Language of document : ECLI:EU:T:2007:270

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

12 septembre 2007 (*)

« FEOGA – Section ‘Garantie’ – Dépenses exclues du financement communautaire – Cultures arables – Huile d’olive – Audit financier – Délai de 24 mois »

Dans l’affaire T‑243/05,

République hellénique, représentée par M. G. Kanellopoulos et Mme E. Svolopoulou, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par Mme H. Tserepa-Lacombe et M. L. Visaggio, en qualité d’agents, assistés de Me N. Korogiannakis, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 2005/354/CE de la Commission, du 29 avril 2005, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie » (JO L 112, p. 14), en tant qu’elle exclut certaines dépenses effectuées par la République hellénique dans les secteurs des cultures arables et de l’huile d’olive ainsi qu’en matière d’audit financier,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),

composé de MM. J. Pirrung, président, N. J. Forwood et S. Papasavvas, juges,

greffier : Mme C. Kantza, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 20 mars 2007,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1         Le règlement (CEE) n° 729/70 du Conseil, du 21 avril 1970, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 94, p. 13), tel que modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 1287/95 du Conseil, du 22 mai 1995 (JO L 125, p. 1), a établi les règles générales applicables au financement de la politique agricole commune. Le règlement (CE) n° 1258/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, relatif au financement de la politique agricole commune (JO L 160, p. 103) a remplacé le règlement n° 729/70 et s’applique aux dépenses effectuées à partir du 1er janvier 2000.

2        En vertu de l’article 1er, paragraphe 2, sous b), et de l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 729/70 ainsi que de l’article 1er, paragraphe 2, sous b), et de l’article 2, paragraphe 2, du règlement n° 1258/1999, la section « Garantie » du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA) finance, dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles, les interventions destinées à la régularisation de ces marchés, entreprises selon les règles communautaires.

3        Selon l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70 et l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999, la Commission décide des dépenses à écarter du financement communautaire, lorsqu’elle constate que ces dernières n’ont pas été effectuées conformément aux règles communautaires. Lors de l’évaluation des montants à écarter, la Commission tient compte de la nature et de la gravité de l’infraction ainsi que du préjudice financier causé à la Communauté européenne.

4        L’article 5, paragraphe 2, sous c), cinquième alinéa, du règlement n° 729/70 prévoit qu’« [u]n refus de financement ne peut pas porter sur les dépenses effectuées antérieurement aux 24 mois ayant précédé la communication écrite par la Commission à l’État membre concerné des résultats [des] vérifications [de la Commission] ». L’article 7, paragraphe 4, cinquième alinéa, du règlement n° 1258/1999 contient une disposition identique.

5        Les modalités de la procédure d’apurement des comptes du FEOGA demeurent fixées par le règlement (CE) n° 1663/95 de la Commission, du 7 juillet 1995, établissant les modalités d’application du règlement n° 729/70 en ce qui concerne la procédure d’apurement des comptes du FEOGA, section « Garantie » (JO L 158, p. 6), tel que modifié notamment par le règlement (CE) n° 2245/1999 de la Commission, du 22 octobre 1999 (JO L 273, p. 5).

6        L’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95 dispose :

« Si, à l’issue d’une enquête, la Commission considère que les dépenses n’ont pas été effectuées conformément aux règles communautaires, elle communique les résultats de ses vérifications à l’État membre concerné et indique les mesures correctives à prendre pour garantir à l’avenir le respect des règles précitées.

La communication fait référence au présent règlement. L’État membre répond dans un délai de deux mois et la Commission peut modifier sa position en conséquence. Dans des cas justifiés, la Commission peut accorder une prorogation de ce délai.

Après l’expiration du délai accordé pour la réponse, la Commission convoque une discussion bilatérale et les deux parties essayent d’arriver à un accord sur les mesures à prendre, ainsi que sur l’évaluation de la gravité de l’infraction et du préjudice financier causé à la Communauté européenne. Après cette discussion et après toute date fixée par la Commission, en consultation avec l’État membre, après la discussion bilatérale pour la communication d’informations supplémentaires ou, si l’État membre n’accepte pas la convocation dans un délai fixé par la Commission, après l’échéance de ce délai, cette dernière communique formellement ses conclusions à l’État membre en faisant référence à la décision 94/442/CE de la Commission. Sans préjudice des dispositions du quatrième alinéa du présent paragraphe, cette communication évaluera les dépenses qu’elle envisage d’exclure au titre de l’article 5, paragraphe 2, [sous] c), du règlement [...] n° 729/70.

L’État membre informe la Commission dans les meilleurs délais des mesures correctives prises pour assurer le respect des règles communautaires et de la date effective de leur mise en œuvre. La Commission adopte, le cas échéant, une ou plusieurs décisions en application de l’article 5, paragraphe 2, [sous] c), du règlement [...] n° 729/70 pour exclure jusqu’à la date effective de mise en oeuvre des mesures correctives les dépenses affectées par le non-respect des règles communautaires. »

7        Les orientations pour l’application des corrections forfaitaires ont été définies dans le document n° VI/5330/97 de la Commission, du 23 décembre 1997, intitulé « Orientations concernant le calcul des conséquences financières lors de la préparation de la décision d’apurement des comptes du FEOGA-Garantie » (ci-après le « document n° VI/5330/97 »). Lorsque les informations fournies par l’enquête ne permettent pas d’évaluer les pertes subies par la Communauté, à partir d’une extrapolation de ces pertes, par des moyens statistiques ou par référence à d’autres données vérifiables, une correction forfaitaire peut être envisagée. Le taux de correction appliqué s’élève, en général, à 2 %, à 5 %, à 10 % ou à 25 % des dépenses déclarées, en fonction de l’ampleur du risque de perte.

 Antécédents du litige

8        Par la décision 2005/354/CE, du 29 avril 2005, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du FEOGA, section « Garantie » (JO L 112, p. 14, ci-après la « décision attaquée »), la Commission a écarté du financement communautaire, en ce qui concerne la République hellénique, dans les secteurs des cultures arables et de l’huile d’olive ainsi qu’en matière d’audit financier, la somme de 26 437 135,76 euros pour les exercices financiers de 1996 à 1998, de 2001 et de 2002.

9        Les motifs des corrections financières effectuées par la Commission ont été résumés dans le rapport de synthèse AGRI-64241-2004, du 31 octobre 2004, relatif aux résultats des contrôles dans l’apurement des comptes du FEOGA, section « Garantie », au titre de l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement (CEE) n° 729/70 et de l’article 7, paragraphe 4, du règlement (CE) n° 1258/1999 en ce qui concerne les restitutions à l’exportation, les fruits et légumes, les produits laitiers, le stockage public, les primes animales, les cultures arables, l’huile d’olive et les matières grasses, le développement rural et les retards de paiements (ci-après le « rapport de synthèse »).

10      Le recours vise trois types de corrections :

–        une correction forfaitaire de 5 % concernant les cultures arables en raison d’un niveau insuffisant de garantie de la régularité des demandes, soit 25 361 283 euros pour l’exercice 2002 ;

–        une correction ponctuelle d’un montant total de 200 146,68 euros concernant l’huile d’olive en raison de retards dans les retraits d’agrément et de la non-imposition de sanctions relatives à la qualité pour les exercices 1996 à 1998 ;

–        une correction ponctuelle de 488 788,96 euros pour non-respect des délais de paiement (audit financier) pour l’exercice 2001, qui s’analyse en 455 070,44 euros concernant l’aide aux vesces et en 33 718,52 euros concernant l’aide par hectare au riz.

 Procédure et conclusions des parties

11      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 30 juin 2005, la République hellénique a introduit le présent recours.

12      La République hellénique conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler ou, à titre subsidiaire, réformer la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

13      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la République hellénique aux dépens.

 Sur le bien-fondé du recours

14      Le recours porte sur trois interventions financées par le FEOGA, à savoir celles concernant les cultures arables, l’huile d’olive et l’audit financier. C’est dans cet ordre, en distinguant selon ces trois interventions, que le Tribunal examinera le bien-fondé des moyens présentés par la République hellénique.

 Sur les cultures arables

 Réglementation communautaire

15      Le règlement (CEE) n° 3508/92 du Conseil, du 27 novembre 1992, établissant un système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d’aides communautaires (JO L 355, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) n° 1593/2000 du Conseil, du 17 juillet 2000 (JO L 182, p. 4), prévoit que chaque État membre crée un tel système (ci-après le « SIGC ») qui s’applique notamment au régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables.

