Language of document : ECLI:EU:T:2004:238

Arrêt du Tribunal

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)
15 juillet 2004 (1)

« Fonctionnaires – Affectation – Détachement dans l'intérêt du service – Modification avec effet rétroactif du lieu d'affectation et des droits financiers y afférents – Répétition de l'indu – Indemnité d'installation et indemnité journalière – Transfert d'une partie des émoluments hors du lieu d'affectation »

Dans les affaires jointes T-180/02 et T-113/03,

Georgios Gouvras, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bereldange (Luxembourg), représenté par Mes J.-N. Louis, É. Marchal et A. Coolen, avocats, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. J. Currall et Mme L. Lozano Palacios, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse,

ayant pour objet,

dans l'affaire T-180/02, l'annulation de la décision de la Commission de fixer, avec effet rétroactif au 1er novembre 2000 et pendant la durée de son détachement dans l'intérêt du service, le lieu d'affectation du requérant à Athènes, de supprimer son droit à l'indemnité de dépaysement et son droit au remboursement des frais de voyage annuel et d'affecter sa rémunération du coefficient correcteur applicable à la Grèce, ainsi que de la décision de procéder à la répétition de l'indu, et,

dans l'affaire T-113/03, l'annulation de la décision de la Commission refusant au requérant le bénéfice de l'indemnité d'installation et de l'indemnité journalière pour la période de son détachement à Athènes dans l'intérêt du service et le bénéfice de l'indemnité d'installation lors de sa réaffectation à Luxembourg, ainsi que de la décision limitant à 35 % la partie de sa rémunération transférable au lieu d'affectation au Luxembourg pendant la durée de son détachement,



LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),



composé de MM. J. Azizi, président, M. Jaeger et F. Dehousse, juges,

greffier : M. I. Natsinas, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du 15 janvier 2004,

rend le présent



Arrêt




Cadre juridique

1
L’article 37 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après le « statut ») définit le détachement dans l’intérêt du service en ces termes :

« Le détachement est la position du fonctionnaire titulaire qui, par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination :

a) dans l’intérêt du service :

est désigné pour occuper temporairement un emploi en dehors de son institution

[…] »

2
L’article 38 du statut précise les règles applicables à ce type de détachement :

« Le détachement dans l’intérêt du service obéit aux règles suivantes :

a)
il est décidé par l’autorité investie du pouvoir de nomination, l’intéressé ayant été entendu ;

b)
sa durée est fixée par l’autorité investie du pouvoir de nomination ;

c)
à l’expiration de chaque période de six mois, l’intéressé peut demander qu’il soit mis fin à son détachement ;

d)
le fonctionnaire détaché en vertu des dispositions prévues à l’article 37, [sous] a), premier tiret, a droit à un traitement différentiel lorsque l’emploi de détachement comporte une rémunération globale inférieure à celle afférente à son grade et à son échelon, dans son institution d’origine ; il a droit également au remboursement de la totalité des charges supplémentaires qu’entraîne pour lui son détachement ;

[…]

f)
le fonctionnaire détaché conserve son emploi, ses droits à l’avancement et sa vocation à la promotion ;

g)
à l’expiration du détachement, le fonctionnaire réintègre immédiatement l’emploi qu’il occupait antérieurement. »

3
Le lieu d’affectation pendant le détachement a une incidence sur l’applicabilité des articles 4, 5 et 10 de l’annexe VII du statut, qui régissent respectivement l’indemnité de dépaysement, l’indemnité d’installation et l’indemnité journalière.

4
Selon l’article 4 de l’annexe VII du statut :

« 1. L’indemnité de dépaysement égale à 16 % du montant total du traitement de base ainsi que de l’allocation de foyer et de l’allocation pour enfant à charge versées au fonctionnaire est accordée :

a)      au fonctionnaire :

qui n’a pas et n’a jamais eu la nationalité de l’État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation

et

qui n’a pas, de façon habituelle, pendant la période de cinq années expirant six mois avant son entrée en fonctions, habité ou exercé son activité professionnelle principale sur le territoire européen dudit État. Pour l’application de cette disposition, les situations résultant de services effectués pour un autre État ou une organisation internationale ne sont pas à prendre en considération ;

b)
au fonctionnaire qui, ayant ou ayant eu la nationalité de l’État sur le territoire duquel est situé le lieu de son affectation, a, de façon habituelle, pendant la période de dix années expirant lors de son entrée en service, habité hors du territoire européen dudit État pour une raison autre que l’exercice de fonctions dans un service d’un État ou dans une organisation internationale. »

5
L’article 5 de l’annexe VII du statut dispose :

« 1. Une indemnité d’installation égale à deux mois de traitement de base, s’il s’agit d’un fonctionnaire qui a droit à l’allocation de foyer, ou égale à un mois de traitement de base, s’il s’agit d’un fonctionnaire n’ayant pas droit à cette allocation, est due au fonctionnaire titulaire qui remplit les conditions pour bénéficier de l’indemnité de dépaysement ou qui justifie avoir été tenu de changer de résidence pour satisfaire aux obligations de l’article 20 du statut.

[…]

L’indemnité d’installation est affectée du coefficient correcteur fixé pour le lieu d’affectation du fonctionnaire.

2. Une indemnité d’installation d’un même montant est versée lors d’une affectation à un nouveau lieu de service au fonctionnaire qui est appelé à transférer sa résidence pour satisfaire aux obligations de l’article 20 du statut.

3. […]

L’indemnité d’installation est versée sur production de documents justifiant de l’installation du fonctionnaire au lieu de son affectation, ainsi que de celle de sa famille, si le fonctionnaire a droit à l’allocation de foyer.

4. Si un fonctionnaire qui a droit à l’allocation de foyer ne s’installe pas avec sa famille au lieu de son affectation, il ne reçoit que la moitié de l’indemnité à laquelle il aurait normalement droit ; la seconde moitié lui est versée lors de l’installation de sa famille au lieu de son affectation pour autant que cette installation ait lieu dans les délais visés à l’article 9, paragraphe 3, [de l’annexe VII du statut].

Si cette installation n’est pas intervenue et si le fonctionnaire vient à être affecté au lieu où réside sa famille, il n’a pas droit, de ce fait, à une indemnité d’installation.

[…] »

6
L’article 10 de l’annexe VII du statut prévoit :

« 1. Le fonctionnaire qui justifie être tenu de changer de résidence pour satisfaire aux obligations de l’article 20 du statut a droit, pour une durée déterminée au paragraphe 2, à une indemnité journalière [...]

2.

[…]

En aucun cas, l’indemnité journalière n’est octroyée au-delà de la date à laquelle le fonctionnaire a effectué son déménagement en vue de satisfaire aux obligations de l’article 20 du statut.

[…] »

7
L’article 85 du statut régit, quant à lui, la répétition de l’indu en ces termes :

« Toute somme indûment perçue donne lieu à répétition si le bénéficiaire a eu connaissance de l’irrégularité du versement ou si celle-ci était si évidente qu’il ne pouvait manquer d’en avoir connaissance. »

8
L’article 17 de l’annexe VII du statut prévoit :

« 1. Les sommes dues au fonctionnaire sont payées au lieu et dans la monnaie du pays où le fonctionnaire exerce ses fonctions.

2. Dans les conditions fixées par une réglementation établie d’un commun accord par les institutions des Communautés après avis du comité du statut, le fonctionnaire peut :

a)
faire transférer régulièrement, par l’entremise de l’institution dont il relève, une partie de ses émoluments ne dépassant pas le montant qu’il perçoit au titre de l’indemnité de dépaysement ou d’expatriation […]

b)
faire effectuer des transferts réguliers dépassant le plafond indiqué [sous] a) in limine pour autant qu’ils soient destinés à couvrir des dépenses résultant notamment de charges régulières et prouvées que l’intéressé aurait à assumer en dehors du pays du siège de son institution ou du pays où il exerce ses fonctions ;

c)
être autorisé, à titre tout à fait exceptionnel et pour des cas dûment justifiés, à faire transférer, indépendamment des transferts réguliers précités, les montants dont il désirerait pouvoir disposer dans les monnaies visées [sous] a).

3. Les transferts prévus au paragraphe 2 s’effectuent aux taux de change visés à l’article 63, deuxième alinéa, du statut ; les montants transférés sont affectés du coefficient résultant du rapport qui existe entre le coefficient correcteur fixé pour le pays dans la monnaie duquel le transfert est effectué et le coefficient correcteur fixé pour le pays d’affectation du fonctionnaire. »

9
L’article 1er de la réglementation fixant les modalités relatives aux transferts d’une partie des émoluments des fonctionnaires des Communautés européennes (ci-après la « réglementation commune »), entrée en vigueur le 1er janvier 1980, avec effet au 1er avril 1979, dispose :

« En application de l’article 17, paragraphe 2, [sous] a), de l’annexe VII du statut, le fonctionnaire peut faire transférer régulièrement, sur sa demande et par l’entremise de l’institution, une partie de ses émoluments non supérieure au montant qu’il perçoit au titre de l’indemnité de dépaysement ou d’expatriation, affectée du coefficient correcteur applicable à la rémunération du fonctionnaire au lieu d’affectation. »

10
L’article 2 de la réglementation commune prévoit :

« En application de l’article 17, paragraphe 2, [sous] b), de l’annexe VII du statut, le fonctionnaire peut, en outre, faire transférer régulièrement, sur sa demande et par l’entremise de l’institution, une partie de ses émoluments supérieure au montant visé à l’article 1er, pour autant que ces transferts soient destinés à couvrir des dépenses résultant de charges régulières et prouvées hors du pays de son affectation.

Sont à considérer comme des dépenses justifiant de tels transferts :

sur présentation d’une attestation scolaire ou universitaire, les frais d’études des enfants qui donnent droit à l’allocation pour enfant à charge, [...]

sur présentation de l’acte notarié et du contrat de prêt, le remboursement d’un prêt hypothécaire […] »

11
Selon l’article 3 de la réglementation commune :

« L’ensemble des transferts réguliers, tels qu’ils sont définis aux articles 1er et 2, ne peut dépasser 35 % de la rémunération mensuelle nette. »

12
Aux termes de l’article 5 de la réglementation commune :

« En application de l’article 17, paragraphe 2, [sous] c), de l’annexe VII du statut, l’autorité investie du pouvoir de nomination peut, à titre tout à fait exceptionnel et pour des cas dûment justifiés, autoriser le fonctionnaire à faire transférer, par l’entremise de l’institution, les montants dont il désirerait pouvoir disposer dans une des monnaies visées à l’article 17, paragraphe 2, [sous] a), de ladite annexe. L’autorisation est accordée sur la base d’un examen de la justification. »

13
Enfin, l’article 6, dernier alinéa, de la réglementation commune prévoit :

« L’institution vérifie régulièrement que les conditions qui ont justifié l’autorisation de transfert demeurent toujours remplies. Elle met fin au transfert lorsqu’elle constate que ces conditions ne sont plus remplies. »

14
La directive interne de la Commission du 30 juillet 1993, portant modalités d’application de la réglementation commune, publiée aux Informations administratives nº 815 du 11 août 1993, dispose quant à elle :

« 1.
Dans les conditions fixées par lタルarticle 2 de la réglementation [commune], le fonctionnaire a la possibilité de faire procéder à des transferts réguliers de montants dépassant le plafond y indiqué à l’article 1er.

