Language of document : ECLI:EU:T:2012:294

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

13 juin 2012 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale CIRCON – Marque communautaire verbale antérieure CIRCULON – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Similitude des signes – Caractère distinctif élevé – Renommée – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Procédure devant la chambre de recours – Droits de la défense – Articles 75 et 76 du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑542/10,

XXXLutz Marken GmbH, établie à Wels (Autriche), représentée par MH. Pannen, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté initialement par Mme R. Manea, puis par Mme K. Klüpfel, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, intervenant devant le Tribunal, étant

Meyer Manufacturing Co. Ltd, établie à Kowloon (Hong‑Kong), représentée par MM. Fiedler, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 3 septembre 2010 (affaire R 40/2010‑1), relative à une procédure d’opposition entre Meyer Manufacturing Co. Ltd et XXXLutz Marken GmbH,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. O. Czúcz, président, Mme I. Labucka et M. D. Gratsias (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 22 novembre 2010,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 15 mars 2011,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 28 février 2011,

vu la question écrite et la demande de production de documents du Tribunal adressées, respectivement, à l’OHMI et à la requérante le 11 octobre 2011,

vu les documents et les observations déposées par l’OHMI et la requérante au greffe du Tribunal, respectivement, le 24 et le 17 octobre 2011,

vu la question écrite du Tribunal adressée à l’OHMI et à la partie intervenante le 24 janvier 2012,

vu les observations déposées par l’OHMI et l’intervenante au greffe du Tribunal, respectivement, le 6 et le 9 février 2012,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 11 février 2005, la requérante, XXXLutz Marken GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal CIRCON.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relevaient des classes 6, 7, 8, 9, 11, 16, 18, 19, 20, 21, 24, 25, 26, 27, 28 et 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 38/2005, du 19 septembre 2005.

5        Le 19 décembre 2005, l’intervenante, Meyer Manufacturing Co. Ltd, a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009).

6        L’opposition était fondée sur la marque verbale communautaire CIRCULON, enregistrée le 29 octobre 1998 sous le numéro 202176, et le signe CIRCULON utilisé dans la vie des affaires au Royaume-Uni, notamment, pour les produits relevant de la classe 21 et correspondant à la description suivante : « Faïence de cuisson, poêles à lait, poêles à sauce, poêles à frire, poêles à sauté couvertes, poêles, cocottes, pots à bouillon, woks et grils chinois ».

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), paragraphe 4, et paragraphe 5, du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), paragraphe 4, et paragraphe 5, du règlement n° 207/2009].

8        Le 24 avril 2006, la demande d’enregistrement a été restreinte à certains produits relevant des classes 7, 11 et 21, dont, notamment, ceux qui correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        Classe 7 : « Appareils électroménagers et/ou de cuisine et ustensiles de cuisine petits et grands de tous types, compris dans la classe 7 » ;

–        Classe 11 : « Appareils de cuisson » ;

–        Classe 21 : « Ustensiles et récipients pour le ménage ou la cuisine (ni en métaux précieux, ni en plaqué) ; verrerie, porcelaine et faïence ».

9        Le 5 mai 2006, l’intervenante a confirmé qu’elle maintenait l’opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits mentionnés au point 8 ci-dessus.

10      Dans ses observations sur l’opposition du 18 avril 2007, adressées à l’OHMI, la requérante a présenté une demande de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure pour les produits invoqués à l’appui de l’opposition, au sens de l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 40/94 [devenu article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009].

11      Le 27 octobre 2009, la division d’opposition a considéré que l’intervenante avait prouvé l’usage de la marque antérieure pour les produits mentionnés au point 6 ci-dessus et a accueilli l’opposition, sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009], pour les produits mentionnés au point 8 ci-dessus.

12      Elle a considéré, à cet égard, que les marques en conflit étaient similaires et que les produits, visés, respectivement aux points 6 et 8 ci‑dessus étaient identiques ou similaires, de sorte qu’il existe un risque de confusion entre ces marques au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. La division d’opposition a rejeté l’opposition pour le surplus.

13      Le 23 décembre 2009, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

14      Par décision du 3 septembre 2010 (ci-après la « décision attaquée »), notifiée le 22 septembre 2010, la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours et confirmé la décision de la division d’opposition.

15      La chambre de recours a constaté que les signes en conflit étaient similaires sur les plans visuel et phonétique et qu’ils couvraient des produits similaires. Elle a également estimé que la marque antérieure disposait d’une renommée au Royaume‑Uni pour la faïence de cuisson. En tenant compte de ces facteurs, elle a ainsi considéré qu’il existait un risque de confusion entre les signes en conflit au moins au Royaume‑Uni.

 Conclusions des parties

16      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

17      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

18      La requérante invoque un moyen unique, dans le cadre duquel elle avance différents griefs, par lesquels, d’une part, elle conteste, quant au fond, l’appréciation de la chambre de recours relative à l’existence d’un risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, entre les signes en conflit et, d’autre part, elle soulève plusieurs irrégularités procédurales, prétendument commises par la chambre de recours lors des différents stades de cette appréciation.

 Observations liminaires

19      Dans le cadre de l’exposé des différentes irrégularités procédurales qu’elle reproche à la chambre de recours, la requérante fait référence, à plusieurs reprises, à « l’article 76, paragraphe 2, deuxième phrase, du règlement n° 40/94 ». Dès lors qu’il s’agit d’une disposition inexistante, l’OHMI fait valoir que les griefs correspondants de la requérante sont irrecevables. Aucun élément de la requête ne permettrait, en outre, de déterminer, de manière certaine, la règle de droit invoquée par la requérante.

20      Cette argumentation ne saurait être retenue. Il est, certes, vrai que ni l’article 76, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 (devenu article 78, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009), ni l’article 76, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, ne comportent une seconde phrase. Il n’en reste pas moins que, dans les parties de sa requête où elle invoque cette disposition inexistante, la requérante reproche expressément à la chambre de recours d’avoir pris en considération des faits non avancés par l’intervenante. Or, une telle prise de considération est effectivement interdite par l’article 76, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement n° 207/2009. Il est, ainsi, évident que la requérante entendait fonder les différents griefs tirés de prétendues irrégularités procédurales qu’elle avance sur cette dernière disposition. Ces griefs sont, par conséquent, recevables.

21      En effet, il n’est pas exigé qu’une partie invoque expressément les dispositions aux termes desquelles il est habilité à intenter son action en justice ou, plus généralement, sur lesquelles elle fonde les griefs qu’elle invoque (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 16 décembre 1963, Acciaierie San Michele e.a./Haute Autorité, 2/63 à 10/63, Rec. p. 661 et 692, et du Tribunal du 17 juin 2003, Seiller/BEI, T‑385/00, RecFP p. I‑A‑161 et II‑801, point 41). Il suffit que l’objet de la demande de cette partie ainsi que les principaux éléments de fait et de droit sur lesquels elle est fondée soient exposés dans la requête avec suffisamment de clarté (voir, en ce sens, arrêt Seiller/BEI, précité, points 40 à 45), ce qui est le cas en l’espèce.

