Language of document : ECLI:EU:T:2007:396

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

17 décembre 2007 (*)

« Référé – Directive 91/414/CEE – Demande de sursis à exécution – Recevabilité – Défaut d’urgence »

Dans l’affaire T‑367/07 R,

Dow AgroSciences Ltd, établie à Hitchin, Hertforshire (Royaume-Uni),

Dow AgroSciences BV, établie à Hoek (Pays Bas),

Dow AgroSciences Danmark A/S, établie à Kongens Lyngby (Danemark),

Dow AgroSciences GmbH, établie à Munich (Allemagne),

Dow AgroSciences, établie à Mougins (France),

Dow AgroSciences Export, établie à Mougins,

Dow AgroSciences Hungary kft, établie à Budapest (Hongrie),

Dow AgroSciences Italia Srl, établie à Milan (Italie),

Dow AgroSciences Polska sp. z o.o., établie à Varsovie (Pologne),

Dow AgroSciences Distribution, établie à Mougins,

Dow AgroSciences Iberica, SA, établie à Madrid, (Espagne),

Dow AgroSciences s.r.o., établie à Prague (République tchèque),

Dow AgroSciences LLC, établie à Indianapolis, Indiana (États-Unis),

représentées par Mes C. Mereu et K. Van Maldegem, avocats,

parties requérantes,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. B. Doherty et L. Parpala, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande de sursis à l’exécution de la décision 2007/437/CE de la Commission, du 19 juin 2007, concernant la non-inscription de l’haloxyfop-R dans l’annexe I de la directive 91/414/CEE du Conseil et le retrait des autorisations de produits phytopharmaceutiques contenant cette substance (JO L 163, p. 22), jusqu’au prononcé de l’arrêt au principal,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

rend la présente

Ordonnance

 Cadre juridique

1        La directive 91/414/CEE du Conseil, du 15 juillet 1991, concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques (JO L 230, p. 1, ci-après la « directive »), établit notamment le régime communautaire applicable à l’autorisation et au retrait de l’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques.

2        Le neuvième considérant de la directive énonce que les dispositions régissant l’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques doivent assurer un niveau élevé de protection, qui doit notamment éviter l’autorisation de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques dont les risques pour la santé, les eaux souterraines et l’environnement n’ont pas fait l’objet de recherches appropriées. Ce considérant indique également que l’objectif d’améliorer la production végétale ne doit pas porter préjudice à la protection de la santé humaine et de l’environnement.

3        L’article 2 de la directive définit les produits phytopharmaceutiques comme étant, notamment, les substances actives destinées à détruire les végétaux indésirables. Cet article définit les substances actives comme étant des substances ou micro-organismes exerçant une action générale ou spécifique sur les organismes nuisibles ou sur les végétaux, parties de végétaux ou produits végétaux.

4        L’article 4, paragraphe 1, de la directive prévoit que les États membres veillent à ce qu’un produit phytopharmaceutique soit autorisé uniquement si ses substances actives sont énumérées à l’annexe I de la directive.

5        Les substances actives qui ne sont pas inscrites à l’annexe I de la directive peuvent bénéficier, dans certaines conditions, d’un régime dérogatoire transitoire. Selon l’article 8, paragraphe 2, de la directive, un État membre pouvait, pendant une période de douze ans à compter de la date de notification de la directive, autoriser la mise sur son marché national de produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non visées à l’annexe I, qui étaient déjà sur le marché deux ans après la date de notification de la directive, soit le 25 juillet 1993. La Commission devait entamer un programme de travail pour l’examen graduel de ces substances actives. Par la suite, il pouvait être décidé que ladite substance serait ou non incluse à l’annexe I de la directive. Les États membres devaient assurer que les autorisations pertinentes, selon le cas, seraient accordées, retirées ou modifiées.

6        Conformément à ces dispositions, la Commission a entamé un programme de travail pour l’examen graduel des substances actives, dans le cadre duquel les parties intéressées souhaitant obtenir l’inscription d’une telle substance à l’annexe I devaient fournir à la Commission et aux États membres toutes les données nécessaires dans un délai déterminé.

7        Le règlement (CEE) n° 3600/92 de la Commission, du 11 décembre 1992, établissant les modalités de mise en œuvre de la première phase du programme de travail visé à l’article 8, paragraphe 2, de la directive (JO L 366, p. 10), a organisé la procédure d’évaluation pour une première série de substances en vue de leur inscription éventuelle à l’annexe I de la directive.

8        Ensuite, par son règlement (CE) nº 451/2000, du 28 février 2000, établissant les modalités de mise en œuvre des deuxième et troisième phases du programme de travail visé à l’article 8, paragraphe 2, de la directive (JO L 55, p. 25), la Commission a prévu l’évaluation d’une deuxième et d’une troisième série de substances actives en vue de leur inscription éventuelle à l’annexe I de la directive.

9        Parmi les substances actives faisant partie de la deuxième série figure l’haloxyfop-R – objet de la présente procédure –, un produit graminicide, utilisé pour l’élimination des graminées dans les cultures telles que le soja, le colza, la betterave sucrière, le coton et le tournesol. Il appartient à la classe des herbicides.

10      La procédure instituée par le règlement nº 451/2000 débutait par une notification d’intérêt, prévue à son article 4, paragraphe 1, qui devait être adressée pour le 31 août 2000 au plus tard à l’État membre rapporteur désigné à l’annexe I du règlement, à savoir le Royaume de Danemark pour l’haloxyfop-R, par le producteur souhaitant obtenir l’inscription à l’annexe I de la directive.

11      En vertu de l’article 6, paragraphe 1, du règlement nº 451/2000, il appartenait à chaque auteur d’une notification de transmettre à l’État membre rapporteur un dossier sommaire et un dossier complet, tels que définis à l’article 6, paragraphes 2 et 3, de ce même règlement.

12      Le délai pour la soumission de ces dossiers, ainsi que d’informations pertinentes pouvant contribuer à l’évaluation des substances actives, a été fixé au 30 avril 2002, en vertu des dispositions combinées de l’article 5, paragraphe 4, sous c) et d), du règlement nº 451/2000 et de l’article 2 du règlement (CE) nº 703/2001 de la Commission, du 6 avril 2001, fixant les substances actives des produits phytopharmaceutiques qui doivent être évaluées au cours de la deuxième phase du programme de travail visé à l’article 8, paragraphe 2, de la directive et modifiant la liste des États membres désignés comme rapporteurs pour ces substances (JO L 98, p. 6).

13      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, du règlement nº 451/2000, l’État membre rapporteur était tenu de présenter à la Commission, au plus tard six mois après réception de tous les dossiers relatifs à une substance active, un rapport sur le caractère complet des dossiers transmis. Pour les substances actives faisant l’objet d’un dossier considéré comme complet, l’État membre rapporteur procédait à l’évaluation du dossier.

14      Conformément à l’article 8, paragraphe 1, du règlement nº 451/2000, dans sa rédaction initiale, l’État membre rapporteur devait présenter à la Commission, le plus rapidement possible et au plus tard douze mois après que le dossier avait été considéré comme complet, son rapport d’évaluation du dossier, qui contenait la recommandation d’inscrire la substance active à l’annexe I de la directive ou de ne pas l’inscrire.

15      Les dispositions de l’article 8 du règlement nº 451/2000 ont été modifiées par l’article 20 du règlement (CE) nº 1490/2002 de la Commission, du 14 août 2002, établissant des modalités supplémentaires de mise en œuvre de la troisième phase du programme de travail visé à l’article 8, paragraphe 2, de la directive et modifiant le règlement nº 451/2000 (JO L 224, p. 23), en ce sens qu’une étape procédurale supplémentaire a été introduite.

16      Ainsi, l’État membre rapporteur – tout en recommandant à la Commission d’inscrire la substance active à l’annexe I de la directive ou de ne pas l’inscrire – devait adresser un projet de rapport d’évaluation du dossier à l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) dans les meilleurs délais et au plus tard douze mois après que le dossier avait été jugé complet (article 8, paragraphe 1, du règlement nº 451/2000). À ce stade de la procédure, si la soumission de nouvelles études n’était, en principe, pas acceptée, l’État membre rapporteur pouvait inviter les auteurs de la notification à soumettre des données complémentaires, nécessaires à la clarification du dossier (article 8, paragraphe 2, du règlement nº 451/2000).

17      L’EFSA devait alors transmettre le projet de rapport d’évaluation de l’État membre rapporteur aux autres États membres et pouvait organiser une consultation d’experts (examen collégial). À ce stade de la procédure, la soumission de nouvelles études n’était pas acceptée ; toutefois, l’État membre rapporteur pouvait, en accord avec l’EFSA, inviter les auteurs de la notification à soumettre, dans des délais spécifiés, des données complémentaires que l’État membre rapporteur ou l’EFSA jugeait nécessaires à la clarification du dossier (article 8, paragraphe 5, du règlement nº 451/2000).

