Language of document : ECLI:EU:T:2014:27

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)

23 janvier 2014 (*)

« Concurrence – Ententes – Marché du carbure de calcium et du magnésium destinés aux secteurs sidérurgique et gazier dans l’EEE, à l’exception de l’Irlande, de l’Espagne, du Portugal et du Royaume‑Uni – Décision constatant une infraction à l’article 81 CE – Fixation des prix et répartition du marché – Droits de la défense – Imputabilité du comportement infractionnel – Obligation de motivation – Amendes – Égalité de traitement – Circonstances atténuantes – Coopération durant la procédure administrative – Proportionnalité – Responsabilité solidaire pour le paiement de l’amende – Lignes directrices pour le calcul du montant des amendes de 2006 »

Dans l’affaire T‑384/09,

SKW Stahl-Metallurgie Holding AG, établie à Unterneukirchen (Allemagne),

et

SKW Stahl-Metallurgie GmbH, établie à Unterneukirchen,

représentées initialement par Mes A. Birnstiel, S. Janka et S. Dierckens, avocats, puis par Mes Birnstiel et Janka,

parties requérantes,

soutenues par

Gigaset AG, anciennement Arques Industries AG, établie à Munich (Allemagne), représentée par Mes C. Grave, A. Scheidtmann et B. Meyring, avocats,

partie intervenante,

contre

Commission européenne, représentée par M. N. von Lingen et Mme A. Antoniadis, en qualité d’agents, assistés de Me A. Böhlke, avocat,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision C (2009) 5791 final de la Commission, du 22 juillet 2009, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/39.396 − Réactifs à base de carbure de calcium et de magnésium destinés aux secteurs sidérurgique et gazier), en ce qu’elle vise les requérantes, ainsi que, à titre subsidiaire, une demande d’annulation ou de réduction du montant de l’amende infligée aux requérantes par ladite décision,

LE TRIBUNAL (troisième chambre),

composé de M. O. Czúcz, président, Mme I. Labucka et M. D. Gratsias (rapporteur), juges,

greffier : Mme K. Andová, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 16 avril 2013,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Par sa décision C (2009) 5791 final, du 22 juillet 2009, relative à une procédure d’application de l’article 81 [CE] et de l’article 53 de l’accord EEE (affaire COMP/39.396 − Réactifs à base de carbure de calcium et de magnésium destinés aux secteurs sidérurgique et gazier) (résumé au JO C 301, p. 18, ci‑après la « décision attaquée »), la Commission des Communautés européennes a constaté que les principaux fournisseurs de carbure de calcium et de magnésium destinés aux secteurs sidérurgique et gazier avaient enfreint l’article 81, paragraphe 1, CE et l’article 53 de l’accord sur l’Espace économique européen (EEE) en participant, du 7 avril 2004 au 16 janvier 2007, à une infraction unique et continue. Celle‑ci se traduisait par un partage de marchés, une fixation de quotas, une répartition des clients, une fixation des prix et un échange d’informations commerciales sensibles concernant les prix, les clients et les volumes de vente dans l’EEE, à l’exception de l’Irlande, de l’Espagne, du Portugal et du Royaume‑Uni.

2        La procédure a été ouverte à la suite d’une demande d’immunité, au sens de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes (JO 2002, C 45, p. 3, ci‑après la « communication sur la clémence »), déposée le 20 novembre 2006 par Akzo Nobel NV.

3        Par l’article 1er, sous f) de la décision attaquée, la Commission a constaté que la première requérante, SKW Stahl-Metallurgie Holding AG (ci-après « SKW Holding »), avait participé à l’infraction du 30 août 2004 au 16 janvier 2007 et que la seconde requérante, SKW Stahl-Metallurgie GmbH (dénommée, jusqu’en 2005, SKW Stahl-Technik GmbH & Co. KG, ci‑après « SKW »), avait participé à l’infraction du 22 avril 2004 au 16 janvier 2007. Ainsi qu’il ressort du considérant 226 de la décision attaquée, la Commission a considéré que, pendant la période susmentionnée, des employés de SKW avaient été directement impliqués dans les accords et/ou pratiques concertées de l’entente litigieuse. Quant à SKW Holding, il ressort du considérant 245 de la décision attaquée que, du 30 août 2004 au 16 janvier 2007, elle détenait 100 % du capital de SKW et, pour les motifs exposés aux considérants 245 à 250 de la décision attaquée, la Commission a considéré qu’elle faisait partie de la même unité économique que SKW et pouvait, dès lors, être tenue pour responsable de l’infraction aux règles de la concurrence commise par cette dernière.

4        Par l’article 2, sous f), de la décision attaquée, la Commission a infligé aux requérantes ainsi qu’à Arques Industries AG (ci-après « Arques »), du fait de leur participation à l’infraction litigieuse, une amende de 13,3 millions d’euros, en les désignant comme étant solidairement responsables pour le paiement de cette amende. En outre, par l’article 2, sous g), de la décision attaquée, elle a infligé à Evonik Degussa GmbH (ci-après « Degussa »), AlzChem Hart GmbH et SKW, désignées comme étant toutes solidairement responsables, une amende de 1,04 million d’euros. À cet égard, la note en bas de page n° 681, sous le considérant 361 de la décision attaquée, prévoit ce qui suit :

« Veuillez noter que [SKW] est responsable pour une amende unique et que sa responsabilité conjointe et solidaire cumulative avec d’autres destinataires de la décision n’excède pas [13,3 millions d’euros] [...] »

 Procédure et conclusions des parties

5        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 1er octobre 2009, les requérantes ont introduit le présent recours.

6        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 21 janvier 2010, Arques a demandé à intervenir au présent litige, au soutien des conclusions des requérantes. La demande d’intervention a été signifiée aux parties conformément à l’article 116, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal. Par ordonnance du 2 juillet 2010, le président de la cinquième chambre du Tribunal a admis l’intervention.

7        Par lettres déposées au greffe du Tribunal les 22 février et 23 avril 2010, les requérantes ont demandé le traitement confidentiel à l’égard de l’intervenante, respectivement, de certains passages et de certaines annexes de leur requête et d’un point de leur réplique. Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 30 juillet 2010, l’intervenante a émis des objections aux demandes de traitement confidentiel susvisées, sauf en ce qui concerne certaines annexes de la requête.

8        L’intervenante a déposé son mémoire en intervention le 30 août 2010.

9        La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur initialement désigné a été affecté à la troisième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée. En raison du renouvellement partiel du Tribunal, la présente affaire a été attribuée à un nouveau juge rapporteur, siégeant dans la même chambre.

10      Par ordonnance du 3 mai 2011, le président de la troisième chambre du Tribunal a rejeté les demandes de traitement confidentiel dans la mesure où elles étaient contestées par l’intervenante.

11      Le 6 juillet 2011, à la suite de la communication des éléments pour lesquels les demandes de traitement confidentiel avaient été rejetées, l’intervenante a déposé un complément à son mémoire en intervention. Par lettre déposée au greffe le même jour, elle a informé le Tribunal de la modification de sa raison sociale, devenue Gigaset AG.

12      Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé d’ouvrir la procédure orale et, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 64 du règlement de procédure, a invité la Commission à répondre à une question et à produire certains documents. La Commission a déféré à ces demandes dans le délai imparti.

13      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal à l’audience du 16 avril 2013. Lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, les requérantes ont déclaré ne plus maintenir leur demande de traitement confidentiel de certaines annexes de la requête, contre lesquelles l’intervenante n’avait pas émis d’objections. Il a été pris acte de cette déclaration au procès‑verbal de l’audience.

14      Les requérantes concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée en ce qu’elle les concerne ;

–        à titre subsidiaire, modifier l’article 2 de la décision attaquée en annulant l’amende qui leur a été infligée ou, à tout le moins, en la réduisant considérablement ;

–        condamner la Commission aux dépens.

15      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner les requérantes aux dépens.

16      L’intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal de faire droit aux premier et deuxième chefs de conclusions des requérantes.

 En droit

17      À l’appui de leurs recours, les requérantes invoquent six moyens, tirés, le premier, de la violation de leur droit d’être entendues, le deuxième, d’une application erronée de l’article 81 CE, le troisième, de la violation de l’obligation de motivation, le quatrième, de la violation du principe d’égalité de traitement en raison du traitement discriminatoire de SKW par rapport à Almamet GmbH Handel mit Spänen und Pulvern aus Metall (ci-après « Almamet »), le cinquième, de la violation des articles 7 et 23 du règlement (CE) n° 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO L 1, p. 1), ainsi que des principes de proportionnalité et de légalité des peines et, le sixième, d’une violation de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003.

18      Tout en soutenant les conclusions des requérantes, l’intervenante n’a présenté d’observations que sur les deuxième, quatrième et cinquième moyens.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation du droit d’être entendu

19      Les requérantes font valoir que la Commission a violé leurs droits de la défense et, en particulier, leur droit d’être entendues, dès lors qu’elle ne leur a pas donné la possibilité de présenter oralement, dans le cadre d’une audition, une partie essentielle de leur argumentation à décharge.

20      Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que l’article 27, paragraphe 1, du règlement no 1/2003 dispose que, avant de prendre les décisions prévues, notamment, à l’article 23 du même règlement, la Commission donne aux entreprises et aux associations d’entreprises visées par la procédure menée par elle l’occasion de faire connaître leur point de vue au sujet des griefs qu’elle a retenus. Elle ne fonde ses décisions que sur les griefs au sujet desquels les parties concernées ont pu faire valoir leurs observations. Aux termes du paragraphe 2 du même article, les droits de la défense des parties concernées sont pleinement assurés dans le déroulement de la procédure. Celles-ci ont le droit d’avoir accès au dossier de la Commission sous réserve de l’intérêt légitime des entreprises à ce que leurs secrets d’affaires ne soient pas divulgués. Toutefois, ce droit d’accès ne s’étend pas aux informations confidentielles et aux documents internes de la Commission ou des autorités de concurrence des États membres.

21      Par ailleurs, l’article 12, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 773/2004 de la Commission, du 7 avril 2004, relatif aux procédures mises en œuvre par la Commission en application des articles 81 [CE] et 82 [CE] (JO L 123, p. 18), tel que modifié par le règlement (CE) n° 622/2008 de la Commission, du 30 juin 2008 (JO L 171, p. 3), prévoit que la Commission donne aux parties auxquelles elle adresse une communication des griefs la possibilité de développer leurs arguments lors d’une audition, si elles en font la demande dans leurs observations écrites. Aux termes de l’article 14, paragraphe 1, du règlement n° 773/2004, les auditions sont conduites en toute indépendance par un conseiller-auditeur. Le paragraphe 6 du même article prévoit que l’audition n’est pas publique et que toute personne peut être entendue séparément ou en présence d’autres personnes invitées à assister à l’audition, compte tenu de l’intérêt légitime des entreprises à ce que leurs secrets d’affaires et autres informations confidentielles ne soient pas divulgués.

22      Il convient de relever, par ailleurs, que la décision 2001/462/CE, CECA de la Commission, du 23 mai 2001, relative au mandat des conseillers-auditeurs dans certaines procédures de concurrence (JO L 162, p. 21), prévoit, en son article 13, paragraphe 1, que le conseiller-auditeur fait rapport au membre de la Commission chargé de la concurrence sur l’audition et sur les conclusions qu’il en tire, quant au respect du droit d’être entendu. Les observations contenues dans ce rapport portent sur les aspects procéduraux, notamment la divulgation des documents et l’accès au dossier, les délais de réponse aux communications des griefs et le déroulement de l’audition.

23      L’article 15, paragraphe 1, de la même décision, dispose que le conseiller-auditeur, sur la base du projet de décision à soumettre au comité consultatif sur l’affaire en question, élabore par écrit un rapport final, sur le respect du droit d’être entendu, au sens de l’article 13, paragraphe 1. Ce rapport examine, notamment, si le projet de décision ne retient que les griefs au sujet desquels les parties ont eu l’occasion de faire connaître leur point de vue. Il résulte de l’article 16, paragraphe 3, de ladite décision que ce rapport final est publié par la Commission au Journal officiel de l’Union européenne en même temps que la décision de la Commission.

24      En l’espèce, dans leur réponse du 6 octobre 2008 à la communication des griefs, les requérantes ont, notamment, fait valoir que, contrairement aux affirmations de la Commission, SKW Holding n’avait pas exercé une influence déterminante sur SKW lors de la période infractionnelle et elles ont exposé les circonstances spécifiques qui, selon elles, justifiaient cette affirmation. Elles ont ajouté que, en réalité, c’était Degussa qui déterminait la stratégie de vente de SKW et son influence déterminante sur cette dernière société avait persisté même après le rachat, le 30 août 2004, de l’intégralité de son capital par SKW Holding. Selon les requérantes, SKW agissait de facto comme un agent ou représentant commercial de Degussa.

25      Dans la même réponse, les requérantes ont demandé à pouvoir développer leurs arguments lors d’une audition. Ayant été convoquées à une audition qui devait se tenir les 10 et 11 novembre 2008, elles ont, par courriel du 31 octobre 2008, demandé au conseiller-auditeur de pouvoir présenter à huis clos la partie de leur argumentation relative à l’influence prétendument exercée sur SKW par Degussa. Afin de motiver cette demande, elles ont affirmé que SKW dépendait, pour sa survie économique, de Degussa, qui lui fournissait la quasi-totalité du carbure de calcium qu’elle commercialisait et ces deux entreprises étaient en négociation au sujet d’un nouveau contrat de fourniture. Elles ont ajouté que la présentation de cette partie de leur argumentation en présence de Degussa mettrait sérieusement en péril la relation commerciale de SKW avec celle-ci et pourrait conduire à des représailles de sa part.

26      Le 5 novembre 2008, les requérantes ont adressé un nouveau courriel à la Commission, dans lequel elles ont suggéré qu’une « solution praticable » pourrait consister à donner à Degussa l’accès à leur présentation à huis clos après la fin de l’année 2008 ou après la conclusion d’un contrat de fourniture entre ces deux entreprises.

27      Le 6 novembre 2008, dans un courriel adressé, notamment, au conseiller-auditeur et faisant suite à une conversation téléphonique avec celui-ci, les requérantes ont fourni des précisions sur les raisons justifiant leur demande de pouvoir présenter une partie de leur argumentation, lors de l’audition, à huis clos, ainsi que sur la teneur de cette argumentation, et elles ont réitéré leur proposition de solution, mentionnée au point 26 ci-dessus.

28      Par lettre du 6 novembre 2008, le conseiller-auditeur a rejeté la demande susvisée des requérantes. À titre liminaire, il a fait observer que cette demande n’était pas stricto sensu fondée sur un intérêt légitime de protection de secrets d’affaires et d’autres informations confidentielles. Il a, dès lors, indiqué qu’il l’examinerait du point de vue du droit d’être entendu. À cet égard, il a relevé que l’argumentation en question des requérantes concernait le comportement de Degussa et, pour pouvoir être prise en considération par la Commission en tant que circonstance atténuante, sa valeur probante devrait être vérifiée par une comparaison avec une déclaration à obtenir de Degussa. En outre, une audition à huis clos priverait Degussa de son droit de répondre oralement aux allégations des requérantes la mettant en cause au moins indirectement. Quant à la solution alternative proposée par les requérantes, le conseiller-auditeur a relevé qu’elle n’était pas réalisable, dès lors que ni le moment auquel les négociations entre les requérantes et Degussa se termineraient ni leur issue n’étaient certains.

29      L’audition a eu lieu les 10 et 11 novembre 2008.

30      Par lettre du 28 janvier 2009, les requérantes, après avoir rappelé leur demande rejetée par la lettre du conseiller-auditeur mentionnée au point 28 ci­‑dessus, ont relevé que, entre-temps, les négociations entre SKW et Degussa avaient abouti à la conclusion d’un nouveau contrat de fourniture, de sorte qu’il n’y avait plus aucune difficulté pour elles de présenter oralement, en présence de Degussa, la partie de leur argumentation concernant le rôle de cette dernière. Elles ont, dès lors, demandé au conseiller‑auditeur d’organiser une nouvelle audition, afin de leur donner l’occasion de présenter oralement cette partie de leur argumentation, non présentée lors de l’audition des 10 et 11 novembre 2008.

