Language of document : ECLI:EU:T:2024:377

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

12 juin 2024 (*)

« Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande de marque de l’Union européenne figurative TOUR DE X – Marque nationale verbale et enregistrement international d’une marque figurative antérieurs TOUR DE FRANCE – Marques de l’Union européenne et nationale verbales antérieures LE TOUR DE FRANCE – Marque de l’Union européenne figurative antérieure LE TOUR DE FRANCE – Motifs relatifs de refus – Absence de risque de confusion – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) no 207/2009 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001] – Absence d’atteinte à la renommée – Article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 (devenu article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001) »

Dans l’affaire T‑604/22,

Société du Tour de France, établie à Boulogne-Billancourt (France), représentée par Mes T. de Haan, P. Péters et S. Vandezande, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), représenté par Mme D. Stoyanova-Valchanova et M. V. Ruzek, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’EUIPO, intervenant devant le Tribunal, étant

FitX Beteiligungs GmbH, établie à Monheim-sur-le-Rhin (Allemagne), représentée par Mes S. Prés et T. Nguyen, avocats,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de Mme K. Kowalik‑Bańczyk, présidente, M. G. Hesse et Mme B. Ricziová (rapporteure), juges,

greffier : M. G. Mitrev, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure,

à la suite de l’audience du 25 octobre 2023,

rend le présent

Arrêt

1        Par son recours fondé sur l’article 263 TFUE, la requérante, la Société du Tour de France, demande l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) du 11 juillet 2022 (affaire R 1136/2019-2) (ci-après la « décision attaquée »).

I.      Antécédents du litige

2        Le 11 mai 2017, l’intervenante, FitX Beteiligungs GmbH, a présenté à l’EUIPO une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne pour le signe figuratif suivant :

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3        La marque demandée désignait les produits et les services relevant des classes 25, 28 et 41 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondant, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 25 : « Vêtements ; chaussures ; chapellerie » ;

–        classe 28 : « Jeux ; jouets ; jouets; appareils de jeux vidéo ; équipements de sport ; appareils de musculation corporelle [exercice physique] ; articles et équipement de sport ; décorations pour arbres de Noël ; tous les produits précités, excepté les patins pour le hockey sur glace, les patins à roulettes, les cadres de patins à roulettes en ligne, les équipements de sécurité pour patineurs à roulettes et/ou sacs pour patineurs à roulettes » ;

–        classe 41 : « Services d’éducation sportive ; formation ; services de divertissement ; activités sportives et culturelles ».

4        L’intervenante a revendiqué les couleurs noir et orange.

5        Le 11 août 2017, la requérante a formé opposition à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits et les services visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur les droits antérieurs suivants (ci-après, pris ensemble, les « droits antérieurs ») :

–        l’enregistrement international désignant l’Allemagne pour la marque figurative TOUR DE FRANCE déposée et enregistrée le 2 décembre 1966 sous le numéro 329298, désignant notamment les « vêtements, y compris les bottes, les souliers et les pantoufles », relevant de la classe 25, et les « jeux, jouets, articles de gymnastique et de sport (à l’exception des vêtements), ornements et décorations pour arbres de Noël », relevant de la classe 28, telle que reproduite ci-après :

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–        la marque verbale française TOUR DE FRANCE, déposée le 21 août 1986 et enregistrée sous le numéro 1368310, désignant, notamment, les « vêtements confectionnés, tricots et bonneterie, lingerie, sous-vêtements, pyjamas, robes de chambre, jupes, robes, pantalons, vestes, manteaux, chemiserie, cravates, foulards, ceintures, gants, chapeaux, vêtements imperméables, vêtements pour la pratique des sports, articles chaussants, chaussettes, bas, collants, bottes, chaussures et pantoufles ; tous vêtements pour hommes, femmes et enfants ; cuissardes, peignoirs ; survêtements, souliers de gymnastique et de sport, maillots de bain », relevant de la classe 25, les « jeux, jouets, articles de gymnastique et de sport non compris dans d’autres classes ; décorations pour arbres de Noël ; appareils pour la rééducation du corps ; bicyclettes fixes d’entraînement », relevant de la classe 28, et les « divertissements ; organisation de concours en matière d’éducation ou de divertissement ; organisations d’épreuves sportives, exploitation d’établissements de culture physique et d’entraînement à la pratique des sports », relevant de la classe 41 ;

–        la marque de l’Union européenne verbale LE TOUR DE FRANCE déposée le 1er avril 1996 et enregistrée le 13 septembre 1999 sous le numéro 28191, désignant, notamment, les « vêtements ; chaussures ; chapellerie », relevant de la classe 25, et les « Activités sportives ; organisation d’activités sportives », relevant de la classe 41 ;

–        la marque de l’Union européenne figurative LE TOUR DE FRANCE déposée le 31 octobre 2003 et enregistrée le 31 mars 2005 sous le numéro 3530557, (ci-après la « marque figurative antérieure ») désignant, notamment, les « logiciels de jeux », relevant de la classe 9, les « vêtements, chaussures, chapellerie ; chemises ; ceintures (habillement) ; gants (habillement) ; foulards ; cravates; bonneterie ; chaussettes ; chaussons ; chaussures de sport ; sous-vêtements », relevant de la classe 25, les « jeux, jouets; décorations pour arbres de Noël (à l’exception des articles d’éclairage) ; appareils de culture physique ou de gymnastique », relevant de la classe 28, et les services « éducation ; divertissement, activités sportives et culturelles ; informations en matière de divertissement ; services de loisirs ; organisation de concours (éducation ou divertissement) ; services de jeux proposés en ligne à partir d’un réseau informatique ; services de jeux d’argent », relevant de la classe 41, telle que reproduite ci-après :

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–        la marque de l’Union européenne verbale LE TOUR DE FRANCE déposée le 31 octobre 2003 et enregistrée le 19 avril 2005 sous le numéro 3503216, désignant, notamment, les « jeux, jouets; décorations pour arbres de Noël (à l’exception des articles d’éclairage) ; appareils de culture physique ou de gymnastique », relevant de la classe 28 ;

–        la marque verbale française LE TOUR DE FRANCE, déposée le 30 juillet 2015 et enregistrée le 20 novembre 2015 sous le numéro 4200761, désignant notamment les « activités sportives ; organisation d’évènements sportifs et de courses cyclistes ; organisation de spectacles et d’évènements sportifs ; divertissement ; organisation de compétitions en rapport avec l’éducation et le divertissement ; services de jeu proposés en ligne à partir d’un réseau informatique », relevant de la classe 41.