18      L’EFSA devait évaluer le projet de rapport d’évaluation de l’État membre rapporteur et transmettre à la Commission un avis sur la conformité de la substance active aux exigences de sécurité de la directive dans un délai d’un an après la réception dudit projet de rapport. Le cas échéant, l’EFSA pouvait formuler un avis sur les options considérées comme satisfaisant aux exigences de sécurité (article 8, paragraphe 7, du règlement nº 451/2000).

19      Au plus tard six mois après la réception de l’avis de l’EFSA, la Commission était tenue de proposer, selon le cas, une décision refusant l’inscription de la substance active à l’annexe I de la directive et visant le retrait, par les États membres, des autorisations de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques contenant cette substance ou une directive visant l’inscription de ladite substance à l’annexe I de la directive (article 8, paragraphe 8, du règlement nº 451/2000).

20      L’acte final devait être adopté conformément à la procédure dite de « comitologie » prévue par les dispositions combinées de la décision 1999/468/CE du Conseil, du 28 juin 1999, fixant les modalités de l’exercice des compétences d’exécution conférées à la Commission (JO L 184, p. 23), de l’article 19 de la directive et de l’article 2, sous b), du règlement nº 1490/2002, c’est-à-dire sur avis du comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale.

 Faits à l’origine du litige

21      Dow AgroSciences Ltd, Dow AgroSciences BV, Dow AgroSciences Danmark A/S, Dow AgroSciences, Dow AgroSciences Export, Dow AgroSciences Hungary kft, Dow AgroSciences Polska sp. z o.o., Dow AgroSciences Distribution, Dow AgroSciences Iberica, SA et Dow AgroSciences s.r.o., requérantes dans la présente affaire, sont des filiales à 100 % de la requérante Dow AgroSciences LLC, laquelle est une société d’agriculture établie aux États-Unis, qui développe, fabrique et commercialise des produits et des solutions dans le domaine du contrôle des parasites, de l’agriculture et de la culture biotechnologique. Dow AgroSciences LLC est, pour sa part, une filiale à 100 % de Dow Chemical Co.

22      Dow AgroSciences GmbH et Dow AgroSciences Italia Srl, également requérantes, appartiennent à des sociétés qui sont également contrôlées par Dow Chemical Co.

23      En ce qui concerne l’haloxyfop-R, les requérantes sont les seuls fabricants et distributeurs dans le monde entier de cette substance active. Les produits à base d’haloxyfop-R sont fabriqués par Dow AgroSciences dans l’usine de Drusenheim (France), puis distribués par les autres requérantes européennes sur le marché communautaire. Les produits sont vendus aux consommateurs finaux par des distributeurs locaux.

24      Dow AgroSciences Ltd a, avant le 1er septembre 2000, notifié à la Commission son souhait d’obtenir l’inscription de l’haloxyfop-R à l’annexe I de la directive. La Commission a accepté cette notification et inscrit le nom de Dow AgroSciences Ltd dans la liste des « auteurs de notification ». Dow AgroSciences Ltd a soumis au Royaume de Danemark, l’État membre rapporteur, un dossier. Après l’avoir considéré comme complet, cet État a procédé à son évaluation, en application de l’article 8 du règlement n° 451/2000.

25      Le Royaume de Danemark a soumis son projet de rapport d’évaluation à l’EFSA le 21 novembre 2003 aux fins d’un examen collégial. Ce projet de rapport d’évaluation – qui requérait la fourniture de données scientifiques supplémentaires – a fait l’objet d’un examen collégial par les États membres et l’EFSA. Cet examen a duré du 26 mars 2004 au 28 juillet 2006, l’EFSA et les États membres s’étant accordés, lors de la première réunion d’évaluation en septembre 2004, sur la nécessité de données supplémentaires.

26      Pendant cette période, Dow AgroSciences Ltd a déposé auprès du Royaume de Danemark et de l’EFSA plusieurs documents scientifiques relatifs à l’évaluation de l’haloxyfop-R. La plupart de ces données supplémentaires n’ont pas été prises en considération.

27      Le 28 juillet 2006, l’EFSA a présenté à la Commission ses « conclusions relatives à l’examen collégial de l’évaluation du risque pesticide de la substance active haloxyfop-R ». Les États membres et la Commission ont alors procédé, au sein du comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale, à l’examen de la problématique. Après avoir reçu des observations de Dow AgroSciences Ltd sur les conclusions de l’EFSA, la Commission a, le 24 novembre 2006, établi son rapport d’examen de l’haloxyfop-R, dans lequel elle proposait de ne pas inscrire l’haloxyfop-R à l’annexe I de la directive.

28      Conformément à l’avis du comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé animale, la Commission a, le 19 juin 2007, adopté la décision 2007/437/CE, concernant la non-inscription de l’haloxyfop-R dans l’annexe I de la directive et le retrait des autorisations de produits phytopharmaceutiques contenant cette substance (JO L 163, p. 22, ci-après la « décision attaquée »), dont le dispositif se lit comme suit :

« Article premier

L’haloxyfop-R n’est pas inscrit en tant que substance active à l’annexe I de la directive [...]

Article 2

Les États membres font en sorte :

a)      que les autorisations de produits phytopharmaceutiques contenant de l’haloxyfop-R soient retirées pour le 19 décembre 2007 ;

b)      qu’aucune autorisation de produits phytopharmaceutiques contenant de l’haloxyfop-R ne soit accordée ou reconduite à partir de la date de publication de la présente décision.

Article 3

Tout délai de grâce accordé par des États membres conformément aux dispositions de l’article 4, paragraphe 6, de la directive [...] est le plus court possible et expire au plus tard le 19 décembre 2008.

Article 4

Les États membres sont destinataires de la présente décision. »

29      La non-inscription de l’haloxyfop-R en tant que substance active à l’annexe I de la directive est justifiée dans la décision attaquée par le fait que, au cours de l’évaluation de cette substance active, un certain nombre de sujets de préoccupation ont été identifiés. Ainsi, la décision attaquée expose que l’évaluation des risques de contamination des eaux souterraines n’a pas pu être achevée et que l’on constate, notamment, que l’utilisation de l’haloxyfop-R, dans les scénarios présentés par l’auteur de la notification, entraîne l’apparition d’un certain nombre de métabolites persistants pouvant facilement contaminer la nappe phréatique et avoir des effets préjudiciables sur l’eau potable. Elle indique que ce constat a suscité des préoccupations qu’il n’a pas été possible de dissiper sur la base des données présentées par l’auteur de la notification dans les délais requis et que, en outre, eu égard aux données disponibles, des préoccupations subsistent concernant l’évaluation des risques pour les mammifères. Par conséquent, les informations disponibles n’auraient pas permis de conclure que l’haloxyfop-R satisfaisait aux critères requis pour être inclus dans l’annexe I de la directive (considérant 5).

30      En dépit des arguments avancés par Dow AgroSciences Ltd, la Commission a estimé que les sujets de préoccupation subsistaient. Elle a considéré que les évaluations effectuées sur la base des informations fournies et examinées lors des réunions des experts de l’EFSA n’avaient pas démontré que, dans les conditions d’utilisation proposées, les produits phytopharmaceutiques contenant de l’haloxyfop-R satisfaisaient, d’une manière générale, aux conditions fixées par la directive (considérant 6).

 Procédure et conclusions des parties

31      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 septembre 2007, les requérantes ont introduit un recours visant à l’annulation de la décision attaquée.

32      Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 15 novembre 2007, les requérantes ont introduit la présente demande en référé, dans laquelle elles concluent à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        surseoir à l’exécution de la décision attaquée ;

–        adopter toute mesure provisoire appropriée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

33      Dans ses observations écrites déposées au greffe du Tribunal le 28 novembre 2007, la Commission conclut à ce qu’il plaise au président du Tribunal :

–        rejeter la demande en référé ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

34      En date du 29 novembre 2007, le juge des référés a posé certaines questions aux requérantes, qui y ont répondu par écrit dans le délai imparti.

 En droit

35      En vertu des dispositions combinées des articles 242 CE et 243 CE, d’une part, et de l’article 225, paragraphe l, CE, d’autre part, le Tribunal peut, s’il estime que les circonstances l’exigent, ordonner le sursis à l’exécution d’un acte attaqué devant lui ou prescrire les mesures provisoires nécessaires.

