Language of document : ECLI:EU:T:2004:226

Arrêt du Tribunal

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)
8 juillet 2004 (1)

« Marque communautaire – Marque verbale bestpartner – Motifs absolus de refus – Article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement (CE) n° 40/94 – Marque dépourvue de caractère distinctif – Marque descriptive »

Dans l'affaire T-270/02,

MLP Finanzdienstleistungen AG, établie à Heidelberg (Allemagne), représentée par Me W. Göpfert, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Schneider, en qualité d'agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la troisième chambre de recours de l'OHMI du 26 juin 2002 (affaire R 206/2002-3), portant rejet de l'enregistrement de la marque verbale bestpartner,



LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),



composé de MM. J. Pirrung, président, A. W. H. Meij et N. J. Forwood, juges,

greffier : Mme D. Christensen, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 28 août 2002,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 19 décembre 2002,

vu les mesures d'organisation de la procédure du 16 décembre 2003,

à la suite de l'audience du 3 février 2004,

rend le présent



Arrêt




Antécédents du litige

1
Le 20 juin 2001, la requérante a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2
La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal bestpartner.

3
Les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 36, 38 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, après rectification, à la description suivante :

« assurances, notamment conseils en matière d’assurances ; courtage en assurances ; services financiers, conseils financiers ; conseil en matière d’épargne et de placement de capitaux, conseils en matière d’investissement ; analyses financières, courtage en placement, en particulier dans des fonds ; investissements de capitaux ; gestion du patrimoine pour le compte de tiers ; conseils en matière d’achat immobilier ; concepts de gestion immobilière pour le compte de tiers », relevant de la classe 36 ;

« services Internet, à savoir préparation, traitement et offre d’informations via Internet », relevant de la classe 38 ;

« traitement de données pour le compte de tiers ; développement, création, amélioration et actualisation de programmes pour le traitement de textes et de l’information, ainsi que pour la commande de procédés ; conseils techniques et d’utilisation en rapport avec les ordinateurs et les programmes de traitement de l’information ; service d’un fournisseur d’accès à Internet, à savoir programmation pour résoudre des problèmes spécifiques de chaque secteur sur Internet, création et conception de sites Web, à savoir création, maintien et entretien d’accès et de portails d’accès à Internet », relevant de la classe 42.

4
Par décision du 2 janvier 2002, l’examinatrice a rejeté la demande d’enregistrement au titre de l’article 38 du règlement n° 40/94, en se fondant sur l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), et, paragraphe 2, dudit règlement, au motif que le signe demandé était une expression courante et serait compris comme un slogan publicitaire descriptif et dépourvu de caractère distinctif, à tout le moins dans la partie anglophone de l’Union européenne. Le 27 février 2002, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI au titre de l’article 59 du règlement n° 40/94 contre la décision de l’examinatrice.

5
Par décision du 26 juin 2002 (ci-après la « décision attaquée »), la troisième chambre de recours a rejeté le recours au motif que le signe demandé est, d’une part, totalement dénué du caractère distinctif requis et, d’autre part, exclusivement composé d’indications descriptives.


Conclusions des parties

6
La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler la décision attaquée ;

condamner l’OHMI aux dépens.

7
L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

condamner la requérante aux dépens.


En droit

Arguments des parties

8
La requérante fonde son recours, premièrement, sur la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 en ce que la chambre de recours a méconnu le caractère distinctif de la marque demandée et, deuxièmement, sur la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement en ce que la chambre de recours a appliqué de manière erronée le critère tiré du besoin de disponibilité.

9
La requérante fait valoir que les termes « best » et « partner » peuvent s’entendre tous les deux dans des sens différents. À plus forte raison, le vocable bestpartner résultant de la combinaison de ces termes n’aurait aucun sens univoque et permettrait au public ciblé, qui serait composé de consommateurs moyens mais particulièrement avisés et raisonnablement attentifs au domaine sensible des services d’assurance et des services financiers, de distinguer les services qu’elle offre. Elle souligne que le vocable bestpartner est un néologisme qui ne figure pas dans les dictionnaires en tant que terme unique et qui devrait être examiné en le distinguant de ses éléments constitutifs.

