Language of document : ECLI:EU:T:2013:110

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

7 mars 2013 (*)

« Médicaments à usage humain – Suspension de la mise sur le marché et retrait de certains lots de médicaments contenant le principe actif Clopidogrel – Modification de l’autorisation de mise sur le marché – Interdiction de mise sur le marché des médicaments – Règlement (CE) n° 726/2004 et directive 2001/83/CE – Proportionnalité – Obligation de motivation »

Dans l’affaire T‑539/10,

Acino AG, anciennement Acino Pharma GmbH, établie à Miesbach (Allemagne), représentée par Mes R. Buchner et E. Burk, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée initialement par MM. A. Sipos, G. Wilms, B.-R. Killmann et Mme M. Šimerdová, puis par M. Killmann et Mme Šimerdová, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation des décisions de la Commission du 29 mars et du 16 septembre 2010 relatives à la suspension de la mise sur le marché des médicaments à usage humain contenant le principe actif Clopidogrel fabriqué sur un certain site, au retrait des lots de ces médicaments du marché, à la modification des autorisations de mise sur le marché ainsi qu’à l’interdiction de mise sur le marché desdits médicaments,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. A. Dittrich (rapporteur), président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. M. Prek, juges,

greffier : Mme K. Andová, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 8 novembre 2012,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        À la demande d’Acino Pharma GmbH, la Commission des Communautés européennes a octroyé, conformément au règlement (CE) n° 726/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 31 mars 2004, établissant des procédures communautaires pour l’autorisation et la surveillance en ce qui concerne les médicaments à usage humain et à usage vétérinaire, et instituant une Agence européenne des médicaments (JO L 136, p. 1), une autorisation centralisée de mise sur le marché des huit médicaments suivants contenant le principe actif Clopidogrel :

–        Clopidogrel Acino – Clopidogrel, par la décision C (2009) 6149, du 28 juillet 2009 ;

–        Clopidogrel ratiopharm GmbH – Clopidogrel, par la décision C (2009) 6150, du 28 juillet 2009 ;

–        Clopidogrel 1A Pharma – Clopidogrel, par la décision C (2009) 6151, du 28 juillet 2009 ;

–        Clopidogrel Hexal – Clopidogrel, par la décision C (2009) 6152, du 28 juillet 2009 ;

–        Clopidogrel Sandoz – Clopidogrel, par la décision C (2009) 7409, du 21 septembre 2009 ;

–        Clopidogrel Acino Pharma GmbH – Clopidogrel, par la décision C (2009) 7422, du 21 septembre 2009 ;

–        Clopidogrel ratiopharm – Clopidogrel, par la décision C (2009) 7468, du 23 septembre 2009,

–        Clopidogrel Acino Pharma – Clopidogrel, par la décision C (2009) 7558, du 28 septembre 2009.

2        Les demandes d’autorisation indiquaient que le Clopidogrel était fabriqué dans plusieurs usines, y compris dans une usine à Visakhapatnam (Inde).

3        Du 23 au 26 février 2010, l’autorité nationale de surveillance des médicaments compétente, le gouvernement de Haute-Bavière (Allemagne), a contrôlé l’usine située à Visakhapatnam à la demande du comité des médicaments à usage humain (ci-après le « comité ») de l’Agence européenne des médicaments (EMA). Cette inspection portait sur le respect des principes et des lignes directrices de bonnes pratiques de fabrication pour les médicaments (ci-après les « bonnes pratiques ») visés à l’article 46, sous f), de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (JO L 311, p. 67), telle que modifiée, en dernier lieu, par la directive 2009/120/CE de la Commission, du 14 septembre 2009 (JO L 242, p. 3) (ci-après la « directive 2001/83 »). Ce contrôle a abouti à un rapport, datant initialement du 9 mars 2010 et modifié le 16 mars 2010, établissant que la production à ladite usine n’était pas conforme aux règles des bonnes pratiques. Ce rapport cite comme infraction critique le fait que 70 protocoles de fabrication de lots ont été réécrits et que certaines indications initiales ont été modifiées. Selon ce rapport, le contrôle a aussi révélé huit autres infractions graves, liées à l’absence de mise en œuvre d’un système d’assurance de qualité de base et à l’inobservation des obligations fondamentales des bonnes pratiques relatives aux locaux et à l’équipement ainsi qu’à l’entretien préventif et à la manipulation des solvants. En outre, les procédures de nettoyage des locaux et des équipements ont été jugées inappropriées pour garantir l’absence d’une contamination ou de contaminations croisées. Selon ce rapport, dans sa version modifiée, le retrait des lots délivrés n’était pas nécessaire faute de preuve que les produits concernés étaient nocifs pour les patients. En outre, en ce qui concerne l’infraction critique, ce rapport indique, dans sa version modifiée, que la qualité des produits n’était pas modifiée sur papier du fait de la réécriture des données relatives à la qualité et qu’il n’y avait pas de preuve que cette infraction concernait la santé des patients.

4        Par la suite, le comité a été informé de la situation et a invité Acino Pharma à présenter des explications orales lors d’une audience qui s’est tenue le 17 mars 2010.

5        Le 18 mars 2010, la Commission a ouvert une procédure en vertu de l’article 20 du règlement n° 726/2004 et a demandé l’avis de l’EMA qui lui a envoyé, le même jour, l’avis du comité. Dans cet avis, qui a été transmis le jour suivant à Acino Pharma, le comité a recommandé que l’usine à Visakhapatnam soit rayée de la liste des sites autorisés à fabriquer le Clopidogrel et que tous les lots des médicaments qui contenaient ce principe actif fabriqué par ladite usine soient retirés du réseau de distribution jusqu’au niveau des pharmacies.

6        Par courrier du 22 mars 2010, Acino Pharma a demandé à l’EMA le réexamen de l’avis du comité. Elle a annexé à sa lettre un rapport détaillé sur l’évaluation des risques selon lequel les infractions aux bonnes pratiques constatées n’avaient pas eu d’effet sur la qualité des médicaments. Le 23 mars 2010, Acino Pharma a informé la Commission dudit rapport et de sa demande de réexamen.

7        Par lettre du 25 mars 2010 à Acino Pharma, l’EMA lui a confirmé que les indications fournies par elle avaient fait l’objet d’un examen au sein du comité, mais que les conclusions de l’avis du comité étaient maintenues.

8        Le 29 mars 2010, la Commission a adopté, conformément à l’article 20, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n° 726/2004, les décisions C (2010) 2203, C (2010) 2204, C (2010) 2205, C (2010) 2206, C (2010) 2207, C (2010) 2208, C (2010) 2210 et C (2010) 2218, notifiées à Acino Pharma le 30 mars 2010 (ci-après les « décisions provisoires »). Celles-ci contiennent des mesures provisoires relatives à la mise sur le marché des médicaments contenant le principe actif Clopidogrel fabriqué sur le site de Visakhapatnam. En effet, selon l’article 1er, paragraphe 1, des décisions provisoires, sur la base des conclusions scientifiques du comité, jointes en annexe auxdites décisions, la mise sur le marché des lots de médicaments contenant le principe actif Clopidogrel, fabriqué sur ledit site, est suspendue. Conformément au paragraphe 2 de cet article, les lots se trouvant déjà sur le marché de l’Union européenne doivent être retirés du réseau de distribution jusqu’au niveau des pharmacies.

9        Par lettre du 10 juin 2010, Acino Pharma a transmis à la Commission la synthèse finale des résultats des tests visés dans le rapport détaillé sur l’évaluation des risques et la validation des méthodes de test employées ainsi qu’un rapport, datant du 28 mai 2010, sur l’évaluation des risques de contamination du Clopidogrel fabriqué par l’usine à Visakhapatnam par d’autres principes actifs fabriqués durant la même période. Selon ce rapport, il n’y avait aucun risque pour la santé des patients. Sur la base de ces documents, Acino Pharma a demandé un nouvel examen.

10      Le 29 juin 2010, la Commission a transmis la lettre du 10 juin 2010 d’Acino Pharma à l’EMA en lui demandant de lui faire savoir s’il s’agissait là d’informations susceptibles de modifier l’avis du comité. Le 2 juillet 2010, la Commission a déclaré à Acino Pharma que le contenu de sa lettre du 10 juin 2010 faisait l’objet d’un examen approfondi en vue de l’adoption d’une décision définitive. Le 23 juillet 2010, la Commission a reçu une lettre de l’EMA l’informant qu’elle maintenait les conclusions de l’avis initial du comité.

11      Le 16 septembre 2010, la Commission a adopté, conformément à l’article 20, paragraphe 3, second alinéa, du règlement n° 726/2004, les décisions C (2010) 6428, C (2010) 6429, C (2010) 6430, C (2010) 6432, C (2010) 6433, C (2010) 6434, C (2010) 6435 et C (2010) 6436, notifiées à Acino Pharma le 20 septembre 2010 (ci-après les « décisions définitives »). Celles-ci énoncent deux mesures définitives à leur article 1er. Premièrement, elles disposent que, sur la base des conclusions scientifiques du comité, jointes en annexe aux décisions définitives, les autorisations de mise sur le marché des médicaments contenant le principe actif Clopidogrel sont modifiées en ce sens que le site de Visakhapatnam est supprimé de la liste des sites de production autorisés à fournir le principe actif Clopidogrel. Deuxièmement, elles disposent que les lots de médicaments contenant du Clopidogrel fabriqué sur ce site ne doivent pas être mis sur le marché dans l’Union.

 Procédure et conclusions des parties

12      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 24 novembre 2010, Acino Pharma a formé le présent recours tendant à l’annulation des décisions provisoires et définitives.

13      Le 14 avril 2011, Acino Pharma s’est désistée du recours introduit contre les décisions C (2010) 2206 et C (2010) 2207, du 29 mars 2010, ainsi que contre les décisions C (2010) 6433 et C (2010) 6428, du 16 septembre 2010, concernant les médicaments Clopidogrel Sandoz – Clopidogrel et Clopidogrel 1A Pharma – Clopidogrel. Le 27 mai 2011, la Commission a fait savoir qu’elle prenait acte de ce désistement.

14      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 20 mars 2012, la Commission a indiqué que, en raison de l’absence d’intérêt à agir d’Acino Pharma, il n’y avait plus lieu de statuer sur le recours dans la mesure où il concernait les décisions C (2010) 2203, C (2010) 2204, C (2010) 2208 et C (2010) 2210, du 29 mars 2010, ainsi que les décisions C (2010) 6434, C (2010) 6436, C (2010) 6429 et C (2010) 6435, du 16 septembre 2010, concernant les médicaments Clopidogrel Acino – Clopidogrel, Clopidogrel Acino Pharma GmbH – Clopidogrel, Clopidogrel Acino Pharma – Clopidogrel et Clopidogrel Hexal – Clopidogrel. Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 11 mai 2012, Acino Pharma a soumis ses observations sur cette lettre.

15      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (septième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale.

16      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 22 octobre 2012, le conseil de la requérante a indiqué, d’une part, qu’Acino Pharma avait fait, par contrat du 6 juillet 2012, l’objet d’une fusion-absorption dans Acino AG et, d’autre part, que les autorisations de mise sur le marché des médicaments Clopidogrel ratiopharm – Clopidogrel et Clopidogrel ratiopharm GmbH – Clopidogrel, octroyées par les décisions C (2009) 7468 et C (2009) 6150, avaient été transférées à un tiers respectivement par les décisions de la Commission C (2012) 6424 et C (2012) 6526, des 11 et 17 septembre 2012. Par décision du président de la septième chambre du Tribunal du 23 octobre 2012, il a été signalé à la Commission qu’elle pourrait prendre position sur ce document lors de l’audience.

