Language of document : ECLI:EU:T:2008:319

ARRÊT DU TRIBUNAL (quatrième chambre)

9 septembre 2008 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire verbale MAGIC SEAT – Marque nationale figurative antérieure SEAT – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l’affaire T‑363/06,

Honda Motor Europe Ltd, établie à Slough, Berkshire (Royaume-Uni), représentée par MM. S. Malynicz, barrister, et N. Cordell, solicitor,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme  S. Laitinen et M. A. Folliard-Monguiral, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI ayant été

Seat, SA, établie à Barcelone (Espagne),

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 7 septembre 2006 (affaire R 960/2005-1), relative à une procédure d’opposition entre Seat, SA et Honda Motor Europe Ltd,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCEDES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (quatrième chambre),

composé de MM. O. Czúcz (rapporteur), président, J. D. Cooke et Mme I. Labucka, juges,

greffier : Mme C. Kantza, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 5 décembre 2006,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 5 avril 2007,

à la suite de l’audience du 11 mars 2008,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 10 décembre 2001, la requérante, Honda Motor Europe Ltd, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94, du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO L 11, p. 1), tel que modifié.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal MAGIC SEAT.

3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 12 de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Sièges de véhicules et mécanismes de sièges de véhicules, et pièces, parties constitutives et accessoires de ces produits ».

4        La demande a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 70/2002, du 2 septembre 2002.

5        Le 7 octobre 2002, Seat, SA a formé une opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94, à l’encontre de l’enregistrement de la marque communautaire demandée pour l’intégralité des produits visés par cette dernière.

6        L’opposition était notamment fondée sur la marque figurative espagnole n° 2189822 enregistrée le 3 mars 1999 pour les produits « véhicules terrestres, accouplements et organes de transmission, ainsi que d’autres éléments et pièces de rechange de véhicules terrestres non compris dans d’autres classes ; appareils de locomotion par terre, air ou eau », relevant de la classe 12, représentée ci‑après :

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7        L’un des motifs invoqués à l’appui de l’opposition était le risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, entre la marque demandée et la marque antérieure. À l’appui de l’opposition, Seat invoquait également la renommée de sa marque, notamment en Espagne.

8        Par décision du 10 juin 2005, la division d’opposition a fait droit à l’opposition au motif qu’il existait un risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure compte tenu de l’identité des produits et de la similitude des marques en cause. Par ailleurs, elle a précisé que, eu égard à cette conclusion, il n’était pas nécessaire d’examiner le caractère distinctif accru de la marque antérieure.

9        Le 5 août 2005, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI contre cette décision.

10      Par décision du 7 septembre 2006 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours a rejeté le recours dans son intégralité. Elle a motivé sa décision en indiquant qu’il existait un risque de confusion entre la marque demandée et la marque antérieure, car les produits en cause étaient identiques et les signes en conflit similaires. La chambre de recours a fondé cette dernière conclusion sur la constatation que les signes en conflit étaient, jusqu’à un certain degré, similaires d’un point de vue visuel, qu’ils étaient similaires d’un point de vue phonétique et qu’ils risquaient d’être perçus comme similaires d’un point de vue conceptuel. Elle a aussi relevé que la marque antérieure avait un caractère distinctif élevé en Espagne en raison de sa renommée. La chambre de recours a ajouté que, même si les consommateurs ne confondaient pas les signes entre eux et s’apercevaient de leur différence, ils risquaient néanmoins de les associer et de supposer qu’ils avaient la même origine commerciale.