Ces transferts doivent être destinés à couvrir des dépenses prévues à l’article 2 de la réglementation [commune]

[…]

3.
L’intervention du système de transfert par l’entremise de l’institution n’est admise que dans les cas où la localisation des charges et des dépenses y relatives se trouve en dehors du pays d’affectation du fonctionnaire et vise le pays correspondant à la devise du transfert [...] »


Faits et procédure

15
Le requérant a été nommé, le 1er juin 1982, fonctionnaire stagiaire à la Commission des Communautés européennes et affecté à Luxembourg en tant qu’administrateur de grade A 6.

16
Il a été titularisé par décision du 25 février 1983, prenant effet le 1er mars suivant, puis promu au grade A 5 en 1987, au grade A 4 en 1991 et enfin au grade A 3, le 1er mars 1999, en qualité de chef d’unité.

17
À la suite de la réorganisation de l’ensemble des services de la Commission, il a été nommé le 1er octobre 1999 chef de l’unité « Analyse de la santé publique, développement de la politique et de la santé dans les autres domaines politiques » de la direction « Santé publique » de la direction générale (DG) « Santé et protection des consommateurs ».

18
En accord avec toutes les parties concernées, sa DG a demandé, le 6 octobre 2000, à la DG « Personnel et administration » de la Commission de détacher le requérant dans l’intérêt du service auprès du ministère de la Santé grec, conformément à l’article 37, sous a), premier tiret, et à l’article 38 du statut.

19
À cette fin, il a été réaffecté, par décision du 27 octobre suivant, auprès du directeur de la direction « Santé publique » de la DG « Santé et protection des consommateurs » de la Commission, en tant que conseiller ad personam. Cette décision a pris effet le 1er novembre suivant.

20
La Commission a ensuite procédé au détachement du requérant dans l’intérêt du service, par décision du 21 novembre 2000, laquelle est rédigée comme suit :

« Article premier

En application des articles 37, [sous] a), premier tiret, et 38 du statut, il est décidé de détacher dans l’intérêt du service auprès du ministère [...] de la Santé [grec], M. Georgios Gouvras (n° [de] pers[onnel] 04295), fonctionnaire de grade A 3 à la direction générale ‘Santé et protection des consommateurs’. 

Article 2

M. Georgios Gouvras est placé dans la position de détachement dans l’intérêt du service à partir du 1er novembre 2000 jusqu’au 31 octobre 2001. »

21
Eu égard au caractère temporaire du détachement du requérant, sa famille est restée au Luxembourg, ses enfants y poursuivant leurs études et son conjoint, également fonctionnaire des Communautés européennes, y demeurant affecté.

22
La Commission a continué à verser au requérant sa rémunération au Luxembourg, y compris l’indemnité de dépaysement, affectée du coefficient correcteur 100. Il est constant que, pendant la période de son détachement, le requérant n’a perçu aucune rémunération de l’administration grecque.

23
Par courrier électronique du 23 juillet 2001, le requérant a demandé le paiement des frais forfaitaires de voyage annuel, pour lui et ses enfants, de son lieu d’affectation à son lieu d’origine.

24
Par note du 26 juillet suivant, Mme Martine Reicherts, directeur de la direction « Administration et gestion du personnel Luxembourg et Ispra » de la DG «Personnel et administration » de la Commission a demandé au chef de l’unité «Statut » de la direction «Droits et obligations ; politique et actions sociales » de cette même DG, M. Adrian Barnett, de lui « donner des précisions quant à l’interprétation à donner au lieu d’affectation de M. Gouvras, éventuellement après consultation du service juridique, compte tenu [...] de la jurisprudence en la matière (arrêt [du Tribunal] du 28 février 1996, do Paço Quesado/Commission, T‑15/95, [RecFP p. I‑A‑57 et II‑171], notamment points 26 [à] 30) ».

25
Dans cette note, Mme Reicherts constatait :

« La décision de détachement ne précisant pas le lieu d’affectation de l’intéressé, mes services ont été confrontés à des difficultés lors des paiements et des remboursements dus à l’intéressé, qui ont fait l’objet d’échanges de courriers entre l’[unité ‘Personnel Luxembourg’ de la direction ‘Administration et gestion du personnel Luxembourg et Ispra’ de la direction générale ‘Personnel et administration’ et l’unité ‘Gestion des droits individuels’ de la direction ‘Droits et obligations ; politique et actions sociales’ de cette même direction générale], et qui ont été soulevées lors d’une réunion à Bruxelles, sans, par ailleurs, qu’une position finale ait été trouvée. »

26
À la suite de la réponse de M. Barnett, Mme Reicherts a adressé, le 14 août 2001, la lettre suivante (ci-après la « décision du 14 août 2001 ») au requérant :

« [À la] suite [de] votre demande [...], l’unité [...] ‘Personnel Luxembourg’ a requis une nouvelle fois des clarifications [de] l’unité ‘Statut’ sur l’application des dispositions réglementaires à votre situation. Je joins en annexe l’échange de courrier qui a eu lieu à cette occasion.

De cette réponse donnée le 31 juillet 2001, il ressort que :

conformément à l’article 38 du statut, vous êtes en droit de demander le remboursement, sur présentation de pièces justificatives, de tous les frais exposés du fait de votre détachement ;

il convient de déduire de votre salaire tout revenu éventuel provenant du ministère [...] de la Santé [grec] auprès duquel vous êtes détaché ;

étant détaché à Athènes [Grèce], votre lieu d’affectation doit être fixé dans cette ville avec effet au 1er novembre 2000 ;

de ce fait, il n’y a pas lieu de maintenir votre droit à l’indemnité de dépaysement à compter de cette date, ni au remboursement de frais de voyage annuel ;

il convient d’affecter votre rémunération du coefficient correcteur de la Grèce ;

votre rémunération doit vous être versée en Grèce ;

[…]

Afin de vous garantir la continuité du paiement de votre salaire, votre traitement [du mois] de septembre 2001 sera effectué selon les droits repris ci-dessus sur votre compte en banque à Luxembourg. Le bureau des salaires vous informera au début du mois de septembre 2001 du montant exact qui devra être retenu sur vos salaires à venir et se tiendra à votre disposition pour définir les modalités exactes de récupération. À ce stade, le montant total à récupérer peut être évalué à 31 000 euros à titre purement indicatif et à l’exclusion de la récupération au titre du voyage annuel. »

27
Le requérant a eu connaissance de cette lettre par fax du 11 septembre 2001 et y a répondu par lettre circonstanciée le 14 du même mois, demandant la révision de cette décision ainsi que diverses autres informations. Dans cette lettre, le requérant faisait également état de ses difficultés à obtenir des indications précises sur les conditions de son détachement et mentionnait les différentes personnes qu’il avait consultées sur ce point, à savoir Mme J. Lavaud, de l’unité « Personnel statutaire et experts nationaux détachés » de la direction « Politique du personnel » de la DG « Personnel et administration » de la Commission, Mme Perez-Silvan, de l’unité « Gestion des droits individuels » de la direction « Droits et obligations ; politique et actions sociales » de cette même DG et M. D. Janssens, chef de l’unité « Personnel, budget et autres ressources » de la direction « Affaires générales » de la DG d’affectation du requérant. Ce dernier ajoutait n’avoir, depuis son départ, reçu aucune note des services de la Commission sur les conditions de son détachement, l’avertissant que celui-ci était effectué à ses risques et périls financiers avec récupération éventuelle des sommes indûment versées.

28
Mme Reicherts y a répondu par note du 2 octobre 2001 (ci-après la « décision du 2 octobre 2001 »), invitant le requérant à contester, s’il le souhaitait, la décision concernant la nouvelle fixation de ses droits financiers en introduisant une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut.

29
Le 10 octobre suivant, M. F. Augendre, de l’unité « Personnel Luxembourg » de la direction « Administration et gestion du personnel Luxembourg et Ispra » de la DG « Personnel et administration » de la Commission, a adressé une note au requérant l’informant que, à la suite de la décision du 14 août 2001, le calcul rectificatif de sa rémunération pendant son détachement se traduirait, en application de l’article 85 du statut, par une retenue de 1 342,30 euros pour le mois de novembre 2001 et de 1 342,16 euros pour les mois de décembre 2001 à novembre 2003, soit un total de 24 retenues mensuelles.

30
Le 22 octobre 2001, le requérant a saisi l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») d’une réclamation tendant à l’annulation de la décision du 14 août 2001 et de la décision du 2 octobre 2001, ainsi que de tous les bulletins de rémunération mettant en œuvre la première de ces décisions.

31
Par courrier électronique du 31 octobre 2001, le requérant a été informé de la décision de M. David Byrne, membre de la Commission en charge des questions de santé et de protection des consommateurs, de le rappeler à Luxembourg le jour même, en raison des défis auxquels la Commission devait faire face en matière de bioterrorisme.

32
Par décision du 11 décembre 2001, prenant effet le 1er novembre 2001, la Commission a mis fin au détachement dans l’intérêt du service du requérant auprès du ministère de la Santé grec et l’a « réaffecté » en tant que conseiller ad personam auprès du directeur de la direction « Santé publique » de la DG « Santé et protection des consommateurs ». Cette décision a été annulée et remplacée par la décision de la Commission du 6 février 2002, par laquelle le requérant a été « réintégré » dans ses fonctions de conseiller ad personam du même directeur.

33
La réclamation du requérant a été rejetée par l’AIPN par décision du 22 février 2002, dont il a accusé réception le 1er mars suivant.

34
Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 juin 2002, le requérant a introduit un recours dirigé contre la décision du 14 août 2001 (affaire T‑180/02).

35
À la suite de la décision de la Commission de fixer à Athènes le lieu de son affectation, le requérant a présenté, le 28 janvier 2002, une demande tendant au transfert de la partie de sa rémunération nécessaire pour couvrir les charges régulières et prouvées auxquelles il devait selon lui faire face au Luxembourg, lieu de son affectation habituelle et de sa résidence principale.

36
Le 8 mars suivant, le requérant a présenté une seconde demande tendant à l’octroi des indemnités d’installation et journalière, conformément aux articles 5 et 10 de l’annexe VII du statut, en raison de ses prises de fonctions intervenues respectivement le 1er novembre 2000 à Athènes et le 1er novembre 2001 à Luxembourg.

37
Par décisions du 30 avril 2002 (ci-après les « décisions du 30 avril 2002 »), l’administration a, d’une part, fait droit à sa demande de transfert, au titre de l’article 17, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut, d’une partie de sa rémunération nette de Grèce au Luxembourg pour la période comprise entre les mois de novembre 2000 et d’octobre 2001, dans la limite toutefois de 35 % de ladite rémunération, et, d’autre part, informé le requérant du rejet de sa demande tendant au paiement des indemnités d’installation et journalière.