17      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 26 octobre 2012, la requérante a demandé que soit versée au dossier une nouvelle offre de preuve, à savoir un arrêt du Verwaltungsgericht Köln (tribunal administratif de Cologne, Allemagne) du 9 octobre 2012. Par décision du président de la septième chambre du Tribunal du 26 octobre 2012, cette demande a été accueillie et il a été signalé à la Commission qu’elle pourrait prendre position sur ce document lors de l’audience.

18      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 8 novembre 2012. Au cours de cette audience, la Commission a retiré sa demande de non-lieu à statuer en ce qui concerne les décisions C (2010) 2203 et C (2010) 6434, relatives au médicament Clopidogrel Acino – Clopidogrel. En revanche, elle a indiqué que, en raison d’absence d’intérêt à agir de la requérante, il n’y avait plus lieu de statuer sur le recours dans la mesure où il concernait les décisions C (2010) 2205, C (2010) 2218, C (2010) 6432 et C (2010) 6430, relatives aux médicaments Clopidogrel ratiopharm – Clopidogrel et Clopidogrel ratiopharm GmbH – Clopidogrel.

19      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler les décisions de la Commission C (2010) 2203, C (2010) 2204, C (2010) 2205, C (2010) 2208, C (2010) 2210 et C (2010) 2218, du 29 mars 2010, ainsi que les décisions de la Commission C (2010) 6429, C (2010) 6430, C (2010) 6432, C (2010) 6434, C (2010) 6435 et C (2010) 6436, du 16 septembre 2010 ;

–        condamner la Commission aux dépens.

20      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater qu’il n’y a plus lieu de statuer sur le recours en ce qui concerne les décisions de la Commission C (2010) 2204, C (2010) 2205, C (2010) 2208, C (2010) 2210 et C (2010) 2218, du 29 mars 2010, ainsi que les décisions de la Commission C (2010) 6429, C (2010) 6430, C (2010) 6432, C (2010) 6435 et C (2010) 6436, du 16 septembre 2010 ;

–        rejeter le recours comme irrecevable dans la mesure où il vise les décisions de la Commission C (2010) 2203, C (2010) 2204, C (2010) 2205, C (2010) 2208, C (2010) 2210 et C (2010) 2218, du 29 mars 2010 ;

–        à titre subsidiaire, rejeter le recours comme étant dépourvu de fondement dans la mesure où il vise les décisions de la Commission C (2010) 2203, C (2010) 2204, C (2010) 2205, C (2010) 2208, C (2010) 2210 et C (2010) 2218, du 29 mars 2010 ;

–        rejeter le recours comme étant dépourvu de fondement dans la mesure où il vise les décisions de la Commission C (2010) 6429, C (2010) 6430, C (2010) 6432, C (2010) 6434, C (2010) 6435 et C (2010) 6436, du 16 septembre 2010 ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur l’incidence de la fusion-absorption entre Acino Pharma et Acino

21      Selon une jurisprudence constante, une action en annulation engagée par une personne morale peut être poursuivie par l’ayant cause à titre universel de celle-ci, notamment dans le cas où cette personne morale cesse d’exister alors que l’ensemble de ses droits et obligations est transféré à un nouveau titulaire (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 20 octobre 1983, Gutmann/Commission, 92/82, Rec. p. 3127, point 2 ; du 23 avril 1986, Les Verts/Parlement, 294/83, Rec. p. 1339, points 13 à 18, et du Tribunal du 8 juillet 2004, JFE Engineering e.a./Commission, T‑67/00, T‑68/00, T‑71/00 et T‑78/00, Rec. p. II‑2501, point 46). Il y a aussi lieu de rappeler que, dans une telle situation, l’ayant cause à titre universel est nécessairement substitué de plein droit à son prédécesseur (voir arrêt du Tribunal du 21 mars 2012, Marine Harvest Norway et Alsaker Fjordbruk/Conseil, T‑113/06, non publié au Recueil, point 28, et la jurisprudence citée).

22      En l’espèce, il est constant que, par contrat du 6 juillet 2012, Acino Pharma a fait l’objet d’une fusion-absorption dans Acino. Cette opération a eu pour effet qu’Acino Pharma a, en tant que personne morale, cessé d’exister et qu’Acino a repris les droits et les obligations d’Acino Pharma, succédant donc à cette dernière dans tous les rapports juridiques l’impliquant, en ce compris les procédures engagées avant la fusion.

23      Il s’ensuit qu’Acino est devenue, de plein droit, partie requérante dans la présente affaire, en se substituant à Acino Pharma, et qu’elle est en droit de poursuivre le présent recours.

 Sur le désistement du recours en ce qu’il vise les décisions C (2010) 2206, C (2010) 2207, C (2010) 6428 et C (2010) 6433

24      Les 20 décembre 2010 et 9 mars 2011, Acino Pharma a demandé à la Commission le retrait des autorisations de mise sur le marché des médicaments Clopidogrel 1A Pharma – Clopidogrel et Clopidogrel Sandoz – Clopidogrel, octroyées par les décisions C (2009) 6151 et C (2009) 7409. À la suite de ces demandes, la Commission a retiré ces autorisations respectivement par la décision C (2011) 686, du 1er février 2011, et par la décision C (2011) 2423, du 31 mars 2011.

25      Le Tribunal prend acte du fait qu’Acino Pharma s’est désistée de son recours en ce qu’il est introduit contre les décisions C (2010) 2206 et C (2010) 2207, du 29 mars 2010, ainsi que contre les décisions C (2010) 6433 et C (2010) 6428, du 16 septembre 2010, concernant les médicaments Clopidogrel Sandoz – Clopidogrel et Clopidogrel 1A Pharma – Clopidogrel (voir point 13 ci-dessus).

 Sur la recevabilité du recours en ce qu’il est introduit contre les décisions provisoires

26      La Commission fait valoir, en substance, que le recours contre les décisions provisoires était tardif et donc irrecevable, parce que ces décisions constitueraient des actes attaquables contre lesquels la requérante n’aurait pas formé un recours dans le délai requis.

27      Il appartient au Tribunal d’apprécier si une bonne administration de la justice justifie, dans les circonstances de l’espèce, de se prononcer au fond sur le recours sans statuer sur la recevabilité (arrêt de la Cour du 26 février 2002, Conseil/Boehringer, C‑23/00 P, Rec. p. I‑1873, point 52). En l’espèce, le Tribunal estime qu’il convient de se prononcer sur le fond du recours sans statuer sur les questions de recevabilité soulevées par la Commission.

 Sur la demande de non-lieu à statuer partiel

28      La Commission fait valoir que le recours contre les décisions C (2010) 2204, C (2010) 2205, C (2010) 2208, C (2010) 2210 et C (2010) 2218, du 29 mars 2010, ainsi que contre les décisions C (2010) 6436, C (2010) 6432, C (2010) 6429, C (2010) 6435 et C (2010) 6430, du 16 septembre 2010, concernant respectivement les médicaments Clopidogrel Acino Pharma GmbH – Clopidogrel, Clopidogrel ratiopharm – Clopidogrel, Clopidogrel Acino Pharma – Clopidogrel, Clopidogrel Hexal – Clopidogrel et Clopidogrel ratiopharm GmbH – Clopidogrel est devenu sans objet et que la requérante n’a plus d’intérêt à agir en ce qui concerne ces décisions.

29      Il convient de relever que, les conditions de recevabilité d’un recours et, notamment, le défaut d’intérêt à agir relevant des fins de non-recevoir d’ordre public, il appartient au Tribunal de vérifier d’office si une partie requérante a un intérêt à obtenir l’annulation de la décision qu’elle attaque (voir arrêt du Tribunal du 18 mars 2009, Shanghai Excell M&E Enterprise et Shanghai Adeptech Precision/Conseil, T‑299/05, Rec. p. II‑565, point 42, et la jurisprudence citée).

30      Selon une jurisprudence constante, l’intérêt à agir d’un requérant doit, au vu de l’objet du recours, exister au stade de l’introduction de celui-ci sous peine d’irrecevabilité. Cet objet du litige doit perdurer, tout comme l’intérêt à agir, jusqu’au prononcé de la décision juridictionnelle sous peine de non-lieu à statuer, ce qui suppose que le recours soit susceptible, par son résultat, de procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (voir arrêt de la Cour du 17 avril 2008, Flaherty e.a./Commission, C‑373/06 P, C‑379/06 P et C‑382/06 P, Rec. p. I‑2649, point 25, et la jurisprudence citée) et que celle-ci justifie d’un intérêt né et actuel à l’annulation de l’acte attaqué (voir arrêt du Tribunal du 19 juin 2009, Socratec/Commission, T‑269/03, non publié au Recueil, point 36, et la jurisprudence citée).

31      Il ressort également de la jurisprudence que c’est au requérant qu’il appartient d’apporter la preuve de son intérêt à agir, qui constitue la condition essentielle et première de tout recours en justice (ordonnance du président de la deuxième chambre de la Cour du 31 juillet 1989, S./Commission, 206/89 R, Rec. p. 2841, point 8, et arrêt du Tribunal du 14 avril 2005, Sniace/Commission, T‑141/03, Rec. p. II‑1197, point 31).

32      En premier lieu, s’agissant des décisions C (2010) 2203 et C (2010) 6434, concernant le médicament Clopidogrel Acino – Clopidogrel, il est constant que, par la décision C (2012) 1556, du 6 mars 2012, la Commission a, à la suite de la demande d’Acino Pharma du 31 décembre 2011, transféré à Acino l’autorisation de mise sur le marché de ce médicament, octroyée par la décision C (2009) 6149, conformément au règlement (CE) n° 2141/96 de la Commission, du 7 novembre 1996, concernant l’examen d’une demande de transfert d’autorisation de mise sur le marché d’un médicament relevant du champ d’application du règlement (CEE) nº 2309/93 du Conseil (JO L 286, p. 6).

33      Étant donné qu’Acino est devenue, de plein droit, partie requérante dans la présente affaire, en se substituant à Acino Pharma (voir points 21 à 23 ci-dessus), il convient de relever qu’elle a un intérêt à agir en ce qui concerne les décisions C (2010) 2203 et C (2010) 6434, ce qui n’est, par ailleurs, pas contesté par la Commission (voir point 18 ci-dessus).

34      En deuxième lieu, s’agissant des décisions C (2010) 2204 et C (2010) 2208, du 29 mars 2010, ainsi que des décisions C (2010) 6436 et C (2010) 6429, du 16 septembre 2010, concernant respectivement les médicaments Clopidogrel Acino Pharma GmbH – Clopidogrel et Clopidogrel Acino Pharma – Clopidogrel, il est constant que, le 11 janvier 2012, Acino Pharma a demandé à la Commission le retrait des autorisations de mise sur le marché de ces médicaments, octroyées par les décisions C (2009) 7422 et C (2009) 7558. À la suite de ces demandes, la Commission a retiré ces autorisations respectivement par les décisions C (2012) 1041, du 13 février 2012, et C (2012) 889, du 9 février 2012.

35      La requérante, qui, par ailleurs, n’a pas apporté la preuve qu’elle conservait un intérêt à agir en ce qui concerne les décisions C (2010) 2204, C (2010) 2208, C (2010) 6436 et C (2010) 6429, concernant les médicaments Clopidogrel Acino Pharma GmbH – Clopidogrel et Clopidogrel Acino Pharma – Clopidogrel, a indiqué qu’il n’y avait plus lieu de statuer sur sa demande d’annulation relative à ces décisions. Il n’y a donc plus lieu de statuer sur le recours dans la mesure où il concerne les décisions C (2010) 2204, C (2010) 2208, C (2010) 6436 et C (2010) 6429.