31      Par lettre du 3 février 2009, le conseiller-auditeur a rejeté la demande des requérantes tendant à l’organisation d’une nouvelle audition, au motif que le droit d’être entendu trouvait son origine dans la communication des griefs et n’était accordé qu’une seule fois. Le conseiller-auditeur a, toutefois, permis aux requérantes de compléter par écrit, dans un délai qu’il a fixé, leur argumentation relative au rôle de Degussa.

32      Par lettre du 10 février 2009, les requérantes ont exprimé leur désaccord en ce qui concernait la position du conseiller-auditeur et elles ont insisté sur leur demande de présentation orale de leur argumentation relative au rôle de Degussa. Dans ce contexte, elles ont, notamment, souligné qu’elles avaient, à plusieurs occasions, soumis sous forme écrite cette argumentation à la Commission, laquelle, toutefois, n’en avait pas suffisamment tenu compte. Selon elles, seule une présentation orale de cette argumentation leur permettrait de mettre en exergue et d’expliciter le rôle de Degussa. Partant, une telle présentation serait indispensable pour le respect de leurs droits de la défense.

33      Dans son rapport final sur l’affaire COMP/39.396 – Réactifs à base de carbure de calcium et de magnésium destinés aux secteurs sidérurgique et gazier, du 9 juillet 2009 (JO C 301, p. 16), le conseiller-auditeur a relevé ce qui suit, au sujet de la demande en cause des requérantes :

« Avant l’audition, une société a sollicité une session à huis clos. Comme elle a reconnu que celle-ci pourrait être utile à la défense d’une autre société, elle a proposé à titre de solution pratique de révéler [à cette dernière société] le contenu de l’exposé à huis clos à un stade ultérieur de la procédure.

J’ai examiné cette demande à la lumière du droit fondamental d’être entendu […] car il ne s’agissait pas à proprement parler de la nécessité de protéger des secrets d’affaires et autres informations confidentielles […] Tout bien considéré, j’ai rejeté cette demande, car une session à huis clos ne permettrait pas à l’autre société de répondre verbalement aux allégations formulées (au moins indirectement) contre elle en présence des États membres, du conseiller-auditeur, du service juridique et d’autres services de la Commission.

Quelques mois après l’audition, cette société a sollicité une audition supplémentaire pour exposer le problème au sujet duquel elle avait demandé la session à huis clos. J’ai rejeté cette demande, car le droit d’être entendu oralement trouve son origine dans la communication des griefs et n’est accordé qu’une seule fois […]. Je lui ai néanmoins permis de présenter des observations écrites sur ce sujet dans un délai de deux semaines. »

34      C’est dans ce contexte que les requérantes font valoir que leurs droits de la défense et, en particulier, leur droit d’être entendues ont été violés dès lors qu’elles ont été privées de la possibilité de présenter oralement leur argumentation résumée au point 24 ci‑dessus.

35      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, les droits de la défense dans toute procédure susceptible d’aboutir à des sanctions, notamment à des amendes ou à des astreintes, telle que celle prévue par le règlement n° 1/2003, constituent des droits fondamentaux faisant partie intégrante des principes généraux du droit dont le juge de l’Union européenne assure le respect (voir arrêt du Tribunal du 8 juillet 2008, AC Treuhand/Commission, T‑99/04, Rec. p. II‑1501, point 46, et la jurisprudence citée). Ils sont, par ailleurs, consacrés à l’article 41, paragraphe 2, de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

36      Les dispositions mentionnées aux points 20 et 21 ci‑dessus visent, précisément, à assurer la protection des droits de la défense des entreprises concernées par les procédures visées au point 35 ci-dessus. Ces entreprises doivent, ainsi, disposer de la possibilité de prendre position sur les griefs retenus à leur égard par la Commission et, si elles en font la demande, de développer leur argumentation lors d’une audition. Leurs secrets d’affaires et les autres informations confidentielles qu’elles ont éventuellement dû faire connaître à la Commission pour se défendre bénéficient également d’une protection par cette dernière.

37      À cet égard, il y a lieu de préciser que la catégorie des « autres informations confidentielles » comprend, ainsi que la Commission l’a elle-même relevé au paragraphe 19 de sa communication relative aux règles d’accès au dossier de la Commission dans les affaires relevant des articles 81 [CE] et 82 [CE], des articles 53, 54 et 57 de l’accord EEE et du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil (JO 2005, C 325, p. 7), les informations autres que les secrets d’affaires qui peuvent être considérées comme confidentielles dans la mesure où leur divulgation léserait gravement une personne ou une entreprise. Selon les circonstances du cas d’espèce, il peut s’agir de renseignements fournis par des tiers sur des entreprises qui sont en mesure d’exercer des pressions de nature économique ou commerciale très fortes sur leurs concurrents ou leurs partenaires commerciaux, clients ou fournisseurs (voir également, en ce sens, arrêt de la Cour du 6 avril 1995, BPB Industries et British Gypsum/Commission, C‑310/93 P, Rec. p. I‑865, points 26 et 27, et arrêt du Tribunal du 25 octobre 2002, Tetra Laval/Commission, T‑5/02, Rec. p. II‑4381, point 98).

38      En outre, il résulte de l’article 14, paragraphe 6, du règlement n° 773/2004 que l’audition ne se tient pas en public. Cependant, la même disposition prévoit que chaque personne concernée peut être entendue séparément ou en présence d’autres personnes invitées à assister l’audition. Il n’est, dès lors, pas exclu qu’une personne soit entendue en présence d’autres personnes même si, comme le dispose également l’article 14, paragraphe 6, du règlement n° 773/2004, il est tenu compte, à cet égard, de l’intérêt légitime des entreprises à la non-divulgation de leurs secrets d’affaires et d’autres informations confidentielles. En effet, il convient de tenir compte, dans ce contexte, du fait que les exigences de la protection des droits de la défense empêchent la Commission d’utiliser à l’appui de sa décision des éléments recueillis lors de l’audition d’une des entreprises concernées à l’encontre d’une autre entreprise, sans les avoir préalablement soumis à cette dernière (conclusions de l’avocat général M. Darmon sous l’arrêt de la Cour du 31 mars 1993, Ahlström Osakeyhtiö e.a./Commission, C‑89/85, C‑104/85, C‑114/85, C‑116/85, C‑117/85 et C‑125/85 à C‑129/85, Rec. p. I‑1307, I‑1445, point 156).

39      Il résulte des considérations exposées aux points 37 et 38 ci-dessus que la protection des droits de la défense d’une entreprise poursuivie pour une infraction alléguée aux règles de la concurrence du droit de l’Union doit être conciliée avec l’intérêt légitime des tiers, des personnes ou des entreprises, ayant fourni des informations ou des pièces en rapport avec cette infraction présumée, à la protection de leurs secrets d’affaires et d’autres informations confidentielles et il incombe à la Commission, dans chaque cas d’espèce, d’adopter les modalités appropriées pour assurer une protection suffisante de ces deux exigences.

40      En l’espèce, les requérantes, qui demandaient la protection des informations prétendument confidentielles mises à la disposition de la Commission, étaient elles-mêmes poursuivies pour une infraction aux règles de la concurrence et les informations en question étaient, selon elles, indispensables à leur défense contre les griefs formulés par la Commission à leur égard, tout en contenant des allégations susceptibles d’être utilisées à charge d’un autre participant à l’entente.

41      C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il convient d’examiner l’argumentation avancée par les requérantes à l’appui du présent moyen. À cet égard, il y a lieu, dans un premier temps, de vérifier si, comme le font valoir les requérantes, la partie de leur argumentation qu’elles souhaitaient présenter à huis clos lors de l’audition était indispensable à leur défense contre les griefs formulés par la Commission à leur égard.

42      Dans la communication des griefs que la Commission a adressée aux requérantes le 24 juin 2008 (point 235), elle a reproché à SKW une participation des membres de son personnel, entre le 22 avril 2004 et le 16 janvier 2007, aux accords et aux pratiques concertées en cause.

43      En outre, au point 236 de la communication des griefs, la Commission a relevé que, durant la période infractionnelle, SKW était une filiale de différentes sociétés détenue à 100 % par celles‑ci et que, par conséquent, il pouvait être présumé que ces sociétés exerçaient une influence déterminante sur le comportement de SKW sur le marché. S’agissant, en particulier, de SKW Holding, au point 238 de la communication des griefs, il a été relevé que, du 14 septembre 2004 jusque, à tout le moins, au 16 janvier 2007, elle détenait à 100 % le capital de SKW. Au point 242 de la communication des griefs, la Commission a exposé une série d’éléments factuels qui, selon elle, permettaient de démontrer, indépendamment même de la présomption fondée sur la détention de la totalité du capital de SKW, l’exercice, par SKW Holding, d’une influence déterminante sur le comportement de cette dernière sur le marché. Sur la base de ces considérations, la Commission a relevé, au point 239 de la communication des griefs, que pendant la période où chacune des différentes sociétés mères de SKW, dont SKW Holding, détenait, directement ou indirectement, le capital de SKW, ces sociétés mères constituaient avec cette dernière une entreprise unique et pouvaient, dès lors, être tenues pour responsables de son comportement infractionnel lors de cette période.

44      En d’autres termes, la Commission n’a reproché une participation directe à l’infraction litigieuse qu’aux membres du personnel ou de la direction de SKW. En revanche, elle a affirmé que SKW Holding était responsable pour la même infraction au seul motif que, pendant la partie de la période infractionnelle où SKW Holding détenait l’intégralité du capital de SKW, SKW Holding exerçait une influence déterminante sur le comportement de SKW sur le marché et constituait avec celle-ci une seule et même entreprise.

45      Dans leur réponse à la communication des griefs, du 6 octobre 2008, les requérantes ont contesté l’exercice d’une influence déterminante par SKW Holding sur le comportement de SKW sur le marché et ont nié toute participation directe de SKW Holding à l’infraction. Cette argumentation était complétée par une section consacrée au rôle de Degussa et de M. N. Selon les requérantes, ce dernier était un employé de Degussa qui travaillait de facto pour SKW et l’avait représentée lors des réunions des membres de l’entente litigieuse.

46      Cependant, les requérantes n’ont pas contesté la participation directe à l’infraction des employés de SKW ou des membres de sa direction. Elles ont seulement relevé, à cet égard, ce qui suit :

« Dans la communication des griefs, la participation directe des collaborateurs de [SKW] aux ‘accords de cartel et/ou pratiques concentrées’ pour le secteur de la poudre de carbure de calcium et des granulés de magnésium est constatée. Dans ce contexte, la Commission se réfère à MM. [L., N. et G.].

Par la suite, aux fins de la présente prise de position, nous partons de la prémisse que des accords de cartel anticoncurrentiels ont effectivement été conclus avec la participation des personnes susmentionnées. »

47      Force est de constater qu’il ne ressort ni de la communication des griefs ni de la réponse des requérantes à celle-ci, telles qu’elles ont été résumées aux points 42 à 46 ci‑dessus, quelles étaient les « circonstances à décharge » mentionnées dans l’argumentation des requérantes, relative à Degussa, que celles-ci souhaitaient développer lors d’une audition à huis clos. En effet, même à admettre que, comme l’affirment les requérantes, Degussa déterminait la stratégie de vente de SKW après l’acquisition de l’intégralité du capital de cette dernière par SKW Holding, cette seule circonstance ne saurait exempter SKW de sa responsabilité pour la participation directe à l’infraction des membres de son personnel ou de sa direction. Ainsi qu’il a déjà été relevé, cette participation n’a pas été contestée dans la réponse des requérantes à la communication des griefs et, par ailleurs, le présent recours ne comporte aucun moyen tendant à contester la participation, à l’infraction, des membres du personnel ou de la direction de SKW, constatée dans la décision attaquée.

48      L’argumentation des requérantes relative à Degussa était également dépourvue de pertinence s’agissant du fait que la Commission entendait tenir SKW Holding pour responsable de l’infraction litigieuse. Ainsi qu’il a été relevé aux points 43 et 44 ci‑dessus, sans alléguer une participation directe du personnel ou de la direction de SKW Holding à l’infraction, la Commission s’est fondée, à cet égard, sur sa prétendue influence déterminante sur le comportement de SKW sur le marché. Selon la Commission, cette influence a eu pour conséquence que ces deux entités formaient, lors de la période infractionnelle, une seule unité économique permettant d’imputer également à SKW Holding la responsabilité pour l’infraction litigieuse. Pour contester cette imputation de responsabilité, SKW Holding devait démontrer qu’elle n’exerçait pas elle-même une telle influence. La question de savoir si une autre entité, telle que Degussa, exerçait une influence déterminante sur le comportement de SKW n’était pas pertinente aux fins de cette démonstration.

49      Il convient également de constater que les requérantes n’ont aucunement expliqué dans leurs écrits devant le Tribunal, en quoi leur argumentation relative à Degussa pourrait les exempter de leur responsabilité pour l’infraction. Les seules explications à cet égard figurent dans le courriel des requérantes mentionné au point 27 ci‑dessus. Les requérantes y ont fourni l’explication suivante :

« De notre point de vue, le rôle de Degussa doit essentiellement conduire à la conclusion que [SKW] ne peut pas du tout être tenue pour responsable pour l’infraction de cartel. L’influence déterminante de Degussa a eu pour effet que [SKW] était ‘contrôlée à distance’ par Degussa. De plus, en particulier M. [L.] et M. [N.] étaient à la tête de l’entreprise de SKW et poursuivaient les propres intérêts de Degussa. Nous allons aussi expliquer pourquoi Degussa était intéressée par une immixtion dans l’activité opérationnelle de [SKW] et comment elle a continué son immixtion après qu’elle avait vendu la société. »

50       Ces affirmations ont, pour l’essentiel, été réitérées lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal.

51      Or, même à admettre l’exactitude matérielle de telles affirmations, celles-ci ne contredisent pas la participation directe à l’infraction des membres du personnel ou de la direction de SKW. Cela est d’autant plus le cas que, si les requérantes affirment que M. N. était formellement employé par Degussa (tout en fournissant ses services à SKW), elles ne contestent, en revanche, pas que M. L. était un membre du personnel de SKW. Contrairement aux affirmations des requérantes, la seule circonstance que les membres du personnel ou de la direction de SKW ont participé aux réunions de l’entente était suffisante pour justifier l’imputation, à celle-ci, de la responsabilité pour l’infraction. De plus, ainsi qu’il a déjà été relevé, dans la mesure où SKW et SKW Holding formaient une même entreprise et faisaient partie de la même unité économique, la responsabilité de l’infraction pouvait, au même titre, être également imputée à SKW Holding.

52      S’agissant de SKW Holding, les requérantes ont, en substance, réitéré l’affirmation selon laquelle elle n’exerçait pas d’influence sur le comportement de SKW. Or, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 48 ci‑dessus, la prétendue influence de Degussa était, à cet égard, dépourvue de pertinence.

53      Il ressort des considérations qui précèdent que les affirmations des requérantes quant à l’influence de Degussa sur le comportement de SKW sur le marché, même à les supposer exactes, étaient dépourvues de pertinence par rapport à la question de leur responsabilité pour l’infraction litigieuse. Il convient, à cet égard, de constater que les requérantes avaient également relevé que, dans l’hypothèse où la Commission ne serait pas convaincue par leurs arguments déjà mentionnés, le rôle allégué de Degussa dans l’infraction, devait, au moins, être considéré comme une circonstance atténuante à retenir en leur faveur.

54      C’est uniquement au regard de cette dernière hypothèse que la demande des requérantes de pouvoir présenter à huis clos, lors de l’audition, la partie de leur argumentation relative au rôle de Degussa a été examinée. En effet, il ressort des termes de la lettre du conseiller-auditeur du 6 novembre 2008, mentionnée au point 28 ci‑dessus, que celui-ci a considéré que c’était uniquement dans un tel contexte que cette argumentation pourrait apporter un bénéfice aux requérantes. Au regard des considérations exposées aux points 47 à 53 ci‑dessus, cette conclusion doit être approuvée.

55      Dans leur réponse à la communication des griefs, les requérantes ont relevé que, dans le cadre de la détermination du montant de l’amende, il devrait être tenu compte, en tant que circonstance atténuante, du fait que, même après l’acquisition, par SKW Holding, de l’intégralité du capital de SKW, cette dernière agissait « comme le bras long » de Degussa.