 Sur le fond

22      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

23      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment, de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

24      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

25      Lorsque la protection de la marque antérieure s’étend à l’ensemble de l’Union, il y a lieu de prendre en compte la perception des marques en conflit par le consommateur des produits ou des services en cause sur ce territoire. Toutefois, il convient de rappeler que, pour refuser l’enregistrement d’une marque communautaire, il suffit qu’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 existe dans une partie de l’Union [arrêt du Tribunal du 14 juillet 2011, ratiopharm/OHMI – Nycomed (ZUFAL), T‑222/10, non publié au Recueil, point 17].

26      Par ailleurs, le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important. Ainsi, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance de celles-ci sur le marché, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre. Le caractère distinctif de la marque antérieure, et en particulier sa renommée, doit donc être pris en compte pour apprécier s’il existe un risque de confusion [voir arrêt de la Cour du 17 avril 2008, Ferrero Deutschland/OHMI, C‑108/07 P, non publié au Recueil, points 32 et 33, et la jurisprudence citée, et arrêt du Tribunal du 28 octobre 2010, Farmeco/OHMI – Allergan (BOTUMAX), T‑131/09, non publié au Recueil, point 67].

27      Dans le cadre de l’appréciation globale du risque de confusion, il convient de prendre en compte le consommateur moyen de la catégorie de produits concernée, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie de produits ou de services en cause [voir arrêt du Tribunal du 13 février 2007, Mundipharma/OHMI – Altana Pharma (RESPICUR), T‑256/04, Rec. p. II‑449, point 42, et la jurisprudence citée].

28      C’est au regard des considérations exposées aux points 22 à 27 ci‑dessus qu’il convient, en l’espèce, d’examiner le moyen unique de la requérante.

 Sur le public pertinent

29      S’agissant du public pertinent, il convient de rappeler que la chambre de recours a considéré que les produits visés par les marques en conflit s’adressaient au grand public. Les parties ne contestent pas cette définition du public pertinent que la chambre de recours a retenue. Eu égard à la nature et à la destination desdits produits, il convient de confirmer cette appréciation.

 Sur la comparaison des produits

30      S’agissant des produits concernés, il ressort d’une jurisprudence constante que, pour apprécier la similitude entre des produits, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre ces produits. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire (arrêts de la Cour du 11 mai 2006, Sunrider/OHMI, C‑416/04 P, Rec. p. I‑4237, point 85, et easyHotel, point 24 supra, point 45).

31      En l’espèce, la chambre de recours a procédé, aux points 29 à 32 de la décision attaquée, à une comparaison entre les produits concernés par les deux marques en conflit. Elle a relevé que la requérante ne contestait pas l’existence d’une similitude entre la « verrerie, porcelaine et faïence », relevant de la classe 21, ainsi que les « appareils de cuisson », relevant de la classe 11, visés par la marque demandée et les produits pour lesquels l’usage de la marque antérieure avait été démontré. En ce qui concerne les « appareils électroménagers et/ou de cuisine et ustensiles de cuisine petits et grands de tous types » relevant de la classe 7, également visés par la marque demandée, la chambre de recours a considéré qu’ils présentaient un faible degré de similitude avec les produits visés par la marque antérieure. L’usage des uns compléterait souvent celui des autres. L’intervenante aurait également démontré que certains produits électroniques relevant de la classe 7 couverts par la marque demandée étaient substituables aux produits non électroniques relevant de la classe 21, couverts par la marque antérieure, et que les mêmes entreprises produiraient souvent des ustensiles électroniques et non électroniques.

32      Ces considérations, non contestées par les parties, doivent être approuvées. Il convient, dès lors, de conclure que les produits visés par les marques en conflit sont à tout le moins similaires.

 Sur la comparaison des signes

33      Selon la jurisprudence, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [voir arrêt du Tribunal du 30 septembre 2010, PVS/OHMI – MeDiTA Medizinische Kurierdienst (medidata), T‑270/09, non publié au Recueil, point 32, et la jurisprudence citée]. La perception des marques que le consommateur moyen a des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

34      En l’espèce, la chambre de recours a considéré que les deux signes verbaux en cause, à savoir les signes CIRCON et CIRCULON, présentaient une similitude sur les plans visuel et phonétique et que, sur le plan conceptuel, aucune comparaison n’était possible entre eux.

35      Quant à la requérante, elle conteste les appréciations de la chambre de recours relatives à la similitude des signes en conflit. Elle fait valoir que leur similitude sur les plans visuel et phonétique est faible. Elle ajoute que cette faible similitude est neutralisée par le concept auquel renvoie la marque communautaire antérieure.

–       Sur la similitude visuelle

36      Selon la chambre de recours, il existe une similitude visuelle entre les signes en conflit étant donné que six des huit lettres de la marque antérieure sont « reproduites, dans le même ordre, dans la marque demandée ».

37      En premier lieu, la requérante fait valoir que, contrairement à ce qui est indiqué au point 25 de la décision attaquée, l’intervenante n’avait pas invoqué le fait que la marque communautaire demandée et la marque antérieure avaient en commun six lettres, apparaissant dans le même ordre. Pour étayer son moyen d’opposition tiré, notamment, du risque de confusion, l’intervenante s’était, selon la requérante, bornée à indiquer que les quatre premières lettres et les deux dernières lettres formant la marque demandée étaient les mêmes que les quatre premières lettres et les deux dernières lettres formant la marque antérieure.

38      Il est, certes, vrai que, en vertu de l’article 76, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement n° 207/2009, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, telle que celle en cause en l’espèce, l’examen des faits auquel procède l’OHMI est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties. Cette disposition vise, notamment, la base factuelle des décisions de l’OHMI, à savoir les faits et les preuves sur lesquels celles-ci peuvent être valablement fondées. Ainsi, la chambre de recours, en statuant sur un recours contre une décision mettant fin à une procédure d’opposition, ne saurait fonder sa décision que sur les faits et les preuves présentés par les parties, ainsi que, le cas échéant, sur des faits notoires [voir arrêt du Tribunal du 22 juin 2004, Ruiz-Picasso e.a./OHMI – DaimlerChrysler (PICARO), T‑185/02, Rec. p. II‑1739, points 28 et 29, et la jurisprudence citée].

