Language of document : ECLI:EU:T:2011:79

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

9 mars 2011 (*)

« Clause compromissoire – Programme concernant la promotion de technologies énergétiques pour l’Europe (Thermie) – Contrat concernant la construction à Valladolid (Espagne) d’un centre commercial et d’affaires équipé d’un système de climatisation solaire – Inexécution du contrat – Remboursement des sommes avancées – Intérêts de retard – Procédure par défaut »

Dans l’affaire T‑235/09,

Commission européenne, représentée par M. G. Valero Jordana, en qualité d’agent,

partie requérante,

contre

Edificios Inteco, SL, établie à Valladolid (Espagne), représentée par Me C. de la Red Mantilla, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé par la Commission en vertu de l’article 238 CE en vue d’obtenir le remboursement de la somme de 157 238,07 euros, versée par cette dernière à la défenderesse dans le cadre d’un projet de construction à Valladolid d’un centre commercial et d’affaires équipé d’un système de climatisation solaire (contrat BU/1041/93), majorée des intérêts de retard,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. O. Czúcz, président, Mme I. Labucka (rapporteur) et M. M. van der Woude, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la procédure écrite,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 22 mars 1994, la Communauté européenne, représentée par la Commission des Communautés européennes, a conclu le contrat BU‑1041/93 (ci-après le « contrat ») avec un consortium comprenant une société anglaise, en qualité de coordonnateur, et dix autres contractants, parmi lesquels figure Edificios Inteco, SL (ci‑après la « défenderesse »).

2        Le contrat prévoit la mise en œuvre du projet « Energy – Comfort 2000 Phase I », dans le cadre du programme Thermie prévu par le règlement (CEE) n° 2008/90 du Conseil, du 29 juin 1990, concernant la promotion de technologies énergétiques pour l’Europe (programme Thermie) (JO L 185, p. 1).

3        En vertu du contrat, la défenderesse devait bâtir un immeuble comprenant des bureaux et des espaces commerciaux dans la ville de Valladolid (Espagne), en utilisant une technologie permettant, pour un coût raisonnable, de remplacer intégralement les systèmes traditionnels de climatisation par des systèmes utilisant l’énergie solaire.

4        Le contrat est rédigé en anglais et, en vertu de son article 9.1, est régi par le droit anglais. Il comporte trois annexes, qui en font partie intégrante. Dans l’annexe I du contrat, est décrit le programme de travail. L’annexe II du contrat contient les conditions générales gouvernant le contrat. L’annexe III du contrat contient l’accord de partenariat et le protocole de collaboration.

5        Aux termes de l’article 12 des conditions générales, la Cour de justice des Communautés européennes est seule compétente pour connaître des litiges concernant le contrat.

6        Selon l’article 2.1 du contrat, la durée du projet était de 18 mois, conformément au calendrier établi dans le programme de travail. Le paragraphe 5 de la partie B du programme de travail précisait les différentes phases de la construction de l’immeuble en cause, qui devait commencer en janvier 1994 et s’achever en décembre 1995, en vue de sa mise en service en mars 1996 au plus tard.

7        Selon l’article 2.2 du contrat, la Commission devait être informée de tout retard dans l’exécution du projet. Les contractants ou la Commission avaient le droit de résilier le contrat dans les circonstances décrites à l’article 8 des conditions générales.

8        En vertu de l’article 3.1 du contrat, les coûts totaux du projet avaient été estimés à 5 235 000 écus. À l’article 3.2 du contrat, il était prévu que la Commission s’engagerait à financer jusqu’à 40 % des coûts admissibles du projet à concurrence d’un montant maximum de 2 094 000 écus.

9        En vertu de l’article 4 du contrat, le versement de la contribution financière de la Commission devait s’effectuer comme suit :

–        un paiement d’une avance initiale de 628 000 écus équivalant à 30 % des coûts admissibles du projet ;

–        des paiements périodiques de sommes équivalant à 20 % des dépenses effectives, à effectuer dans les deux mois suivant l’approbation des rapports techniques et des relevés de coûts correspondants, le montant total des sommes payées ne devant pas excéder 50 % des coûts admissibles du projet ;

–        un paiement final dont le montant ne dépasse pas 20 % des coûts admissibles du projet.