56      À cet égard, il y a lieu de constater que la Commission n’a retenu, dans la décision attaquée, aucune circonstance atténuante à l’égard des requérantes, ce que celles-ci contestent par leur quatrième moyen. La question de savoir si leur argumentation relative à la prétendue implication de Degussa dans l’infraction après le 30 août 2004 pourrait justifier la reconnaissance d’une circonstance atténuante à leur égard doit, dès lors, être examinée dans le cadre de ce moyen (voir points 214 à 228 ci‑après).

57      En ce qui concerne l’examen du présent moyen, il suffit de relever qu’admettre l’affirmation des requérantes selon laquelle, après le 30 août 2004, Degussa a continué à participer à l’infraction en exerçant une influence sur le comportement de SKW, à supposer même qu’elle eût pu justifier qu’une circonstance atténuante fût retenue en leur faveur, devait nécessairement conduire la Commission à reprocher à Degussa une participation à l’infraction plus longue que celle qui a été retenue dans la décision attaquée. En effet, la reconnaissance d’une telle circonstance atténuante ne pourrait découler que d’une coopération effective des requérantes avec la Commission, qui aurait permis à cette dernière d’effectuer cette constatation à l’égard de Degussa. Il aurait, en outre, été contradictoire pour la Commission de reconnaître aux requérantes une circonstance atténuante en raison de la prétendue influence, sur le comportement de SKW après le 30 août 2004, de Degussa, tout en considérant que la participation de celle-ci à l’infraction avait pris fin à cette dernière date.

58      Par conséquent, il convient de conclure que c’est à juste titre que le conseiller-auditeur a considéré qu’une présentation de cette partie de l’argumentation des requérantes à huis clos ne saurait être permise, dès lors que Degussa devait également disposer de la possibilité d’en prendre connaissance et d’y répondre. C’est également à juste titre que le conseiller-auditeur a, en substance, considéré que la proposition des requérantes, selon laquelle il conviendrait de ne permettre à Degussa de prendre connaissance de cette partie de leur argumentation qu’après la conclusion des négociations entre celle-ci et SKW, ne pouvait être admise. En effet, dans un tel cas, Degussa aurait pu faire valoir une violation de son droit d’être entendue, dès lors qu’elle n’aurait pas eu la possibilité de répondre oralement, lors de l’audition, aux accusations des requérantes.

59      Contrairement à ce que font valoir les requérantes, il ne s’agirait pas, dans cette hypothèse, d’une violation « purement théorique » des droits de la défense de Degussa. Ainsi qu’il a déjà été relevé, les affirmations des requérantes ne pouvaient prospérer que si la durée de l’infraction reprochée par la Commission à Degussa était prolongée et, dans une telle éventualité, les droits de la défense de cette dernière devaient être respectés au même titre que ceux des requérantes.

60      Ne saurait non plus prospérer l’argument des requérantes selon lequel le conseiller-auditeur aurait dû accéder à leur demande, présentée après la conclusion des négociations entre SKW et Degussa, d’organiser une nouvelle audition pour leur permettre de présenter oralement leur argumentation non évoquée lors de l’audition de novembre 2008.

61      À cet égard, la thèse du conseiller-auditeur, selon laquelle, en substance, le droit de développer son argumentation à une audition n’est accordée qu’une seule fois est correcte et conforme aux dispositions et considérations mentionnées aux points 20, 21 et 36 à 39 ci-dessus. Il ne saurait pas non plus être admis qu’une partie soit en droit d’exiger l’organisation d’une nouvelle audition à chaque fois qu’elle considère que les raisons l’ayant empêchée d’évoquer certains arguments ou éléments lors de l’audition déjà organisée ont, entre-temps, disparu. Il doit être tenu compte, à cet égard, des exigences d’un bon déroulement de la procédure administrative, laquelle doit aboutir à l’adoption, dans un délai raisonnable après l’ouverture de cette procédure, d’une décision de la Commission. Cet objectif serait mis en péril s’il était permis aux parties d’exiger l’organisation d’une nouvelle audition au seul motif que, lors d’une précédente audition, elles avaient été empêchées, pour des raisons qui ne relèvent aucunement de la responsabilité de la Commission, de développer oralement certains de leurs arguments.

62      En conclusion, il convient de relever que les requérantes semblent méconnaître le fait que leur argumentation relative au rôle de Degussa dans l’entente, après la cession de l’intégralité du capital de SKW, ainsi que leur demande tendant à ce que cette argumentation ne soit pas portée à la connaissance de Degussa, nécessitaient une conciliation des exigences découlant des droits de la défense des requérantes et ceux de Degussa, ainsi qu’une mise en balance des intérêts respectifs de ces entreprises. Les faits exposés aux points 24 à 32 ci‑dessus démontrent que le conseiller-auditeur n’a procédé à une telle mise en balance qu’après avoir entendu les explications des requérantes quant à la teneur de cette argumentation et à sa prétendue importance pour leur défense. Il ressort, de plus, des considérations exposées ci‑dessus que c’est à juste titre que le conseiller-auditeur a conclu qu’il n’était pas justifié de donner la priorité à la protection des droits de la défense des requérantes et d’accepter, ainsi, une éventuelle violation des droits analogues de Degussa. De surcroît, il convient de rappeler que si, certes, le conseiller-auditeur n’a pas accédé à la demande des requérantes tendant à l’organisation d’une nouvelle audition, ce qui aurait été excessif au vu de la nécessité d’assurer un bon déroulement de la procédure et sa conclusion dans un délai raisonnable, il leur a, tout de même, permis de compléter par écrit leur argumentation.

63      Compte tenu de l’ensemble de ces éléments, le Tribunal considère que la Commission et le conseiller-auditeur ont suffisamment tenu compte de la nécessité de respecter les droits de la défense des requérantes. Partant, le premier moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré d’une application erronée de l’article 81 CE

64      Par leur deuxième moyen, les requérantes font valoir que la conclusion de la Commission, selon laquelle SKW Holding doit être tenue pour responsable du comportement infractionnel de SKW, est fondée sur une application erronée de l’article 81 CE. Ce moyen s’articule en quatre branches, tirées, la première, d’une erreur de droit dans l’imputation à SKW Holding de la responsabilité pour l’infraction commise par SKW, la deuxième, d’une appréciation erronée des faits par la Commission, la troisième, d’une erreur de droit en ce que la Commission a soumis le renversement de la présomption de l’exercice d’une influence déterminante par la société mère sur sa filiale à des exigences impossibles à respecter et, la quatrième, d’une violation, par la Commission, de son devoir d’enquêter d’office sur les faits pertinents.

65      Par ailleurs, lors de l’audience, les requérantes ont reproché à la Commission de ne pas avoir, dans la décision attaquée, déterminé leurs quotes‑parts des montants auxquels elles ont été condamnées solidairement avec d’autres entités, contrairement à ce que le Tribunal a jugé dans son arrêt du 3 mars 2011, Siemens et VA Tech Transmission & Distribution/Commission (T‑122/07 à T‑124/07, Rec. p. II‑793, ci‑après l’« arrêt Siemens », point 157). Interrogées quant à la question de savoir si ce grief était nouveau ou s’il avait déjà été soulevé dans la requête, les requérantes ont répondu qu’il se rattachait au deuxième moyen, dans la mesure où la violation de l’obligation susmentionnée de la Commission constituait, selon elles, une application erronée de l’article 81 CE. Pour sa part, la Commission a fait valoir qu’il s’agissait d’un nouveau grief, non fondé sur des éléments révélés en cours d’instance et, partant, irrecevable. Il a été pris acte de ces déclarations au procès-verbal de l’audience.

66      Avant d’examiner les quatre branches du deuxième moyen ainsi que le grief mentionné ci‑dessus, il convient, tout d’abord, de procéder à un rappel de la jurisprudence en matière d’imputation à la société mère de la responsabilité pour l’infraction commise par sa filiale, et, ensuite, d’exposer brièvement le contenu de la partie pertinente de la décision attaquée.

 Rappel de la jurisprudence pertinente

67      Selon une jurisprudence constante, la notion d’entreprise désigne toute entité exerçant une activité économique, indépendamment du statut juridique de cette entité et de son mode de financement (voir arrêt de la Cour du 20 janvier 2011, General Química e.a./Commission, C‑90/09 P, Rec. p. I‑1, point 34, et la jurisprudence citée).

68      La Cour a également précisé que la notion d’entreprise, placée dans ce contexte, devait être comprise comme désignant une unité économique, même si, du point de vue juridique, cette unité économique était constituée de plusieurs personnes physiques ou morales (voir arrêt General Química e.a./Commission, point 67 supra, point 35, et la jurisprudence citée).

69      Lorsqu’une telle entité économique enfreint les règles de la concurrence, il lui incombe, selon le principe de la responsabilité personnelle, de répondre de cette infraction (voir arrêt General Química e.a./Commission, point 67 supra, point 36, et la jurisprudence citée). Toutefois, ainsi que l’a également précisé la Cour, l’infraction au droit de la concurrence doit être imputée sans équivoque à une personne juridique qui sera susceptible de se voir infliger des amendes et la communication des griefs doit être adressée à cette dernière. Il importe également que la communication des griefs indique en quelle qualité une personne juridique se voit reprocher les faits allégués (arrêt de la Cour du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission, C‑97/08 P, Rec. p. I‑8237, point 57).

70      S’agissant de la question de savoir dans quelles circonstances une personne juridique qui n’est pas l’auteur de l’infraction peut néanmoins être sanctionnée, il résulte d’une jurisprudence constante que le comportement d’une filiale peut être imputé à la société mère notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques (voir arrêt General Química e.a./Commission, point 67 supra, point 37, et la jurisprudence citée).

71      En effet, dans une telle situation, la société mère et sa filiale faisant partie d’une même unité économique et formant ainsi une seule entreprise au sens de l’article 81 CE, la Commission peut adresser une décision imposant des amendes à la société mère sans qu’il soit requis d’établir l’implication personnelle de cette dernière dans l’infraction (voir arrêt General Química e.a./Commission, point 67 supra, point 38, et la jurisprudence citée).

72      La Cour a également précisé, à cet égard, que, dans le cas particulier où une société mère détenait 100 % du capital de sa filiale ayant commis une infraction aux règles de la concurrence de l’Union, d’une part, cette société mère pouvait exercer une influence déterminante sur le comportement de cette filiale et, d’autre part, il existait une présomption réfragable (ci-après la « présomption capitalistique »), selon laquelle ladite société mère exerçait effectivement une telle influence. Dans ces conditions, il suffit que la Commission prouve que la totalité du capital d’une filiale est détenue par sa société mère pour présumer que cette dernière exerce une influence déterminante sur la politique commerciale de cette filiale. La Commission sera en mesure, par la suite, de considérer la société mère comme tenue solidairement au paiement de l’amende infligée à sa filiale, à moins que cette société mère, à laquelle il incombe de renverser cette présomption, n’apporte des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché (voir arrêt General Química e.a./Commission, point 67 supra, points 39 et 40, et la jurisprudence citée ; arrêts de la Cour du 29 mars 2011, ArcelorMittal Luxembourg/Commission et Commission/ArcelorMittal Luxembourg e.a., C‑201/09 P et C‑216/09 P, Rec. p. I‑2239, point 97, et du 3 mai 2012, Legris Industries/Commission, C‑289/11 P, non encore publié au Recueil, point 46).

 Décision attaquée

73      Il ressort du considérant 226 de la décision attaquée que la Commission a tenu SKW pour responsable de l’infraction litigieuse, pour la période allant du 22 avril 2004 au 16 janvier 2007, motif pris de la participation directe de certains de ses employés aux accords et aux pratiques anticoncurrentielles litigieux.

74      S’agissant de la responsabilité de SKW Holding pour l’infraction, la Commission a relevé, au considérant 245 de la décision attaquée, que durant la période allant du 30 août 2004 au 16 janvier 2007, SKW était une filiale détenue à 100 % de SKW Holding. Pour ces motifs et en application de la jurisprudence citée au point 72 ci‑dessus, également rappelée au considérant 206 de la décision attaquée, la Commission a considéré que, pour la période où SKW Holding détenait l’intégralité du capital de SKW, elle pouvait lui imputer la responsabilité pour le comportement infractionnel de cette dernière (voir également le considérant 227 de la décision attaquée). Indépendamment de cette considération, la Commission a exposé, au considérant 246 de la décision attaquée, certaines circonstances additionnelles lesquelles, selon elle, venaient confirmer la présomption capitalistique et la conclusion qui en découlait, selon laquelle SKW Holding exerçait, durant la période où elle détenait l’intégralité du capital de SKW, une influence déterminante sur le comportement de cette dernière sur le marché, et pouvait, dès lors, être tenue pour responsable de l’infraction commise par sa filiale. Enfin, aux considérants 247 à 250 de la décision attaquée, la Commission a résumé certains arguments avancés par SKW Holding qui tendaient à nier l’exercice de toute influence sur le comportement de sa filiale et elle a précisé les motifs pour lesquels ils devaient, selon elle, être rejetés.

–       Sur la première branche, tirée d’une erreur de droit dans l’imputation à SKW Holding de la responsabilité pour l’infraction commise par SKW

75      Les requérantes reprochent à la Commission une erreur de droit en ce qu’elle a imputé la responsabilité pour l’infraction commise par SKW à SKW Holding, en méconnaissance du fait que cette dernière n’était qu’une société intermédiaire, contrôlée elle-même par Arques, qui se trouvait à la tête de leur groupe d’entreprises.

76      Selon les requérantes, la présomption capitalistique a toujours été appliquée pour imputer la responsabilité pour l’infraction commise par une filiale à la société mère placée à la tête d’un groupe d’entreprises. L’arrêt du Tribunal du 18 décembre 2008, General Química e.a./Commission (T‑85/06, non publié au Recueil), porterait sur un cas de figure différent, dans la mesure où la société intermédiaire sanctionnée pour le comportement infractionnel de sa filiale impliquée dans l’infraction dont il était question dans cette affaire était pleinement intégrée dans le groupe d’entreprises concerné et nommait les membres du conseil d’administration de sa filiale.

77      Les requérantes mettent en exergue le fait qu’Arques détenait l’intégralité du capital de SKW Holding jusqu’au 30 novembre 2006 et, après cette date et jusqu’à la fin de la période infractionnelle, environ 57 % de celui-ci. Elles considèrent, dès lors, que le comportement infractionnel de SKW pouvait, tout au plus, être imputé à Arques, mais non à SKW Holding. Selon elles, une société intermédiaire comme en l’occurrence SKW Holding ne fait que « transmettre » l’influence déterminante, au sens de la jurisprudence mentionnée au point 72 ci-dessus, de la société placée à la tête du groupe à la société ayant participé à l’infraction. En revanche, il ressortirait de la décision attaquée que c’était Arques qui adoptait les décisions stratégiques pour ses filiales et déterminait, dans les faits, leur comportement sur le marché. Ce serait, dès lors, Arques qui devrait être considérée comme la société « exerçant la domination en dernier ressort ». SKW Holding n’aurait eu aucune possibilité d’influencer le comportement de SKW et n’aurait, d’ailleurs, tiré aucun bénéfice de l’infraction, tout bénéfice éventuel ayant été transféré, de sa part, à Arques. Il ne saurait être question d’une « influence parallèle » exercée sur SKW par SKW Holding. La Commission aurait, en tout état de cause, omis de rechercher quelle était la contribution de cette dernière société à l’infraction.

78      Les requérantes ajoutent que la thèse selon laquelle la responsabilité de l’infraction peut être imputée tant à une société intermédiaire, telle que SKW Holding, qu’à la société à la tête du groupe, en l’occurrence Arques, ne peut être admise dans des cas où, comme en l’espèce, les liens juridiques existants entre les sociétés concernées au moment de l’infraction avaient déjà été dissous quand la Commission a arrêté sa décision. L’approche adoptée dans la décision attaquée conduirait à engager, sans justification objective, la responsabilité d’un autre sujet de droit pour l’infraction.

79      L’intervenante relève que, même si l’existence de la présomption capitalistique devait, en principe, être admise, son application dans un cas comme celui de l’espèce, où il existe plusieurs sociétés mères, ne paraît pas opportune. En effet, même s’il était admis que chaque société mère ait le potentiel d’exercer une influence, il ne serait pas possible de déterminer quelle influence aurait été « déterminante », au sens de la jurisprudence.