39      Toutefois, dans la mesure où la similitude entre les signes en conflit constitue une condition essentielle de l’existence d’un risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, ainsi que le souligne la jurisprudence mentionnée au point 24 ci‑dessus, la partie ayant formé une opposition fondée sur cette disposition doit être regardée comme ayant invoqué, à tout le moins implicitement, mais clairement, l’existence d’une telle similitude, laquelle est une question de fait (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 16 juin 2011, Union Investment Privatfonds/UniCredito Italiano et OHMI, C‑317/10 P, non encore publié au Recueil, point 45). Les instances compétentes de l’OHMI sont alors appelées à procéder à une comparaison entre les signes en conflit et elles peuvent, dans ce contexte, relever toute éventuelle similitude ou différence existant entre eux, quand bien même les parties n’y auraient pas fait allusion dans leurs écritures.

40      Il s’ensuit que le grief de la requérante résumé au point 37 ci‑dessus doit être écarté.

41      En second lieu, la requérante fait valoir que, sur le plan visuel, la similitude des signes en conflit est faible. La chambre de recours aurait admis que lesdits signes présentaient une similitude sur le plan visuel et justifié l’existence de celle-ci par le fait que six des huit lettres composant la marque antérieure étaient « reproduites, dans le même ordre, dans la marque demandée ». Or, alors que le signe CIRCON se composerait de six lettres et de deux syllabes, le signe CIRCULON présenterait huit lettres et trois syllabes. Ainsi, la longueur de ces deux signes serait par nature clairement différente, et pareille différence n’échapperait pas à un observateur, même distrait. De plus, les deux lettres différentes, à savoir les lettres « u » et « l », se trouveraient au milieu du signe CIRCULON, où l’observateur les remarquerait immédiatement, et sépareraient nettement les autres lettres des signes en question qui figureraient en tête et en fin de ceux-ci. Selon la requérante, c’est l’impression visuelle globale conférée par les signes en conflit qui est décisive, et cette dernière ne pourrait, contrairement à ce qu’aurait estimé la chambre de recours, être déterminée à partir du nombre de lettres « communes » aux deux signes. Étant donné que ces derniers ne présenteraient aucune particularité sur le plan visuel et qu’il manquerait notamment un élément dominant, la longueur des signes serait le seul critère permettant au public de les différencier sur le plan visuel. Les signes en cause présenteraient ainsi des différences notables.

42      À cet égard, il y a lieu de relever, à l’instar de la chambre de recours, que, dans chacun des signes en conflit, apparaissent les lettres « c » (deux occurrences), « i », « r », « o » et « n », placées dans le même ordre. La seule différence sur le plan visuel entre lesdits signes est constituée par la présence de deux lettres supplémentaires, à savoir les lettres « u » et « l », dans la marque antérieure. Bien que ces deux lettres ne figurent que dans la marque antérieure et ne se retrouvent pas dans la marque demandée, il n’en résulte pas que leur présence dans la marque antérieure est suffisante pour exclure toute similitude entre celle-ci et la marque demandée.

43      En effet, le consommateur attache normalement plus d’importance à la partie initiale des mots et, par conséquent, la présence dans les signes en conflit de la même racine, à savoir la racine « circ », crée une similitude visuelle, qui est, de plus, renforcée par la présence de la terminaison « on » à la fin desdits signes [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia, Líneas Aéras de España (MUNDICOR), T‑183/02 et T‑184/02, Rec. p. II‑965, point 81, et du 7 septembre 2006, Meric/OHMI – Arbora & Ausonia (PAM-PIM’S BABY‑PROP), T‑133/05, Rec. p. II‑2737, point 51]. Il s’ensuit que l’argument de la requérante selon lequel la présence des lettres « u » et « l » au milieu de la marque demandée était suffisante pour écarter toute similitude entre celle-ci et la marque antérieure ne saurait prospérer.

44      En outre, l’argument de la requérante fondé sur la longueur différente des signes en conflit n’est pas suffisant pour écarter l’existence d’une similitude visuelle entre eux, laquelle, contrairement à ce que la requérante fait valoir, ne saurait être qualifiée de faible.

45      Dans ces conditions, c’est à juste titre que la chambre de recours a constaté l’existence d’une similitude visuelle entre les signes en conflit.

–       Sur la similitude phonétique

46      Selon la chambre de recours, il existe une similitude phonétique entre les signes en conflit, étant donné que les première et dernière syllabes desdits signes sont identiques. Leur deuxième syllabe commencerait également par la même consonne, à savoir la consonne « c ».

47      La requérante soutient que la constatation selon laquelle les signes en conflit présentent des syllabes identiques en leur début et en leur fin est inexacte. Selon elle, seule la première syllabe desdits signes, à savoir la syllabe « cir », est identique. Dès lors, ces signes ne présenteraient, sur le plan phonétique, qu’une faible similitude. L’impression d’ensemble produite par les signes en cause serait, sur le plan phonétique, influencée principalement par leur longueur et le nombre de syllabes qu’ils comportent.

48      Or, il y a lieu de rappeler que toutes les lettres constituant le signe CIRCON, sont incluses dans le signe CIRCULON. De plus, ces lettres sont placées dans le même ordre dans lesdits signes, dont les quatre premières lettres, à savoir les lettres « c », « i », « r » et « c », ainsi que les deux dernières lettres, à savoir les lettres « o » et « n » sont identiques.

49      Certes, la structure syllabique des signes en conflit est différente, la marque antérieure comportant trois syllabes, à savoir les syllabes « cir », « cu » et « lon », et la marque demandée n’en comportant que deux, à savoir les syllabes « cir » et « con ». Toutefois, la première syllabe des signes en conflit est identique. À cet égard, il y a lieu de rappeler, ainsi qu’il a été mentionné au point 43 ci‑dessus, que normalement l’attention du consommateur se dirige surtout sur le début du mot. Par ailleurs, les lettres qui forment la dernière syllabe de la marque demandée, à savoir les lettres « c », « o » et « n », sont toutes présentes dans la marque antérieure, et plus précisément dans les deux dernières syllabes de celle-ci. Enfin, la dernière syllabe de la marque demandée et la dernière syllabe de la marque antérieure sont toutes deux composées de la voyelle « o » et de la consonne finale « n ». Cela induit lors de leur prononciation des sonorités similaires.

50      Au regard de ces considérations, contrairement à ce que fait valoir la requérante, l’existence d’une syllabe additionnelle dans la marque antérieure ne permet pas d’exclure toute similitude phonétique entre les signes en conflit, une telle similitude devant être appréciée sur la base de l’impression d’ensemble produite par lesdits signes lors de leur prononciation complète.

51      C’est, donc, à juste titre que la chambre de recours a considéré que, sur le plan phonétique, les signes en conflit présentaient un certain degré de similitude.

