Language of document : ECLI:EU:T:2007:175

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

13 juin 2007 (*)

« Procédure – Taxation des dépens »

Dans l’affaire T‑157/01 DEP,

Danske Busvognmænd, établie à Copenhague (Danemark), représentée par Me P. Dalskov, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. H. Støvlbæk et D. Triantafyllou, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenue par

Royaume de Danemark, représenté par M. J. Molde, en qualité d’agent, assisté de Mes P. Biering et K. Lundgaard Hansen, avocats,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande de taxation des dépens à rembourser par la Commission à la requérante à la suite de l’arrêt du Tribunal du 16 mars 2004, Danske Busvognmænd/Commission (T‑157/01, Rec. p. II‑917),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),

composé de MM. J. Pirrung, président, A. W. H. Meij et N. J. Forwood, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits, procédure et conclusions des parties

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 11 juillet 2001, Danske Busvognmænd, une fédération professionnelle danoise d’entreprises de transport par autobus, a introduit un recours visant à l’annulation de la décision SG (2001) D/287297 de la Commission, du 28 mars 2001 (aide NN 127/2000), déclarant compatible avec le marché commun l’aide accordée par les autorités danoises à une société de transport par autobus, à savoir Combus A/S, dans le cadre de la privatisation de celle-ci (ci-après la « décision attaquée »).

2        Par arrêt du 16 mars 2004, Danske Busvognmænd/Commission (T‑157/01, Rec. p. II‑917), le Tribunal a partiellement annulé la décision attaquée et, notamment, condamné la Commission à supporter les dépens exposés par la requérante.

3        Par lettre du 13 septembre 2004, la requérante a transmis à la Commission une demande de remboursement de ses dépens à hauteur de 1 181 752,06 couronnes danoises (DKK). Dans sa lettre en réponse du 14 mars 2005, la Commission a offert de payer la somme de 40 000 euros, correspondant à 297 600 DKK, taxe sur la valeur ajoutée (TVA) comprise.

4        Aucun accord n’étant intervenu entre les parties sur les dépens récupérables, la requérante a, par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 novembre 2006, demandé à celui-ci, en application de l’article 92, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sur les dépens.

5        Par mémoire déposé au greffe du Tribunal le 5 février 2007, la Commission a présenté ses observations sur cette demande. Par lettre déposée au greffe du Tribunal le même jour, le Royaume de Danemark a déclaré que, s’agissant d’un différend entre les parties principales, il n’avait aucune observation à faire sur la demande de taxation.

6        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        à titre principal, condamner la Commission à lui verser la somme de 1 181 752,06 DKK ;

–        à titre subsidiaire, la condamner à lui verser un montant inférieur, fixé par le Tribunal, mais non inférieur à 1 121 708,05 DKK ;

–        à titre plus subsidiaire, la condamner à payer un montant à fixer par le Tribunal.

7        La Commission demande au Tribunal de fixer le montant global des dépens récupérables à 40 000 euros.

 En droit

 Arguments des parties

8        Se référant à plusieurs notes d’honoraires de ses avocats, la requérante fait valoir que la somme réclamée à titre principal se compose des éléments suivants :

–        947 390,00 DKK (honoraires de consultation) ;

–        43 734,23 DKK (frais de voyage et de séjour) ;

–        5 780,83 DKK (frais de port et de redevances) ;

–        182 847,00 DKK (TVA sur la partie taxable des honoraires).

9        Pour justifier ces montants, la requérante affirme qu’elle avait confié le traitement de l’affaire à deux avocats et à un conseiller juridique, les tâches ayant été réparties entre eux et effectuées de la même manière que si elles avaient été accomplies par une seule personne. Or, les 579 heures de travail consacrées à la représentation de la requérante n’auraient pas servi de base à la facturation, et ce en raison du conventionnement et du plafonnement des honoraires. Par conséquent, il y aurait lieu de prendre pour base un temps de travail égal à seulement 410 heures. Selon la requérante, ce temps est modeste eu égard au caractère complexe, étendu et important de l’affaire.