80      Ces arguments doivent être rejetés.

81      Il convient de relever, à cet égard, que, ainsi que la Commission l’a elle-même souligné aux considérants 224 et 247 de la décision attaquée, SKW Holding n’a pas, en l’espèce, été tenue pour responsable de l’infraction du fait qu’elle en aurait eu connaissance, voire même qu’elle y aurait participé avec son propre personnel. La référence de la décision attaquée à l’influence déterminante que, en application de la présomption capitalistique, SKW Holding était présumée exercer sur SKW, ne doit pas être comprise en ce sens qu’il lui était reproché d’avoir usé de son influence pour inciter sa filiale à participer à l’infraction ou, à tout le moins, de ne pas avoir usé de cette influence pour empêcher une telle participation.

82      Comme il ressort de la jurisprudence rappelée aux points 67 à 72 ci‑dessus, l’exercice, par la société mère, d’une influence déterminante sur le comportement de sa filiale sur le marché fournit la preuve que les deux entités font partie de la même entreprise et peuvent, de ce fait, être toutes deux tenues pour responsables d’une infraction aux règles de la concurrence commise par cette entreprise. En d’autres termes, dans l’hypothèse d’une telle infraction, la société mère n’est pas sanctionnée pour avoir exercé une influence déterminante sur sa filiale. Elle est sanctionnée, au même titre que la filiale, du fait qu’elle faisait partie d’une entreprise qui a enfreint les règles de la concurrence. Dans un tel contexte, il est indifférent de savoir quelle était l’entité précise, au sein de l’entreprise en question, dont relevaient les personnes physiques impliquées dans l’infraction. Selon la jurisprudence constante citée au point 69 ci‑dessus, la responsabilité pour l’infraction est imputée à l’entreprise en tant que telle.

83      Est également indifférente, dans le même contexte, la question de savoir si, dans l’exercice d’une influence déterminante sur sa filiale, une société est elle-même soumise à l’influence déterminante de sa propre société mère. Cette circonstance démontre seulement que les trois sociétés font partie de la même entreprise et peuvent, dès lors, être toutes tenues pour responsables de l’infraction commise par cette dernière (voir, en ce sens, arrêt du 20 janvier 2011, General Química e.a./Commission, point 67 supra, points 86 et 87).

84      Par ailleurs, dans un tel contexte, il n’est pas question, comme le font valoir à tort les requérantes et l’intervenante (voir les points 77 à 79 ci‑dessus), d’une influence « parallèle » de la société placée à la tête du groupe et de la société intermédiaire, sur le comportement de la société dont les membres du personnel ou de la direction ont démontré un comportement anticoncurrentiel. Indépendamment même du fait que la jurisprudence mentionnée aux points 67 à 72 ci-dessus n’exclut pas l’imputation de l’infraction à une société qui, conjointement avec une autre société, déterminait la politique commerciale d’une entité ayant commis une infraction aux règles de la concurrence (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 27 septembre 2006, Avebe/Commission, T‑314/01, Rec. p. II‑3085, points 137 à 141, et du 13 juillet 2011, General Technic-Otis/Commission, T‑141/07, T‑142/07, T‑145/07 et T‑146/07, Rec. p. II‑4977, point 118), en l’espèce la Commission n’a pas admis l’exercice, à la fois par SKW Holding et par Arques, d’une influence parallèle sur le comportement de SKW. Elle a plutôt considéré que SKW Holding exerçait une influence déterminante sur le comportement de SKW sur le marché, étant elle-même soumise à l’influence déterminante de sa propre société mère, Arques.

85      Est tout aussi indifférente, dans un tel contexte, la question de savoir si les liens ayant uni plusieurs sociétés faisant partie de la même entreprise au moment de l’infraction persistaient ou non au moment de l’adoption de la décision infligeant une sanction pour cette infraction. Cette sanction se rapporte, en effet, à l’infraction et peut, dès lors, frapper toutes les sociétés ayant fait partie de l’entreprise impliquée dans l’infraction, quand bien même elles auraient, entre-temps, cessé de constituer une seule et même entreprise.

86      Enfin, la prétendue pratique décisionnelle de la Commission, invoquée par les requérantes (voir point 76 ci-dessus), ne saurait conduire à une conclusion différente. Indépendamment du fait que, ainsi que l’admettent les requérantes elles-mêmes, il existe au moins un cas où la Commission a également tenu pour responsable de l’infraction la société mère de l’entité impliquée dans l’infraction, quand bien même elle ne se trouverait pas à la tête de l’entreprise concernée (arrêt du 18 décembre 2008, General Química e.a./Commission, point 76 supra, point 109, et arrêt du 20 janvier 2011, General Química e.a./Commission, point 67 supra, points 100 à 110), il suffit de relever que, selon la jurisprudence constante, la pratique décisionnelle antérieure de la Commission ne sert pas de cadre juridique applicable aux amendes en matière de droit de la concurrence (arrêts de la Cour du 21 septembre 2006, JCB Service/Commission, C‑167/04 P, Rec. p. I‑8935, point 205, et du 24 septembre 2009, Erste Group Bank e.a./Commission, C‑125/07 P, C‑133/07 P, C‑135/07 P et C‑137/07 P, Rec. p. I‑8681, point 233). Cela est d’autant plus le cas que les requérantes n’invoquent aucune considération juridique qui aurait, dans d’autres affaires par le passé, conduit la Commission à ne pas imputer la responsabilité pour l’infraction à des sociétés se trouvant dans une position comparable à celle de SKW Holding en l’espèce. Elles soutiennent tout simplement qu’une telle imputation a été très rare, ce qui, à supposer cette allégation exacte, pourrait s’expliquer par des considérations purement pratiques, liées au bon déroulement de la procédure administrative.

87      Il ressort des considérations qui précèdent que la première branche du présent moyen n’est pas fondée et doit être rejetée.

–       Sur les deuxième à quatrième branches, tirées, respectivement, d’une appréciation erronée des faits par la Commission, d’une erreur de droit en ce que la Commission a soumis le renversement de la présomption capitalistique à des exigences impossibles à respecter et d’une violation, par la Commission, de son devoir d’enquêter d’office sur les faits pertinents

88      Ces trois branches étant étroitement liées, il convient de les examiner ensemble.

89      Aux fins de cet examen, il convient, d’abord, de rappeler que, ainsi qu’il ressort du point 74 ci‑dessus, pour imputer à SKW Holding la responsabilité pour l’infraction aux règles de la concurrence commise par SKW, sa filiale détenue à 100 %, la Commission s’est, à titre principal, fondée sur la présomption capitalistique. Aucune erreur ne saurait lui être reprochée à ce titre, les requérantes n’ayant pas contesté la détention, pendant la période pertinente, de l’intégralité du capital de SKW par SKW Holding. À titre surabondant, la Commission a exposé, au considérant 246 de la décision attaquée, certaines circonstances additionnelles qui, selon elle, renforçaient la conclusion selon laquelle SKW Holding exerçait, pendant la période infractionnelle, une influence déterminante sur le comportement de sa filiale SKW sur le marché.

90      Il ressort de la jurisprudence citée au point 72 ci‑dessus que, lorsque la présomption capitalistique trouve à s’appliquer, il incombe à la société mère concernée de la renverser en apportant des éléments de preuve suffisants, à défaut de quoi la Commission est en mesure de considérer, sur la seule base de la détention de l’intégralité du capital de la filiale par ladite société mère, que cette dernière exerçait une influence déterminante sur cette filiale et pouvait être tenue pour responsable de l’infraction dont ladite filiale est l’auteur.

91      En l’espèce, aux considérants 247 à 250 de la décision attaquée, la Commission a résumé les éléments invoqués par SKW Holding aux fins de renverser la présomption capitalistique, ainsi que les raisons pour lesquelles elle considérait qu’ils ne pouvaient pas aboutir. Ces considérants sont ainsi libellés :

« (247) Dans sa réponse à la communication des griefs, [SKW Holding] affirme qu’elle ne connaissait pas […] ou n’était pas informée […] de l’existence des activités de l’entente. En réponse, la Commission renvoie au considérant (224).

(248) [SKW Holding] explique qu’elle n’avait aucun intérêt économique dans l’entente, car elle jouait le rôle de représentant commercial pour Degussa. Cependant, la Commission trouve que cela n’est pas confirmé par la formulation du contrat de livraison et de service (Delivery and Service Agreement), selon lequel aucune partie n’a négocié pour le compte de l’autre […]

(249) En vue de réfuter la conclusion relative à l’exercice effectif de l’influence déterminante, la société mère fait remarquer que son rôle était celui d’un investisseur financier […]. Lorsqu’elle a acheté la filiale, plusieurs contrats à long terme y étaient déjà rattachés, limitant la marge de manœuvre de [SKW Holding]. La société mère poursuit en expliquant que la participation d’un membre de son conseil d’administration aux côtés d’un représentant de sa filiale pour l’achat potentiel d’un concurrent s’est produite uniquement en raison du fait que la filiale n’avait pas la capacité financière requise pour prendre une telle décision sous sa seule responsabilité […]. Étant donné que le projet n’a pas abouti, la société mère prétend que l’influence déterminante n’est pas établie. De même, la cosignature d’un membre de son conseil d’administration en relation avec des transactions bancaires financières pour la filiale n’est survenue que de temps en temps et ne prouve pas que toutes les transactions avec les banques devaient être cosignées […]. L’influence déterminante n’est pas établie non plus parce que les services dans le domaine administratif destinés à la gestion courante de l’entreprise étaient fournis uniquement à titre d’assistance dans certains secteurs non essentiels […]

(250) Les points visés au considérant (249) apportent la preuve de la ligne de raisonnement en relation avec l’influence déterminante de la société mère sur la filiale et ne la réfutent certainement pas. Dans le sens de la jurisprudence […], la Commission maintient que [SKW Holding] n’a pas cité de preuves réfutant la présomption selon laquelle elle aurait exercé une influence déterminante sur [SKW]. Par conséquent [SKW Holding] peut être tenue pour responsable du comportement illégal de [SKW] et la décision est également adressée à [SKW Holding]. »

92      Les requérantes font valoir, à cet égard, par la deuxième branche, que la Commission n’a pas du tout ou n’a pas correctement apprécié les éléments de fait dont elle disposait au moment de l’adoption de la décision attaquée. En particulier, elle n’aurait pas suffisamment tenu compte des éléments de fait qu’elles auraient invoqués et les aurait rejetés de manière sommaire au considérant 250 de la décision attaquée, sans procéder à une appréciation globale de toutes les circonstances pertinentes. Or, une telle appréciation globale aurait conduit la Commission à conclure que SKW Holding n’avait pas exercé et ne pouvait pas exercer une influence déterminante sur le comportement de SKW.

93      Selon les requérantes, leur cas serait différent de ceux ayant été traités dans la jurisprudence, par exemple dans l’arrêt du Tribunal du 12 décembre 2007, Akzo Nobel e.a./Commission (T‑112/05, Rec. p. II‑5049). Contrairement à ce qui avait été le cas dans cette affaire, en l’espèce, SKW Holding, tenue pour responsable du comportement infractionnel de sa filiale SKW, n’aurait pas agi en tant qu’instance centrale de l’entreprise concernée. Elle n’aurait été qu’une simple société participative, créée par Arques, une entreprise spécialisée dans la restructuration, et aurait été utilisée par cette dernière comme intermédiaire lors de l’acquisition de SKW, ainsi que le reconnaîtrait la Commission elle‑même au considérant 29 de la décision attaquée. Son cas serait, dès lors, également différent de ceux d’Akzo Nobel et d’Ecka Granulate GmbH & Co. KG, deux autres sociétés également tenues pour responsables, dans la décision attaquée, de l’implication de leurs filiales dans l’entente litigieuse.

94      En effet, ni le nom de SKW Holding ni celui de ses collaborateurs n’apparaîtraient sur les documents relatifs aux activités de l’entente. Cela s’expliquerait par le fait que SKW Holding n’aurait pas placé ses collaborateurs à la direction de SKW. Cette dernière aurait continué à être dirigée par son gérant, M. L., qui n’aurait été loyal qu’envers Degussa, dont il aurait été un employé pendant 25 ans. L’influence persistante de Degussa sur SKW ne ferait, dès lors, aucun doute, ainsi que les requérantes l’auraient, d’ailleurs, expliqué dans leur réponse à la communication des griefs. Une influence déterminante de SKW Holding sur le comportement de SKW et, en particulier, sur sa politique commerciale, par exemple sur les stratégies en matière de distribution et de prix aurait, dès lors, été impossible.

95      En outre, les requérantes invoquent une appréciation erronée des faits par la Commission, en ce qui concerne, en particulier, l’influence déterminante de Degussa sur le comportement de SKW, même après la cession de l’intégralité du capital de celle-ci à SKW Holding, question à laquelle elles s’étaient référées en détail dans leur réponse à la communication des griefs. Elles considèrent que la Commission a omis de reconnaître l’importance, pour cette question, de sa propre admission, au considérant 357, qui renvoie à la note en bas de page n° 679 de la décision attaquée, selon laquelle, à l’époque, M. N. était un employé de Degussa qui travaillait de facto pour SKW.

96      Dans le cadre de la troisième branche, les requérantes reprochent à la Commission d’avoir soumis le renversement de la présomption capitalistique à des exigences impossibles à respecter. La Commission aurait, ainsi, laissé ouverte la question de la nature des éléments susceptibles de justifier le renversement de ladite présomption et n’aurait fourni aucune indication spécifique à cet égard aux requérantes.

97      Sur la base de l’ensemble de l’argumentation résumée ci-dessus, les requérantes invoquent également une violation du devoir de la Commission d’enquêter d’office sur les faits pertinents. Elles se réfèrent, dans ce contexte, à l’arrêt de la Cour du 21 novembre 1991, Technische Universität München (C‑269/90, Rec. p. I‑5469, point 14), selon lequel parmi les garanties conférées par l’ordre juridique de l’Union dans les procédures administratives figure, notamment, l’obligation pour l’institution compétente d’examiner, avec soin et impartialité, tous les éléments pertinents du cas d’espèce. Cette garantie serait d’autant plus importante dans un cas où la présomption capitalistique trouve à s’appliquer et la Commission serait, dès lors, appelée à apprécier avec une attention et un soin particuliers les arguments invoqués en vue du renversement de cette présomption. Les requérantes estiment, par conséquent, que la Commission aurait dû, en l’espèce, éclaircir davantage les relations personnelles existant entre Degussa et SKW et rechercher des informations plus détaillées sur cette question. Son omission de procéder à ces investigations l’aurait conduite à fonder sa décision sur une base matérielle incomplète.

98      L’intervenante soutient, dans le même contexte, que l’exercice d’une influence déterminante, par la société mère sur sa filiale, présuppose en tout état de cause des connaissances suffisantes de la branche en cause. En l’espèce, les activités opérationnelles de SKW supposeraient un know-how particulier et une longue expérience. Or, les membres de la direction de SKW Holding et ses employés ne disposaient pas d’une telle expérience. Leur parcours professionnel jusqu’alors se serait réalisé dans d’autres domaines, notamment la télécommunication, et leur expertise spécialisée se rapporterait plutôt au domaine financier. Par conséquent, les personnes employées par SKW Holding n’auraient jamais pris de décisions en matière commerciale pour SKW et il ne saurait être question d’une influence déterminante de la première sur la seconde.

99      À titre liminaire, il convient de constater que l’argumentation avancée par les requérantes et par l’intervenante aux fins de renverser la présomption capitalistique ne tient pas compte de la considération énoncée au point 90 ci‑dessus ainsi que de la jurisprudence constante, selon laquelle, afin de renverser la présomption capitalistique, il incombe à la société mère de soumettre à l’appréciation du juge de l’Union tout élément relatif aux liens organisationnels, économiques et juridiques entre elle‑même et sa filiale de nature à démontrer qu’elles ne constituent pas une seule entité économique (voir arrêt du 20 janvier 2011, General Química e.a./Commission, point 67 supra, point 51, et la jurisprudence citée).

100    En effet, ni les requérantes ni l’intervenante n’ont présenté une argumentation complète et étayée des éléments de fait et de preuve pertinents, tendant à démontrer que, malgré la détention de l’intégralité du capital de SKW, SKW Holding n’exerçait pas une influence déterminante sur le comportement de celle-ci sur le marché. Elles se sont limitées à critiquer l’examen, par la Commission, de l’argumentation qu’elles avaient avancée dans leur réponse à la communication des griefs et de contester, de manière ponctuelle, certaines conclusions énoncées dans la décision attaquée, sans toutefois soumettre à l’appréciation du Tribunal un exposé détaillé et cohérent, de nature à démontrer que, malgré l’indice important que constitue la détention, par SKW Holding, de la totalité du capital de SKW, cette dernière déterminait de manière autonome son comportement sur le marché.

