Language of document : ECLI:EU:T:2011:278

ARRÊT DU TRIBUNAL (sixième chambre élargie)

16 juin 2011 (*)

« Concurrence – Ententes – Peroxyde d’hydrogène et perborate de sodium – Décision constatant une infraction à l’article 81 CE – Amendes – Prescription – Traitement différencié – Durée de l’infraction – Circonstances atténuantes »

Dans l’affaire T‑192/06,

Caffaro Srl, établie à Milan (Italie), représentée par Mes A. Santa Maria et C. Biscaretti di Ruffia, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par MM. V. Di Bucci et F. Amato, puis par MM. Di Bucci et V. Bottka, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, à titre principal, une demande d’annulation de la décision C (2006) 1766 final de la Commission, du 3 mai 2006, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/F/38.620 – Peroxyde d’hydrogène et perborate), en ce que la Commission y inflige une amende solidaire à la requérante et à SNIA SpA, et, à titre subsidiaire, une demande de réduction du montant de ladite amende,

LE TRIBUNAL (sixième chambre élargie),

composé de MM. V. Vadapalas (rapporteur), faisant fonction de président, A. Dittrich et L. Truchot, juges,

greffier : Mme K. Pocheć, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 4 mars 2010,

rend le présent

Arrêt

 Faits à l’origine du litige

1        La requérante, Caffaro Srl, anciennement Industrie Chimiche Caffaro SpA, puis Caffaro SpA, est une société de droit italien qui commercialisait, jusqu’en 1999, du perborate de sodium (ci-après le « PBS »). À l’époque des faits, elle était une filiale à 100 % de Caffaro SpA, devenue, en 2000, SNIA SpA.

2        En novembre 2002, Degussa AG a informé la Commission des Communautés européennes de l’existence d’une entente sur les marchés du peroxyde d’hydrogène (ci-après le « PH ») et du PBS et a sollicité l’application de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2002, C 45, p. 3).

3        Degussa a fourni des preuves matérielles à la Commission qui lui ont permis d’effectuer, les 25 et 26 mars 2003, des vérifications dans les locaux de trois entreprises.

4        Le 26 janvier 2005, la Commission a envoyé une communication des griefs à la requérante et aux autres entreprises concernées.

5        À la suite de l’audition des entreprises concernées, la Commission a adopté la décision C (2006) 1766 final, du 3 mai 2006, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE à l’encontre d’Akzo Nobel NV, Akzo Nobel Chemicals Holding AB, EKA Chemicals AB, Degussa, Edison, FMC Corp., FMC Foret SA, Kemira Oyj, L’Air liquide SA, Chemoxal SA, SNIA, la requérante, Solvay SA, Solvay Solexis SpA, Total SA, Elf Aquitaine SA et Arkema SA (affaire COMP/F/38.620 – Peroxyde d’hydrogène et perborate)(ci‑après la « décision attaquée »), dont un résumé est publié au Journal officiel de l’Union européenne du 13 décembre 2006 (JO L 353, p. 54). Elle a été notifiée à la requérante par lettre du 8 mai 2006.

 Décision attaquée

6        La Commission a indiqué, dans la décision attaquée, que les destinataires de celle-ci avaient participé à une infraction unique et continue à l’article 81 CE et à l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen (EEE), concernant le PH et le produit en aval, le PBS (considérant 2 de la décision attaquée).

7        L’infraction, qui a été constatée concernant la période allant du 31 janvier 1994 au 31 décembre 2000, a consisté principalement en l’échange, entre concurrents, d’informations importantes sous l’angle commercial et d’informations confidentielles sur les marchés et les entreprises, en une limitation et en un contrôle de la production et des capacités potentielles et réelles de celles-ci, en une répartition des parts de marché et des clients ainsi qu’en la fixation et en la surveillance du respect d’objectifs de prix.

8        La requérante a été tenue pour responsable de l’infraction « conjointement et solidairement » avec SNIA (considérants 407 à 412 de la décision attaquée).

9        Aux fins du calcul des montants des amendes, la Commission a fait application de la méthodologie exposée dans les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 et de l’article 65, paragraphe 5, [CA] (JO 1998, C 9, p. 3, ci-après les « lignes directrices »).

10      La Commission a déterminé les montants de base des amendes en fonction de la gravité et de la durée de l’infraction (considérant 452 de la décision attaquée), celle-ci ayant été qualifiée de très grave (considérant 457 de la décision attaquée).

11      En application d’un traitement différencié, la requérante a été classée dans la quatrième et dernière catégorie, correspondant à un montant de départ de l’amende de 1,875 millions d’euros. Lors de la détermination de ce montant, la Commission a également appliqué une réduction de 25 %, au vu du fait qu’il n’avait pas été établi que la requérante avait connaissance ou devait nécessairement avoir eu connaissance du projet global d’arrangements anticoncurrentiels (considérants 460 à 462 de la décision attaquée).

12      La requérante ayant pris part à l’infraction, selon la Commission, du 29 mai 1997 au 31 décembre 1998, à savoir pendant une période d’un an et sept mois, le montant de départ de son amende a été majoré de 15 % (considérant 467 de la décision attaquée).

13      La Commission a constaté que la requérante avait joué un rôle passif et mineur dans l’infraction et, en raison de cette circonstance atténuante, a réduit le montant de l’amende de 50 % (considérants 476 et 477 de la décision attaquée).

14      L’article 1er, sous l), de la décision attaquée dispose que la requérante a enfreint l’article 81, paragraphe 1, CE et l’article 53 de l’accord EEE, en participant à l’infraction concernée du 29 mai 1997 au 31 décembre 1998.

15      À l’article 2, sous g), de la décision attaquée, la Commission a infligé à la requérante, « conjointement et solidairement » avec SNIA, une amende d’un montant de 1,078 million d’euros.

 Procédure et conclusions des parties

16      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 18 juillet 2006, la requérante a introduit le présent recours.

17      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la sixième chambre et, les parties entendues, la présente affaire a été renvoyée devant la sixième chambre élargie.

18      Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, du 22 décembre 2009, le Tribunal a posé une question écrite à la requérante, à laquelle celle-ci a répondu dans le délai imparti.

19      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d’ouvrir la procédure orale. Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions du Tribunal lors de l’audience qui s’est déroulée le 4 mars 2010.

20      Conformément à l’article 32 du règlement de procédure du Tribunal, deux membres de la chambre étant empêchés d’assister au délibéré, les délibérations du Tribunal ont été poursuivies par les trois juges dont le présent arrêt porte la signature.

21      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée, en ce que la Commission lui a infligé, solidairement avec SNIA, une amende ;

–        à titre subsidiaire, réduire le montant de l’amende à un montant symbolique ;

–        à titre plus subsidiaire, réduire ce montant « de manière substantielle », compte tenu de la courte durée de sa participation à l’infraction et de l’existence de circonstances atténuantes ;

–        condamner la Commission aux dépens.

22      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

23      À l’appui du recours tendant à l’annulation de la décision attaquée, en ce que la Commission y a infligé à la requérante, solidairement avec SNIA, une amende, ou à la réduction du montant de l’amende, la requérante invoque cinq moyens, tirés d’erreurs de droit et d’appréciation des faits concernant, premièrement, le prétendu fait qu’elle est « victime et non membre de l’entente sur le [PH] », deuxièmement, le choix, prétendument erroné, de l’année de référence dans le cadre du traitement différencié, troisièmement, l’appréciation de la durée de sa participation à l’infraction, quatrièmement, l’application de la prescription visée à l’article 25, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles [81 CE] et [82 CE] (JO 2003, L 1, p. 1), et, cinquièmement, l’appréciation des circonstances atténuantes.

 Sur le prétendu statut de « victime et non [de] membre de l’entente sur le PH » invoqué par la requérante

 Arguments des parties

24      La requérante fait valoir qu’elle est « victime de l’entente », parce qu’elle est sortie du marché du PBS, en 1999, précisément à la suite des accords illicites intervenus sur le marché du PH. En effet, elle aurait été contrainte de s’approvisionner en PH, unique matière première nécessaire pour la fabrication du PBS, auprès des producteurs impliqués dans l’entente, ses concurrents directs sur le marché du PBS. L’augmentation des prix du PH, décidée par les parties à l’entente, aurait poussé la requérante hors du marché.

25      La requérante aurait été dans une situation de dépendance économique absolue vis-à-vis des producteurs de PH, faute d’avoir pu adapter sa propre stratégie commerciale sur le marché du PBS en fonction des augmentations de prix programmées sur le marché du PH. La Commission aurait, elle-même, affirmé qu’« il n’a[vait] pas été établi que [la requérante] avait connaissance ou [devait] nécessairement avoir eu connaissance du projet global d’arrangements anticoncurrentiels » (considérant 461 de la décision attaquée).

26      La requérante fait valoir que, dans plusieurs décisions antérieures, la Commission a décidé de ne pas infliger d’amende aux participants de ces accords illicites, dans la mesure où ils avaient agi contre leurs intérêts ou avaient été économiquement dépendants d’autres entreprises parties audit accord. Dans d’autres cas similaires, la Commission aurait uniquement infligé une amende symbolique. En outre, la possibilité pour la Commission d’infliger une amende symbolique serait explicitement prévue au point 5, sous d), des lignes directrices.

27      La Commission serait liée par ces décisions antérieures, celles-ci étant nombreuses et les affaires en cause semblables à la présente affaire. Leur dénominateur commun consisterait dans le fait que, à l’instar de la requérante, les entreprises concernées auraient été impliquées dans un accord conclu contre leurs intérêts ou, en tout état de cause, auraient été économiquement dépendantes d’autres parties à l’accord. La situation de la requérante pourrait être assimilée à celle d’un distributeur dans le cas d’un accord vertical conclu avec un producteur, s’agissant, dans les deux cas, d’une entreprise économiquement dépendante.