16      Conformément à l’article 1er, paragraphe 1, sous a), du règlement n° 3508/92, le SIGC s’applique, entre autres, aux aides prévues par le règlement (CEE) n° 1765/92 du Conseil, du 30 juin 1992, instituant un régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables (JO L 181, p. 12), remplacé à compter du 1er juillet 2000 par le règlement (CE) n° 1251/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, instituant un régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables (JO L 160, p. 1).

17      Selon l’article 2 du règlement n° 3508/92 :

« Le [SIGC] comprend les éléments suivants :

a) une base de données informatisée ;

b) un système d’identification des parcelles agricoles ;

c) un système d’identification et d’enregistrement des animaux ;

d) des demandes d’aides ;

e) un système intégré de contrôle. »

18      L’article 7 du règlement n° 3508/92 précise que le SIGC « porte sur l’ensemble des demandes d’aide présentées, notamment en ce qui concerne les contrôles administratifs, les contrôles sur place et, le cas échéant, les vérifications par télédétection aérienne ou spatiale ».

19      Aux termes de l’article 8 du règlement n° 3508/92 :

« 1. L’État membre procède à un contrôle administratif des demandes d’aides.

2. Les contrôles administratifs sont complétés par des contrôles sur place portant sur un échantillon des exploitations agricoles. Pour l’ensemble de ces contrôles, l’État membre établit un plan d’échantillonnage.

3. Chaque État membre désigne une autorité chargée d’assurer la coordination des contrôles prévus par le présent règlement.

4. Les autorités nationales peuvent, dans des conditions à fixer, utiliser la télédétection pour déterminer les superficies des parcelles agricoles, pour en identifier l’utilisation et pour en vérifier l’état.

[…] »

20      L’article 13, paragraphe 1, du règlement n° 3508/92, tel que modifié par le règlement (CE) n° 2466/96 du Conseil, du 17 décembre 1996 (JO L 335, p. 1), dispose que le SIGC est applicable, à partir du 1er février 1993, pour ce qui concerne les demandes d’aides, un système alphanumérique d’identification et d’enregistrement des espèces bovines et le système intégré de contrôle visé à l’article 7 et, au plus tard à partir du 1er janvier 1997, pour ce qui concerne les autres éléments visés à l’article 2.

21      Les modalités d’application du SIGC étaient fixées, pour les exercices concernés par la décision attaquée, par le règlement (CEE) n° 3887/92 de la Commission, du 23 décembre 1992, portant modalités d’application du SIGC relatif à certains régimes d’aides communautaires (JO L 391, p. 36), tel que modifié par le règlement (CE) n° 2801/1999 de la Commission, du 21 décembre 1999 (JO L 340, p. 29).

22      Les articles 6 et 7 du règlement n° 3887/92 prévoient les modalités détaillées des contrôles à effectuer par les autorités des États membres.

 Rapport de synthèse

23      Du 6 au 9 août 2001 et du 15 au 17 avril 2002, les services de la Commission ont effectué en Grèce des inspections portant sur la mise en place des instruments requis pour assurer la légalité et la régularité des paiements dans le secteur des cultures arables.

24      Selon le point B.7.1.1 du rapport de synthèse, la Grèce n’avait pas mis en place, en ce qui concerne l’année de récolte 2001, le SIGC ni la procédure d’agrément, par laquelle le ministère de l’Agriculture avait été invité, à partir du 16 octobre 1995, à faire réaliser tous les contrôles nécessaires avant d’effectuer des paiements aux bénéficiaires. La Commission indique que l’organisme chargé des paiements (la Gedidagep) a cependant continué à effectuer ces paiements sans disposer de preuves attestant la vérification préalable des demandes respectives par d’autres services, notamment certaines préfectures.

25      S’agissant de la mise en œuvre du SIGC, le même point du rapport de synthèse souligne que le système d’identification des parcelles agricoles (ci-après le « SIPA ») (voir point 17 ci-dessus), qui aurait dû être achevé le 1er janvier 1997 (voir point 20 ci-dessus), ne l’était pas encore en 2003 et que seuls 67,5 % des surfaces des cultures arables et des surfaces fourragères ont été identifiées dans le SIPA avec des parcelles de référence sur la base des orthophotographies. Partant, selon la Commission, une partie importante des terres, s’élevant à 28,2 % des surfaces concernées, a été identifiée au moyen de matériaux inappropriés, alors que 4,3 % des surfaces n’ont pas été identifiées du tout.

26      Selon le rapport de synthèse, les contrôles effectués sur place ont été d’une qualité insuffisante et, de surcroît, ont porté sur un échantillon faible de demandes d’aide et ne suffisaient pas, dès lors, pour assurer une vérification appropriée de l’éligibilité dans 100 % des cas ou empêcher un cumul anormal d’aide. Pour être efficaces, les inspections classiques doivent être effectuées avant ou peu de temps après la récolte. Or, la majeure partie des cultures étant récoltée entre la fin de mai et le début de juillet, la Commission indique que les autorités helléniques n’ont pas pu garantir, pour l’année 2001, le respect des conditions dans lesquelles les aides sont accordées, puisque 28 % des inspections classiques ont été réalisées après le 31 août. Selon la Commission, cette circonstance a une importance particulière pour les cultures de blé dur, qui est récolté au mois de juillet et représente 40 à 50 % des superficies des cultures arables grecques. Dans le rapport de synthèse, la Commission fait également état de déficiences en ce qui concerne la qualité des contrôles par télédétection (tardiveté dans la conclusion des contrats ainsi que dans les visites de suivi et concernant la communication des résultats à l’administration, ancienneté des photos, non-respect des recommandations relatives aux tolérances techniques).

27      Quant à la procédure d’agrément, la Commission dénonce une situation insatisfaisante dans les préfectures particulièrement au niveau de l’organisation du personnel, de la réalisation des contrôles ainsi que des tâches assumées par les organisations syndicales des agriculteurs.

 Sur le premier moyen, tiré de l’incompétence ratione temporis de la Commission

–       Arguments des parties

28      D’abord, le gouvernement grec mentionne, la limitation instaurée par les dispositions citées au point 4 ci-dessus. Il souligne, ensuite, que le règlement n° 1663/95 précise, à son article 8, paragraphe 1, premier alinéa, le contenu de la communication écrite par laquelle la Commission communique le résultat de ses vérifications aux États membres. Il fait également observer que cette même disposition prévoyait, avant sa modification par le règlement n° 2245/1999, que la communication en question devait inclure une évaluation des dépenses que la Commission envisageait d’exclure au titre de l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70 et de l’article 7, paragraphe 4, cinquième alinéa, du règlement n° 1258/1999.

29      Or, la limitation prévue par les articles auxquels il est fait référence au point 4 ci-dessus aurait pour but de protéger les États membres contre l’absence de sécurité juridique qui existerait si la Commission était en mesure de remettre en question des dépenses effectuées plusieurs années avant l’adoption d’une décision sur leur conformité avec les règles communautaires. De plus, ladite limitation aurait pour objectif de renforcer la transparence de la procédure en informant l’État membre en temps utile de l’appréciation du préjudice financier, mais aussi de la correction envisagée. Le rôle important des États membres dans la procédure d’apurement des comptes du FEOGA justifierait leur droit à être pleinement informés aux divers stades de la procédure et à présenter à chaque fois leurs observations.

30      Par conséquent, le gouvernement grec estime qu’il convient de vérifier si chaque communication faite au titre de l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1663/95 satisfait aux exigences de cette disposition. Dans ce cadre, l’expression « évaluation des dépenses que la Commission envisage d’exclure » devrait être interprétée en ce sens qu’une indication chiffrée du montant des dépenses en cause n’est pas nécessaire et qu’il suffit que soient indiqués les éléments permettant de calculer ce montant au moins approximativement.