38
Le 25 juillet 2002, le requérant a introduit une réclamation contre ces décisions, laquelle a fait l’objet d’un rejet explicite le 11 octobre 2002, notifié au requérant le 19 décembre suivant.

39
Le 31 mars 2003, le requérant a introduit un recours dirigé contre les décisions du 30 avril 2002 (affaire T‑113/03).

40
Tant dans l’affaire T‑180/02 que dans l’affaire T‑113/03, le requérant a renoncé au dépôt d’un mémoire en réplique.

41
Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal a décidé d’ouvrir la procédure orale. L’audience a été fixée au 15 janvier 2004 et les parties ont été invitées à déposer, avant le 18 décembre 2003, leurs observations sur une éventuelle jonction des affaires T‑180/02 et T‑113/03 aux fins de la procédure orale et de l’arrêt.

42
Les parties ayant informé le Tribunal qu’elles n’avaient aucune objection à formuler à cet égard, le Tribunal a joint les affaires à l’audience, aux fins de celle-ci et de l’arrêt.

43
À l’audience, qui s’est tenue le 15 janvier 2004, les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal.


Conclusions des parties

44
Dans l’affaire T‑180/02, le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler la décision du 14 août 2001 ;

condamner la défenderesse aux dépens.

45
La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

statuer comme de droit sur les dépens.

46
Dans l’affaire T‑113/03, le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

annuler les décisions du 30 avril 2002 ;

condamner la défenderesse aux dépens.

47
La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

rejeter le recours ;

statuer sur les dépens comme de droit.


En droit

1. Sur la légalité de la décision du 14 août 2001

48
À l’appui de son recours dirigé contre la décision du 14 août 2001, le requérant invoque trois moyens : le premier est tiré de la violation de l’article 37, sous a), premier tiret, et de l’article 38 du statut, le deuxième de la violation de l’article 85 du statut, de l’adoption par l’administration d’une décision arbitraire ainsi que de la méconnaissance du principe de protection de la confiance légitime et du devoir de sollicitude et, enfin, le troisième de la violation des articles 5 et 10 de l’annexe VII du statut.

En ce qui concerne le premier moyen, tiré de la violation de l’article 37, sous a), premier tiret, et de l’article 38 du statut

Arguments des parties

49
Le requérant affirme avoir été entendu à plusieurs reprises par l’AIPN avant son détachement à Athènes, sans qu’on lui ait indiqué que celui-ci entraînerait un changement de lieu d’affectation et, par voie de conséquence, l’application du coefficient correcteur applicable à la Grèce et la suppression de l’indemnité de dépaysement.

50
Il estime que la décision de la Commission du 21 novembre 2000 de le détacher auprès du ministère de la Santé grec n’a modifié ni son affectation ni le lieu de celle-ci. Selon lui, son affectation n’a été modifiée que par la décision du 14 août 2001, qui a fixé le lieu de son affectation à Athènes avec effet rétroactif au 1er novembre 2000.

51
Dans le cadre de la première branche du présent moyen, le requérant prétend que c’est en violation de l’obligation d’entendre le fonctionnaire avant son détachement, en application de l’article 38, sous a), premier tiret, du statut, que la Commission a modifié, avec effet rétroactif, le lieu de son affectation.

52
Dans le cadre de la seconde branche du présent moyen, le requérant fait valoir l’illégalité de la décision attaquée en ce qu’elle n’a pas maintenu son emploi et le lieu de son affectation à Luxembourg.

53
Quant à son emploi, le requérant estime qu’il résulte de l’article 7, paragraphe 1, du statut que tout fonctionnaire doit être affecté à un emploi et un seul. Il fait observer que l’article 38, sous f) et g), prévoit que le fonctionnaire détaché dans l’intérêt du service conserve son emploi et doit y être immédiatement réintégré à l’expiration de son détachement. Il s’ensuit, selon le requérant, que les fonctionnaires détachés continuent à être affectés au lieu de leur emploi.

54
Cette analyse est, à son avis, confirmée par l’obligation de verser au fonctionnaire détaché une rémunération globale correspondant à celle afférente à son grade et à son échelon dans son institution d’origine.

55
Or, fait-il valoir, la décision du 14 août 2001 a eu pour effet de lui attribuer, avec un effet rétroactif de plus de neuf mois, un lieu d’affectation différent du lieu d’exercice de l’emploi de conseiller auprès du directeur de la direction « Santé publique » de la DG « Santé et protection des consommateurs » de la Commission, auquel il avait été affecté par décision du 27 octobre 2000 et auquel il devait rester affecté pendant toute la durée de son détachement, en application de l’article 38, sous f) et g), du statut.

56
En outre, la Commission aurait, par décision du 11 décembre 2001, « réaffecté » le requérant en tant que conseiller ad personam auprès du directeur de ladite direction « Santé publique », puis, le 6 février 2002, modifié cette décision et « réintégré » le requérant dans son emploi, conformément à l’article 38, sous g), du statut. Cette décision modificative démontrerait que le requérant n’a jamais été affecté à Athènes dans l’emploi qu’il occupait et que, dès lors, le lieu de son affectation a bien été maintenu, pendant toute la durée de son détachement, à Luxembourg, où sa rémunération lui a, au demeurant, été versée.

57
Le requérant fait donc valoir, en conclusion de ce premier moyen, que la décision attaquée est illégale en ce qu’elle a fixé avec effet rétroactif le lieu d’affectation du requérant à Athènes.

58
La Commission conteste que la décision du 14 août 2001 ait modifié une situation acquise. En réalité, l’administration n’aurait jamais précisé officiellement que l’affectation du requérant demeurait au Luxembourg, de sorte qu’il n’existerait aucune décision en ce sens ayant pu faire naître la confiance légitime du requérant.

59
Elle concède avoir, tout au plus, « pris un certain temps » avant d’arrêter sa position définitive, comme le montrerait un échange de correspondance interne, dont elle précise qu’il a débuté peu de temps après le début du détachement et visait à obtenir des précisions sur la situation du requérant.

60
Elle soutient que le message électronique du requérant du 23 juillet 2001 n’a donc pas amené l’administration à découvrir la situation, puisqu’elle la connaissait déjà. Ce message aurait seulement servi à rappeler à l’administration sise à Luxembourg qu’elle devait relancer les services compétents sis à Bruxelles afin qu’ils prennent position. Forte des explications obtenues, l’administration aurait ainsi communiqué sa position au requérant par la décision du 14 août 2001.

61
À l’argument du requérant concernant la violation du droit reconnu au fonctionnaire d’être entendu avant toute décision de détachement dans l’intérêt du service, la Commission répond qu’il manque en fait et que le requérant a été largement entendu avant que n’intervienne ledit détachement. Selon elle, le requérant a en outre admis que les conditions financières du détachement n’avaient pas été précisées avant son départ. Or, soutient-elle, le fonctionnaire ne saurait en aucun cas se créer un droit par sa propre omission de demander des précisions à l’administration, encore moins lorsque ce droit va à l’encontre des termes mêmes du statut et de la finalité des dispositions concernées.

62
La défenderesse considère que rien, dans les articles 37 et 38 du statut, ne justifie l’assertion selon laquelle le lieu d’affectation du requérant, pendant un détachement d’un an, qui aurait pu être prolongé ensuite, n’était pas Athènes mais Luxembourg. Le requérant travaillait en effet à Athènes, sur la base d’une décision de la Commission, pour un an au moins, et seule la Commission le rémunérait pendant cette période.

63
Quant à l’argument du requérant portant sur le fait qu’il a conservé son emploi pendant son détachement, la Commission allègue qu’il est sans incidence sur la détermination du lieu de son affectation pendant ce détachement. Elle souligne également que l’obligation de maintenir le niveau global de la rémunération du fonctionnaire détaché ne saurait pour autant obliger l’administration à lui verser une indemnité illégalement ou à appliquer à sa rémunération un coefficient correcteur inadapté.

64
La présente affaire concerne, à son avis, les droits du requérant pendant son affectation à Athènes et non pendant une théorique affectation à Luxembourg, qui n’a jamais été concrétisée par la présence du requérant. La Commission indique que le but de l’affectation du requérant en qualité de conseiller ad personam était de ne pas laisser vacantes les fonctions de chef d’unité occupées par lui avant son détachement et de prévoir une formule permettant d’assurer sa réintégration à un poste de grade A 3 à la fin de son détachement.

65
Le requérant semble soutenir, fait observer la Commission, que, étant détaché, ce n’était pas à elle de l’affecter à Athènes. Or, poursuit-elle, s’il n’était pas exclu que le ministère de la Santé grec puisse l’affecter ailleurs en Grèce pendant le détachement, une telle réaffectation n’aurait toutefois pas modifié les conditions financières du détachement et aurait, en tout état de cause, fait l’objet d’une consultation préalable de la Commission. Tout cela ne signifierait cependant pas que la présence du requérant à Athènes était une circonstance à laquelle la Commission était en quelque sorte étrangère, n’ayant plus de pouvoir sur le requérant. Au contraire, fait-elle valoir, elle seule continuait à le rémunérer et elle seule pouvait juger de la pertinence du maintien ou non du détachement, dans la seule limite de l’intérêt du service. Il serait donc parfaitement artificiel de prétendre que, pendant le détachement, la Commission ne pouvait être considérée comme ayant affecté le requérant à Athènes. La Commission affirme que ce dont il convient de tenir compte est la situation de fait et qu’il est inconcevable qu’une personne se trouvant dans cette situation puisse bénéficier de droits autres que ceux reconnus à un autre fonctionnaire des Communautés européennes affecté en Grèce.

66
Il est constant, rappelle la Commission, que le requérant a été présent à Athènes pendant un an en raison des fonctions qu’il exerçait au ministère de la Santé grec, et prétendre qu’il est resté affecté pendant ce temps à Luxembourg revient, estime-t-elle, à nier les faits mêmes de l’affaire.

67
Quant au statut du requérant durant la période en cause, la Commission ne conteste pas qu’il s’agissait d’un détachement et non d’une mise à disposition. Elle ajoute que ce fait n’apporte cependant aucun secours au requérant, car il ne signifie en aucun cas que le lieu de son affectation était Luxembourg. Le requérant doit, selon elle, admettre que s’il avait été mis à la disposition du gouvernement hellénique pour la même période d’un an, le lieu de son affectation aurait été Athènes. Elle estime en conséquence que, se trouvant, sur le plan des relations financières, exactement dans la même situation envers son institution, et ayant été détaché pendant un an, le requérant ne saurait, sous le seul prétexte qu’il s’agissait d’un détachement, se voir reconnaître des droits que rien ne justifie et qui sont contraires au principe d’égalité de traitement.

68
Enfin, selon la Commission, la remarque du requérant concernant le lieu où sa rémunération lui était versée est sans pertinence, car le lieu de versement du salaire ne détermine pas le lieu d’affectation et ne saurait créer un droit indu au profit de l’intéressé. De même, le fait que sa famille soit restée au Luxembourg résulterait d’un choix personnel du requérant.