28      En particulier, la situation de la requérante présenterait de fortes similitudes avec celle de la Compagnie maritime zaïroise (CMZ) visée par la décision 93/82/CEE, du 23 décembre 1992, relative à une procédure d’application de l’article [81 CE] (IV/32.448 et IV/32.450 – Cewal, Cowac, Ukwal) et de l’article [82 CE] (IV/32.448 et IV/32.450 – Cewal) (JO 1993, L 34, p. 20), société à laquelle la Commission aurait décidé de ne pas infliger d’amende, car elle n’aurait tiré aucun avantage de l’infraction constatée.

29      Ayant omis de prendre en compte les mêmes circonstances à l’égard de la requérante, la Commission aurait violé l’article 81, paragraphe 1, CE, l’article 23, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 1/2003, les lignes directrices, ainsi que son obligation de motivation. L’appréciation en cause serait entachée d’une erreur manifeste d’appréciation et d’un détournement de pouvoir. Par ailleurs, la Commission aurait, à tort, confondu le statut de la requérante et celui d’Atochem SA, de Kemira et de Chemoxal, producteurs de PH [considérant 332, sous b), de la décision attaquée].

30      En particulier, la Commission aurait omis de prendre en compte le fait que les producteurs de PH avaient mis en place un système s’étant traduit par un doublement des prix en moins d’une année et demie, que la requérante ne produisait pas de PH et était en situation de totale dépendance économique vis-à-vis de ces entreprises, qu’elle n’était pas au courant du projet global de l’entente, qu’elle avait dû subir une augmentation substantielle du prix du PH, aspect déterminant de sa sortie du marché du PBS au cours de l’entente, qu’elle n’avait tiré aucun profit même en changeant de fournisseur, étant donné que l’alignement des prix concernait tous les producteurs de PH, et qu’elle n’avait pas été en mesure d’adapter sa propre stratégie commerciale sur le marché du PBS, puisqu’elle n’avait jamais pris part aux réunions concernant le PH. En raison de l’omission de prendre en compte ces considérations et de motiver ce choix, l’imposition d’une amende à la requérante serait illégale.

31      Enfin, l’amende infligée à la requérante serait dépourvue d’effet utile, tant en ce qui concerne l’objectif de répression que l’objectif de dissuasion, dès lors que la requérante serait déjà sortie du marché concerné précisément à la suite de l’entente en cause, qu’elle aurait donc déjà été sanctionnée et qu’elle ne serait plus en mesure de commettre à nouveau l’infraction.

32      La Commission conteste les arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

33      Il y a lieu d’observer, à titre liminaire, que, ainsi qu’il ressort de l’argumentation développée dans la requête, la requérante, tout en faisant référence à son prétendu statut de « victime et non [de] membre de l’entente sur le [PH] », ne conteste, en réalité, ni sa participation à l’infraction en cause ni le caractère unique de celle-ci.

34      En particulier, la requérante ne met pas en cause sa participation aux réunions de l’entente ayant eu lieu le 28 ou le 29 mai 1997 à Séville et le 14 mai 1998 à Évian-les-Bains, ni ne conteste le contenu illicite de ces réunions, tel qu’il a été constaté par la Commission, notamment, aux considérants 162 à 164 et 226 à 229 de la décision attaquée, mais se borne à contester, dans le cadre du troisième moyen examiné ci-après, la durée de sa participation à l’infraction en cause.

35      Dans ces conditions, le présent moyen, tiré du fait que la requérante « est victime et non membre de l’entente sur le [PH] », doit être compris comme visant, en réalité, à remettre en cause la légalité et le niveau de l’amende au regard de la situation particulière de la requérante au sein de l’entente.

36      En effet, la requérante se limite à invoquer un certain nombre de circonstances qui, selon elle, devaient conduire à l’absence d’imposition d’amende ou, tout au plus, à l’imposition d’une amende symbolique de 1 000 euros prévue au point 5, sous d), des lignes directrices. Elle se prévaut notamment de sa situation unique de fabricant de PBS, produit en aval du PH, en soutenant qu’elle était économiquement dépendante d’autres parties à l’accord, fabricants de PH ou des deux produits en cause, ainsi que du fait qu’elle a participé aux arrangements collusoires contre ses propres intérêts, en n’en n’ayant tiré aucun avantage, puisqu’elle a été contrainte de sortir du marché du PBS au milieu de l’année 1999.

37      Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que le pouvoir de la Commission d’infliger des amendes aux entreprises qui, de propos délibéré ou par négligence, commettent une infraction aux dispositions de l’article 81, paragraphe 1, CE, constitue un des moyens attribués à la Commission en vue de lui permettre d’accomplir la mission de surveillance que lui confère le droit de l’Union. Cette mission comporte le devoir de poursuivre une politique générale visant à appliquer en matière de concurrence les principes fixés par le traité et à orienter en ce sens le comportement des entreprises (arrêt de la Cour du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission, 100/80 à 103/80, Rec. p. 1825, point 105).

38      La Commission dispose d’une marge d’appréciation dans la fixation du montant des amendes afin d’orienter le comportement des entreprises dans le sens du respect des règles de concurrence. En particulier, le fait que la Commission ait appliqué, dans le passé, des amendes d’un certain niveau à certains types d’infractions ne saurait donc la priver de la possibilité d’élever, à tout moment, ce niveau pour assurer la mise en œuvre de la politique de concurrence de l’Union (arrêt Musique Diffusion française e.a./Commission, point 37 supra, point 109).

39      Cette marge d’appréciation existe, à plus forte raison, dans le cadre de la possibilité, dans certains cas, d’infliger une amende dite « symbolique », que la Commission s’est réservée au point 5, sous d), des lignes directrices, ou de ne pas infliger d’amende.

40      En l’espèce, pour contester la légalité de l’amende qui lui a été infligée, en premier lieu, la requérante invoque sa situation de dépendance vis-à-vis d’autres parties à l’entente.

41      Il y a lieu de relever que le fait d’avoir agi dans une situation de dépendance économique ne constitue pas, en tant que tel, une circonstance susceptible d’exclure la responsabilité d’une partie à l’entente. Une telle circonstance ne doit pas non plus nécessairement être prise en compte lors de la détermination du montant de l’amende.

42      Il est de jurisprudence bien établie qu’une entreprise qui participe à des réunions ayant un objet anticoncurrentiel, même sous la contrainte d’autres participants ayant un pouvoir économique supérieur, dispose toujours de la possibilité d’introduire une plainte auprès de la Commission afin de dénoncer les activités anticoncurrentielles en cause plutôt que de poursuivre sa participation auxdites réunions (arrêts du Tribunal du 20 mars 2002, HFB e.a./Commission, T‑9/99, Rec. p. II‑1487, point 178, et du 25 octobre 2005, Groupe Danone/Commission, T‑38/02, Rec. p. II‑4407, point 423). En effet, même à supposer qu’une entreprise ait subi des pressions pour adhérer à l’entente, elle aurait toujours pu en informer les autorités compétentes, au lieu de se rallier à l’entente (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 29 avril 2004, Tokai Carbon e.a./Commission, T‑236/01, T‑239/01, T‑244/01 à T‑246/01, T‑251/01 et T‑252/01, Rec. p. II‑1181, point 344).

43      Eu égard à ces considérations, ni la prétendue situation de dépendance vis-à-vis d’une autre partie de l’entente ni la position menaçante prétendument adoptée par cette dernière ne sauraient caractériser une situation susceptible d’être prise en compte par la Commission en tant que circonstance atténuante (arrêt Groupe Danone/Commission, point 42 supra, point 424).

44      Dès lors, la Commission ne saurait, a fortiori, être tenue de prendre en compte ces mêmes éléments aux fins de décider de ne pas imposer d’amende ou d’imposer uniquement une amende symbolique.

45      Au vu de ce qui précède, l’argument de la requérante tiré de l’absence de prise en compte de sa situation de dépendance économique vis-à-vis d’autres parties à l’entente ne saurait prospérer.

46      S’agissant ensuite de la référence faite par la requérante aux décisions antérieures de la Commission, dans lesquelles celle-ci n’a pas imposé d’amende ou a seulement infligé une amende symbolique, il y lieu de rappeler qu’une pratique décisionnelle de la Commission ne saurait servir de cadre juridique aux amendes en matière de concurrence et que des décisions concernant d’autres affaires ne revêtent qu’un caractère indicatif en ce qui concerne l’existence éventuelle d’une violation du principe d’égalité de traitement, étant donné qu’il est peu vraisemblable que les circonstances propres à celles-ci, telles que les marchés, les produits, les entreprises et les périodes concernés, soient identiques (arrêts de la Cour du 21 septembre 2006, JCB Service/Commission, C‑167/04 P, Rec. p. I‑8935, points 201 et 205, et du 7 juin 2007, Britannia Alloys & Chemicals/Commission, C‑76/06 P, Rec. p. I‑4405, point 60).

47      Il n’en reste pas moins que, également dans ce contexte, la Commission est tenue au respect du principe d’égalité de traitement et ne peut traiter des situations comparables de manière différente ou des situations différentes de manière identique, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié.

48      Or, il y a lieu de relever que les situations en cause dans les affaires ayant donné lieu aux décisions antérieures de la Commission invoquées par la requérante revêtent des différences significatives par rapport à celle en cause dans la présente affaire.