10
Selon la requérante, il découle de ces circonstances que le signe dont elle a demandé l’enregistrement comme marque pour les services financiers, d’assurance et de traitement de données sur Internet n’est pas descriptif de ces services. Dès lors, il n’y aurait aucun besoin de disponibilité qui s’oppose à cet enregistrement. La requérante invoque, à cet égard, l’arrêt du Tribunal du 31 janvier 2001, Taurus-Film/OHMI (Cine Action) (T‑135/99, Rec. p. II-379, point 29), pour relever qu’un signe n’a pas de caractère descriptif par rapport à des services si le rapport entre ce signe et ces services est trop vague et indéterminé. La requérante fait valoir que seules les indications qui sont directement descriptives, de manière claire et univoque, doivent rester disponibles conformément à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94. En l’espèce, le signe bestpartner serait à considérer comme un slogan publicitaire.

11
Quant au résultat d’une recherche sur Internet évoquée au point 4 de la décision attaquée, la requérante souligne que le fait que l’expression en cause est abondamment utilisée dans le commerce n’est pas une raison suffisante pour en refuser l’enregistrement comme marque au titre de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94. La requérante cite des exemples d’utilisation du signe en question dans le cadre de noms de domaine sur Internet et conclut que l’utilisation faite de ce signe dans le commerce démontre son aptitude à indiquer que des services proviennent d’une entreprise déterminée.

12
En outre, il résulterait des mêmes circonstances que le signe bestpartner n’est pas dénué du degré minimal de distinctivité requis par la jurisprudence [arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, Rec. p. II-683, point 39]. La requérante souligne, à cet égard, que l’absence de distinctivité ne saurait résulter de la seule constatation de ce que le signe en cause manque de surcroît de fantaisie ou n’a pas un aspect inhabituel ou frappant [arrêt du Tribunal du 5 avril 2001, Bank für Arbeit und Wirtschaft/OHMI (EASYBANK), T‑87/00, Rec. p. II-1259, point 39].

13
Par ailleurs, le fait que des marques similaires ont été enregistrées auprès de l’OHMI, en particulier les marques bestpartner classic et bestpartner topinvest, ainsi que dans des États membres de la Communauté, devrait être considéré comme une indication de ce que le signe demandé est susceptible d’être enregistré comme marque également.

14
Enfin, la requérante renvoie aux arguments qu’elle a soulevés devant l’OHMI et fait valoir qu’ils font partie intégrante de sa requête.

15
L’OHMI conteste l’ensemble des moyens et arguments avancés par la requérante. Ainsi, c’est à juste titre, selon l’OHMI, que la chambre de recours a refusé la marque demandée par la requérante, en particulier parce que celle‑ci est dépourvue du caractère distinctif minimal requis.

Appréciation du Tribunal

16
À titre liminaire, il y a lieu de relever que la requérante conclut sa requête par une demande visant à ce que son mémoire devant l’OHMI soit considéré comme faisant partie intégrante des moyens et arguments du présent recours, afin d’« éviter de [se] répéter inutilement ». Or, selon une jurisprudence bien établie, en vertu de l’article 44, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, applicable en matière de propriété intellectuelle en vertu de l’article 130, paragraphe 1, et de l’article 132, paragraphe 1, de ce règlement, si le corps de la requête peut être étayé et complété, sur des points spécifiques, par des renvois à des extraits de pièces qui y sont annexées, un renvoi global à d’autres écrits ne saurait pallier l’absence des éléments essentiels de l’argumentation en droit, qui, en vertu des dispositions rappelées ci-dessus, doivent figurer dans la requête elle‑ême (arrêt du Tribunal du 20 avril 1999, LVM/Commission, T‑305/94 à T‑307/94, T‑313/94 à T‑316/94, T‑318/94, T‑325/94, T‑328/94, T‑329/94 et T‑335/94, Rec. p. II-931, point 39). Dès lors, la requête, pour autant qu’elle renvoie aux écrits déposés par la requérante devant l’OHMI, est irrecevable dans la mesure où le renvoi global qu’elle contient n’est pas rattachable à un moyen développé dans la requête.

17
Sur le fond, il y a lieu de rappeler d’abord que, aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sont refusées à l’enregistrement « les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ».

18
En outre, l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 énonce que le « paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».

19
À cet égard, le caractère distinctif ne peut être apprécié que par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement du signe est demandé et, d’autre part, par rapport à la compréhension qu’en a le public pertinent [voir, par exemple, arrêt du Tribunal du 20 mars 2002, DaimlerChrysler/OHMI (TELE AID), T‑355/00, Rec. p. II‑1939, point 51].

20
En outre, il convient de tenir compte non seulement du sens explicite et direct des termes utilisés pour former un signe composite, mais aussi des connotations qu’ils sont susceptibles d’évoquer.