31      Ces appréciations ne sauraient être remises en cause par la modification de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95 par le règlement n° 2245/1999. En effet, le déplacement de l’obligation d’évaluer la correction financière ne saurait démontrer une volonté de la part du législateur de supprimer la protection en faveur des États membres visée au point 29 ci-dessus. En revanche, son intention aurait été d’assortir la procédure d’apurement des comptes du FEOGA de l’opinion de l’État membre concerné. Il en résulterait qu’une communication qui n’inclurait pas une évaluation des dépenses que la Commission envisage d’exclure ne saurait déclencher le délai des 24 mois prévu par les règlements nos 729/70 et 1258/1999. La jurisprudence aurait affirmé que c’est la seconde communication prévue par l’article 8, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement n° 1663/95 qui déclenche le délai de 24 mois, puisque c’est dans cette communication que la Commission fait référence aux dépenses qu’elle envisage d’exclure.

32      En l’espèce, la première communication dans laquelle la Commission a effectué une évaluation des dépenses qu’elle se proposait d’exclure aurait été une lettre du 16 février 2004. Il en résulterait que la Commission ne serait pas compétente ratione temporis pour imposer une correction concernant des dépenses effectuées avant le 16 février 2002. Partant, la décision attaquée devrait être annulée en tant qu’elle applique, dans le domaine des cultures arables, une correction financière aux dépenses concernant l’année de récolte 2001.

33      La Commission, pour sa part, nie avoir communiqué les résultats de ses vérifications pour la première fois par la lettre du 16 février 2004. Elle précise l’avoir déjà fait par deux lettres des 1er mars et 21 août 2002, qui satisfaisaient aux exigences de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95.

34      Par ailleurs, l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95, tel que modifié par le règlement n° 2245/1999, n’exigerait plus que la Commission fasse une évaluation des dépenses à écarter dans sa communication aux États membres. Cette communication remplirait une fonction d’avertissement. De surcroît, il y aurait lieu d’opérer une distinction entre, d’une part, la « communication des constatations », visée à l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1663/95 et, d’autre part, la « communication formelle des conclusions », visée, initialement, au second alinéa de cette même disposition, puis au troisième alinéa de celle-ci après sa modification par le règlement n° 2245/1999. La communication des constatations ne devrait pas répondre à des conditions de forme aussi strictes que la communication formelle des conclusions. Partant, la Commission considère que les lettres des 1er mars et 21 août 2002 répondaient, contrairement à ce que prétend le gouvernement grec, aux exigences relatives à la communication des résultats de ses vérifications.

35      La Commission s’appuie sur une interprétation littérale de l’article 7, paragraphe 4, cinquième alinéa, du règlement n° 1258/1999 et de l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1663/95 pour en déduire que le point de départ du délai de 24 mois est la lettre par laquelle elle communique les résultats de ses vérifications. Mise à part cette interprétation, l’objet de cette dernière disposition consisterait en une meilleure protection des droits procéduraux des États membres. En conséquence, l’argumentation du gouvernement grec fondée sur une jurisprudence élaborée sous l’empire de l’ancienne formulation de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95 ne saurait prospérer.

–       Appréciation du Tribunal

36      Il ressort d’une jurisprudence bien établie que l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70 et l’article 7, paragraphe 4, cinquième alinéa, du règlement n° 1258/1999, d’une part, et l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1663/95, d’autre part, visent la même étape de la procédure d’apurement des comptes du FEOGA, c’est-à-dire l’envoi de la première communication par la Commission à l’État membre à l’issue des contrôles qu’elle a effectués. Partant, l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1663/95 précise le contenu de la communication écrite dont font état l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70 et l’article 7, paragraphe 4, cinquième alinéa, du règlement n° 1258/1999 (arrêts de la Cour du 24 janvier 2002, Finlande/Commission, C‑170/00, Rec. p. I‑1007, points 26 et 27 ; du 13 juin 2002, Luxembourg/Commission, C‑158/00, Rec. p. I‑5373, point 23, et du 24 février 2005, Grèce/Commission, C‑300/02, Rec. p. I‑1341, point 68).

37      Avant sa modification par le règlement n° 2245/1999, l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1663/95 prévoyait que la communication en question devait indiquer les mesures correctives à prendre pour garantir à l’avenir le respect des règles concernées ainsi qu’une évaluation des dépenses que la Commission envisage d’exclure, et faire référence au règlement n° 1663/95 (arrêts Finlande/Commission, point 36 supra, point 26 ; Luxembourg/Commission, point 36 supra, point 23, et Grèce/Commission, point 36 supra, point 69).

38      Toutefois, l’obligation pour la Commission de mentionner, dans la communication qu’elle envoie à l’État membre concerné au titre de l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1663/95, une évaluation des dépenses qu’elle envisage d’exclure a été abrogée par le règlement n° 2245/1999. Cette évaluation doit désormais figurer dans la lettre envoyée après les discussions bilatérales, conformément à l’article 8, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement n° 1663/95, tel que modifié.

39      Le gouvernement grec ne conteste pas que la Commission ne soit plus obligée d’effectuer une évaluation des dépenses à exclure dans la première lettre qu’elle envoie à l’issue de son enquête. Il fait cependant valoir que, si la Commission doit désormais effectuer cette évaluation dans la seconde lettre qu’elle envoie à l’issue des discussions bilatérales et avant la procédure de conciliation, c’est l’envoi de cette lettre qui doit dorénavant être considéré comme le point de départ du délai de 24 mois. Afin d’étayer son allégation, le gouvernement grec prend appui sur la formulation des arrêts mentionnés ci-dessus, selon laquelle, si la Commission ne respecte pas les obligations qu’elle s’est imposées par le règlement n° 1663/95, ce non-respect peut, selon son importance, vider de sa substance la garantie procédurale accordée aux États membres par les dispositions des règlements nos 729/70 et 1258/1999, qui limitent dans le temps les dépenses sur lesquelles peut porter un refus de financement par le FEOGA.

40      Si, par conséquent, la communication de l’évaluation des dépenses à exclure fait partie de la « garantie procédurale accordée aux États membres par l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70 et par l’article 7, paragraphe 4, cinquième alinéa, du règlement n° 1258/1999 », il y a lieu de conclure, selon le gouvernement grec, que le délai de 24 mois est à calculer à partir du moment où cette communication est effectuée.

41      L’argumentation du gouvernement grec ne saurait être accueillie. Il convient de rappeler que, tant selon l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70 que selon l’article 7, paragraphe 4, cinquième alinéa, du règlement n° 1258/1999, le délai de 24 mois est à calculer à partir du moment où la Commission communique à l’État membre concerné les résultats de ses vérifications, c’est-à-dire les résultats des investigations sur place, dans les États membres, effectuées par ses services (arrêt Finlande/Commission, point 36 supra, point 27).

42      Il n’est donc aucunement requis par les règlements nos 729/70 et 1258/1999 que la Commission présente une évaluation des dépenses qu’elle envisage d’exclure afin que le délai de 24 mois soit déclenché. Cette exigence n’était prévue que dans le règlement n° 1663/95 avant sa modification par le règlement n° 2245/1999. Dès lors, la garantie procédurale conférée, sous la forme du délai de 24 mois, par les dispositions susvisées des règlements nos 729/70 et 1258/1999 n’est liée qu’à la communication des résultats des vérifications de la Commission et non à une évaluation des dépenses que cette dernière envisage d’exclure. En effet, ce sont ces résultats qui constituent la base de toute correction et qui doivent être communiqués à l’État membre aussitôt que possible afin que ce dernier puisse remédier aux déficiences constatées dans les meilleurs délais et, par conséquent, éviter de nouvelles corrections dans l’avenir.

43      Il en résulte que, même si l’évaluation des dépenses à exclure s’effectue dorénavant dans la seconde communication de la Commission envoyée à l’État membre concerné à l’issue des discussions bilatérales, le délai de 24 mois est toujours à calculer, selon les règlements nos 729/70 et 1258/1999, à partir de la première communication, qui expose les résultats des vérifications.

44      Cette position n’affecte pas les droits procéduraux invoqués par le gouvernement grec. En effet, les décisions en matière d’apurement des comptes du FEOGA sont prises à l’issue d’une procédure contradictoire au cours de laquelle les États membres concernés disposent de toutes les garanties requises pour présenter leur point de vue (arrêt de la Cour du 29 janvier 1998, Grèce/Commission, C‑61/95, Rec. p. I‑207, point 39). En particulier, depuis l’entrée en vigueur du règlement no 2245/1999, les États membres ont toujours la possibilité de faire valoir leur position quant aux constatations que la Commission formule à l’issue de ses investigations, dans la lettre prévue à cet effet par l’article 8, paragraphe 1, deuxième alinéa, du règlement n° 1663/95, tel que modifié, ainsi que lors de la discussion bilatérale qui suit. Quant aux corrections envisagées, qui sont communiquées pour la première fois dans la lettre envoyée après les discussions bilatérales, les États membres ont la possibilité de présenter leur point de vue lors des étapes suivantes de la procédure, notamment, en saisissant l’organe de conciliation à cet égard.