7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque [de l’Union européenne] (JO 2009, L 78, p. 1).

8        La requérante a apporté la preuve de l’usage sérieux des droits antérieurs invoqués, tant à l’appui de sa revendication de renommée, qu’à l’invitation de l’EUIPO à la suite de la demande formulée par l’intervenante.

9        Le 2 avril 2019, la division d’opposition a rejeté l’opposition dans son intégralité.

10      Le 24 mai 2019, la requérante a formé un recours auprès de l’EUIPO contre la décision de la division d’opposition.

11      Par la décision attaquée, la chambre de recours a rejeté le recours aux motifs, d’une part, qu’il n’y avait pas de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil, du 14 juin 2017, sur la marque de l’Union européenne (JO 2017, L 154, p. 1), et, d’autre part, que l’usage de la marque demandée pour les produits et les services visés par cette dernière n’était pas susceptible de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des droits antérieurs ou de leur porter préjudice au sens de l’article 8, paragraphe 5, dudit règlement.

II.    Conclusions des parties 

12      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’EUIPO et l’intervenante aux dépens, y compris ceux exposés devant la chambre de recours.

13      L’EUIPO conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens en cas de convocation à une audition.

14      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

III. En droit 

A.      Sur la détermination du règlement applicable ratione temporis

15      Compte tenu de la date d’introduction de la demande d’enregistrement de la marque demandée, à savoir le 11 mai 2017, qui est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable, les faits de l’espèce sont régis par les dispositions matérielles du règlement (CE) no 207/2009 (voir, en ce sens, arrêts du 8 mai 2014, Bimbo/OHMI, C‑591/12 P, EU:C:2014:305, point 12, et du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 2 et jurisprudence citée). Par suite, en l’espèce, en ce qui concerne les règles de fond, il convient d’entendre les références faites par la chambre de recours dans la décision attaquée et par les parties dans leurs écritures, à l’article 8, paragraphe 1, sous b), et à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001, comme visant respectivement l’article 8, paragraphe 1, sous b), et l’article 8, paragraphe 5, d’une teneur identique du règlement no 207/2009.

16      Par ailleurs, dans la mesure où, selon une jurisprudence constante, les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à la date à laquelle elles entrent en vigueur (voir arrêt du 11 décembre 2012, Commission/Espagne, C‑610/10, EU:C:2012:781, point 45 et jurisprudence citée), le litige est régi par les dispositions procédurales du règlement 2017/1001.

B.      Sur le fond

17      La requérante invoque trois moyens, tirés, le premier, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, le deuxième, de la violation de l’article 8, paragraphe 5, de ce règlement, et, le troisième, de la violation de l’article 94 du règlement 2017/1001.

1.      Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009

18      Au soutien du premier moyen, la requérante fait valoir que la chambre de recours a erronément apprécié le risque de confusion, notamment lors de son examen de la similitude entre les droits en conflit et du caractère distinctif des droits antérieurs.

19      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

20      Aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire dans lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

21      Constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, EU:T:2003:199, points 30 à 33 et jurisprudence citée].

22      En l’espèce, aux points 37 et 38 de la décision attaquée, la chambre de recours a constaté que le public pertinent était le grand public, les amateurs de cyclisme et les cyclistes professionnels, dont le niveau d’attention était moyen, et que les territoires pertinents étaient ceux de l’Allemagne, de la France, et de l’Union européenne en fonction du droit antérieur concerné. Ces appréciations de la chambre de recours ne sont pas contestées par la requérante.

23      En ce qui concerne la comparaison des produits et des services en cause, la chambre de recours a considéré, aux points 29 à 35 de la décision attaquée, que les produits et les services visés par la marque demandée étaient identiques ou similaires aux produits et services désignés par les droits antérieurs. La requérante n’apporte aucun argument pour remettre en cause cette appréciation.

a)      Sur la comparaison des droits en conflit 

24      Il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents, à savoir les aspects visuel, phonétique et conceptuel [arrêts du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, EU:T:2002:261, point 30, et du 15 décembre 2010, Novartis/OHMI – Sanochemia Pharmazeutika (TOLPOSAN), T‑331/09, EU:T:2010:520, point 43].

25      L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des marques en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par celles-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, EU:C:2007:333, point 35 et jurisprudence citée).

26      Conformément à cette jurisprudence, avant de traiter la question de la similitude des droits en conflit sur les plans visuel, phonétique et conceptuel, il y a lieu d’examiner l’appréciation des éléments distinctifs et dominants des droits en conflit effectuée par la chambre de recours. 

1)      Sur les éléments distinctifs et dominants des droits en conflit

27      La chambre de recours a analysé les éléments distinctifs et dominants des droits en conflit aux points 43 à 59 de la décision attaquée.

28      En ce qui concerne les marques verbales antérieures et l’enregistrement international antérieur, la chambre de recours a considéré que ces droits ne contenaient aucun élément dominant. En outre, elle a examiné les éléments « tour de », « tour », « de France » et « le » contenus dans les droits antérieurs et a conclu, en substance, que chacun de ces éléments soit possédait un caractère distinctif très faible, voire inexistant, soit était descriptif pour les produits et les services en cause.