36      L’article 104, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal dispose que les demandes de mesures provisoires doivent spécifier l’objet du litige, les circonstances établissant l’urgence, ainsi que les moyens de fait et de droit justifiant à première vue (fumus boni juris) l’octroi de la mesure provisoire à laquelle elles concluent. Ainsi, le sursis à exécution et les mesures provisoires peuvent être accordés par le juge des référés s’il est établi que leur octroi est justifié à première vue en fait et en droit (fumus boni juris) et qu’ils sont urgents en ce sens qu’il est nécessaire, pour éviter un préjudice grave et irréparable aux intérêts du requérant, qu’ils soient édictés et sortent leurs effets dès avant la décision au principal. Ces conditions sont cumulatives, de sorte que les demandes de mesures provisoires doivent être rejetées dès lors que l’une d’elles fait défaut [ordonnance du président de la Cour du 14 octobre 1996, SCK et FNK/Commission, C‑268/96 P(R), Rec. p. I‑4971, point 30]. Le juge des référés procède également, le cas échéant, à la mise en balance des intérêts en présence (voir ordonnance du président de la Cour du 23 février 2001, Autriche/Conseil, C‑445/00 R, Rec. p. I‑1461, point 73, et la jurisprudence citée).

37      En outre, dans le cadre de cet examen d’ensemble, le juge des référés dispose d’un large pouvoir d’appréciation et reste libre de déterminer, au regard des particularités de l’espèce, la manière dont ces différentes conditions doivent être vérifiées ainsi que l’ordre de cet examen, dès lors qu’aucune règle de droit communautaire ne lui impose un schéma d’analyse préétabli pour apprécier la nécessité de statuer provisoirement [ordonnances du président de la Cour du 19 juillet 1995, Commission/Atlantic Container Line e.a., C‑149/95 P(R), Rec. p. I‑2165, point 23, et du 3 avril 2007, Vischim/Commission, C‑459/06 P(R), non publiée au Recueil, point 25].

38      Compte tenu des éléments du dossier et notamment des réponses des requérantes aux questions posées, le juge des référés estime qu’il dispose de tous les éléments nécessaires pour statuer sur la présente demande de mesures provisoires, sans qu’il soit utile d’entendre, au préalable, les parties en leurs explications orales.

 Sur la recevabilité

 Arguments des parties

39      La Commission estime qu’aucune des requérantes autres que Dow AgroSciences Ltd n’est individuellement concernée, au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE, par la décision attaquée, qui constitue un acte d’application générale adressé aux seuls États membres. Ces autres requérantes seraient de simples producteurs ou vendeurs de l’haloxyfop-R. Or, ainsi qu’il ressort de deux listes annexées aux observations de la Commission, il existerait de nombreux opérateurs autres que lesdites requérantes qui sont autorisés à vendre des produits contenant de l’haloxyfop-R. Par conséquent, le recours et, partant, la demande en référé devraient être déclarés irrecevables en ce qui concerne ces requérantes.

40      De l’avis des requérantes, le recours au principal est recevable, conformément à l’article 230, quatrième alinéa, CE, car il est dirigé contre un acte produisant des effets juridiques obligatoires qui les concernent directement et individuellement. Dow AgroSciences Ltd en tant qu’auteur de la notification de l’haloxyfop-R serait sans aucun doute recevable à agir dans le cadre du recours au principal. Or, lorsqu’il s’agit d’établir la recevabilité d’un seul et même recours introduit par plusieurs requérants et que le recours est recevable en ce qui concerne l’un d’entre eux, il n’y aurait pas lieu d’examiner la qualité pour agir des autres requérants [voir ordonnance du président du Tribunal du 19 juillet 2007, Du Pont de Nemours (France) e.a./Commission, T‑31/07 R, non encore publiée au Recueil, point 113, et la jurisprudence citée].

41      Par ailleurs, s’agissant des requérantes autres que Dow AgroSciences Ltd, chacune d’entre elles (à l’exception de Dow AgroSciences Distribution) serait recevable à agir dans le cadre du recours au principal, puisqu’elles détiennent toutes des autorisations nationales de commercialisation de produits phytopharmaceutiques à base d’haloxyfop-R, qui leur ont été accordées par les autorités compétentes des États membres. Dès lors qu’aucun autre opérateur ne pourrait désormais obtenir de telles autorisations de commercialisation, ces requérantes appartiendraient donc à un cercle fermé d’opérateurs. Toutes leurs autorisations leur seraient retirées le 19 décembre 2007 au plus tard en conséquence directe de la décision attaquée.

42      De surcroît, Dow AgroSciences LLC détiendrait des droits de propriété intellectuelle sur les produits phytopharmaceutiques à base d’haloxyfop-R par le biais de différentes marques. Or, ces marques bien établies deviendraient inutiles en conséquence de la décision attaquée.

 Appréciation du juge des référés

43      En vertu des dispositions de l’article 104, paragraphe 1, du règlement de procédure, une demande de mesures provisoires n’est recevable que si elle émane d’une partie à une affaire dont le Tribunal est saisi. Cette règle implique que le recours au principal, sur lequel se greffe la demande en référé, puisse être effectivement examiné par le Tribunal.

44      Selon une jurisprudence constante, la recevabilité du recours au principal ne doit pas, en principe, être examinée dans le cadre d’une procédure de référé sous peine de préjuger l’affaire au principal. Il peut, néanmoins, s’avérer nécessaire, lorsque l’irrecevabilité manifeste du recours au principal sur lequel se greffe la demande en référé est soulevée, d’établir l’existence de certains éléments permettant de conclure, à première vue, à la recevabilité d’un tel recours [ordonnance du président de la Cour du 12 octobre 2000, Federación de Cofradías de Pescadores de Guipúzcoa e.a./Conseil, C‑300/00 P(R), Rec. p. I‑8797, point 34 ; ordonnances du président du Tribunal du 15 janvier 2001, Stauner e.a./Parlement et Commission, T‑236/00 R, Rec. p. II‑15, point 42, et du 8 août 2002, VVG International e.a./Commission, T‑155/02 R, Rec. p. II‑3239, point 18].

45      Un tel examen de la recevabilité du recours au principal est nécessairement sommaire, compte tenu du caractère urgent de la procédure de référé (ordonnance Federación de Cofradías de Pescadores de Guipúzcoa e.a./Conseil, point 44 supra, point 35).

46      En effet, dans le cadre d’une demande en référé, la recevabilité du recours au principal ne peut être appréciée que de prime abord, la finalité étant d’examiner si le requérant produit des éléments suffisants qui justifient a priori de conclure que la recevabilité du recours au principal ne saurait être exclue. Le juge des référés ne doit déclarer cette demande irrecevable que si la recevabilité du recours au principal peut être totalement exclue. En effet, statuer sur la recevabilité au stade du référé lorsque celle-ci n’est pas, prima facie, totalement exclue reviendrait à préjuger la décision du Tribunal statuant au principal (ordonnances du président du Tribunal du 17 janvier 2001, Petrolessence et SG2R/Commission, T‑342/00 R, Rec. p. II‑67, point 17 ; du 19 décembre 2001, Government of Gibraltar/Commission, T‑195/01 R et T‑207/01 R, Rec. p. II‑3915, point 47, et du 7 juillet 2004, Região autónoma dos Açores/Conseil, T‑37/04 R, Rec. p. II‑2153, point 110).

47      En l’espèce, la Commission conteste que le recours au principal soit recevable. Il y a donc lieu de vérifier s’il existe des éléments permettant de conclure néanmoins, à première vue, à la recevabilité du recours au principal dans cette affaire.

48      À cet égard, il importe de constater, d’abord, que, tout en contestant que les requérantes autres que Dow AgroSciences Ltd soient recevables à introduire le recours au principal, la Commission admet expressément cette recevabilité en ce qui concerne cette dernière. En effet, en sa qualité d’auteur de la notification de l’haloxyfop-R ayant effectivement participé à la procédure d’évaluation d’une substance active prévue par la directive et bénéficiant des garanties procédurales prévues par la réglementation pertinente, il ne peut être exclu, à première vue, que Dow AgroSciences Ltd soit directement et individuellement concernée par la décision attaquée, au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE, et que le recours au principal introduit par elle soit recevable [ordonnance Du Pont de Nemours (France) e.a./Commission, point 40 supra, point 112].

49      Dans ces circonstances, s’agissant d’un seul et même recours au principal, il n’y a prima facie pas lieu d’examiner la qualité pour agir des autres requérantes (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 24 mars 1993, CIRFS e.a./Commission, C‑313/90, Rec. p. I‑1125, point 31, et du Tribunal du 8 juillet 2003, Verband der freien Rohrwerke e.a./Commission, T‑374/00, Rec. p. II‑2275, point 57 ; voir également, en ce sens, arrêt du Tribunal du 6 juillet 1995, AITEC e.a./Commission, T‑447/93 à T‑449/93, Rec. p. II‑1971, point 82). Cette jurisprudence, fondée sur des considérations d’économie de procédure, est justifiée par la circonstance que, à supposer même que l’une ou l’autre de ces requérantes n’ait pas qualité pour agir, le Tribunal devrait néanmoins examiner au fond les moyens d’annulation présentés dans leur intégralité (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 9 juillet 2007, Sun Chemical Group e.a./Commission, T‑282/06, non encore publié au Recueil, point 52).