36      En troisième lieu, il convient d’examiner l’intérêt à agir de la requérante en ce qui concerne les décisions C (2010) 2210, C (2010) 2205 et C (2010) 2218, du 29 mars 2010, ainsi que les décisions C (2010) 6435, C (2010) 6432 et C (2010) 6430, du 16 septembre 2010, concernant respectivement les médicaments Clopidogrel Hexal – Clopidogrel, Clopidogrel ratiopharm – Clopidogrel et Clopidogrel ratiopharm GmbH – Clopidogrel.

37      Il est constant que, le 11 janvier 2012, Acino Pharma a demandé à la Commission le retrait de l’autorisation de mise sur le marché du médicament Clopidogrel Hexal – Clopidogrel, octroyée par la décision C (2009) 6152. À la suite de cette demande, la Commission a retiré cette autorisation par la décision C (2012) 896, du 9 février 2012. En outre, il est constant que, respectivement par la décision C (2012) 6424, du 11 septembre 2012, et la décision C (2012) 6526, du 17 septembre 2012, la Commission a, à la suite des demandes de la requérante du 20 juillet 2012, transféré les autorisations de mise sur le marché des médicaments Clopidogrel ratiopharm – Clopidogrel et Clopidogrel ratiopharm GmbH – Clopidogrel, octroyées par les décisions C (2009) 7468 et C (2009) 6150, à un tiers, conformément au règlement n° 2141/96.

38      La Commission ne conteste pas qu’Acino Pharma ait eu, lors de l’introduction du recours, un intérêt à agir. Toutefois, en raison du retrait de l’autorisation relative au médicament Clopidogrel Hexal – Clopidogrel et du transfert des autorisations relatives aux médicaments Clopidogrel ratiopharm – Clopidogrel et Clopidogrel ratiopharm GmbH – Clopidogrel, la requérante l’aurait perdu en ce qui concerne les décisions C (2010) 2210, C (2010) 2205 et C (2010) 2218, du 29 mars 2010, ainsi que les décisions C (2010) 6435, C (2010) 6432 et C (2010) 6430, du 16 septembre 2010. Une éventuelle annulation de ces décisions ne procurerait plus d’avantage à la requérante dès lors que, à la suite du retrait et du transfert mentionnés ci-dessus, ni les autorisations initiales ni leur modification par lesdites décisions ne pourraient produire un effet juridique sur la requérante. Le recours contre ces décisions serait devenu sans objet et il n’y aurait donc plus lieu de statuer sur la demande d’annulation de celles-ci.

39      La requérante conteste avoir perdu un intérêt à agir du fait du retrait et du transfert des autorisations concernées. En effet, d’une part, elle aurait conservé cet intérêt, car elle envisagerait, au cas où son recours en annulation serait accueilli, d’introduire un recours en indemnité contre la Commission afin que le dommage causé par lesdites décisions soit réparé. D’autre part, elle aurait conservé un intérêt à agir au vu de son intérêt à réhabiliter sa réputation.

40      Premièrement, il importe de constater que les décisions C (2010) 2210, C (2010) 2205, C (2010) 2218, C (2010) 6435, C (2010) 6432 et C (2010) 6430 n’ont pas été formellement retirées par la Commission. Le recours a donc conservé son objet en ce qui concerne ces décisions (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 7 juin 2007, Wunenburger/Commission, C‑362/05 P, Rec. p. I‑4333, points 48 et 49).

41      Deuxièmement, un requérant peut conserver un intérêt à demander l’annulation d’un acte pour obtenir la constatation, par le juge de l’Union, d’une illégalité commise à son égard, de sorte qu’une telle constatation puisse servir de base à un éventuel recours en indemnité destiné à réparer de façon adéquate le dommage causé par l’acte attaqué (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 31 mars 1998, France e.a./Commission, C‑68/94 et C‑30/95, Rec. p. I‑1375, point 74 ; ordonnance du Tribunal du 5 décembre 2007, Schering-Plough/Commission et EMEA, T‑133/03, non publiée au Recueil, point 31, et arrêt Shanghai Excell M&E Enterprise et Shanghai Adeptech Precision/Conseil, point 29 supra, point 53).

42      Tel est le cas en l’espèce. En effet, la requérante a fourni des éléments qui permettraient de conclure que les décisions C (2010) 2210, C (2010) 2205, C (2010) 2218, C (2010) 6435, C (2010) 6432 et C (2010) 6430 lui ont causé un préjudice.

43      D’une part, s’agissant des décisions C (2010) 2210 et C (2010) 6435, concernant le médicament Clopidogrel Hexal – Clopidogrel, la requérante a indiqué que, du fait de ces décisions, ledit médicament d’une valeur de vente de 5,7 millions d’euros avait dû être retiré du marché et des pharmacies. Les frais résultant de ce retrait se seraient élevés à 0,5 million d’euros. Selon la requérante, si les médicaments retirés avaient pu être vendus, elle aurait pu réaliser un bénéfice d’un montant de 3 à 4 millions d’euros. En outre, en l’absence d’une quantité suffisante de ce médicament sur le marché, causée par lesdites décisions, elle n’aurait pas pu dégager le bénéfice qui aurait pu être réalisé sans celles-ci.

44      D’autre part, s’agissant des décisions C (2010) 2205, C (2010) 2218, C (2010) 6432 et C (2010) 6430, concernant les médicaments Clopidogrel ratiopharm – Clopidogrel et Clopidogrel ratiopharm GmbH – Clopidogrel, la requérante a indiqué que, du fait de ces décisions, elle avait subi un dommage, parce qu’elle n’aurait pu exécuter des contrats de livraison existants conclus avec deux entreprises tierces ou seulement avec des coûts supplémentaires pour les clients. En outre, ces derniers auraient dû faire face à des coûts à la suite du rappel et de la destruction des médicaments périmés que la requérante aurait dû prendre en charge. Pour cette raison, la requérante aurait dû rédiger une note de crédit en faveur de ces entreprises tierces d’un montant total de 10,6 millions d’euros.

45      Par conséquent, force est de constater que la requérante a conservé un intérêt à demander l’annulation des décisions C (2010) 2210, C (2010) 2205, C (2010) 2218, C (2010) 6435, C (2010) 6432 et C (2010) 6430 pour obtenir la constatation, par le juge de l’Union, d’une illégalité commise à son égard qui puisse servir de base à un éventuel recours en indemnité, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur l’existence d’un éventuel intérêt à agir en raison d’un intérêt à réhabiliter la réputation.

46      Compte tenu de ce qui précède, il n’y a donc plus lieu de statuer sur le recours dans la mesure où il est dirigé contre les décisions C (2010) 2204, C (2010) 2208, C (2010) 6436 et C (2010) 6429 concernant les médicaments Clopidogrel Acino Pharma GmbH – Clopidogrel et Clopidogrel Acino Pharma – Clopidogrel.

47      Dans le cadre du présent recours, il y aura donc lieu de statuer sur le recours seulement dans la mesure où il est dirigé contre les décisions C (2010) 2203, C (2010) 2205, C (2010) 2210 et C (2010) 2218, du 29 mars 2010 (ci-après les « décisions provisoires examinées »), ainsi que contre les décisions C (2010) 6434, C (2010) 6432, C (2010) 6435 et C (2010) 6430, du 16 septembre 2010 (ci-après les « décisions définitives examinées »), concernant les médicaments Clopidogrel Acino – Clopidogrel, Clopidogrel ratiopharm – Clopidogrel, Clopidogrel Hexal – Clopidogrel et Clopidogrel ratiopharm GmbH – Clopidogrel.

 Sur le fond

48      À l’appui de son recours, la requérante soulève cinq moyens. Le premier est tiré d’une violation des articles 116 et 117 de la directive 2001/83, dès lors que les conditions visées par ces dispositions ne seraient pas remplies. Dans son deuxième moyen, la requérante affirme que la Commission n’a pas respecté les exigences de preuve relatives aux conditions visées aux articles 116 et 117 de ladite directive. Le troisième moyen est tiré d’une violation du principe de proportionnalité dans la mesure où la Commission aurait ordonné le retrait des lots déjà fabriqués. Le quatrième moyen vise une prétendue violation des formes substantielles, en ce que l’avis du comité serait illégal, et une prétendue erreur d’appréciation de la Commission. Le cinquième moyen est tiré d’une violation de l’obligation de motivation.

 Sur le premier moyen, tiré d’une violation des articles 116 et 117 de la directive 2001/83

49      La requérante fait valoir, en substance, que les conditions des articles 116 et 117 de la directive 2001/83 relatives aux modifications des autorisations de mise sur le marché des médicaments en cause ainsi qu’au retrait du marché des médicaments concernés et à l’interdiction de leur mise sur le marché n’étaient pas remplies. En effet, la Commission n’aurait pas pu modifier les autorisations de mise sur le marché des médicaments contenant le principe actif Clopidogrel fabriqué sur le site de Visakhapatnam, conformément à l’article 116 de la directive 2001/83. En outre, ni le retrait du marché des médicaments en cause ni l’interdiction de leur mise sur le marché, par les décisions provisoires et définitives examinées, n’auraient pu être fondés sur l’article 117 de cette directive.

–       Sur la modification des autorisations en cause conformément à l’article 116 de la directive 2001/83

50      La requérante conteste que la modification des autorisations de mise sur le marché des médicaments en cause par les décisions définitives examinées puisse être fondée sur l’article 116, premier et second alinéas, de la directive 2001/83, ainsi que l’allègue la Commission.

51      Il convient de relever que, en vertu de l’article 116 de la directive 2001/83, applicable en vertu de l’article 20, paragraphe 3, premier et second alinéas, du règlement n° 726/2004, lu en combinaison avec l’article 81, paragraphe 2, et l’article 20, paragraphe 1, second alinéa, de ce règlement, la Commission peut modifier une autorisation de mise sur le marché d’un médicament.

52      S’agissant de l’article 116, premier alinéa, de la directive 2001/83, cette disposition énonce que les autorités compétentes suspendent, retirent ou modifient l’autorisation de mise sur le marché lorsqu’il est considéré que le médicament est nocif dans les conditions normales d’emploi ou que l’effet thérapeutique fait défaut ou que le rapport bénéfice/risque n’est pas favorable dans les conditions normales d’emploi ou, enfin, que le médicament n’a pas la composition qualitative et quantitative déclarée.

53      À cet égard, la Commission fait valoir qu’elle pouvait modifier les autorisations en cause dès lors que les médicaments concernés n’avaient pas la composition qualitative et quantitative déclarée en raison du non-respect du procédé de fabrication par rapport aux indications fournies lors de l’obtention des autorisations. Selon la Commission, étant donné que le procédé de fabrication doit être précisé lors de la demande d’autorisation, il est également pris en considération dans l’appréciation aboutissant à l’octroi de l’autorisation de mise sur le marché des médicaments. Chaque infraction grave aux bonnes pratiques durant le procédé de fabrication s’accompagnerait d’un risque de déviation par rapport à la composition qualitative et quantitative déclarée. La Commission affirme qu’une autorisation de mise sur le marché doit pouvoir être modifiée, si les conditions ayant permis l’octroi de cette autorisation ne sont plus du tout ou plus intégralement remplies.

54      Il convient donc d’examiner si, afin de modifier les autorisations de mise sur le marché, en vertu de l’article 116, premier alinéa, de la directive 2001/83, la Commission pouvait, à bon droit, considérer, d’une part, que le procédé de fabrication déclaré par Acino Pharma n’avait pas été respecté en raison des infractions aux bonnes pratiques et, d’autre part, que, de ce fait, les médicaments en cause n’avaient pas la composition qualitative et quantitative déclarée.

55      Premièrement, s’agissant de la question de savoir si le procédé de fabrication déclaré par Acino Pharma n’avait pas été respecté en raison des infractions aux bonnes pratiques, il convient de relever que les autorisations de mise sur le marché des médicaments en cause ont été accordées par la Commission dans le cadre de la procédure d’autorisation centralisée visée aux articles 3 à 15 du règlement n° 726/2004.