29      En ce qui concerne la marque figurative antérieure, contenant également l’élément verbal « le tour de France », la chambre de recours a indiqué que les éléments distinctifs et dominants seraient les éléments figuratifs, qui étaient stylisés, tandis que l’élément verbal était descriptif et serait « faible » dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci.

30      En ce qui concerne la marque demandée, la chambre de recours a conclu que la lettre « x » devrait être considérée comme l’élément dominant de la marque demandée, notamment en raison de sa stylisation, ayant un caractère distinctif moyen.

31      La requérante conteste cette appréciation en faisant valoir que l’élément verbal « tour de », commun aux droits en conflit, est dominant sur le plan visuel, et qu’il n’a pas un faible degré du caractère distinctif, contrairement à l’analyse de la chambre de recours.

32      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

33      À cet égard, il importe de rappeler que lors de l’appréciation du caractère dominant d’un ou plusieurs composants déterminés d’une marque complexe, il convient de prendre en compte, notamment, les qualités intrinsèques de chacun de ces composants en les comparant à celles des autres composants. En outre et de manière accessoire, peut être prise en compte la position relative des différents composants dans la configuration de la marque complexe (arrêt du 23 octobre 2002, MATRATZEN, T‑6/01, EU:T:2002:261, point 35).

34      En l’espèce, en premier lieu, il y a lieu de relever que, concernant la considération de la chambre de recours selon laquelle l’élément verbal « tour de », commun aux droits en conflit, a un caractère distinctif très faible, voire inexistant, en particulier dans le contexte des compétitions cyclistes et des produits s’y rapportant, la requérante se borne à soutenir que cette considération n’est pas correcte sans pour autant fournir le moindre argument permettant de la remettre en cause.

35      En second lieu, s’agissant de l’argument de la requérante tiré du caractère dominant de l’élément verbal « tour de » dans les droits en conflit sur le plan visuel, il convient d’observer, tout d’abord, que cet élément verbal dans les marques verbales antérieures et dans l’enregistrement international antérieur dispose d’une taille identique aux autres éléments verbaux, à savoir le terme « France » et, le cas échéant, l’article « le ». Ensuite, dans la marque figurative antérieure, l’élément verbal « tour de » n’est aucunement prépondérant ni par rapport à l’élément verbal « France » ni par rapport aux éléments figuratifs de cette marque, tels que la structure figurative particulière, la représentation du cycliste et la stylisation de la lettre « o ». En outre, dans la marque demandée, la lettre « x » constitue l’élément dominant car elle est représentée dans une grande police de caractères de couleur orange vive, ce qui la distingue clairement de l’élément « tour de » représenté dans une police de caractères plus petite de couleur noire.

36      Par ailleurs, c’est également en raison de son très faible caractère distinctif, que l’élément verbal « tour de » ne domine pas l’impression d’ensemble produite par les droits en conflit. En effet, cet élément ne dispose pas d’un caractère distinctif plus élevé que les autres éléments composant les droits en conflit, de sorte qu’il n’aura pas une faculté plus grande à dominer l’impression d’ensemble produite par ces droits (voir, par analogie, arrêt du 12 juin 2019, Hansson, C‑705/17, EU:C:2019:481, point 53).

37      Il découle de ce qui précède que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation des éléments distinctifs et dominants des droits en conflit, en concluant que l’élément verbal « tour de » possédait un caractère distinctif très faible, voire inexistant, et n’était pas dominant au sein de ces droits.

2)      Sur la comparaison visuelle, phonétique et conceptuelle

38      La chambre de recours a considéré, aux points 60 à 65 de la décision attaquée, que les droits en conflit présentaient un degré de similitude faible, voire très faible sur le plan visuel, et tout au plus faible sur le plan phonétique et qu’ils n’étaient pas similaires sur le plan conceptuel.

39      La requérante estime que les droits en conflit présentent un degré élevé de similitude.

40      La requérante reproche à la chambre de recours d’avoir tenu compte, d’une part, des circonstances dans lesquelles les produits et les services en cause sont commercialisés dans le cadre de la comparaison visuelle, et d’autre part, du faible caractère distinctif de l’élément verbal « tour de » dans le cadre des comparaisons visuelle et phonétique, ce qui aurait été contraire à la jurisprudence. En particulier, elle avance que le fait que l’élément commun « tour de » soit prétendument non distinctif pour les services concernés est dénué de pertinence aux fins de l’analyse visuelle et phonétique des droits en conflit. Cet élément commun serait visuellement dominant et non négligeable sur le plan phonétique dans ces droits. En outre, les droits en conflit présenteraient un degré élevé de similitude phonétique, compte tenu du chevauchement et de la prononciation identique de leur partie initiale. Partant, selon la requérante, les marques sont similaires à un degré élevé sur les plans visuel et phonétique. Par ailleurs, les droits en conflit seraient conceptuellement similaires dans une certaine mesure, voire très similaires, car le fait que la marque demandée soit susceptible d’être comprise comme donnant l’idée que X doit être remplacé par une destination ou un pays qui n’est pas encore dévoilé, impliquerait l’établissement d’un lien mental évident avec les droits antérieurs les plus renommés et notoires.