50      Force est de souligner, toutefois, que la jurisprudence mentionnée au point 49 ci-dessus, si elle est le cas échéant à prendre en considération dans le cadre de la procédure au principal, ne saurait trouver application pour ce qui est de la question de l’appréciation de l’urgence dans le cadre d’une procédure de référé.

51      En effet, selon une jurisprudence constante, l’urgence doit s’apprécier par rapport à la nécessité de statuer provisoirement, afin d’éviter qu’un préjudice grave et irréparable ne soit occasionné à la partie qui sollicite la mesure provisoire. Cette partie est tenue d’apporter la preuve qu’elle ne saurait attendre l’issue de la procédure au principal sans avoir à subir personnellement un préjudice qui entraînerait des conséquences graves et irréparables pour elle (ordonnances du président de la Cour du 15 juin 1987, Belgique/Commission, 142/87 R, Rec. p. 2589, point 23, et du 8 mai 1991, Belgique/Commission, C‑356/90 R, Rec. p. I‑2423, points 20 et 23).

52      Il s’ensuit que seule une partie, recevable à introduire le recours au principal sur lequel se greffe la demande en référé, peut être admise à établir l’urgence en faisant valoir qu’elle subirait personnellement un préjudice grave et irréparable si la mesure provisoire sollicitée n’était pas accordée. À défaut d’une telle restriction, il suffirait, pour obtenir une mesure provisoire, à des entreprises concernées par un acte communautaire de s’associer en formant un recours collectif en annulation, assorti d’une demande en référé, qui serait introduit par des requérants dont l’un seulement serait recevable au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE, tandis que les autres pourraient seulement démontrer être victime d’un préjudice grave et irréparable.

53      Dans le présent contexte, il y a donc lieu d’examiner si les requérantes autres que Dow AgroSciences Ltd apparaissent prima facie manifestement irrecevables à demander au Tribunal l’annulation au principal de la décision attaquée.

54      Aux termes de l’article 230, quatrième alinéa, CE, toute personne physique ou morale peut former un recours contre les décisions qui, bien que prises sous l’apparence d’un règlement ou d’une décision adressée à une autre personne, la concernent directement et individuellement.

55      S’agissant de la question de savoir si les requérantes autres que Dow AgroSciences Ltd sont, à première vue, individuellement concernées par la décision attaquée, dont les uniques destinataires sont les États membres (article 4 de la décision attaquée), force est de constater d’abord que la décision attaquée constitue prima facie un acte de portée générale en ce qu’elle s’applique à des situations déterminées objectivement et comporte des effets juridiques à l’égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite. En effet, les articles 1er à 3 de la décision attaquée concernent une substance active, l’haloxyfop-R, et les opérateurs économiques détenant des autorisations de commercialisation visées de manière générale et abstraite. Dès lors, au regard de ces dispositions et sous réserve de l’existence de caractéristiques qui leur sont particulières, ces opérateurs économiques sont prima facie affectés par la décision attaquée de la même manière et placés dans une situation identique.

56      Toutefois, il n’est pas exclu que, dans certaines circonstances, les dispositions de cet acte de portée générale puissent concerner individuellement certains d’entre eux (voir arrêts de la Cour du 16 mai 1991, Extramet Industrie/Conseil, C‑358/89, Rec. p. I‑2501, point 13 ; du 18 mai 1994, Codorníu/Conseil, C‑309/89, Rec. p. I‑1853, point 19, et du 25 juillet 2002, Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, C‑50/00 P, Rec. p. I‑6677, point 36).

57      Selon une jurisprudence constante, une personne physique ou morale autre que le destinataire d’un acte ne saurait prétendre être concernée individuellement, au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE, que si elle est atteinte, par l’acte en cause, en raison de certaines qualités qui lui sont particulières ou d’une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, l’individualise d’une manière analogue à celle dont le serait le destinataire de l’acte (arrêts de la Cour du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, Rec. p. 197, 223 ; Codorníu/Conseil, point 56 supra, point 20 ; Unión de Pequeños Agricultores/Conseil, point 56 supra, point 36, et du 1er avril 2004, Commission/Jégo-Quéré, C‑263/02 P, Rec. p. I‑3425, point 45).

58      À cet égard, la possibilité de déterminer, avec plus ou moins de précision, le nombre ou même l’identité des sujets de droit auxquels s’applique une mesure n’implique nullement que ces sujets doivent être considérés comme concernés individuellement par cette mesure, tant qu’il est constant que cette application s’effectue en vertu d’une situation objective de droit ou de fait définie par l’acte en cause (ordonnance de la Cour du 24 mai 1993, Arnaud e.a./Conseil, C‑131/92, Rec. p. I‑2573, point 13 ; voir, également, ordonnance de la Cour du 18 décembre 1997, Sveriges Betodlares et Henrikson/Commission, C‑409/96 P, Rec. p. I‑7531, point 37, et arrêt du Tribunal du 22 février 2000, ACAV e.a./Conseil, T‑138/98, Rec. p. II‑341, point 64).

59      En l’espèce, il semble que les requérantes autres que Dow AgroSciences Ltd, loin d’être individualisées par des qualités qui leur seraient particulières, sont affectées au même titre que tous les autres vendeurs d’haloxyfop-R se trouvant dans la même situation. La décision attaquée ne comporte aucun élément concret permettant de conclure qu’elle a été adoptée en tenant compte de la situation particulière des requérantes autres que Dow AgroSciences Ltd. Il semble donc que c’est uniquement en raison de leur qualité objective d’opérateurs économiques visés par la décision attaquée que ces requérantes pourraient prétendre être affectées par celle-ci. Or, une telle atteinte n’est pas suffisante pour être individuellement concerné au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE. Aucun des arguments avancés en sens contraire par les requérantes ne permet de remettre en cause cette appréciation.

60      S’agissant de la circonstance que les requérantes autres que Dow AgroSciences Ltd (à l’exception de Dow AgroSciences Distribution) détiennent des autorisations nationales de commercialisation de l’haloxyfop-R, il suffit de relever que la seule existence de tels droits de commercialisation, potentiellement remise en cause par la décision attaquée, n’est pas susceptible d’individualiser le titulaire dudit droit dès lors qu’il est constant que ce même droit est accordé, en application d’une règle générale et abstraite, à des opérateurs déterminés objectivement (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 28 novembre 2005, EEB e.a./Commission, T‑94/04, Rec. p. II‑4919, points 53 à 55). Or, la Commission a démontré, en produisant deux listes annexées à ses observations, qu’il existe plusieurs entreprises autres que les requérantes qui, elles aussi, vendent l’haloxyfop-R et qui disposent donc de droits de commercialisation au même titre que les requérantes. En réponse à une question posée par le juge des référés, les requérantes n’ont pas contesté la présence sur le marché de ces entreprises mentionnées par la Commission.

61      À supposer même que la décision attaquée soit susceptible de produire des effets différents selon chaque vendeur concerné, cette circonstance ne saurait suffire pour démontrer que les requérantes autres que Dow AgroSciences Ltd ont des qualités particulières ou se trouvent dans une situation de fait qui les caractérise par rapport aux opérateurs mentionnés dans les listes produites par la Commission. En effet, les requérantes n’ont pas précisé, dans la demande en référé, dans quelle mesure leurs droits de commercialisation seraient particulièrement affectés par les conséquences négatives de la décision attaquée, et ce d’une manière qui les distinguerait de tout autre opérateur de la catégorie en cause (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 11 septembre 2007, Fels-Werke e.a./Commission, T‑28/07, non publiée au Recueil, point 63).

62      Dans la mesure où les requérantes invoquent l’atteinte de la valeur des marques dont Dow AgroSciences LLC est titulaire, il est vrai que, dans l’arrêt Codorníu/Conseil, point 56 supra (point 21), la Cour a jugé que le titulaire espagnol de la marque Gran Cremant de Codorniu, qui avait utilisé traditionnellement cette marque, était individuellement concerné par une disposition de caractère général qui réservait le droit d’utiliser la mention « crémant » aux seuls producteurs français et luxembourgeois, étant donné que cette disposition aboutissait à empêcher ledit titulaire d’utiliser sa marque. Toutefois, tel n’est pas le cas en l’espèce. En effet, s’il ressort des documents présentés par les requérantes que Dow AgroSciences LLC est titulaire des marques Gallant, Zellek, Verdict, Nomade et Eloge, rien n’indique que l’utilisation par Dow AgroSciences LLC de ces marques puisse, en tant que telle, être affectée par une interdiction de commercialisation de la substance active haloxyfop-R, d’autant que lesdites marques, loin d’être enregistrées spécifiquement pour l’haloxyfop-R, portent sur des pesticides, des herbicides, des insecticides, des fongicides ou des préparations pour détruire les animaux nuisibles, au sens générique. Dow AgroSciences LLC peut donc, en tout état de cause, continuer à les utiliser pour des produits qui ne contiennent pas d’haloxyfop-R et pour empêcher d’autres entreprises d’employer des signes susceptibles d’être confondus avec les marques en cause.