 Conclusions des parties

11      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

12      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

13      À l’appui de son recours, la requérante invoque en substance un moyen unique tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

 Arguments des parties

14      S’agissant de la comparaison visuelle des signes en cause, la requérante soutient que la chambre de recours a sous-estimé l’importance du logo « S » de la marque antérieure en considérant qu’il serait perçu comme un élément décoratif ou comme la première lettre du mot « seat ». Cette conclusion contredirait d’ailleurs l’affirmation contenue dans la décision attaquée selon laquelle les deux marques diffèrent visuellement du fait de la présence dudit logo dans la marque antérieure et de celle du mot « magic » dans la marque demandée. Le logo « S » serait l’élément visuel dominant de la marque antérieure alors que, dans la marque demandée, le mot « magic » attirerait immédiatement le regard. La chambre de recours aurait donc dû conclure qu’il existait globalement une très faible similitude visuelle entre les signes en conflit. Par ailleurs, le logo « S » serait un signe très connu et distinctif, à l’instar des logos de Citroën, Peugeot, Audi, Mercedes, Toyota et Honda. Le négliger reviendrait à conférer une protection purement verbale à une marque figurative ou complexe, ce qui ne saurait être admis dans l’économie de la marque communautaire, les marques ne méritant bien souvent protection que grâce à leur élément emblématique. Enfin, le fait d’ignorer l’élément emblématique en l’espèce serait un acte inacceptable de « décomposition radicale » de la marque complexe [arrêt du Tribunal du 28 juin 2005, Canali Ireland/OHMI – Canal Jean (CANAL JEAN CO. NEW YORK), T‑301/03, Rec. p. II‑2479, point 48]. À l’audience, la requérante a également invoqué à l’appui de cet argument l’arrêt de Cour du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI (C‑193/06 P, non publié au Recueil).

15      En ce qui concerne la comparaison phonétique des marques en cause, la chambre de recours aurait conclu à tort que les signes étaient similaires. D’une part, le consommateur espagnol ne prononcerait pas le terme « magic » comme un mot espagnol, car ce mot n’existerait pas dans cette langue et, par conséquent, la marque demandée considérée dans son ensemble ne serait pas non plus prononcée comme une expression espagnole. D’autre part, la chambre de recours n’aurait pas non plus tenu compte du fait que « magic » est le premier mot de la marque MAGIC SEAT, de sorte que les différences phonétiques avec la marque antérieure SEAT se situeraient au début de la marque demandée.

16      S’agissant de la comparaison conceptuelle, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir estimé que le mot « seat » n’avait aucune signification en tant que tel en espagnol et de ne pas avoir considéré la marque antérieure dans son ensemble, laquelle est composée du mot « seat » et du logo « S » et serait immédiatement et clairement comprise par le consommateur espagnol comme désignant le célèbre constructeur automobile espagnol Seat. Quant à la marque demandée MAGIC SEAT, le mot « magic », bien qu’il présente des similitudes avec le mot espagnol « mágico », serait compris comme ayant une signification en anglais, ou au moins dans une langue autre que l’espagnol, mais en aucun cas comme une référence à la société automobile espagnole Seat. Par conséquent, la différence conceptuelle entre les marques neutraliserait une éventuelle similitude visuelle ou phonétique. En outre, la chambre de recours n’aurait pas tenu compte des preuves présentées par la requérante sur la manière dont les consommateurs espagnols seraient susceptibles de percevoir la marque MAGIC SEAT, en particulier le rapport de M. S. selon lequel les consommateurs espagnols qui savent parler anglais reconnaîtraient en « magic » un terme anglais, alors que ceux qui ne savent pas le parler pourraient le considérer comme semblable au mot espagnol « mágico », de sorte que la marque MAGIC SEAT serait perçue dans son ensemble comme une expression anglaise ou, à tout le moins, comme une expression étrangère.

