lettres ainsi que deux syllabes placées dans le même ordre (voir, en ce sens, arrêt ARMAFOAM, point 37 supra, point 66).

60      Partant, il convient de constater que, s’agissant des utilisateurs finals des produits en cause, la chambre de recours a erronément exclu toute similitude des signes en conflit sur les plans visuel et phonétique.

 Sur la comparaison des signes sur le plan conceptuel

61      Dans la perception des utilisateurs finals des produits en cause qui ne comprennent pas que le suffixe « asa » fait référence à la mésalazine, aucun des signes en conflit, pris dans son ensemble, n’a de signification.

62      Pour la partie des utilisateurs finals qui ne comprend pas non plus que les débuts des signes en conflit, à savoir « penta » et « octa », font référence à des chiffres grecs, la comparaison conceptuelle des signes est neutre. En effet, dans la perception de cette partie du public visé, aucun des signes ne fait référence à un quelconque concept.

63      Cependant, une partie des utilisateurs finals comprendra que le début des signes en conflit fait référence à des chiffres grecs. Pour cette partie des utilisateurs finals, les signes en conflit sont conceptuellement similaires en ce qu’ils font tous les deux références à des chiffres grecs. Néanmoins, étant donné que les signes en conflit font référence à des chiffres grecs différents, cette similitude conceptuelle doit être qualifiée de faible.

64      En ce qui concerne l’argument de l’OHMI selon lequel des chiffres différents ne présentent pas de similitude conceptuelle, il convient de relever ce qui suit.

65      Il résulte de l’arrêt du Tribunal du 3 septembre 2010, Companhia Muller de Bebidas/OHMI – Missiato Industria e Comercio (61 A NOSSA ALEGRIA), T‑472/08, Rec. p. II‑3907, point 96, que des nombres différents peuvent, dans certaines circonstances, être considérés comme conceptuellement similaires, s’ils partagent des éléments communs, tels que, dans cette affaire, dans laquelle les marques en conflit comportaient respectivement les éléments « 51 » et « 61 », le nombre de chiffres et le chiffre 1 des unités.

66      En l’espèce, le fait qu’il s’agit de chiffres n’est pas le seul élément de similitude entre les signes en conflit sur le plan conceptuel, mais à cela s’ajoute le fait qu’il s’agit de chiffres grecs, langue qui n’est pas habituellement parlée dans le territoire pertinent (voir, concernant la définition du territoire pertinent, le point 25 ci-dessus). Cette circonstance suffit pour constater l’existence d’une faible similitude conceptuelle entre les signes.

67      Il convient cependant de rejeter l’argument du requérant selon lequel les signes sont hautement similaires sur le plan conceptuel en raison de la renommée dont bénéficie, selon elle, la marque antérieure. En effet, le degré de caractère distinctif de la marque antérieure est l’un des éléments à prendre en considération dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion. Il n’y a pourtant pas lieu de le prendre en considération au stade de l’appréciation de la similitude entre les signes [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 25 mars 2010, Nestlé/OHMI – Master Beverage Industries (Golden Eagle et Golden Eagle Deluxe), T‑5/08 à T‑7/08, Rec. p. II‑1177, point 65, et la jurisprudence citée].

 Conclusion

68      Il convient de rappeler la jurisprudence citée au point 21 ci‑dessus, selon laquelle, afin de constater l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, il n’est pas nécessaire de constater que ce risque existe pour la totalité du public visé. Il suffit qu’il existe pour une partie non négligeable dudit public.

69      En l’espèce, les utilisateurs finals pour lesquels il existe une certaine similitude entre les signes en conflit sur les plans visuel et phonétique constituent une partie non négligeable du public visé. Pour cette partie du public, soit la comparaison conceptuelle est neutre, soit il existe une faible similitude conceptuelle entre lesdits signes. La chambre de recours a donc commis une erreur susceptible d’entrainer l’annulation de la décision attaquée en constatant que les signes en conflit n’étaient pas similaires et qu’une des conditions nécessaires pour constater le risque de confusion faisait donc défaut, et en s’abstenant d’effectuer une appréciation globale du risque de confusion en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce. Il n’est donc pas nécessaire de se prononcer sur la question de savoir si la conclusion de la chambre de recours selon laquelle le suffixe « asa » est descriptif et selon laquelle il n’existe pas de similitude entre les signes en conflit est correcte pour ce qui concerne les professionnels du secteur médical. En conséquence, il convient d’accueillir le premier moyen et d’annuler la décision attaquée sur ce fondement, sans qu’il y ait lieu d’examiner les autres arguments et moyens soulevés par le requérant.

 Sur les dépens

70      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Par ailleurs, aux termes de cette même disposition, si plusieurs parties succombent, le Tribunal décide du partage des dépens.

71      En l’espèce, l’OHMI et l’intervenante ayant succombé, il y a lieu de les condamner à supporter, outre leurs propres dépens, les dépens du requérant, conformément aux conclusions de cette dernière.

72      Quant au partage des dépens exposés par le requérant, il y a lieu de condamner l’OHMI et l’intervenante à supporter chacun la moitié de ces dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la quatrième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 6 septembre 2012 (affaire R 1214/2011-4) est annulée.

2)      L’OHMI supportera ses propres dépens ainsi que la moitié de ceux exposés par le Farmaceutisk Laboratorium Ferring A/S.

3)      Tillotts Pharma AG supportera ses propres dépens ainsi que la moitié de ceux exposés par le Farmaceutisk Laboratorium Ferring.

Dittrich

Schwarcz

Tomljenović

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 avril 2014.

Signatures



* Langue de procédure : l’anglais.