–       Sur la similitude conceptuelle

52      Dans la décision attaquée, la chambre de recours a notamment relevé qu’aucune des deux marques en cause ne pouvait être perçue comme ayant une signification conceptuelle. D’une part, elle a estimé que la marque antérieure ne pouvait être perçue comme une référence au terme anglais « circular » (circulaire), étant donné que les consommateurs étaient essentiellement intéressés par les aspects techniques et fonctionnels de la faïence de cuisson et des appareils de cuisine et non par leur forme « circulaire ». D’autre part, elle a considéré que le consommateur moyen ne pouvait déceler, dans la marque demandée, une référence au terme « zircon », qui désigne soit un minéral, soit une pierre utilisée en joaillerie, dès lors que les marchés de la joaillerie et des produits de cuisine étaient nettement distincts. Selon elle, les consommateurs moyens ne disposaient pas des connaissances techniques nécessaires et ne s’enquerraient donc pas des propriétés abrasives et isolantes de l’élément « zirconium ».

53      La requérante fait valoir que cette appréciation est erronée.

54      Selon la requérante, le signe CIRCULON est une déformation du terme « circleon », qui est composé du mot anglais « circle » et du suffixe « on ». Il correspondrait également aux premières syllabes du terme anglais « circular », auxquelles ledit suffixe aurait été ajouté. Ainsi, il signifierait « doté de cercles » ou « avec des cercles », ce qui constituerait une allusion aux cercles concentriques figurant au fond de toutes les poêles et casseroles de marque CIRCULON. Elle soutient que ces cercles concentriques sont un élément caractéristique non seulement de la forme des produits concernés, à laquelle l’intervenante fait référence dans toutes ses publicités de manière appuyée, mais également d’une technologie anti-adhésive spécifique, dénommée « Hi‑Low Food Release System », qui est protégée par un brevet et constituerait un élément de distinction par rapport aux produits des concurrents. Quant au signe CIRCON, il fait, selon la requérante, manifestement référence au terme « zircon », qui désigne un minéral. En outre, à la différence du signe CIRCULON, il n’évoquerait pas des cercles ou des ronds. Dès lors, les différences dans la signification des signes en conflit seraient de nature à neutraliser l’éventuelle similitude entre ceux-ci sur les plans visuel et phonétique.

55      Il y a lieu de relever, à cet égard, que, selon la jurisprudence, si des différences sur le plan conceptuel entre les signes en conflit peuvent être de nature à neutraliser dans une large mesure les similitudes entre lesdits signes sur les plans visuel et phonétique, une telle neutralisation requiert toutefois qu’au moins un de ces signes ait, dans la perspective du public pertinent, une signification claire et déterminée, de sorte que ce public est susceptible de la saisir immédiatement, et que l’autre signe n’ait pas une telle signification ou qu’il ait une signification entièrement différente [arrêt du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips-Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, Rec. p. II‑4335, point 54].

56      Or, force est de constater que tel n’est pas le cas en l’espèce.

57      D’une part, le signe CIRCULON, tout en ayant une certaine force évocatrice, ne saurait être regardée comme ayant une signification claire et déterminée dans la perspective du public pertinent. Eu égard à la présence du suffixe « on », il n’est pas certain que le consommateur anglophone considère le signe CIRCULON comme une allusion aux termes « circle » ou « circular ». Cela est d’autant moins le cas des consommateurs non anglophones.

58      D’autre part, le signe CIRCON étant également dépourvu de signification, l’argumentation de la requérante concernant le lien entre le signe CIRCON et le terme « zircon » doit être écartée. À cet égard, il convient en effet de relever que, pour démontrer qu’un tel lien se fait dans l’esprit du public ciblé, la requérante n’a avancé devant l’OHMI aucun élément de preuve pour étayer ses affirmations. De plus, comme l’a relevé à juste titre la chambre de recours, les marchés de la joaillerie et des produits de cuisine étant distincts, le consommateur moyen ne peut pas déceler de lien entre le signe CIRCON et le terme « zircon », dans son acception en matière de joaillerie.

59      Il s’ensuit que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré qu’une comparaison entre les signes en conflit n’était pas possible sur le plan conceptuel et que, en se fondant sur les similitudes entre lesdits signes sur les plans visuel et phonétique, elle a conclu que ces signes étaient similaires.

 Sur l’appréciation globale du risque de confusion

60      Ainsi qu’il ressort du point 34 de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré qu’il existait un risque de confusion entre les deux marques en conflit en prenant en compte, non seulement la similitude des signes et celle des produits, mais également le caractère distinctif élevé de la marque antérieure en raison de sa renommée au Royaume‑Uni pour la faïence de cuisson.

61      La requérante invoque deux erreurs procédurales qui auraient entaché la constatation, par la chambre de recours, de l’existence d’une renommée de la marque antérieure au Royaume‑Uni. D’une part, elle fait valoir que la chambre de recours a, en violation de l’article 76, paragraphe 1, deuxième phrase, du règlement n° 207/2009, procédé à un examen d’office de certains faits. D’autre part, elle soutient que la chambre de recours a fondé sa décision sur des preuves sur lesquelles elle n’avait pas pu prendre position.

–       Sur le prétendu examen d’office des faits par la chambre de recours

62      Ainsi qu’il a été relevé au point 38 ci-dessus, en vertu de l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, dans une procédure concernant des motifs relatifs de refus d’enregistrement, telle que celle en cause en l’espèce, l’examen des faits auquel procède l’OHMI est limité aux moyens invoqués et aux demandes présentées par les parties.

63      À l’appui de son grief tiré de la violation de l’article 76, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, la requérante invoque deux arguments.

64      D’une part, la requérante soutient que le caractère distinctif élevé d’une marque communautaire antérieure est un fait qu’il incombait à l’intervenante de faire valoir et, le cas échéant, de démontrer, dans le cadre de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. Selon elle, la chambre de recours ne pouvait, par conséquent, examiner ce point que si l’intervenante s’était prévalue du caractère distinctif élevé de sa marque, ce qui n’a pas été le cas en l’espèce. En outre, cette règle aurait dû s’appliquer alors même que l’intervenante avait revendiqué, au bénéfice de la marque CIRCULON, la protection de la renommée en vertu de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009.

65      Cet argument manque en fait et doit être rejeté. Il ressort, en effet, du dossier de la procédure devant l’OHMI, communiqué au Tribunal conformément à l’article 133, paragraphe 3, du règlement de procédure, que l’intervenante a indiqué, dans son mémoire d’opposition, au soutien de son argumentation relative tant à l’article 8, paragraphe 5, du règlement n° 207/2009, qu’à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du même règlement, que la marque CIRCULON avait, pendant de nombreuses années, fait l’objet d’un usage important et étendu dans l’Union européenne et qu’elle avait de ce fait acquis une renommée considérable en relation avec les articles de cuisson. Elle a notamment relevé, dans le cadre de son argumentation ayant trait à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, que, « [c]ompte tenu de l’usage répandu, long et important de la marque à l’intérieur de l’Union […] par l’opposante, l’usage par la partie requérante de la marque demandée en relation avec les produits à l’encontre desquels l’opposition [était] dirigée [serait] étroitement associé avec les activités de l’opposante, ce qui [contribuerait] à accroître le risque de confusion entre les marques » et que « [d]ès lors, compte tenu des similitudes visuelles et phonétiques existant entre les marques et l’identité ou la similitude entre les produits couverts, et eu égard à la renommée importante de l’opposante sous sa marque antérieure, il [fallait] considérer qu’il [existait] un risque important de confusion dans l’esprit du public pertinent ».