17      S’agissant du risque de confusion, quatre facteurs plaideraient contre son existence en l’espèce. En premier lieu, les sièges de voiture seraient parfois assez coûteux et les acheteurs manifesteraient donc à leur égard un degré d’attention relativement élevé. En deuxième lieu, ils seraient habituellement achetés avec l’assistance d’un professionnel. En troisième lieu, même lorsque ces produits sont achetés sans l’aide de professionnels, les consommateurs, probablement des amateurs d’automobiles ou des membres de club d’automobilistes, seraient quand même bien informés. Enfin, toute personne, professionnelle ou non, veillerait tout particulièrement à s’assurer qu’elle achète le siège correspondant à la voiture concernée. Par ailleurs, la chambre de recours aurait omis de tenir compte de l’avis de l’expert M. G. dont il ressortirait que les sièges de voitures sont habituellement commercialisés par l’entremise de revendeurs agréés, qu’ils sont vendus comme équipement d’origine ou comme articles du marché secondaire des pièces de rechange, qu’ils sont généralement achetés par des connaisseurs et que même les sièges de voiture du marché secondaire des pièces de rechange requièrent un kit de montage correspondant au modèle de voiture.

18      L’OHMI conteste les arguments de la requérante.

 Appréciation du Tribunal

19      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsqu’en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée ; le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 40/94, il convient notamment d’entendre par marques antérieures les marques enregistrées dans un État membre, dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

20      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance entre la similitude des signes et celle des produits ou des services désignés [voir arrêts du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

21      En l’espèce, la marque antérieure sur laquelle se fonde l’opposition est la marque figurative espagnole SEAT. Ainsi que l’a constaté la chambre de recours dans la décision attaquée, le territoire pertinent aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 est le territoire espagnol. Par ailleurs, compte tenu de la nature des produits, le public pertinent est composé, d’une part, de revendeurs automobiles, de propriétaires de garages et de mécaniciens et, d’autre part, de consommateurs moyens qui seront probablement assistés par un mécanicien ou par d’autres professionnels compétents en la matière lors du changement ou de la réparation de tout élément pouvant se rapporter à un siège automobile. Cette définition du public pertinent n’est d’ailleurs pas contestée par la requérante.

22      Quant à la comparaison des produits concernés, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré, sans être contredite sur ce point par la requérante, que les produits en cause sont identiques dans la mesure où les produits désignés par la demande d’enregistrement, à savoir les « sièges de véhicules et mécanismes de sièges de véhicules, et pièces, parties constitutives et accessoires de ces produits », sont inclus dans la définition plus large de certains produits couverts par la marque antérieure, à savoir « éléments et pièces de rechange de véhicules terrestres ».

 Sur la comparaison des signes

23      Ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants [voir arrêt du Tribunal du 14 octobre 2003, Phillips-Van Heusen/OHMI – Pash Textilvertrieb und Einzelhandel (BASS), T‑292/01, Rec. p. II‑4335, point 47, et la jurisprudence citée].

24      S’agissant, en premier lieu, de la comparaison visuelle des signes en conflit, il convient de rappeler que rien ne s’oppose à ce que l’existence d’une similitude visuelle entre une marque verbale et une marque figurative soit vérifiée, étant donné que ces deux types de marques ont une configuration graphique capable de donner lieu à une impression visuelle [arrêts du Tribunal du 12 décembre 2002, Vedial/OHMI – France Distribution (HUBERT), T‑110/01, Rec. p. II‑5275, point 51, et du 4 mai 2005, Chum/OHMI – Star TV (STAR TV), T‑359/02, Rec. p. II‑1515, point 43].

25      À cet égard, il y a lieu de considérer qu’une marque complexe, composée à la fois d’éléments verbaux et d’éléments figuratifs, ne peut être considérée comme présentant une similitude avec une autre marque, identique ou présentant une similitude avec un des composants de la marque complexe, que lorsque celui-ci constitue l’élément dominant dans l’impression d’ensemble produite par la marque complexe. Tel est le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci [arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 33, et STAR TV, précité, point 44].

26      Cette approche ne revient pas à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer une telle comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans leur ensemble. Cependant, cela n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants [arrêt MATRATZEN, précité, point 34 ; arrêt du Tribunal du 11 mai 2005, Grupo Sada /OHMI – Sadia (GRUPO SADA), T‑31/03, Rec. p. II‑1667, point 49].