10      Elle rappelle que l’affaire a donné lieu au dépôt d’une requête, d’une réplique, d’une demande visant à la communication de certains documents et à des observations sur le mémoire en intervention du Royaume de Danemark, ainsi qu’à un mémoire supplémentaire, suivis de la préparation de l’audience publique et de la participation à cette dernière. En ces diverses occasions, il aurait fallu compulser un dossier considérable. Par ailleurs, la tâche de ses conseils aurait été compliquée par le raisonnement ambigu contenu dans la décision attaquée.

11      La requérante soutient que le litige était complexe de par ses données factuelles et économiques et qu’il portait, notamment, sur les mêmes questions de principe que celles tranchées par l’arrêt de la Cour du 24 juillet 2003, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (C‑280/00, Rec. p. I‑7747, ci-après l’« arrêt Altmark »). Cet arrêt de la Cour et l’arrêt dans la présente affaire auraient défini de nouvelles frontières en matière d’aides d’État.

12      La présente affaire aurait donc eu une importance essentielle au regard du traitement des affaires d’aides d’État, notamment dans le secteur des transports par autobus, mais aussi en dehors de ce secteur, comme lors de la vente de la chaîne de télévision TV 2 Danemark. En outre, la requérante souligne le grand retentissement de la présente affaire, du point de vue économique, pour les parties à l’instance, la requérante ayant représenté les entreprises danoises de transport par autobus qui auraient beaucoup souffert du fait des aides d’État illégalement accordées par le Royaume de Danemark.

13      La requérante affirme encore avoir versé des honoraires à une société d’audit, à savoir le cabinet Ernst & Young, dont les services étaient devenus nécessaires du fait que plusieurs conclusions figurant dans la décision attaquée ne paraissaient pas conformes aux informations susceptibles d’être extraites des comptes officiels. Pour établir, dans le cadre de la procédure écrite, le caractère erroné des données factuelles utilisées par la Commission dans la décision attaquée, elle aurait dû charger Ernst & Young d’effectuer une série d’analyses comptables spécifiques.

14      Quant aux frais de voyage et de séjour, la requérante allègue qu’ils peuvent être répartis en trois postes concernant, d’abord, le suivi de l’affaire Altmark par l’un de ses avocats, ensuite, les frais de voyage de ses trois conseils aux fins de leur participation à l’audience dans la présente affaire et, enfin, les frais de voyage de ses représentants légaux aux fins de leur participation à cette audience.

15      S’agissant du caractère récupérable de la TVA, la requérante soutient qu’elle effectue des prestations de services non soumises à la TVA, de sorte qu’elle ne pouvait pas obtenir la déduction en amont de la TVA figurant sur les factures liées à la présente affaire. Par conséquent, il y aurait lieu de lui rembourser le montant de la TVA restant à sa charge dans le cadre de cette affaire.

16      À titre subsidiaire, la requérante accepte de renoncer aux honoraires dus pour le dépôt de la plainte précontentieuse (25 000 DKK) et pour le suivi de l’affaire Altmark (12 500 DKK), aux frais de voyage et de séjour relatifs à cette dernière affaire (9 235,23 DKK) et à la participation de ses représentants légaux à l’audience dans la présente affaire (13 208,78 DKK). Les frais de voyage et de séjour s’élèveraient ainsi à 21 290,22 DKK au total. Dans ces conditions, le montant global des dépens récupérables serait de 1 121 708,05 DKK.

17      À titre plus subsidiaire, la requérante considère comme récupérables les honoraires versés à ses deux avocats à hauteur de 723 750 DKK (TVA comprise) et à son conseiller juridique à hauteur de 193 000 DKK (exonérés de la TVA), les frais de voyage et de séjour à hauteur de 21 290,22 DKK et les frais d’envoi et d’autres redevances à hauteur de 5 780,83 DKK. Le montant total des dépens récupérables s’élèverait donc à 942 344,05 DKK.

18      La Commission qualifie d’excessives les sommes revendiquées par la requérante. Cette dernière exagérerait tant l’importance de l’affaire au regard du droit communautaire que les difficultés de la cause.