10      Selon l’article 4.3 du contrat, tous les paiements effectués par la Commission devaient l’être au coordonnateur, lequel était tenu de verser immédiatement aux différents contractants les montants qui leur étaient dus.

11      Les coûts admissibles, visés à l’article 3.2 du contrat, étaient définis à l’article 19 des conditions générales comme ceux correspondant aux dépenses effectives, qui sont indispensables à la réalisation du projet et qui ont été acquittés après la date de début des travaux. Peuvent être considérés comme des coûts admissibles : les frais de personnel, les frais généraux, les frais de voyages et de déplacement, les frais liés à l’équipement durable, les frais liés aux biens de consommation, les frais liés au traitement des données, les frais liés aux services externes et les autres frais.

12      Selon l’article 6.1, sous a), des conditions générales, les contractants étaient tenus de présenter à la Commission, au cours du septième mois suivant la date de démarrage des travaux indiquée à l’article 2.1 du contrat, un rapport technique, un rapport financier et une mise à jour de la fiche destinée à la base de données.

13      Conformément aux conditions générales, la Commission était en droit de résilier le contrat pour les motifs indiqués à l’article 8.2 desdites conditions générales et de demander, pour les cas visés à l’article 8.4 de ces conditions générales, le remboursement de tout ou partie de sa contribution financière et des intérêts de retard. En outre, en vertu de l’article 8.5, premier alinéa, des conditions générales, la Commission pouvait décider, au lieu de résilier le contrat en application de l’article 8.2 des mêmes conditions générales, de mettre fin, selon les termes et conditions qu’elle jugeait appropriés, à la participation au contrat du contractant auquel s’appliquent les motifs de résiliation mentionnés ci-dessus.

14      L’entrée en vigueur, le 20 juin 1997, du règlement (CE) n° 1103/97 du Conseil, du 17 juin 1997, fixant certaines dispositions relatives à l’introduction de l’euro (JO L 162, p. 1), a eu pour conséquence, par application de l’article 2, paragraphe 1, de ce règlement, le remplacement de toute référence à l’écu par une référence à l’euro au taux d’un euro pour un écu.

15      Par lettres du 24 octobre et du 3 novembre 1997, M. H. G., administrateur unique, représentant la défenderesse, a informé la Commission que son entreprise ne pourrait construire l’immeuble en cause, étant donné que son entreprise n’avait pas pu obtenir un financement garanti. En conséquence, la défenderesse a demandé la clôture du dossier relatif audit immeuble dans le cadre du projet et a annoncé qu’elle transmettrait le rapport technique et la justification économique des tâches accomplies avant la fin du mois en cours.

16      Le 29 novembre 1997, la défenderesse a remis à la Commission les rapports concernant l’exécution technique et l’avancement immobilier du projet, ainsi qu’une copie des projets et des rapports effectués. Elle a également ajouté que la construction de l’immeuble en cause n’avait pas débuté en raison de problèmes de financement bancaire, ce qui l’avait empêchée de transmettre les rapports intermédiaires.

17      Le 6 février 1998, le coordonnateur a informé la Commission que, dans le cadre du projet, il avait transféré à la défenderesse un montant de 298 582 euros, qui correspondait à la somme du montant de l’avance initiale et des montants de trois paiements intermédiaires effectués.

18      Par télécopie du 9 février 1998, la Commission a demandé à la défenderesse de présenter les documents relatifs à ses frais de personnel et à ses frais liés aux services externes.

19      Le 3 mars 1998, la défenderesse a remis à la Commission un rapport financier final daté du 27 février 1998. Dans ledit rapport, la défenderesse a indiqué que l’inexécution du contrat était due aux problèmes de financement bancaire. Cette circonstance devrait être considérée comme un cas de force majeure, conformément à l’article 1.6 du contrat, la délivrant de son obligation de remboursement des sommes avancées (voir article 8.4 des conditions générales).