27      Quant à l’appréciation du caractère dominant d’un ou plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants (arrêts MATRATZEN, précité, point 35, et GRUPO SADA, précité, point 49).

28      Force est de constater, en l’espèce, que les deux signes à comparer ont en commun le mot « seat », auquel est adjoint, dans la marque antérieure, un logo en forme de « S » stylisé et, dans la marque demandée, le mot « magic ».

29      La chambre de recours a considéré que le terme « seat » constituait l’élément dominant de la marque antérieure, à savoir l’élément que les consommateurs espagnols citeront lorsqu’ils tenteront d’identifier la marque dans son ensemble.

30      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence au produit en cause en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 23 octobre 2002, Oberhauser/OHMI – Petit Liberto (Fifties), T‑104/01, Rec. p. II‑4359, point 47 et du 14 juillet 2005, Wassen International/OHMI – Stroschein Gesundkost (SELENIUM-ACE), T‑312/03, Rec. p. II‑2897, point 37].

31      En l’espèce, il y a lieu de constater que le logo « S » de la marque antérieure est légèrement stylisé mais n’apparaît pas comme étant original ou très élaboré. En effet, il constitue la première lettre de l’élément verbal « seat » qui, même en se situant en dessous du logo « S » et reproduit dans des caractères plus petits que ledit logo, est néanmoins écrit en lettres majuscules de grande taille, est plus large que ledit logo et est parfaitement lisible. En outre, ainsi que le soutient à juste titre l’OHMI, et en dépit des éléments auxquels fait référence la requérante, tels que la reproduction du logo « S » sur la page de garde du rapport annuel de la société Seat ou à l’avant des voitures commercialisées par ladite société, ledit logo n’a pas de contenu sémantique intrinsèque qui donnerait à la marque antérieure son caractère distinctif, mais a surtout pour objectif de mettre l’accent sur la première lettre du mot « seat ».

32      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a retenu au point 25 de la décision attaquée que, bien que le logo en tant que tel soit indiscutablement identifiable par lui-même, il se trouve également indissociablement lié à l’élément verbal « seat », qui possède un caractère distinctif élevé en Espagne en raison de sa renommée. Dès lors, la marque antérieure, analysée dans son ensemble, risque d’être identifiée par l’intermédiaire de l’élément verbal « seat », alors que le logo sera perçu comme un élément décoratif ou l’initiale de « seat ». Par conséquent, il y a lieu de confirmer la conclusion de la chambre de recours selon laquelle l’élément verbal « seat » est dominant dans la marque antérieure.

33      Contrairement à ce qu’allègue la requérante, la chambre de recours a ainsi fait une application correcte de la jurisprudence selon laquelle l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe peut, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (arrêt Nestlé/OHMI, précité, point 42).

34      Il s’ensuit également que c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu au point 28 de la décision attaquée que, d’un point de vue visuel, les signes en cause étaient, jusqu’à un certain degré, similaires eu égard à la présence de l’élément commun « seat », mais qu’ils différeraient en raison de l’élément figuratif présent dans la marque antérieure et du mot « magic », qui sera perçu, dans la marque demandée, comme qualifiant le mot « seat » en raison de sa ressemblance avec son équivalent espagnol « mágico ».

35      Enfin, il y a également lieu de rejeter l’argument de la requérante selon lequel les points 25 et 28 de la décision attaquée seraient inconciliables en ce qu’il ressortirait du point 25 que le logo de la marque antérieure serait insignifiant et du point 28 que les deux signes différeraient visuellement du fait de la présence dudit logo dans la marque antérieure et de celle du mot « magic » dans la marque demandée. En effet, ainsi qu’il a été relevé ci-dessus, la chambre de recours n’a pas ignoré le logo « S » au point 25 de la décision attaquée mais a estimé que ladite marque, considérée dans son ensemble, était dominée par l’élément verbal « seat » et que le logo serait perçu comme un élément décoratif ou l’initiale de « seat ». Ainsi, même si, au point 28 de la décision attaquée, la chambre de recours a certes reconnu que, sur le plan visuel, les marques en cause différaient en raison de l’élément figuratif accessoire de la marque antérieure et du mot « magic » présent dans la demande de marque, elle a également considéré que lesdites marques étaient, jusqu’à un certain degré, similaires en raison de la présence dans les deux signes de l’élément « seat », élément dominant de la marque antérieure.