41      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

42      Premièrement, en ce qui concerne la comparaison visuelle, il importe de constater que l’élément verbal « tour de » est commun aux droits en conflit. Cependant, comme il résulte des points 34 à 37 ci-dessus, cet élément n’est pas dominant au sein de ces droits et présente un caractère distinctif très faible, voire inexistant. Ensuite, il convient de considérer que les droits en conflit diffèrent en ce que, d’une part, la marque demandée comporte une police de caractères différente, la lettre « x », qui est dominante pour les raisons exposées au point 35 ci-dessus, ainsi que la lettre « o » qui contient la représentation stylisée d’un chronomètre. D’autre part, les droits antérieurs comportent les éléments verbaux « France » et, le cas échéant, « le », qui ne sont pas présents dans la marque demandée. En outre, les différences entre la marque demandée et la marque figurative antérieure sont encore plus évidentes. En effet, la police de caractères est nettement différente, la marque figurative antérieure a une forme globale différente, sa lettre « o » évoque une roue d’un vélo, et sa lettre « r » prend la forme stylisée d’un cycliste. Ainsi, toutes ces différences ainsi que le caractère distinctif moyen dont jouit la lettre « x » dans la marque demandée, atténuent considérablement la similitude née de l’expression commune « tour de » et de sa position au sein des droits en conflit.

43      Partant, la chambre de recours a conclu à juste titre que sur le plan visuel, la marque demandée présentait un faible degré de similitude avec les marques verbales antérieures et l’enregistrement international antérieur, et un très faible degré de similitude avec la marque figurative antérieure.

44      Deuxièmement, en ce qui concerne la comparaison phonétique, il convient de constater, à l’instar de la chambre de recours, que la prononciation des droits en conflit coïncide par le son de l’élément verbal « tour de », et diffère par la prononciation des éléments non communs, à savoir le terme « France » et, le cas échéant, l’article « le », dans les droits antérieurs, et la lettre « x » dans la marque demandée. Si le caractère distinctif très faible, voire inexistant, de l’élément verbal « tour de » (voir les points 34 et 37 ci-dessus) ne fait pas obstacle à ce que, sur le plan phonétique, le public perçoive une certaine ressemblance, dans la partie initiale des droits, par la prononciation de cet élément commun, il convient de rappeler que cet élément n’est pas dominant dans l’impression d’ensemble produite par les droits en conflit, ainsi qu’il a été constaté aux points 35 à 37 ci-dessus, et qu’il ne sera pas accentué. En revanche, la lettre « x », laquelle constitue l’élément dominant de la marque demandée, produit un son distinct qui ne passerait pas inaperçu aux oreilles du public pertinent et, au contraire, elle aurait tendance à être accentuée. Ainsi, les différences entre les droits en conflit, qui sont essentiellement fondées sur, d’une part, la lettre « x », et, d’autre part, sur l’élément verbal « France », qui n’est également pas négligeable au regard de sa prononciation, contrebalancent en grande partie les similitudes dues à l’élément commun « tour de ».

45      Partant, le degré de similitude phonétique entre les droits en conflit est faible, ainsi que la chambre de recours l’a, en substance, conclu.

46      Troisièmement, les conclusions concernant la similitude visuelle et phonétique figurant aux points 43 et 45 ci-dessus ne sont pas remises en cause par les autres arguments de la requérante.

47      À cet égard, il convient de relever que l’argument de la requérante, tiré de la prétendue méconnaissance de la jurisprudence de l’arrêt du 4 mars 2020, EUIPO/Equivalenza Manufactory (C‑328/18 P, EU:C:2020:156, points 66 à 72), en raison de la prise en compte par la chambre de recours, d’une part, des circonstances dans lesquelles les produits et les services en cause sont commercialisés dans le cadre de la comparaison visuelle, et d’autre part, du faible caractère distinctif de l’élément verbal « tour de » dans le cadre de la comparaison visuelle et phonétique, ne saurait prospérer.

48      En effet, ainsi que le fait valoir à juste titre l’EUIPO, l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle l’expression « tour de » est couramment utilisée dans le cadre d’événements et de compétitions cyclistes ne constitue pas une référence aux conditions de commercialisation des produits et des services en cause, mais une référence à la perception du public à l’égard duquel le caractère distinctif intrinsèque des éléments composant les droits en conflit doit être examiné. En revanche, les circonstances dans lesquelles les produits et les services en cause sont commercialisés, à savoir le fait que les produits soient commercialisés dans des magasins en libre‑service ou dans des points de vente spécialisés, avec ou sans l’aide du personnel de vente, n’étaient pas un facteur pris en compte dans la comparaison des droits en conflit dans la décision attaquée.

49      En outre, le fait que la chambre de recours ait tenu compte du contenu sémantique et du degré du caractère distinctif de l’élément commun « tour de » dans l’appréciation de la similitude des marques en conflit, est conforme à la jurisprudence selon laquelle, le caractère distinctif plus ou moins élevé des éléments communs à une marque demandée et à une marque antérieure est un des éléments pertinents dans le cadre de l’appréciation de la similitude des signes [voir arrêt du 26 mars 2015, Royal County of Berkshire Polo Club/OHMI – Lifestyle Equities (Royal County of Berkshire POLO CLUB), T‑581/13, non publié, EU:T:2015:192, point 41 et jurisprudence citée].

50      Quatrièmement, s’agissant de la comparaison conceptuelle, il convient de constater, d’une part, que les droits antérieurs font référence à une compétition cycliste concrète, le Tour de France, consistant à réaliser un tour principalement en France. D’autre part, la marque demandée est susceptible d’être comprise comme une référence à un concours, mais sans une référence à un lieu géographique déterminé et pas nécessairement une compétition cycliste. En effet, l’interprétation de la signification de « X » est laissée entièrement ouverte. Or, le simple fait que les droits en conflit soient toutes susceptibles d’être compris comme faisant référence à une compétition ne les rend pas similaires sur le plan conceptuel, étant donné qu’ils renvoient à des concepts globalement différents. En revanche, il se peut qu’une partie du public pertinent percevrait la marque demandée comme faisant référence à une compétition cycliste, ce que la chambre de recours n’a pas exclu. Dans ce cas, quand bien même le public pertinent distinguerait cette compétition cycliste du concept spécifique transmis par les droits antérieurs, à savoir le Tour de France, il existerait une faible similitude entre les droits en conflit sur le plan conceptuel.