20      Le 8 avril 1998, la Commission a informé la défenderesse que, conformément au programme de travail, sur un montant total des frais déclarés de 127 846 685 pesetas (ESP) (soit 769 340 euros), seule une partie desdits frais pouvait être acceptée comme coûts admissibles du projet, à savoir un montant de 32 712 765 ESP (soit 196 855 euros). Elle a précisé que, après application du taux maximal de 40 % des coûts admissibles du projet auxdites dépenses acceptées, le montant obtenu était de 13 085 106 ESP (soit 78 742 euros). La défenderesse ayant déjà perçu une subvention de 298 582 euros, elle devait rembourser la somme de 219 840 euros.

21      Par lettre du 20 mai 1998, la défenderesse a accusé réception de la lettre de la Commission du 8 avril 1998 et a demandé l’annulation de la demande de remboursement en alléguant que l’inexécution du contrat était dû à un cas de force majeure, conformément à l’article 1.6 du contrat. En outre, elle a rappelé que l’article 8.4 des conditions générales ne prévoit pas la possibilité de demander le remboursement des sommes avancées en cas de force majeure [article 8.2, sous g), des conditions générales].

22      Le 5 juin 1998, lors de la réunion de tous les contractants, la Commission a informé ces derniers, à la suite du défaut d’exécution de la défenderesse et à la suite de sa demande de se retirer du projet, de sa décision de mettre fin à la participation de la défenderesse au projet, conformément à l’article 8.5 des conditions générales.

23      Le 15 juillet 1998, M. H. G. a notamment indiqué à la Commission, qu’il avait demandé à un groupe de consultants spécialisés de procéder à la dissolution ou à la liquidation de la défenderesse.

24      Dans sa réponse du 31 mars 1999 à la lettre de M. H. G. du 15 juillet 1998, la Commission a demandé le remboursement de la somme de 219 840 euros, conformément à l’article 8.4 des conditions générales, et lui a transmis, le 9 août 1999, la note de débit correspondante.

25      Par lettre du 28 septembre 1999, M. H. G. a accusé réception de la note de débit du 9 août 1999 et a indiqué que la défenderesse faisait l’objet d’une procédure de dissolution.

26      Par lettre du 7 octobre 1999, la Commission a demandé à M. H. G. de lui communiquer dans les plus brefs délais le nom du liquidateur de la défenderesse. Le 9 novembre 1999, elle a réitéré sa demande par télécopie.

27      Le 3 décembre 1999, en réponse aux demandes de la Commission, M. H. G. lui a transmis une photocopie de l’acte notarié de dissolution de la défenderesse (y compris le bilan de liquidation de la société) et d’ouverture de la procédure de liquidation. Dans ledit acte, daté du 23 novembre 1999, il est indiqué que l’assemblée générale extraordinaire des actionnaires a approuvé la dissolution de la société et a nommé M. H. G. en qualité de liquidateur.

28      Par lettre du 16 février 2000, la Commission a demandé au liquidateur de prendre les mesures nécessaires en vue de lui rembourser les sommes qui lui étaient dues.

29      Par lettre du 22 février 2000, le liquidateur a informé la Commission qu’il allait demander l’ouverture d’une procédure judiciaire de faillite ou de cessation de paiement ainsi que, la défenderesse manquant de liquidités, la désignation d’un avocat et d’un avoué commis d’office. Il s’est également engagé à informer la Commission de l’évolution de la procédure judiciaire.

30      Par décision du 13 juillet 2001, la Commission a décidé de compenser partiellement la dette de la défenderesse à l’égard de la Communauté par une dette de la Communauté à l’égard de la défenderesse d’un montant de 62 601,93 euros pour des travaux effectués par cette dernière dans le cadre du contrat SE-203-90, lequel concernait la mise en œuvre du projet « Solar Systems for a Computer Controlled Hybrid Environmentally and Cooled Office Building ».