69
La Commission allègue donc que le premier moyen doit être rejeté.

Appréciation du Tribunal

– S’agissant du droit d’être entendu avant le détachement

70
L’article 38, sous a), du statut dispose que l’intéressé doit être entendu avant que l’AIPN ne décide de son détachement dans l’intérêt du service.

71
C’est à la lumière de cette disposition qu’il y a lieu d’examiner si, comme le fait valoir le requérant, c’est en violation de l’obligation d’entendre au préalable le fonctionnaire que la Commission a arrêté la décision attaquée.

72
Le Tribunal relève à cet égard que le requérant a lui-même indiqué dans sa première requête que, « [c]onformément [aux dispositions sous] a) de l’article 38 du statut, [il] a[vait] été entendu à plusieurs reprises avant que l’AIPN ne le désigne pour être détaché au ministère de la Santé grec à Athènes ».

73
Il en résulte donc que, selon une interprétation littérale, l’article 38, sous a), du statut n’a pas été violé.

74
Certes, il convient de prêter une attention particulière à la mise en œuvre du droit d’être entendu dans l’hypothèse du détachement dans l’intérêt du service qui, contrairement au détachement sur demande, est décidé par l’AIPN et peut l’être « contre la volonté du fonctionnaire concerné » (arrêt do Paço Quesado/Commission, précité, point 30). L’administration doit donc l’en informer et l’entendre avant de prendre sa décision, selon le principe du respect des droits de la défense.

75
Les parties sont en désaccord sur la portée de cette obligation. Le requérant prétend que les conditions, notamment financières, de son détachement auraient dû lui être précisées pour lui permettre de prendre position en connaissance de tous ses droits.

76
Il convient en premier lieu de relever que la Commission a, en l’espèce, fourni des informations au requérant. En effet, selon la requête déposée dans l’affaire T‑180/02, ce dernier a pris ses fonctions « après avoir été informé des incidences sur sa situation administrative de son détachement ». Il est donc établi que l’administration a indiqué au requérant les principales caractéristiques du détachement envisagé. Si toutefois le requérant conservait une préoccupation particulière après les différents entretiens préalables à son détachement, il lui incombait de demander à la Commission des précisions à ce sujet. L’administration était de plus en droit d’attendre du requérant, compte tenu de son grade, un degré élevé de connaissance des procédures administratives et statutaires (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 30 mai 2001, Barth/Commission, T‑348/00, RecFP p. I‑A‑119 et II‑557, point 33). En second lieu et à titre surabondant, il faut noter que le requérant avait accepté le détachement en question, ainsi qu’il ressort de la requête, selon laquelle la demande a été présentée « en accord avec toutes les parties concernées », et n’a présenté aucun élément de nature à remettre en cause le caractère suffisant de la consultation préalable au détachement, établissant par exemple qu’il aurait alors demandé à la Commission les précisions qui lui seraient apparues indispensables.

77
Il y a donc lieu de rejeter ce grief.

– S’agissant de la fixation du lieu d’affectation du requérant

78
Le lieu d’affectation d’un fonctionnaire se situe en principe au lieu où il exerce ses fonctions. Ce lien trouve une confirmation dans l’article 20 du statut, selon lequel « [l]e fonctionnaire est tenu de résider au lieu de son affectation ou à une distance telle de celui-ci qu’il ne soit pas gêné dans l’exercice de ses fonctions ».

79
Dès lors, en détachant le requérant auprès du ministère de la Santé grec pour une durée d’au moins un an, la Commission, par décision du 21 novembre 2000, a fixé, de manière implicite mais nécessaire, le lieu de son affectation à Athènes.

80
Contrairement à ce que prétend le requérant, les articles 37 et 38 du statut ne s’opposent pas à cette analyse. En effet, ils ne contiennent aucune disposition explicite sur le lieu d’affectation du fonctionnaire en cas de détachement.

81
Certes, selon l’article 38, sous f) et g), du statut, le fonctionnaire détaché conserve son emploi et, à l’expiration du détachement, il réintègre immédiatement l’emploi qu’il occupait antérieurement. Il n’en est pas moins vrai que, selon l’article 37 du statut, le fonctionnaire en détachement est désigné pour occuper temporairement un emploi en dehors de son institution et l’article 38, sous d), du statut évoque à cet égard l’« emploi de détachement ». Ainsi, tout en étant affecté au lieu d’exercice de l’emploi de détachement, le fonctionnaire conserve l’emploi qu’il occupait – un seul emploi, conformément à l’article 7, paragraphe 1, du statut – dans son institution d’origine. Les dispositions relatives au maintien de l’emploi et de la rémunération globale du fonctionnaire dans son institution d’origine sont donc neutres quant à la détermination du lieu d’affectation du fonctionnaire détaché, car elles ne visent qu’à préserver les droits du fonctionnaire détaché. L’emploi constitue donc un concept fonctionnel et non géographique.

82
En raison des considérations qui précèdent, le transfert du requérant, préalable à son détachement, au poste de conseiller ad personam du directeur de la direction « Santé publique » de la DG « Santé et protection des consommateurs » de la Commission ne s’oppose pas davantage à la fixation du lieu de son affectation à Athènes à compter de son détachement au ministère de la Santé grec se trouvant dans cette ville.

83
En tout état de cause, le requérant ne saurait prétendre avoir exercé ses fonctions à Luxembourg, où était implantée la direction dont relevait son emploi, puisqu’il est constant qu’il était alors effectivement en poste à Athènes, où il travaillait pour le ministère de la Santé grec, tout en étant entièrement rémunéré par la Commission. Le fait de le désigner pour occuper le poste de conseiller ad personam, puis de l’y maintenir, avait pour seul objectif de permettre sa réintégration à la fin de son détachement, conformément à l’article 38 du statut.

84
Le requérant ne saurait pas plus utilement invoquer le fait que sa famille est demeurée au Luxembourg pour en inférer que le lieu de son affectation est, durant la période en cause, resté fixé dans ce pays. Cette situation résulte en effet d’un choix personnel du requérant, qui, par suite, ne saurait lier l’administration et créer au profit du requérant des droits que ne lui confère pas le statut.

85
Enfin, à titre surabondant, le Tribunal relève que, s’agissant de la fixation du lieu d’affectation du requérant au lieu de son détachement, il serait contraire aux dispositions statutaires qu’un fonctionnaire détaché pour une longue durée, éventuellement renouvelable, dans son pays d’origine puisse bénéficier de l’indemnité de dépaysement alors même qu’il n’est nullement dépaysé.

86
Qui plus est, le versement de cette indemnité à un fonctionnaire grec travaillant et résidant en Grèce porterait atteinte au principe d’égalité de traitement avec les autres fonctionnaires communautaires grecs affectés à Athènes, qui n’ont pas droit à cette indemnité.

87
Il résulte de l’ensemble de ces considérations que c’est à bon droit que la Commission a fixé le lieu d’affectation du requérant à Athènes. Il convient donc de rejeter le premier moyen.

En ce qui concerne le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 85 du statut, de l’adoption par l’administration d’une décision arbitraire, de la méconnaissance du principe de protection de la confiance légitime et du devoir de sollicitude

Arguments des parties

88
Selon le requérant, la décision de la Commission de le détacher au ministère de la Santé grec, dans le seul intérêt du service, n’a pas modifié pour autant le lieu de son affectation.

89
Une lecture attentive du statut ne pouvait, affirme-t-il, que le conforter dans son analyse relative au maintien du lieu de son affectation à Luxembourg et à son droit au paiement d’une rémunération globale correspondant à celle afférente à son grade et à son échelon dans son institution d’origine, ainsi qu’au remboursement de la totalité des charges supplémentaires entraînées par son détachement.

90
De plus, avant son départ, le requérant soutient avoir discuté des conditions de son détachement à Athènes avec les services de la DG « Personnel et administration » de la Commission à Luxembourg et à Bruxelles, notamment avec Mme Perez-Silvan, et avec le chef de l’unité « Personnel, budget et autres ressources » de la direction « Affaires générales » de sa DG, M. D. Janssens. Ces deux dernières personnes lui auraient confirmé le maintien du lieu de son affectation à Luxembourg et l’absence de changement quant à ses conditions de rémunération, indemnités et allocations incluses.

91
Le requérant estime donc qu’il a agi en fonctionnaire particulièrement diligent et que les différents services de la Commission lui ont donné des assurances quant au maintien du lieu de son affectation à Luxembourg et de sa rémunération.

92
Dans ces conditions, le requérant allègue que c’est illégalement que la Commission a fait application des dispositions de l’article 85 du statut. Il fait valoir qu’elle a méconnu son devoir de sollicitude envers le requérant en ne lui fournissant pas, en temps utile, des informations fiables lui permettant d’examiner si, compte tenu de ses engagements financiers, il pouvait accepter d’être détaché à Athènes et de voir sa rémunération sensiblement diminuée par l’application du coefficient correcteur pour la Grèce et la suppression de l’indemnité de dépaysement.

93
Le requérant invoque, à cet égard, la jurisprudence du Tribunal du 27 février 1996, Galtieri/Parlement (T‑235/94, RecFP p. I‑A‑43 et II‑129, points 63 et 64).

94
En l’espèce, le requérant estime qu’il résulte des démarches qu’il a entreprises aux fins de clarifier les droits découlant de sa position de fonctionnaire détaché dans l’intérêt du service que l’administration lui a donné des assurances précises quant au maintien du lieu de son affectation à Luxembourg et de sa rémunération, calculée en fonction de ce lieu d’affectation.

95
Selon la Commission, le statut, et notamment ses articles 37 et 38, ainsi que les dispositions financières telles que l’article 4 de l’annexe VII dudit statut, ne pouvaient en rien conforter le requérant dans l’idée qu’il pourrait travailler un an à Athènes et se faire rémunérer comme s’il travaillait à Luxembourg.

96
La Commission souligne que les contacts que le requérant a pu avoir avec l’administration avant son détachement montrent qu’elle n’était nullement convaincue qu’il demeurerait affecté à Luxembourg.

97
Elle soutient que même le fait, à le supposer établi, que Mme Perez-Silvan ait donné au requérant une réponse différente à un moment donné ne pouvait ni faire naître sa confiance légitime ni affecter les conditions d’application de l’article 85 du statut, qui postule précisément l’existence d’une erreur ou d’une omission de la part de l’administration. La Commission rappelle en outre que, même si la promesse de maintenir les prestations en question avait été faite au requérant (ce qu’il ne prétend pas), elle n’aurait pu avoir les conséquences que le requérant prête au comportement de la Commission, dans la mesure où cette promesse aurait été faite sans tenir compte des dispositions applicables, au sens de l’arrêt du Tribunal du 27 mars 1990, Chomel/Commission (T‑123/89, Rec. p. II‑131, points 26 à 30).

98
La Commission indique également avoir interrogé M. Janssens au vu de la requête, lequel aurait précisé que l’essentiel des discussions qu’il avait eues avec la DG « Personnel et administration » de la Commission concernait le choix entre le détachement dans l’intérêt du service et le détachement sur demande, l’initiative du détachement ne venant pas de ladite DG, mais de M. Gouvras ou du ministère de la Santé grec (ou des deux). M. Janssens aurait déclaré être presque certain que la question du lieu d’affectation n’avait pas été évoquée, car elle ne le concernait pas.