56      Aux fins de l’obtention des autorisations en cause, Acino Pharma devait soumettre des demandes à l’EMA, conformément à l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 726/2004. En vertu de l’article 6, paragraphe 1, première phrase, de ce règlement, chaque demande d’autorisation d’un médicament à usage humain devait comporter spécifiquement et exhaustivement les renseignements et documents visés à l’article 8, paragraphe 3, aux articles 10, 10 bis, 10 ter ou 11, et à l’annexe I de la directive 2001/83. En vertu de l’article 8, paragraphe 3, sous d) et h), de ladite directive, il était nécessaire qu’à la demande soient jointes la description du mode de fabrication et la description des méthodes de contrôle utilisées par le fabricant, présentées conformément à l’annexe I de cette directive. Le point 6 de la partie « Introduction et principes généraux » de cette annexe précise, notamment, que le processus de fabrication devait être conforme aux exigences de la directive 91/356/CEE de la Commission, du 13 juin 1991, établissant les principes et lignes directrices de bonnes pratiques de fabrication pour les médicaments à usage humain (JO L 193, p. 30). En vertu de l’article 16 de la directive 2003/94/CE de la Commission, du 8 octobre 2003, établissant les principes et lignes directrices de bonnes pratiques de fabrication concernant les médicaments à usage humain et les médicaments expérimentaux à usage humain (JO L 262, p. 22), la directive 91/356 a été abrogée et les références faites à cette dernière directive s’entendent comme faites à la directive 2003/94.

57      Il résulte de ce qui précède que le procédé de fabrication devait être déclaré dans le cadre de la procédure d’octroi des autorisations de mise sur le marché en cause et que ce procédé devait respecter les bonnes pratiques.

58      Dès lors qu’il est constant que, en raison de l’infraction critique et des huit autres infractions graves aux bonnes pratiques constatées par le gouvernement de Haute-Bavière dans son rapport de contrôle (voir point 3 ci-dessus), le procédé de fabrication sur le site de Visakhapatnam n’a pas respecté les bonnes pratiques, la Commission pouvait, à juste titre, considérer que le procédé de fabrication déclaré par Acino Pharma n’avait pas été respecté.

59      Deuxièmement, s’agissant de la question de savoir si la Commission pouvait, à bon droit, considérer que, de ce fait, les médicaments en cause n’avaient pas la composition qualitative et quantitative déclarée, d’une part, la requérante allègue que l’interprétation de la notion de « composition qualitative et quantitative », selon laquelle celle-ci vise également les modalités formelles du procédé de fabrication, dépasse les limites des sens possibles de cette notion. Selon la requérante, cette notion vise exclusivement la nature même du médicament, qui est déterminé d’après ses caractéristiques.

60      À cet égard, il y a lieu de relever que le procédé de fabrication est, dans le cadre de la procédure d’octroi d’une autorisation de mise sur le marché, un élément qui doit être pris en compte afin d’examiner si la qualité, la sécurité ou l’efficacité d’un médicament est assurée de façon adéquate ou suffisante. En effet, ainsi qu’il ressort des développements aux points 56 et 57 ci-dessus, le procédé de fabrication doit être déclaré dans le cadre de la procédure d’octroi d’une autorisation. À la suite d’une demande d’autorisation, le comité est chargé de formuler l’avis de l’EMA concernant l’octroi d’une autorisation, conformément à l’article 5, paragraphe 2, du règlement n° 726/2004. La décision définitive d’octroi d’une autorisation est, ensuite, arrêtée par la Commission après qu’elle a reçu l’avis de l’EMA, conformément à la procédure visée à l’article 10 dudit règlement. En vertu de l’article 12, paragraphe 1, premier alinéa, de ce règlement, l’autorisation de mise sur le marché est refusée si, après vérification des renseignements et des documents soumis conformément à l’article 6 dudit règlement, il apparaît que le demandeur n’a pas démontré de façon adéquate ou suffisante la qualité, la sécurité ou l’efficacité du médicament à usage humain.

61      Le procédé de fabrication est également, dans le cadre de la procédure de modification d’une autorisation de mise sur le marché, un élément pertinent pour apprécier la composition qualitative d’un médicament. En effet, s’il est vrai que l’examen du procédé de fabrication n’est pas suffisant pour apprécier la composition qualitative et quantitative d’un médicament, il n’en demeure pas moins que ce procédé est un élément susceptible de modifier la composition qualitative d’un médicament. Ainsi que la Commission l’a considéré au considérant 5 des décisions définitives examinées, les obligations liées au procédé de fabrication ont une importance essentielle pour assurer la composition qualitative des médicaments déclarée. Le respect d’un certain procédé de fabrication est un élément garantissant la composition qualitative d’un médicament. Son non-respect peut entraîner la modification de la composition qualitative. Afin d’examiner si les médicaments en cause avaient la composition qualitative et quantitative déclarée, la Commission pouvait donc, à bon droit, prendre en compte le procédé de fabrication déclaré par Acino Pharma.

62      D’autre part, la requérante fait valoir que la Commission ne pouvait valablement considérer que les infractions aux bonnes pratiques sont seules susceptibles de modifier la composition qualitative et quantitative déclarée des médicaments en cause. Une infraction aux bonnes pratiques ne conduirait pas automatiquement à une atteinte à la qualité du médicament. Tous les motifs visés à l’article 116, premier alinéa, de la directive 2001/83 auraient en commun de devoir présenter un risque concret pour la santé des patients. Selon la requérante, l’économie de la directive 2001/83 prévoit qu’un risque abstrait potentiel, tel que couvert par les règles des bonnes pratiques, ne suffit pas pour la modification de l’autorisation.

63      À cet égard, il convient de rappeler que le respect d’un certain procédé de fabrication est un élément garantissant la composition qualitative et quantitative d’un médicament et que son non-respect peut entraîner la modification de cette composition. En outre, s’il est vrai que tous les motifs mentionnés à l’article 116, premier alinéa, de la directive 2001/83 ont pour but de prévenir certains risques pour la santé publique, il n’en demeure pas moins que ces risques ne doivent pas revêtir un caractère concret, mais seulement un caractère potentiel. En effet, conformément au principe de précaution, qui constitue un principe général du droit de l’Union, les autorités compétentes doivent prendre des mesures appropriées en vue de prévenir certains risques potentiels pour la santé publique, la sécurité et l’environnement, en faisant prévaloir les exigences liées à la protection de ces intérêts sur les intérêts économiques (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du Tribunal du 26 novembre 2002, Artegodan e.a./Commission, T‑74/00, T‑76/00, T‑83/00 à T‑85/00, T‑132/00, T‑137/00 et T‑141/00, Rec. p. II‑4945, point 184).

64      Par ailleurs, l’argument de la requérante relatif à l’économie de la directive 2001/83 doit être rejeté. En effet, une autorisation doit être modifiée, en vertu de l’article 116, second alinéa, de cette directive, également lorsque les contrôles visés à l’article 112 de ladite directive n’ont pas été effectués. L’absence de tels contrôles ne crée pas un risque concret, mais un risque potentiel.

65      S’agissant, plus précisément, de l’argumentation de la requérante selon laquelle une infraction aux bonnes pratiques ne conduirait pas automatiquement à une atteinte à la qualité du médicament, il y a lieu de relever qu’il ne s’agit, en l’espèce, pas d’une simple infraction aux bonnes pratiques, mais d’une infraction critique et de huit autres infractions graves. Ainsi qu’il ressort du rapport du gouvernement de Haute-Bavière, l’infraction critique consistait en la réécriture de 70 protocoles de fabrication de lots et en la modification de certaines indications initiales. Les huit autres infractions graves étaient liées à l’absence de mise en œuvre d’un système d’assurance de qualité de base et à l’inobservation des obligations fondamentales des bonnes pratiques relatives aux locaux et à l’équipement ainsi qu’à l’entretien préventif et à la manipulation des solvants. En outre, les procédures de nettoyage des locaux et des équipements ont été jugées inappropriées pour garantir l’absence d’une contamination ou de contaminations croisées (voir point 3 ci-dessus).

66      S’il est vrai que de telles infractions graves ne conduisent pas automatiquement à une atteinte à la composition qualitative et quantitative déclarée des médicaments concernés, il n’en demeure pas moins qu’elles impliquent, en tant que telles, un risque potentiel d’atteinte à cette composition et, ainsi, à la santé publique. Cette argumentation de la requérante ne s’oppose donc pas, sous réserve des exigences de preuves et dans le cadre de l’appréciation qui revient à la Commission (voir deuxième et quatrième moyens ci-après), à ce que cette dernière considère que les médicaments en cause n’ont pas la composition qualitative et quantitative déclarée. En effet, il y a lieu de relever que la Commission peut se limiter à fournir des indices sérieux et concluants, qui, sans écarter l’incertitude scientifique, permettent raisonnablement de douter de la composition qualitative et quantitative déclarée des médicaments en cause. En outre, lorsqu’elle est appelée à effectuer une évaluation complexe pour déterminer si les infractions graves aux bonnes pratiques conduisent à une atteinte à la composition qualitative et quantitative déclarée, la Commission dispose d’un large pouvoir d’appréciation dont l’exercice est soumis à un contrôle juridictionnel se limitant à vérifier si la mesure en cause n’est pas entachée d’erreurs manifestes, de détournement de pouvoir ou si l’autorité compétente n’a pas manifestement dépassé les limites de son pouvoir d’appréciation (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Artegodan e.a./Commission, point 63 supra, points 192 et 201).

67      Par conséquent, l’argumentation de la requérante relative à l’article 116, premier alinéa, de la directive 2001/83 doit être rejetée. Il n’y a donc plus lieu d’examiner si la Commission pouvait fonder la modification des autorisations en cause sur le second alinéa de cet article.

–       Sur le retrait du marché des médicaments en cause et l’interdiction provisoire et définitive de leur mise sur le marché en vertu de l’article 117 de la directive 2001/83

68      La requérante conteste que le retrait du marché des médicaments concernés et l’interdiction provisoire et définitive de leur mise sur le marché, par les décisions provisoires et définitives examinées, puissent être fondés sur l’article 117, paragraphe 1, sous e), de la directive 2001/83, ainsi que l’allègue la Commission.

69      Il convient de relever que, en vertu de l’article 117 de la directive 2001/83, applicable en vertu de l’article 20, paragraphe 3, premier et second alinéas, du règlement n° 726/2004, lu en combinaison avec l’article 20, paragraphe 1, second alinéa, de ce règlement, la Commission peut retirer un médicament du marché ou interdire sa délivrance.

70      Aux termes de l’article 117, paragraphe 1, sous e), de la directive 2001/83, sans préjudice des mesures prévues à l’article 116 de cette directive, la délivrance d’un médicament peut être interdite et ce médicament peut être retiré du marché lorsqu’il est considéré que les contrôles sur le médicament et/ou sur les composants et les produits intermédiaires de la fabrication n’ont pas été effectués ou lorsqu’une autre exigence ou obligation relative à l’octroi de l’autorisation de fabrication n’a pas été respectée.

71      Selon la Commission, dès lors que le procédé de fabrication sur le site de Visakhapatnam n’a pas respecté les bonnes pratiques, l’une des exigences ou des obligations relatives à l’octroi de l’autorisation de fabrication n’a pas été respectée.