36      S’agissant, en deuxième lieu, de la comparaison phonétique des deux signes en cause, il n’est pas contesté que l’élément figuratif en forme de « S » de la marque antérieure n’est pas conçu pour être prononcé. En outre, il convient de constater, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours, sans être contredite par la requérante, que l’élément verbal de la marque antérieure « seat » sera prononcé par le public pertinent en deux syllabes « se-at ».

37      En ce qui concerne la marque demandée, il y a lieu de constater que le terme « seat », reproduit dans la marque verbale MAGIC SEAT, risque de ne pas être perçu par le public pertinent comme étant la traduction anglaise du mot « siège », et ce y compris pour le consommateur qui comprend l’anglais, dans la mesure où ce mot déclenchera immédiatement une association avec le nom du célèbre constructeur automobile espagnol Seat. Contrairement à ce qu’affirme la requérante, il risque, par conséquent, d’être prononcé comme un mot espagnol en deux syllabes, et non en une seule comme en anglais.

38      En ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel l’analyse de la chambre de recours irait à l’encontre de la jurisprudence selon laquelle les consommateurs retiendraient généralement davantage le début d’un signe que sa fin, il y a lieu de rappeler que cette considération ne saurait valoir dans tous les cas [voir arrêt du Tribunal du 16 mai 2007, Trek Bicycle/OHMI – Audi (ALLTREK), T‑158/05, non publié au Recueil, point 70, et la jurisprudence citée] et ne saurait, en tout état de cause, remettre en cause le principe selon lequel l’examen de la similitude des marques doit prendre en compte l’impression d’ensemble produite par ces marques, dès lors que le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à l’examen de ses différents détails.

39      Or, ainsi qu’il a été relevé ci-dessus, le terme « magic » sera perçu par le public pertinent comme qualifiant simplement le mot « seat » en raison de sa ressemblance avec le terme espagnol « mágico », qui est purement laudatif. Il convient d’observer à cet égard qu’il est de jurisprudence constante que, en règle générale, le public ne considérera pas un élément descriptif faisant partie d’une marque complexe comme l’élément distinctif et dominant dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci [arrêts du Tribunal du 3 juillet 2003, Alejandro/OHMI – Anheuser-Busch (BUDMEN), T‑129/01, Rec. p. II‑2251, point 53, et du 6 octobre 2004, New Look/OHMI – Naulover (NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection), T‑117/03 à T‑119/03 et T‑171/03, Rec. p. II‑3471, point 34]. L’argument selon lequel le public pertinent ne prononcera pas « magic seat » comme une expression espagnole en raison du fait que le mot « magic » n’existe pas dans cette langue doit être rejeté pour la même raison.

40      Il s’ensuit qu’il ne peut pas être exclu que la marque demandée sera prononcée « ma-gic se-at » au moins par une partie du public pertinent. Dans ces conditions, l’inclusion du seul élément verbal de la marque antérieure dans l’élément dominant de la marque demandée permet de conclure à une similitude phonétique importante entre les signes en cause, l’appréciation retenue sur ce point par la chambre de recours devant par conséquent être approuvée [voir, en ce sens, arrêt NLSPORT, NLJEANS, NLACTIVE et NLCollection, précité, point 37].

41      S’agissant, en dernier lieu, de la comparaison conceptuelle des deux signes en cause, il convient de prendre en compte la compréhension éventuelle que le public pertinent aura des signes en cause et plus particulièrement de l’élément dominant de la marque antérieure « seat », commun aux deux signes.