66      D’autre part, la requérante soutient que la chambre de recours a jugé l’opposition fondée, au motif, notamment, que la marque antérieure disposait d’une renommée au Royaume‑Uni et que les signes en conflit ainsi que les produits concernés étaient similaires. Or, l’intervenante n’aurait pas fondé son opposition sur une marque antérieure jouissant d’une renommée au Royaume‑Uni, mais sur une marque renommée dans l’Union.

67      À cet égard il suffit de relever qu’une renommée dans l’ensemble de l’Union comprend nécessairement l’invocation d’une renommée dans un seul des États membres de celle-ci (arrêt ZUFAL, point 25 supra, point 45). Il s’ensuit que, contrairement à ce que fait valoir la requérante, la chambre de recours n’a pas pris en considération une renommée de la marque antérieure non invoquée par l’intervenante.

–       Sur la violation du droit d’être entendu

68      La requérante fait valoir que, pour constater la prétendue renommée de la marque antérieure, la chambre de recours s’est fondée, notamment, sur deux éléments de preuve, à savoir, d’une part, sur la publication spéciale du magazine Progressive Housewares intitulée « The 2004 Training Source Book » (ci‑après la « brochure de 2004 »), et, d’autre part, sur des copies de factures parvenues à l’OHMI le 7 septembre 2006. Or, la brochure de 2004, à laquelle la décision de la division d’opposition ne ferait pas référence, n’aurait pas été communiquée au représentant de la requérante avec les autres documents que l’intervenante aurait déposés, le 7 septembre 2006, afin de justifier de ses droits antérieurs. Par ailleurs, selon la requérante, en se fondant sur les seules copies de factures parvenues à l’OHMI le 7 septembre 2006, la chambre de recours n’aurait pas pu constater que les chiffres des ventes cités dans la déclaration sur l’honneur datée du 24 août 2006, établie par le conseil de l’intervenante, étaient dignes de foi. En effet, ces copies de factures seraient, dans leur quasi-totalité, illisibles. Ainsi, dans bien des cas, il serait impossible de lire l’adresse de facturation (Invoice Address), l’adresse du destinataire (Despatch Address), le numéro d’article (Invoice Code) ou bien encore la description de l’article (Description). En outre, nombre de factures, dont la rubrique « Description de l’article » était lisible, visaient, selon la requérante, d’autres marques de l’intervenante.

69      Il ressort de cette argumentation de la requérante, telle que présentée aux points 35, 36, 53 et 54 de la requête, qu’elle invoque un grief tiré de la violation de l’article 75, seconde phrase, du règlement n° 207/2009, aux termes duquel, les décisions de l’OHMI ne peuvent être fondées que sur des motifs sur lesquels les parties ont pu prendre position. Plus spécifiquement, la requérante prétend qu’elle n’a pas pu apprécié la force probante de la brochure de 2004 et des factures mentionnées au point précèdent (voir également le point 83 ci‑dessous), alors que la chambre de recours s’est fondée sur ces éléments de preuve dans le cadre de son évaluation de la renommée de la marque antérieure.

70      L’article 75, seconde phrase, du règlement n° 207/2009 constitue une application spécifique du principe général de protection des droits de la défense, consacré, par ailleurs, à l’article 41, paragraphe 2, sous a), de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (JO 2010 C 83, p. 389), selon lequel les personnes dont les intérêts sont affectées par des décisions des autorités publiques doivent être mis en mesure de faire connaître utilement leur point de vue. Le droit à être entendu s’étend à tous les éléments de fait ou de droit qui constituent le fondement de l’acte décisionnel [voir arrêt du Tribunal du 7 février 2007, Kustom Musical Amplification/OHMI (Forme d’une guitare), T‑317/05, Rec. p. II‑427, points 24, 26 et 27, et la jurisprudence citée]. Dès lors, si une décision d’une chambre de recours repose sur des éléments de preuve produits par une partie à la procédure devant l’OHMI dont il n’est pas établi qu’ils ont été communiqués entièrement et sans altération à l’autre partie, cette décision méconnaît l’article 75, seconde phrase, du règlement n° 207/2009.

71      En outre, ainsi que le prévoit l’article 43, paragraphe 1, du règlement no 40/94 (devenu article 42, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009), au cours de l’examen de l’opposition, l’OHMI « invite les parties, aussi souvent que cela est nécessaire, à présenter, dans un délai qu’il leur impartit, des observations sur les communications émanant des autres parties ou de lui-même ». La règle 16 bis, du règlement (CE) n° 2868/95 de la Commission, du 13 décembre 1995, portant modalités d’application du règlement n° 40/94 (JO L 303, p. 1), tel que modifié, précise, par ailleurs, que « [l’] autre partie est informée de l’opposition par communication de tout acte d’opposition, de tout document produit par l’opposant ainsi que de toute communication adressée à l’une des parties par l’[OHMI] ».

72      Par suite, c’est à l’OHMI qu’il incombe l’obligation de mettre les parties à une procédure pendante devant ses instances en mesure de faire valoir leur point de vue sur tous les éléments qui constituent le fondement de leurs décisions. S’il est, certes, vrai que les parties doivent faire preuve de bonne foi et de signaler en temps utile à l’OHMI toute omission ou erreur qu’elles ont pu déceler dans les envois que leur a adressés l’OHMI, il n’en demeure pas moins que c’est à l’OHMI qu’il incombe de prouver qu’il satisfait à ses obligations découlant des dispositions susvisées. À défaut d’une telle preuve, il convient de conclure que ces obligations n’ont pas été satisfaites.

73      En l’espèce, au point 24 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé ce qui suit : « [L]es documents produits par l’[intervenante] devant la division d’opposition, le 7 septembre 2006, indiquent l’existence de la renommée de la marque antérieure pour la faïence de cuisson à la date de dépôt de la marque demandée. Les nombreuses factures présentées montrent que l’[intervenante] a fourni certains des plus grands magasins et des principaux magasins de détail au Royaume-Uni […] en faïence de cuisson, en quantités suffisamment importantes au cours des cinq années qui ont précédé la date de publication de la marque demandée. La faïence de cuisson ‘ CIRCULON ’ identifiée dans les brochures peut être clairement identifiée dans les factures. En outre, la publication spéciale [de la brochure de 2004], déclare que [Circulon de l’intervenante est la marque de faïence de cuisson anodisée dure la plus vendue]. Cette publication fait également référence à l’approbation donnée par des chefs célèbres […] à la faïence de cuisson de l’[intervenante]. La page 33 de cette publication déclare également que [l’intervenante] a développé la première faïence de cuisson anodisée dure et antiadhésive en 1986. Les documents, considérés dans leur ensemble, corroborent dès lors les chiffres concernant le chiffre d’affaires réalisé au Royaume‑Uni au cours des années 2001 à 2005 (par exemple, 2 749 789 GBP en 2001 et 3 051 197 GBP en 2005) spécifiés dans les déclarations de témoin ».