51      Il découle des considérations qui précèdent qu’il existe un degré de similitude faible entre les droits en conflit.

b)      Sur le caractère distinctif des droits antérieurs 

52      L’appréciation du risque de confusion dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance qu’a le public de la marque sur le marché en cause. Comme le risque de confusion est d’autant plus étendu que le caractère distinctif de la marque antérieure s’avère important, les marques qui ont un caractère distinctif élevé, soit intrinsèquement, soit en raison de la connaissance qu’en a le public, jouissent d’une protection plus étendue que celles dont le caractère distinctif est moindre (arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 18, et du 22 juin 1999, Lloyd Schuhfabrik Meyer, C‑342/97, EU:C:1999:323, point 20).

53      En l’espèce, aux points 66 à 95 de la décision attaquée, la chambre de recours a conclu, en ce qui concerne les services d’organisation de compétitions cyclistes compris dans la classe 41, que les marques verbales antérieures possédaient, de par leur usage, un caractère distinctif moyen et la marque figurative antérieure disposait d’un caractère distinctif élevé. À cet égard, elle a constaté que, si les marques verbales antérieures et l’enregistrement international antérieur devaient être considérés comme possédant un faible caractère distinctif intrinsèque, les marques verbales antérieures avaient acquis, eu égard aux éléments de preuve produits par la requérante sur leur usage, pour les services d’organisation de compétitions cyclistes compris dans la classe 41, un caractère distinctif moyen. Elle a précisé que le caractère distinctif accru par l’usage s’appliquerait aux droits antérieurs dans leur ensemble, plutôt qu’aux seuls éléments « tour de ». Par ailleurs, elle a considéré que la marque figurative antérieure possédait un caractère distinctif intrinsèque moyen, mais que, par son usage, cette marque avait acquis un caractère distinctif élevé en ce qui concerne les services d’organisation de compétitions cyclistes compris dans la classe 41.

54      La requérante conteste cette appréciation en faisant valoir que les constatations concernant le caractère distinctif accru par l’usage des droits antérieurs sont discordantes, incohérentes et incorrectes.

55      Elle affirme, en ce qui concerne les services d’organisation de compétitions cyclistes compris dans la classe 41, que le fait que la chambre de recours ait considéré, de manière injustifiée, que les marques verbales antérieures possédaient un caractère distinctif intrinsèque plus faible que la marque figurative antérieure ne permet pas de conclure que des éléments de preuve supplémentaires devaient être produits pour démontrer le caractère distinctif accru par l’usage des marques verbales. Les éléments de preuve produits par la requérante démontreraient le caractère distinctif accru par l’usage pour tous les droits antérieurs, qu’il s’agisse des marques verbales ou de la marque figurative antérieures. La chambre de recours aurait commis une erreur d’appréciation en estimant que les marques verbales antérieures présentaient un « degré inférieur » de caractère distinctif accru par l’usage.

56      En outre, dans le cadre de son argumentation sur l’appréciation globale du risque de confusion, la requérante relève que le caractère distinctif accru par l’usage « de la marque TOUR DE FRANCE » ne saurait être réduit à néant par la simple référence à l’existence d’autres noms d’événements dont la plupart sont soit inconnus, soit marginaux.

57      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

58      À cet égard, force est de constater que la requérante ne formule aucun argument étayé au point 34 de la requête pour remettre en cause les appréciations de la chambre de recours dans la décision attaquée relatives au caractère distinctif intrinsèque et au caractère distinctif accru par l’usage des droits antérieurs, lesquelles sont résumées au point 53 ci-dessus. En effet, la requérante se limite à de simples affirmations à cet effet, n’avançant aucun argument.

59      À titre surabondant, s’agissant de l’affirmation de la requérante selon laquelle le caractère distinctif accru par l’usage des « marques TOUR DE FRANCE » ne saurait être réduit à néant par la simple référence à l’existence d’autres noms d’événements dont la plupart sont soit inconnus, soit marginaux, il suffit de constater qu’il s’agit d’une lecture erronée de la décision attaquée. En effet, aux points 54 et 55 de cette décision, la chambre de recours n’a pas examiné le caractère distinctif acquis par l’usage des droits antérieurs dans leur ensemble, mais uniquement le caractère distinctif intrinsèque de leur élément commun « tour de ». Dans ce contexte, la chambre de recours a considéré que cet élément possédait un caractère distinctif très faible, voire inexistant, en particulier en ce qui concerne les événements cyclistes et les produits s’y rapportant, au regard du fait que, entre autres, l’expression « tour de » est fréquemment utilisée dans les noms de compétitions cyclistes et d’évènements similaires. De plus, la chambre de recours a considéré à juste titre, au point 95 de la décision attaquée, que le caractère distinctif supplémentaire acquis par l’usage s’appliquait aux droits antérieurs dans leur ensemble, plutôt qu’au seul élément « tour de ».

c)      Sur l’appréciation du risque de confusion

60      Il convient de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêts du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, EU:C:1998:442, point 17, et du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, EU:T:2006:397, point 74].

61      En outre, lorsque la marque antérieure et le signe dont l’enregistrement est demandé coïncident dans un élément de caractère faiblement distinctif au regard des produits en cause, l’appréciation globale du risque de confusion, au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, n’aboutit fréquemment pas au constat de l’existence de ce risque (voir, en ce sens, arrêt du 18 juin 2020, Primart/EUIPO, C‑702/18 P, EU:C:2020:489, point 53 et jurisprudence citée).

62      En l’espèce, la chambre de recours a conclu, au point 100 de la décision attaquée, que compte tenu des différences claires entre les droits en conflit, un risque de confusion pouvait être exclu avec certitude, malgré l’identité et la similitude des produits et des services en cause et le caractère distinctif accru par l’usage des droits antérieurs pour les services d’organisation de compétition cyclistes compris dans la classe 41.