101    C’est dans ce contexte qu’il convient de procéder à l’analyse des différents griefs invoqués par les requérantes et par l’intervenante dans le cadre des branches sous examen du présent moyen. Dans le cadre de cette analyse, il convient également de tenir compte des arguments avancés par les requérantes pour remettre en cause les éléments mentionnés par la Commission au considérant 246 de la décision attaquée. Bien que ce considérant énonce un motif surabondant, dans la mesure où les arguments avancés par les requérantes pour le contester pourraient contenir des éléments tendant à démontrer que SKW Holding n’exerçait pas une influence déterminante sur sa filiale SKW, ces éléments doivent être examinés.

102    Il ressort de la lecture de la réponse des requérantes à la communication des griefs que celles-ci ont produite en annexe à leur requête que, au stade de la procédure administrative, les requérantes ont fait valoir que SKW Holding n’avait pas participé à l’entente litigieuse et n’en avait aucune connaissance et que cette entente n’avait aucun intérêt économique pour elle. Leur réponse contient également des passages consacrés à la démonstration de l’absence de toute influence active de SKW Holding sur les activités opérationnelles de SKW et à l’inexistence d’une unité économique entre les deux sociétés, ainsi qu’au rôle de Degussa et, en particulier, de M. N. Du reste, cette réponse contient des arguments relatifs au calcul du montant de l’éventuelle amende à infliger aux requérantes, lesquels ne sont pas pertinents pour la présente analyse.

103    Premièrement, il y a lieu de relever que, au considérant 248 de la décision attaquée, la Commission a rejeté l’argument selon lequel SKW Holding n’avait aucun intérêt économique dans l’entente et ni les requérantes ni l’intervenante n’ont avancé d’arguments spécifiques tendant à contester cette conclusion.

104    Deuxièmement, il y a lieu de constater que l’argumentation relative à l’absence de toute influence active de SKW Holding sur les activités opérationnelles de SKW et à l’inexistence d’une unité économique entre les deux sociétés, que les requérantes avaient exposée dans leur réponse à la communication des griefs, a correctement été résumée par la Commission, au considérant 249 de la décision attaquée, cité au point 91 ci‑dessus.

105    La conclusion selon laquelle cette argumentation ne réfute pas l’influence déterminante de SKW Holding sur SKW, mais, au contraire, la confirme, énoncée au considérant 250 de la décision attaquée, est également correcte. En effet, la participation d’un membre du conseil d’administration de SKW Holding aux négociations relatives au rachat potentiel, par SKW, d’un concurrent, tend à confirmer les affirmations figurant au considérant 246, respectivement deuxième et quatrième tirets, de la décision attaquée, selon lesquelles SKW Holding était impliquée dans les contacts commerciaux quotidiens de SKW et responsable de son développement stratégique. Les requérantes ont elles-mêmes affirmé, dans leur réponse à la communication des griefs qu’en tant qu’investisseur financier SKW Holding « se limitait dès le début sur le développement stratégique de son portfolio ». Le fait que, selon les requérantes, la participation de SKW Holding dans les négociations relatives au rachat d’un concurrent de SKW était nécessaire en raison de la capacité financière limitée de cette dernière société ainsi que le fait que, également selon les requérantes, le projet de rachat n’a finalement pas abouti sont indifférents s’agissant de la question de savoir si SKW Holding exerçait une influence déterminante sur SKW.

106    Les requérantes ont également confirmé, en substance, les affirmations figurant au considérant 246, respectivement cinquième et septième tirets, de la décision attaquée, selon lesquelles SKW Holding prenait des décisions concernant les services centraux, tels que le personnel, le recrutement et le financement, et SKW avait besoin de la signature d’un membre du conseil d’administration de SKW Holding pour souscrire des contrats avec des banques. La conclusion que ces affirmations permettent de tirer quant à l’influence déterminante de SKW Holding sur SKW n’est remise en cause ni par le caractère prétendument occasionnel de la cosignature des transactions financières de SKW par un membre du conseil d’administration de SKW Holding ni par le fait que les requérantes, bien qu’elles confirment l’implication de SKW Holding dans la gestion administrative de SKW, affirment qu’elle concernait « certains secteurs non essentiels ».

107    Il convient d’examiner, dans le même contexte, l’argument avancé par les requérantes dans leur réponse à la communication des griefs, selon lequel SKW Holding agissait, par rapport à sa filiale SKW, comme simple investisseur financier, ainsi que l’argumentation de l’intervenante, résumée au point 98 ci‑dessus, selon laquelle les responsables de SKW Holding ne disposaient pas de connaissances suffisantes relatives à la branche en cause et ne pouvaient, dès lors, exercer aucune influence sur les activités opérationnelles de SKW.

108    Il y a lieu de relever, à cet égard, que peut, certes, être imaginé le cas d’un investisseur qui détient des participations dans une société aux fins de la réalisation d’un profit financier, mais qui s’abstient de toute implication dans sa gestion et dans son contrôle et ne peut, dès lors, être considéré comme exerçant une influence déterminante sur son comportement sur le marché. Toutefois, les requérantes n’ont invoqué, ni dans leur réponse à la communication des griefs ni devant le Tribunal, aucun élément de fait ou de preuve susceptible de démontrer que leur cas serait comparable à celui d’un tel investisseur. Au contraire, ainsi qu’il a déjà été relevé, l’argumentation des requérantes n’infirme pas les différents indices de l’exercice, par SKW Holding, d’une influence déterminante sur le comportement de SKW, que la Commission a, à titre surabondant, mentionnés au considérant 246 de la décision attaquée. Partant, l’argument selon lequel SKW Holding agissait, à l’égard de SKW, comme un simple investisseur financier doit être rejeté.

109    S’agissant des connaissances spéciales relatives à la branche qui feraient défaut chez les responsables de SKW Holding, il y a lieu de relever que, dans son arrêt du 12 décembre 2007, Akzo Nobel e.a./Commission (point 93 supra, points 63 et 64), le Tribunal a expressément rejeté la thèse selon laquelle l’influence déterminante susceptible de justifier l’imputation, à la société mère, de la responsabilité pour l’infraction commise par sa filiale, ne saurait concerner que la politique commerciale stricto sensu de cette filiale, à savoir, par exemple, la stratégie de distribution et des prix. Le Tribunal a, au contraire, souligné qu’il incombait à la société mère de soumettre à son appréciation tout élément relatif aux liens organisationnels, économiques et juridiques, entre sa filiale et elle-même, et qu’elle considère de nature à démontrer qu’elles ne constituent pas une entité économique unique. Il a, d’ailleurs, relevé que, lors de son appréciation, il doit tenir compte de l’ensemble des éléments qui lui sont soumis par les parties, dont le caractère et l’importance peuvent varier selon les caractéristiques propres à chaque cas d’espèce (arrêt du 12 décembre 2007, Akzo Nobel e.a./Commission, point 93 supra, point 65).

110    Par ailleurs, il convient d’observer que la thèse avancée par l’intervenante aboutirait logiquement, si elle était admise, à la conclusion selon laquelle seules des personnes disposant de connaissances spécialisées dans le domaine concerné par l’activité économique d’une société commerciale sont capables d’exercer une influence déterminante sur le comportement de cette société sur le marché. Cela signifierait, en définitive, qu’une entreprise, au sens de la jurisprudence citée aux points 67 et 68 ci‑dessus, ne peut exercer ses activités que dans un seul domaine économique déterminé. Or, une telle thèse ne trouve aucun appui dans la jurisprudence.

111    En effet, dans son arrêt du 12 décembre 2007, Akzo Nobel e.a./Commission (point 93 supra, points 67 à 83), le Tribunal a admis la responsabilité d’une société mère pour l’infraction aux règles de la concurrence commise par sa filiale, malgré le fait que ladite société mère se limitait à prendre des décisions sur des questions de nature plutôt générale et laissait à sa filiale une autonomie considérable dans son domaine spécial d’activités. Le Tribunal a, dans ce contexte, souligné que l’imputation du comportement infractionnel d’une filiale à sa société mère ne nécessitait pas la preuve que la société mère influence la politique de sa filiale dans le domaine spécifique ayant fait l’objet de l’infraction (arrêt du 12 décembre 2007, Akzo Nobel e.a./Commission, point 93 supra, point 83).

112    Il s’ensuit que le seul fait que les responsables de SKW Holding ne disposaient pas de connaissances spécialisées dans le domaine d’activités de SKW, même à le supposer établi, ne suffit pas pour exclure la possibilité que la première société ait exercé une influence déterminante sur le comportement de la seconde sur le marché.

113    Troisièmement, l’argumentation des requérantes résumée aux points 93 et 94 ci‑dessus, laquelle, d’ailleurs, ne fait que réitérer des arguments déjà avancés par les requérantes dans leur réponse à la communication des griefs est, en substance, fondée sur la même prémisse erronée que la première branche du présent moyen. Il ressort, en effet, des considérations exposées dans le cadre de l’examen de cette première branche que la conclusion selon laquelle une société mère et sa filiale impliquée dans une infraction aux règles de la concurrence constituent une même unité économique et peuvent être toutes deux tenues pour responsables de l’infraction en cause, ne concerne pas uniquement les cas où ladite société mère se trouve à la tête de l’entreprise concernée. Dès lors, il importe peu, dans le cadre du présent examen, que SKW Holding n’était pas à la tête de l’entreprise concernée et n’agissait pas comme son instance centrale. Pour les mêmes motifs, toute comparaison à cet égard entre les requérantes et d’autres entreprises ayant participé à l’entente litigieuse ou entre les circonstances de la présente affaire et celles d’autres affaires mentionnées dans la jurisprudence, est dénuée de pertinence.

114    Quatrièmement, s’agissant de l’argumentation des requérantes relative au rôle de Degussa quant au comportement de SKW, postérieurement à la cession de l’intégralité de son capital à SKW Holding (résumée au point 95 ci‑dessus), elle est, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 48 ci‑dessus, dépourvue de pertinence s’agissant de l’imputation à SKW Holding de la responsabilité pour l’infraction commise par SKW. La note en bas de page n° 679 de la décision attaquée, évoquée par les requérantes (voir point 95 ci‑dessus), est également dépourvue de pertinence, et ce d’autant plus que les requérantes n’avaient pas contesté l’implication dans les accords anticoncurrentiels litigieux des deux personnes mentionnées au point 46 ci‑dessus, autres que M. N., lesquelles non seulement travaillaient pour le compte de SKW, mais étaient formellement employées par elle.

115    Cinquièmement, il convient de relever que, pour répondre aux arguments des requérantes, selon lesquels SKW Holding n’avait pas participé à l’entente litigieuse et n’en était pas même informée, la Commission a renvoyé, au considérant 247 de la décision attaquée, au considérant 224 de la même décision. Ce dernier considérant relève ce qui suit :

« L’argument selon lequel la société mère n’était pas au courant de l’entente se base sur une conception erronée de l’imputation du comportement de la filiale à la société mère. Si la société mère avait eu connaissance de l’existence des activités de l’entente ou avait enjoint la filiale à participer à ces activités, sa responsabilité aurait été établie par une implication directe dans l’entente. De plus, la Commission n’est pas tenue de démontrer l’influence de la société mère sur les différents individus au sein de la filiale. »

116    Les considérations énoncées au considérant 224 de la décision attaquée sont correctes et conformes à la jurisprudence constante rappelée aux points 67 à 72 ci‑dessus (voir également point 81 ci‑dessus). Il convient donc de constater que la Commission n’a pas ignoré la partie de l’argumentation des requérantes relative à la non-participation de SKW Holding à l’infraction, mais l’a examinée et l’a à juste titre rejetée, au motif, en substance, qu’elle était dépourvue de pertinence par rapport à la question de l’imputation à SKW Holding du comportement infractionnel de sa filiale, SKW.

117    Cependant, bien qu’elle ait considéré, à juste titre, que la connaissance de l’entente, voire la participation à celle-ci du personnel de SKW Holding, n’était aucunement nécessaire pour imputer à celle-ci l’infraction dans laquelle s’était impliquée sa filiale SKW, la Commission a, tout de même, indiqué, au considérant 246, troisième tiret, de la décision attaquée, que « le directeur exécutif de [SKW Holding] était au courant des échanges de tarifs de vente entre concurrents ». Pour étayer cette affirmation, elle a renvoyé, en note en bas de page n° 522, à un courriel de M. L., gérant de SKW. Or, les requérantes ont rappelé devant le Tribunal que l’affirmation en question figurait également dans la communication des griefs et que, dans leur réponse à celle-ci, elles l’avaient contestée. Il ressort, en effet, de la lecture de cette réponse que les requérantes avaient expliqué que le courriel invoqué par la Commission était adressé à une société en Argentine qui n’avait pas participé à l’entente litigieuse et concernait un produit différent de ceux visés par l’entente. Par conséquent, selon les requérantes, ledit courriel ne saurait étayer l’affirmation en cause de la Commission.

118    Malgré ces explications des requérantes, la Commission a repris dans la décision attaquée l’affirmation en cause, sans aucunement exposer les raisons pour lesquelles elle avait rejeté les explications fournies à ce sujet par les requérantes dans leur réponse à la communication des griefs. Si, certes, cette omission pouvait indiquer que cette partie de l’argumentation exposée par les requérantes dans leur réponse à la communication des griefs n’a pas été examinée par la Commission avec le soin requis, elle n’est pas, à elle seule, suffisante pour justifier l’annulation de la décision attaquée.

119    En effet, il convient de rappeler que le considérant 246 de la décision attaquée énonce des motifs surabondants, dans la mesure où la conclusion selon laquelle SKW Holding exerçait une influence déterminante sur le comportement de sa filiale sur le marché et pouvait, dès lors, être tenue pour responsable de l’infraction commise par cette dernière, pouvait être fondée, à suffisance de droit, sur la présomption capitalistique (considérant 245 de la décision attaquée), qu’il appartient aux requérantes de renverser. En tout état de cause, le considérant 246 de la décision attaquée mentionne plusieurs autres circonstances, lesquelles se sont avérées exactes (voir points 103 à 114 ci‑dessus) et sont, à elles seules, suffisantes pour fonder la conclusion relative à l’exercice, par SKW Holding, d’une influence déterminante sur SKW.

120    Il ressort de l’ensemble de ces considérations que, à l’exception de l’argumentation des requérantes tendant à démontrer que le directeur exécutif de SKW Holding n’était pas au courant des échanges de tarifs de vente entre concurrents, la Commission a analysé l’argumentation avancée par les requérantes pour démontrer que SKW Holding ne pouvait pas être tenue pour responsable de l’infraction litigieuse et elle l’a, à juste titre, rejetée. Son omission d’examiner l’argumentation relative à l’absence de connaissance, par le directeur exécutif de SKW Holding, des échanges de tarifs ne peut conduire à l’annulation de la décision attaquée, cette argumentation se rapportant à un motif surabondant de la décision attaquée (voir point 119 ci‑dessus), laquelle est fondée, à suffisance de droit, sur d’autres motifs non entachés d’erreur, à savoir, d’une part, sur la présomption capitalistique, que les requérantes ne sont pas parvenues à renverser et, d’autre part, et en tout état de cause, sur les autres motifs exposés aux autres tirets du considérant 246 de la décision attaquée. Partant, la deuxième branche du présent moyen doit être rejetée.

121    Il en va de même de la troisième branche. En effet, les considérations exposées ci‑dessus démontrent que la Commission n’a aucunement soumis le renversement de la présomption capitalistique à des exigences impossibles à respecter. Ce sont, au contraire, les requérantes qui ont omis d’avancer une argumentation complète et cohérente de nature à démontrer que SKW Holding n’exerçait pas une influence déterminante sur le comportement de SKW sur le marché. Le peu d’éléments invoqué par les requérantes ne s’avère pas, pour les motifs exposés ci‑dessus, suffisants à cet égard et, en tout état de cause, les circonstances mentionnées au considérant 246 de la décision attaquée (sous réserve des considérations exposées aux points 106 et 107 ci-dessus s’agissant du troisième tiret) corroborent la conclusion de la Commission relative à l’influence déterminante de SKW Holding sur le comportement de sa filiale.