45      Dans ces conditions, il ne saurait être considéré que les États membres se trouvent dans un état d’incertitude insupportable, tel qu’allégué par le gouvernement grec, lorsque la Commission ne leur fait pas part, dès sa première communication, de son évaluation relative aux dépenses qu’elle envisage d’exclure du financement communautaire. En effet, même avant la modification du règlement no 1663/95, l’évaluation de ces dépenses, que la Commission effectuait dans sa première communication, n’était pas définitive et, dès lors, était susceptible d’être revue à la lumière des réponses fournies par l’État membre lors de la procédure administrative. Par conséquent, aussi longtemps que la correction finale n’est pas arrêtée, une incertitude quant à son niveau est inhérente à toute procédure prévoyant des contacts bilatéraux préalables à l’adoption de la décision définitive.

46      Partant, c’est la lettre envoyée au titre de l’article 8, paragraphe 1, premier alinéa, du règlement n° 1663/95, tel que modifié, qui marque le point de départ du délai de 24 mois. En l’espèce, la Commission a communiqué aux autorités helléniques les résultats de ses vérifications par lettres des 1er mars et 21 août 2002. La correction forfaitaire appliquée ne concernant que les dépenses de l’exercice 2002, elle a été effectuée conformément au délai de 24 mois prévu à l’article 7, paragraphe 4, cinquième alinéa, du règlement n° 1258/1999. Le premier moyen d’annulation doit donc être rejeté.

 Sur le deuxième moyen, tiré des erreurs de droit et de fait assorties d’une insuffisance de motivation

–       Arguments des parties

47      Premièrement, le gouvernement grec fait valoir que le SIPA ne constitue pas un contrôle, mais un moyen de contrôle.

48      Deuxièmement, le pourcentage de 67,5 % des terres dûment identifiées en tant que cultures arables et surfaces fourragères correspondrait, en réalité, aux 70,5 % des surfaces ayant fait l’objet d’un paiement. En effet, les autorités helléniques n’auraient effectué aucun paiement pour les 4,3 % des terres n’ayant pas été identifiées (voir point 25 ci-dessus). Cet élément serait important parce qu’il remettrait en cause un des arguments sur lesquels la Commission a fondé la correction litigieuse.

49      Troisièmement, le gouvernement grec indique que le système alphanumérique en vigueur avant l’adoption du SIPA reposait sur des éléments (plans et documents cadastraux, cartes, etc.) correspondant à ceux sur la base desquels ont été identifiées 28,2 % des superficies déclarées (voir point 25 ci-dessus).

50      Quatrièmement, les autorités auraient effectué, avant la mise en œuvre du SIPA, toutes sortes de contrôles (sur place, croisés, etc.) sur la base du système alphanumérique d’identification des parcelles sans susciter de doutes quant à la fiabilité de ce dernier, qui aurait simplement été amélioré par le SIPA.

51      Il résulterait de ce qui précède que, pour ce qui concerne l’année de récolte 2001, le SIPA aurait été appliqué à 70 % des superficies déclarées, alors que pour le reste les autorités helléniques auraient mis en œuvre un système qui, quoique non compatible avec le SIPA, aurait été absolument fiable et opérationnel. Partant, l’ensemble des paiements effectués pour l’année de récolte 2001 aurait été couvert par un système de contrôle fiable et opérationnel.

52      Le gouvernement grec conteste le grief selon lequel la Gedidagep aurait continué à effectuer des paiements sans disposer de preuves attestant la vérification des demandes respectives par d’autres services, notamment certaines préfectures (voir point 24 ci-dessus). Tout en soulignant le caractère rigoureux de la procédure d’apurement des comptes du FEOGA, le gouvernement grec souligne que la Gedidagep a été remplacée, en tant que service du ministère de l’Agriculture et organisme chargé des paiements, par l’Opekepe au cours de l’année 2001, élément factuel dont la Commission était au courant.

53      Il y aurait donc lieu d’annuler la décision attaquée en ce qu’elle impose la correction forfaitaire en question.

54      Selon la Commission, le gouvernement grec admet que le SIPA n’était pas opérationnel, mais fait valoir que les autorités helléniques appliquaient des systèmes de contrôle différents mais appropriés, selon elles, pour atteindre le même résultat. Or, selon une jurisprudence bien établie, même à supposer que des contrôles alternatifs aient été organisés, les États membres seraient tenus d’appliquer des mesures spécifiques de contrôle instaurées par un règlement sans qu’il soit nécessaire d’apprécier si un système de contrôle différent éventuellement appliqué serait plus efficace.

55      Partant, en admettant que les autorités helléniques n’aient pas effectué de paiements pour les 4,3 % des surfaces qui n’ont pas été identifiées, l’identification de 28,2 % des surfaces sur la base d’un système non compatible avec le SIPA, et d’ailleurs non fiable, justifierait pleinement la correction forfaitaire appliquée. Le SIPA requerrait en outre une application sur l’ensemble des surfaces afin de garantir l’exactitude des résultats qu’il présente.

56      Quant à la référence au nom exact de l’organisme chargé des paiements, la Commission souligne l’absence de pertinence de cet élément ainsi que le fait que l’Opekepe a remplacé la Gedidagep à partir du 3 septembre 2001, alors que l’enquête en question a eu lieu en août 2001.

–       Appréciation du Tribunal

57      En vertu d’une jurisprudence constante, il appartient à la Commission, aux fins de prouver l’existence d’une violation des règles de l’organisation commune des marchés agricoles, non pas de démontrer d’une façon exhaustive l’insuffisance des contrôles effectués par les administrations nationales ou l’irrégularité des chiffres transmis par elles, mais de présenter un élément de preuve du doute sérieux et raisonnable qu’elle éprouve à l’égard de ces contrôles ou de ces chiffres. Cet allégement de l’exigence de la preuve pour la Commission s’explique par le fait que c’est l’État membre qui est le mieux placé pour recueillir et vérifier les données nécessaires à l’apurement des comptes du FEOGA, et auquel il incombe, en conséquence, de présenter la preuve la plus détaillée et complète de la réalité de ses contrôles ou de ses chiffres et, le cas échéant, de l’inexactitude des affirmations de la Commission (arrêt de la Cour du 11 janvier 2001, Grèce/Commission, C‑247/98, Rec. p. I‑1, points 7 à 9 ; du 6 mars 2001, Pays-Bas/Commission, C‑278/98, Rec. p. I‑1501, points 39 à 41, et du 19 juin 2003, Espagne/Commission, C‑329/00, Rec. p. I‑6103, point 68).

58      Ainsi, en l’espèce, il y a lieu de vérifier si le gouvernement grec a démontré l’inexactitude des appréciations de la Commission ou l’absence de risque de perte ou d’irrégularité pour le FEOGA (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 24 février 2005, Pays-Bas/Commission, C‑318/02, non publié au Recueil, point 36) sur la base de l’application d’un système de contrôle fiable et efficace (voir, en ce sens, arrêt du 24 février 2005, Grèce/Commission, point 36 supra, point 95).

59      S’agissant de l’argument tiré du pourcentage précis des surfaces couvertes par le SIPA, celui-ci doit être examiné conjointement avec l’argument relatif à l’utilisation d’un système alphanumérique fiable et opérationnel autre que le SIPA pour l’identification de 28,2 % des terres déclarées. Il convient de souligner à cet égard que, lorsqu’un règlement institue des mesures spécifiques de contrôle, les États membres sont tenus de les appliquer sans qu’il soit nécessaire d’apprécier le bien-fondé de leur thèse selon laquelle un système de contrôle différent éventuellement appliqué serait plus efficace (arrêt de la Cour du 21 mars 2002, Espagne/Commission, C‑130/99, Rec. p. I‑3005, point 87, et du 9 septembre 2004, Grèce/Commission, C‑332/01, Rec. p. I‑7699, point 62).