63      Enfin, l’argumentation concernant l’appartenance des requérantes autres que Dow AgroSciences Ltd à un cercle fermé d’entreprises condamnées à perdre leurs autorisations de commercialisation le 19 décembre 2007 au plus tard doit également être écartée. En effet, pour que l’existence d’un tel cercle puisse être un élément de nature à individualiser les particuliers en question au regard d’un acte de portée générale, il faut, selon une jurisprudence constante, que l’institution dont émane l’acte attaqué ait eu l’obligation de tenir compte, lors de l’adoption dudit acte, de la situation spécifique de ces particuliers (voir ordonnance Federación de Cofradías de Pescadores de Guipúzcoa e.a./Conseil et Commission, point 44 supra, point 46, et la jurisprudence citée ; arrêt du Tribunal du 15 décembre 1994, Unifruit Hellas/Commission, T‑489/93, Rec. p. II‑1201, point 25 ; ordonnance du Tribunal du 3 juin 1997, Merck e.a./Commission, T‑60/96, Rec. p. II‑849, point 58, et arrêt du Tribunal du 27 juin 2001, Andres de Dios e.a./Conseil, T‑166/99, Rec. p. II‑1857, point 54). Or, en l’espèce, une telle obligation n’était pas imposée à la Commission pour l’adoption de la décision attaquée.

64      Il résulte de ce qui précède que les requérantes autres que Dow AgroSciences Ltd ne peuvent, à première vue, être considérées comme individuellement concernées par la décision attaquée. Ces requérantes ne sont donc pas recevables à arguer de leur propre situation individuelle pour établir l’urgence. Elles ne sont, en conséquence, pas non plus recevables à introduire la présente demande en référé.

65      En revanche, la demande en référé est recevable en ce qui concerne Dow AgroSciences Ltd.

 Sur l’urgence

 Arguments des parties

66      Selon les requérantes, l’urgence de faire droit à la présente demande résulte du fait que la décision attaquée leur occasionnera un préjudice grave et irréparable. Ce préjudice serait constitué par la perte de leurs autorisations de vente de produits à base d’haloxyfop-R, au plus tard le 19 décembre 2007, la perte de clients et la perte irréparable de parts de marché au bénéfice d’entreprises concurrentes qui seraient très puissantes et d’ores et déjà présentes sur le marché. En outre, la décision attaquée détruirait irrévocablement la réputation de leur produit haloxyfop-R. Enfin, la décision attaquée porterait atteinte à la réputation des marques commerciales, déjà anciennes, de Dow AgroSciences LLC et des procédés de production brevetés associés.

67      En ce qui concerne la charge de la preuve leur incombant, les requérantes se réfèrent à l’ordonnance du président de la Cour du 21 octobre 2003, Industrias Químicas del Vallés/Commission [C‑365/03 P(R), Rec. p. I‑12389, point 6], pour soutenir qu’il leur suffit d’établir qu’elles subiraient « probablement » un préjudice grave et irréparable parce qu’elles pourraient « difficilement offrir » des produits de substitution à leur clientèle et qu’elles « risquent » de perdre irrémédiablement des parts de marché, compte tenu des conditions de concurrence sur le marché en cause. Elles ajoutent que cette détermination du niveau d’exigence en matière de preuve a été confirmée par l’ordonnance Du Pont de Nemours (France) e.a./Commission, point 40 supra.

68      Par ailleurs, les requérantes n’auraient pas à démontrer qu’elles deviendraient probablement insolvables si le sursis à l’exécution de la décision attaquée n’était pas ordonné, mais il leur suffirait d’établir que, en l’absence d’une telle mesure, elles se trouveraient dans une situation susceptible « de modifier de manière irrémédiable [leurs] parts de marché » (ordonnances du président du Tribunal du 11 avril 2003, Solvay Pharmaceuticals/Conseil, T‑392/02 R, Rec. p. II‑1825, point 107, et du 5 août 2003, Industrias Químicas del Vallés/Commission, T‑158/03 R, Rec. p. II‑3041, point 69), ou verraient affecter leur « position sur le marché » ou leur réputation (ordonnance du président du Tribunal du 20 juillet 2000, Esedra/Commission, T‑169/00 R, Rec. p. II‑2951, point 45).

69      S’agissant du cas d’espèce, les requérantes allèguent que l’imminence du préjudice est évidente du fait que, en vertu de la décision attaquée, les États membres devront retirer les autorisations de mise sur le marché de produits phytopharmaceutiques détenues par les requérantes au plus tard le 19 décembre 2007. Le retrait de ces autorisations entraînerait la perte irrémédiable des parts de marché des requérantes et de leur clientèle en ce qui concerne l’haloxyfop-R, la valeur de leurs ventes sur le marché communautaire de l’haloxyfop-R étant estimée à environ [confidentiel] (1) millions de dollars des États-Unis (USD) ([confidentiel] millions d’euros) en 2006. Par ailleurs, les requérantes assumeraient la totalité des ventes d’haloxyfop-R sur le marché communautaire.

70      Pour ce qui est de la substituabilité de l’haloxyfop-R, les requérantes soulignent que, d’un point de vue juridique, elles devraient disposer d’une autorisation nationale aux fins de l’utilisation et de la commercialisation d’une substance de remplacement. L’obtention de telles autorisations prenant du temps, il serait probable que le marché aura, entre-temps, été conquis par des entreprises concurrentes. L’introduction d’une nouvelle substance active par les requérantes prendrait environ dix années de recherche et de développement et serait financièrement très onéreuse. D’un point de vue commercial, il ne saurait raisonnablement être exigé des requérantes qu’elles distribuent les produits d’autres fabricants. D’un point de vue structurel, le marché pertinent se caractériserait par une concurrence de forte intensité, les requérantes étant confrontées à de puissants concurrents capables d’offrir non seulement des produits de substitution directe, mais des produits pour tous les besoins en matière de lutte contre les nuisibles, mauvaises herbes et maladies.

71      En ce qui concerne les produits en concurrence avec l’haloxyfop-R, les requérantes produisent un tableau comprenant six substances de substitution probables, qui seraient commercialisées par de puissantes sociétés, telles Syngenta et BASF. Celles-ci disposeraient de ressources financières considérables et pourraient donc conquérir le marché perdu par les requérantes.

72      S’agissant d’une éventuelle substitution de l’haloxyfop-R par des produits de leur propre portefeuille, les requérantes déclarent ne disposer d’aucun produit dont la vente pourrait remplacer celle de l’haloxyfop-R sur les mêmes marchés.

73      Se référant au rapport Phillips McDougall (joint à la demande en référé), les requérantes ajoutent qu’une reprise des ventes de l’haloxyfop-R après son retrait et son éventuelle réintroduction sur le marché sera très difficile à réaliser, étant donné que leur portefeuille de produits est plus réduit que celui de certaines des autres grandes entreprises de cette branche. Et même si l’haloxyfop-R était réintroduit, on ne pourrait raisonnablement s’attendre à ce que les requérantes soient en mesure de reconquérir la clientèle perdue par une simple campagne publicitaire. Dans ce contexte, les requérantes se réfèrent à une lettre d’un de leurs distributeurs selon laquelle la non-incription de l’haloxyfop-R est susceptible de porter atteinte à la réputation tant de la substance que des requérantes, les clients ayant déjà réagi par une réduction considérable de leurs commandes et les concurrents par la conquête des parts de marché concernées.

74      Les requérantes affirment encore que, si l’haloxyfop-R avait effectivement été inscrit à l’annexe I de la directive, l’article 13 de la directive aurait permis à Dow AgroSciences Ltd, en tant qu’auteur de la notification, de refuser à ses concurrents et clients l’accès aux informations acquises – à un coût élevé – afin d’obtenir cette inscription. Normalement, l’accès de ces concurrents et clients auxdites informations – nécessaires à l’obtention des autorisations nationales pour le produit phytopharmaceutique en question – ne serait permis qu’en contrepartie d’un paiement calculé de façon à dédommager le notifiant des frais qu’il a supportés. Or, du fait de la non-inscription de l’haloxyfop-R à l’annexe I de la directive, Dow AgroSciences Ltd subirait un préjudice consistant en un refus du bénéfice des droits à la protection des données résultant d’une telle inscription.