42      En ce qui concerne la signification de la marque antérieure, d’une part, il convient de rappeler que le logo « S » n’a pas de contenu sémantique intrinsèque.

43      D’autre part, la chambre de recours a considéré, au point 30 de la décision attaquée, que le terme « seat » en tant que tel était dépourvu de toute signification en langue espagnole et constituait l’acronyme du nom de la société titulaire de la marque antérieure, à savoir Sociedad Española de Automóviles de Turismo. Elle a ajouté que, en raison de la renommée acquise par cette société et par la marque antérieure, le terme « seat » était devenu identifiable en tant que marque automobile.

44      Il y a lieu de confirmer cette analyse de la chambre de recours. En effet, le terme « seat » n’existe pas dans la langue espagnole mais y a acquis un sens secondaire ou une signification qui lui est propre dans la mesure où il désigne clairement le constructeur automobile espagnol Seat (voir, en ce sens et par analogie, arrêt de la Cour du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, Rec. p. I‑1619, point 104). La requérante reconnaît d’ailleurs que la marque antérieure composée du logo et du terme « seat » sera immédiatement perçue par le consommateur pertinent comme désignant le célèbre constructeur automobile espagnol Seat.

45      En ce qui concerne la marque demandée MAGIC SEAT, la chambre de recours a ensuite conclu qu’elle risquait d’être perçue comme présentant une similitude conceptuelle avec la marque antérieure SEAT, en ce qu’elle se compose d’une marque possédant un caractère distinctif élevé à laquelle est ajouté l’adjectif élogieux « magic ».

46      Cette analyse doit également être confirmée dans la mesure où il ne peut pas être exclu que le public pertinent, en présence de la marque MAGIC SEAT désignant des sièges de véhicules vendus par la requérante, associera ladite marque à la marque antérieure SEAT et donc au constructeur automobile espagnol, eu égard à la renommée de la marque antérieure et au caractère purement laudatif de l’adjectif « magic ».

47      Doivent être rejetées à cet égard les preuves d’ordre linguistique, qui, selon la requérante, n’auraient pas été prises en compte par la chambre de recours. La simple déclaration de l’expert M. S. selon laquelle la plupart des consommateurs espagnols reconnaîtraient en « magic » un mot anglais et, bien qu’ils puissent le trouver semblable au mot espagnol « mágico », percevraient néanmoins la marque MAGIC SEAT, considérée dans son ensemble, comme une expression anglaise ne suffit pas pour démontrer qu’une telle marque ne serait pas comprise par au moins une partie du public pertinent comme une expression espagnole.

48      En effet, il s’agit d’un avis ne reposant sur aucune donnée statistique ou scientifique de nature à démontrer que le public pertinent comprend l’anglais. Or, ainsi qu’il a été relevé ci-dessus, le public pertinent est constitué, d’une part, de revendeurs automobiles, de propriétaires de garages et de mécaniciens et, d’autre part, de consommateurs moyens qui seront probablement assistés par un mécanicien ou par d’autres professionnels compétents en la matière lors du changement ou de la réparation de tout élément pouvant se rapporter à un siège automobile. Dans ces circonstances, ladite déclaration ne saurait suffire pour exclure qu’au moins une partie dudit public pertinent ne comprendra pas la marque demandée comme une expression non espagnole mais l’associera au constructeur automobile espagnol Seat.

49      Par conséquent, dans la mesure où les deux signes en cause risquent d’être perçus par au moins une partie du public pertinent comme faisant référence au constructeur automobile Seat, c’est à bon droit que la chambre de recours a considéré qu’ils étaient conceptuellement similaires.

50      Dès lors qu’il n’y a pas de différence conceptuelle entre les deux signes en conflit susceptible de neutraliser leurs similitudes visuelles et phonétiques, l’argument de la requérante tiré de l’absence d’application par la chambre de recours de la règle de la neutralisation doit être rejeté.