60      Partant, même à supposer que des contrôles alternatifs aient été organisés, ce fait ne saurait infléchir l’appréciation de la Commission fondée sur la non-application du SIPA, circonstance que le gouvernement grec ne conteste d’ailleurs pas. Par conséquent, la question de savoir si le pourcentage des terres couvertes par l’application du SIPA s’élève à 67,5 ou à 70,5 % n’est pas d’une importance déterminante, étant donné qu’une partie significative des surfaces en question n’était pas couverte par le SIPA.

61      De surcroît, il y a lieu de rappeler l’importance que revêt la mise en place du SIGC. En effet, l’identification des parcelles agricoles à elle seule, non encore intégralement achevée en Grèce, constitue un élément clé de l’application correcte d’un régime lié à la superficie. L’absence d’un système fiable d’identification des parcelles implique en soi un risque élevé de préjudice pour le budget communautaire (arrêts de la Cour du 24 février 2005, Grèce/Commission, point 36 supra, point 97, et du 17 mars 2005, Grèce/Commission, C‑285/03, non publié au Recueil, point 62).

62      Quant au remplacement de la Gedidagep par l’Opekepe, force est de constater que le gouvernement grec n’a pas démontré en quoi une prétendue erreur concernant le nom de l’organisme payeur pouvait affecter le bien-fondé des griefs formulés par la Commission.

63      Le gouvernement grec n’étant pas parvenu à démontrer l’inexactitude des appréciations de la Commission ni l’absence d’incidence sur le budget communautaire des irrégularités constatées, le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du document n° VI/5330/97 et du principe de proportionnalité, d’une erreur de fait et d’une insuffisance de motivation concernant le taux de la correction forfaitaire en question

–       Arguments des parties

64      Le gouvernement grec se réfère aux appréciations figurant aux points 48 à 50 ci-dessus en ajoutant qu’il y aurait lieu de tenir également compte des difficultés résultant du morcellement important des parcelles agricoles ainsi que du progrès réalisé depuis 2001. En effet, le SIPA couvrirait aujourd’hui 90 % du pays.

65      S’agissant des inspections classiques (voir point 26 ci-dessus), le gouvernement grec souligne qu’elles ont concerné plus de 10 % des demandes d’aides et qu’il s’agit donc d’un pourcentage supérieur à celui requis par la réglementation communautaire. De surcroît, plus de 200 000 ha desdites surfaces constitueraient des cultures printanières (maïs) qui sont récoltées jusqu’au milieu de l’automne, ce qui expliquerait la possibilité d’effectuer des inspections après le 31 août. Le climat xérothermique régnant dans le pays favoriserait d’ailleurs le maintien des résidus de la culture dans un état relativement identifiable pendant une période assez longue, ce qui permettrait l’identification de la culture de blé dur. Au cas où le contrôle s’effectuerait après la récolte, les autorités compétentes demanderaient aux producteurs de ne pas détruire les résidus aux fins de l’achèvement des inspections. Ainsi, le grief de la Commission concernant les inspections classiques ne saurait justifier ou étayer utilement la correction forfaitaire appliquée.

66      En ce qui concerne les contrôles par télédétection (voir point 26 ci-dessus), le gouvernement grec fait valoir que les retards dus aux procédures d’adjudication ne sauraient fausser les résultats des contrôles et, dès lors, constituer un véritable risque pour le FEOGA. En effet, la télédétection s’effectuerait sur la base d’images satellites prises avant la récolte et à différents stades du développement.

67      Pour ce qui est de la tolérance technique admise (voir point 26 ci-dessus), le gouvernement grec fait observer qu’elle a été fixée à plus ou moins 3 m à la suite d’une enquête et conformément aux spécifications techniques établies en collaboration avec le Centre commun de recherche d’Ispra (document du 24 novembre 2000). De plus, cette tolérance, qui aurait été appliquée sur les orthophotographies de 1996 à 1998, serait préférable à celle fixée à plus ou moins 5 m qui aurait été appliquée si les autorités avaient utilisé des images satellites.

68      Quant à l’ancienneté des orthophotographies datant des années 1996 à 1998, la Commission aurait elle-même admis, dans sa lettre du 21 août 2002, qu’une ancienneté de cinq ans est considérée comme satisfaisante. Partant, les griefs relatifs aux contrôles par télédétection ne pourraient justifier ou étayer utilement la correction forfaitaire appliquée, qui, en tout état de cause, serait entachée d’un défaut de motivation.

69      À titre subsidiaire, le gouvernement grec fait valoir qu’une correction ne dépassant pas 2 % des dépenses déclarées serait conforme au principe de proportionnalité.

70      La Commission, pour sa part, réitère son appréciation figurant au point 55 ci-dessus. Le SIPA constituerait un élément clé dans le système des contrôles, dont la République hellénique n’aurait pas respecté le nombre, la fréquence ou la rigueur préconisés par la réglementation communautaire.

71      La Commission ne nie pas le progrès réalisé jusqu’à ce jour (voir point 64 ci-dessus), mais souligne que celui-ci concerne des périodes postérieures à celle en question.

72      Pour ce qui est des arguments relatifs à la possibilité d’effectuer des contrôles après la récolte (voir point 65 ci-dessus), la Commission maintient que, la récolte effectuée, une parcelle n’offre pas d’informations suffisamment précises sur la production. Elle souligne que les mesures de soutien en question se fondent sur la production et non sur la surface cultivée. Le blé dur, dont la récolte a lieu vers la fin de juillet et au début d’août, constituerait, par ailleurs, la majeure partie des cultures.

73      La Commission confirme qu’elle accepte la tolérance de plus ou moins 3 m, tout en précisant, néanmoins, ne pas avoir formulé, en l’espèce, un grief s’y rapportant. En revanche, son grief concernerait la tolérance de 5 % pour au moins 50 % de la surface contrôlée. Cette tolérance serait prévue dans le document de travail n° VI/8388/94 portant recommandations pour les mesures sur place des superficies et mentionnée dans le document du 24 novembre 2000 issu du Centre commun de recherche (voir point 67 ci-dessus).

74      Quant à l’ancienneté des orthophotographies, la Commission précise qu’elle accepte une ancienneté remontant jusqu’à cinq ans pour la constitution du SIPA, mais les contrôles sur place nécessitent des photos de la même année. En effet, selon la Commission, des orthophotographies archivées peuvent servir aux mesurages dans le cadre du SIPA. Toutefois, il serait évidemment impossible d’utiliser des orthophotographies anciennes pour enregistrer la récolte relative à un exercice financier ultérieur. Étant donné que les aides prévues par les règlements nos 1765/92 et 1251/1999 sont calculées sur la base de la production, la Commission considère que la constatation de ce qu’une parcelle spécifique a été cultivée pendant une année de récolte précise avec une culture particulière est d’une importance centrale. Or, cette constatation pourrait être fondée uniquement sur des photos de la même année de récolte.

–       Appréciation du Tribunal

75      En ce qui concerne l’argument réitéré relatif au pourcentage exact des surfaces couvertes par le SIPA ainsi qu’à l’application d’autres méthodes de contrôle, il convient de renvoyer à l’analyse effectuée aux points 59 et 60 ci-dessus.

76      Au demeurant, dans ses arrêts du 24 février 2005, Grèce/Commission, point 36 supra (points 97 et 100), et du 17 mars 2005, Grèce/Commission, point 61 supra (points 62 à 64), la Cour a considéré que l’inachèvement du SIGC justifiait en soi l’application d’une correction forfaitaire de 5 % sans qu’il soit nécessaire d’examiner en détail les questions de la qualité des contrôles par télédétection ou du taux des contrôles effectués sur place.

77      L’argument invoqué par le gouvernement grec lors de l’audience, selon lequel il y aurait lieu pour le Tribunal de s’écarter de ces conclusions au vu du progrès réalisé dans l’achèvement du SIGC, ne saurait être accepté. En effet, même à supposer établies les améliorations relatives au fonctionnement du SIGC, le gouvernement grec ne saurait soutenir que, en raison de ce constat, le taux des corrections à effectuer doit être réduit. En effet, en dépit de ces améliorations, le risque de préjudice pour le FEOGA, du fait de l’inachèvement d’une partie importante du SIGC, a continué à être très élevé, et cela depuis l’expiration du délai imparti pour la mise en oeuvre de ce dernier, à savoir le 1er janvier 1997 (arrêts du 24 février 2005, Grèce/Commission, point 36 supra, point 99, et du 17 mars 2005, Grèce/Commission, point 61 supra, point 63).