99
Selon la Commission toujours, la décision du 14 août 2001 ne prononce pas le retrait d’une décision antérieure, puisqu’il n’existait pas de décision prévoyant spécifiquement l’octroi au requérant de l’indemnité de dépaysement et l’application du coefficient correcteur pour le Luxembourg pendant son détachement. Il n’y aurait donc jamais eu de promesse explicite faite au requérant et d’ailleurs, estime la Commission, cette promesse aurait été illicite.

100
La Commission conclut donc au rejet du deuxième moyen.

Appréciation du Tribunal

101
Dans le cadre de ce deuxième moyen, le requérant invoque la violation de l’article 85 du statut, l’adoption par l’administration d’une décision arbitraire et la méconnaissance du principe de protection de la confiance légitime ainsi que du devoir de sollicitude.

102
En premier lieu, le Tribunal rappelle que la répétition de l’indu suppose, selon l’article 85 du statut, une irrégularité de versement dont le bénéficiaire a eu connaissance ou dont le caractère erroné est si évident qu’il ne pouvait manquer d’en avoir connaissance.

103
Il convient de vérifier d’abord si les conditions posées par l’article 85 du statut sont remplies.

104
S’agissant de l’existence de l’irrégularité, il convient de relever que, selon la jurisprudence, l’erreur de versement peut résulter d’une carence ou d’une tolérance administrative (arrêt de la Cour du 24 juin 1976, Elz/Commission, 56/75, Rec. p. 1097, points 19 et 20) et peut avoir porté sur une longue période (arrêt du Tribunal du 10 février 1994, White/Commission, T‑107/92, RecFP p. I‑A‑41 et II‑143, à propos d’une répétition de l’indu portant sur dix ans). Par conséquent, le maintien pendant neuf mois, au profit du requérant, des droits financiers afférents à un lieu d’affectation erroné, à savoir le versement de l’indemnité de dépaysement ainsi que l’application à sa rémunération d’un coefficient correcteur auquel il n’avait pas droit en qualité de ressortissant grec affecté à Athènes, constitue une telle erreur de versement.

105
Le requérant fait toutefois valoir que, en vertu de l’article 38, sous d), du statut, le fonctionnaire détaché a droit au maintien d’une rémunération globale correspondant à celle afférente à son grade et à son échelon dans son institution d’origine. Ainsi, les sommes visées n’auraient pas été indûment versées en l’espèce.

106
La rémunération globale au sens de l’article 38 du statut doit être comprise comme l’ensemble du montant payé par l’institution de détachement. Ledit article 38 prévoit donc une compensation au cas où le fonctionnaire détaché percevrait de l’institution d’accueil une rémunération globale inférieure à celle correspondant à son grade et à son échelon dans l’institution d’origine. Or, il est constant que, dans le cas d’espèce, la Commission a continué à verser seule au requérant la rémunération correspondant aux grade et échelon qui étaient les siens.

107
Il convient par ailleurs de souligner, en tout état de cause, que le principe du maintien de la rémunération globale du fonctionnaire ne saurait conduire l’administration à verser à ce dernier des indemnités et avantages auxquels il n’a pas droit.

108
En conséquence, dès lors que le lieu d’affectation du requérant aurait dû être fixé à Athènes, il y a lieu de considérer qu’il a indûment perçu les sommes versées par l’administration du fait de la fixation du lieu de son affectation à Luxembourg.

109
Ces sommes ne pouvaient cependant donner lieu à répétition que si l’erreur commise par l’administration était si évidente que le requérant ne pouvait manquer d’en avoir connaissance.

110
Une telle erreur, ainsi que l’a notamment précisé le Tribunal dans l’arrêt White/Commission, précité (point 33), ne dispense pas l’intéressé « de tout effort de réflexion ou de contrôle », mais « n’échappe pas à un fonctionnaire normalement diligent qui est censé connaître les règles régissant son traitement ».

111
S’il est vrai que la Commission n’a pas été claire et a mis plusieurs mois à se prononcer sur les droits du requérant, force est de constater qu’un fonctionnaire normalement diligent de l’expérience et du grade du requérant ne pouvait pas ignorer que le versement de l’indemnité de dépaysement est lié à un dépaysement au sens de l’article 4 de l’annexe VII du statut.

112
Toutefois, le requérant estime avoir fait des efforts de réflexion et de contrôle qui l’ont conduit à croire au maintien du lieu de son affectation à Luxembourg pendant son détachement à Athènes.

113
Il convient de relever à cet égard que le requérant a incontestablement consulté plusieurs personnes de différentes directions générales, notamment Mmes Perez-Silvan et Lavaud, ainsi que M. Janssens.

114
Le requérant a cependant admis à l’audience ne pas avoir obtenu d’assurances précises sur le maintien du lieu de son affectation à Luxembourg. Il n’a d’ailleurs présenté aucun document écrit indiquant qu’il les ait seulement demandées. Cette absence d’assurances précises constituait déjà un élément susceptible de provoquer un doute dans son chef.

115
Par ailleurs, contrairement à ce qu’affirme le requérant, les dispositions du statut ne pouvaient pas le conforter dans l’idée qu’il détenait un droit au maintien du lieu de son affectation à Luxembourg et de toutes les indemnités qu’il y percevait. D’une part, ainsi que le Tribunal l’a indiqué au point 84 ci-dessus, le statut ne comporte pas de dispositions explicites quant à la détermination du lieu d’affectation du fonctionnaire en cas de détachement et, d’autre part, il lie expressément à certaines conditions le versement des indemnités en cause.

116
Dès lors, c’est à bon droit que la Commission a mis en œuvre la procédure de répétition de l’indu, de sorte que le grief tiré de la violation de l’article 85 du statut doit être rejeté.

117
Au sujet du caractère prétendument arbitraire de la décision du 14 août 2001, le requérant se borne à une allégation d’ordre général, sans développer aucun argument spécifique à cet égard.

118
Or, de jurisprudence constante (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 16 mars 1993, Blackman/Parlement, T‑33/89 et T‑74/89, Rec. p. II‑249, point 64, et du 16 mars 2004, Danske Busvognmænd/Commission, T‑157/01, non encore publié au Recueil, point 45), conformément aux dispositions de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal, tout moyen doit être exposé au moins sommairement, de sorte que sa seule énonciation abstraite ne répond pas aux exigences du règlement de procédure. Dès lors, la seule référence au caractère supposément arbitraire de la décision du 14 août 2001, en l’absence d’allégations précises concernant l’obligation qui aurait été violée, ne saurait être considérée comme suffisante.

119
Il y a donc lieu de rejeter ce grief.

120
Concernant le devoir de sollicitude, le requérant estime que la Commission l’a méconnu en ne lui fournissant pas, en temps utile, des informations fiables lui permettant d’examiner si, compte tenu de ses engagements financiers, il pouvait envisager d’être détaché à Athènes.

121
Il convient de relever que, même à le supposer fondé, ce grief ne pourrait viser que la décision de détachement du 21 novembre 2000 et non la décision du 14 août 2001, précisant les droits du requérant au regard de sa situation de fonctionnaire détaché et procédant à la répétition de l’indu.

122
De plus et en toute hypothèse, comme le Tribunal l’a indiqué au point 76 ci-dessus, le requérant admet dans la requête présentée dans l’affaire T‑180/02 « avoir été informé des incidences sur sa situation administrative de son détachement dans l’intérêt du service ».

123
Enfin, si le devoir de sollicitude de l’administration implique qu’elle prenne en considération « l’ensemble des éléments [...] susceptibles de déterminer sa décision, et que, ce faisant, elle tienne compte non seulement de l’intérêt du service, mais aussi de celui du fonctionnaire concerné » (arrêt de la Cour du 31 mars 1992, Burban/Parlement, C‑255/90 P, Rec. p. I‑2253, point 7), il ne saurait la conduire à méconnaître l’exigence selon laquelle « la protection des droits et intérêts des fonctionnaires doit toujours trouver sa limite dans le respect des normes en vigueur » (arrêts Chomel/Commission, précité, point 32, et Blackman/Parlement, précité, point 96).

124
Dès lors, dans le présent contexte, où l’intérêt du fonctionnaire concerné entrait en contradiction avec l’exigence du respect des normes en vigueur, le respect des dispositions statutaires, notamment celui de l’article 4 de l’annexe VII du statut, devait prévaloir sur l’intérêt du requérant.

125
Il convient par conséquent de considérer que la Commission n’a pas violé son devoir de sollicitude.

126
Au sujet de la violation du principe de protection de la confiance légitime, le requérant invoque plusieurs éléments qui lui auraient donné l’espoir légitime de conserver le lieu de son affectation à Luxembourg, et donc, notamment, son droit à l’indemnité de dépaysement.

127
Outre le fait que ce droit résultait, à son avis, de l’application des articles 37 et 38 du statut, des assurances précises en ce sens lui auraient été données. Il se prévaut également de la circonstance que la Commission a continué à lui verser sa rémunération à Luxembourg, y compris l’indemnité de dépaysement.

128
Quant aux articles 37 et 38 du statut, le Tribunal a déjà constaté qu’ils ne contenaient aucune disposition en matière de lieu d’affectation du fonctionnaire détaché et ne pouvaient donc conforter le requérant dans l’idée qu’il avait droit au maintien du lieu de son affectation à Luxembourg.

129
Quant à la continuation du versement de la rémunération du requérant, il importe de rappeler que la Cour, dans l’arrêt Elz/Commission, précité (points 19 et 20), a jugé que « la concession faite au requérant […] du bénéfice litigieux trouv[ait] son origine soit dans une carence, soit dans une tolérance administrative des services compétents de la Commission » et que « le maintien dudit bénéfice pendant la période considérée appara[issai]t comme une mesure de caractère précaire, n’impliquant aucune décision implicite de la part de l’institution, qui serait constitutive d’un droit au profit de l’intéressé ».

130
Il y a lieu d’en déduire que le maintien temporaire du versement de la rémunération du requérant au Luxembourg n’impliquait pas de décision implicite de la part de la Commission quant à la fixation du lieu de son affectation dans ce pays, constitutive d’un droit au profit de l’intéressé.

131
S’agissant des assurances précises que, dans ses écrits, le requérant avait prétendu avoir reçues, l’avocat de ce dernier a reconnu leur inexistence à l’audience. Au demeurant, la lettre du requérant à la défenderesse du 14 septembre 2001 faisait état de « difficultés à obtenir des indications précises sur les conditions [du] détachement » en question et de l’absence de note des services de la Commission sur les conditions dudit détachement.

132
Or, selon une jurisprudence constante, « aucun fonctionnaire ne peut invoquer une violation du principe de protection de la confiance légitime en l’absence d’assurances précises fournies par l’administration » (arrêt Chomel/Commission, précité, point 26, et arrêt du Tribunal du 30 novembre 1994, Dornonville de la Cour/Commission, T‑498/93, RecFP p. I‑A‑257 et II‑813, point 46).