49      D’une part, la requérante invoque de nombreuses décisions concernant des accords et des pratiques concertées entre un producteur et des distributeurs comportant des mesures empêchant les importations ou les exportations parallèles.

50      Il ressort de ces décisions que, dans le cadre de certaines affaires concernant les restrictions verticales, la Commission a pris en compte le fait que les distributeurs, entreprises substantiellement plus faibles du point de vue économique, agissaient sous la contrainte d’un producteur et à l’encontre de leurs propres intérêts économiques, par peur de se voir retirer le droit de distribution exclusive. La Commission a ainsi décidé, au cas par cas, de ne pas retenir la responsabilité des distributeurs, de ne pas leur infliger d’amende ou de leur en infliger une d’un montant très modéré.

51      Or, il y a lieu de relever que ces considérations ne sont pas directement transposables à des cas de restrictions horizontales, tels que le cartel de prix et de répartition des marchés en cause en l’espèce, infractions très graves de par leur nature, qui ont généralement lieu entre des entreprises jouant un rôle économique comparable, celles-ci étant toutes des producteurs du ou des produits en cause.

52      En effet, en l’espèce, la requérante a pris part à l’infraction unique, ayant porté sur les marchés du PH et du PBS. Le fait qu’elle produisait uniquement du PBS, qu’elle était tenue de s’approvisionner en PH auprès d’autres parties à l’entente et, partant, qu’elle était soumise à des pressions tarifaires sur le marché du PH en amont, ne démontre pas qu’elle ait été contrainte d’agir de manière illégale sur le marché du PBS. En tout état de cause, la requérante n’invoque aucun indice concret visant à établir que les autres parties à l’entente l’auraient soumise à des pressions, par exemple, en menaçant de lui retirer l’approvisionnement en PH, en cas de méconnaissance de la discipline collusoire imposée sur le marché du PBS.

53      D’autre part, s’agissant des restrictions horizontales, la requérante invoque la décision 94/210/CE de la Commission, du 29 mars 1994, relative à une procédure d’application des articles [81 CE] et [82 CE] (affaire 33.941 – HOV-SVZ/MCN) (JO L 104, p. 34), ainsi que la décision C (2004) 4030 de la Commission, du 20 octobre 2004, relative à une procédure d’application de l’article 81, paragraphe 1, [CE] (affaire 38.238 − Tabac brut – Espagne) , dont un résumé est publié au Journal officiel de l’Union européenne du 19 avril 2007 (JO L 102, p. 14).

54      Il y a lieu d’observer que la décision 94/210 concernait des entreprises ferroviaires parties à une « entente défensive » destinée à contrer les effets des pratiques tarifaires d’une entreprise dominante, examinées sous l’angle de l’article 82 CE dans le cadre de la même décision. Aux considérants 109 à 112 de ladite décision, la Commission a notamment relevé que, « d’une façon générale […] une entente de nature défensive ne p[ouvait] exonérer les entreprises de l’imposition d’une amende » avant de décider que, « compte tenu […] de la spécificité du cas d’espèce, […] il n’y a[vait] pas lieu d’imposer d’amendes pour l’infraction à l’article [81 CE] ».

55      S’agissant de la décision C (2004) 4030, concernant deux ententes, respectivement, entre les entreprises de transformation de tabac et entre des représentants de producteurs, la Commission était, concernant la seconde entente, parvenue à la conclusion qu’il n’y avait lieu d’infliger qu’une amende symbolique de 1000 euros à chacun des représentants des producteurs, dès lors que le cadre règlementaire national avait entraîné un degré considérable d’incertitude quant à la légalité de leur comportement. En effet, la Commission a constaté que les autorités espagnoles avaient, à tout le moins, encouragé les représentants des producteurs à poursuivre les négociations sur les prix, le ministère de l’Agriculture ayant même autorisé les tableaux de prix négociés, qui avaient été annexés au contrat type publié au Journal officiel espagnol [considérants 425 à 431 de la décision C (2004) 4030].

56      Il ressort de ces constatations que les deux décisions invoquées par la requérante constituent des décisions isolées fondées sur des circonstances spécifiques, lesquelles ne sont aucunement comparables à celles invoquées par la requérante en l’espèce.

57      Dès lors, l’argument de la requérante tiré d’une prétendue « discrimination » au regard de la pratique décisionnelle de la Commission, quant à la prise en compte d’une situation de dépendance économique vis-à-vis d’autres parties à l’entente, ne saurait prospérer.

58      En deuxième lieu, la requérante invoque le fait de n’avoir tiré aucun bénéfice de l’entente, voire d’avoir subi un préjudice.

59      Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le fait qu’une entreprise n’ait retiré aucun bénéfice de l’infraction ne saurait faire obstacle à l’imposition d’une amende, sous peine de faire perdre à celle-ci son caractère dissuasif. Il s’ensuit que la Commission n’est pas tenue, en vue de fixer les amendes, d’établir que l’infraction a procuré un avantage illicite aux entreprises concernées, ni de prendre en considération, le cas échéant, l’absence de bénéfice tiré de l’infraction en cause (arrêts du Tribunal du 15 mars 2000, Cimenteries CBR e.a./Commission, T‑25/95, T‑26/95, T‑30/95 à T‑32/95, T‑34/95 à T‑39/95, T‑42/95 à T‑46/95, T‑48/95, T‑50/95 à T‑65/95, T‑68/95 à T‑71/95, T‑87/95, T‑88/95, T‑103/95 et T‑104/95, Rec. p. II‑491, point 4881, et du 26 avril 2007, Bolloré e.a./Commission, T‑109/02, T‑118/02, T‑122/02, T‑125/02 et T‑126/02, T‑128/02 et T‑129/02, T‑132/02 et T‑136/02, Rec. p. II‑947, point 671).

60      L’absence d’un tel bénéfice ne saurait être considérée comme une circonstance atténuante susceptible d’entrer en ligne de compte dans le cadre de la détermination du montant de l’amende (arrêts du Tribunal du 29 novembre 2005, SNCZ/Commission, T‑52/02, Rec. p. II‑5005, point 91, et du 8 juillet 2008, BPB/Commission, T‑53/03, Rec. p. II‑1333, point 442), et, partant, ne constitue pas un motif justifiant l’imposition d’une amende symbolique.

61      Les mêmes considérations s’appliquent, en principe, en ce qui concerne le prétendu fait que la requérante a participé à une collusion avec ses concurrents contre ses propres intérêts économiques et qu’elle a subi, en conséquence, les effets négatifs de cette collusion, une telle circonstance, même à la supposer établie, ne constituant pas non plus un élément devant nécessairement être pris en compte en tant que circonstance atténuante et, a fortiori, en tant que circonstance justifiant l’imposition d’une amende symbolique.

62      Selon la jurisprudence, une entreprise qui continue de se concerter avec ses concurrents sur les prix, malgré le prétendu préjudice qu’elle subit, ne peut être considérée comme ayant commis une infraction moins grave que celle des autres entreprises également impliquées dans la collusion (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 mai 1998, Europa Carton/Commission, T‑304/94, Rec. p. II‑869, point 141).

63      Dans ce contexte, s’agissant de l’argument de la requérante tiré de la situation de la CMZ, visée par la décision 93/82, il convient d’observer qu’il ressort des considérants 111 et 112 de cette décision, figurant sous l’intitulé « Degré de participation », que la Commission a décidé de ne pas infliger d’amende à la CMZ pour des considérations liées essentiellement à sa participation à l’infraction, et en particulier l’absence de sa présence active sur le marché concerné, l’absence d’avantage tiré de l’infraction étant relevée uniquement à titre surabondant. En outre, il y a lieu d’observer que le Tribunal a confirmé que la Commission était en droit de ne pas infliger d’amende à la société concernée, au motif que sa situation commerciale et financière était différente de celle des autres participants à l’infraction à l’époque (arrêt du Tribunal du 1er juillet 2008, Compagnie maritime belge/Commission, T‑276/04, Rec. p. II‑1277, point 96).

64      Dès lors, s’agissant d’une décision isolée, adoptée à propos d’une affaire qui ne présente par ailleurs pas de similitudes avec le cas d’espèce, elle ne saurait étayer l’argument de la requérante tiré de la nécessité de prendre en compte l’absence de bénéfice tiré de l’infraction.

65      Par conséquent, la requérante ne peut valablement prétendre que la Commission était tenue de s’abstenir de lui imposer une amende ou de lui infliger une amende symbolique, en considération du fait qu’elle n’avait tiré aucun bénéfice de l’entente, voire qu’elle en avait subi des conséquences négatives.

66      En troisième et dernier lieu, concernant l’argument de la requérante tiré de la prétendue absence d’effet utile de l’amende, tant en ce qui concerne l’objectif de répression que l’objectif de dissuasion, il y a lieu de rappeler que le facteur de dissuasion est évalué en prenant en compte une multitude d’éléments, et non la seule situation particulière de l’entreprise concernée (arrêts de la Cour du 29 juin 2006, Showa Denko/Commission, C‑289/04 P, Rec. p. I‑5859, point 23, et du Tribunal du 30 avril 2009, Nintendo et Nintendo of Europe/Commission, T‑13/03, Rec. p. II‑947, point 71).

67      En outre, cette évaluation n’inclut pas l’appréciation de la probabilité que l’entreprise en cause récidive. En effet, la recherche de l’effet dissuasif ne vise pas uniquement les entreprises précisément visées par la décision infligeant des amendes, dans la mesure où il convient également d’inciter les entreprises de taille similaire et disposant de ressources analogues à s’abstenir de participer à des infractions similaires aux règles de la concurrence (voir, en ce sens, arrêt Nintendo et Nintendo of Europe/Commission, point 66 supra, points 72 et 73).