51      Il résulte des considérations qui précèdent que les signes en conflit apparaissent comme étant globalement similaires, cette similitude résultant notamment de la reproduction de l’élément dominant « seat » de la marque antérieure dans la marque demandée.

 Sur le risque de confusion

52      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, comme le risque de confusion est d’autant plus élevé que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance de celles-ci sur le marché, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, Rec. p. I‑3819, point 20, et la jurisprudence citée).

53      Par ailleurs, aux fins de l’appréciation globale du risque de confusion, le consommateur moyen de la catégorie de produits concernés est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé. Cependant, il convient de tenir compte de la circonstance que le consommateur moyen n’a que rarement la possibilité de procéder à une comparaison directe des différentes marques, mais doit se fier à l’image non parfaite qu’il a gardée en mémoire. Il y a également lieu de prendre en considération le fait que le niveau d’attention du consommateur moyen est susceptible de varier en fonction de la catégorie des produits en cause (voir, par analogie, arrêt Lloyd Schuhfabrik Meyer, précité, point 26) ainsi que le fait qu’un public de professionnels spécialisés dans le domaine des produits concernés est susceptible de manifester un degré élevé d’attention lors du choix de ces produits [voir arrêt du Tribunal du 14 juillet 2005, Reckitt Benckiser (España)/OHMI – Aladin (ALADIN), T‑126/03, Rec. p. II‑2861, point 96, et la jurisprudence citée].

54      En l’espèce, la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion au motif que les marques sont similaires, que la marque antérieure a un caractère distinctif élevé en Espagne en raison de sa renommée et que les produits concernés sont identiques. Elle a précisé que, en particulier, même si le public pertinent ne confondait pas les marques entre elles et s’apercevait de leur différence, il risquait néanmoins d’associer ces deux signes et de supposer que les produits désignés avaient la même origine commerciale.

55      Il ressort de l’analyse exposée ci-dessus que les produits visés par les deux signes sont identiques et que les deux marques sont globalement similaires.

56      En outre, il n’est pas contesté que la marque antérieure a un caractère distinctif élevé en Espagne en raison de sa renommée de sorte qu’elle jouit d’une protection plus étendue que les marques dont le caractère distinctif est moindre.

57      Il s’ensuit qu’il existe un risque que le public pertinent puisse croire que les produits concernés proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement. Dès lors, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant qu’il existait un risque de confusion ou d’association aux yeux du public pertinent.

58      Cette conclusion ne saurait être remise en cause par les arguments de la requérante.

59      S’agissant de l’argument selon lequel le mot « seat » contenu dans la demande de marque communautaire perd son sens secondaire d’indicateur de l’origine commerciale en raison de son association avec le terme anglais « magic », il suffit de rappeler que, eu égard à la renommée de la marque SEAT et au caractère descriptif du terme « magic », ce dernier risque d’être perçu par le public pertinent comme qualifiant le mot « seat », notamment dans l’expression « magic seat ! », ainsi que l’a relevé la chambre de recours au point 27 de la décision attaquée. En outre, cette conclusion est corroborée par le fait que, ainsi que le souligne l’OHMI dans ses écritures, il est de plus en plus fréquent dans des États membres non anglophones de promouvoir des marques en recourant à des termes anglais afin d’accroître leur image internationale et que l’usage du mot anglais « magic » comme qualificatif élogieux s’est popularisé.

60      Quant à l’argument tiré des quatre facteurs qui auraient dû conduire la chambre de recours à conclure à l’absence de risque de confusion, à savoir le prix relativement élevé des sièges de véhicules, l’aide habituellement fournie par le vendeur lors de l’achat de ces produits, la bonne connaissance qu’a le consommateur desdits produits et le fait que tout consommateur, professionnel ou non, veillera à s’assurer de la compatibilité du siège avec le modèle de voiture concerné, il doit également être rejeté.