122    S’agissant du grief des requérantes, selon lequel la Commission n’a fourni aucune indication spécifique quant à la nature des éléments de fait ou de preuve qui seraient suffisants pour renverser la présomption capitalistique, il doit également être rejeté au regard de la jurisprudence mentionnée au point 109 ci‑dessus, selon laquelle il incombe à la société mère d’invoquer, à cet égard, tout élément relatif aux liens entre elle-même et sa filiale.

123    Doit également être rejetée la quatrième branche du présent moyen, relative à la violation du devoir de la Commission d’enquêter d’office sur les faits pertinents. Il ressort, en effet, des considérations déjà exposées (voir, notamment, la jurisprudence mentionnée au point 72 ci-dessus) que la Commission peut se fonder sur la seule présomption capitalistique et que, dans un tel cas, il appartient à la société mère d’apporter des éléments de preuve suffisants pour démontrer que sa filiale se comportait de façon autonome sur le marché. Ainsi que l’a relevé l’avocat général Mme Kokott dans ses conclusions sous l’arrêt du 10 septembre 2009, Akzo Nobel e.a./Commission (point 69 supra, Rec. p. I‑8241, point 75), les faits et les informations nécessaires à cet effet proviennent de toute façon de la sphère interne de l’entreprise constituée par la société mère et la filiale et il est donc tout à fait justifié d’exiger de ces dernières qu’elles exposent leurs thèses.

124    Certes, les considérations exposées au point 122 ci-dessus n’excluent pas que, dans un cas déterminé, la Commission soit obligée, si les circonstances l’exigent, d’user de ses pouvoirs d’enquête pour obtenir des éléments susceptibles de renverser la présomption capitalistique, que l’entreprise concernée n’était pas en mesure d’apporter elle-même. Toutefois, encore faut-il que l’entreprise en cause fournisse des explications suffisantes permettant d’identifier, dans toute la mesure du possible, les éléments en question et les faits qu’ils pourraient servir à prouver et de comprendre les motifs pour lesquels il lui est impossible de produire elle-même ces éléments. Cette dernière condition n’est manifestement pas remplie en l’espèce, dès lors que les requérantes n’ont pas expliqué, même devant le Tribunal, sur quel objet particulier aurait porté l’enquête que la Commission aurait dû, selon elles, mener d’office.

125    Il convient, par conséquent, de rejeter les deuxième à quatrième branches du deuxième moyen.

–       Sur le grief tiré de l’arrêt Siemens évoqué lors de l’audience

126    Ainsi qu’il a été relevé au point 65 ci‑dessus, lors de l’audience, les requérantes ont fait valoir que la Commission aurait dû, dans la décision attaquée, déterminer leur quote-part dans les montants auxquels elles ont été condamnées solidairement avec d’autres entités. Selon elles, l’absence d’une telle détermination constitue une application erronée de l’article 81 CE, de sorte que ce grief se rattache au deuxième moyen.

127    Tel n’est, toutefois, pas le cas. Il ressort des considérations énoncées quant aux quatre branches du deuxième moyen, évoqué par les requérantes dans ce contexte, que ce moyen ne concerne aucunement la question de la répartition interne du montant des amendes auxquelles les requérantes ont été condamnées solidairement avec d’autres entités, mais celle de l’imputation à SKW Holding de la responsabilité pour l’infraction commise par sa filiale, détenue à 100 %, SKW. Le seul fait que les requérantes invoquent, à l’appui tant du deuxième moyen que du grief tiré de l’arrêt Siemens, point 65 supra, une application erronée de l’article 81 CE, ne saurait conduire à une conclusion différente.

128    Ce grief ne saurait pas davantage être considéré comme une ampliation de l’argumentation avancée par les requérantes dans le cadre de la première branche du cinquième moyen, examinée aux points 191 à 213 ci‑après. Cette branche ne porte pas sur la répartition interne, entre les requérantes et les autres codébiteurs, des montants des amendes pour le paiement desquelles ils sont tous solidairement responsables envers la Commission. Elle concerne uniquement le prétendu risque que la seconde requérante, SKW, solidairement responsable avec d’autres entreprises, pour le paiement de deux amendes dont la somme excède 13,3 millions d’euros, soit obligée, à la suite d’actions récursoires des autres codébiteurs, de supporter un montant allant au-delà de cette dernière somme, laquelle constitue, toutefois, selon la Commission dans la décision attaquée, la sanction appropriée pour sa participation à l’infraction litigieuse.

129    Il s’ensuit que ce grief constitue un moyen nouveau, avancé en cours d’instance. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 48, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, la production de moyens nouveaux en cours d’instance est interdite à moins que ces moyens ne se fondent sur des éléments de droit et de fait qui se sont révélés pendant la procédure. Cependant, un moyen qui constitue l’ampliation d’un moyen énoncé antérieurement, directement ou implicitement, dans la requête introductive d’instance et qui présente un lien étroit avec celui-ci doit être déclaré recevable (voir arrêt du Tribunal du 15 octobre 2008, Mote/Parlement, T‑345/05, Rec. p. II‑2849, point 85, et la jurisprudence citée). Par ailleurs, selon une jurisprudence constante, un arrêt qui n’a fait que confirmer une situation de droit que le requérant connaissait, en principe, au moment où il a introduit son recours ne saurait être considéré comme un élément nouveau permettant la production d’un moyen nouveau (arrêts du Tribunal du 12 juillet 2001, T. Port/Conseil, T‑2/99, Rec. p. II‑2093, point 57 ; Banatrading/Conseil, T‑3/99, Rec. p. II‑2123, point 49, et du 22 mai 2012, Internationaler Hilfsfonds/Commission, T‑300/10, non encore publié au Recueil, point 44).

130    En l’espèce, le nouveau moyen soulevé par les requérantes ne saurait être considéré comme se fondant sur un élément révélé pendant la procédure. Il résulte de la jurisprudence citée au point 129 ci‑dessus que l’arrêt Siemens, point 65 supra, ne constitue pas un tel élément. Par conséquent, ledit moyen est irrecevable.

131    En tout état de cause, quand bien même les conditions justifiant la production d’un moyen nouveau en cours d’instance, prévues à l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure, seraient remplies, ce moyen devrait être rejeté comme irrecevable, car non conforme aux exigences prévues à l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour, applicable à la procédure devant le Tribunal conformément à l’article 53, premier alinéa, dudit statut, et de l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal.

132    En vertu de ces dispositions, toute requête doit contenir l’exposé sommaire des moyens invoqués. Indépendamment de toute question de terminologie, cet exposé doit être suffisamment clair et précis pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (voir ordonnance du Tribunal du 28 avril 1993, De Hoe/Commission, T‑85/92, Rec. p. II‑523, point 20, et la jurisprudence citée).

133    Ces exigences doivent également être respectées lorsque les conditions justifiant, conformément à l’article 48, paragraphe 2, du règlement de procédure, la production, en cours d’instance, d’un moyen nouveau sont remplies. Cette dernière disposition peut justifier la production tardive d’un moyen, lequel, toutefois, doit être exposé de manière conforme à la jurisprudence citée au point 132 ci‑dessus (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 9 février 1994, Lacruz Bassols/Cour de justice, T‑109/92, RecFP p. I‑A‑31 et II‑105, point 67).

134    Or, en l’espèce, les requérantes se sont limitées à reprocher à la Commission de ne pas avoir déterminé leur quote-part dans les montants qu’elles ont été condamnées à payer solidairement avec d’autres entités, sans indiquer les éléments de fait et de droit sur la base desquels la Commission aurait dû procéder à une telle répartition ni même quelle aurait dû être, selon elles, la répartition appropriée. Il y a lieu de relever que le seul renvoi à l’arrêt Siemens, point 65 supra, est manifestement insuffisant à cet égard. En effet, il ne ressort pas de cet arrêt lequel, au demeurant, a été frappé de plusieurs pourvois qui sont encore pendants devant la Cour de justice, que, dans tous les cas où la Commission inflige une amende pour violation des règles de la concurrence solidairement à plusieurs entités, elle doit procéder à la répartition de quotes-parts internes respectives de chacune d’entre elles dans le montant de l’amende. Au contraire, le Tribunal a considéré que, faute d’indication contraire dans la décision par laquelle la Commission infligeait une amende à payer solidairement à plusieurs sociétés en raison du comportement infractionnel d’une entreprise, celle-ci leur imputait, à responsabilité égale, ledit comportement (arrêt Siemens, point 65 supra, point 158).

135    La circonstance que les requérantes ont également demandé au Tribunal d’exercer sa compétence de pleine juridiction à l’égard du montant de l’amende qui leur a été infligée ne saurait conduire à une conclusion différente. À supposer même que la détermination de la quote-part interne dans le montant de l’amende de chaque codébiteur condamné solidairement au paiement d’une amende fasse partie de la compétence de pleine juridiction du Tribunal en matière d’amendes, il importe de rappeler que l’exercice de cette compétence n’équivaut pas à un contrôle d’office, la procédure devant les juridictions de l’Union étant contradictoire. À l’exception des moyens d’ordre public que le juge est tenu de soulever d’office, dont le présent ne fait pas partie, c’est à la partie requérante qu’il appartient de soulever les moyens à l’encontre de la décision visée par son recours. Dans ce contexte, un requérant doit identifier les éléments contestés de cette décision, formuler des griefs à cet égard et apporter des preuves, qui peuvent être constituées d’indices sérieux, tendant à démontrer que ses griefs sont fondés (arrêt de la Cour du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission, C‑389/10 P, non encore publié au Recueil, points 131 et 132). C’est ce que les requérantes sont restées à défaut de faire en l’espèce, s’agissant du grief tiré de l’arrêt Siemens, point 65 supra. Partant, ce grief doit être écarté pour cause d’irrecevabilité.

136    Il résulte de ce qui précède que le deuxième moyen doit être rejeté.

 Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

137    Par le troisième moyen, les requérantes reprochent à la Commission une violation de l’obligation de motivation, en ce qu’elle aurait omis d’exposer, dans la décision attaquée, les motifs pour lesquels les éléments qu’elles avaient invoqués en vue du renversement de la présomption capitalistique, n’étaient pas suffisants à cet égard. Selon les requérantes, la remarque de la Commission figurant au considérant 250 de la décision attaquée ne constitue pas une motivation conforme aux exigences de la jurisprudence.

138    Les requérantes ajoutent que la Commission aurait dû, à tout le moins, indiquer les raisons pour lesquelles elle considérait que les éléments de fait qu’elles avaient invoqués en vue du renversement de la présomption capitalistique n’étaient pas pertinents et leur donner la possibilité d’invoquer d’autres circonstances à décharge. Selon les requérantes, cette obligation résulte également du principe du procès équitable, consacré à l’article 6 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, ainsi que de celui d’une procédure administrative régulière, consacré à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux.

139    Cette argumentation ne saurait prospérer. Il ressort des considérations exposées aux points 102 à 105 ci‑dessus que la Commission a répondu aux arguments invoqués par les requérantes en vue du renversement de la présomption capitalistique non seulement au considérant 250 de la décision attaquée, mais également aux considérants 247 (qui renvoie au considérant 224) et 248 de celle‑ci.

140    Certes, il pourrait être reproché à la Commission de ne pas avoir répondu à l’argumentation des requérantes tendant à contester l’affirmation, figurant dans la communication des griefs, selon laquelle le directeur exécutif de SKW Holding était au courant des échanges de tarifs de vente entre concurrents (voir point 118 ci‑dessus). Toutefois, pour les motifs exposés au point 120 ci‑dessus, quand bien même cette omission de la Commission pourrait être considérée comme un défaut ou une insuffisance de motivation de la décision attaquée, un tel grief ne saurait, en tout état de cause, entraîner son annulation, dès lors qu’il vise un motif surabondant (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 16 janvier 2008, Scippacercola et Terezakis/Commission, T‑306/05, non publié au Recueil, point 145).

141    Du reste, il convient de relever que la motivation figurant aux considérants 224, 247, 248 et 250 de la décision attaquée était suffisante pour permettre aux requérantes de comprendre les motifs du rejet des arguments qu’elles avaient avancés dans leur réponse à la communication des griefs et de les contester et, comme il ressort des considérations exposées dans le cadre de l’examen des deuxième à quatrième branches du deuxième moyen, permet au Tribunal d’exercer pleinement son contrôle.

142    S’agissant, en particulier, du considérant 250 de la décision attaquée, la motivation qui y figure est, certes, succincte, mais est, elle aussi, suffisante. Ainsi qu’il ressort des considérations exposées aux points 105 et 106 ci‑dessus, les arguments des requérantes dont il est question audit considérant de la décision attaquée ne remettaient pas en cause l’exactitude matérielle des constatations figurant au considérant 246 de cette décision (sous réserve des considérations exposées aux points 118 et 119 ci-dessus s’agissant du troisième tiret), mais fournissaient, tout au plus, certaines explications qui étaient dépourvues de pertinence quant à la question de l’exercice d’une influence déterminante, par SKW Holding, sur le comportement de sa filiale SKW. Dans ces conditions, la Commission pouvait valablement se limiter à relever que ces arguments des requérantes ne remettaient pas en cause l’exercice d’une influence déterminante par la société mère sur la filiale, mais, au contraire, la confirmaient.

143    Enfin, ne saurait non plus prospérer le grief des requérantes résumé au point 138 ci-dessus. Indépendamment du fait que ce grief ne concerne, en substance, pas le respect de l’obligation de motivation, il convient de relever que, ainsi qu’il ressort des considérations exposées dans le cadre de l’examen du premier moyen, les droits de la défense des requérantes ont pleinement été respectés pendant la procédure administrative. Les requérantes ont eu l’occasion de répondre par écrit à la communication des griefs, laquelle contenait l’affirmation selon laquelle SKW Holding exerçait une influence déterminante sur le comportement de sa filiale SKW sur le marché et pouvait, dès lors, être tenue pour responsable de l’infraction commise par cette dernière. Elles ont également eu la possibilité de développer cette argumentation oralement lors d’une audition et, s’agissant de la question du prétendu rôle de Degussa, par rapport à laquelle la Commission n’a pas, à juste titre, accédé à leur demande de leur permettre de la présenter à huis clos lors de l’audition, elles ont disposé de la possibilité de compléter par écrit leur argumentation. Partant, les exigences du respect du droit d’être entendu et du droit à une bonne administration, consacrés à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux, n’ont aucunement été violées en l’espèce.

144    Contrairement à ce que font valoir les requérantes, il ne ressort pas des dispositions et des principes qu’elles invoquent que la Commission était obligée de les prévenir du caractère insuffisant des éléments de fait et de preuve qu’elles avaient avancés aux fins de renverser la présomption capitalistique et de les inviter à les compléter. Au contraire, ainsi qu’il a itérativement été relevé, il leur appartenait de présenter elles-mêmes tous les éléments qu’elles estimaient pertinents à cet égard.

145    Il en résulte que le troisième moyen n’est pas fondé et doit également être rejeté.

 Sur le quatrième moyen, tiré de la violation du principe d’égalité de traitement en raison du traitement discriminatoire de SKW par rapport à Almamet

146    Par le quatrième moyen, les requérantes invoquent une violation du principe d’égalité de traitement, au motif que, dans le cadre du calcul du montant de l’amende, la Commission a traité SKW de manière moins favorable qu’un autre participant à l’entente, Almamet, malgré la similarité de leurs situations respectives. Ce moyen s’articule en deux branches, ayant trait, respectivement, au chiffre d’affaires utilisé pour le calcul du montant de base de l’amende et à la réduction exceptionnelle de 20 % du montant de l’amende accordée à Almamet, mais non à SKW.