133
Ce grief doit donc également être rejeté, de sorte que le deuxième moyen du requérant n’est pas fondé.

En ce qui concerne le troisième moyen, tiré de la violation des articles 5 et 10 de l’annexe VII du statut

Arguments des parties

134
Dans l’hypothèse où le Tribunal estimerait que le lieu de son affectation devait être fixé à Athènes, le requérant fait valoir que c’est illégalement que la Commission a refusé de lui reconnaître le droit de bénéficier, d’une part, de l’indemnité d’installation, calculée conformément à l’article 5 de l’annexe VII du statut, et, d’autre part, de l’indemnité journalière, telle que prévue par l’article 10 de cette même annexe.

135
En effet, le requérant affirme avoir dû changer de résidence pour se conformer aux obligations de l’article 20 du statut et, tout en gardant sa résidence familiale au Luxembourg, il soutient avoir dû exposer des frais de remise en état de la maison parentale, à Athènes.

136
À l’appui de ce moyen, le requérant cite l’arrêt du Tribunal du 12 décembre 1996, Lozano Palacios/Commission (T‑33/95, RecFP p. I‑A‑575 et II‑1535, points 47, 55, 58 et 63).

137
Selon la Commission, la portée de ce moyen est difficile à saisir, puisque le requérant y postule que le Tribunal rejettera ses deux premiers moyens. Ce moyen contredirait donc les deux premiers.

138
Il est par ailleurs curieux, selon elle, que le requérant insiste sur les articles 5 et 10 de l’annexe VII du statut, sans parler de l’article 4 de la même annexe.

139
Elle estime, en outre, que la jurisprudence citée par le requérant à propos des articles 5 et 10 de l’annexe VII du statut concerne, d’une part, la situation d’un fonctionnaire changeant de lieu d’affectation tout en restant au service d’institutions communautaires (arrêt Lozano Palacios/Commission, précité), ce qui n’est pas le cas en l’espèce, et, d’autre part, dans le cas de l’indemnité journalière (arrêt de la Cour du 11 août 1995, Parlement/Vienne, C‑43/94 P, Rec. p. I‑2441, point 21, et arrêt du Tribunal du 2 mai 2001, Cubeta/Commission, T‑104/00, RecFP p. I‑A‑99 et II‑469, point 38), la situation de fonctionnaires stagiaires, qui est intrinsèquement précaire, précarité que ne connaissait pas le requérant.

140
En ce qui concerne le fait que le requérant ait résidé dans une maison parentale, la Commission affirme qu’il s’agit d’un élément pertinent. D’une part, cela signifierait que le requérant n’a pas établi la réalité des frais qu’il aurait pu exposer du fait de sa résidence à Athènes, alors que la jurisprudence mentionnerait l’exigence de l’existence de frais à cet égard. D’autre part, la jurisprudence aurait admis que le fait de rejoindre sa famille (en l’occurrence le conjoint et les enfants, et non les parents, il est vrai) peut influer sur le droit à l’indemnité d’installation (arrêt de la Cour du 25 novembre 1982, Evens/Cour des comptes, 79/82, Rec. p. 4033, point 12).

141
La Commission conclut au rejet de ce moyen et, dès lors, au rejet du recours dans son ensemble.

Appréciation du Tribunal

142
Il y a lieu de constater que, dans ce troisième moyen, le requérant part effectivement de la prémisse que ses deux premiers moyens ont été rejetés et que le Tribunal a donc jugé légale la fixation du lieu de son affectation à Athènes.

143
En tout état de cause, sans avoir à ce stade à examiner si le requérant avait droit à l’indemnité d’installation et à l’indemnité journalière dans cette hypothèse, il convient d’observer que la décision du 14 août 2001 n’a pas refusé ces indemnités au requérant. La Commission n’ayant pas statué sur l’octroi de ces indemnités par cette décision, il ne saurait être préjugé de sa réponse à une éventuelle demande du requérant en ce sens. Ce moyen doit, dès lors, être rejeté comme les deux premiers.

144
Le Tribunal considère, par suite, que le recours dirigé contre la décision du 14 août 2001 doit être rejeté dans son intégralité.

2. Sur la légalité des décisions du 30 avril 2002

145
Le requérant conteste également la légalité de la décision de la Commission du 30 avril 2002 lui refusant l’octroi de l’indemnité d’installation et de l’indemnité journalière pendant son affectation à Athènes, et de l’indemnité d’installation lors de sa réaffectation à Luxembourg, ainsi que celle de la décision de la Commission du même jour limitant à 35 % de ses émoluments nets la partie de sa rémunération transférable du lieu de son détachement vers le lieu de son affectation habituelle.

En ce qui concerne le premier moyen, tiré de la violation des articles 5 et 10 de l’annexe VII du statut

Arguments des parties

146
Selon le requérant, si le Tribunal estime que le lieu de son affectation provisoire pouvait être fixé au lieu de son détachement, il conviendra de constater qu’il a dû changer de résidence à deux reprises pour se conformer aux obligations de l’article 20 du statut.

147
Or, le versement de l’indemnité journalière est subordonné, à son avis, à la seule condition que le fonctionnaire quitte, pour satisfaire aux obligations statutaires, la résidence où il maintient le centre de ses intérêts.

148
En prenant ses fonctions au ministère de la Santé grec, le requérant soutient avoir dû supporter les frais et inconvénients nés de la précarité de son détachement dans l’intérêt du service, notamment en ce qu’il a été obligé de résider provisoirement à Athènes tout en gardant sa résidence principale, où sa famille a continué à séjourner, au Luxembourg.

149
Le requérant cite à l’appui de ce moyen l’arrêt Lozano Palacios/Commission, précité (points 47, 55, 58 et 63).

150
La Commission reconnaît que, en raison du détachement du requérant à Athènes (dans le cadre duquel la Commission demeurait son employeur et continuait à le rémunérer exclusivement), elle l’a affecté en ce lieu et que, à la fin du détachement, elle l’a réaffecté à Luxembourg. Cela signifie, admet la Commission, qu’il a bien été obligé de changer deux fois de lieu de résidence pour satisfaire à l’obligation de l’article 20 du statut, aux termes duquel le fonctionnaire « est tenu de résider au lieu de son affectation ou à une distance telle de celui-ci qu’il ne soit pas gêné dans l’exercice de ses fonctions ».

151
En conséquence, la Commission est d’avis que le requérant était fondé à demander l’indemnité d’installation en ce qui concerne son détachement à Athènes. Elle précise que, étant donné que la famille du requérant est restée au Luxembourg durant cette période, le requérant n’a droit, en application de l’article 5, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, qu’à une indemnité d’installation calculée à partir d’un montant correspondant à un mois de son traitement de base. En conséquence, la Commission indique qu’elle procédera au versement de cette indemnité au requérant dans les meilleurs délais.

152
En revanche, de l’avis de la défenderesse, lors du retour de M. Gouvras à Luxembourg à la fin de son détachement, nonobstant la survenance d’un nouveau changement de résidence, l’octroi de l’indemnité d’installation était exclu explicitement par l’article 5, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut, aux termes duquel, « si le fonctionnaire vient à être affecté au lieu où réside sa famille, il n’a pas droit, de ce fait, à une indemnité d’installation ». La Commission fait observer que, le requérant ayant réintégré la maison familiale, il se trouvait exactement dans ce cas. Dès lors, conclut-elle, il n’avait pas droit à l’indemnité d’installation.

153
La défenderesse rappelle ensuite que l’indemnité journalière, accordée au fonctionnaire jusqu’à la date à laquelle il effectue son déménagement, vise à « compenser les frais et les inconvénients occasionnés par la nécessité de se déplacer ou de s’installer provisoirement au lieu de son affectation, tout en gardant, également à titre provisoire, sa résidence au lieu de son recrutement ou de son affectation antérieure ». Elle souligne que, dans son arrêt du 18 décembre 1997, Costantini/Commission (T‑57/96, RecFP p. I‑A‑495 et II‑1293), le Tribunal, après avoir rappelé la jurisprudence en la matière, a rejeté la demande du requérant tendant à obtenir le bénéfice de l’indemnité journalière, au motif qu’il n’avait pas apporté la preuve des frais ou inconvénients encourus.

154
La Commission soutient avoir refusé au requérant l’octroi de cette indemnité parce qu’il n’avait jamais justifié avoir encouru de tels frais, alors qu’elle lui avait expressément indiqué qu’il devait présenter des pièces justificatives de l’exposition de ces derniers.

155
En ce qui concerne le retour du requérant, au terme de son détachement, la Commission considère qu’il ne pouvait faire naître dans le chef du fonctionnaire le droit de percevoir l’indemnité journalière et que le refus de lui octroyer ladite indemnité était d’autant plus justifié qu’il n’avait pu encourir de frais en raison de la nécessité de se réinstaller au Luxembourg, sa famille y étant restée pendant son détachement. La Commission ajoute que la nouvelle installation au Luxembourg du requérant ne pouvait pas davantage être considérée comme provisoire et qu’il n’avait pas non plus gardé, à titre provisoire, sa résidence à Athènes. Enfin, elle indique que le requérant n’a, à aucun moment, effectué le déménagement de ses meubles.

Appréciation du Tribunal

156
S’agissant, en premier lieu, de l’octroi au requérant de l’indemnité d’installation lors de son détachement à Athènes, il convient de rappeler que l’article 5, paragraphe 1, de l’annexe VII du statut prévoit que cette indemnité est due au fonctionnaire qui justifie avoir été tenu de changer de résidence pour satisfaire aux obligations de l’article 20 du statut.

157
Or, il est constant que le requérant a été contraint, dans l’intérêt du service, de s’installer à Athènes. Il était donc en droit de bénéficier de cette indemnité.

158
Au demeurant, après avoir, en réponse à sa réclamation, refusé complètement l’indemnité d’installation au requérant, la Commission a reconnu en cours d’instance le bien-fondé de ses prétentions pour ce qui concerne son installation à Athènes.

159
C’est dès lors à bon droit que le requérant demande l’annulation de la décision du 30 avril 2002 en ce qu’elle lui a refusé le bénéfice de l’indemnité d’installation lors de son détachement à Athènes. Le premier moyen est donc fondé sur ce point.

160
S’agissant, en deuxième lieu, du versement de cette indemnité au requérant à son retour au Luxembourg, à la fin de son détachement, l’avocat de M. Gouvras a reconnu à l’audience que cette demande constituait une erreur.

161
L’article 5, paragraphe 4, de l’annexe VII du statut prévoit expressément, en effet, que, si le fonctionnaire est affecté au lieu où réside sa famille, il n’a pas droit à cette indemnité. Or, il est constant que la famille du requérant résidait au Luxembourg. La Commission était ainsi fondée à refuser au requérant l’octroi de l’indemnité d’installation à l’occasion de son retour au Luxembourg, à la fin de son détachement.

162
Pour ce qui concerne, en troisième lieu, l’indemnité journalière, le requérant rappelle que l’article 10 de l’annexe VII du statut subordonne son versement à la seule condition que le fonctionnaire justifie être tenu de changer de résidence pour satisfaire aux obligations de l’article 20 dudit statut. Il estime donc remplir cette condition.