68      En tout état de cause, étant donné que la requérante n’a pas cessé toute activité économique, le fait qu’elle n’opère plus sur le marché concerné ne remet aucunement en cause la nécessité de garantir le caractère dissuasif de la sanction qui lui est infligée.

69      S’agissant de l’objectif de répression, il suffit de relever qu’il serait contraire à cet objectif que la cessation des activités commerciales sur le marché concerné ait pour conséquence que l’entreprise en cause échappe à l’infliction d’une amende pour l’infraction commise.

70      Par conséquent, l’amende infligée à la requérante ne saurait être considérée comme dépourvue d’effet utile.

71      Enfin, il y a lieu de relever que les circonstances invoquées, considérées dans leur ensemble, ne démontrent pas que la Commission aurait excédé sa marge d’appréciation dans le cadre de l’exercice de son pouvoir de sanction à l’égard de la requérante.

72      Il importe de relever, à cet égard, que la Commission a tenu compte des éléments caractérisant la participation de la requérante à l’infraction, en appliquant une réduction de 25 % au montant de départ de son amende, au motif qu’il n’avait pas été établi que la requérante avait connaissance du projet global d’arrangements anticoncurrentiels (considérant 461 de la décision attaquée), ainsi qu’en appliquant une réduction de 50 % du montant de l’amende, au titre d’une circonstance atténuante tirée de son rôle passif et mineur, sa participation à l’entente n’étant pas comparable à celle des autres membres actifs (considérants 476 et 477 de la décision attaquée).

73      Par ailleurs, par son argument tiré de la prétendue comparaison effectuée par la Commission entre sa situation et celle des producteurs de PH, la requérante se limite à renvoyer au considérant 332, sous b), de la décision attaquée, selon lequel le fait que certaines entreprises ne fabriquaient que l’un ou l’autre produit concerné n’infirme pas la constatation du caractère unique de l’infraction. Or, dans la mesure où la requérante ne conteste pas le caractère unique de l’infraction en cause, son argument est inopérant.

74      Eu égard à ces considérations, il convient de rejeter l’argument de la requérante tiré d’un détournement de pouvoir. En effet, ainsi qu’il résulte notamment des points 66 à 70 ci-dessus, la sanction qui lui a été infligée n’a en rien été détournée de sa finalité, tant en ce qui concerne l’objectif de répression que l’objectif de dissuasion.

75      Par ailleurs, il y a lieu d’écarter le grief de la requérante tiré de la prétendue violation de l’obligation de motivation, énoncé dans le seul intitulé du présent moyen dans la requête, mais non développé dans ses écritures, ni dans ses observations orales formulées lors de l’audience.

76      En effet, à supposer que, par ce grief, la requérante reproche à la Commision de ne pas avoir pris position sur sa situation particulière au sein de l’entente, il y a lieu d’observer, d’une part, que la Commission a exposé les considérations justifiant la réduction du montant de l’amende eu égard à la situation particulière de la requérante, aux considérants 461 et 474 à 477 de la décision attaquée, et, d’autre part, qu’elle n’a pas été tenue de prendre position sur l’éventuelle imposition d’une amende symbolique, s’agissant d’une simple possibilité envisagée, à titre exceptionnel, au point 5), sous d), des lignes directrices.

77      Au vu de tout ce qui précède, le premier moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur l’année de référence prise en compte dans le cadre du traitement différencié

 Arguments des parties

78      La requérante soutient que la Commission a commis une erreur, en utilisant, dans le cadre du traitement différencié, sa part de marché afférente à l’année 1998, alors que, pour tous les autres destinataires de la décision attaquée, elle a pris en compte les parts de marché en 1999, dernière année complète d’infraction. À cet égard, la Commission aurait également violé le principe d’égalité de traitement, l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 et les lignes directrices.

79      La Commission aurait été tenue de choisir, en tant qu’année de référence, la dernière année complète de la période d’infraction. Il résulterait, en outre, de l’arrêt de la Cour du 2 octobre 2003, Aristrain/Commission (C‑196/99 P, Rec. p. I‑11005, point 129) que seule l’utilisation d’une année de référence commune à toutes les entreprises ayant participé à la même infraction garantit l’égalité de traitement. Dans ses décisions antérieures, la Commission aurait utilisé une année de référence unique, bien que les diverses entreprises aient pris part à l’infraction à différentes périodes.

80      Par le choix de l’année 1998 à l’égard de la requérante, la Commission aurait cherché à augmenter le montant de son amende. Le chiffre d’affaires réalisé par la requérante en 1999 ainsi que la part de marché correspondante auraient été nettement inférieurs à ceux de 1998, son chiffre d’affaires mondial pour le PBS étant passé de 12,9 millions d’euros en 1998 à 9,1 millions d’euros en 1999.

81      La Commission conteste les arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

82      Selon le point 1 A, sixième alinéa, des lignes directrices, dans le cas d’infractions impliquant plusieurs entreprises, il peut convenir de pondérer le montant de départ, afin de tenir compte du poids spécifique, et donc de l’impact réel, du comportement infractionnel de chaque entreprise sur la concurrence, notamment lorsqu’il existe une disparité considérable dans la dimension des entreprises auteurs d’une infraction de même nature, et d’adapter en conséquence le point de départ du montant de base selon le caractère spécifique de chaque entreprise.

83      Selon une jurisprudence constante, la répartition des membres d’une entente en catégories, aux fins de réaliser un traitement différencié au stade de la fixation des montants de départ des amendes, doit respecter le principe d’égalité de traitement selon lequel il est interdit de traiter des situations comparables de manière différente et des situations différentes de manière identique, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié. Par ailleurs, le montant des amendes doit, au moins, être proportionné par rapport aux éléments pris en compte pour apprécier la gravité de l’infraction (voir arrêt Tokai Carbon e.a./Commission, point 42 supra, point 219, et la jurisprudence citée)

84      Pour vérifier si la répartition des membres d’une entente en catégories est conforme aux principes d’égalité de traitement et de proportionnalité, le Tribunal, dans le cadre de son contrôle de l’exercice du pouvoir d’appréciation dont la Commission dispose en la matière, doit toutefois se limiter à vérifier si cette répartition est cohérente et objectivement justifiée (arrêts du Tribunal du 19 mars 2003, CMA CGM e.a./Commission, T‑213/00, Rec. p. II‑913, point 416, et Tokai Carbon e.a./Commission, point 42 supra, point 220).

85      En l’espèce, afin de déterminer le poids individuel de chaque participant à l’infraction, à l’exception de la requérante, la Commission a pris en considération les parts de marché résultant des ventes combinées des deux produits en cause sur le marché mondial en 1999, dernière année complète durant laquelle l’infraction portait sur ces deux produits. À l’égard de la requérante, la Commission a pris en compte sa part de marché en 1998, dernière année de sa participation à l’infraction (considérant 460 de la décision attaquée).

86      En outre, la Commission a réduit de 25 % le montant de départ de l’amende infligée à la requérante, au vu du fait qu’il n’avait pas été établi que celle-ci avait connaissance ou devait nécessairement avoir eu connaissance du projet global d’arrangements anticoncurrentiels (considérant 461 de la décision attaquée).

87      À cet égard, il y a lieu de relever que le fait de retenir, dans le cadre d’un traitement différencié, une année de référence différente pour un membre de l’entente ne conduit pas, en soi, à une violation du principe d’égalité de traitement.

88      Certes, la Cour a jugé, d’une part, que l’utilisation d’une année de référence commune pour toutes les entreprises ayant participé à la même infraction donne à chaque entreprise l’assurance d’être traitée de la même façon que les autres, les sanctions étant déterminées d’une manière uniforme et, d’autre part, que le choix de l’année de référence faisant partie de la période infractionnelle permet d’apprécier l’ampleur de l’infraction commise en fonction de la réalité économique telle qu’elle apparaissait durant cette période (arrêt Aristrain/Commission, point 79 supra, point 129).

89      Cependant, contrairement à ce que soutient la requérante, il n’en résulte pas que le choix de l’année commune constitue le seul moyen de déterminer les sanctions d’une manière conforme au principe d’égalité de traitement.

90      En particulier, la Commission peut légalement tenir compte du fait que, pour une entreprise donnée, l’année de référence commune se situe en dehors de la période infractionnelle retenue à son égard et ne constitue donc pas une indication utile de son poids individuel lors de l’infraction et, de ce fait, prendre en compte son chiffre d’affaires relatif à une année différente de l’année de référence commune, à condition que la répartition des membres d’une entente en catégories reste cohérente et objectivement justifiée.

91      En effet, c’est eu égard à des considérations analogues qu’il convient de faire le choix d’un exercice social de référence différent, dans le cadre de l’application du plafond de 10 % du chiffre d’affaires, prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement nº 1/2003, s’agissant d’une entreprise qui n’est plus active sur le marché au cours de l’exercice social retenu à l’égard des autres parties à l’entente, lequel ne constituant donc pas un indice fiable de sa situation économique réelle, (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 7 juin 2007, Britannia Alloys & Chemicals/Commission, point 46 supra, points 28 à 30 et 43, et arrêt du Tribunal du 29 novembre 2005, Britannia Alloys & Chemicals/Commission, T‑33/02, Rec. p. II‑4973, point 74).