63      La requérante conteste cette appréciation en soutenant, que, au regard du caractère distinctif accru par l’usage, voire d’une renommée exceptionnelle, des droits antérieurs, du fait que les droits en conflit sont similaires en raison de l’identité de la partie initiale « tour de », et que les produits et les services en cause sont identiques ou très similaires, le public pertinent peut croire que ces produits et services proviennent de la même entreprise ou, à tout le moins, d’entreprises économiquement liées.

64      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

65      À cet égard, il convient de considérer que, dans le cadre d’une appréciation globale du risque de confusion, il résulte du faible caractère distinctif du seul élément commun « tour de », et du faible degré de similitude entre les droits en conflit, que le public pertinent ne confondra pas ces droits, et ce malgré l’identité ou la similitude des produits et des services en cause et le caractère distinctif accru par l’usage des droits antérieurs pour les services d’organisation de compétitions cyclistes compris dans la classe 41. Dans ce cadre, l’erreur d’appréciation commise par la chambre de recours en ce qu’elle a conclu à l’absence de similitude conceptuelle entre les droits en conflit, qui ressort du point 50 ci-dessus, n’a aucune incidence sur le résultat de l’analyse globale du risque de confusion.

66      Au vu de ce qui précède, il y a lieu de considérer que la chambre de recours n’a commis d’erreur en concluant à l’absence de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

67      Partant, il convient de rejeter le premier moyen dans son ensemble.

2.      Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009

68      Par son deuxième moyen, la requérante avance que la chambre de recours a erronément apprécié l’usage de la marque demandée pour les produits et services visés par cette dernière comme n’étant pas susceptible de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des droits antérieurs ou de leur porter préjudice au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009.

69      Il convient de rappeler qu’aux termes de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure enregistrée au sens du paragraphe 2, la marque demandée est refusée à l’enregistrement si elle est identique ou similaire à une marque antérieure, indépendamment du fait que les produits ou services pour lesquels elle est demandée sont identiques, similaires ou non similaires à ceux pour lesquels la marque antérieure est enregistrée, lorsque cette marque antérieure est une marque de l’Union européenne qui jouit d’une renommée dans l’Union ou une marque nationale qui jouit d’une renommée dans l’État membre concerné, et que l’usage sans juste motif de la marque demandée tirerait indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de cette marque antérieure ou leur porterait préjudice.

70      La protection élargie accordée à la marque antérieure par l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 présuppose donc la réunion de plusieurs conditions. Premièrement, la marque antérieure prétendument renommée doit être enregistrée. Deuxièmement, cette dernière et celle dont l’enregistrement est demandé doivent être identiques ou similaires. Troisièmement, la marque antérieure doit jouir d’une renommée dans l’Union, dans le cas d’une marque de l’Union européenne antérieure, ou dans l’État membre concerné, dans le cas d’une marque nationale antérieure. Quatrièmement, l’usage sans juste motif de la marque demandée doit conduire au risque qu’un profit puisse être indûment tiré du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure ou qu’un préjudice puisse être porté au caractère distinctif ou à la renommée de la marque antérieure. Ces conditions étant cumulatives, l’absence de l’une d’entre elles suffit à rendre inapplicable ladite disposition [arrêt du 22 mars 2007, Sigla/OHMI – Elleni Holding (VIPS), T‑215/03, EU:T:2007:93, point 34 ; voir, également, arrêt du 31 mai 2017, Alma-The Soul of Italian Wine/EUIPO – Miguel Torres (SOTTO IL SOLE ITALIANO SOTTO il SOLE), T‑637/15, EU:T:2017:371, point 29 et jurisprudence citée].

71      En l’espèce, aux points 102 à 131 de la décision attaquée, la chambre de recours a conclu que l’usage de la marque demandée pour les produits et services visés ne serait pas susceptible de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des droits antérieurs ou de leur porter préjudice. À cet égard, premièrement, elle a constaté qu’il existait une certaine similitude entre les droits en conflit. Deuxièmement, elle a précisé que le degré de caractère distinctif accru par l’usage des marques verbales antérieures et de la marque figurative antérieure pour les services d’organisation de compétitions cyclistes compris dans la classe 41 démontrait une renommée au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, mais qu’un degré de renommée élevé n’avait pas été prouvé. Troisièmement, si elle a observé qu’il y avait une proximité suffisante entre, d’une part, les produits et les services visés par la marque demandée et, d’autre part, les services d’organisation de compétitions cyclistes couverts par les droits antérieurs, elle a estimé que le public pertinent n’établirait pas de lien mental entre les droits en conflit au sens de ladite disposition. En effet, selon la chambre de recours, il n’y avait pas de preuve que le caractère distinctif accru par l’usage et la renommée des droits antérieurs TOUR DE FRANCE et/ou LE TOUR DE FRANCE s’étendaient à l’élément « tour de » seul. De plus, dans la marque demandée, cet élément ne renverrait pas à un tour de France, mais à un tour de X. 

72      La requérante conteste cette appréciation en faisant valoir, en premier lieu, que la chambre de recours n’a pas correctement apprécié la renommée des droits antérieurs. En particulier, elle reproche à la chambre de recours d’avoir considéré qu’un degré de renommée supérieur à la moyenne ou élevé n’avait pas été prouvé. D’une part, le législateur de l’Union n’exigerait pas un tel degré de renommée et, d’autre part, les éléments de preuve produits par la requérante suffiraient à démontrer la renommée exceptionnellement élevée dont jouissent les droits antérieurs dans l’Union pour des produits et les services pour lesquels elles sont enregistrées, y compris pour les services de divertissement.