72      La requérante fait valoir que l’article 117, paragraphe 1, sous e), de la directive 2001/83 ne traite pas de la « perte ultérieure des conditions d’autorisation », mais de la réunion de celles-ci au moment de l’octroi de l’autorisation. Dans cette mesure, il serait possible que la condition d’applicabilité de ladite disposition soit remplie alors qu’une autorisation de fabrication n’aurait d’emblée pas dû être octroyée, mais non en cas de la perte ultérieure des conditions. En tout état de cause, le respect des bonnes pratiques ne serait pas une condition d’octroi d’une autorisation de fabrication. Par ailleurs, ladite disposition ne permettrait pas de retirer un médicament du marché en raison de simples infractions aux bonnes pratiques lorsqu’il n’existerait pas de danger pour la santé des patients. Les variantes de l’article 117, paragraphe 1, de la directive 2001/83 viseraient toutes des défauts établis de qualité, d’efficacité et de sécurité d’un médicament.

73      À cet égard, il convient de relever qu’il est vrai que, en vertu de l’article 41 de la directive 2001/83, le respect des bonnes pratiques n’est pas une exigence pour obtenir une autorisation de fabrication, puisqu’une fabrication conforme aux bonnes pratiques n’est pas exigée avant que cette autorisation n’ait été octroyée. Toutefois, le respect des bonnes pratiques est une obligation relative à l’octroi de l’autorisation de fabrication. En effet, ainsi qu’il ressort de l’article 46, sous f), de la directive 2001/83, le titulaire de l’autorisation de fabrication est tenu de respecter les bonnes pratiques. Ainsi, l’octroi de l’autorisation de fabrication implique automatiquement l’obligation pour le titulaire de celle-ci de respecter les bonnes pratiques pour fabriquer des médicaments. En outre, ainsi qu’il a déjà été constaté (voir points 56 et 57 ci-dessus), le procédé de fabrication, qui doit être déclaré dans le cadre de la procédure d’octroi d’une autorisation de mise sur le marché, doit respecter les bonnes pratiques.

74      En ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel l’article 117, paragraphe 1, sous e), de la directive 2001/83 ne traite pas de la « perte ultérieure des conditions d’autorisation », mais de la réunion de celles-ci au moment de l’octroi de l’autorisation, il y a lieu de relever qu’une telle interprétation restrictive de ladite disposition ne résulte pas de son libellé. En effet, ce dernier ne limite pas le champ d’application de cette disposition au non-respect des conditions relatives à l’octroi de l’autorisation de fabrication qui doivent être réunies au moment de l’octroi de celle-ci. En outre, une telle interprétation restrictive n’est pas compatible avec les exigences résultant du principe de précaution. En effet, en vue de permettre aux autorités compétentes de prévenir certains risques pour la santé publique, la disposition en cause ne saurait être interprétée de manière restrictive. De plus, l’article 117 de la directive 2001/83 ne traite pas de l’autorisation, mais de l’interdiction de délivrer un médicament et de son retrait du marché. Son interprétation ne saurait donc être limitée à la prise en compte de la réunion des conditions d’autorisation au moment de l’octroi de cette dernière.

75      Enfin, la requérante fait valoir, en faisant référence aux autres variantes de l’article 117, paragraphe 1, de la directive 2001/83, que la variante en cause n’est applicable que s’il existe un danger pour la santé des patients. À cet égard, il convient de relever qu’il ressort clairement de l’article 117, paragraphe 1, de la directive 2001/83 que toutes les variantes visées par cette disposition s’appliquent indépendamment l’une de l’autre. En outre, l’exigence d’un danger pour la santé des patients n’est pas mentionnée dans la variante en cause. L’interprétation de cette variante en ce sens qu’un tel danger doit être exigé est également contraire au principe de précaution, qui impose aux autorités compétentes de prendre des mesures appropriées en vue de prévenir certains risques potentiels pour la santé publique (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Artegodan e.a./Commission, point 63 supra, point 184). Or, le non-respect des bonnes pratiques constitue un risque potentiel pour la santé publique. L’exigence d’un danger pour la santé des patients équivaudrait à l’exigence d’un risque concret, lequel n’est pas nécessaire au vu des implications du principe de précaution.

76      Par conséquent, l’argumentation de la requérante relative à l’article 117, paragraphe 1, sous e), de la directive 2001/83 doit être rejetée.

77      Au vu de tout ce qui précède, le premier moyen doit être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une méconnaissance des exigences de preuve

78      La requérante affirme, en substance, que la Commission n’a pas démontré, à suffisance de droit, la réunion des conditions visées aux articles 116 et 117 de la directive 2001/83.

79      S’agissant des exigences de preuve, qui incombent à la Commission pour démontrer que les conditions pour modifier les autorisations en cause, en vertu de l’article 116, premier alinéa, de la directive 2001/83, ainsi que pour retirer les médicaments concernés du marché et interdire leur délivrance, conformément à l’article 117, paragraphe 1, sous e), de cette directive, sont remplies, il y a lieu de relever que, dans le système d’autorisation préalable des médicaments, le titulaire d’une autorisation d’un médicament n’est pas tenu, durant la période de validité de cette autorisation, d’apporter la preuve de l’efficacité et/ou de l’innocuité de ce médicament. C’est à l’autorité compétente, en l’espèce la Commission, qu’il incombe d’établir que l’une des conditions alternatives relatives au retrait, à la modification ou à la suspension d’une autorisation de mise sur le marché, ou au retrait ou à l’interdiction de délivrance d’un médicament, énoncées par les articles 116 ou 117 de la directive 2001/83, est remplie. Le principe de précaution impose en effet de retirer, de suspendre ou de modifier une autorisation et/ou de retirer un médicament du marché et d’interdire sa délivrance en présence de données nouvelles suscitant des doutes sérieux quant à la sécurité du médicament considéré. Dans ce contexte, la Commission peut se limiter à fournir des indices sérieux et concluants, qui, sans écarter l’incertitude scientifique, permettent raisonnablement de douter de la composition qualitative et quantitative déclarée des médicaments en cause et du respect d’une des obligations relatives à l’octroi de l’autorisation de fabrication. La modification d’une autorisation ainsi que le retrait d’un médicament et l’interdiction de sa délivrance sont justifiés si l’existence d’un risque potentiel nouveau est étayée par des données ou des informations scientifiques et/ou médicales nouvelles objectives (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Artegodan e.a./Commission, point 63 supra, points 191 à 194).

80      En l’espèce, il convient de relever que la Commission a motivé en substance, dans les décisions provisoires et définitives examinées, la modification des autorisations des médicaments en cause ainsi que le retrait et l’interdiction provisoire et définitive de mise sur le marché de ceux-ci en renvoyant, à leur considérant 3 et à leur article 1er, paragraphe 1, aux conclusions scientifiques du comité annexées à ces décisions. Ces conclusions recommandaient la modification des autorisations et le retrait des lots de médicaments en cause du marché en vue des défaillances relatives au non-respect des bonnes pratiques constatées par le gouvernement de Haute-Bavière lors du contrôle effectué du 23 au 26 février 2010 et des données transmises par Acino Pharma lors de l’audience du 17 mars 2010, qui n’étaient, selon ces conclusions, pas aptes à neutraliser lesdites défaillances. En outre, les décisions définitives examinées font référence, à leur considérant 6, à des défaillances importantes constatées dans le procédé de fabrication du Clopidogrel.

81      Ce faisant, la Commission a, en fait, modifié les autorisations en cause, retiré les médicaments concernés et interdit, de manière provisoire et définitive, leur mise sur le marché au vu des défaillances constatées relatives au non-respect des bonnes pratiques. Ces défaillances, qui sont étayées par des données scientifiques nouvelles objectives, mentionnées dans le rapport de contrôle du gouvernement de Haute-Bavière, par rapport aux données disponibles lors de l’octroi des autorisations en cause, constituent, sur la base des conclusions scientifiques du comité (voir, en ce qui concerne la légalité de celles-ci, l’appréciation du quatrième moyen ci-après), des indices sérieux et concluants. Sans écarter l’incertitude scientifique, ces indices permettaient à la Commission de douter raisonnablement de la composition qualitative et quantitative déclarée des médicaments en cause et du respect d’une des obligations relatives à l’octroi de l’autorisation de fabrication.

82      S’agissant de la demande de la requérante qu’une expertise soit ordonnée aux fins de prouver que les infractions aux bonnes pratiques constatées n’altèrent pas la qualité des médicaments en cause, il convient de rappeler que le juge de l’Union contrôle, dans le cadre d’un recours en annulation en vertu de l’article 263 TFUE, la légalité des actes de la Commission. Ainsi qu’il résulte des développements ci-dessus, la Commission a satisfait, en l’espèce, aux exigences de preuve qui ne requièrent pas que les conditions visées aux articles 116 et 117 de la directive 2001/83 soient démontrées avec une certitude scientifique. La question de savoir si, dans le cadre de la présente procédure, il peut être prouvé que les infractions aux bonnes pratiques constatées n’altèrent pas la qualité des médicaments en cause n’est donc pas pertinente pour l’appréciation du cas d’espèce. Par conséquent, la demande d’expertise de la requérante doit être rejetée.

83      Il s’ensuit que l’argumentation de la requérante relative à la méconnaissance des exigences de preuve par la Commission doit être écartée et que, dès lors, le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du principe de proportionnalité

84      La requérante fait valoir que, dans la mesure où la Commission a ordonné le retrait des lots déjà fabriqués et, par conséquent, un retrait de l’autorisation de mise sur le marché des médicaments en cause de manière rétroactive, elle a violé le principe de proportionnalité. Après qu’Acino Pharma aurait apporté la preuve que la qualité des médicaments n’était pas altérée, ces mesures n’auraient pas été nécessaires pour répondre à l’objectif de protection de la santé publique, mais auraient eu un caractère de sanction. Selon la requérante, les doutes concernant la fiabilité du site de fabrication à Visakhapatnam auraient pu être pris en compte par le biais d’une modification des autorisations de mise sur le marché pour l’avenir.

85      Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le principe de proportionnalité, qui constitue l’un des principes généraux du droit de l’Union, exige que les actes des institutions ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante, et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (voir arrêt de la Cour du 21 juillet 2011, Etimine, C‑15/10, non encore publié au Recueil, point 124, et la jurisprudence citée).

86      La requérante ne conteste pas que le retrait du marché des lots déjà fabriqués constitue une mesure appropriée par rapport à la réalisation de l’objectif de protection de la santé humaine poursuivi par les décisions provisoires et définitives examinées. Toutefois, selon elle, cette mesure dépasse les limites de ce qui est nécessaire à la réalisation de l’objectif poursuivi et la Commission aurait pu adopter des mesures moins contraignantes, à savoir l’unique modification des autorisations de mise sur le marché pour l’avenir.

87      À cet égard, premièrement, il convient de rappeler que la Commission a ordonné le retrait du marché des lots déjà fabriqués après avoir présenté des indices sérieux et concluants qui, sans écarter l’incertitude scientifique, permettaient raisonnablement de douter du respect d’une des obligations relatives à l’octroi de l’autorisation de fabrication, en vertu de l’article 117, paragraphe 1, sous e), de la directive 2001/83, et qu’elle a donc satisfait aux exigences de preuve (voir points 81 et 82 ci-dessus).

88      Deuxièmement, il y a lieu de relever que la Commission pouvait, sans violer le principe de proportionnalité, considérer que l’unique modification des autorisations de mise sur le marché pour l’avenir, au titre de l’article 116 de la directive 2001/83, telle qu’envisagée par la requérante en tant que mesure moins contraignante, ne constituait pas une mesure suffisamment appropriée au vu de l’objectif de protection de la santé humaine. En effet, la modification des autorisations de mise sur le marché, prévue à l’article 116 de la directive 2001/83, ne visait pas le risque découlant de la présence effective des médicaments concernés sur le marché. Or, ce risque était visé par le retrait effectif du marché de ces médicaments, prévu à l’article 117 de la directive 2001/83. Ces considérations valent d’autant plus eu égard à l’exigence du respect du principe de précaution appliqué dans le domaine sensible de la protection de la santé humaine (voir, en ce sens, arrêt Etimine, point 85 supra, point 129).