92      Dès lors, en l’espèce, après avoir constaté que les ventes réalisées par la requérante au cours de l’année de référence commune retenue à l’égard des autres entreprises ayant participé à l’entente ne constituait pas un indice fiable de sa situation économique réelle durant la période infractionnelle, étant donné notamment que sa participation à l’infraction avait déjà cessé, la Commission a pu légalement se référer à ses ventes de 1998, dernière année de sa participation à l’entente.

93      Il convient d’ailleurs d’observer que ce critère a été appliqué d’une manière objective à l’égard de tous les membres de l’entente, toutes les entreprises en cause, à l’exception de la requérante, ayant participé à l’entente en 1999, année qui constitue ainsi la dernière année de leur participation à l’infraction portant sur les deux produits concernés.

94      En outre, la requérante n’a pas démontré que le choix d’une année de référence différente à son regard avait conduit à un manque de cohérence dans la répartition en catégories.

95      En effet, il y a lieu d’observer que la requérante est la seule entreprise classée dans la quatrième et dernière catégorie, avec un montant de départ de l’amende s’élevant à 1,875 million d’euros (soit 2,5 millions d’euros avant la réduction appliquée au considérant 461 de la décision attaquée), lequel est donc significativement inférieur à celui correspondant à la troisième catégorie, à savoir 20 millions d’euros. D’ailleurs, la différence entre les parts de marché de la requérante en 1998 et en 1999 est relativement peu importante, notamment en comparaison avec l’écart existant entre les parts de marché des différentes entreprises classées toutes au sein de la troisième catégorie, cet écart s’expliquant pleinement par la forfaitisation des montants pris en compte.

96      Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que le fait que les montants de départ afférents à chacune des catégories ne sont pas strictement proportionnels aux parts de marché respectives ne saurait être censuré, dans la mesure où il n’est que le résultat de la forfaitisation des montants (arrêt CMA CGM e.a./Commission, point 84 supra, point 411).

97      Or, l’écart invoqué par la requérante, entre ses parts de marché en 1998 et en 1999, n’est pas d’une importance telle que la méthode adoptée par la Commission ait pu aboutir à une représentation grossièrement déformée des marchés en cause (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 15 mars 2006, BASF/Commission, T‑15/02, Rec. p. II‑497, point 159, et du 8 octobre 2008, SGL Carbon/Commission, T‑68/04, Rec. p. II‑2511, point 70).

98      À la lumière de l’ensemble de ces considérations, le présent moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur l’appréciation de la durée de la participation de la requérante à l’infraction

 Arguments des parties

99      La requérante conteste la durée de sa participation à l’infraction telle qu’elle a été constatée par la Commission dans le cadre du calcul du montant de l’amende. À cet égard, elle invoque une dénaturation des faits, un détournement de pouvoir, une violation des droits de la défense, une insuffisance de motivation, ainsi qu’une violation de l’article 23, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 1/2003 et des lignes directrices.

100    En substance, elle conteste sa participation à la réunion du 26 novembre 1998, qui s’est tenue à Bruxelles en marge de l’assemblée du Conseil européen de l’industrie chimique (CEFIC) (considérant 258 de la décision attaquée), et allègue que son représentant a participé uniquement aux discussions légales lors de ladite assemblée. En retenant sa participation aux contacts illicites pris au cours des pauses lors de l’assemblée, la Commission se serait fondée sur la déclaration de Degussa, laquelle ne contiendrait qu’une liste des participants à l’assemblée du CEFIC. L’affirmation de la Commission selon laquelle toutes les personnes ayant participé à l’assemblée du CEFIC, « sans exception », ont pris part aux contacts illicites ne pourrait pas être déduite de cette déclaration. Le fait que, dans sa réponse à la communication des griefs, Degussa n’est « pas revenue » sur ses déclarations et ne les a pas non plus modifiées (considérant 258 de la décision attaquée) ne prouverait rien, car la déclaration initiale de Degussa aurait déjà été insuffisamment circonstanciée.

101    Par ailleurs, au considérant 258 de la décision attaquée, la Commission aurait employé, pour étayer un grief relatif à la présence de la requérante à la réunion de Bruxelles, des éléments tirés de la réponse de Degussa à la communication des griefs à laquelle la requérante n’aurait pas eu accès. Cela serait constitutif d’une violation de ses droits de la défense.

102    En tout état de cause, la déclaration de Degussa n’aurait pas pu être retenue en tant qu’élément à charge, dans la mesure où elle est contestée par la requérante et n’est pas corroborée par d’autres éléments de preuve. La Commission aurait d’ailleurs implicitement reconnu l’absence de la requérante à la réunion de Bruxelles, car elle a affirmé que sa participation à l’infraction s’était limitée à deux réunions (considérant 476 de la décision attaquée) qui ne pourraient être que celles de Séville et d’Évian-les-Bains.

103    Selon la requérante, sa participation à la réunion de Bruxelles n’ayant pas été établie, la Commission aurait dû considérer le 14 mai 1998, date de la réunion d’Évian-les-Bains, comme la date finale de sa participation à l’infraction. En effet, la requérante n’aurait pas appliqué les accords sur le prix du PBS fixés au cours de la réunion d’Évian-les-Bains. Cela serait corroboré par son absence lors des cinq réunions suivantes de 1998, dont l’objet était l’exécution de l’accord convenu à Évian-les-Bains, ainsi que par sa décision de sortir du marché du PBS, prise au cours des derniers mois de 1998.

104    Ce serait donc à tort que la Commission aurait déterminé la durée de la participation de la requérante à l’infraction à un an et sept mois, au lieu d’une année, du 29 mai 1997 au 14 mai 1998, et appliqué une majoration indue du montant de l’amende au titre de cette durée.

105    La Commission conteste les arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

106    Il ressort du dossier que, dans la communication des griefs, la Commission a reproché à la requérante d’avoir pris part aux comportements illicites entre le 24 mai 1996 et le 30 juin 1999. Cette période infractionnelle a été substantiellement réduite dans la décision attaquée, dans laquelle la Commission a constaté que la requérante avait participé à l’infraction entre le 29 mai 1997 et le 31 décembre 1998 [article 1er, sous l), de la décision attaquée].

107    Dans le cadre du présent moyen, la requérante conteste sa participation à l’infraction pour une partie de la période infractionnelle, à savoir la période allant du 14 mai au 31 décembre 1998, dans la mesure où la prise en compte de cette période a conduit à la majoration du montant de son amende.

108    À titre liminaire, il convient d’observer que, ainsi que l’indique la Commission, la requérante a, dans sa réponse à la communication des griefs, affirmé s’être engagée dans des contacts illégaux, tout au plus, pendant la période allant du 29 mai 1997 au 31 décembre 1998.

109    À cet égard, certes, le Tribunal a jugé que, en présence d’une reconnaissance expresse, claire et précise par l’entreprise en question des faits reprochés par la Commission dans sa communication des griefs, ces faits doivent alors être considérés comme établis, l’entreprise n’étant plus, en principe, en mesure de les contester devant le Tribunal (voir arrêt du Tribunal du 8 octobre 2008, Schunk et Schunk Kohlenstoff-Technik/Commission, T‑69/04, Rec. p. II‑2567, point 84, et la jurisprudence citée).

110    Néanmoins, en l’espèce, bien que, dans le cadre de la contestation des griefs retenus par la Commission, portant sur la période allant du 24 mai 1996 au 30 juin 1999, la requérante ait effectivement indiqué que « la durée de l’infraction [lui étant] imputable correspond[ait], au maximum, à la période [entre] le 29 mai 1997 [et] le 31 décembre 1998 », dans la même réponse, elle a contesté sa participation à des contacts illicites relevant de cette période, à savoir les réunions des 16 septembre et 26 novembre 1998.

111    Dès lors, eu égard au contexte dans lequel l’indication en cause a été fournie, la requérante ne saurait être considérée comme ayant reconnu, d’une manière expresse, claire et précise, sa participation à l’infraction durant la période litigieuse.

112    Par conséquent, le présent moyen doit être considéré comme recevable.

113    S’agissant du bien-fondé de ce moyen, il y a lieu d’observer, tout d’abord, que la requérante ne conteste ni sa participation à la réunion sur le PBS le 14 mai 1998 à Évian-les-Bains, ni le contenu illicite des discussions intervenues dans le cadre de cette réunion, exposées aux considérants 226 à 230 de la décision attaquée.

114    Il est également constant que la requérante n’a pas pris part à quatre autres réunions de l’entente concernant le PBS, qui ont eu lieu entre les assemblées du CEFIC de mai et de novembre 1998, à savoir deux réunions trilatérales portant sur la fermeture d’un site d’Atochem (considérants 233 et 243 de la décision attaquée), une réunion multilatérale de « haut niveau » et une réunion bilatérale entre Solvay et Degussa (considérants 237 et 239 de la décision attaquée).

115    La requérante conteste, néanmoins, sa participation à des contacts illicites en marge de l’assemblée du CEFIC le 26 novembre 1998 à Bruxelles, arguant ainsi que son implication dans l’entente s’est terminée à la date de la réunion du 14 mai 1998 à Évian-les-Bains. Elle soutient que, au regard de ces contacts, la Commission s’est appuyée, à tort, sur la seule déclaration de Degussa, imprécise et non corroborée par d’autres éléments de preuve.

116    Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que, selon une jurisprudence constante, la déclaration d’une entreprise inculpée, dont l’exactitude est contestée par d’autres entreprises, ne peut être considérée comme constituant une preuve suffisante de l’existence d’une infraction commise par ces dernières sans être étayée par d’autres éléments de preuve (voir arrêt Groupe Danone/Commission, point 42 supra, point 285, et la jurisprudence citée).