74      Ainsi, pour parvenir à la conclusion, rappelée au point 60 ci-dessus, quant à la renommée de la marque communautaire au Royaume Uni pour la faïence de cuisson, la chambre de recours s’est fondée sur deux éléments de preuve, à savoir la brochure de 2004, d’une part, et les factures produites par l’intervenante le 7 septembre 2006, d’autre part. Ces éléments de preuve corroborent, selon elle, le chiffre d’affaires spécifié dans les déclarations de témoin. Ainsi qu’il ressort implicitement, mais clairement de la décision attaquée, la chambre de recours a considéré, à juste titre [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 13 mai 2009, Schuhpark Fascies/OHMI – Leder & Schuh (jello SCHUHPARK), T‑183/08, non publié au Recueil, points 38 et 39], que ces déclarations de témoin, établies par une seule et même personne ayant notamment la qualité de conseil juridique d’une entreprise associée à l’intervenante, ne pouvaient prouver, à elles seules, la renommée de la marque antérieure au Royaume‑Uni. Par conséquent, lesdits éléments de preuve constituent le soutien nécessaire de son raisonnement.

75      Il résulte du dossier de la procédure devant l’OHMI que les éléments de preuve soumis par l’intervenante aux instances de l’OHMI comprenaient, notamment, la brochure de 2004 et 24 factures produites par l’intervenante le 7 septembre 2006. Les copies de ces factures, telles qu’elles figurent dans le dossier de l’OHMI, sont parfaitement lisibles. Le dossier de l’OHMI comporte aussi une lettre de l’OHMI du 6 février 2007 par laquelle celui-ci a transmis à la requérante les pièces justificatives produites par l’intervenante le 7 septembre 2006. Cette lettre mentionne que lui sont annexés « une lettre de l’opposante du [7 septembre 2006 de] 110 pages ainsi que des copies de brochures et de catalogues ». Le texte de cette lettre ne contient aucune précision supplémentaire qui permettrait d’identifier la nature des brochures et des catalogues communiqués.

76      Il est constant que la requérante a reçu la lettre de l’OHMI du 6 février 2007, puisqu’elle en a accusé réception dans le mémoire d’observations du 18 avril 2007, qu’elle a adressé à l’OHMI. Néanmoins, en l’absence d’une liste détaillée des documents annexés à ladite lettre, il est impossible de déterminer si, parmi les documents communiqués à la requérante, figurait la brochure de 2004.

77      C’est ainsi que, dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure, le Tribunal a invité, d’une part, la requérante à lui communiquer l’original de la lettre de l’OHMI du 6 février 2007, qui lui avait été adressée, avec tous les documents y annexés, et d’autre part, l’OHMI à lui indiquer, par le moyen de toute preuve documentaire, s’il avait communiqué à la requérante, soit par sa lettre du 6 février 2007, soit par une lettre ultérieure, la brochure de 2004. La requérante a envoyé au Tribunal l’ensemble des documents demandés, parmi lesquels ne figurait pas la brochure de 2004.

78      Par ailleurs, par lettre du 24 octobre 2011, l’OHMI a, en réponse à la question posée par le Tribunal, relevé que, conformément à sa pratique, il ne rédige pas de listes des documents transmis aux intéressés. Il a ajouté que les documents en cause ayant été transmis par envoi postal et non par télécopieur, il ne disposait d’aucun document pouvant démontrer que la brochure de 2004 avait effectivement été communiquée à la requérante. L’OHMI admet lui‑même qu’il ne peut pas exclure que le membre de son personnel chargé d’effectuer cet envoi ait omis de copier la brochure de 2004 et de la transmettre à la requérante.

79      Une telle omission apparaît d’autant plus vraisemblable que la brochure de 2004 prend la forme d’un livre de poche et est relativement difficile à photocopier.

80      Il convient de relever, en outre, que, la brochure de 2004 n’étant pas expressément évoquée dans la lettre de couverture de l’envoi de l’OHMI à la requérante, cette dernière ne pouvait pas constater et signaler à l’OHMI l’omission dudit envoi. En outre, les preuves effectivement communiquées par l’OHMI à la requérante par cet envoi postal consistaient en la déclaration sur l’honneur datée du 24 août 2006, établie par le conseil de l’intervenante et l’ensemble des pièces annexées à cette déclaration. Ayant reçu ladite déclaration et toutes ses annexes, la requérante n’avait aucune raison de soupçonner que cet envoi n’était pas complet.

81      Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précédent, il convient de conclure que l’OHMI n’a pas démontré à suffisance de droit qu’il a respecté son obligation, découlant de l’article 75, seconde phrase, du règlement n° 207/2009, de donner à la requérante l’occasion de présenter ses observations sur la brochure de 2004.

82      Cette conclusion n’est pas remise en cause par la réponse de l’OHMI du 6 février 2012 à la question écrite du Tribunal du 24 janvier 2012, par laquelle celui‑ci lui a demandé de compléter son argumentation concernant le grief de la requérante tiré de la violation de la disposition de l’article 75, seconde phrase, du règlement n° 207/2009. En effet, l’OHMI fait certes valoir, dans cette réponse, que la brochure de 2004 ne peut qu’avoir été envoyée à la requérante dès lors que, d’une part, il n’y a plus qu’un seul exemplaire de cette brochure dans le dossier, et, d’autre part, l’intervenante était obligée en vertu de la règle 79 bis, du règlement n° 2868/95, de transmettre deux exemplaires de ladite brochure. Toutefois, une telle allégation, qui n’est corroborée par aucun autre élément de fait, ne suffit pas, à elle seule, à démontrer que la brochure de 2004 a été effectivement envoyée à la requérante et que cette dernière l’a reçue.