89      La Commission ayant ordonné la modification des autorisations en cause ainsi que le retrait du marché des médicaments en cause et l’interdiction provisoire et définitive de leur mise sur le marché, en limitant ces mesures au seul site de Visakhapatnam et aux seuls lots y étant fabriqués conformément à l’article 117, paragraphe 2, de la directive 2001/83, elle n’a pas violé le principe de proportionnalité.

90      Le troisième moyen doit donc être rejeté.

 Sur le quatrième moyen, tiré d’une violation des formes substantielles de la procédure relative à l’avis du comité et d’une erreur d’appréciation de la Commission

91      La requérante affirme, en substance, que la Commission a violé les formes substantielles de la procédure en ce que l’avis du comité, sur lequel les décisions provisoires et définitives examinées étaient fondées, était illégal. En outre, en adoptant ces décisions, la Commission aurait manqué à exercer son pouvoir d’appréciation et commis une erreur d’appréciation.

92      S’agissant de l’étendue du contrôle juridictionnel, il convient de relever que la Commission a motivé, en substance, les mesures adoptées dans les décisions provisoires et définitives examinées en renvoyant, à leur considérant 3 et à leur article 1er, paragraphe 1, aux conclusions scientifiques du comité annexées à ces décisions. Dans ce contexte, aux fins de l’appréciation de la régularité d’une décision de la Commission fondée sur l’article 20, paragraphe 3, premier et second alinéas, du règlement n° 726/2004 ainsi que sur les articles 116 et 117 de la directive 2001/83, le juge de l’Union exerce son contrôle, d’une part, sur la légalité externe de l’avis scientifique du comité et, d’autre part, sur l’exercice, par la Commission, de son pouvoir d’appréciation (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Artegodan e.a./Commission, point 63 supra, point 199).

–       Sur la légalité de l’avis du comité

93      S’agissant de l’avis du comité, le Tribunal ne saurait substituer sa propre appréciation à celle du comité. En effet, le contrôle juridictionnel s’exerce seulement sur la régularité du fonctionnement du comité ainsi que sur la cohérence interne et la motivation de son avis. Sous ce dernier aspect, le juge est uniquement habilité à vérifier si l’avis contient une motivation permettant d’apprécier les considérations sur lesquelles il est fondé et s’il établit entre les constatations médicales et/ou scientifiques et les conclusions qu’il comporte un lien compréhensible. À cet égard, il convient de souligner que le comité est tenu d’indiquer, dans son avis, les principaux rapports et expertises scientifiques sur lesquels il s’appuie, et de préciser, en cas de divergence significative, les raisons pour lesquelles il s’écarte des conclusions des rapports ou des expertises produits par les entreprises concernées. Cette obligation s’impose tout spécialement en cas d’incertitude scientifique. En garantissant le caractère contradictoire et transparent de la consultation du comité, elle permet de s’assurer que la substance considérée a fait l’objet d’une évaluation scientifique approfondie et objective, fondée sur une confrontation des thèses scientifiques les plus représentatives et des positions scientifiques avancées par les laboratoires pharmaceutiques concernés (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Artegodan e.a./Commission, point 63 supra, point 200).

94      En l’espèce, la requérante fait valoir que l’avis du comité est illégal. En effet, le comité ne se serait pas intéressé aux éléments de preuve relatifs à la qualité des médicaments concernés qu’Acino Pharma aurait apportés. Le comité aurait ignoré le fait qu’Acino Pharma aurait apporté la preuve que les risques, couverts préventivement par les bonnes pratiques qui n’ont pas été observées, ne se seraient pas réalisés. En outre, l’expertise du comité serait contradictoire. D’une part, il aurait procédé à une appréciation abstraite en se fondant sur la rupture de la confiance dans le niveau de qualité et de sécurité. D’autre part, il se serait fondé sur la qualité du médicament in concreto. De plus, l’avis du comité ne serait pas suffisamment motivé.

95      À cet égard, il convient de relever que l’avis du comité décrit, dans la première partie du résumé complet des conclusions scientifiques, les défaillances dans le procédé de fabrication du Clopidogrel constatées par le gouvernement de Haute-Bavière dans son rapport de contrôle et la procédure administrative jusqu’à l’ouverture, le 18 mars 2010, de la procédure par la Commission, en vertu de l’article 20 du règlement n° 726/2004, et la demande de l’avis de l’EMA le même jour. Dans la deuxième partie, le comité a arrêté des conclusions au vu des constatations dans le rapport de contrôle et des données transmises par Acino Pharma lors de l’audience du 17 mars 2010. Ainsi, tout d’abord, il rappelle que, au vu de la modification des documents originaux de fabrication et de qualité, qui aurait été effectuée de façon organisée et soutenue au niveau du management, et des défaillances relatives au système d’assurance de qualité dans des domaines essentiels tels que l’entretien des locaux et des équipements, la documentation, le nettoyage et la validation, les inspecteurs ont conclu que les principes fondamentaux des bonnes pratiques n’avaient pas été respectés. Ensuite, il relève que, en raison de ces faits, il n’a pas abouti à la conclusion que le procédé de fabrication, utilisé pour fabriquer les médicaments en cause contenant le principe actif Clopidogrel, était le procédé évalué et décrit dans les autorisations de mise sur le marché. En outre, il conclut que les constatations mentionnées ci-dessus ont mené au manque de confiance en la qualité et la pureté des médicaments en cause. Les mesures correctrices proposées par le titulaire de l’autorisation de mise sur le marché ne pourraient a posteriori assurer la qualité des médicaments qui auraient été fabriqués sans assurance de qualité ni observation des bonnes pratiques. La qualité des médicaments concernés ne pourrait donc être garantie. Dans une troisième partie, le comité recommande la suppression du site de Visakhapatnam de la liste des sites autorisés à fabriquer le Clopidogrel et le retrait du marché de tous les lots de médicaments contenant du Clopidogrel, fabriqué sur ce site, jusqu’au niveau des pharmacies.

96      Dans la partie contenant la motivation relative à la modification de l’autorisation de mise sur le marché et relative au retrait des lots en cause, cet avis indique que le comité a vérifié le rapport de contrôle du gouvernement de Haute-Bavière et les données transmises par le titulaire de l’autorisation de mise sur le marché lors de l’audience du 17 mars 2010. L’avis mentionne, ensuite, quatre considérations. Selon la première, le site de Visakhapatnam ne remplissait pas, selon les constatations du gouvernement de Haute-Bavière, les bonnes pratiques, de sorte qu’il ne pouvait être garanti que le principe actif en cause a été fabriqué selon les bonnes pratiques. Selon la deuxième, l’infraction critique aux bonnes pratiques concernait la découverte de documents réécrits, modifiés et dès lors infidèles, par exemple des protocoles de fabrication de lots et des rapports de nettoyage. Selon la troisième, les infractions graves aux bonnes pratiques montraient, en outre, que la qualité du principe actif en cause ne pouvait être assurée. Selon la quatrième, les explications du titulaire de l’autorisation de mise sur le marché lors de l’audience ainsi que les mesures de correction proposées n’offraient pas de motivation suffisante ni de garantie que le procédé de fabrication utilisé pour la fabrication du principe actif Clopidogrel contenu dans les médicaments en cause était le procédé évalué et décrit dans l’autorisation de mise sur le marché. L’avis rappelle ensuite les recommandations mentionnées dans sa partie de résumé complet des conclusions scientifiques. De plus, il contient une recommandation relative à des mesures provisoires.

97      Il ressort, à suffisance de droit, de cet avis que le comité a recommandé les mesures relatives à la modification des autorisations en cause et au retrait de certains lots des médicaments concernés en raison des infractions aux bonnes pratiques constatées par le gouvernement de Haute-Bavière lors du contrôle effectué du 23 au 26 février 2010 et des données transmises par Acino Pharma lors de l’audience du 17 mars 2010. Ces infractions aux bonnes pratiques étaient, selon l’avis du comité, de nature à porter atteinte à l’assurance de qualité des médicaments en cause. En ajoutant que les mesures de correction proposées par Acino Pharma lors de l’audience ne pouvaient a posteriori garantir la qualité des médicaments, l’avis du comité indique un lien compréhensible entre les constatations et les recommandations.

98      Contrairement à ce qu’allègue la requérante, l’avis du comité n’est pas contradictoire. En effet, il est vrai que, dans cet avis, le comité, d’une part, fait référence à l’absence de confiance en la qualité et la pureté des médicaments en cause et, d’autre part, conclut que la qualité des médicaments concernés ne pouvait être garantie. Toutefois, les considérations dans l’avis du comité permettent clairement de connaître son raisonnement selon lequel les défaillances ayant affecté le procédé de fabrication étaient susceptibles d’avoir un impact sur la qualité des médicaments concernés, seul le procédé de fabrication autorisé pouvait assurer la qualité desdits médicaments et les mesures proposées par Acino Pharma ne pouvaient a posteriori garantir le respect de ce procédé de fabrication.

99      Il convient de relever que la production des données par Acino Pharma, après l’audience du 17 mars 2010, n’a pas remis en cause le lien compréhensible entre les constatations et les recommandations de l’avis du comité.

100    En effet, premièrement, s’agissant du rapport détaillé sur l’évaluation des risques, transmis par Acino Pharma le 22 mars 2010, la requérante fait valoir que celui-ci a montré, sur la base des données de pharmacovigilance ainsi que des résultats d’autres essais sur les lots produits, que les principes actifs, fabriqués sur le site de Visakhapatnam, étaient sans risque pour la santé des patients. En outre, les documents réécrits auraient fait l’objet d’une contre-expertise approfondie dont il résulterait que les données n’auraient pas subi de modifications.

101    À cet égard, par lettre du 25 mars 2010, l’EMA a confirmé à Acino Pharma que les indications fournies avaient fait l’objet d’un examen au sein du comité, mais que les conclusions de l’avis original du comité étaient maintenues. L’EMA a annexé à cette lettre l’appréciation de son rapporteur relative aux documents supplémentaires transmis par Acino Pharma. Ainsi qu’il ressort de cette annexe, le rapporteur a analysé en détail les données transmises par Acino Pharma. Pour ce qui est des données de pharmacovigilance, le rapporteur a considéré que ces données n’avaient qu’une valeur très limitée pour la détermination de problèmes potentiels de qualité. En ce qui concerne les analyses des lots affectés, il a relevé qu’Acino Pharma affirmait qu’il n’y avait pas eu d’impureté, mais qu’au lieu de se référer à cet égard à l’identification d’impuretés, Acino Pharma se contentait d’évoquer la présence d’autres principes actifs. En outre, il a regretté l’absence d’informations sur les conséquences toxicologiques dans l’analyse d’Acino Pharma. De plus, il a relevé que la méthode employée par Acino Pharma pour son analyse n’était pas précisée et que l’éventuelle contamination par d’autres substances que les trois autres principes actifs, sur lesquels les essais auraient porté, n’avait pas été vérifiée et qu’une contamination ne pouvait donc être exclue à cet égard. En ce qui concerne l’examen des documents réécrits, le rapporteur a fait valoir que le non-respect des bonnes pratiques à cet égard avait duré plus d’une année et que, dès lors, celui-ci ne constituait pas un cas isolé, mais plutôt la pratique habituelle. Selon le rapporteur, l’examen de documents réécrits n’était pas susceptible d’exclure que la manipulation de documents avait eu lieu dans une mesure plus large et qu’il existait encore d’autres données manipulées non découvertes.

102    En outre, l’EMA a annexé à sa lettre du 25 mars 2010 un rapport de pharmacovigilance relevant que les données fournies par Acino Pharma étaient dépourvues de pertinence pour exclure les risques engendrés par la violation des règles des bonnes pratiques en raison de l’insensibilité des mesures de pharmacovigilance à cet égard.