21
En l’espèce, les parties se sont focalisées dans leur argumentation sur le fait que les deux termes « best » et « partner » sont des termes anglais, mais il y a lieu de constater que, en outre, ces termes existent avec d’éventuelles variations mineures dans d’autres langues de la Communauté, notamment en néerlandais et en allemand. En toute hypothèse, dès lors qu’il suffit, pour que l’enregistrement d’une marque soit refusé, que les motifs de refus existent dans une partie de la Communauté, force est de constater que, au cas où il serait établi qu’un motif de refus existe pour la partie anglophone de celle-ci, comprenant deux États membres, l’éventuelle existence d’un tel motif également dans d’autres parties de la Communauté serait sans incidence sur l’issue du présent litige. Ainsi, il convient de considérer, aux fins de la présente procédure, que le public pertinent est un public anglophone.

22
De plus, il y a lieu de considérer que le public pertinent est composé de consommateurs particulièrement avisés et attentifs, compte tenu du caractère spécialisé des services concernés par la demande de marque.

23
En l’espèce, le signe est composé exclusivement des termes « best » et « partner », tous deux appartenant notamment à la langue anglaise. Le terme « best » évoque la notion de qualité et permet donc au public pertinent de comprendre que l’on est en présence d’un produit ou d’un service qui est de la meilleure qualité. Le mot « partner » est employé dans des contextes différents, y compris dans le domaine des prestations de services, pour décrire des relations d’association ou de partenariat en évoquant des connotations positives de fiabilité et de continuité à cet égard. En effet, la chambre de recours relève à juste titre au point 24 de la décision attaquée que, dans le langage publicitaire moderne, ce terme est utilisé pour décrire la relation de fournisseur à client, ce premier se considérant comme le « partenaire commercial » de ce dernier.

24
Ainsi, force est de constater que les termes « best » et « partner » sont des mots génériques qui se bornent à évoquer la qualité des services fournis par une entreprise à ses clients [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 janvier 2000, DKV/OHMI (COMPANYLINE), T‑19/99, Rec. p. II‑1, point 26, confirmé par la Cour sur pourvoi par arrêt du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec. p. I‑7561, points 13 à 25].

25
Dès lors, ces termes pris individuellement sont descriptifs des services visés. Or, des termes descriptifs à l’égard de certains produits ou services sont également dépourvus de caractère distinctif en ce qui concerne les mêmes produits ou services [arrêt du Tribunal du 2 juillet 2002, SAT.1/OHMI (SAT.2), T‑323/00, sous pourvoi, Rec. p. II‑2839, point 40]. Il n’en serait autrement que si, du fait de leur accolement, le vocable en résultant signifiait autre chose que le sens évoqué par les deux termes se suivant.

26
Le fait d’accoler ces deux termes, sans la moindre modification graphique ou sémantique, ne présente aucune caractéristique additionnelle susceptible de rendre le signe dans son ensemble apte à distinguer les services de la requérante de ceux d’autres entreprises dans l’esprit du public pertinent (voir, en ce sens, arrêt COMPANYLINE, point 24 supra, point 26). En effet, le vocable bestpartner laisse apparaître que le sens des deux termes qui le composent est « meilleur partenaire », de la même manière que l’expression composée des mêmes termes non accolés, « best partner ». Le fait que ledit vocable n’est pas cité dans les dictionnaires en tant que tel – qu’il soit écrit en un seul mot ou non – ne modifie en aucune manière cette appréciation.

27
En conséquence, le signe bestpartner est dépourvu, à l’égard du public pertinent, du degré minimal de distinctivité requis par la jurisprudence (voir, par exemple, arrêt EUROCOOL, point 12 supra, point 39), et la chambre de recours a donc conclu à juste titre que le motif de refus prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 s’opposait à l’enregistrement demandé en l’espèce.

28
Il ressort de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 40/94 qu’il suffit qu’un des motifs absolus de refus énumérés s’applique pour que le signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire (arrêt COMPANYLINE, point 24 supra, point 30). Par conséquent, il résulte de ce qui précède que le présent recours doit être rejeté sans qu’il soit besoin d’examiner l’argumentation de la requérante relative à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94.


Sur les dépens

29
Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux entiers dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)
Le recours est rejeté.

2)
La requérante supportera les dépens.

Pirrung

Meij

Forwood

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 8 juillet 2004.

Le greffier

Le président

H. Jung

J. Pirrung


1
Langue de procédure : l'allemand.