61      Force est en effet de constater que la requérante, en alléguant ces quatre facteurs, semble soutenir que le niveau d’attention du public pertinent, professionnel ou non, est élevé, ce qui l’empêcherait de confondre les deux marques en cause. À cet égard, l’appréciation de la chambre de recours figurant au point 35 de la décision attaquée, selon laquelle l’existence du risque de confusion entre les deux marques en cause n’est aucunement affectée par le fait que le public se compose essentiellement de spécialistes, doit être approuvée. En effet, ainsi que le relève la chambre de recours, le commerce d’éléments et de pièces de rechange d’automobiles n’est pas restreint aux revendeurs automobiles agréés d’une seule marque, de sorte qu’il ne saurait être exclu qu’un revendeur automobile ou qu’un mécanicien espagnol se fournissant en éléments et en pièces de rechange provenant de différents constructeurs supposera que les produits commercialisés sous la marque demandée proviennent de Seat ou d’un constructeur ayant un lien économique avec Seat.

62      Par ailleurs, si le degré d’attention élevé du consommateur pertinent peut, certes, conduire celui-ci à être au fait des caractéristiques techniques des sièges de voiture de sorte qu’il puisse s’assurer de leur compatibilité avec le modèle de voiture concerné, il y a lieu de retenir que, compte tenu de l’identité des produits visés, de la similitude des signes en conflit et du caractère distinctif élevé de la marque antérieure, la circonstance que le public pertinent soit composé de professionnels ne suffit pas à exclure qu’il puisse croire que les produits proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement (voir, en ce sens, arrêt ALADIN, précité, point 100). En effet, si le niveau d’attention élevé du public pertinent implique qu’il se renseignera sur les sièges de véhicules et pourra ainsi éviter de commettre des erreurs quant à leur compatibilité avec le modèle de voiture concerné, il ne saurait l’empêcher de croire que les sièges portant la marque MAGIC SEAT font partie d’une nouvelle gamme de produits développée par le célèbre constructeur automobile espagnol Seat.

63      Enfin, s’agissant de l’argument tiré de la prétendue absence de prise en compte par la chambre de recours de la déclaration de l’expert M. G. dont il ressortirait, selon la requérante, que les sièges de voiture sont habituellement commercialisés par l’entremise de revendeurs agréés, et vendus soit comme équipement d’origine, soit comme pièce de rechange, il y a lieu de considérer qu’il est dépourvu de pertinence dans la mesure où, les modalités de commercialisation particulières des produits désignés par les marques pouvant varier dans le temps et suivant la volonté des titulaires de ces marques, l’analyse prospective du risque de confusion entre deux marques ne saurait dépendre des intentions commerciales, réalisées ou non, et par nature subjectives des titulaires des marques [arrêt de la Cour du 15 mars 2007, T.I.M.E. ART/OHMI, C‑171/06 P, non publié au Recueil, point 59].

64      En outre, dans la mesure où la requérante prétend que la chambre de recours n’a pas pris en compte la déclaration de l’expert M. G. selon laquelle les sièges de voiture seraient généralement achetés par des connaisseurs qui ne seraient pas susceptibles d’être victimes de confusion et même les sièges de rechange requerraient un kit de montage correspondant au modèle de voiture concerné, son argument doit être rejeté dès lors qu’il a été établi ci-dessus que, si le niveau d’attention élevé du public pertinent pourra lui éviter de commettre des erreurs quant à la compatibilité des sièges avec le modèle de voiture concerné, il ne saurait exclure un risque de confusion ou d’association en ce qui concerne leur origine commerciale.

65      Il s’ensuit que l’unique moyen soulevé en substance par la requérante n’est pas fondé. Par conséquent, il convient de rejeter le présent recours.

 Sur les dépens

66      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens exposés par l’OHMI, conformément aux conclusions de celui-ci.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (quatrième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Honda Motor Europe Ltd est condamnée aux dépens.

Czúcz

Cooke

Labucka

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 septembre 2008.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       O. Czúcz


* Langue de procédure : l’anglais.