103    Il résulte de ce qui précède que l’EMA a examiné en détail et de manière compréhensible les données présentées par Acino Pharma le 22 mars 2010 et répondu à celle-ci.

104    Deuxièmement, s’agissant de la synthèse finale des résultats des tests visés dans le rapport détaillé sur l’évaluation des risques et la validation des méthodes de test employées ainsi que du rapport du 28 mai 2010 sur l’évaluation des risques de contamination du Clopidogrel fabriqué par l’usine à Visakhapatnam par d’autres principes actifs fabriqués durant la même période, transmis par Acino Pharma le 10 juin 2010, ces données permettaient, selon la requérante, de réfuter les objections exprimées par le comité et le rapporteur le 25 mars 2010. En effet, le seuil retenu d’une éventuelle contamination par les trois principes actifs, sur lesquels les essais auraient porté, aurait été validé dans le cadre d’analyses complémentaires. Le rapport du 28 mai 2010 aurait examiné, en substance, les objections présentées par le comité à l’encontre de la pertinence des résultats des tests figurant dans le rapport détaillé sur l’évaluation des risques. Tous les lots du principe actif Clopidogrel, qui auraient été fabriqués sur le site de Visakhapatnam et qui ne seraient pas encore périmés, auraient fait l’objet d’un contrôle portant sur leur contamination par les trois principes actifs éventuellement pertinents et aucun cas de contamination n’aurait été relevé. Selon ce rapport, il n’y aurait eu aucun risque pour la santé des patients, ce qui aurait été confirmé par une analyse détaillée de tous les rapports disponibles sur les effets secondaires signalés. Il aurait été constaté que chaque prélèvement du principe actif ainsi que chaque lot de comprimés était conforme aux normes et qu’il n’y avait donc aucune erreur dans la concentration du principe actif Clopidogrel. De plus, le rapport du 28 mai 2010 aurait permis de démontrer qu’il n’y avait pas de risque d’effets secondaires.

105    À cet égard, il convient de relever que, dans sa lettre du 23 juillet 2010 à la Commission, l’EMA l’a informée qu’elle maintenait ses recommandations concernant les médicaments contenant du Clopidogrel émises dans l’avis initial du comité. L’EMA a indiqué, dans cette lettre, que les données contenues dans la lettre d’Acino Pharma du 10 juin 2010 ne constituaient pas des informations nouvelles pertinentes qui n’avaient pas encore été prises en compte par le comité. Selon l’EMA, Acino Pharma n’avait pas présenté de justifications pour les infractions graves aux bonnes pratiques et n’avait pas abordé l’infraction critique aux bonnes pratiques relative à la réécriture des documents. L’EMA a fait valoir que l’infraction critique ne pouvait être écartée par des tests a posteriori du médicament. Selon l’EMA, la qualité, la sécurité et l’efficacité devaient être désignées et incorporées dans le médicament fini et ses ingrédients afin de maximaliser la probabilité que le principe actif ait été conforme à toutes les spécifications de qualité et de design. Elle a indiqué que, si, lors d’un contrôle, des documents falsifiés relatifs à la qualité étaient trouvés, il ne serait plus possible d’avoir confiance et de vérifier que toutes les sources de variabilité affectant le procédé de fabrication étaient identifiées, contrôlées et maintenues de manière appropriée par des mesurages de processus pertinents dans des limites critiques. Dès lors, il ne serait pas possible d’être sûr que le principe actif final ait toujours ses caractéristiques prédéfinies. Selon l’EMA, il serait contraire aux principes, reconnus par les autorités européennes et par les industries européennes, concernant le besoin fondamental de bonnes pratiques relatives aux médicaments et à leurs principes actifs, d’autoriser qu’un médicament contenant une substance active fabriquée selon un procédé de fabrication inconnu et sans traçabilité soit donné à un patient alors que son profil d’impureté et que ses caractéristiques physiques pourraient être altérés.

106    Il résulte de ce qui précède que, l’EMA ayant examiné en détail les données présentées par Acino Pharma le 10 juin 2010, le lien compréhensible entre les constatations et les recommandations de l’avis n’est pas remis en cause. En effet, l’EMA a expliqué, de manière compréhensible, en faisant référence à l’infraction critique et aux infractions graves aux bonnes pratiques, que, dès lors que la traçabilité du procédé de fabrication n’était plus possible, la qualité des médicaments en cause ne pouvait plus être garantie. En indiquant, en particulier, qu’il ne serait pas possible d’examiner si toutes les sources de variabilité affectant le procédé de fabrication étaient identifiées, elle a conclu, de manière compréhensible, à l’insuffisance des données transmises par Acino Pharma pour garantir la qualité des médicaments concernés.

107    S’agissant du fait que la lettre de l’EMA du 23 juillet 2010 n’a pas été transmise à Acino Pharma et que cette dernière n’était donc pas informée de l’analyse faite par l’EMA des données transmises par elle le 10 juin 2010, il y a lieu de relever que ce fait ne saurait concerner que l’obligation de motivation des décisions définitives examinées qui sera examinée dans le cadre du cinquième moyen du présent recours.

108    L’argumentation de la requérante relative à une prétendue illégalité de l’avis du comité doit donc être rejetée.

–       Sur l’exercice du pouvoir d’appréciation par la Commission

109    La requérante fait valoir, en substance, que la Commission a manqué à l’exercice de son pouvoir d’appréciation et qu’elle a commis une erreur d’appréciation.

110    En premier lieu, s’agissant de l’argumentation de la requérante selon laquelle la Commission n’aurait pas exercé son pouvoir d’appréciation, mais aurait uniquement fait référence à l’avis du comité, il importe de relever que la motivation des décisions provisoires et définitives examinées ne se borne pas à une simple référence à cet avis, mais qu’elle mentionne également des considérations propres à la Commission permettant de percevoir que celle-ci a exercé son pouvoir d’appréciation pour adopter des mesures prévues respectivement aux articles 116 et 117 de la directive 2001/83. En effet, la Commission a indiqué, au considérant 2 de ces décisions, qu’elle avait ouvert une procédure au titre de l’article 20, paragraphe 2, du règlement n° 726/2004 afin d’examiner si des mesures pour assurer la qualité des médicaments concernés devaient être prises et, notamment, si les autorisations de mise sur le marché en cause devaient être suspendues, modifiées ou retirées. En outre, le considérant 3 des décisions provisoires examinées énonce qu’il résulte de l’appréciation scientifique du comité que des mesures provisoires devraient être prises afin de retirer du marché certains lots des médicaments concernés. S’agissant des décisions définitives examinées, la Commission a indiqué, à leur considérant 3, qu’il résultait de l’appréciation scientifique du comité que les autorisations des médicaments concernés devraient être modifiées et que certains lots de ces médicaments devraient être retirés du réseau de distribution. En outre, le considérant 5 des décisions définitives examinées énonce que les contrôles des médicaments et/ou de leur composition et les obligations liées au procédé de fabrication, prévues par le règlement n° 726/2004, ont une importance essentielle pour garantir la qualité des médicaments mis sur le marché de l’Union et pour s’assurer que leur composition qualitative est telle qu’elle est déclarée et pour protéger la santé publique. De plus, selon le considérant 6 des décisions définitives examinées, des défaillances importantes ont été décelées dans le procédé de fabrication du principe actif utilisé dans les médicaments en cause.

111    En outre, l’argumentation de la requérante selon laquelle la Commission n’aurait pas exercé son pouvoir d’appréciation visé à l’article 20, paragraphe 3, premier alinéa, du règlement n° 726/2004, en indiquant qu’elle n’aurait pas eu d’autre choix que d’ordonner le retrait du marché des médicaments concernés, doit être rejetée. En effet, s’il est vrai que cette disposition autorise la Commission à adopter les mesures provisoires nécessaires, elle doit être lue conjointement avec l’article 81, paragraphe 2, et l’article 20, paragraphe 1, second alinéa, de ce règlement ainsi qu’avec les articles 116 et 117 de la directive 2001/83. Selon ces dispositions, la Commission avait le choix entre différentes mesures, à savoir, d’une part, le retrait, la suspension ou la modification d’une autorisation de mise sur le marché, conformément à l’article 116 de cette directive, et, d’autre part, le retrait du marché d’un médicament et l’interdiction de sa délivrance, conformément à l’article 117 de ladite directive. La Commission ayant ordonné la modification des autorisations en cause ainsi que le retrait du marché des médicaments concernés et l’interdiction provisoire et définitive de leur mise sur le marché, en limitant ces mesures au seul site de Visakhapatnam et aux seuls lots y étant fabriqués, conformément à l’article 117, paragraphe 2, de la directive 2001/83, elle a exercé son pouvoir d’appréciation en respectant le principe de proportionnalité (voir point 89 ci-dessus).

112    En second lieu, la requérante fait valoir que la Commission a commis une erreur d’appréciation. Selon la requérante, le non-respect des bonnes pratiques n’entraîne pas nécessairement l’adoption de mesures par l’autorité compétente.

113    À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie, lorsqu’une institution est appelée à effectuer des évaluations complexes, elle dispose d’un large pouvoir d’appréciation dont l’exercice est soumis à un contrôle juridictionnel se limitant à vérifier si la mesure en cause n’est pas entachée d’erreurs manifestes, de détournement de pouvoir ou si l’autorité compétente n’a pas manifestement dépassé les limites de son pouvoir d’appréciation (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Artegodan e.a./Commission, point 63 supra, point 201).

114    En l’espèce, la Commission a, en particulier, suivi les recommandations dans l’avis du comité, qui présente une importance décisive dans le cadre de la procédure devant elle (voir, en ce sens et par analogie, arrêt Artegodan e.a./Commission, point 63 supra, point 197) et qui n’était pas illégal, contrairement à ce que la requérante affirme. En outre, elle pouvait, à bon droit, considérer que les obligations liées au procédé de fabrication ont une importance essentielle pour garantir la qualité des médicaments mis sur le marché de l’Union et pour s’assurer que leur composition qualitative est telle qu’elle est déclarée et pour protéger la santé publique, et que les infractions aux bonnes pratiques constatées lors du contrôle ont mené à des défaillances importantes dans le procédé de fabrication en cause. Au vu de ces éléments, la Commission pouvait, à bon droit, conclure, d’une part, que les médicaments en cause n’avaient pas la composition qualitative et quantitative déclarée et, d’autre part, qu’une obligation relative à l’octroi des autorisations de fabrication n’avait pas été respectée. Par conséquent, les décisions provisoires et définitives examinées ne sont pas entachées d’une erreur manifeste d’appréciation et la Commission n’a pas non plus manifestement dépassé les limites de son pouvoir d’appréciation en modifiant les autorisations de mise sur le marché en cause ainsi qu’en retirant du marché les médicaments concernés et en interdisant, de manière provisoire et définitive, leur mise sur le marché.

115    Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’autre argumentation avancée par la requérante à cet égard.

116    Premièrement, la requérante affirme que les décisions provisoires et définitives examinées étaient illégales en raison de la pratique décisionnelle de la Commission. En effet, une simple infraction aux règles des bonnes pratiques ne pourrait constituer le fondement d’une modification de l’autorisation de mise sur le marché ni la base d’un retrait, lorsque, dans un autre cas, aucun retrait automatique ni même provisoire n’aurait eu lieu, bien qu’une contamination du médicament autorisé ait été établie de manière positive. Selon la requérante, une infraction aux bonnes pratiques ne démontre aucune contamination concrète du médicament et encore moins un danger concret pour la santé des patients.