117    Concernant la participation de la requérante aux contacts illicites le 26 novembre 1998, il ressort du considérant 257 de la décision attaquée que les « producteurs de PBS (selon Degussa, [des] représentants d’Ausimont, de [la requérante], de Degussa, d’Atochem, de FMC Foret et de Solvay étaient présents) ont eu entre eux des contacts bilatéraux et multilatéraux pendant la pause de l’assemblée du CEFIC, afin d’échanger leurs points de vue sur l’application de la hausse du prix du PBS décidée en mai lors de la réunion d’Évian ».

118    La Commission a, en outre, rejeté la contestation de ces contacts par la requérante, en indiquant ce qui suit (considérant 258 de la décision attaquée) :

« Degussa a dit clairement que certains représentants avaient pris part à la réunion officielle sur le PBS et que, au cours de cette réunion, ces personnes avaient entretenu des contacts illicites (en n’excluant personne ; dans sa réponse à la communication des griefs, Degussa n’est pas revenue sur ces déclarations et ne les a pas non plus modifiées). Atofina a placé ces contacts illicites dans le même contexte sans avoir eu connaissance, au préalable, des déclarations de Degussa, de sorte que la Commission est d’avis que ces discussions ont effectivement eu lieu et que les personnes citées par Degussa y ont bien participé. »

119    Il ressort de ces motifs que, pour constater la participation de la requérante aux contacts illicites en cause, la Commission s’est fondée exclusivement sur l’information provenant de la déclaration de Degussa, faite dans le cadre de la coopération avec la Commission.

120    En effet, si la Commission a également relevé que Degussa « n’[était] pas revenue » sur ses dires et que sa déclaration coïncidait avec certaines informations d’Atofina, ces indications n’apportent aucun élément de preuve additionnel en ce qui concerne la participation de la requérante. En particulier, ainsi qu’il ressort du dossier, les informations d’Atofina font uniquement état de la réunion relative au PH qui a eu lieu le 25 novembre 1998 et ne font aucune référence à la requérante.

121    Il y a lieu de relever également que la déclaration de Degussa ne fait pas référence de manière explicite à la participation de la requérante à des contacts collusoires, mais se limite à fournir la liste des participants à l’assemblée officielle du CEFIC, dont un représentant de la requérante, ainsi qu’à affirmer, de manière générale, l’existence de contacts bilatéraux illicites en marge des réunions officielles.

122    Dès lors, il y a lieu de considérer que les éléments résultant de la déclaration de Degussa n’attestent pas de manière certaine la participation de la requérante aux contacts illicites à Bruxelles et, en l’absence de corroboration, ne constituent pas une preuve suffisante pour établir que la requérante a pris part à ces contacts.

123    Par conséquent, c’est à tort que la Commission a retenu la participation de la requérante aux contacts illicites du 26 novembre 1998.

124    S’agissant des conséquences de cette erreur, il convient de rappeler, que selon une jurisprudence bien établie, dans la mesure où certains motifs d’une décision sont à eux seuls, de nature à justifier celle-ci à suffisance de droit, les vices dont pourraient être entachés d’autres motifs de l’acte sont, en tout état de cause, sans influence sur son dispositif (arrêts du Tribunal du 21 septembre 2005, EDP/Commission, T‑87/05, Rec. p. II‑3745, point 144, et du 14 décembre 2005, General Electric/Commission, T‑210/01, Rec. p. II‑5575, point 42 ; voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du 12 juillet 2001, Commission et France/TF1, C‑302/99 P et C‑308/99 P, Rec. p. I‑5603, points 26 à 29).

125    En l’espèce, ainsi qu’il ressort du considérant 362 de la décision attaquée, la constatation du fait que la requérante a participé à l’infraction jusqu’au 31 décembre 1998 ne repose pas sur le seul élément tiré de sa participation aux contacts illicites du 26 novembre 1998, mais est également fondée sur le motif que la requérante s’est « conformée aux arrangements collusoires au moins jusqu’au 31 décembre 1998 », date jusqu’à laquelle valaient les arrangements collusoires décidés lors de la réunion du 14 mai 1998 à Évian-les-Bains.

126    Étant donné que la requérante ne conteste ni sa présence à la réunion à Évian-les-Bains, ni le contenu des accords conclus lors de cette réunion (considérants 226 à 230 de la décision attaquée), la constatation relative à sa participation aux arrangements décidés à Évian-les-Bains pour la période allant jusqu’au 31 décembre 1998 ne saurait être remise en cause par son argumentation tirée du prétendu défaut d’application des arrangements en question, qui serait prétendument corroborée par son absence dans d’autres réunions collusoires de 1998 ainsi que par sa décision de sortir du marché du PBS, prise à la fin de l’année 1998.

127    En effet, d’une part, la circonstance qu’une entreprise ne donne pas suite aux résultats d’une réunion ayant un objet anticoncurrentiel n’est pas de nature à écarter sa responsabilité, à moins qu’elle ne se soit distanciée publiquement du contenu illicite des discussions (voir arrêt de la Cour du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, Rec. p. I‑123, point 85, et la jurisprudence citée).

128    D’autre part, l’entente peut, à juste titre, être considérée comme ayant poursuivi ses effets jusqu’à la date butoir prévue explicitement dans le cadre des arrangements collusoires, indépendamment de leurs effets concrets sur le marché (voir, en ce sens, arrêt Bolloré e.a./Commission, point 59 supra, point 186).

129    Ainsi, en l’espèce, dans la mesure où il est établi que la requérante a adhéré aux arrangements décidés à Évian-les-Bains, incluant notamment la fixation des prix du PBS applicables au second semestre 1998 (considérants 229 et 362 de la décision attaquée), la seule circonstance qu’elle s’est soustraite à leur application, même à la supposer démontrée, ne saurait avoir d’incidence sur sa responsabilité pour la participation à l’entente durant la période concernée.

130    Il y a lieu de relever, à cet égard, que l’argument de la requérante tiré de l’absence de sa participation à des réunions au cours du second semestre 1998 n’est pas susceptible de démontrer qu’elle s’est distanciée publiquement du contenu des accords illicites conclus le 14 mai 1998 à Évian-les-Bains. En outre, il est constant que la requérante est restée active sur le marché du PBS jusqu’au milieu de l’année 1999.

131    Dès lors, il y a lieu de considérer que la constatation de la Commission relative à la participation de la requérante à l’infraction jusqu’au 31 décembre 1998 repose, à suffisance de droit, sur le fait que la requérante a adhéré aux arrangements collusoires applicables au second semestre 1998 décidés lors de la réunion du 14 mai 1998 à Évian-les-Bains.

132    Par conséquent, le fait que la Commission n’a pas établi la participation de la requérante aux contacts illicites du 26 novembre 1998 est sans influence sur la durée de l’infraction retenue à son égard.

133    S’agissant de la prétendue violation de l’obligation de motivation, il convient de relever que, ainsi qu’il résulte des points 125 et 129 ci‑dessus, la Commission a exposé, aux considérants 226 à 230 et 362 de la décision attaquée, tant les considérations juridiques que les éléments factuels sur lesquels elle fondait la constatation relative à la date de fin de la participation de la requérante à l’infraction.

134    En effet, la Commission a exposé, aux considérants 226 à 230 de la décision attaquée, le raisonnement à l’appui de sa constatation selon laquelle la requérante a adhéré aux arrangements collusoires décidés lors de la réunion du 14 mai 1998 à Évian-les-Bains. En outre, elle a indiqué, au considérant 362 de la décision attaquée, que « les prix convenus à [Évian-les-Bains] ont été appliqués jusqu’au 31 décembre 1998 » et que, « étant donné que [la requérante] s’est conformée au moins jusqu’au 31 décembre 1998 aux arrangements collusoires, la Commission maintiendr[ait] [ladite date] comme date finale à prendre en considération pour déterminer la durée de l’infraction dans [son] cas ».

135    Enfin, la constatation de la Commission relative à la participation de la requérante aux contacts illicites du 26 novembre 1998 ayant été infirmée, il n’est pas nécessaire de se prononcer sur l’argument de la requérante tiré d’une prétendue violation des droits de la défense affectant cette constatation, résultant du fait que, pour établir sa participation à la réunion de Bruxelles, la Commission s’est fondée sur un élément non divulgué tiré de la réponse de Degussa à la communication des griefs.

136    En tout état de cause, par cet argument, la requérante se limite à indiquer que, au considérant 258 de la décision attaquée, la Commission a fait référence au fait que, « dans sa réponse à la communication des griefs, Degussa n’[était] pas revenue sur ces déclarations [relatives aux contacts illicites ayant eu lieu le 26 novembre 1998 à Bruxelles] et ne les a pas non plus modifiées ». Or, il ne ressort aucunement de cette référence que la Commission ait employé un élément de preuve additionnel non communiqué à la requérante, susceptible de conduire à une violation de ses droits de la défense.

137    Au vu de tout ce qui précède, il convient de rejeter le présent moyen comme non fondé.

 Sur la prescription quinquennale

 Arguments des parties

138    La requérante soutient que, en refusant de constater que sa participation à l’infraction était prescrite, la Commission a violé l’article 25, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, ses droits de la défense, ainsi que l’obligation de motivation.

139    Elle fait valoir que cinq années se sont écoulées entre la date de cessation de sa participation à l’infraction, le 31 décembre 1998, et la date de la demande de renseignements, qui lui aurait été adressée le 18 mars 2004.

