Language of document : ECLI:EU:T:2018:319

Affaire T352/17

Janusz Korwin-Mikke

contre

Parlement européen

« Droit institutionnel – Parlement européen – Règlement intérieur du Parlement – Propos portant atteinte à la dignité du Parlement et au bon déroulement des travaux parlementaires – Sanctions disciplinaires de perte du droit à l’indemnité de séjour et de suspension temporaire de participation à l’ensemble des activités du Parlement – Liberté d’expression – Obligation de motivation – Erreur de droit »

Sommaire – Arrêt du Tribunal (sixième chambre élargie) du 31 mai 2018

1.      Recours en annulation – Moyens – Défaut ou insuffisance de motivation – Moyen distinct de celui portant sur la légalité au fond

(Art. 263 TFUE)

2.      Actes des institutions – Motivation – Obligation – Portée et limites

(Art. 296 TFUE)

3.      Droits fondamentaux – Liberté d’expression – Consécration aux articles 11 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et 10 de la convention européenne des droits de l’homme – Sens et portée identiques

(Art. 6, § 1, al. 3, et 3, TUE ; charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 11 et 52, § 3 et 7)

4.      Droits fondamentaux – Liberté d’expression – Limitations – Conditions – Limitations correspondant à celles tolérées dans le cadre de l’article 10 de la convention européenne des droits de l’homme

(Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 11 et 52, § 1)

5.      Parlement européen – Membres – Droits – Liberté d’expression – Limites

(Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, art. 11)

6.      Droit de l’Union européenne – Interprétation – Textes plurilingues – Interprétation uniforme – Divergences entre les différentes versions linguistiques – Contexte et finalité de la réglementation en cause comme base de référence

7.      Parlement européen – Membres – Régime disciplinaire – Sanctions – Propos portant atteinte à la dignité du Parlement et au bon déroulement des travaux parlementaires – Nécessité d’un trouble grave de la séance ou d’une perturbation grave des travaux du Parlement

(Règlement intérieur du Parlement européen, art. 11 et 166)

8.      Responsabilité non contractuelle – Conditions – Préjudice réel et certain causé par un acte illégal – Annulation de l’acte illégal attaqué – Réparation adéquate du préjudice moral

(Art. 340, al. 2, TFUE)

1.      Voir le texte de la décision.

(voir point 20)

2.      Voir le texte de la décision.

(voir point 21)

3.      Voir le texte de la décision.

(voir point 39)

4.      Voir le texte de la décision.

(voir points 42-46)

5.      La liberté d’expression des parlementaires doit se voir accorder une protection accrue eu égard à l’importance fondamentale que le Parlement joue dans une société démocratique. Cependant, s’il est vrai que tout propos tenu dans l’enceinte parlementaire appelle un haut degré de protection, vu le lien étroit existant entre le caractère véritablement démocratique d’un régime politique et le fonctionnement du Parlement, l’exercice de la liberté d’expression au sein du Parlement doit parfois s’effacer devant les intérêts légitimes que sont la protection du bon ordre des activités parlementaires et la protection des droits des parlementaires.

Il s’ensuit que, d’une part, un règlement interne du Parlement ne pourrait prévoir la possibilité de sanctionner des propos tenus par les parlementaires que dans l’hypothèse où ceux-ci porteraient atteinte au bon fonctionnement du Parlement ou représenteraient un danger sérieux pour la société tel que des appels à la violence ou à la haine raciale. D’autre part, le pouvoir, reconnu aux parlements, d’infliger des sanctions disciplinaires afin d’assurer la bonne conduite de leurs activités ou la protection de certains droits, principes ou libertés fondamentaux devrait se concilier avec la nécessité d’assurer le respect de la liberté d’expression des parlementaires.

(voir points 47, 48, 50, 51)

6.      Voir le texte de la décision.

(voir point 56)

7.      Eu égard à l’importance particulière que revêt la liberté d’expression des parlementaires et des limites strictes dans lesquelles des restrictions peuvent lui être apportées, les articles 11 et 166 du règlement intérieur du Parlement doivent être interprétés comme ne permettant pas de sanctionner un député en raison de propos tenus dans le cadre de ses fonctions parlementaires en l’absence de trouble grave de la séance ou de perturbation grave des travaux du Parlement. De surcroît, l’article 166, paragraphe 2, dudit règlement vise le comportement des députés. En revanche, les propos, les paroles ou les discours ne sont pas mentionnés et ne sont, dès lors, pas susceptibles de faire, en tant que tels, l’objet d’une mesure de sanction. La circonstance que l’article 11, paragraphe 3, du règlement intérieur comporte, dans son deuxième alinéa, une référence aux « propos ou [au] comportement diffamatoire, raciste ou xénophobe » ne saurait infirmer cette conclusion. En effet, une violation des principes définis à l’article 11 dudit règlement, auxquels renvoie l’article 166 du même règlement, à la supposer établie, ne peut, à elle seule, être sanctionnée en tant que telle, mais uniquement si elle s’accompagne d’un trouble ou d’une perturbation des travaux du Parlement d’une manière grave.

(voir points 65, 67, 70)

8.      Voir le texte de la décision.

(voir point 78)