31      En l’absence de nouvelles informations sur la procédure de liquidation de la défenderesse, la Commission a mandaté un avocat en Espagne, qui a demandé, par télécopie du 23 juin 2003, au liquidateur de l’informer de l’évolution de la procédure de liquidation de la défenderesse.

32      Par télécopie du 27 juin 2003, M. G. A., représentant d’un groupe de consultants spécialisés, a indiqué à l’avocat de la Commission que le liquidateur avait cessé toute activité.

33      Le 6 février 2006, ayant localisé le domicile privé du liquidateur, la Commission a rappelé à ce dernier qu’il ne l’avait pas tenue informée de l’évolution de la procédure de liquidation, comme il s’y était engagé, et lui a demandé des informations sur l’état d’avancement du bilan de liquidation de la défenderesse. Enfin, la Commission a indiqué que le bilan de la défenderesse accompagnant l’acte authentique de dissolution de la société ne mentionnait pas la dette à l’égard de la Communauté.

34      Par lettre du 2 mars 2006, M. G. A. a répondu à la Commission et expliqué, notamment, que les subventions perçues par la société étaient justifiées par les dépenses liées à la réalisation du projet, qui apparaissaient dans le compte de pertes et profits et ne figuraient donc pas dans le bilan.

 Procédure

35      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 juin 2009, la Commission a introduit le présent recours en vertu de l’article 238 CE.

36      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 8 octobre 2009, le liquidateur a demandé au Tribunal de l’admettre au bénéfice de l’aide judiciaire au titre de l’article 95 du règlement de procédure du Tribunal.

37      Par ordonnance du 11 janvier 2010, le président de la quatrième chambre a rejeté la demande d’aide judiciaire.

38      Le 20 janvier 2010, en considération du fait que la défenderesse n’avait pas produit de mémoire en défense dans le délai imparti, la Commission a demandé au Tribunal de lui adjuger le bénéfice de ses conclusions, conformément à l’article 122, paragraphe 1, du règlement de procédure. Le greffe a signifié cette demande à la défenderesse.

39      À cet égard, il convient effectivement de constater que, bien que la requête de la Commission ait été régulièrement notifiée à la défenderesse, cette dernière n’a pas produit, dans les délais prescrits, de mémoire en défense au sens de l’article 46 du règlement de procédure. Le Tribunal doit, dès lors, statuer par défaut. La recevabilité du recours ne faisant aucun doute et les formalités ayant été régulièrement accomplies, il appartient au Tribunal, conformément à l’article 122 du règlement de procédure, de vérifier si les conclusions de la Commission paraissent fondées.

40      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (quatrième chambre) a décidé d’inviter les parties, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure, à répondre par écrit à quelques questions et à produire certains documents. La Commission a déféré à cette demande dans le délai imparti. Le président de la quatrième chambre a décidé de verser au dossier le document produit par la défenderesse.

41      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la troisième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

42      Un membre de la chambre étant empêché de siéger, le président du Tribunal a désigné, en application de l’article 32, paragraphe 3, du règlement de procédure, un autre juge pour compléter la chambre.

 Conclusions de la Commission

43      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        condamner la défenderesse à rembourser à la Commission la somme de 157 238,07 euros, majorée de 81 686,22 euros correspondant aux intérêts dus à la date du 1er juin 2009 ;

–        condamner la défenderesse à rembourser à la Commission la somme de 21,73796 euros par jour de retard supplémentaire à compter du 2 juin 2009 et jusqu’à la date du remboursement intégral des sommes dues ;

–        condamner la défenderesse aux dépens.

 En droit

 Sur le droit de remboursement d’une partie des sommes avancées

 Arguments de la Commission

44      La Commission rappelle que, selon l’article 2.1 du contrat, la durée du projet était de 18 mois, conformément au calendrier établi dans le programme de travail. Elle précise que, selon le programme de travail, la construction de l’immeuble en cause devait commencer en janvier 1994 et s’achever en décembre 1995, en vue de la mise en service au plus tard en mars 1996.