19      Elle rappelle que l’une des questions déterminantes du litige était de savoir si Combus devait accomplir une obligation de service public. Or, par son arrêt dans la présente affaire, le Tribunal aurait tranché cette question au regard des critères de principe déjà fixés par l’arrêt Altmark, ce qui relativiserait l’importance des questions soulevées en l’espèce. Il en irait de même pour la problématique de l’article 73 CE. Ainsi, la présente affaire aurait essentiellement porté sur la seule application, aux faits de la cause, d’une jurisprudence existante. L’importance de l’affaire pour le droit communautaire serait donc limitée et la difficulté de la cause ne saurait être considérée comme exceptionnelle.

20      Quant à l’ampleur du travail, la Commission relève que la requérante n’a pas produit de comptabilité, mais seulement le nombre total des heures consacrées au traitement de l’affaire, et ce sur la base d’un accord sur les honoraires. Les informations communiquées ne permettraient pas de vérifier si le montant réclamé correspond au travail effectivement réalisé par les conseils de la requérante.

21      La Commission ajoute que le nombre total des heures prétendument consacrées à l’affaire est de loin supérieur à ce qui était indispensable pour défendre les intérêts de la requérante. La prétention exorbitante de cette dernière serait indubitablement due au fait que pas moins de trois conseils ont participé au traitement de l’affaire. Par ailleurs, certains des conseils de la requérante auraient représenté cette dernière pendant la procédure administrative, ce qui leur aurait permis d’acquérir une connaissance approfondie du dossier qui pouvait être mise à profit pendant la procédure contentieuse.

22      En ce qui concerne les frais d’audit, la Commission fait observer que la requérante n’a pas établi que ces frais étaient indispensables à la défense de ses intérêts. Enfin, certains des griefs invoqués par la requérante auraient été rejetés par le Tribunal comme irrecevables (points 44 à 60 de l’arrêt Danske Busvognmænd/Commission, précité), de sorte qu’il n’y aurait pas lieu de prendre en considération le travail lié à ces griefs.

23      S’agissant des frais de voyage et de séjour, la Commission affirme que, ainsi qu’il ressort de la demande de taxation des dépens, la requérante a été représentée par pas moins de cinq personnes. Or, celle-ci ne saurait exiger la récupération des frais de voyage et de séjour occasionnés par ce nombre excessif de conseils. Les frais de « services de courrier » de la requérante apparaîtraient également superfétatoires. En effet, les « délais de distance » tiendraient compte de la nécessité d’expédier les actes de procédure, de sorte qu’il ne serait pas nécessaire de recourir à des services de courrier express.

 Appréciation du Tribunal

24      Selon l’article 91, sous b), du règlement de procédure, sont considérés comme dépens récupérables « les frais indispensables exposés par les parties aux fins de la procédure, notamment les frais de déplacement et de séjour et la rémunération d’un agent, conseil ou avocat ».

25      Il découle de cette disposition que les dépens récupérables sont limités, d’une part, à ceux exposés aux fins de la procédure devant le Tribunal et, d’autre part, à ceux qui ont été indispensables à ces fins (voir ordonnance du Tribunal du 28 juin 2004, Airtours/Commission, T‑342/99 DEP, Rec. p. II‑1785, point 13, et la jurisprudence citée).

26      À cet égard, il y a lieu de relever, d’emblée, que les honoraires se rapportant au dépôt de la plainte précontentieuse devant la Commission et au suivi de l’affaire Altmark, ainsi que les frais et la TVA y relatifs, sont exclus de tout remboursement dans le présent contexte, en ce qu’ils n’ont pas été exposés dans le cadre de la procédure devant le Tribunal dans la présente affaire (voir en ce sens, et par analogie, ordonnance de la Cour du 30 novembre 1994, British Aerospace/Commission, C‑294/90 DEP, Rec. p. I‑5423, points 11 et 12).

 Sur les honoraires d’avocat

27      Il est de jurisprudence constante que, à défaut de dispositions communautaires de nature tarifaire, le Tribunal doit apprécier librement les données de la cause, en tenant compte de l’objet et de la nature du litige, de son importance sous l’angle du droit communautaire ainsi que des difficultés de la cause, de l’ampleur du travail que la procédure contentieuse a pu causer aux agents ou aux conseils intervenus et des intérêts économiques que le litige a représentés pour les parties (voir ordonnances du Tribunal du 10 janvier 2002, Starway/Conseil, T‑80/97 DEP, Rec. p. II‑1, point 27, et la jurisprudence citée, et du 19 décembre 2006, WestLB/Commission, T‑228/99 DEP, non publiée au Recueil, point 61).