83      S’agissant des factures produites par l’intervenante, il y a lieu de relever que celles-ci avaient été produites par l’intervenante le 7 septembre 2006, en réponse à l’invitation de la division d’opposition de présenter des faits et des preuves à l’appui de l’opposition. Dans ses observations en réponse, déposées le 18 avril 2007, la requérante a relevé que la plupart des copies desdites factures qu’elle avait reçues étaient illisibles et a présenté une demande de preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure (voir point 10 ci‑dessus). Dans ses observations en réponse, déposées le 10 décembre 2007, l’intervenante a relevé que les copies de factures qu’elle avait produites le 7 septembre 2006 étaient parfaitement lisibles et a également joint d’autres copies, dont deux seulement concernaient les mêmes factures que celles produites le 7 septembre 2006. Dans sa décision, la division d’opposition a mentionné l’affirmation de la requérante selon laquelle les copies de factures produites le 7 septembre 2006 étaient illisibles, sans y répondre. Elle a, en outre, considéré, en tenant compte, notamment, de l’ensemble des factures produites par l’intervenante, tant le 7 septembre 2006 que le 10 décembre 2007, que l’usage sérieux de la marque antérieure avait été prouvé par l’intervenante pour les produits mentionnés au point 6 ci‑dessus. En revanche, elle ne s’est pas prononcée sur une éventuelle renommée de ladite marque.

84      La chambre de recours, quant à elle, n’a évoqué dans la décision attaquée que les seules factures produites par l’intervenante le 7 septembre 2006 et elle a fondé sa conclusion sur l’existence d’une renommée de la marque antérieure au Royaume‑Uni pour la faïence de cuisson notamment sur ces factures.

85      Il y a lieu de relever que les copies de factures produites par l’intervenante le 7 septembre 2006 et communiquées par l’OHMI à la requérante ont été produites par cette dernière en réponse à la demande du Tribunal mentionnée au point 77 ci‑dessus. Il peut être constaté à la suite de leur examen qu’elles sont, effectivement, en grande partie, illisibles, en ce qui concerne l’adresse de facturation (Invoice Address), l’adresse du destinataire (Despatch Address), le numéro d’article (Invoice Code) ou bien encore la description de l’article (Description). Cette constatation ne peut pas être remise en cause par la seule affirmation de l’intervenante, dans ses observations du 9 février 2012, selon laquelle le contenu des factures est lisible.

86      Au regard des allégations de la requérante devant la division d’opposition, reproduites dans la décision de cette dernière sans, toutefois, être examinées ou expressément rejetées, la chambre de recours, pour respecter ses obligations découlant de l’article 75, seconde phrase, du règlement no 207/2009, devait s’assurer de la lisibilité des copies, adressées à la requérante, des factures produites par l’intervenante le 7 septembre 2006, avant de se fonder sur ces factures (et non sur celles produites le 10 décembre 2007, dont la lisibilité n’avait pas été contestée par la requérante), pour constater la renommée de la marque antérieure au Royaume‑Uni.

87      La chambre de recours ne saurait se contenter, à cet égard, au seul examen des copies de ces factures contenues dans le dossier de la procédure, qui étaient parfaitement lisibles ainsi que le Tribunal a pu le constater par l’examen de ce dossier. En effet, il ne saurait logiquement être exclu que les copies reçues par la requérante aient été d’une qualité inférieure, mettant la requérante dans l’impossibilité de présenter ses observations afférentes auxdites factures. Dès lors qu’elle a constaté que les factures dont elle disposait étaient lisibles, la chambre de recours aurait dû communiquer cette information à la requérante et envoyer à cette dernière, en cas de demande éventuelle, de nouvelles copies lisibles des mêmes factures.

88      En tout état de cause, l’OHMI n’a pas prouvé que des copies lisibles des factures originales avaient été communiquées à la requérante lors de la procédure administrative. Il ne saurait, d’ailleurs, apporter une telle preuve en se bornant à relever que, dans son dossier, les copies des factures en cause étaient parfaitement lisibles.

89      Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que la décision attaquée repose sur des éléments de preuve, à savoir la brochure de 2004 et les factures produites par l’intervenante le 7 septembre 2006, dont il n’est pas établi qu’ils ont été communiqués entièrement et sans altération à la requérante. La chambre de recours a, donc, violé l’article 75, deuxième phrase, du règlement n° 207/2009.

90      Il est, certes, vrai que selon une jurisprudence constante les droits de la défense ne sont violés du fait d’une irrégularité procédurale que dans la mesure où celle‑ci a eu une incidence concrète sur la possibilité pour la personne intéressée de se défendre. Ainsi, le non‑respect des règles en vigueur ayant pour finalité de protéger les droits de la défense n’est susceptible de vicier la procédure administrative que s’il est établi que celle-ci aurait pu aboutir à un résultat différent si lesdites règles avaient été respectées [voir arrêt du Tribunal du 12 mai 2009, Jurado Hermanos/OHMI (JURADO), T‑410/07, Rec. p. II‑1345, point 32, et la jurisprudence citée].

91      En l’espèce, cette dernière condition est remplie. En effet, ainsi qu’il a été mentionné aux points 60 et 74 ci‑dessus, la chambre de recours a considéré qu’il existait, en l’espèce, un risque de confusion entre les deux marques en conflit eu égard, non seulement à la similitude des marques en conflit et des produits visés par elles, mais également au caractère distinctif élevé de la marque antérieure, lequel tenait à la renommée de cette dernière au Royaume‑Uni s’agissant de la faïence de cuisson. Pour conclure que la marque antérieure était renommée au Royaume‑Uni, la chambre de recours s’est fondée sur deux éléments de preuve, à savoir la brochure de 2004, d’une part, et les factures produites par l’intervenante, d’autre part. Or, ainsi qu’il a été constaté au point 89 ci-dessus, il n’a pas été prouvé que ces éléments de preuve avaient été communiqués entièrement et sans altération à la requérante et, par conséquent, il n’a pas été établi à suffisance de droit qu’elle avait eu l’occasion de présenter ses observations les concernant. En outre, il ne saurait a priori être exclu que, si de telles observations avaient été présentées, elles auraient pu amener la chambre de recours à une conclusion différente quant à l’existence d’une renommée de la marque antérieure au Royaume‑Uni et, donc, quant à l’existence d’un risque de confusion au moins au Royaume‑Uni. Il s’ensuit que, en l’espèce, la procédure administrative aurait pu aboutir à un résultat différent si les règles relatives à la protection des droits de la défense avaient été respectées.

92      Cette conclusion n’est pas remise en question par les arguments avancés par l’OHMI dans son mémoire en réponse et dans sa réponse à la question écrite que lui a adressée le Tribunal le 24 janvier 2012 ainsi que par les arguments de l’intervenante dans ses observations du 9 février 2012. L’OHMI et l’intervenante soutiennent, en premier lieu, que la division d’opposition, dans sa décision qui a été confirmée par la décision attaquée, avait conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit en tenant compte du caractère distinctif inhérent de la marque antérieure, sans prendre en considération la renommée de cette marque au Royaume‑Uni.