45      Image not foundLa Commission fait également observer que, le 3 novembre 1997, le liquidateur l’a informée du fait que la défenderesse ne pouvait construire l’immeuble en cause. Elle en déduit que, en ne respectant pas le calendrier figurant au paragraphe 5 de la partie B, du programme de travail, la défenderesse a violé l’article 2.1 du contrat.

46      La Commission fait valoir qu’elle était, dès lors, en droit de résilier le contrat et de demander le remboursement partiel des avances versées à la défenderesse, ces sommes devant être majorées des intérêts de retard. Elle soutient avoir demandé ce remboursement par lettres du 8 avril 1998 ainsi que du 31 mars et du 9 août 1999, pour un montant total de 219 840 euros. Elle ajoute, toutefois, qu’il convient de soustraire dudit montant la somme de 62 601,93 euros en raison de la compensation effectuée de la dette de la défenderesse à l’égard de la Communauté par une dette de la Communauté à l’égard de la défenderesse. Elle estime ainsi que le montant des sommes restant dues en principal par la défenderesse est de 157 238,07 euros.

47      Interrogée par le Tribunal dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, la Commission a précisé que le contrat avait été résilié pour le motif indiqué à l’article 8.2, sous d), des conditions générales.

48      La Commission ajoute que, en vertu de l’article 8.5 des conditions générales, elle pouvait décider, selon les termes et conditions qu’elle jugeait appropriés, de « résilier partiellement le contrat à l’égard du contractant responsable de son inexécution ».

 Appréciation du Tribunal

49      Il convient de rappeler que les litiges nés lors de l’exécution d’un contrat doivent être tranchés en principe sur la base des clauses contractuelles (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 16 mai 2001, Toditec/Commission, T‑68/99, Rec. p. II‑1443, point 77, et du 15 mars 2005, GEF/Commission, T‑29/02, Rec. p. II‑835, point 108).

50      Aux termes de l’article 8.4 des conditions générales, la Commission peut exiger, dans le cadre de la résiliation du contrat, au motif mentionné à l’article 8.2, sous c), d), e) ou f), desdites conditions générales, le remboursement de toute sa contribution financière ou d’une partie de celle-ci. Il résulte de l’économie du contrat, que cette possibilité est également ouverte à la Commission lorsqu’elle choisit, conformément à l’article 8.5 des conditions générales, de seulement mettre fin à la participation au contrat d’un contractant au lieu de résilier ledit contrat. En revanche, il convient de constater que le contrat ne prévoit pas la possibilité pour la Commission de demander le remboursement des sommes avancées en cas de force majeure [article 8.2, sous g), des conditions générales].

51      En l’espèce, il ressort des informations fournies par la Commission que celle-ci a été informée par la défenderesse, par lettres du 24 octobre et du 3 novembre 1997, que cette dernière ne pouvait pas construire l’immeuble en cause.

52      En outre, il ressort du dossier, plus précisément du rapport financier final daté du 27 février 1998 et de la lettre du 20 mai 1998 adressée par la défenderesse à la Commission, que la défenderesse était d’avis que l’inexécution du contrat devait être considéré comme un cas de force majeure, conformément à l’article 1.6 du contrat. En effet, la défenderesse estimait, en substance, que la nature innovante du projet lui-même avait été à l’origine d’un manque de confiance manifesté par un secteur aussi conservateur que celui de la finance, des investisseurs, de l’industrie de la construction, en particulier dans une région géographique traditionnellement conservatrice, ce qui constituait un cas de force majeure la délivrant de son obligation de remboursement des sommes avancées. La défenderesse précise, à cet égard, que l’article 8.4 des conditions générales ne prévoit pas la possibilité de demander le remboursement des sommes avancées en cas de force majeure.

53      Par ailleurs, il convient de relever que la Commission ne partageait pas cet avis et a mis fin à la participation de la défenderesse au contrat en invoquant l’inexécution de ses obligations contractuelles.