–       Sur la première branche, relative au chiffre d’affaires utilisé pour le calcul du montant de base de l’amende

147    Il convient de rappeler que le montant des amendes infligées par la Commission a été calculé suivant la méthodologie décrite dans les lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1/2003 (JO 2006, C 210, p. 2, ci‑après les « lignes directrices »), laquelle comporte deux étapes. En premier lieu, la Commission détermine un montant de base pour chaque entreprise ou association d’entreprises, sur la base de la valeur des ventes de biens ou de services, réalisées par l’entreprise concernée, en relation directe ou indirecte avec l’infraction, dans le secteur géographique concerné. Il est précisé au paragraphe 13 des lignes directrices que la Commission utilisera normalement les ventes de l’entreprise durant la dernière année complète de sa participation à l’infraction. Le montant de base est lié à une proportion de la valeur des ventes déterminée en fonction du degré de gravité de l’infraction, multipliée par le nombre d’années d’infraction. Toutefois, conformément au paragraphe 25 des lignes directrices, indépendamment de la durée de la participation d’une entreprise à l’infraction, la Commission inclura dans le montant de base une somme comprise entre 15 et 25 % de la valeur des ventes, afin de dissuader les entreprises de participer à des accords horizontaux de fixation de prix, de répartition de marché et de limitation de production. En second lieu, la Commission peut ajuster le montant de base de l’amende, fixé lors de la première étape, à la hausse ou à la baisse, pour tenir compte de circonstances aggravantes ou atténuantes.

148    Les valeurs des ventes réalisées par les participants à l’entente en relation directe ou indirecte avec l’infraction, utilisées par la Commission aux fins de la fixation du montant de base des amendes qu’elle leur a infligées, figurent au considérant 288 de la décision attaquée. Celui-ci comporte un tableau qui indique, pour SKW, une valeur de ventes de poudre de carbure de calcium entre 15 et 20 millions d’euros et une valeur de ventes de granulés de magnésium entre 5 et 10 millions d’euros. Il est, en outre, relevé au septième tiret du même considérant que, pour SKW, la valeur des ventes inclut les ventes de poudre de carbure de calcium et de granulés de magnésium en 2006. Ce tiret renvoie à la note en bas de page n° 603, qui indique que « les ventes de granulés de carbure de calcium ne sont pas prises en compte, car SKW n’a qu’un seul client dans l’industrie du gaz et il n’existe pas de preuve concluante indiquant que SKW a participé à la collusion pour l’industrie du gaz ».

149    En outre, il est indiqué au considérant 288, deuxième tiret, de la décision attaquée que, « dans le cas d’Almamet, la valeur des ventes inclut les ventes de granulés de magnésium et de poudre de carbure de calcium en 2006, ne provenant pas de [Novácke chemické závody, a.s.] ».

150    Les requérantes se réfèrent, dans le cadre de leur argumentation relative au présent moyen, aux considérants 13 à 15 de la décision attaquée, qui expliquent les termes de l’accord de coopération entre Almamet et Novácke chemické závody (ci‑après « NCHZ »). Ces considérants de la décision attaquée sont libellés de la manière suivante :

« 13. Almamet […] est un négociant en granulés de magnésium et en poudre de carbure de calcium pour l’industrie de l’acier […]. Ses granulés de magnésium proviennent en majorité de Chine et elle s’approvisionne en poudre de carbure de calcium principalement auprès de [NCHZ] en Slovaquie […]

14. Almamet et [NCHZ] ont signé un accord‑cadre de coopération technique et commerciale (‘Skeleton Agreement for technical and commercial co-operation’) en vertu duquel les deux parties acceptent de former un partenariat à long terme avec des droits et des obligations distincts en relation avec les ventes de poudre de carbure de calcium au sein de l’EEE […]. Dans le cadre de cet accord, Almamet apporte, entre autres, le savoir‑faire technique en vue de mettre sur pied un site de production spécifique et donne des conseils sur les spécifications de produits, y compris le développement de futurs nouveaux types et processus pour leur production et leur utilisation ; elle est également en charge de l’étude approfondie du marché, définissant les besoins existants et prévisibles des clients au regard de la quantité, de la qualité et du prix, et est responsable de la vente du produit par l’intermédiaire de contrats de vente. Pour l’ensemble de ces services, Almamet perçoit une commission fixée en fonction des produits vendus.

15. Lors du dernier exercice complet ayant précédé la présente décision, le chiffre d’affaires mondial total d’Almamet GmbH s’est élevé à [entre 45 et 50] millions d’euros. Au cours de la dernière année complète de l’infraction, les ventes de poudre de carbure de calcium et de granulés de magnésium au sein de l’EEE – à l’exception de l’Espagne, du Portugal, de l’Irlande et du Royaume‑Uni – se sont élevées à [entre 20 et 25] millions d’euros […] »

151    Le considérant 13 de la décision attaquée renvoie à la note en bas de page n° 22, laquelle relève ce qui suit :

« Concernant la poudre de carbure de calcium, Almamet a conclu un accord de coopération avec NCHZ [voir considérants (14) et (22)] qui s’applique uniquement à la poudre de carbure de calcium destinée à la désulfurisation. Almamet a acheté de la poudre de carbure de calcium destinée à la désoxydation auprès d’autres sources, représentant moins de 10 % de son commerce de carbure de calcium. »

152    Selon les requérantes, il ressort de ces considérations figurant dans la décision attaquée que les chiffres d’affaires qu’Almamet avait réalisés par la vente de poudre de carbure de calcium qu’elle s’était procurée chez NCHZ n’ont pas été pris en compte pour le calcul du montant de base de l’amende. Les requérantes considèrent, dès lors, que les « chiffres d’affaires internes », réalisés dans le cadre de la relation entre Degussa et SKW, n’auraient pas non plus dû être pris en compte pour le calcul du montant de base de l’amende à infliger à cette dernière. Les requérantes se réfèrent, à cet égard, au contrat de livraison et de prestation de services conclu entre ces deux entreprises dont elles ont produit des extraits et soutiennent qu’il en ressort que SKW ne percevait, pour les ventes de carbure de calcium effectuées par elle, qu’une commission s’élevant à environ 11 % du revenu tiré de la vente, le reste dudit revenu revenant à Degussa. Elles considèrent que la Commission n’aurait dû prendre en considération, aux fins du calcul du montant de base de l’amende, que les commissions réalisées par SKW. Dans la mesure où, en raison des dispositions exceptionnelles prises à son égard dans la décision attaquée, Almamet, qui détiendrait une part importante du marché en cause, se serait vu infliger une amende dont le montant de base était 3,5 fois moins important que celui de l’amende infligée à SKW, la Commission aurait violé le principe d’égalité de traitement.

153    Il est de jurisprudence constante que, pour fixer des amendes en vertu de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, la Commission est tenue de respecter les principes généraux du droit dont, notamment, le principe d’égalité de traitement, tel que développé par la jurisprudence de la Cour et du Tribunal (arrêts du Tribunal du 5 avril 2006, Degussa/Commission, T‑279/02, Rec. p. II‑897, point 77, et du 13 juillet 2011, Schindler Holding e.a./Commission, T‑138/07, Rec. p. II‑4819, point 105). Selon une jurisprudence également constante, ce principe exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’une différenciation ne soit objectivement justifiée (voir arrêt de la Cour du 29 avril 2004, Novartis Pharmaceuticals, C‑106/01, Rec. p. I‑4403, point 69, et la jurisprudence citée).

154    Il convient, dès lors, de vérifier si la situation de SKW était comparable à celle d’Almamet, compte tenu du traitement différencié de cette dernière entreprise, en ce qui concerne le calcul des ventes réalisées en relation avec l’infraction, prises en considération aux fins de la détermination du montant de base de l’amende.

155    À cet égard, la Commission a expliqué devant le Tribunal qu’elle n’avait aucunement pris en considération, aux fins du calcul du montant de base de l’amende, les ventes réalisées par Almamet avec de la poudre de carbure de calcium que celle-ci s’était procurée chez NCHZ. En d’autres termes, elle n’avait pas même tenu compte des commissions perçues par Almamet en relation avec ces ventes. Ces affirmations correspondent à celles figurant au considérant 288, deuxième tiret, de la décision attaquée (voir point 149 ci‑dessus). La Commission a expliqué que ce calcul avait permis d’éviter une double comptabilisation de la valeur des ventes concernées par l’entente, qui aurait pu se produire du fait de la participation à l’entente, à la fois, d’Almamet et de NCHZ.

156    Cette dernière circonstance constitue, comme le fait valoir à juste titre la Commission, un élément de différenciation important entre la situation d’Almamet et celle de SKW. En effet, le cas d’Almamet et de NCHZ présente la particularité selon laquelle le fournisseur de la poudre de carbure de calcium, à savoir NCHZ, participait avec des membres de sa propre direction et de son propre personnel à l’entente. Ceux-ci déterminaient de manière directe, avec les autres participants, les prix de vente aux consommateurs finaux du produit concerné. Le fait que ces ventes étaient réalisées non de manière directe par NCHZ, mais par le biais d’Almamet, n’avait aucune influence sur le prix de vente, qui était celui décidé dans le cadre de l’entente. De plus, il ressort de l’arrêt du Tribunal du 12 décembre 2012, Almamet/Commission (T‑410/09, non publié au Recueil, point 221), qu’Almamet percevait une commission fixe (et non proportionnelle au prix de vente) pour les ventes qu’elle réalisait avec la poudre de carbure de calcium en provenance de NCHZ.

157    Dans ces conditions, la Commission a, à l’évidence, considéré que les ventes réalisées avec du carbure de calcium en provenance de NCHZ ne devaient être prises en considération qu’aux fins du calcul du montant de base de l’amende à infliger à cette dernière entreprise, alors que le montant de base de l’amende à infliger à Almamet était calculé sur la base de la valeur des autres ventes réalisées par celle-ci en relation avec l’infraction, à savoir les ventes de poudre de carbure de calcium qu’elle s’était procurée chez d’autres fournisseurs et les ventes de granulés de magnésium. Il n’appartient pas au Tribunal, dans le cadre de la présente procédure, de se prononcer sur la validité de ce choix de la Commission, lequel concerne l’amende infligée à une entreprise autre que les requérantes dans la présente affaire. Il suffit de relever que la situation d’Almamet qui a justifié ce choix, telle qu’elle a été résumée au point 155 ci-dessus, n’est pas comparable à celle de SKW, de sorte qu’une violation du principe d’égalité de traitement ne saurait, en l’espèce, être reprochée à la Commission.

158    En effet, indépendamment même du fait que, selon ses propres affirmations, SKW percevait, en tant que commission de vente, un pourcentage du prix de vente et non un montant fixe, il y a lieu de constater que la Commission n’a pas reproché aux membres du personnel ou de la direction de Degussa ou de sa filiale AlzChem Hart, détentrice de la totalité du capital de SKW avant sa cession à SKW Holding, une participation directe à l’infraction. Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que l’une des personnes impliquées dans l’entente pour le compte de SKW, M. N., était, certes, formellement un employé de Degussa, mais il est constant entre les parties qu’il travaillait, à l’époque des faits litigieux, pour le compte de SKW (voir également point 45 ci‑dessus). Contrairement donc à ce qui a été le cas pour NCHZ, la responsabilité pour l’entente litigieuse a été imputée à Degussa et à AlzChem Hart, pour la période allant du début de l’infraction au 30 août 2004, au seul motif que, pendant cette période, elles faisaient partie de la même unité économique que SKW (voir le considérant 235 de la décision attaquée).

159    Par ailleurs, si les requérantes ont allégué, dans leur réponse à la communication des griefs que, même après l’acquisition, par SKW Holding, de l’intégralité du capital de SKW, cette dernière était « contrôlée à distance » par Degussa (voir point 49 ci‑dessus), elles n’ont soutenu, ni dans cette réponse ni dans le cadre du présent recours, que Degussa ou AlzChem Hart participaient par le biais des membres de leur personnel ou de leur direction à l’infraction. Ainsi, à la différence de la situation d’Almamet et de NCHZ, caractérisée par la participation directe, au sein de l’entente, des membres du personnel ou de la direction à la fois du fournisseur du produit concerné et du négociant responsable pour les ventes de ce produit aux consommateurs finaux, dans le cas de SKW et de Degussa, seuls les membres du personnel ou de la direction de la première ont participé à l’entente.

160    Il est, à cet égard, indifférent, que, comme le font valoir les requérantes, la plus grande partie du revenu généré par les ventes de poudre de carbure de calcium à des prix déterminés par l’entente revenait à Degussa. Il convient de faire remarquer, à cet égard, que le revenu ainsi perçu par Degussa ne représentait pas nécessairement des profits, dès lors que cette dernière entreprise devait couvrir le coût de la production. Indépendamment, toutefois, de cette considération, ce qui importe c’est que c’étaient les membres du personnel ou de la direction de SKW qui participaient à l’infraction et c’est à cette dernière que la Commission devait infliger une sanction, laquelle, conformément aux lignes directrices, devait être calculée en fonction de la valeur des ventes réalisées par SKW en relation avec l’infraction et non du profit qu’elle en a tiré. Quant à Degussa et à AlzChem Hart, à la différence de NCHZ, tenue pour responsable de l’infraction litigieuse en raison de la participation de son propre personnel à celle-ci, elles se sont vu imputer la responsabilité pour cette infraction au motif que, durant la période mentionnée au point 158 ci‑dessus, elles faisaient partie de la même unité économique que SKW.

161    Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que la première branche n’est pas fondée et doit être rejetée.

–       Sur la seconde branche, relative à la réduction exceptionnelle de 20 % du montant de l’amende accordée à Almamet

162    Dans le cadre de la seconde branche, les requérantes font valoir que la Commission a traité SKW de manière discriminatoire par rapport à Almamet, dès lors qu’elle ne lui a pas accordé une réduction de 20 % du montant de l’amende, comme elle l’a fait pour Almamet. Selon les requérantes, les circonstances invoquées, par la Commission, pour justifier la réduction accordée à Almamet étaient également valables à l’égard de SKW qui se trouvait, dès lors, dans une situation similaire.

163    Au considérant 372 de la décision attaquée, la Commission a relevé qu’il convenait de tenir compte du fait qu’Almamet était un négociant indépendant de très petite taille qui n’appartenait à aucun grand groupe de sociétés. Almamet serait actif dans le négoce de matériaux de valeur élevée avec une marge de profit plutôt réduite et aurait un « portefeuille de produits relativement focalisé ». La Commission a ajouté que « [l]e fait que l’amende imposée aurait un impact relativement élevé sur la situation financière de ce type de société » était également pris en considération. La Commission a conclu que, au regard de ces « caractéristiques spéciales » d’Almamet, elle considérait qu’une réduction du montant de l’amende de 20 % était appropriée, dès lors qu’Almamet serait, en tout état de cause, suffisamment dissuadée par une amende de ce niveau. La Commission a renvoyé, en note en bas de page n° 685, au paragraphe 37 des lignes directrices, qui est ainsi libellé :

« Bien que les présentes lignes directrices exposent la méthodologie générale pour la fixation d’amendes, les particularités d’une affaire donnée ou la nécessité d’atteindre un niveau dissuasif dans une affaire particulière peuvent justifier que la Commission s’écarte de cette méthodologie ou des limites fixées au [paragraphe] 21. »

164    Il s’ensuit que, pour accorder une réduction de 20 % du montant de l’amende à Almamet, la Commission s’est écartée de ses propres lignes directrices. Ainsi qu’il ressort d’une jurisprudence constante, un tel écart doit être compatible, notamment, avec le principe d’égalité de traitement (arrêt de la Cour du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec. p. I‑5425, point 211 ; arrêts du Tribunal du 8 octobre 2008, Schunk et Schunk Kohlenstoff-Technik/Commission, T‑69/04, Rec. p. II‑2567, point 44, et du 28 avril 2010, Amann & Söhne et Cousin Filterie/Commission, T‑446/05, Rec. p. II‑1255, point 146).

165    Il convient de relever que la Commission a énuméré, au considérant 372 de la décision attaquée, certaines « caractéristiques spéciales » d’Almamet, pour justifier la réduction du montant de l’amende qu’elle lui avait accordée. Ainsi que le Tribunal l’a jugé dans son arrêt du 12 décembre 2012, Novácke chemické závody/Commission (T‑352/09, non encore publié au Recueil, points 137 à 141), une entreprise qui présente ces caractéristiques se trouve, du point de vue d’une éventuelle réduction du montant de l’amende en dehors des cas spécifiquement prévus dans les lignes directrices, dans une situation différente de celle d’une entreprise qui ne présente pas lesdites caractéristiques.