75      Elles ajoutent que la décision attaquée portera atteinte tant à la marque Gallant, qui a été activement utilisée pour la commercialisation de produits à base d’haloxyfop-R sur le marché communautaire depuis le début des années 80, qu’au brevet de production de l’haloxyfop-R détenu par Dow AgroSciences Ltd. Si le préjudice causé par cette atteinte n’apparaît pas chiffrable, il est évident pour les requérantes que les fonds substantiels investis pour obtenir ces droits exclusifs de propriété intellectuelle seront perdus.

76      S’agissant du caractère grave du préjudice causé par la décision attaquée, il est établi, selon les requérantes, par le fait que les ventes d’haloxyfop-R et de produits à base d’haloxyfop-R ont atteint [confidentiel] millions de USD en 2006 sur le marché communautaire. Or, toutes les ventes réalisées sur ce marché seraient perdues à la suite du retrait, le 19 décembre 2007 au plus tard, des autorisations nationales de mise sur le marché.

77      Les requérantes dénoncent également des pertes pour les ventes réalisées en dehors du territoire des États membres de la Communauté. À cet égard, elles font valoir que certains pays tiers suivent la réglementation communautaire, de sorte que le refus d’inscription à l’annexe I de la directive d’une substance active entraînerait l’interdiction de cette substance dans ces pays, ce qui serait confirmé par le rapport de Phillips McDougall. De surcroît, conformément à l’article 5 de la convention de Rotterdam sur la procédure de consentement préalable en connaissance de cause applicable à certains produits chimiques et pesticides dangereux qui font l’objet d’un commerce international (JO 2003, L 63, p. 29), les États signataires seraient tenus de notifier les interdictions dans les 90 jours suivant leur adoption. Une telle notification pourrait aboutir à l’inscription de la substance à l’annexe III de la convention, avec pour effet que la substance en question est alors soumise à une procédure de consentement préalable en cas d’exportation hors de la Communauté.

78      Dans ce contexte, elles affirment que la viabilité de l’usine de Drusenheim (voir point 23 ci-dessus) sera particulièrement menacée par le fait que plusieurs autorités administratives de pays non communautaires exigent des documents justifiant que l’haloxyfop-R a été légalement produit dans le pays d’origine. Cela ne serait plus possible en conséquence de la décision attaquée. Dans cette hypothèse, non seulement les ventes à l’exportation ne pourraient pas compenser les pertes des ventes nationales, mais, de surcroît, il serait nécessaire de délocaliser la production afin de satisfaire à ces exigences réglementaires de pays non communautaires. La survie de cette installation et les emplois du personnel qui y travaille seraient donc menacés.

79      En outre, une décision de non-inscription telle la décision attaquée serait généralement suivie de la fixation de nouvelles teneurs maximales en résidus (ci-après les « TMR ») pour la substance en question dans les produits d’origine végétale. La fixation de telles TMR reviendrait à rendre plus difficile la commercialisation de produits traités avec de l’haloxyfop-R. En toute hypothèse, pour éviter qu’une telle limite dissuasive ne soit instituée, les requérantes devraient soumettre des analyses coûteuses aux autorités de surveillance dans la Communauté pour défendre des teneurs maximales plus élevées.

80      Les requérantes concluent en soutenant que, de manière générale, la gravité du préjudice qu’elles subiront, si l’exécution de la décision attaquée n’est pas suspendue, doit s’apprécier au regard de la notoriété qu’elles ont bâtie depuis les années 80 avec le l’haloxyfop-R, de la clientèle et du chiffre d’affaires soigneusement conquis sur une longue période de temps ainsi que de leurs investissements dans l’haloxyfop-R, la notoriété des marques relatives au produit et sa défense tout au long de la procédure d’évaluation communautaire.

81      La Commission estime que le préjudice allégué par les requérantes est de nature purement pécuniaire. Un tel préjudice ne saurait, en général, être regardé comme irréparable du fait qu’il peut faire l’objet d’une compensation financière ultérieure.

82      En ce qui concerne le caractère grave du préjudice allégué, la Commission reconnaît que la décision attaquée entraînera pour les requérantes une perte de leurs ventes, de leurs revenus et de leurs parts de marché. Toutefois, une part de marché ne serait pas un but en soi : l’entreprise ne pourrait en bénéficier que dans la mesure où elle lui apporte des profits. Pour apprécier le caractère grave ou non de la perte d’une part de marché, il conviendrait, par conséquent, de traduire cette part en des termes financiers, et ce eu égard à la taille financière de l’entreprise tout entière.

83      En l’espèce, les requérantes faisant partie du groupe Dow Chemical, dont le chiffre d’affaires total s’élevait à 49,1 milliards de USD en 2006, le préjudice qui leur serait causé par la décision attaquée sur le marché communautaire ne pourrait être qualifié que de minime. S’agissant du préjudice prétendument subi hors de la Communauté, les requérantes ne fourniraient aucun élément chiffré.

84      Par ailleurs, il existerait des produits de substitution dont la vente pourrait compenser les pertes causées par la décision attaquée. Enfin, le préjudice subi par les requérantes ne serait pas irréparable.

85      La Commission en conclut que l’urgence n’est pas établie en l’espèce.

 Appréciation du juge des référés

86      Selon une jurisprudence constante, l’urgence doit s’apprécier par rapport à la nécessité de statuer provisoirement, afin d’éviter qu’un préjudice grave et irréparable ne soit occasionné à la partie qui sollicite la mesure provisoire. L’imminence du préjudice ne doit pas être établie avec une certitude absolue ; il suffit, particulièrement lorsque la réalisation du préjudice dépend de la survenance d’un ensemble de facteurs, qu’elle soit prévisible avec un degré de probabilité suffisant (voir ordonnance du président du Tribunal du 7 juin 2007, IMS/Commission, T‑346/06 R, non encore publiée au Recueil, points 121 et 123, et la jurisprudence citée). Toutefois, la partie qui s’en prévaut demeure tenue de prouver les faits qui sont censés fonder la perspective d’un préjudice grave et irréparable [ordonnance du président de la Cour du 14 décembre 1999, HFB e.a./Commission, C‑335/99 P(R), Rec. p. I‑8705, point 67 ; ordonnances du président du Tribunal du 15 novembre 2001, Duales System Deutschland/Commission, T‑151/01 R, Rec. p. II‑3295, point 188, et du 25 juin 2002, B/Commission, T‑34/02 R, Rec. p. II‑2803, point 86].

87      Il est également de jurisprudence bien établie qu’un préjudice d’ordre financier ne peut, sauf circonstances exceptionnelles, être regardé comme irréparable ou même difficilement réparable, dès lors qu’il peut normalement faire l’objet d’une compensation financière ultérieure [ordonnance du président de la Cour du 11 avril 2001, Commission/Cambridge Healthcare Supplies, C‑471/00 P(R), Rec. p. I‑2865, point 113 ; ordonnance du président du Tribunal du 15 juin 2001, Bactria/Commission, T‑339/00 R, Rec. p. II‑1721, point 94].

88      La mesure provisoire sollicitée ne se justifie que s’il apparaît que, en l’absence d’une telle mesure, le requérant se trouverait dans une situation susceptible de mettre en péril son existence avant l’intervention de l’arrêt mettant fin à la procédure au principal (ordonnance du président du Tribunal du 3 décembre 2002, Neue Erba Lautex/Commission, T‑181/02 R, Rec. p. II‑5081, point 84). L’imminence de la disparition du marché constituant effectivement un préjudice tant irrémédiable que grave, l’adoption de la mesure provisoire demandée apparaît justifiée dans une telle hypothèse.

89      S’il a également été tenu compte du fait que, en l’absence de la mesure provisoire sollicitée, les parts de marché du requérant seraient modifiées de manière irrémédiable [ordonnances du président du Tribunal du 30 juin 1999, Pfizer Animal Health/Conseil, T‑13/99 R, Rec. p. II‑1961, point 138 ; Solvay Pharmaceuticals/Conseil, point 68 supra, point 107, et Du Pont de Nemours (France) e.a./Commission, point 40 supra, point 175], il doit être précisé que ce cas de figure ne saurait être mis sur un pied d’égalité avec celui du risque de la disparition du marché et justifier l’adoption de la mesure provisoire demandée que si la modification irrémédiable des parts de marché présente aussi un caractère grave. Il ne suffit donc pas qu’une part de marché, aussi minime soit-elle, risque d’être irrémédiablement perdue, mais il importe que cette part de marché soit suffisamment importante. Un requérant qui se prévaut de la perte d’une telle part de marché doit démontrer, en outre, que la reconquête d’une fraction appréciable de celle-ci, notamment par des mesures appropriées de publicité, est impossible en raison d’obstacles de nature structurelle ou juridique (voir, en ce sens, ordonnance Commission/Cambridge Healthcare Supplies, point 87 supra, points 110 et 111, et ordonnance du président du Tribunal du 26 février 2007, Sumitomo Chemical Agro Europe/Commission, T‑416/06 R, non publiée au Recueil, points 59 et 60).