54      À cet égard, il y a lieu d’observer que la force majeure n’est pas mentionnée dans le contrat parmi les motifs possibles de résiliation de ce dernier par un contractant.

55      En effet, un contractant peut seulement invoquer un cas de force majeure, pour justifier une suspension de l’exécution des obligations lui incombant en vertu de l’article 1.6 du contrat, si une série de conditions sont respectées. Le contractant doit, premièrement, informer sans délai la Commission et les autres contractants des causes de la force majeure, deuxièmement, prendre toutes les mesures propres à éviter ou à éliminer les causes de l’inexécution et, troisièmement, poursuivre l’exécution du contrat aussitôt que les causes sont éliminées. Si un cas de force majeure perdure au-delà de quatre mois, la Commission peut résilier le contrat, en application de l’article 8.2, sous g), des conditions générales.

56      Or, il ressort, tout d’abord, du dossier que la défenderesse a informé la Commission, le 3 novembre 1997, qu’elle ne pouvait pas construire l’immeuble en cause et a, en conséquence, sollicité la clôture du dossier relatif audit immeuble dans le cadre du projet. Il convient également de relever que c’est seulement lors de la remise du rapport financier final, le 3 mars 1998, que la défenderesse a invoqué un cas de force majeure. Par conséquent, la défenderesse n’a pas respecté la première condition prévue par l’article 1.6 du contrat, à savoir informer sans délai la Commission et les autres contractants des causes de la force majeure. Ensuite, il ne ressort pas du dossier que la défenderesse a entrepris toutes les démarches possibles pour obtenir le financement bancaire nécessaire à la poursuite de l’exécution du contrat. Dès lors, elle n’a pas respecté la deuxième condition prévue par l’article 1.6 du contrat.

57      De surcroît, la seule explication fournie par la défenderesse est l’impossibilité d’obtenir un prêt hypothécaire en raison de la nature innovante du projet. Une telle situation ne saurait être considérée comme un cas de force majeure, car elle n’est pas un événement exceptionnel auquel la société concernée ne peut faire face.

58      Par conséquent, en l’absence de cas de force majeure justifiant l’inexécution par la défenderesse de ses obligations contractuelles, la Commission paraît fondée à mettre fin à la participation au contrat de la défenderesse pour le motif indiqué à l’article 8.2, sous d), des conditions générales et à demander le remboursement d’une partie des sommes avancées, en vertu de l’article 8.4 des conditions générales.

59      S’agissant de la somme due en principal par la défenderesse, il y a lieu de rappeler que, le 29 novembre 1997, celle-ci a remis à la Commission les rapports concernant l’exécution technique et l’avancement immobilier du projet ainsi qu’une copie des projets et des rapports effectués. Elle a notamment ajouté que la construction de l’immeuble en cause n’avait pas débuté en raison de problèmes de financement bancaire, ce qui l’avait empêchée de transmettre les rapports intermédiaires. Le rapport financier final a été transmis le 3 mars 1998.

60      Il ressort de la lettre de la Commission du 8 avril 1998 qu’une série de dépenses, pour un montant global de 32 712 765 ESP (196 855 euros), pouvaient être considérées comme des coûts admissibles. Il y a lieu d’observer que la Commission justifie la réduction opérée, d’une part, par la circonstance que les tâches accomplies par la défenderesse aux fins du projet correspondaient uniquement à des travaux prévus dans le cadre de la phase 1, intitulée « Conception » [pour un montant de 25 000 000 ESP (150 442 euros)], et à un quart des activités de diffusion dans le cadre de la phase 5, intitulée « Contrôle » [pour un montant 5 000 000 ESP (30 088 euros), soit 25 % de 20 000 000 ESP], et, d’autre part, par la prise en considération des frais liés aux services externes [pour un montant de 1 240 000 ESP (7 462 euros)] et des frais de déplacement [pour un montant de 1 472 765 ESP (8 863 euros)]. Après application du taux maximal de 40 % des coûts admissibles du projet conformément à l’article 3.2 du contrat, la Commission a retenu un montant de 13 085 106 ESP (78 742 euros). La défenderesse ayant perçu une montant de 298 582 euros, la Commission en a déduit que celle-ci devait rembourser la somme de 219 840 euros.