140    La requérante admet que, conformément à l’article 25, paragraphe 3, du règlement n° 1/2003, l’interruption de la prescription prend effet le jour où l’acte est notifié à au moins une entreprise ayant participé à l’infraction. Elle indique, cependant, que, en l’espèce, elle serait contrainte de « payer les effets de l’inertie de la Commission ». En effet, jusqu’au mois de mars 2004, la requérante aurait ignoré l’existence de l’enquête et n’aurait pas pu en avoir connaissance, car elle aurait été contrainte de sortir du marché cinq ans auparavant.

141    Selon la requérante, qui invoque l’arrêt CMA CGM e.a./Commission, point 84 supra (point 484), l’interruption de la prescription constitue une exception au principe de la prescription quinquennale, qui doit être interprétée de manière restrictive. En l’espèce, la Commission se serait limitée à donner une « interprétation formaliste » de l’article 25 du règlement n° 1/2003 et aurait omis d’expliquer les raisons pour lesquelles elle n’a pas envoyé la demande de renseignements à la requérante au début de l’enquête. La Commission aurait ainsi méconnu la raison sous-tendant l’interruption de la prescription, à savoir l’efficacité de l’action administrative, et aurait agi en méconnaissance des exigences de rapidité de la procédure et des intérêts de la requérante.

142    La décision attaquée serait donc illégale en ce que la Commission y a infligé une amende à la requérante, alors que cette dernière aurait cessé sa participation à l’entente plus de cinq années avant le début de l’enquête à son égard. Cette thèse serait confirmée par l’approche suivie par la Commission en l’espèce à l’égard de Chemoxal et de Air liquide (considérant 448 de la décision attaquée), ainsi que dans des décisions antérieures, dans lesquelles la Commission n’aurait pas infligé d’amendes aux producteurs ayant cessé leur participation à l’entente plus de cinq années avant le début de l’enquête [décision 2005/566/CE de la Commission, du 9 décembre 2004, relative à une procédure d’application de l’article [81 CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire C.37.533 – Chlorure de choline) (JO 2005, L 190, p. 22)].

143    L’attitude de la Commission serait illégale, dans la mesure où, en se prévalant de l’article 25 du règlement n° 1/2003, elle aurait omis, pendant plus d’une année, de communiquer à la requérante l’existence d’une enquête et n’aurait pas motivé cette omission. L’enquête de la Commission serait entachée d’un « excès de pouvoir », consistant en un détournement de la finalité de cette disposition et en un défaut de motivation. Ce vice de procédure aurait pour conséquence l’illégalité de la décision attaquée en ce que la Commission y a infligé une amende à la requérante.

144    L’inertie de la Commission à l’égard de la requérante, à savoir l’envoi tardif de la demande de renseignements à celle-ci, imputable à une négligence de l’institution, entraînerait l’illégalité de la décision attaquée pour violation des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime.

145    La Commission aurait manqué à son devoir de motivation, à défaut d’avoir indiqué les motifs pour lesquels la communication à la requérante avait été effectuée tardivement. Le caractère tardif de l’action de la Commission aurait, en outre, indûment restreint les droits de la défense de la requérante, qui aurait disposé de moins de temps pour préparer sa défense et pour prendre connaissance des faits litigieux.

146    La Commission conteste les arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

147    Aux termes de l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1/2003, le pouvoir de sanction prévu pour la Commission par les articles 23 et 24 dudit règlement est soumis au délai de prescription de cinq ans.

148    En vertu de l’article 25, paragraphe 2, du même règlement, la prescription court à compter du jour où l’infraction a été commise ou, pour les infractions continues ou continuées, à compter du jour où l’infraction a pris fin.

149    Conformément à l’article 25, paragraphe 3, du règlement n° 1/2003, la prescription est interrompue par tout acte de la Commission visant à l’instruction ou à la poursuite de l’infraction. L’interruption prend effet le jour où l’acte est notifié à au moins une entreprise ou association d’entreprises ayant participé à l’infraction et, en vertu de l’article 25, paragraphe 4, du même règlement, vaut à l’égard de toutes les entreprises et associations d’entreprises ayant participé à l’infraction.

150    Les mêmes règles résultent des articles 1er et 2 du règlement (CEE) n° 2988/74 du Conseil, du 26 novembre 1974, relatif à la prescription en matière de poursuites et d’exécution dans les domaines du droit des transports et de la concurrence de la Communauté économique européenne (JO L 319, p. 1).

151    En l’espèce, ainsi qu’il ressort de l’examen du troisième moyen (voir point 131 ci‑dessus), la Commission a constaté, à bon droit, que la requérante avait participé à l’infraction jusqu’au 31 décembre 1998.

152    Il est constant que la première mesure prise par la Commission pour instruire l’infraction en cause consista en des inspections dans les locaux de certaines entreprises, effectuées les 25 et 26 mars 2003 (voir point 3 ci-dessus), soit avant l’expiration du délai de prescription quinquennale à l’égard de la requérante, de sorte que la prescription n’avait pas été acquise à la date d’adoption de la décision attaquée.

153    Il en résulte que la poursuite de l’infraction à l’égard de la requérante n’était pas prescrite.

154    À cet égard, l’argument de la requérante, tiré du fait que cinq années se sont écoulées entre la date de fin de l’infraction et la date de demande de renseignements qui lui a été adressée par la Commission, procède d’une interprétation erronée des dispositions de l’article 25, paragraphes 3 et 4, du règlement n° 1/2003, et de celles de l’article 2, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 2988/74, dont il résulte clairement que l’interruption de la prescription prend effet le jour où l’acte est notifié à au moins une entreprise ayant participé à l’infraction et vaut à l’égard de toutes les entreprises ayant participé à l’infraction.

155    Ces considérations, résultant de manière explicite des dispositions précitées, ne sauraient par ailleurs être remises en cause par l’argumentation de la requérante tirée de la nécessité d’une interprétation stricte des règles de l’interruption de prescription, d’un « excès de pouvoir » consistant en un détournement de la finalité de cette disposition, ainsi qu’en un défaut de motivation.

156    En outre, c’est également à tort que la requérante invoque une prétendue « discrimination », en faisant référence à l’absence de condamnation à une amende d’entreprises dans des décisions antérieures, lesdites entreprises s’étant trouvées dans des situations manifestement différentes de la sienne, dans la mesure où la prescription de cinq ans avait été acquise à la date des premiers actes de la Commission visant à l’instruction de l’infraction (considérant 448 de la décision attaquée et considérant 184 de la décision 2005/566).

157    Concernant l’argument de la requérante fondé sur la jurisprudence selon laquelle, pour interrompre valablement la prescription quinquennale, une demande de renseignements doit pouvoir être légitimement regardée comme présentant un rapport avec l’infraction présumée (arrêt CMA CGM e.a./Commission, point 84 supra, points 484 à 488), il suffit d’observer que la requérante n’avance aucune argumentation tendant à démontrer que les actes interruptifs en cause, à savoir les inspections des 25 et 26 mars 2003 (voir point 3 ci-dessus), n’ont pas été justifiés au regard des objectifs de l’enquête ou que leur seul objectif a été de prolonger artificiellement le délai de prescription.

158    L’argumentation de la requérante tirée de l’application prétendument erronée des règles de prescription est donc dépourvue de fondement.

159    Dans le cadre du présent moyen, la requérante soutient également que la prétendue négligence de la Commission, ayant envoyé la demande de renseignements à la requérante presque un an après le début de l’enquête, constitue une violation des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime, ainsi que de ses droits de la défense. La requérante indique notamment qu’elle n’a pas été au courant de l’existence de l’enquête en temps utile et qu’elle n’aurait pas pu en avoir connaissance, car elle n’était plus présente sur le marché en cause.

160    S’agissant de la prétendue violation des principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime, dans la mesure où la requérante invoque la jurisprudence selon laquelle, en l’absence de texte prévoyant un délai de prescription, l’exigence fondamentale de la sécurité juridique s’oppose à ce que la Commission puisse retarder indéfiniment l’exercice de ses pouvoirs (arrêt du Tribunal du 6 octobre 2005, Sumitomo Chemical et Sumika Fine Chemicals/Commission, T‑22/02 et T‑23/02, Rec. p. II‑4065, points 87 à 89), il suffit d’observer que l’hypothèse visée par cette jurisprudence n’est pas pertinente dans le cas de l’espèce, le pouvoir de sanction de la Commission exercé à l’égard de la requérante étant soumis à un délai de prescription visé à l’article 25, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 1/2003 ainsi qu’à l’article 1er, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 2988/74.

161    Ledit délai de prescription ayant été respecté en l’espèce, l’imposition de l’amende à la requérante ne saurait enfreindre les principes de sécurité juridique et de protection de la confiance légitime.

162    S’agissant de la prétendue violation des droits de la défense de la requérante, résultant d’une information prétendument tardive de l’existence de l’enquête, il y a lieu de rappeler que, bien que la Commission soit tenue de fournir à l’entreprise concernée certains éléments d’information, dès le stade de la phase d’instruction préliminaire, cette obligation vise l’information donnée à l’entreprise concernée, au stade de la première mesure prise à son égard (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 8 juillet 2008, AC-Treuhand/Commission, T‑99/04, Rec. p. II‑1501, points 52 à 56).

163    Or, en l’espèce, la requérante ne conteste pas avoir été informée de l’instruction en cours, de manière adéquate, au stade de la première mesure prise à son égard, à savoir dans le cadre de la demande de renseignements du 18 mars 2004.