78      Par conséquent, la correction forfaitaire en question paraît conforme aux orientations établies par la Commission dans le document n° VI/5330/97. Le troisième moyen doit donc être rejeté dans son ensemble sans qu’il soit besoin de se prononcer sur le bien-fondé de l’argument relatif aux contrôles par télédétection fondés sur des images satellites prises avant la récolte et à l’ancienneté acceptable des orthophotographies.

 Sur l’huile d’olive

 Réglementation communautaire

79      Les règles générales relatives à l’aide dans le domaine de l’huile d’olive étaient établies, pour les exercices concernés, par le règlement (CEE) n° 3089/78 du Conseil, du 19 décembre 1978, arrêtant les règles générales relatives à l’aide à la consommation pour l’huile d’olive (JO L 369, p. 12), tel que modifié par le règlement (CE) n° 1582/96 du Conseil, du 30 juillet 1996 (JO L 206, p. 13).

80      Les modalités d’application du régime d’aide à la consommation pour l’huile d’olive étaient fixées, pour les exercices concernés, par le règlement (CEE) n° 2677/85 de la Commission, du 24 septembre 1985, portant modalités d’application du régime d’aide à la consommation pour l’huile d’olive (JO L 254, p. 5), tel que modifié par les règlements (CE) no 643/93 de la Commission, du 19 mars 1993 (JO L 69, p. 19), et (CE) n° 887/96 de la Commission, du 15 mai 1996 (JO L 119, p. 16).

 Rapport de synthèse

81      Eu égard aux inspections déjà effectuées par la Commission en juillet 1996 (concernant les exercices 1994 et 1995), le contrôle dans le secteur de l’huile d’olive a été limité, en l’espèce, à une analyse documentaire incluant de nombreux échanges de courriers entre 1999 et 2001 (point B.8.4.1 du rapport de synthèse). Cette analyse a confirmé que divers problèmes détectés concernant les exercices 1994 et 1995 avaient persisté, même si des améliorations notables avaient été introduites.

82      C’est ainsi qu’une correction ponctuelle d’un montant total de 200 146,68 euros a été appliquée pour les exercices 1996 à 1998 (point B.8.4.3 du rapport de synthèse).

 Arguments des parties

83      Le gouvernement grec avance un moyen d’annulation unique tiré de l’incompétence ratione temporis de la Commission. En effet, en se référant à l’analyse effectuée dans le cadre du premier moyen d’annulation concernant le secteur des cultures arables, le gouvernement grec fait valoir que la première lettre par laquelle la Commission a fait état de la correction en question a été celle du 14 avril 2004. Par conséquent, il estime que la Commission ne pouvait exclure des dépenses engagées avant le 14 avril 2002, sauf si les autorités helléniques avaient communiqué à la Commission les éléments nécessaires pour le calcul de ladite correction après cette date. Or, les éléments pertinents auraient été communiqués à la Commission bien plus tôt.

84      Partant, la décision attaquée doit être annulée en ce qu’elle impose une correction forfaitaire dans le domaine de l’huile d’olive.

85      La Commission conteste ces allégations. En effet, par sa lettre du 3 juillet 1998, elle aurait déjà exprimé la nécessité d’imposer les corrections appliquées pour les exercices 1994 et 1995 aux exercices suivants. Le caractère défaillant du système d’aides dans le domaine en question aurait été constaté depuis 1990 et aurait donné lieu aux corrections imposées pour les exercices financiers de 1992 à 1995. La correction en cause se fonderait sur les mêmes éléments factuels, étant donné que la Grèce n’aurait amélioré que partiellement son système d’aides. La République hellénique aurait eu connaissance des irrégularités en cause dès 1992, sans jamais les contester au fond. La Commission aurait réitéré ces griefs par lettre du 3 juillet 1998 et aurait, par lettre du 8 février 1999, demandé aux autorités helléniques de lui communiquer les mesures adoptées à cet égard pour les exercices 1996 et 1997. La demande d’informations aurait été réitérée dans l’invitation du 3 août 2001 à une réunion bilatérale.

86      En tout état de cause, les corrections pour les années 1996 à 1998 s’inscriraient dans le prolongement de celles appliquées depuis 1992. La République hellénique aurait donc été pleinement informée de la correction en cause dont elle admettrait indirectement le bien-fondé.

 Appréciation du Tribunal

87      Aux fins de l’analyse du présent moyen, il y a lieu, tout d’abord, de prendre en considération les constatations figurant aux points 36 à 46 ci-dessus. Ensuite, il convient de souligner que, indépendamment de la question de savoir si la date que le gouvernement grec considère comme le point de départ du délai de 24 mois est correcte, ce dernier a saisi le Tribunal, par le présent moyen, de la question relative à la compétence ratione temporis de la Commission pour imposer la correction en question.

88      À cet égard, il convient de relever que les éléments factuels de la procédure ayant donné lieu à cette correction et invoqués par les parties démontrent que, même sous l’empire du règlement n° 2245/1999, la Commission a agi en dehors de sa compétence ratione temporis.

89      En effet, par lettre du 3 juillet 1998, la Commission a informé les autorités helléniques de sa position finale à la suite du contrôle relatif aux exercices 1994 et 1995. Ainsi qu’il résulte du point B.8.4.1 du rapport de synthèse et de la lettre du 3 juillet 1998, ce contrôle avait mis en évidence un manque de suivi par le ministère de l’Agriculture des constatations et des propositions de sanctions émises par l’organisme de contrôle d’aides à l’huile d’olive inclus dans des rapports de contrôle envoyés audit ministère jusqu’à la fin d’octobre 1994. Par lettre du 12 janvier 1999, la Commission a informé les autorités helléniques, dans le cadre de la même procédure, du montant final de la correction ponctuelle qui serait proposée [3 068 123 875 drachmes grecques (GRD), soit 9 004 031,91 euros]. Cette correction a finalement été effectuée, ainsi qu’il est attesté au point B.8.4.1 du rapport de synthèse.

90      En ce qui concerne la présente procédure d’apurement des comptes du FEOGA portant sur les exercices 1996 à 1998, la Commission a, par lettre du 8 février 1999, demandé aux autorités helléniques de lui fournir certaines informations concernant les mesures correctives prises à l’encontre des entreprises relevant de la troisième des cinq catégories mentionnées dans la lettre du 3 juillet 1998, pour lesquelles les contrôles avaient révélé certaines irrégularités.

91      Par lettre du 2 mai 2001, envoyée au titre de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95, la Commission a communiqué à l’État membre les résultats de ses vérifications dans le cadre de l’enquête 2000/11 portant sur les dépenses effectuées au titre d’aide à la consommation d’huile d’olive pour les exercices 1996 à 1998. À cet égard, la Commission fait référence à la lettre du 8 février 1999. Par lettre du 3 août 2001, la Commission a convoqué l’État membre à une réunion bilatérale conformément à l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95, concernant, notamment, l’aide à la consommation d’huile d’olive. Enfin, par lettre du 14 avril 2004, la Commission a communiqué formellement ses conclusions aux autorités helléniques et a évalué les dépenses qu’elle envisageait d’exclure.

92      Il convient de considérer que, en l’espèce, la lettre du 8 février 1999 constitue le début d’un nouveau contrôle de la Commission et non une lettre au titre de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95.

93      À cet égard, il importe de relever que la correction en question effectuée au titre des exercices 1996 à 1998 a été fondée sur des constatations relatives à des faits postérieurs à ceux qui ont donné lieu à la correction ayant porté sur les exercices 1994 et 1995.

94      En effet, il résulte du point B.8.4.3 du rapport de synthèse, lu en combinaison avec la lettre de la Commission du 14 avril 2004, que la correction financière en question a été appliquée pour deux raisons. Il s’agit, premièrement, de retards dans les retraits d’agrément de certaines entreprises, qui auraient dû être effectués pour les exercices 1996 et 1997 en vertu de l’article 12, paragraphe 6, du règlement no 2677/85, tel que modifié par l’article 1er du règlement no 643/93, et, deuxièmement, de l’absence d’imposition de sanctions en raison d’irrégularités concernant la qualité de l’huile d’olive en vertu de l’article 5, paragraphe 2, du règlement no 2677/85, tel que modifié par l’article 1er du règlement no 887/96.