61      À cet égard, il y a lieu de considérer que la Commission pouvait tenir compte des coûts admissibles définis à l’article 19 des conditions générales, comme ceux correspondant aux dépenses effectives, qui sont indispensables à la réalisation du projet et qui ont été acquittées après la date de début des travaux. En revanche, elle ne pouvait pas tenir compte des frais visés à l’article 28 des conditions générales, lequel fait état de tous les coûts non admissibles.

62      Par lettre du 20 mai 1998, la défenderesse a notamment attiré l’attention sur les différents types de coûts en l’espèce. Les conditions générales, d’une part, mentionnent des coûts admissibles et le programme de travail, d’autre part, mentionne des coûts éligibles. Il ressort de ladite lettre que la défenderesse a fait valoir que les coûts admissibles devaient être pris en compte en l’espèce et non pas les coûts éligibles comme mentionnés dans la lettre de la Commission du 8 avril 1998.

63      Interrogée par le Tribunal, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, quant à la différence entre les « coûts admissibles », mentionnés à l’article 3 du contrat et dans ses conditions générales, et les coûts éligibles, auxquels il est fait référence au point 21 du programme de travail, la Commission a fait valoir que ces deux termes font référence au même type de coûts.

64      Il ressort des pièces du dossier, que la Commission a pris en compte les coûts admissibles, tels que mentionnés à l’article 19 des conditions générales.

65      Ensuite, par décision du 31 juillet 2001, la Commission a décidé de compenser partiellement la dette de la défenderesse à l’égard de la Communauté par une dette de la Communauté à l’égard de la défenderesse d’un montant de 62 601,93 euros pour des travaux effectués par cette dernière dans le cadre du contrat SE-203-90. Par conséquent, la Commission paraît fondée à réclamer le remboursement de la somme de 157 238,07 euros due en principal.

66      Étant donné que les contestations présentées à cet égard par la défenderesse dans la correspondance avec la Commission préalable à l’introduction du présent recours ainsi que les éléments du dossier ne permettent pas de remettre en cause le bien-fondé de cette demande de la Commission, il y a lieu de conclure que la défenderesse semble être débitrice à l’égard de la Communauté d’une somme de 157 238,07 euros et que la Commission paraît fondée à lui demander le remboursement de cette somme en vertu de l’article 8.4 des conditions générales.

 Sur le paiement des intérêts de retard

 Arguments de la Commission

67      La Commission fait valoir qu’à la somme de 157 238,07 euros due en principal vient s’ajouter le montant des intérêts de retard, qui courent depuis le 9 août 1999, date à laquelle la note de débit a été envoyée, jusqu’à la date de remboursement effectif de l’ensemble des sommes dues. Elle soutient que les intérêts de retard doivent être calculés selon le taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à ses opérations de refinancement correspondant au mois de septembre 1999, soit 2,50 % (JO C 250, du 2.9.1999, p. 1), majoré de 2 points, conformément aux dispositions de l’article 8.4 des conditions générales, qui prévoient un taux global de 4,50 %. À la date du 1er juin 2009, le montant des intérêts de retard dus par la défenderesse serait de 81 686,22 euros. Par conséquent, à la date du 1er juin 2009, la dette totale de la défenderesse à l’égard de la Communauté serait de 238 924,29 euros.

68      La Commission ajoute que la défenderesse n’a pas restitué les sommes dues ni effectué de remboursement partiel desdites sommes. Elle souligne que leur montant doit être majoré de 21,73796 euros pour chaque jour de retard supplémentaire à compter du 2 juin 2009.