163
L’article 10 de l’annexe VII du statut vise à « compenser les frais et les inconvénients occasionnés par la nécessité de se déplacer ou de s’installer provisoirement au lieu de son affectation, tout en gardant, également à titre provisoire, sa résidence au lieu de son recrutement ou de son affectation antérieure » (arrêt Costantini/Commission, précité, point 40, lequel renvoie à l’arrêt de la Cour du 5 février 1987, Mouzourakis/Parlement, 280/85, Rec. p. 589, point 9, et à l’arrêt du Tribunal du 10 juillet 1992, Benzler/Commission, T‑63/91, Rec. p. II‑2095, point 20).

164
Dans l’arrêt Costantini/Commission, précité (point 41), le Tribunal a constaté :

« […] le requérant n’a pas pu établir la preuve de frais ou inconvénients provisoires encourus par lui lors de sa réinstallation dans sa propre maison à Ispra, dont il avait gardé la disponibilité pendant son séjour à Vienne. Il s’ensuit que la situation du requérant ne correspondait nullement à la finalité de l’article 10 de l’annexe VII du statut, à la lumière de laquelle cette même disposition doit être interprétée et appliquée. »

165
Or, le requérant n’a pas justifié avoir encouru des frais liés à son installation à Athènes, en dépit des invitations de l’administration tendant à ce qu’il produise de tels justificatifs. Il n’a jamais fait aucun courrier en ce sens. Il ressort au demeurant du dossier qu’il n’a effectué de déménagement ni vers la Grèce ni vers le Luxembourg, ce qui a d’ailleurs été reconnu par l’avocat du requérant à l’audience. Enfin, le requérant ne s’est pas installé provisoirement au lieu de son affectation. Ni sa résidence à Athènes ni sa résidence au Luxembourg ne pouvaient en effet être considérées comme provisoires.

166
Il s’ensuit que l’octroi au requérant de l’indemnité journalière, tant lors de son affectation à Athènes qu’à son retour à Luxembourg, aurait été contraire à la finalité de l’article 10 de l’annexe VII du statut. C’est ainsi à bon droit que la Commission a refusé de lui accorder ladite indemnité.

167
Il y a donc lieu d’accueillir partiellement le premier moyen invoqué par le requérant, en ce que la décision du 30 avril 2002 lui a refusé l’octroi de l’indemnité d’installation lors de son affectation à Athènes, et de le rejeter pour le surplus.

En ce qui concerne le second moyen, tiré de l’illégalité du plafonnement à 35 % de la partie transférable de la rémunération

168
Le second moyen avancé par le requérant est tiré de la violation de l’article 38, sous d), du statut et de l’article 17 de l’annexe VII du statut, en ce que la Commission a limité à 35 % de sa rémunération la partie qu’il était autorisé à transférer hors du pays où il exerçait ses fonctions.

Arguments des parties

169
Selon le requérant, le critère déterminant des transferts effectués au titre de l’article 17, paragraphe 2, sous b), de l’annexe VII du statut est celui des charges régulières et prouvées que le fonctionnaire concerné doit assumer en dehors du pays où il exerce ses fonctions.

170
En outre, le requérant invoque les dispositions visées sous c), qui autorisent un fonctionnaire à faire transférer, indépendamment des transferts réguliers prévus à l’article 17, sous a) et b), de l’annexe VII du statut, les montants dont il désirerait pouvoir disposer dans les monnaies visées sous a), dans des cas tout à fait exceptionnels et pour des raisons dûment justifiées.

171
Par ailleurs, le requérant renvoie aussi dans ce cadre à l’article 38, sous d), du statut.

172
Le requérant fait également valoir que la limite de 35 % de la rémunération mensuelle nette du fonctionnaire qui demande le transfert – limite fixée par l’article 3 de la réglementation commune – constitue une norme de droit subordonnée au règlement du Conseil fixant le statut. Selon une jurisprudence établie, une telle disposition ne peut avoir pour effet de restreindre la portée d’une disposition statutaire claire.

173
En l’espèce, le requérant rappelle qu’il a demandé à être autorisé, à titre tout à fait exceptionnel et en raison des « circonstances peu communes qui [avaient] entouré [sa] situation à l’époque » de son détachement dans l’intérêt du service au ministère de la Santé grec, à Athènes, à faire transférer de Grèce au Luxembourg les sommes qu’il jugeait indispensables pour lui permettre de couvrir les charges régulières et prouvées qu’il était tenu d’assumer au Luxembourg, lieu de sa résidence principale et habituelle et de celle de sa famille.

174
Il relève que la Commission ne conteste pas le montant des charges régulières auxquelles il devait faire face au Luxembourg. Elle reconnaîtrait au contraire, expressément, les circonstances peu communes qui ont entouré la détermination tardive du lieu de son affectation.

175
De même, la Commission ne contesterait pas le fait que le requérant avait maintenu au Luxembourg le lieu de sa résidence principale et habituelle, que sa famille avait continué à y habiter et qu’il était tenu d’y exposer des charges régulières, notamment à titre de remboursement hypothécaire.

176
La décision attaquée se fonderait ainsi exclusivement sur la limite de 35 % des émoluments nets prévue par l’article 3 de la réglementation commune, disposition qui restreindrait illégalement la portée d’une disposition statutaire claire.

177
Le requérant allègue qu’il y a donc lieu d’annuler la décision du 30 avril 2002 en ce qu’elle ne lui a pas permis de couvrir les charges régulières et prouvées qu’il avait à assumer au Luxembourg, lieu de son affectation habituelle, de sa résidence habituelle et de résidence de sa famille.

178
Selon la Commission, par ce second moyen, le requérant demande en substance à être autorisé à percevoir pendant la durée de son détachement à Athènes, à titre rétroactif, la totalité de la rémunération qu’il percevait pendant son affectation à Luxembourg, y inclus l’indemnité de dépaysement et la somme résultant de l’application du coefficient correcteur luxembourgeois. À cette fin, il tenterait de récupérer ces sommes soit sur la base de l’article 38 du statut, soit par le transfert rétroactif au Luxembourg de la totalité de sa rémunération pendant la période de son détachement.

179
La Commission répond d’abord à l’argumentation du requérant concernant la violation de l’article 38, sous d), du statut. Elle l’interprète en ce sens que le requérant soutient que l’administration devait lui rembourser la différence entre le montant total de la rémunération qui lui a été versée après fixation du lieu de son affectation à Athènes et le montant total de sa rémunération précédente lors de son affectation à Luxembourg.

180
La Commission relève en premier lieu que l’article 38, sous d), du statut règle de manière explicite la question concernant le traitement du fonctionnaire détaché dans l’intérêt du service, qui, aux termes de cet article, « a droit à un traitement différentiel lorsque l’emploi de détachement comporte une rémunération globale inférieure à celle afférente à son grade et à son échelon, dans son institution d’origine ». En conséquence, la deuxième partie de la même disposition ne concernerait pas le salaire, mais les charges entraînées par le détachement. Or, la rémunération globale du requérant pendant son détachement à Athènes correspondrait bien à celle afférente à ses grade et échelon dans son institution d’origine. Le requérant ne saurait donc, poursuit la Commission, par une interprétation biaisée des termes concernant le remboursement de charges, aboutir à une augmentation de son traitement.

181
La Commission fait remarquer en second lieu que ni la suppression de l’indemnité de dépaysement lorsque le fonctionnaire est affecté dans le pays dont il est ressortissant ni l’application du coefficient correcteur de l’État d’affectation ne peuvent être considérées comme des charges au sens de l’article 38 du statut. La notion de charge impliquerait des dépenses liées au détachement. Elle cite, à l’appui de sa thèse, l’arrêt de la Cour du 14 janvier 1982, Novi/Commission (56/81, Rec. p. 1, point 5), selon lequel « uniquement les dépenses […] peuvent être qualifiées de charges supplémentaires entraînées par le détachement même ».

182
En outre, fait-elle valoir, si l’indemnité de dépaysement avait continué à lui être versée et si le coefficient correcteur du Luxembourg avait continué à être appliqué à sa rémunération, il y aurait eu enrichissement sans cause du requérant.

183
Par ailleurs, la Commission soutient que si l’interprétation du requérant était retenue, les fonctionnaires détachés dans l’intérêt du service bénéficieraient de l’indemnité de dépaysement, alors qu’ils seraient affectés dans leur propre pays, et ne se verraient pas appliquer le coefficient correcteur du pays en question. La Commission estime non seulement que cela serait contraire au statut, mais aussi que cela constituerait une violation du principe d’égalité de traitement en raison de l’application de conditions différentes aux autres fonctionnaires de la même nationalité affectés dans le même pays. À ce sujet, la Commission attire l’attention du Tribunal sur l’arrêt de la Cour du 16 juin 1971, Bode e.a./Commission (63/70 à 75/70, Rec. p. 549, point 8), la Cour y ayant consacré le respect du principe d’égalité de traitement entre les fonctionnaires des Communautés par l’application des coefficients correcteurs.

184
La Commission est donc d’avis que la première branche de ce second moyen doit être rejetée. Elle en examine ensuite la seconde branche, qui porte sur la violation de l’article 17 de l’annexe VII du statut résultant de ce que l’administration a limité à 35 % de sa rémunération nette le transfert des émoluments du requérant au Luxembourg.

185
La Commission relève tout d’abord qu’elle a autorisé le requérant, au titre de l’article 17, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut, à transférer, à titre exceptionnel et en raison des circonstances de l’affaire, un montant maximal de 35 % de sa rémunération nette pendant la période de son détachement à Athènes. Elle indique avoir dû recourir à l’article 17, paragraphe 2, sous c), de cette disposition en raison du caractère rétroactif du transfert. Il aurait toutefois été décidé de maintenir le seuil de 35 %, ce pourcentage permettant de déterminer le montant maximal transférable sur la base de la réglementation commune. Il s’agissait en effet, soutient la Commission, de permettre au requérant de transférer la partie de sa rémunération qu’il aurait pu transférer régulièrement sur la base de l’article 17, paragraphe 2, sous b), s’il en avait fait la demande au moment opportun. Dès lors, il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir tenu compte des intérêts du requérant.

186
Sur l’illégalité prétendue de la limitation du transfert de la rémunération nette à 35 % de cette dernière, la Commission rappelle que l’article 17, paragraphe 2, de l’annexe VII du statut indique que le fonctionnaire peut effectuer des transferts de rémunération « [d]ans les conditions fixées par une réglementation établie d’un commun accord par les institutions des Communautés après avis du comité du statut ». Le statut accorderait donc aux institutions communautaires la faculté de fixer les conditions de ces transferts.

187
La Commission fait observer à cet égard que la juridiction communautaire s’est prononcée en faveur de la légalité des dispositions établies par la réglementation commune fixant des plafonds non prévus expressément par le statut (arrêt du Tribunal du 26 octobre 1993, Reinarz/Commission, T‑6/92 et T‑52/92, Rec. p. II‑1047, points 71 à 74).