73      En deuxième lieu, la requérante reproche à la chambre de recours d’avoir tenu compte, dans la comparaison des droits, des conditions de commercialisation des produits et des services couverts par les droits, en concluant que la similitude entre les droits se limite au chevauchement de l’expression « tour de » qui est très couramment utilisée dans le contexte de manifestations et de compétitions cyclistes et possède donc un caractère distinctif très faible, voire inexistant. En outre, elle avance, contrairement à ce qu’a soutenu la chambre de recours dans la décision attaquée, que la requérante ne vise pas l’obtention d’un monopole sur l’élément « tour de » en raison du chevauchement de cette partie dans les droits en conflit, mais relève que ce chevauchement porte à conclure à l’existence d’une similitude très élevée des droits en conflit.

74      En troisième lieu, la chambre de recours aurait erronément apprécié le risque d’association de la marque demandée avec les droits antérieurs et le risque que l’utilisation de la marque demandée puisse tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des droits antérieurs ou leur porter préjudice. La requérante prétend qu’elle a suffisamment démontré l’existence du risque non hypothétique que l’enregistrement de la marque demandée se place dans le sillage des droits antérieurs et qu’il tire indument profit d’une très grande renommée de ces derniers.

75      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

76      Premièrement, s’agissant des arguments de la requérante, résumés au point 73 ci-dessus, visant à contester l’appréciation par la chambre de recours de la similitude des droits en conflit, il suffit de renvoyer à l’analyse effectuée aux points 42 à 51 ci-dessus et de constater que le degré de similitude entre ces marques est faible. La chambre de recours a donc conclu, à juste titre, que la condition d’application à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 relative à l’existence d’une certaine similitude entre les droits en conflit était remplie, mais que cette similitude était, en substance, faible.

77      Deuxièmement, concernant la renommée des droits antérieurs, il importe de relever, d’une part, que, par la constatation dans la décision attaquée selon laquelle il ne saurait être considéré qu’un degré de renommée supérieur à la moyenne ou élevé a été prouvé, la chambre de recours n’a pas imposé une exigence de degré de renommée plus stricte que celle prévue à l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009, mais a tout simplement précisé quel était le degré de renommée des droits antérieurs tel que démontré par les éléments de preuve produits. Partant, le reproche de la requérante à cet égard repose sur une lecture erronée de la décision attaquée.

78      D’autre part, dans la mesure où la requérante soutient, en substance, que les éléments de preuve démontrent que les marques TOUR DE FRANCE et LE TOUR DE FRANCE jouissent d’une renommée pour tous les produits et les services qu’elles couvrent et pas seulement pour l’organisation de compétitions sportives relevant de la classe 41, il importe de relever, ainsi qu’il découle de l’acte de l’opposition du 11 août 2017, que la requérante a invoqué expressément l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 uniquement en ce qui concerne l’organisation de compétitions sportives. Ainsi, la chambre de recours n’a, à bon droit, examiné la renommée des droits antérieurs que par rapport auxdits services.

79      À titre surabondant, concernant l’argument de la requérante tiré de ce que, selon une jurisprudence constante, les événements sportifs doivent être considérés comme des services de divertissement s’adressant au grand public, et que la chambre de recours a erronément considéré qu’aucun des éléments de preuve ou arguments fournis par la requérante ne concernait le divertissement, il convient de rappeler que, dans son acte d’opposition, la requérante a invoqué la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009 uniquement pour l’organisation de compétitions sportives. À supposer même que les événements sportifs doivent être considérés également comme des services de divertissement, la requérante ne fournit aucune explication quant à l’impact de la prétendue erreur de la chambre de recours sur les conclusions relatives à la renommée des droits antérieurs et au risque que l’usage de la marque demandée tire indument profit du caractère distinctif ou de la renommée des droits antérieurs ou leur porte préjudice. Partant, cet argument ne peut, en tout état de cause, pas prospérer.

80      Troisièmement, quand bien même la requérante affirme que la chambre de recours n’a pas correctement apprécié certains éléments de preuve qui démontraient que les droits antérieurs jouissent d’une renommée exceptionnellement élevée dans l’Union, ce fait, à le supposer avéré, n’aurait aucune influence sur la légalité de la décision attaquée dans la mesure où la chambre de recours a conclu, à juste titre, que le public pertinent n’établirait pas de lien mental entre les droits en conflit au sens de l’article 8, paragraphe 5, du règlement no 207/2009. En effet, la chambre de recours a fondé sa conclusion à cet égard sur l’ensemble des facteurs pertinents, en tenant compte du degré de caractère distinctif des droits antérieurs, du degré de proximité entre les produits et les services visés par la marque demandée et les services d’organisation de compétitions cyclistes couverts par les droits antérieurs et du degré de similitude entre les droits en conflit.

81      À cet égard, l’argument de la requérante selon lequel la chambre de recours n’a pas dument tenu compte du lien immédiat et évident qui existait entre une marque commençant par l’expression « tour de » pour des événements sportifs et des produits connexes et la marque antérieure (LE) TOUR DE FRANCE, dont la renommée est exceptionnellement élevée, est dénué de tout fondement. Ainsi qu’il a été constaté au point 59 ci-dessus, et comme l’a considéré à juste titre la chambre de recours aux points 98 et 127 de la décision attaquée, le caractère distinctif accru par l’usage et la renommée des droits antérieurs TOUR DE FRANCE et LE TOUR DE FRANCE ne s’étendent pas à l’élément commun aux droits en conflit, à savoir l’élément « tour de ».

82      En outre, ainsi qu’il découle des points 42 à 51, 65 et 66 ci-dessus, malgré l’expression commune « tour de », les droits en conflit ne présentent qu’une faible similitude, et il n’existe pas de risque de confusion au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009.

83      Dès lors, l’expression descriptive « tour de », très couramment utilisée dans le contexte de compétitions cyclistes et possédant donc un caractère distinctif très faible, voire inexistant, n’amènera pas le public pertinent à percevoir un lien entre les droits en conflit, et ce même à supposer que la renommée des droits antérieurs soit exceptionnellement élevée.