90      C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner les éléments avancés par les requérantes pour établir que Dow AgroSciences Ltd subira un préjudice grave et irréparable si le sursis à l’exécution de la décision attaquée n’est pas ordonné. Dans ce contexte, il importe de rappeler que l’argumentation relative aux requérantes autres que Dow AgroSciences Ltd doit être écartée de cet examen (voir point 64 ci-dessus).

91      Il convient de vérifier, tout d’abord, si le préjudice allégué peut être qualifié de grave au regard, notamment, de la taille et du chiffre d’affaires de l’entreprise ainsi que des caractéristiques du groupe auquel elle appartient [voir ordonnance du président de la Cour du 23 mai 1990, Comos-Tank e.a./Commission, C‑51/90 R et C‑59/90 R, Rec. p. I‑2167, point 26, et ordonnance Du Pont de Nemours (France) e.a./Commission, point 40 supra, points 196 et 203, et la jurisprudence citée].

92      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, pour établir la gravité du préjudice subi, les requérantes allèguent que, par l’effet de la décision attaquée, toutes leurs ventes d’haloxyfop-R et de produits à base d’haloxyfop-R réalisées sur le marché communautaire seront perdues. En ce qui concerne la valeur de ces ventes pour l’année 2006, elles la chiffrent à [confidentiel] millions de USD ou, se référant au rapport Phillips McDougall, à [confidentiel] millions de USD. Elles font encore état de leur comptabilité interne relative aux ventes d’haloxyfop-R sur le marché communautaire selon laquelle ces ventes s’élevaient à [confidentiel] USD en 2006.

93      Or, ces indications, marquées par des chiffres difficilement compréhensibles et limitées au chiffre d’affaires réalisé avec les ventes du produit en cause, ne sont à l’évidence pas suffisamment détaillées pour permettre au juge des référés d’apprécier la gravité du préjudice prétendument subi, une telle appréciation ne pouvant être effectuée que par la mise en rapport de ces ventes avec le chiffre d’affaires total des requérantes ou du groupe auquel elles appartiennent. De telles précisions auraient dû être exposées dans le texte même de la demande en référé (ordonnances du président du Tribunal du 7 mai 2002, Aden e.a./Conseil et Commission, T‑306/01 R, Rec. p. II‑2387, point 52 ; du 25 juin 2003, Schmitt/AER, T‑175/03 R, RecFP p. I‑A‑175 et II‑883, point 18, et du 23 mai 2005, Dimos Ano Liosion e.a./Commission, T‑85/05 R, Rec. p. II‑1721, point 37), d’autant plus que la Commission a affirmé que le groupe américain Dow Chemical, auquel appartiennent les requérantes, avait réalisé, en 2006, un chiffre d’affaires total substantiel.

94      Dans leurs réponses aux questions du juge des référés, les requérantes se sont encore abstenues de fournir des précisions, notamment financières, concernant leur appartenance à ce groupe.

95      Par conséquent, l’argumentation présentée dans la demande en référé ne permet pas au juge des référés d’apprécier la gravité du préjudice invoqué par les requérantes.

96      Il en va de même des allégations selon lesquelles l’exécution de la décision attaquée menacerait la survie de l’usine de Drusenheim de Dow AgroSciences et les emplois du personnel qui y travaille. En effet, les requérantes n’ont fourni aucun élément permettant d’évaluer la valeur de cette usine. Le juge des référés n’est donc pas en mesure d’apprécier l’impact financier de son éventuelle fermeture sur la situation des requérantes ou du groupe auquel elles appartiennent.

97      À titre surabondant, il convient de constater que – ainsi qu’il ressort des documents produits par la Commission et non contestés par les requérantes – la société mère (Dow Chemical Co.) du groupe auquel appartiennent les requérantes a réalisé un chiffre d’affaires total de 49,1 milliards de USD en 2006. Le préjudice invoqué par les requérantes à hauteur de [confidentiel] millions de USD ou de [confidentiel] millions de USD ou encore d’environ [confidentiel] millions de USD ne correspond donc approximativement qu’à moins de 0,1 % de ce chiffre d’affaires total du groupe. Un tel préjudice annuel ne saurait, à l’évidence, être qualifié de grave.

98      Par ailleurs, la valeur probante des éléments sur lesquels est fondé ce chiffre de moins de 0,1 % est nettement affaiblie par le fait que les chiffres fournis par les requérantes doivent être relativisés. En effet, ainsi qu’il a été jugé ci-dessus (points 64 et 90), seuls les éléments concernant Dow AgroSciences Ltd peuvent être pris en considération pour établir l’urgence. Or, les données présentées dans la demande en référé sont relatives aux ventes réalisées par toutes les requérantes et ne permettent pas d’identifier les chiffres pertinents pour Dow AgroSciences Ltd, alors que ces chiffres auraient dû figurer dans le texte même de la demande en référé (voir point 93 ci-dessus).

99      Il s’ensuit que les éléments chiffrés fournis par les requérantes concernant le préjudice subi sur le marché communautaire n’apparaissent, pour ce motif supplémentaire, pas suffisamment précis pour établir l’urgence pour Dow AgroSciences Ltd.

100    En tout état de cause, en évaluant approximativement le préjudice annuel causé à Dow AgroSciences Ltd, seule, par la décision attaquée sur le marché communautaire, on arriverait à un ordre de grandeur inférieur à celui de moins de 0,1 % du chiffre d’affaires du groupe Dow Chemical.

101    Il résulte de ce qui précède que les éléments chiffrés fournis pour établir le préjudice que subirait Dow AgroSciences Ltd sur le marché communautaire ne sont pas de nature à établir le caractère grave de ce préjudice.

102    Dans la mesure où les requérantes invoquent une diminution de leurs ventes dans des États non membres de la Communauté comme une conséquence de la décision attaquée, force est de constater qu’elles se sont abstenues de fournir, dans la demande en référé, des éléments chiffrés qui permettraient de quantifier la partie correspondante du chiffre d’affaires de Dow AgroSciences Ltd susceptible d’être affectée. Cela suffit en soi pour rejeter toute l’argumentation des requérantes qui y est relative.

103    S’agissant de l’argument tiré de ce que « certains pays » tiers suivraient la réglementation communautaire, il convient d’ajouter que les requérantes n’ont pas établi que la mesure provisoire sollicitée, à supposer qu’elle soit accordée, empêcherait les autorités des pays concernés d’interdire la commercialisation de l’haloxyfop-R sur leur territoire. Dès lors, elles n’ont pas démontré que le sursis à l’exécution de la décision attaquée serait de nature à empêcher la réalisation du préjudice allégué. En tout état de cause, une telle interdiction de commercialiser l’haloxyfop-R serait la conséquence directe non pas de la décision attaquée, mais d’une décision prise par les autorités de chaque pays tiers dans l’exercice de leur pouvoir souverain (voir, en ce sens, ordonnance Pfizer Animal Health/Conseil, point 89 supra, point 160).

104    L’invocation par les requérantes de l’article 5 de la convention de Rotterdam (voir point 77 ci-dessus) n’est pas davantage de nature à établir, à suffisance de droit, que l’obligation d’information et de notification incombant à la Communauté en vertu de cette disposition puisse causer à Dow AgroSciences Ltd un préjudice prévisible et chiffrable dans un pays tiers donné pendant la durée de la procédure au principal. Si les requérantes ont signalé que l’haloxyfop-R vient d’être inscrit, en vertu du règlement (CE) no 1376/2007 de la Commission, du 23 novembre 2007, modifiant l’annexe I du règlement (CE) no 304/2003 du Parlement européen et du Conseil concernant les exportations et importations de produits chimiques dangereux (JO L 307, p. 14), dans les parties 1 et 2 de l’annexe I de ce règlement no 304/2003, qui met en œuvre la convention de Rotterdam, il suffit de constater que, aux termes de l’article 13, paragraphe 6, sous a), du règlement no 304/2003, cette inscription a pour seule conséquence d’instaurer, en cas d’exportation d’haloxyfop-R, une obligation d’obtenir le consentement explicite du pays importateur. Or, les requérantes n’ont ni établi que les pays tiers vers lesquels Dow AgroSciences Ltd entendait exporter de l’haloxyfop-R refuseraient de consentir à l’importation, ni fourni des éléments chiffrables à cet égard. En tout état de cause, l’interdiction d’importer de l’haloxyfop-R serait la conséquence directe non pas de la décision attaquée, mais d’une décision prise par les seules autorités du pays tiers concerné (voir point 103 ci-dessus). Par conséquent, les requérantes n’ont pas démontré que le mécanisme de la convention de Rotterdam entraînerait directement et inévitablement des pertes de ventes de produits à base d’haloxyfop-R sur le marché de pays tiers déterminés.