95      Ainsi qu’il ressort du point B.8.4.3 du rapport de synthèse, lu en combinaison avec une lettre de la Commission en date du 31 octobre 2001, la correction effectuée en raison de retards dans les retraits d’agrément est égale aux montants d’aide indûment perçus pendant les exercices 1996 et 1997 par quatre entreprises dont l’agrément aurait dû être retiré pour ces périodes.

96      De plus, il résulte de la communication de la Commission du 14 avril 2004 que la correction effectuée en raison de l’absence d’imposition de sanctions du fait d’irrégularités concernant la qualité de l’huile d’olive est égale aux sanctions pécuniaires qui auraient dû être imposées à 38 cas pendant les exercices 1996 à 1998 et qui devraient être portées en diminution des dépenses du FEOGA, en vertu de l’article 5, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement no 2677/85, tel que modifié, en dernier lieu, par l’article 1er du règlement no 887/96. Par ailleurs, il ressort de la communication du 14 avril 2004 que l’ensemble des échantillonnages effectués par les autorités nationales aux fins des contrôles de qualité a eu lieu après la fin de l’exercice 1995 (15 octobre 1995), alors que le passage de la lettre du 3 juillet 1998 concernant les entreprises de la troisième catégorie (voir point 90 ci-dessus) se réfère à des rapports de contrôle établis par les autorités helléniques jusqu’au mois d’octobre 1994.

97      Dans ces conditions, force est de constater que les défaillances ayant donné lieu à la correction en cause (non-retrait d’agréments et non-imposition de sanctions pécuniaires) sont postérieures à l’exercice 1995, qui est le dernier exercice concerné par le premier contrôle de la Commission. Partant, la thèse que la Commission a soutenue lors de l’audience, selon laquelle le contrôle en question ne saurait être distingué du premier contrôle ayant porté sur les exercices 1994 et 1995 (voir point 89 ci-dessus) ne peut être retenue. En effet, il y a lieu de considérer en l’espèce que, en vérifiant si les autorités helléniques avaient procédé aux retraits d’agréments ainsi qu’à l’imposition de sanctions pendant les exercices 1996 à 1998, la Commission a procédé à un nouveau contrôle, distinct du premier. De même, la garantie procédurale issue du délai de 24 mois instauré par les règlements nos 729/70 et 1258/1999 ne saurait être méconnue au seul motif que les constatations d’un contrôle sont en partie analogues à celles d’un contrôle antérieur.

98      Enfin, l’argument de la Commission selon lequel les autorités helléniques auraient accepté la possibilité de la correction en cause durant la procédure administrative ne saurait prospérer. En effet, cette circonstance ne suffit pas pour doter la Commission de la compétence ratione temporis requise par les règlements nos 729/70 et 1258/1999 afin d’imposer des corrections financières dans le cadre du FEOGA.

99      En l’espèce, la lettre du 2 mai 2001 envoyée au titre de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/95, tel que modifié par le règlement n° 2245/1999, est la première à comporter tous les éléments requis par le premier alinéa de cette disposition. C’est donc cette lettre qui constitue le point de départ à partir duquel doit être calculé le délai de 24 mois.

100    Il s’ensuit que la Commission était incompétente ratione temporis pour exclure des dépenses effectuées antérieurement au 2 mai 1999. Partant, il y a lieu d’annuler la décision attaquée en ce qu’elle exclut du financement communautaire des dépenses relatives à l’aide à la consommation d’huile d’olive.

 Sur l’audit financier

 Réglementation communautaire

101    En vertu de l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 1251/1999, « [l]es paiements [aux producteurs] sont effectués entre le 16 novembre et le 31 janvier suivant la récolte ».

102    Le règlement (CE) n° 296/96 de la Commission, du 16 février 1996, relatif aux données à transmettre par les États membres et à la prise en compte mensuelle des dépenses financées au titre de la section « Garantie » du FEOGA et abrogeant le règlement (CEE) n° 2776/88 (JO L 39, p. 5), précise les conditions dans lesquelles les États membres peuvent bénéficier de la couverture par le FEOGA, section « Garantie », des dépenses qu’ils ont exposées.

103    Aux termes de l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 296/96, tel que modifié par le règlement (CE) n° 1577/2001 de la Commission, du 1er août 2001 (JO L 209, p. 12) :

« Toute dépense payée au-delà des termes ou délais prescrits fera l’objet d’une prise en compte réduite dans le cadre des avances suivant les règles reprises ci-dessous :

a)      jusqu’à concurrence de 4 % des dépenses payées en respectant les termes et délais, aucune réduction n’est à opérer, le nombre de mois de retard n’ayant aucune influence ;

b)      après utilisation de la marge de 4 %, toute dépense supplémentaire effectuée avec un retard jusqu’à concurrence :

–        d’un mois sera réduite de 10 %,

–        de deux mois sera réduite de 25 %,

–        de trois mois sera réduite de 45 %,

–        de quatre mois sera réduite de 70 %,

–        de cinq mois ou plus sera réduite de 100 %.

Toutefois, la Commission appliquera un échelonnement différent et/ou des taux de réduction inférieurs ou nuls si des conditions particulières de gestion se présentent pour certaines mesures, ou si des justifications fondées sont apportées par les États membres.

Les réductions visées au présent article sont effectuées dans le respect des modalités prévues par l’article 14 du règlement (CE) n° 2040/2000. »

 Rapport de synthèse

104    Selon le point C.1.1.1 du rapport de synthèse, les services de la Commission ont examiné les retards de paiement constatés au cours de la période du 16 octobre 2000 au 15 octobre 2001 conformément à l’article 4 du règlement n° 296/96. À la suite de ce contrôle et des discussions bilatérales, la Commission a appliqué des corrections concernant huit postes budgétaires.

 Arguments des parties

105    Parmi les postes budgétaires concernés par les corrections en matière d’audit financier, le gouvernement grec conteste les corrections de 455 070,44 euros concernant l’aide aux vesces et de 33 718,52 euros concernant l’aide par hectare au riz.

106    Le gouvernement grec soulève un moyen d’annulation unique tiré d’une violation de l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 296/96, de l’article 7, paragraphe 4, et de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1258/1999 ainsi que du document n° VI/5330/97, assortie d’une insuffisance de motivation et d’une erreur de fait.

107    Il résulterait des dispositions susvisées que les États membres sont obligés d’observer les délais de paiement des aides, faute de quoi ils subiraient des corrections financières dégressives allant jusqu’à 100 % des dépenses. Or, la Commission devrait, premièrement, tenir compte, à cette fin, du préjudice financier qu’a subi la Communauté du fait de l’inobservation de ces délais et, deuxièmement, respecter le principe de proportionnalité. De surcroît, la Commission serait obligée d’appliquer des taux de réduction inférieurs ou nuls si des conditions particulières de gestion se présentent pour certaines mesures, ou si des justifications fondées sont apportées par les États membres. Partant, le dépassement d’un délai de paiement en raison de contrôles supplémentaires dans des cas ayant fait l’objet d’une contestation ou en raison de paiements complémentaires intervenus à la suite de l’examen des objections fondées sur des erreurs d’enregistrement dans des bases de données constituerait une condition particulière assortie de justifications fondées.

108    Les autorités helléniques auraient informé la Commission que le retard de paiement était dû à des contrôles supplémentaires indispensables, notamment dans la préfecture d’Héraklion, qui est la plus grande du pays en production de vesces. Par lettre du 26 janvier 2001, les autorités helléniques auraient demandé la prorogation du délai de paiement des aides afin de respecter les exigences du document de travail n° VI/7105/98 relatif à l’augmentation du taux de contrôle en cas de constatation d’irrégularités significatives. Par lettre du 1er février 2001, la Commission aurait rejeté cette demande, tout en mentionnant que les justificatifs s’y rapportant seraient pris en compte lors de la procédure d’apurement des comptes du FEOGA afin de ne pas imposer de correction. Le seuil de 4 % prévu par l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 296/96 (voir point 103 ci-dessus) n’aurait été dépassé qu’en raison de l’augmentation considérable des contrôles effectués par les autorités préfectorales d’Héraklion.

109    Or, la Commission aurait, par lettre du 6 novembre 2003, considéré que la réalisation des contrôles en question relevait de l’article 4, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 296/96. La Commission n’aurait donc dû imposer aucune correction ou, à tout le moins, n’imposer qu’une correction inférieure.