 Appréciation du Tribunal

69      Dans la note de débit envoyée le 9 août 1999 à la défenderesse, la Commission a précisé que les sommes dues devaient être payées pour le 30 septembre 1999 au plus tard, et que, après cette date, des intérêts de retard seraient dus jusqu’au complet paiement du montant principal au taux « EUR » de septembre 1999, soit 2,50 % (JO 1999, C 250, p. 1), majoré d’un point et demi.

70      Il convient toutefois de constater que l’article 8.4 des conditions générales prévoit, en cas de résiliation du contrat à l’initiative de la Commission pour inexécution du contrat [article 8.2, sous d), desdites conditions générales], la possibilité de majorer les sommes dues par des intérêts de retard calculés selon le taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à ses opérations de refinancement correspondant au mois de septembre 1999, majoré de 2 points à partir de la date de réception des sommes avancées, ce qui donnerait un taux applicable de 4,50 %.

71      S’agissant des intérêts demandés par la Commission, il ressort du dossier que ceux-ci ont été calculés par la Commission, d’une part, pour la période allant du 10 août 1999 au 13 juillet 2001, au taux de 4,50 % sur la somme de 219 840 euros et, d’autre part, pour la période du 14 juillet 2001 au 1er juin 2009, au même taux sur la somme de 176 318,98 euros (à savoir le montant de 157 238,07 euros, correspondant au montant des sommes dues en principal après compensation majoré des intérêts de retard). La Commission demande ainsi la condamnation de la défenderesse à lui payer un montant de 81 686,22 euros correspondant aux intérêts de retard dus à la date du 1er juin 2009 et un montant de 21,73796 euros par jour correspondant aux intérêts de retard dus à partir du 2 juin 2009 et jusqu’au remboursement intégral des sommes due. Ce montant journalier correspond à celui des intérêts dus par jour sur la somme de 176 318,98 euros au taux de 4,50 % par an.

72      Il y a lieu de constater que les calculs effectués par la Commission paraissent fondés.

73      Interrogée par le Tribunal, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure, quant à la question de savoir si elle pouvait se voir reconnaître des intérêts de retard au taux prévu par le contrat alors même qu’elle avait indiqué un taux inférieur dans sa note de débit, la Commission a répondu que le taux applicable en l’espèce était le taux d’intérêts prévu par le contrat.

74      Dès lors que la Commission paraît fondée à demander à la défenderesse le remboursement d’une somme de 157 238,07 euros due en principal sur le fondement de l’article 8.4 des conditions générales (voir point 66 ci-dessus), elle paraît fondée à demander à la défenderesse de lui payer des intérêts de retard sur cette somme. En effet, les intérêts n’ont qu’un caractère accessoire par rapport à la somme due en principal, laquelle résulte en l’espèce de l’application de l’article 8.4 des conditions générales (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 12 septembre 2007, Commission/Trends, T‑448/04, non publié au Recueil, point 186). Par conséquent, la Commission paraît être en droit de demander le paiement des intérêts de retard prévus par cette disposition à compter de la date du versement de l’avance.

75      Par ailleurs, il y a lieu de relever que la Commission ne demande pas le paiement d’intérêts de retard à partir de la date de réception de la somme avancée, mais seulement à partir de la date à laquelle la défenderesse a été mise en demeure de lui rembourser la somme due en principal, à savoir le 9 août 1999. Il y a donc lieu de faire droit aux conclusions de la Commission à cet égard.

 Sur les dépens

76      En vertu de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La défenderesse ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions en ce sens de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Edificios Inteco, SL est condamnée à rembourser à la Commission européenne la somme de 157 238,07 euros, majorée de la somme de 81 686,22 euros correspondant aux intérêts dus à la date du 1er juin 2009.

2)      Edificios Inteco est condamnée à rembourser à la Commission la somme de 21,73796 euros par jour de retard supplémentaire à compter du 2 juin 2009 et jusqu’à complet paiement de la dette.

3)      Edificios Inteco est condamnée aux dépens.

Czúcz

Labucka

Van der Woude

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 mars 2011.

Signatures


* Langue de procédure : l’espagnol.