28      Il est également de jurisprudence constante que, dans le cadre de l’article 92 du règlement de procédure, le Tribunal n’est pas habilité à taxer les honoraires dus par les parties à leurs propres avocats, mais à déterminer le montant à concurrence duquel ces rémunérations peuvent être récupérées auprès de la partie condamnée aux dépens. En statuant sur la demande de taxation des dépens, le Tribunal n’a pas non plus à prendre en considération un tarif national fixant les honoraires des avocats ni un éventuel accord conclu à cet égard entre la partie intéressée et ses agents ou conseils (voir ordonnances Starway/Conseil, précitée, point 26, et WestLB/Commission, précitée, point 62, et la jurisprudence citée).

29      En outre, il appartient au juge de tenir compte principalement du nombre total d’heures de travail pouvant apparaître comme objectivement indispensable aux fins de la procédure devant le Tribunal, indépendamment du nombre d’avocats entre lesquels les prestations effectuées ont pu être réparties (voir ordonnance WestLB/Commission, précitée, point 63, et la jurisprudence citée).

30      Enfin, si la possibilité pour le juge communautaire d’apprécier la valeur du travail effectué dépend de la précision des informations fournies (ordonnance WestLB/Commission, précitée, point 61), il n’en a pas moins été jugé que l’absence de production des factures ou d’autres documents attestant le paiement effectif des honoraires exposés ne fait pas obstacle à la fixation par le Tribunal, sur la base d’une appréciation équitable, du montant des dépens récupérables (voir ordonnance du Tribunal du 26 janvier 2006, Camar/Conseil et Commission, T‑79/96 DEP et T‑260/97 DEP, non publiée au Recueil, point 53, et la jurisprudence citée).

31      C’est en fonction de ces critères qu’il convient d’évaluer le montant des honoraires récupérables en l’espèce.

32      Quant à l’objet, à la nature et à la difficulté de l’affaire, il apparaît que le litige relatif aux aides octroyées par les autorités danoises à Combus peut être qualifié de difficile tant sur le plan des faits que sur le plan juridique.

33      En effet, il s’agissait d’appliquer à une situation nationale complexe, à savoir le secteur danois des transports régionaux en commun par autobus, les dispositions du règlement (CEE) n° 1191/69 du Conseil, du 26 juin 1969, relatif à l’action des États membres en matière d’obligations inhérentes à la notion de service public dans le domaine des transports par chemin de fer, par route et par voie navigable (JO L 156, p. 1), tel que modifié par le règlement (CEE) n° 1893/91 du Conseil, du 20 juin 1991 (JO L 169, p. 1), en vue d’examiner si Combus, ancien monopole d’État, en exerçant ses missions de transport dans le cadre d’un régime d’appels d’offres, était soumise à des obligations de service public. En outre, le litige soulevait la question de l’applicabilité de l’article 87, paragraphe 1, et de l’article 87, paragraphe 3, sous c), CE et celle de savoir si le Royaume de Danemark était autorisé à invoquer directement le bénéfice de l’article 73 CE en dehors des cas visés par le droit communautaire dérivé, notamment le règlement (CEE) n° 1107/70 du Conseil, du 4 juin 1970, relatif aux aides accordées dans le domaine des transports par chemin de fer, par route et par voie navigable (JO L 130, p. 1). S’il est vrai que l’examen de toutes ces questions, dans les mémoires présentés par la requérante, n’a pas été facilité par l’arrêt Altmark, étant donné que cet arrêt n’a été prononcé qu’après la clôture de la procédure écrite dans la présente affaire, la difficulté du litige ne saurait, cependant, être considérée comme exceptionnelle.

34      Pour ce qui est de l’importance du litige sous l’angle du droit communautaire, force est de constater que l’affaire présente indubitablement un grand intérêt pour le secteur des transports en commun par autobus en ce qui concerne, notamment, le rapport entre la libéralisation de ce secteur et l’octroi d’aides d’État à des transporteurs chargés d’une obligation de service public.