188
Dès lors que, selon la Commission, les institutions communautaires sont habilitées par le statut à fixer d’un commun accord une réglementation commune sur les transferts d’une partie de la rémunération du fonctionnaire, elles sont libres de fixer des plafonds non prévus par le statut, à condition de ne pas dépasser les limites de leur pouvoir d’appréciation.

189
La Commission fait par ailleurs remarquer que, même si une limite aux transferts réguliers a été fixée, la possibilité demeure de faire transférer, à titre exceptionnel et pour des cas dûment justifiés, des montants supérieurs.

190
À l’appui de sa thèse selon laquelle les institutions communautaires sont en droit de limiter le montant de la rémunération pouvant être transférée, elle cite deux arrêts (arrêt Elz/Commission, précité, points 10 à 13, et arrêt du Tribunal du 15 décembre 1992, Scaramuzza/Commission, T‑75/91, Rec. p. II‑2557, points 40 à 42).

191
Selon le premier de ces arrêts, il serait exclu que le fonctionnaire puisse effectuer des transferts réguliers portant sur la totalité de son traitement. Cette solution, précise la Commission, est d’ailleurs logique, dans la mesure où le fonctionnaire ne peut prétendre n’avoir aucune dépense (logement, nourriture, transport, etc.) au lieu de son affectation.

192
La Commission rappelle en outre que l’article 17, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut n’est applicable qu’à titre exceptionnel et dans des cas dûment justifiés. Elle disposerait donc d’une marge d’appréciation à cet égard. La prétention du requérant d’obliger l’administration à lui octroyer, par le biais de cette disposition, le bénéfice du transfert rétroactif de la totalité de son traitement, alors qu’il n’aurait pu prétendre qu’au transfert de 35 % de sa rémunération s’il en avait fait la demande au moment opportun, constituerait, en fait, un détournement de la finalité des dispositions sur le transfert d’une partie de la rémunération du fonctionnaire.

193
La Commission conclut donc au rejet de ce moyen et, partant, du recours dans son ensemble.

Appréciation du Tribunal

194
Les dispositions de l’article 38, sous d), du statut ne sauraient signifier, ainsi que le Tribunal l’a jugé aux points 106 et 107 ci-dessus, que le requérant devait percevoir, pendant son affectation à Athènes, la totalité de la rémunération qu’il percevait lors de son affectation à Luxembourg, y compris l’indemnité de dépaysement et la somme résultant de l’application du coefficient correcteur luxembourgeois. Le Tribunal rappelle à cet égard que les dispositions du statut doivent être appliquées de manière cohérente entre elles.

195
Le remboursement, prévu par le statut, des charges supplémentaires supportées par le fonctionnaire ne vise pas davantage à compenser la mise en œuvre d’autres dispositions du statut. La suppression de l’indemnité de dépaysement et l’application du coefficient correcteur du pays d’affectation ne sauraient par conséquent constituer une charge au sens de l’article 38 du statut. Ainsi que l’a jugé la Cour dans l’arrêt Novi/Commission, précité (point 7), seules les dépenses peuvent être qualifiées de charges supplémentaires entraînées par le détachement.

196
Selon les termes de la disposition invoquée, le fonctionnaire en détachement dans l’intérêt du service a droit à un traitement différentiel lorsque l’emploi de détachement comporte une rémunération globale inférieure à celle afférente à son grade et à son échelon, dans son institution d’origine ; il a droit également au remboursement de la totalité des charges supplémentaires qu’entraîne pour lui son détachement. Cette disposition pose ainsi clairement le principe de l’équivalence de rémunération dans l’emploi de détachement. Indépendamment du fait que la Commission a décidé en l’espèce de rémunérer elle-même le requérant, ce principe s’appliquait à la situation du requérant.

197
Or, comme le Tribunal l’a relevé au point 106 ci-dessus, le requérant, pendant son détachement à Athènes, a bien été rémunéré au même grade et au même échelon que dans son institution d’origine.

198
Dès lors, la suppression de l’indemnité de dépaysement et l’application du coefficient correcteur pour la Grèce à la rémunération du requérant résultent en l’espèce d’une exacte application des dispositions statutaires.

199
Il n’y a donc pas lieu de considérer que la décision litigieuse viole l’article 38, sous d), du statut. Il convient, par suite, de rejeter la première branche du second moyen invoqué par le requérant.

200
Il reste à examiner, enfin, si la décision litigieuse viole l’article 17 de l’annexe VII du statut en ce qu’elle limite le transfert de la rémunération du requérant à 35 % de celle-ci.

201
Cette limite de 35 % a été fixée par l’article 3 de la réglementation commune, en application de l’article 17 de l’annexe VII du statut. Celui-ci prévoit la possibilité, pour le fonctionnaire, d’effectuer des transferts de rémunération « [d]ans les conditions fixées par une réglementation établie d’un commun accord par les institutions des Communautés après avis du comité du statut ». Cette disposition habilite donc les institutions communautaires à déterminer les conditions de ces transferts en leur laissant une certaine marge d’appréciation.

202
Contrairement à ce que prétend le requérant, la fixation de plafonds non prévus par le statut n’est pas illégale en soi du simple fait qu’elle est prévue par une norme de droit subordonnée. Le Tribunal a d’ailleurs déjà admis la légalité de plafonds de cette nature dans son arrêt Reinarz/Commission, précité (points 71 à 74).

203
Il y a cependant lieu de contrôler si la Commission n’a pas dépassé les limites de son pouvoir d’appréciation en fixant cette limite de 35 % de la rémunération nette aux transferts réguliers. Le Tribunal rappelle à cet égard qu’il s’agit d’une dérogation à la règle selon laquelle les sommes dues au fonctionnaire sont payées au lieu et dans la monnaie du pays où le fonctionnaire exerce ses fonctions. On présume en effet que les dépenses se feront à ce lieu (voir, en ce sens, arrêts Elz/Commission, précité, points 11 à 15, et Scaramuzza/Commission, précité, point 44). Cette limite de 35 % apportée aux transferts réguliers ne paraît dès lors pas manifestement disproportionnée.

204
Par ailleurs, il convient de noter que la Commission a recouru ici à une disposition particulière. Elle n’a pas invoqué l’article 17, paragraphe 2, sous b), de l’annexe VII du statut, pour la mise en œuvre duquel il est fait application de la limite relative aux transferts réguliers, mais l’article 17, paragraphe 2, sous c), de cette même annexe. Selon cette dernière disposition, la limite apportée aux transferts réguliers n’exclut pas la possibilité de faire transférer, à titre exceptionnel et pour des cas dûment justifiés, des montants supérieurs. C’est donc dans ce cadre précis que la validité de la limite de 35 % doit être appréciée.

205
En effet, la Commission a recouru à cette disposition, mais, « compte tenu des circonstances peu communes » de l’espèce, elle a appliqué au transfert demandé la limite de 35 %, au motif qu’« il s’agissait en réalité de permettre au requérant de transférer la partie de sa rémunération qu’il aurait pu transférer régulièrement sur la base [des dispositions prévues sous] b) [...] s’il en avait fait la demande au moment opportun ».

206
L’article 17, paragraphe 2, sous c), de l’annexe VII du statut ne vise pas les transferts réguliers limités à 35 % de la rémunération nette, mais les transferts réalisés à titre tout à fait exceptionnel pour des cas dûment justifiés. Il importe à cet égard de souligner que le requérant ne conteste pas le recours à cette disposition, mais seulement le plafond établi par la Commission dans le cadre de cette disposition.

207
Or, cette disposition présente à l’évidence une nature restrictive. Par ailleurs, eu égard à son caractère exceptionnel, l’autorité administrative dispose par définition d’un large pouvoir d’appréciation dans sa mise en œuvre. Il convient du reste de rappeler que, selon la dernière phrase de l’article 5 de la réglementation commune, « l’autorisation est accordée sur la base d’un examen de la justification ».

208
Par ailleurs, en tout état de cause, la disposition en cause, non contestée par le requérant, ne vise pas à permettre la couverture totale des charges régulières que le fonctionnaire assume dans un autre pays que celui du lieu d’affectation. Elle ne peut dès lors être invoquée dans ce sens.

209
Enfin, les dépenses, surtout issues de charges hypothécaires, dont a fait état le requérant dans sa note du 28 janvier 2002 adressée à Mme Reicherts paraissent relever de la catégorie des « dépenses résultant de charges régulières » visée à l’article 2 de la réglementation commune, adoptée en application de l’article 17, paragraphe 2, sous b), de l’annexe VII du statut. Le requérant n’a, du reste, pas établi que ses dépenses n’avaient pas le caractère de charges régulières. Il semble au contraire souligner que le critère déterminant est celui des charges régulières et prouvées que le fonctionnaire concerné doit assumer en dehors du pays où il exerce ses fonctions et il allègue que la décision attaquée ne lui a pas permis de « couvrir les charges régulières et prouvées qu’il a[vait] à assumer au Luxembourg ».

210
Dès lors, et faute pour le requérant d’avoir apporté la justification de charges exceptionnelles qui eussent été de nature à permettre à l’administration d’autoriser un transfert supérieur au seuil de 35 % de la rémunération nette du fonctionnaire, la Commission n’a pas agi de façon disproportionnée en utilisant de façon ponctuelle, dans le cadre d’une disposition exceptionnelle, laissant une marge d’appréciation substantielle à l’autorité administrative, une limite utilisée en règle générale précisément pour le type de transfert réclamé par le requérant.

211
En conséquence, il n’y a pas lieu d’accueillir la seconde branche du second moyen invoqué par le requérant, de sorte que le second moyen doit être intégralement rejeté.


Sur les dépens

212
En application de l’article 87, paragraphes 2 et 3, premier alinéa, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Si plusieurs parties succombent, le Tribunal décide du partage des dépens. Le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supportera ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, ou pour des motifs exceptionnels. Par ailleurs, selon l’article 88 du même règlement, dans les litiges entre les Communautés et leurs agents, les frais exposés par les institutions restent à la charge de celles-ci.

213
Le requérant ayant obtenu gain de cause concernant l’un des chefs de conclusions de son second recours (affaire T‑113/03), d’une part, et le retard avec lequel la Commission s’est prononcée sur les droits du requérant ayant favorisé la naissance de ce litige, d’autre part, le Tribunal juge qu’il y a lieu de condamner la Commission à supporter ses propres dépens et à payer un tiers des dépens du requérant dans les deux affaires.


Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)
La décision de la Commission du 30 avril 2002 est annulée en tant qu’elle a refusé au requérant le bénéfice de l’indemnité d’installation à l’occasion de son détachement à Athènes.

2)
Le surplus des conclusions en annulation présentées dans les affaires T‑180/02 et T‑113/03 est rejeté.

3)
La Commission supportera ses propres dépens et un tiers des dépens du requérant dans ces deux affaires.

4)
Le requérant supportera deux tiers de ses dépens dans ces mêmes affaires.

Azizi

Jaeger

Dehousse

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 juillet 2004.

Le greffier

Le président

H. Jung

J. Azizi


1
Langue de procédure : le français.