84      Partant, les arguments de la requérante ne sont pas de nature à remettre en cause la conclusion de la chambre de recours selon laquelle, étant donné que le public pertinent n’établirait pas de lien entre les droits en conflit, l’usage de la marque demandée pour les produits et les services qu’elle vise n’est pas susceptible de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée des droits antérieurs ou de leur porter préjudice, de sorte que les conditions nécessaires énoncées à l’article 8, paragraphe 5, du règlement 2017/1001 n’étaient pas remplies.

85      Il résulte de ce qui précède qu’il convient de rejeter le deuxième moyen.

3.      Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’article 94 du règlement 2017/1001 

86      La requérante fait valoir qu’un défaut ou une insuffisance de motivation relève de la violation des formes substantielles et qu’une contradiction entre motifs équivaut à une absence de motivation. Elle soutient également que la décision attaquée contient plusieurs contradictions qui ont conduit à une motivation inadéquate de la chambre de recours.

87      En particulier, elle précise, d’une part, que bien que la chambre de recours ait décidé, au point 52 de la décision attaquée, de ne pas se concentrer sur la faiblesse du terme « tour » en tant que tel, il n’était pas expliqué pourquoi elle a tenu compte du fait qu’elle considérait l’expression « tour de » comme faible et possédant un caractère distinctif limité.

88      D’autre part, selon la requérante, bien que la chambre de recours ait conclu, au point 90 de la décision attaquée, que les marques verbales antérieures, ainsi que la marque figurative antérieure, avaient un caractère distinctif accru par l’usage pour les compétitions cyclistes, elle a ensuite distingué artificiellement l’appréciation du caractère distinctif des marques verbales et de celui de la marque figurative, et a conclu de manière inopinée que les marques verbales, même si considérées comme possédant un caractère distinctif accru par l’usage, ne sont que moyennement distinctives.

89      L’EUIPO et l’intervenante contestent les arguments de la requérante.

90      Aux termes de l’article 94, paragraphe 1, première phrase, du règlement 2017/1001, les décisions de l’EUIPO doivent être motivées. Cette obligation a la même portée que celle découlant de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, lequel exige que la motivation fasse apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte, sans qu’il soit nécessaire que cette motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait auxdites exigences devant cependant être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. Cette obligation, qui découle également de l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, a pour objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision concernée (voir arrêt du 28 juin 2018, EUIPO/Puma, C‑564/16 P, EU:C:2018:509, points 64 et 65 et jurisprudence citée).

91      Il y a lieu également de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence que la motivation d’un acte doit être logique, ne présentant notamment pas de contradiction interne entravant la bonne compréhension des raisons sous-tendant cet acte (arrêts du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 151, et du 12 décembre 2012, Electrabel/Commission, T‑332/09, EU:T:2012:672, point 181).

92      En l’espèce, en premier lieu, dans la mesure où les arguments de la requérante pourraient être interprétés comme invoquant l’absence de la motivation de la décision attaquée, il convient de constater que la chambre de recours a motivé, à suffisance de droit, la décision attaquée permettant à la requérante de comprendre les motifs du rejet de son recours et au Tribunal d’exercer son contrôle sur la légalité de ladite décision, tel qu’il ressort d’ailleurs de l’examen des premier et deuxième moyens. En tout état de cause, la requérante n’apporte aucun argument pour soutenir le contraire.

93      Il s’ensuit que l’argument relatif à l’absence de motivation de la décision attaquée doit être rejeté.

94      En second lieu, concernant la prétendue contradiction décrite au point 87 ci-dessus, il convient de relever que la chambre de recours a constaté, au point 52 de la décision attaquée, qu’afin de simplifier l’analyse, elle ne se concentrerait pas sur le faible caractère distinctif du terme « tour » en tant que tel, ce qui constituait le scénario le plus favorable pour la requérante et qui n’aurait pas d’incidence sur l’issue de la décision attaquée. Par la suite, la chambre de recours a procédé, aux points 53 à 56 de la décision attaquée, à un examen approfondi de l’expression « tour de », étant donné qu’elle est présente dans tous les droits en conflit et qu’un tel examen n’avait pas été réalisé par la division d’opposition. À l’issue de cet examen, la chambre de recours a constaté que l’expression « tour de » possédait un caractère distinctif très faible, voire inexistant.

95      Il convient de considérer que ces constats de la chambre de recours ne sont pas contradictoires. En effet, il n’y a aucune contradiction dans le fait que, dans son analyse, la chambre de recours a pris en considération le caractère distinctif très faible de l’expression « tour de » sans tenir compte spécifiquement du faible caractère distinctif du seul terme « tour », notamment dans la situation où c’est l’expression « tour de » qui est commune aux droits en conflit et où le caractère distinctif des éléments communs est l’un de facteurs pertinents à prendre en considération lors de l’examen du risque de confusion.

96      S’agissant de la prétendue contradiction résumée au point 88 ci-dessus, il y a lieu de considérer que les différentes conclusions de la chambre de recours relatives au degré du caractère distinctif accru par l’usage des différents droits antérieurs ne sauraient être considérées comme inopinées ou contradictoires au regard, d’une part, des différences quant au degré du caractère distinctif intrinsèque de ces marques et, d’autre part, du fait que lesdites conclusions étaient fondées sur un examen approfondi des éléments de preuve auquel s’est livré la chambre de recours dans la décision attaquée.

97      Il résulte de ce qui précède qu’il y a lieu de rejeter le troisième moyen et, par voie de conséquence, le recours dans son ensemble.

IV.    Sur les dépens

98      Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

99      La requérante ayant succombé et une audience ayant été tenue, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’EUIPO et de l’intervenante afférentes à leurs propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La Société du Tour de France est condamnée aux dépens.

Kowalik-Bańczyk

Hesse

Ricziová

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 juin 2024.

Signatures


*      Langue de procédure : l’anglais.