164    Par ailleurs, même à supposer que le fait que la requérante n’a pas été informée de l’enquête dès les premiers actes d’instruction puisse, en tant que tel, être pris en compte dans le cadre de l’examen d’une prétendue atteinte à ses droits de la défense, il y a lieu de relever que, en tout état de cause, la requérante n’avance aucun élément concret pour étayer sa thèse selon laquelle le caractère prétendument tardif de cette information aurait porté atteinte à l’efficacité de sa défense.

165    Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de rejeter le présent moyen.

 Sur l’appréciation des circonstances atténuantes

 Arguments des parties

166    La requérante soutient que la Commission a fait une application erronée des lignes directrices, dénaturé les faits et violé l’obligation de motivation, en lui refusant le bénéfice des circonstances atténuantes au titre de l’absence d’application des accords et de l’absence d’avantage économique ou financier retiré de l’infraction.

167    En premier lieu, la requérante soutient ne pas avoir appliqué les accords conclus lors des réunions retenues à son égard dans la décision attaquée. Aucun accord n’ayant été conclu lors des réunions de Séville, en mai 1997 (considérant 164 de la décision attaquée), il s’agirait uniquement de l’application des accords sur le PBS convenus au cours de la réunion d’Évian-les-Bains, en mai 1998, comportant une hausse des prix au cours du second semestre 1998 (considérants 229 et 230 de la décision attaquée).

168    Or, durant la période en cause, la requérante aurait de manière générale réduit ses prix de vente du PBS, à l’exception d’une augmentation légère au mois d’août 1998, due à l’augmentation des prix de la principale matière première, le PH. Jusqu’en mars 1999, ses prix du PBS seraient restés largement inférieurs aux niveaux des prix de mai 1998. Ainsi, il serait évident que les augmentations de prix prévues à Évian-les-Bains n’ont pas été appliquées par la requérante.

169    Eu égard à l’écart des prix pratiqués par la requérante par rapport à ceux convenus, ainsi qu’à sa décision de sortir du marché du PBS prise en automne 1998, il serait impossible que la requérante ait tenté d’utiliser l’entente à son profit, comme le prétendrait la Commission.

170    En second lieu, la requérante indique que sa prétendue participation à l’entente ne lui a procuré aucun avantage économique ou financier, mais qu’elle l’a, au contraire, conduite hors du marché du PBS. La Commission aurait dû prendre en compte cet élément, en tant que circonstance atténuante.

171    La Commission conteste les arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

172    Il y a lieu de rappeler que, dans le cadre de l’appréciation des circonstances atténuantes dans la décision attaquée, la Commission a réduit le montant de l’amende infligée à la requérante de 50 %, au titre de son rôle passif et mineur dans l’infraction. Elle a constaté, en effet, que le rôle de la requérante dans le cadre de l’entente n’était pas comparable à celui des autres membres actifs, que sa participation aux contacts collusoires était sensiblement plus sporadique, limitée à seulement deux réunions concernant le PBS, ce qui attestait sa participation réduite à l’ensemble des arrangements illicites (considérants 476 et 477 de la décision attaquée).

173    À cet égard, il y a lieu de relever qu’il ne ressort pas des lignes directrices que la Commission doit toujours prendre en compte séparément chacune des circonstances atténuantes énumérées au point 3 de celles-ci. Si les circonstances qui y sont énumérées comptent certainement parmi celles qui peuvent être prises en compte par la Commission dans un cas donné, cette dernière n’est pas obligée d’accorder une réduction supplémentaire à ce titre de manière automatique, dès lors qu’une entreprise avance des éléments de nature à indiquer la présence d’une de ces circonstances.

174    Ainsi, en l’absence d’une indication de nature impérative dans les lignes directrices en ce qui concerne les circonstances atténuantes qui peuvent être prises en compte, la Commission a conservé une marge d’appréciation pour apprécier d’une manière globale l’importance d’une éventuelle réduction du montant des amendes, en tenant compte de l’ensemble des circonstances atténuantes caractérisant le cas de l’espèce (arrêts du Tribunal du 8 juillet 2004, Mannesmannröhren-Werke/Commission, T‑44/00, Rec. p. II‑2223, points 274 et 275, et Dalmine/Commission, T‑50/00, Rec. p. II‑2395, points 325 et 326 ; voir également, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 septembre 2007, Prym et Prym Consumer/Commission, T‑30/05, non publié au Recueil, point 204).

175    En l’espèce, eu égard au niveau important de la réduction du montant de l’amende appliquée dans la décision attaquée, l’argumentation de la requérante tirée de l’existence d’autres circonstances atténuantes, non admises par la Commission, même à la supposer fondée, n’est pas susceptible de conduire à admettre le caractère inadéquat d’une réduction, accordée par la Commission au titre de l’appréciation des circonstances atténuantes.

176    De surcroît, il convient de relever que les arguments avancés par la requérante ne démontrent pas, en tout état de cause, l’existence de circonstances atténuantes autres que celles admises par la Commission.

177    S’agissant, d’une part, de la prétendue absence de bénéfice retiré de l’infraction en cause, il convient de rappeler que, dans le cadre de la détermination du montant de l’amende, la Commission n’est pas tenue d’établir que l’infraction a procuré un avantage illicite aux entreprises concernées, ni de prendre en considération, le cas échéant, l’absence de bénéfice tiré de l’infraction (voir arrêt Bolloré e.a./Commission, point 59 supra, point 671, et la jurisprudence citée). En particulier, l’absence d’un avantage financier lié à l’infraction ne saurait être considérée comme une circonstance atténuante (voir arrêt BPB/Commission, point 60 supra, point 442, et la jurisprudence citée).

178    S’agissant, d’autre part, de la prétendue absence d’application effective des accords, circonstance visée par le point 3, deuxième tiret, des lignes directrices, il convient de vérifier si la requérante a avancé des arguments de nature à établir que, pendant la période au cours de laquelle elle a adhéré aux accords infractionnels, elle s’est effectivement soustraite à leur application en adoptant un comportement concurrentiel sur le marché ou, à tout le moins, qu’elle a clairement et de manière considérable enfreint les obligations visant à mettre en œuvre cette entente, au point d’avoir perturbé le fonctionnement même de celle-ci (arrêts du Tribunal du 15 mars 2006, Daiichi Pharmaceutical/Commission, T‑26/02, Rec. p. II‑713, point 113, et du 8 octobre 2008, Carbone‑Lorraine/Commission, T‑73/04, Rec. p. II‑2661, point 196).

179    À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’infraction imputée à la requérante résulte de sa participation, d’une part, aux réunions illicites ayant eu lieu le 29 mai 1997 à Séville, achevées sans conclusion d’un accord quant aux arrangements collusoires (considérants 162 à 164 de la décision attaquée), et, d’autre part, à celle du 14 mai 1998 à Évian-les-Bains, ayant abouti aux accords infractionnels sur les parts de marché et les prix du PBS, applicables au second semestre 1998 (considérants 226 à 230 de la décision attaquée).

180    La requérante soutient, en substance, que ses prix pratiqués durant la période concernée n’ont pas subi les augmentations prévues par des accords infractionnels conclus le 14 mai 1998 à Évian-les-Bains. Elle se réfère, à cet égard, aux éléments joints à sa réponse à la communication des griefs et annexés à la requête ainsi qu’aux éléments supplémentaires présentés au stade de la réplique.

181    Or, premièrement, il y a lieu de relever que les éléments en cause ne sauraient être considérés comme une preuve fiable du comportement de la requérante sur le marché. Il s’agit, en effet, d’un graphique et de tableaux compilés par la requérante en 2005, sans la moindre explication des données sur la base desquelles cette compilation a été établie, et non accompagnés de preuve à l’appui. Par ailleurs, si, en annexe de la réplique, la requérante fournit un certain nombre de factures de 1998 émises pour la vente du produit concerné, ces éléments, qui ont été produits pour la première fois devant le Tribunal doivent, de ce fait, être écartés (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 27 septembre 2006, Akzo Nobel/Commission, T‑330/01, Rec. p. II‑3389, point 89).

182    Deuxièmement, il convient de relever que, ainsi qu’il ressort des considérants 226 à 230 de la décision attaquée, les accords infractionnels conclus à Évian-les-Bains ont porté non pas seulement sur les prix, mais également sur le partage du marché, la requérante ayant participé à l’établissement du modèle de contrôle des parts de marché en fournissant ses données.

183    Dans ces conditions, l’argumentation et les éléments présentés par la requérante ne suffisent pas à démontrer qu’elle s’est soustraite à l’application de l’ensemble de ces arrangements collusoires, en adoptant un comportement concurrentiel sur le marché ou, à tout le moins, qu’elle a clairement et de manière considérable enfreint les obligations visant à mettre en œuvre cette entente, au point d’avoir perturbé le fonctionnement même de celle-ci.

184    Il résulte de toutes ces considérations que le présent moyen doit être rejeté.

185    Par conséquent, il y a lieu de rejeter le présent recours dans son ensemble, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir soulevée par la Commission et tirée de l’irrecevabilité des conclusions de la requérante tendant à l’annulation de la décision attaquée, en ce que la Commission y a infligé une amende à sa société mère SNIA.

 Sur les dépens

186    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre élargie)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Caffaro Srl est condamnée aux dépens.

Vadapalas

Dittrich

Truchot

Signatures

Table des matières

Faits à l’origine du litige

Décision attaquée

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur le prétendu statut de « victime et non [de] membre de l’entente sur le PH » invoqué par la requérante

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur l’année de référence prise en compte dans le cadre du traitement différencié

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur l’appréciation de la durée de la participation de la requérante à l’infraction

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur la prescription quinquennale

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur l’appréciation des circonstances atténuantes

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’italien.