105    Les requérantes soutiennent encore qu’une décision de non-inscription, telle la décision attaquée, est généralement suivie de la fixation de nouvelles TMR pour la substance en question dans les produits d’origine végétale, ce qui reviendrait à rendre plus difficile la commercialisation de produits traités avec de l’haloxyfop-R et obligerait les requérantes à soumettre des analyses coûteuses aux autorités de surveillance dans la Communauté pour défendre des TMR plus élevées, afin d’éviter qu’une limite dissuasive ne soit instituée.

106    À cet égard, s’agissant des prétendus effets négatifs de nouvelles TMR sur le commerce avec des pays tiers, il suffit de rappeler qu’il incombera aux seuls pays tiers concernés de décider de l’importation ou non des produits à base d’haloxyfop-R (voir point 103 ci-dessus).

107    De même, sur le marché communautaire, si la décision attaquée pouvait effectivement entraîner la fixation de nouvelles TMR pour l’haloxyfop-R, le préjudice prétendument subi à cause de ces TMR ne serait pas une conséquence directe de la décision attaquée. En effet, la procédure communautaire de fixation des TMR est indépendante de la non-inscription de l’haloxyfop-R à l’annexe I de la directive. Par ailleurs, les requérantes n’ont pas démontré, à suffisance de droit, que la non-inscription de l’haloxyfop-R à l’annexe I de la directive reviendrait inéluctablement à interdire, en raison de nouvelles TMR plus strictes, les importations dans la Communauté de produits traités avec cette substance. Elles n’ont, notamment, pas exposé les raisons qui empêcheraient le législateur communautaire de fixer, en vue de faciliter les échanges internationaux, des « tolérances d’importation » permettant l’importation d’aliments et de produits d’origine végétale affectés des anciens TMR pour l’haloxyfop-R.

108    Il s’ensuit que les allégations des requérantes concernant la problématique des TMR sont dénuées de pertinence pour démontrer la gravité du préjudice prétendument causé à Dow AgroSciences Ltd par la décision attaquée.

109    S’agissant du préjudice causé par la privation des droits à la protection des données prétendument conférée par l’article 13 de la directive, force est de constater que les requérantes se sont abstenues de chiffrer, dans la demande en référé, cet élément du préjudice résultant de la non-inscription de l’haloxyfop-R à l’annexe I de la directive, sans pour autant soutenir qu’un tel chiffrage serait impossible. L’affirmation relative à la protection des données doit donc également être rejetée.

110    Il résulte de ce qui précède qu’aucun des éléments avancés pour établir la gravité du préjudice subi par Dow AgroSciences Ltd ne peut être retenu.

111    Ces constatations suffisent pour conclure que le préjudice causé à Dow AgroSciences Ltd par la décision attaquée s’élèverait, en tout état de cause, à moins de 0,1 % du chiffre d’affaires du groupe Dow Chemical et ne saurait donc être considéré comme étant grave, sans même qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la question de savoir dans quelle mesure ce préjudice pourrait être réduit par la vente de produits de substitution.

112    Cette conclusion n’est pas remise en question par une appréciation de l’ensemble des circonstances factuelles invoquées par les requérantes, notamment la circonstance qu’elles ont acquis, depuis les années 80, une notoriété avec l’haloxyfop-R, qu’elles ont soigneusement conquis leur clientèle et leur chiffre d’affaires sur une longue période de temps, qu’elles ont fortement investi dans l’haloxyfop-R et qu’elles disposent d’un brevet ainsi que de marques notoires relatives à l’haloxyfop-R établies depuis longtemps dont la valeur serait anéantie par la décision attaquée. En effet, ces considérations historiques ne sauraient être prises en considération dès lors qu’il ne s’en dégage aucune donnée économique et financière chiffrée dont il pourrait être tenu compte pour évaluer le préjudice susceptible de justifier l’octroi d’une mesure provisoire.

113    S’agissant de la prétendue dévalorisation des marques, il suffit de rappeler que celles-ci sont toutes enregistrées au nom de la seule Dow AgroSciences LLC (voir point 42 ci-dessus). Or, ainsi qu’il a été jugé ci-dessus (points 64 et 90), d’éventuels préjudices causés à Dow AgroSciences LLC ne sauraient être pris en considération dans l’examen de l’urgence, cette dernière devant être établie pour la seule Dow AgroSciences Ltd. Du reste, rien ne semble empêcher les requérantes de continuer à utiliser les marques en tant que telles (voir point 62 ci-dessus).

114    S’agissant du brevet détenu par Dow AgroSciences Ltd, il ne peut être exclu que sa valeur est susceptible d’être affectée dans la mesure où la commercialisation de l’haloxyfop-R sera interdite sur le marché communautaire en vertu de la décision attaquée. Toutefois, les requérantes ont elles-mêmes indiqué que les ventes sur le marché communautaire ne représentaient en 2006 que « 30,5 % du marché mondial pour l’haloxyfop ». Le brevet conserve donc sa valeur en ce qui concerne la production de l’haloxyfop-R destiné aux marchés extracommunautaires. À cet égard, il convient de rappeler que les requérantes n’ont pas démontré que le mécanisme de la convention de Rotterdam entraînerait inévitablement des pertes de ventes sur ces marchés (voir point 104 ci-dessus). Si les investissements – d’ailleurs non chiffrés par les requérantes – nécessaires à l’obtention du brevet peuvent donc partiellement perdre leur valeur, les requérantes ne sont pas parvenues à établir que cette perte est de nature à causer à Dow AgroSciences Ltd un préjudice grave.

115    Par ailleurs, les requérantes n’ont pas établi, à suffisance de droit, que le préjudice évalué approximativement ci-dessus puisse être considéré comme étant irréparable.

116    À cet égard, il y a lieu de constater que, si les requérantes soutiennent qu’elles risquent de perdre les parts de marché et la réputation acquises par l’haloxyfop-R dans la Communauté, elles n’ont pas démontré qu’il leur serait impossible de reconquérir cette réputation et ces parts de marché perdues, dans l’hypothèse où la décision attaquée serait annulée à l’issue de la procédure au principal. En effet, les éléments du dossier en référé ne permettent pas de conclure que ces pertes seraient irrémédiables et qu’il ne serait pas possible pour l’haloxyfop-R de reconquérir sa position antérieure.

117    Si les requérantes affirment se trouver en concurrence avec de puissantes entreprises qui disposent de ressources financières considérables leur permettant, grâce à leur portefeuille de produits complet, de conquérir le marché perdu en raison de la décision attaquée, elles se limitent à en conclure qu’une reprise des ventes de l’haloxyfop-R après son éventuelle réintroduction sur le marché « sera[it] bien plus difficile à réaliser », même si elles lançaient une campagne publicitaire. Il s’agit là d’une simple supposition, qui n’est étayée par aucun élément de preuve ou principe fondé sur l’expérience.

118    Il n’est notamment pas produit d’étude effectuée auprès de la clientèle des requérantes et portant sur les chances d’un retour sur le marché de l’haloxyfop-R. Les requérantes n’invoquent dans ce contexte qu’une seule lettre envoyée par un de leurs distributeurs, dont la représentativité apparaît donc douteuse, dans laquelle ce distributeur, tout en déplorant l’atteinte portée à la réputation de l’haloxyfop-R par la décision attaquée, ne se prononce en rien sur les chances d’une reconquête du marché par cette substance en cas d’annulation de ladite décision.

119    Il s’ensuit que, si une reconquête par l’haloxyfop-R des parts de marché perdues en raison de la décision attaquée peut être économiquement et financièrement assez onéreuse, un tel retour sur le marché, en ce compris le rétablissement de la réputation de l’haloxyfop-R, n’apparaît pas impossible (voir, en ce sens, ordonnance Pfizer Animal Health/Conseil, point 89 supra, points 161 à 165).

120    Le préjudice prétendument subi par Dow AgroSciences Ltd du fait de la décision attaquée ne saurait donc être considéré comme étant irréparable.

121    Il résulte de tout ce qui précède que les requérantes ne démontrent pas, en l’état actuel, que Dow AgroSciences Ltd subirait un préjudice grave et irréparable si le sursis à exécution demandé n’était pas octroyé.

122    En conséquence, la demande en référé doit être rejetée pour défaut d’urgence, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si les autres conditions d’octroi du sursis à exécution sont remplies.

Par ces motifs,

LE PRÉSIDENT DU TRIBUNAL

ordonne :

1)      La demande en référé est rejetée.

2)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 17 décembre 2007.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       M. Jaeger


* Langue de procédure : l’anglais.


1 – Données confidentielles occultées.