35      S’agissant de l’intérêt économique en cause, il convient de rappeler que la fédération professionnelle requérante regroupait plus de 90 % des entreprises de transport régional en commun par autobus au Danemark, qui se trouvaient dans un rapport de concurrence avec Combus, la société bénéficiaire des aides d’État litigieuses. L’arrêt qui a annulé la décision approuvant ces aides revêtait donc incontestablement une importance économique considérable non seulement pour la requérante, mais aussi pour Combus et les autorités danoises désireuses de poursuivre la privatisation du secteur en cause.

36      En ce qui concerne l’ampleur du travail que le litige a objectivement pu exiger des conseils de la requérante, il convient de relever que la difficulté des questions juridiques soulevées, la complexité des faits et l’intérêt économique du litige justifient que ces conseils y aient consacré un travail important. Toutefois, les explications fournies par la requérante ne permettent pas au Tribunal de considérer comme objectivement indispensable aux fins de la procédure devant lui le coût correspondant à l’ensemble des heures de travail dont elle fait état. En effet, si le litige a pu effectivement demander aux conseils de la requérante un travail important, le total d’environ 410 heures, avancé par la requérante en tant que temps de travail consacré par un seul conseil, paraît néanmoins excessif par rapport à ce qui peut être considéré comme objectivement indispensable aux fins de la procédure juridictionnelle.

37      À cet égard, ainsi que la Commission l’a relevé à juste titre, les 62 500 DKK (environ 8 300 euros) réclamés au titre d’honoraires pour la rédaction d’une demande de production de preuves illustrent bien le caractère démesuré de cette revendication, étant donné que ce montant correspondrait à un nombre d’heures de travail qui ne saurait raisonnablement être considéré comme requis pour présenter une telle demande. En outre, parmi les dix moyens soulevés par la requérante, ceux dirigés contre deux prétendus éléments d’aide importants, à concurrence de 140 millions et de 21,3 millions de DKK, ont été présentés pour la première fois dans la réplique, ce qui a amené le Tribunal à rejeter ces moyens tardifs comme irrecevables (points 44 à 51 et 59 de l’arrêt). Or, le travail consacré à l’élaboration des moyens en cause ne saurait être qualifié d’indispensable aux fins de la procédure juridictionnelle.

38      En conclusion, le Tribunal estime que, dans les circonstances du cas d’espèce, un taux horaire s’élevant à 1 800 DKK (environ 250 euros) peut être considéré comme approprié pour rémunérer les services d’un professionnel expérimenté, capable de travailler de façon efficace et rapide, et que, s’agissant d’un tel professionnel, le nombre d’heures de travail objectivement indispensables s’élève à environ 300 heures.

39      Par conséquent, il convient d’évaluer le montant des honoraires d’avocat récupérables à 540 000 DKK.

 Sur les honoraires d’expert financier et comptable

40      En ce qui concerne les 190 487 DKK que la requérante a versés au cabinet Ernst & Young pour ses analyses financières et comptables, il convient d’examiner si les honoraires en cause peuvent être considérés comme objectivement nécessaires aux fins de la procédure dans la présente affaire en complément du travail des conseils juridiques de la requérante, étant précisé que la requérante a présenté l’intervention dudit cabinet comme celle d’un expert financier et comptable.

41      À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’article 91, sous a), du règlement de procédure prévoit expressément le caractère récupérable des sommes dues aux experts en vertu de l’article 74 dudit règlement. Il s’agit là des frais d’une expertise que le Tribunal, après avoir entendu les parties, a lui-même ordonnée à titre de mesure d’instruction, conformément à l'article 65, sous d), à l'article 66, paragraphe 1, et à l'article 70 du règlement de procédure. S’agissant d’une telle expertise, les parties peuvent non seulement contribuer au choix de l’expert et à la définition de la mission qui sera confiée à celui-ci, mais également prendre position sur la nécessité même de la mesure (ordonnance WestLB/Commission, précitée, point 85).

42      Une expertise ordonnée par le Tribunal est donc assortie de garanties permettant d’assurer l’indépendance de l’expert par rapport aux parties, le caractère nécessaire de son intervention, la pertinence de ses travaux pour la solution du litige et un contrôle des coûts occasionnés par son intervention. Tel n’est pas le cas des expertises que les parties, comme la requérante en l’espèce, ont fait établir de leur propre initiative. En effet, dans la mesure où une partie y procède unilatéralement, l’indépendance de l’expert n’est pas garantie, ce qui peut amener les parties adverses à faire établir des contre-expertises qui, à leur tour, donnent lieu à des répliques des premiers experts (ordonnance WestLB/Commission, précitée, point 86).