110    Pour ce qui est de la correction concernant l’aide par hectare au riz, le gouvernement grec souligne que les retards observés étaient dus à l’examen des objections fondées sur des erreurs d’enregistrement des éléments sur la base de données. S’agissant de l’une des trois préfectures concernées, le retard aurait été dû à une grève au sein d’une association des coopératives agricoles, circonstance constituant un cas de force majeure. Il s’ensuivrait que les retards en question seraient dus à des circonstances exceptionnelles visant la protection des intérêts financiers de la Communauté. Compte tenu de ces circonstances, le gouvernement grec demande l’annulation de la décision attaquée en ce qu’elle impose la correction en question ou, à titre subsidiaire, la limitation de celle-ci à 2 % des paiements effectués hors délai.

111    La Commission répond que l’article 4, paragraphe 2, sous b), dernier alinéa, du règlement n° 296/96 doit, en tant que disposition dérogatoire, faire l’objet d’une interprétation stricte, la charge de la preuve incombant à la partie qui souhaite s’en prévaloir.

112    S’agissant des aides aux vesces, les retards de paiement au-delà de la marge de 4 % (voir point 103 ci-dessus) auraient été injustifiés, cette marge étant octroyée en vue de faciliter l’approfondissement des contrôles ainsi que la réalisation de contrôles supplémentaires. La demande de prorogation du délai aurait d’ailleurs été introduite trois jours avant l’expiration du délai supplémentaire et ne saurait, dès lors, être acceptée. Il résulterait du document n° VI/5330/97 que, lorsque les États membres souhaitent obtenir une dérogation en raison de la réalisation de contrôles supplémentaires, ils doivent apporter la preuve que les sommes faisant l’objet d’une contestation dépassent le seuil de 4 % des dépenses payées. La Commission considère que les autorités helléniques n’ont pas dûment justifié le dépassement des délais et que, en tout état de cause, la demande de prorogation a été introduite tardivement.

113    Il en irait de même en ce qui concerne l’aide par hectare au riz. Le gouvernement grec ne saurait invoquer des circonstances relevant de sa propre sphère de responsabilité, telles que l’examen des recours et des objections en raison d’erreurs dans la base de données, pour justifier le dépassement des délais.

 Appréciation du Tribunal

114    Il convient de relever, ainsi qu’il ressort du tableau figurant au point C.1.1.4 du rapport de synthèse, que la Commission a appliqué, en ce qui concerne l’aide aux vesces et l’aide par hectare au riz, des corrections égales aux déductions déjà faites dans le cadre des avances mensuelles au titre de l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 296/96.

115    Il y a également lieu de souligner, à l’instar de la Commission, que l’article 4, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n° 296/96 constitue une disposition introduisant une dérogation et doit, dès lors, être interprété restrictivement.

116    Par ailleurs, les dépenses de financement à la charge du FEOGA doivent être calculées en supposant que les délais prévus par la réglementation agricole applicable sont respectés. En conséquence, lorsque les autorités nationales procèdent au paiement des aides après l’expiration du délai, elles imputent au FEOGA, ainsi qu’en atteste le quatrième considérant du règlement n° 296/96, des dépenses irrégulières et, dès lors, non éligibles (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 28 octobre 1999, Italie/Commission, C‑253/97, Rec. p. I‑7529 point 126). Par conséquent, l’État membre doit aménager son système de contrôles en tenant compte du délai imparti pour les paiements des aides par l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1251/1999 (voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 20 juin 2006, Grèce/Commission, T‑251/04, non publié au Recueil, point 76). Au surplus, la marge de 4 % prévue par l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 296/96 sert précisément à donner aux États membres la possibilité d’effectuer des contrôles supplémentaires tout en précisant que le nombre de mois de retard n’a aucune influence pour les paiements ne dépassant pas ce seuil.

117    Ainsi qu’il ressort du dossier, les autorités préfectorales d’Héraklion n’auraient informé le ministère de l’Agriculture des premiers résultats des contrôles que le 19 janvier 2001, ce dernier ayant rappelé, par lettre du 22 janvier 2001, l’obligation d’effectuer de nouveaux contrôles conformément au document VI/7105/98 (voir point 108 ci-dessus). Par lettre du 26 janvier 2001 (vendredi), ce ministère a sollicité une prorogation du délai de paiement expirant le 31 du même mois, sans pour autant préciser la culture concernée ni fournir des pièces justificatives s’y rapportant. Cette demande a été rejetée à juste titre par la Commission par télécopie du 1er février 2001 comme étant imprécise et, surtout, tardive.

118    Dans ces conditions, c’est à juste titre que la Commission a maintenu sa position dans sa lettre du 6 novembre 2003, selon laquelle le besoin d’effectuer les contrôles supplémentaires invoqué par les autorités helléniques ne devrait pas dépasser la marge de 4 % (voir point 103 ci-dessus).

119    Partant, le gouvernement grec n’a pas démontré que les conditions d’application de l’article 4, paragraphe 2, dernier alinéa, du règlement n° 296/96 étaient réunies en ce qui concerne les retards de paiements s’agissant de l’aide aux vesces.

120    Il en est de même en ce qui concerne l’aide par hectare au riz. En effet, la Commission souligne à bon droit que l’État membre ne saurait justifier des paiements tardifs en invoquant les carences concernant les procédures nationales et les recours qui en résultent. S’agissant de l’argument fondé sur la grève invoquée par les autorités helléniques en tant que cas de force majeure, celui-ci ne saurait prospérer. Le seul document s’y rapportant est une lettre en date du 25 octobre 2001 de la préfecture d’Imathia adressée au ministère de l’Agriculture expliquant que la grève en question avait eu comme conséquence l’envoi tardif, le 30 avril 2001, des résultats de l’examen des recours. Or, cette grève a entraîné un retard dans l’examen des recours introduits en raison d’erreurs dans les paiements de l’aide, complication imputable à l’État membre. Le gouvernement grec ne présente d’ailleurs aucun élément sur la durée de la grève en question ni sur son caractère inopiné ou pas. Le présent moyen d’annulation doit, par conséquent, être rejeté.

121    Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que la décision attaquée doit être annulée en tant qu’elle impose à la République hellénique une correction ponctuelle de 200 146,68 euros pour les exercices financiers 1996 à 1998 (aide à la consommation d’huile d’olive), alors que le recours doit être rejeté pour le surplus.

 Sur les dépens

122    Aux termes de l’article 87, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal peut répartir les dépens ou décider que chaque partie supporte ses propres dépens si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs. La République hellénique ayant succombé sur la plupart des chefs du recours, il y a lieu de décider qu’elle supporte, outre ses propres dépens, 70 % des dépens exposés par la Commission, cette dernière devant supporter 30 % de ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      La décision 2005/354/CE de la Commission, du 29 avril 2005, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie », est annulée en tant qu’elle impose à la République hellénique une correction ponctuelle de 200 146,68 euros pour les exercices financiers 1996 à 1998 (aide à la consommation d’huile d’olive).

2)      Le recours est rejeté pour le surplus.

3)      La République hellénique supportera, outre ses propres dépens, 70 % des dépens exposés par la Commission, cette dernière devant supporter 30 % de ses propres dépens.

Pirrung

Forwood

Papasavvas

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 septembre 2007.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       J. Pirrung

Table des matières

Cadre juridique

Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

Sur le bien-fondé du recours

Sur les cultures arables

Réglementation communautaire

Rapport de synthèse

Sur le premier moyen, tiré de l’incompétence ratione temporis de la Commission

– Arguments des parties

– Appréciation du Tribunal

Sur le deuxième moyen, tiré des erreurs de droit et de fait assorties d’une insuffisance de motivation

– Arguments des parties

– Appréciation du Tribunal

Sur le troisième moyen, tiré d’une violation du document n° VI/5330/97 et du principe de proportionnalité, d’une erreur de fait et d’une insuffisance de motivation concernant le taux de la correction forfaitaire en question

– Arguments des parties

– Appréciation du Tribunal

Sur l’huile d’olive

Réglementation communautaire

Rapport de synthèse

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur l’audit financier

Réglementation communautaire

Rapport de synthèse

Arguments des parties

Appréciation du Tribunal

Sur les dépens


* Langue de procédure : le grec.