93      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 64, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, à la suite de l’examen au fond du recours, la chambre de recours statue sur le recours et peut, ce faisant, « exercer les compétences de l’instance qui a pris la décision attaquée », c’est‑à‑dire, en l’occurrence, se prononcer elle‑même sur l’opposition en la rejetant ou en la déclarant fondée, confirmant ou infirmant en cela la décision attaquée. Ainsi que l’a jugé la Cour dans son arrêt du 13 mars 2007, OHMI/Kaul (C‑29/05 P, Rec. p. I‑2213, point 57), il résulte de cette disposition que, par l’effet du recours dont elle est saisie, la chambre de recours est appelée à procéder à un nouvel examen complet du fond de l’opposition, tant en droit qu’en fait.

94      À la suite de cet examen, la chambre de recours peut, notamment, confirmer la décision de la division d’opposition, sur la base de motifs différents de ceux retenus par cette dernière. Dans cette hypothèse, en cas de recours devant le Tribunal contre la décision de la chambre de recours, c’est la légalité des motifs retenus par celle‑ci et non de ceux contenus dans la décision de la division d’opposition qui doit être contrôlée.

95      Ainsi, en l’espèce, le Tribunal ne saurait contrôler les motifs de la décision de la division d’opposition, selon lesquels il existait un risque de confusion entre les deux marques en conflit eu égard seulement à la similitude des signes et des produits concernés. Il ne lui appartient que de contrôler le bien‑fondé de l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle il existait, en l’espèce, un risque de confusion eu égard non seulement à la similitude des signes et des produits concernés, mais également au caractère distinctif élevé de la marque antérieure, lequel tenait à la renommée de cette dernière au Royaume‑Uni s’agissant de la faïence de cuisson.

96      En second lieu, l’OHMI et l’intervenante allèguent que la chambre de recours a pu se fonder sur les autres éléments de preuve fournis par l’intervenante pour conclure à l’existence d’un caractère distinctif élevé de la marque antérieure tenant à sa renommée au Royaume‑Uni. Force est, toutefois, de constater que cette affirmation manque en fait. Certes, au point 24 de la décision attaquée, la chambre de recours a relevé que « les documents produits par l’[intervenante] devant la division d’opposition, le 7 septembre 2006, indiquent l’existence de la renommée de la marque antérieure pour la faïence de cuisson à la date de dépôt de la marque demandée ». Toutefois, ainsi qu’il a été déjà relevé au point 74 ci‑dessus, la décision attaquée ne mentionne, spécifiquement, que deux éléments de preuve, pour conclure à l’existence d’une renommée de la marque antérieure au Royaume‑Uni pour la faïence de cuisson, à savoir la brochure de 2004 et les factures produites par l’intervenante le 7 septembre 2006. Il en résulte que, contrairement à ce qu’affirment l’OHMI et l’intervenante, la chambre de recours, bien qu’elle se soit référée, de manière indifférenciée, aux documents produits par l’intervenante devant la division d’opposition le 7 septembre 2006, n’a, en définitive, fondé sa conclusion relative à l’existence d’une renommée de la marque antérieure que sur les deux seuls éléments de preuve susmentionnés.

97      Dans l’hypothèse où cette affirmation de l’intervenante, à laquelle l’OHMI s’est rallié, devrait être comprise en ce sens que celle‑ci conclut implicitement à ce que le Tribunal examine lui‑même les autres éléments de preuve fournis par elle et contenus dans le dossier de la procédure devant l’OHMI, communiqué au Tribunal en application de l’article 133, paragraphe 3, du règlement de procédure, pour constater l’existence d’une renommée de la marque antérieure au Royaume-Uni pour la faïence de cuisson, il n’appartient pas au Tribunal de procéder à un tel examen.

98      En effet, un tel chef de conclusions, présenté au demeurant à un stade avancé de la procédure, vise, en réalité, à la réformation de la décision attaquée, conformément à l’article 65, paragraphe 3, du règlement no 207/2009, dans la mesure où il est, en substance, demandé au Tribunal de confirmer le dispositif de la décision attaquée en procédant lui‑même à une nouvelle appréciation de l’ensemble d’éléments de preuve de la renommée de la marque antérieure au Royaume‑Uni, y compris ceux qui ne sont pas mentionnés dans la décision attaquée et qui, par conséquent, ne peuvent pas être considérés comme faisant partie du fondement de celle‑ci. Il convient toutefois de rappeler, à cet égard que le pouvoir de réformation reconnu au Tribunal n’a pas pour effet de conférer à celui‑ci le pouvoir de substituer sa propre appréciation à celle de la chambre de recours et, pas davantage, de procéder à une appréciation sur laquelle ladite chambre n’a pas encore pris position. Par conséquent, l’exercice du pouvoir de réformation doit, en principe, être limité aux situations dans lesquelles le Tribunal, après avoir contrôlé l’appréciation portée par la chambre de recours, est en mesure de déterminer, sur la base des éléments de fait et de droit tels qu’ils sont établis, la décision que la chambre de recours était tenue de prendre.

99      En l’espèce, certes, la chambre de recours a pris position sur la question de l’existence d’une renommée de la marque antérieure au Royaume‑Uni. Toutefois, ainsi qu’il a déjà été relevé, l’examen de cette question effectué par la chambre de recours n’a été fondé que sur une partie des éléments de preuve pertinents et, de plus, il était entaché d’une violation des droits de la défense de la requérante. Dans ces conditions, le Tribunal considère qu’un nouvel examen, par lui‑même, de l’ensemble des éléments de preuve pertinents, impliquerait, en substance, l’exercice de fonctions administratives et d’investigation propres à l’OHMI et serait, de ce fait, contraire à l’équilibre institutionnel dont s’inspire le principe de répartition des compétences entre l’OHMI et le Tribunal. Il s’ensuit qu’il ne conviendrait pas, en tout état de cause, d’examiner une demande de réformation en ce sens [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 4 octobre 2006, Freixenet/OHMI (Forme d’une bouteille émerisée noire mate), T‑188/04, non publié au Recueil, point 47, et du 14 mai 2009, Fiorucci/OHMI – Edwin (ELIO FIORUCCI), T‑165/06, Rec. p. II‑1375, point 67].

100    Dans ces conditions, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres griefs avancés par la requérante pour remettre en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle la marque antérieure disposait d’une renommée au Royaume‑Uni, il convient d’annuler la décision attaquée.

 Sur les dépens

101    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’OHMI ayant succombé et la requérante ayant conclu à sa condamnation aux dépens, il y a lieu de le condamner à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la requérante.

102    Aux termes de l’article 87, paragraphe 4, troisième alinéa, du même règlement, le Tribunal peut ordonner qu’une partie intervenante supportera ses propres dépens. L’intervenante ayant succombé en ses conclusions, celle-ci supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision de la première chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 3 septembre 2010 (affaire R 40/2010-1) est annulée.

2)      L’OHMI supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par XXXLutz Marken GmbH.

3)      Meyer Manufacturing Co. Ltd supportera ses propres dépens.

Czúcz

Labucka

Gratsias

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 13 juin 2012.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.