117    Or, une telle argumentation, qui constitue, en substance, un grief tiré d’une prétendue violation du principe d’égalité de traitement, est irrecevable, dès lors qu’elle a été avancée pour la première fois dans la réplique. Conformément à l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. La requérante fait référence, au soutien de son argumentation, à deux communiqués de presse de l’EMA datant du 22 juillet et du 18 novembre 2010, donc bien avant le dépôt du recours le 24 novembre 2010, de sorte que les conditions visées à l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure ne sont pas remplies.

118    En tout état de cause, une telle argumentation doit être écartée comme non fondée. En effet, la requérante n’a pas démontré, à suffisance de droit, les raisons pour lesquelles les situations ayant donné lieu aux décisions provisoires et définitives examinées sont comparables à celles dans lesquelles la Commission a antérieurement estimé qu’aucun retrait des médicaments n’était indiqué. Dans le cas précédent auquel se réfère la requérante, aucune infraction aux bonnes pratiques n’avait été commise. Ce cas concernait la question de savoir si le rapport bénéfice/risque d’un vaccin était favorable. Ainsi qu’il ressort du communiqué de presse de l’EMA du 22 juillet 2010, il appartenait à l’EMA de déterminer dans ce cas si, du fait de la contamination constatée du vaccin en cause, le rapport bénéfice/risque devait désormais être considéré comme défavorable dans les conditions normales d’emploi. Les circonstances du cas d’espèce sont donc tout à fait différentes et ne sont pas comparables à celles ayant donné lieu au non-retrait du vaccin en cause. Contrairement à ce qu’allègue la requérante, leur traitement n’est donc pas contradictoire.

119    Deuxièmement, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel le document de l’EMA relatif à la procédure pour traiter les cas de violation grave des bonnes pratiques ou annuler/suspendre les certificats de conformité, exigeant donc une action administrative coordonnée, prévoirait que l’inobservation des obligations fondamentales des bonnes pratiques n’entraînerait pas nécessairement l’adoption de mesures par l’autorité compétente, il convient de relever que le point 6.5.2 de ce document précise également que, en cas de violation grave des bonnes pratiques dans un site de production situé dans un pays tiers, il peut être nécessaire de modifier l’autorisation de mise sur le marché de façon à rayer ce site de l’autorisation. De même, le point 6.8.1 dudit document explique que, en cas de violation grave des bonnes pratiques, il est également possible de prononcer une interdiction de délivrance du médicament fabriqué.

120    Troisièmement, en ce qui concerne la pertinence de la recommandation du gouvernement de Haute-Bavière selon laquelle le retrait des lots délivrés n’était pas nécessaire faute de preuve que les produits concernés étaient nocifs pour les patients (voir point 3 ci-dessus), il est vrai que, conformément au point 6.8.1 du document de l’EMA visé au point 119 ci-dessus, sur la base de l’information contenue dans le rapport de contrôle, l’autorité de surveillance, en l’espèce, le gouvernement de Haute-Bavière, doit décider, en plus d’autres actions, si elle recommande l’interdiction de délivrance des médicaments concernés. Toutefois, en vertu de l’article 20, paragraphe 3, du règlement n° 726/2004, c’est à la Commission de décider, sur la base des éléments scientifiques, les mesures à adopter.

121    Quatrièmement, il y a lieu de rejeter l’argumentation de la requérante selon laquelle le Verwaltungsgericht de Cologne aurait, dans son arrêt du 9 octobre 2012, point 17 supra, constaté, dans un cas similaire, l’illégalité des mesures relatives à des médicaments contenant des substances fabriquées à Visakhapatnam. En effet, au-delà du fait que cet arrêt ne lie pas le Tribunal, il convient de constater que l’affaire ayant donné lieu audit arrêt n’avait pas pour objet des autorisations centralisées octroyées conformément au règlement n° 726/2004, mais des autorisations nationales octroyées par une autorité allemande. En outre, il ressort de cet arrêt que ce tribunal a considéré que, compte tenu des conclusions du gouvernement de Haute-Bavière, il n’existait manifestement pas le moindre élément indiquant une diminution de la qualité des médicaments contenant des substances fabriquées à Visakhapatnam et que, en dépit des infractions aux bonnes pratiques, aucun défaut de qualité n’était démontrable. Or, d’une part, il convient de relever que la Commission a satisfait, en l’espèce, aux exigences de preuve qui ne requièrent pas que les conditions visées aux articles 116 et 117 de la directive 2001/83 soient démontrées avec une certitude scientifique (voir points 79 à 81 ci-dessus). D’autre part, il y a lieu de constater qu’il ressort de l’arrêt du Verwaltungsgericht de Cologne, point 17 supra, que, dans l’affaire devant ce tribunal, le rapport détaillé sur l’évaluation des risques, produit par Acino Pharma, n’a pas été contesté en ce qui concerne son contenu. En revanche, dans la présente affaire, il ressort des développements aux points 93 à 106 ci-dessus que le lien compréhensible entre les constatations et les recommandations de l’avis du comité n’a pas été remis en cause par les données présentées par Acino Pharma.

122    Il s’ensuit que l’argumentation de la requérante relative à une prétendue appréciation erronée de la Commission doit être rejetée, tout comme le quatrième moyen dans son ensemble.

 Sur le cinquième moyen, tiré d’une violation de l’obligation de motivation

123    La requérante fait valoir, en substance, que la Commission n’a pas respecté son obligation d’indiquer de façon précise les motifs pertinents pour l’adoption des décisions provisoires et définitives examinées. Le seul renvoi à l’avis scientifique du comité ne saurait suffire lorsque la Commission dispose d’un pouvoir d’appréciation. La motivation des décisions en cause ne permettrait ni de déterminer les bases juridiques ni d’expliquer les liens existants entre l’infraction aux bonnes pratiques et les mesures ordonnées. En particulier, la lettre de l’EMA du 23 juillet 2010 n’aurait pas été transmise à Acino Pharma et cette dernière n’aurait donc pas été informée de l’analyse faite par l’EMA des données transmises par elle le 10 juin 2010. La question de savoir si et comment la Commission a exercé son pouvoir d’appréciation serait obscure.

124    À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 296, deuxième alinéa, TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. L’exigence de motivation doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués ainsi que de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir arrêt de la Cour du 1er juillet 2008, Chronopost et La Poste/UFEX e.a., C‑341/06 P et C‑342/06 P, Rec. p. I‑4777, point 88, et la jurisprudence citée).

125    En outre, en vertu de l’article 81, paragraphe 1, du règlement n° 726/2004, qui rappelle explicitement l’obligation générale de motivation visée à l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, toute décision octroyant, refusant, modifiant, suspendant ou retirant une autorisation de mise sur le marché prise en vertu de ce règlement doit indiquer de façon précise les motifs sur lesquels elle se fonde.

126    En l’espèce, premièrement, il convient de relever que les décisions provisoires et définitives examinées indiquent respectivement, comme base légale, les premier et second alinéas de l’article 20, paragraphe 3, du règlement n° 726/2004.

127    Deuxièmement, il ressort de l’article 1er, paragraphe 1, et du considérant 3 de ces décisions ainsi que du considérant 6 des décisions définitives examinées que la modification des autorisations en cause ainsi que le retrait du marché des médicaments concernés et l’interdiction provisoire et définitive de leur mise sur le marché étaient ordonnées sur la base des conclusions scientifiques du comité. En outre, au considérant 5 des décisions définitives examinées, la Commission a indiqué que les contrôles des médicaments et/ou de leur composition et les obligations liées au procédé de fabrication, prévues par le règlement n° 726/2004, avaient une importance essentielle pour garantir la qualité des médicaments mis sur le marché de l’Union et pour s’assurer que leur composition qualitative était telle qu’elle était déclarée et pour protéger la santé publique. De plus, selon le considérant 6 des décisions définitives examinées, des défaillances importantes ont été décelées dans le procédé de fabrication du principe actif utilisé dans les médicaments en cause.

128    Dans le contexte des conclusions scientifiques du comité, annexées aux décisions provisoires et définitives examinées, selon lesquelles la modification des autorisations en cause et le retrait du marché des lots de médicaments concernés étaient recommandés au vu de l’absence de garantie de qualité de ces médicaments au motif que les bonnes pratiques n’étaient pas respectées, Acino Pharma pouvait comprendre, à suffisance de droit, que la Commission avait adopté les mesures en cause en raison de l’absence de garantie de qualité des médicaments du fait des défaillances importantes relative au procédé de fabrication suscitées par l’infraction critique et les infractions graves aux bonnes pratiques.

129    S’il est vrai que les décisions provisoires et définitives examinées ne mentionnent pas les articles 116 et 117 de la directive 2001/83, il n’en demeure pas moins que l’article 20, paragraphe 1, second alinéa, du règlement n° 726/2004 fait référence aux mesures prévues au titre XI de ladite directive, à savoir aux articles 111 à 119, à l’égard d’un médicament. En outre, l’article 81, paragraphe 2, du règlement n° 726/2004 dispose qu’une autorisation de mise sur le marché d’un médicament relevant de ce règlement ne peut être modifiée que selon les procédures et pour les motifs prévus audit règlement. Au vu de ces considérations, il était donc, à suffisance de droit, compréhensible que la modification des autorisations en cause, le retrait du marché des médicaments concernés et l’interdiction provisoire et définitive de leur mise sur le marché étaient fondés sur les dispositions des articles 116 et 117 de la directive 2001/83. Par ailleurs, Acino Pharma s’est également référée à ces dispositions dans la requête.

130    S’agissant, en particulier, du fait que la lettre de l’EMA du 23 juillet 2010 n’a pas été transmise à Acino Pharma et que cette dernière n’était donc pas informée de l’analyse faite par l’EMA des données transmises par elle le 10 juin 2010, il convient de relever qu’il résulte d’une jurisprudence bien établie qu’un acte est suffisamment motivé dès lors qu’il est intervenu dans un contexte connu de l’intéressé, qui lui permet de comprendre la portée de la mesure prise à son égard (voir arrêt du Tribunal du 14 octobre 2009, Bank Melli Iran/Conseil, T‑390/08, Rec. p. II‑3967, point 82, et la jurisprudence citée). Dès lors que tel est le cas en l’espèce du fait qu’Acino Pharma avait connaissance de l’avis du comité ainsi que des observations de l’EMA dans sa lettre du 25 mars 2010 et du fait que, le 2 juillet 2010, la Commission avait déclaré à Acino Pharma que le contenu de sa lettre du 10 juin 2010 faisait l’objet d’un examen approfondi en vue de l’adoption d’une décision définitive, la Commission n’a pas violé l’obligation de motivation lui incombant.

131    Ce moyen doit donc être rejeté.

132    Il résulte de tout ce qui précède qu’il n’y a plus lieu de statuer sur le recours, dans la mesure où il est dirigé contre les décisions C (2010) 2204 et C (2010) 2208, du 29 mars 2010, et contre les décisions C (2010) 6429 et C (2010) 6436, du 16 septembre 2010, et que le recours doit être rejeté comme non fondé pour le surplus.

 Sur les dépens

133    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, premier alinéa, et paragraphe 6, du règlement de procédure, d’une part, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’il est conclu en ce sens et, d’autre part, en cas de non-lieu à statuer, le Tribunal règle librement les dépens.

134    La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission. Compte tenu des circonstances du cas d’espèce, il doit en aller de même en ce qui concerne le non-lieu à statuer.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Il n’y a plus lieu de statuer sur le recours dans la mesure où il est dirigé contre les décisions C (2010) 2204 et C (2010) 2208 de la Commission, du 29 mars 2010, et contre les décisions C (2010) 6429 et C (2010) 6436 de la Commission, du 16 septembre 2010.

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      Acino AG est condamnée aux dépens.

Dittrich

Wiszniewska-Białecka

Prek

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 7 mars 2013.

Signatures


* Langue de procédure : l'allemand.