43      Dans ces circonstances, les frais occasionnés par une expertise, qui a été présentée par une partie unilatéralement et de sa propre initiative, ne sauraient être considérés comme indispensables aux fins de la procédure juridictionnelle que si l’expertise se révèle décisive pour le résultat du litige, de sorte que sa production par une partie a épargné au Tribunal la nécessité d’ordonner une expertise en vertu de l’article 65 de son règlement de procédure, ou si, dans des cas exceptionnels, l’intervention de l’expert était indispensable aux fins de la défense des droits de la partie en cause, en ce qu’elle permettait à cette dernière de justifier une demande de mesures d’instruction (voir, en ce sens, ordonnance WestLB/Commission, précitée, points 79, 81, 88 et 89).

44      Tel n’est cependant pas le cas en l’espèce. En effet, d’une part, l’annulation de la décision attaquée, telle que prononcée dans l’arrêt Danske Busvognmænd/Commission, précité, est fondée sur des raisonnements purement juridiques pour lesquels les analyses financières et comptables du cabinet Ernst & Young présentées par la requérante n’ont joué aucun rôle. D’autre part, la requérante n’a pas prétendu, et encore moins établi, que le cas d’espèce avait un caractère si exceptionnel que l’intervention du cabinet Ernst & Young était objectivement indispensable aux fins de la défense de ses droits. Elle n’a, notamment, pas utilisé l’expertise pour demander au Tribunal l’ouverture d’une instruction.

45      Il s’ensuit que les honoraires versés au cabinet Ernst & Young ne sauraient être considérés comme des dépens récupérables.

 Sur la TVA et les débours

46      La requérante réclame le remboursement de la TVA qui a grevé les honoraires payés dans le cadre de la présente affaire. La Commission, pour sa part, ne conteste ni le fondement de cette revendication, à savoir l’allégation selon laquelle les activités professionnelles de la requérante ne sont pas soumises à la TVA, de sorte qu’elle ne saurait déduire en amont la TVA figurant sur les factures en cause, ni le taux de la TVA exigée, à savoir 25 %.

47      Dans ces circonstances, il convient de considérer que la TVA afférente au montant des honoraires d’avocat récupérables, fixé à 540 000 DKK au point 39 ci-dessus, fait partie des frais indispensables aux fins de la procédure, en ce que la requérante est effectivement redevable de cette taxe. Par conséquent, il y a lieu de faire droit à la demande de taxation en fixant le montant de la TVA récupérable à 135 000 DKK.

48      Quant aux frais de voyage et de séjour, le Tribunal estime que la présente affaire ne comportait pas de circonstances spécifiques justifiant que les frais encourus pour trois conseils, aux fins de leur participation à l’audience, soient considérés comme indispensables au sens de l’article 91, sous b), du règlement de procédure. Le fait que la requérante ait jugé opportun de répartir les travaux nécessaires à sa représentation entre trois conseils juridiques ne saurait donc être financièrement imputé à la partie adverse.

49      Il en va de même des frais de voyage des représentants légaux de la requérante aux fins de leur participation à cette audience. En effet, le Tribunal n’a pas ordonné la comparution personnelle de ces représentants.

50      Il y a donc lieu de ne retenir que les frais engagés pour un seul avocat et de les fixer, à titre forfaitaire, à 10 000 DKK.

51      En ce qui concerne les frais de port et de redevances générales, il convient d’arrêter le montant de ces frais récupérables, ex aequo et bono, à 2 000 DKK.

52      Compte tenu de tout ce qui précède, il sera fait une juste appréciation des dépens récupérables en fixant leur montant à 687 000 DKK.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

ordonne :

Le montant total des dépens à rembourser par la Commission à Danske Busvognmænd est fixé à 687 000 couronnes danoises.

Fait à Luxembourg, le 13 juin 2007.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       J. Pirrung


* Langue de procédure : le danois.