166    Premièrement, il y a lieu de rappeler que l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003 prévoit, notamment, que, pour chaque entreprise participant à une infraction aux dispositions de l’article 81 CE, l’amende n’excède pas 10 % de son chiffre d’affaires total réalisé au cours de l’exercice social précédent. Selon la jurisprudence, le plafond relatif au chiffre d’affaires vise à éviter que les amendes infligées par la Commission soient disproportionnées par rapport à l’importance de l’entreprise concernée (arrêts de la Cour du 7 juin 1983, Musique Diffusion française e.a./Commission, 100/80 à 103/80, Rec. p. 1825, point 119, et du 7 juin 2007, Britannia Alloys & Chemicals/Commission, C‑76/06 P, Rec. p. I‑4405, point 24).

167    Or, ce plafond n’est pas suffisant pour éviter le caractère éventuellement disproportionné de l’amende infligée dans le cas d’un négociant actif dans le commerce de matériaux d’une valeur élevée avec une marge de profit réduite, tel qu’Almamet. En effet, en raison de la valeur élevée des matériaux concernés, une telle entreprise peut présenter un chiffre d’affaires très élevé par rapport à ses profits et ses actifs, lesquels seuls seront consacrés au paiement de l’amende.

168    Deuxièmement, dès lors que, selon la méthodologie des lignes directrices, l’amende est fixée en prenant comme point de départ une proportion de la valeur des ventes réalisées par l’entreprise en question sur le marché concerné par l’infraction (voir point 147 ci‑dessus), le risque d’une amende disproportionnée, car représentant une partie très significative du chiffre d’affaires global de ladite entreprise, est d’autant plus élevé dans le cas d’une entreprise qui, comme Almamet, dispose d’un « portefeuille de produits hautement focalisé ».

169    Troisièmement, le fait qu’Almamet était une entreprise de très petite taille qui n’appartenait à aucun grand groupe est également pertinent, dès lors qu’elle devrait seule faire face à l’amende, aucune autre société n’étant solidairement responsable avec elle pour le paiement de cette amende ou, plus généralement, n’étant en mesure de lui fournir son appui à cette fin.

170    Les requérantes ne contestent pas qu’Almamet présente les caractéristiques spéciales mentionnées au considérant 372 de la décision attaquée. Dès lors, au regard des considérations qui précèdent et en tenant compte de la jurisprudence mentionnée au point 153 ci‑dessus, il convient, afin d’examiner si la Commission a violé le principe d’égalité de traitement en n’accordant pas une réduction du montant de l’amende analogue à SKW, de vérifier si, comme les requérantes le font valoir, cette dernière se trouvait dans une situation comparable à celle d’Almamet, c’est‑à‑dire qu’elle présentait les mêmes caractéristiques spéciales énumérées au considérant 372 de la décision attaquée.

171    Or, il convient de constater que, dans le cadre de leur argumentation relative à la présente branche du quatrième moyen, les requérantes évoquent de prétendues caractéristiques de SKW différentes de celles qui, conformément au considérant 372 de la décision attaquée, ont été déterminantes pour l’octroi d’une réduction du montant de l’amende à Almamet.

172    Ainsi, les requérantes font valoir que, tout comme Almamet, SKW est un négociant qui a conclu un accord de coopération avec une entreprise produisant de la poudre de carbure de calcium (Degussa), dont elle vend le produit sur commission. Toutefois, il convient de rappeler que, comme il ressort du considérant 372 de la décision attaquée, ce qui était déterminant, pour l’octroi d’une réduction du montant de l’amende à Almamet, ce n’était pas le fait qu’elle était un négociant et non un producteur de poudre de carbure de calcium, mais le fait qu’elle était un « négociant indépendant de très petite taille qui n’appartenait à aucun grand groupe de sociétés ».

173    Les requérantes font valoir, à cet égard, que le fait que SKW Holding détient l’intégralité du capital de SKW ne constitue pas un élément de différenciation entre cette dernière et Almamet. En effet, SKW Holding ne disposerait pas de ressources financières importantes. Son chiffre d’affaires ne refléterait pas sa puissance économique. Contrairement à d’autres entreprises, SKW Holding, en tant qu’investisseur financier, rechercherait constamment à participer à d’autres entreprises et à les reprendre. Son chiffre d’affaires augmenterait en raison de ces reprises, mais ces augmentations ne se traduiraient pas en une augmentation de sa puissance économique. Les reprises d’entreprises qu’elle effectuerait seraient majoritairement financées par des crédits, de sorte que le chiffre d’affaires cumulé du groupe de SKW Holding ne refléterait aucunement sa capacité contributive réelle.

174    Ces affirmations ne sauraient prospérer. Ainsi que le fait observer à juste titre la Commission, il existe une différence de taille importante entre Almamet et les requérantes. Il ressort, en effet, respectivement des considérants 15 et 32 de la décision attaquée que les chiffres d’affaires globaux réalisés par Almamet et par les requérantes lors de la dernière année complète avant l’infraction s’élevaient, respectivement, à entre 45 à 50 millions d’euros et à 377 millions d’euros.

175    Les requérantes n’ont aucunement évoqué les chiffres d’affaires globaux d’Almamet et de leur propre entreprise, et elles se sont plutôt concentrées sur les chiffres d’affaires réalisés par celles-ci en relation avec l’infraction, lesquels, selon elles, étaient comparables. Toutefois, il peut être déduit des considérations exposées aux points 166 à 169 ci‑dessus que ce qui importe, du point de vue de la capacité contributive de l’entreprise concernée et, partant, du caractère proportionnel de l’amende, c’est son chiffre d’affaires global et non celui réalisé uniquement avec les produits concernés par l’infraction.

176    Par ailleurs, l’argumentation des requérantes ignore le fait que, pour une partie de la période infractionnelle (jusqu’au 30 août 2004), SKW faisait partie de la même unité économique que Degussa. Elle ignore également le fait que la Commission a considéré que, durant le reste de la période infractionnelle, SKW appartenait à une seule et même unité économique non seulement avec SKW Holding, mais également avec Arques. Les requérantes n’ont ni contesté ce fait ni affirmé qu’Arques ne disposait pas de ressources financières importantes.

177    Enfin, les affirmations relatives à la prétendue absence de ressources financières de SKW Holding ne sont étayées par aucun élément de preuve et sont, de surcroît, en contradiction avec les affirmations relatives aux acquisitions d’entreprises réalisées par cette société. Quand bien même, comme le font valoir les requérantes, ces acquisitions seraient financées par des prêts plutôt que par les ressources propres de SKW Holding, les requérantes n’expliquent pas comment une société ne disposant pas de ressources propres significatives parvient à obtenir les prêts nécessaires.

178    Il convient, en outre, de constater que les requérantes n’analysent pas, dans leur argumentation relative au présent moyen, les autres caractéristiques qui, selon le considérant 372 de la décision attaquée, ont été déterminantes pour l’octroi d’une réduction du montant de l’amende à Almamet. Ainsi, elles ne font pas valoir que les mêmes caractéristiques s’appliquent à SKW. En particulier, elles n’ont ni allégué ni prouvé que SKW répondait également à la description d’Almamet figurant au considérant 372 de la décision attaquée, selon laquelle « Almamet vend[ait] des matériaux de valeur avec une marge plutôt faible et a[vait] un portefeuille de produits relativement focalisé ».

179    Les requérantes font plutôt valoir, en substance, que SKW mériterait davantage qu’Almamet une réduction du montant de l’amende. Elles contestent, dans ce contexte, la coopération d’Almamet avec la Commission au cours de la procédure administrative et rappellent qu’elle était la seule entreprise impliquée dans l’entente à avoir nié sa participation à celle-ci. Elle aurait, en outre, reproché à la Commission d’utiliser des moyens de preuves illégaux. En revanche, SKW Holding, au nom de sa filiale SKW, se serait déclarée prête à coopérer sans restriction avec la Commission. De plus, contrairement à SKW, Almamet aurait été l’instigatrice de l’infraction litigieuse, ainsi qu’il ressortirait des considérants 56 et suivants, 64 et suivants ainsi que 179 de la décision attaquée, ce qui constituerait une circonstance aggravante. Il serait, dès lors, d’autant plus incompréhensible que, contrairement aux requérantes, Almamet se serait vu accorder une réduction du montant de l’amende.

180    Les requérantes ajoutent que, suivant la pratique décisionnelle de la Commission dans d’autres procédures aboutissant à des sanctions pour infraction aux règles de la concurrence, elles auraient dû se voir accorder une réduction du montant de l’amende, en raison de leur non-contestation de faits affirmés dans la communication des griefs et de leur déclaration selon laquelle elles étaient prêtes à coopérer avec la Commission. Le fait que SKW n’avait pas d’intérêt économique propre à l’entente litigieuse, contrairement aux autres participants à l’entente, en particulier Almamet et Degussa, aurait également dû jouer en sa faveur et justifier une réduction du montant de l’amende qui allait lui être infligée. Cette argumentation est également soutenue par l’intervenante. Celle‑ci fait valoir qu’il n’est nullement interdit à la Commission d’accorder une réduction du montant de l’amende pour non-contestation des faits et invoque des exemples de décisions récentes de la Commission qui auraient accordé une telle réduction.

181    Il convient de constater que l’argumentation des requérantes résumée aux points 178 et 179 ci-dessus est dépourvue de pertinence par rapport à la question d’une éventuelle violation du principe d’égalité de traitement au détriment des requérantes. Il ressort clairement du considérant 372 de la décision attaquée qu’une réduction du montant de l’amende n’a été accordée à Almamet qu’en raison des caractéristiques particulières de cette entreprise, énumérées au même considérant. Il ressort tout aussi clairement des considérants 313 à 331 de la décision attaquée qu’aucune circonstance atténuante n’a été retenue à l’égard d’Almamet, pas plus, d’ailleurs, qu’à l’égard des requérantes.

182    Il convient, toutefois, de souligner que la Commission n’a pas non plus retenu, à l’égard d’Almamet, de circonstances aggravantes. Les considérants 56 et suivants et 64 et suivants de la décision attaquée, évoqués par les requérantes dans leur argumentation, décrivent le fonctionnement de l’entente et les différentes réunions des participants qui ont eu lieu. Il n’en ressort pas que la Commission a considéré qu’Almamet jouait un rôle de meneur ou d’incitateur de l’infraction, ce qui, conformément au paragraphe 28, troisième tiret, des lignes directrices, constitue une circonstance aggravante. Il en va de même du considérant 179 de la décision attaquée. Si, certes, celui-ci relève, comme le font remarquer les requérantes, qu’Almamet jouait un « rôle essentiel dans le fonctionnement des accords » litigieux, cette remarque fait partie des motifs pour lesquels la Commission a considéré qu’il convenait de tenir Almamet également pour responsable de l’entente, quand bien même elle ne constituerait qu’un agent ou représentant de NCHZ, qui avait elle-même participé à l’entente.

183    Il s’ensuit que, du point de vue des circonstances aggravantes ou atténuantes, SKW et Almamet se trouvaient sur un pied d’égalité, aucune telle circonstance n’ayant été retenue, par la Commission, à l’égard ni de l’une ni de l’autre. Toutefois, ce seul fait ne signifie pas qu’Almamet ne pouvait se voir accorder une réduction du montant de l’amende pour des motifs qui n’étaient pas liés à la gravité relative de sa participation à l’infraction, que les circonstances aggravantes ou atténuantes sont censées refléter selon la jurisprudence (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 8 octobre 2008, Carbone‑Lorraine/Commission, T‑73/04, Rec. p. II‑2661, point 100), mais, en substance, à sa capacité contributive moins importante, telle qu’elle ressortait de ses caractéristiques particulières, énumérées au considérant 372 de la décision attaquée. Dans la mesure où SKW ne parvient pas à établir qu’elle présentait, en tant qu’entreprise, les mêmes caractéristiques particulières, aucune violation du principe d’égalité de traitement ne saurait être reprochée à la Commission, du fait qu’elle ne lui a pas accordé une réduction analogue du montant de l’amende qui lui a été infligée.

184    Par ailleurs, dans la mesure où l’argumentation des requérantes et de l’intervenante résumée aux points 179 et 180 ci‑dessus devrait être comprise en ce sens qu’elles font valoir que SKW devrait se voir accorder une réduction du montant de l’amende qui lui a été infligée au titre d’une circonstance atténuante sur la base de sa non-contestation des faits reprochés dans la communication des griefs, elle ne saurait pas non plus prospérer.

185    Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que la simple non-contestation des faits par l’entreprise concernée ne figure pas au nombre des circonstances atténuantes énumérées à titre indicatif au paragraphe 29 des lignes directrices. Le seul fait que, conformément à sa pratique décisionnelle antérieure, voire même aux versions précédentes des lignes directives, la Commission accordait une réduction du montant de l’amende à ce titre, ne suffit pas pour conclure qu’elle aurait dû accorder une réduction analogue aux requérantes. En effet, si la Commission ne saurait, en règle générale et sous réserve de la considération énoncée au point 164 ci‑dessus, se départir des règles qu’elle s’est elle‑même imposée par ses lignes directrices (arrêt Dansk Rørindustri e.a./Commission, point 164 supra, point 211 ; arrêt Schunk et Schunk Kohlenstoff‑Technik/Commission, point 164 supra, point 44, et arrêt Amann & Söhne et Cousin Filterie/Commission, point 164 supra, point 146), elle est, en revanche, libre de modifier ces règles ou de les remplacer. Dans un cas qui relève du champ d’application des nouvelles règles, comme c’est le cas de l’infraction litigieuse qui relève, ratione temporis, du champ d’application des lignes directrices, il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir tenu compte d’une circonstance atténuante qui n’est pas prévue par ces nouvelles règles, au seul motif qu’elle était prévue dans les anciennes règles. Par ailleurs, le fait que la Commission ait considéré, dans sa pratique décisionnelle antérieure, que certains éléments constituaient des circonstances atténuantes aux fins de la détermination du montant de l’amende n’implique pas qu’elle soit obligée de porter la même appréciation dans une décision ultérieure (arrêts du Tribunal du 14 mai 1998, Mayr Melnhof/Commission, T‑347/94, Rec. p. II‑1751, point 368 ; du 20 mars 2002, LR AF 1998/Commission, T‑23/99, Rec. p. II‑1705, point 337, et du 12 décembre 2012, Ecka Granulate et non ferrum Metallpulver/Commission, T‑400/09, non encore publié au Recueil, ci‑après l’« arrêt Ecka », point 59).

186    Certes, les lignes directrices (paragraphe 29, quatrième tiret) permettent de reconnaître à l’entreprise concernée une circonstance atténuante lorsqu’elle coopère effectivement avec la Commission, en dehors du champ d’application de la communication sur la clémence et au‑delà de ses obligations juridiques de coopérer. Toutefois, selon une jurisprudence constante, une réduction du montant de l’amende au titre d’une coopération lors de la procédure administrative n’est justifiée que si le comportement de l’entreprise en cause a permis à la Commission de constater l’existence d’une infraction avec moins de difficulté et, le cas échéant, d’y mettre fin (arrêts de la Cour du 16 novembre 2000, SCA Holding/Commission, C‑297/98 P, Rec. p. I‑10101, point 36, et du 10 mai 2007, SGL Carbon/Commission, C‑328/05 P, Rec. p. I‑3921, point 83 ; arrêt du Tribunal du 14 mai 1998, BPB de Eendracht/Commission, T‑311/94, Rec. p. II‑1129, point 325).

187    Or, en l’espèce, les requérantes n’ont pas allégué que, en cas de contestation, de leur part, des faits qui leur étaient reprochés, il aurait été plus difficile, pour la Commission, de les établir par des éléments de preuve pertinents. Il convient de relever, à cet égard, que l’existence de l’entente litigieuse a été portée à la connaissance de la Commission par Akzo Nobel, ainsi que cela est rappelé au considérant 335 de la décision attaquée. Ensuite, Degussa a également déposé une déclaration en vue de bénéficier de la communication sur la clémence, dans laquelle elle a fourni à la Commission des informations additionnelles portant, notamment, sur le volet de l’entente relatif au magnésium, ce qui lui a valu une réduction du montant de l’amende qui lui a été infligée, ainsi que cela résulte des considérants 350 à 356 de la décision attaquée. Ainsi qu’il ressort de la note en bas de page n° 143 sous le considérant 64 et du considérant 348 de la décision attaquée, la Commission avait saisi dans les locaux d’une autre entreprise ayant participé à l’entente, en l’occurrence TDR Metalurgija d.d., des preuves documentaires quant au volet de l’entente relatif à la poudre de carbure de calcium et, plus particulièrement, de la première réunion relative à ce produit, tenue le 22 avril 2004. De plus, il ressort des considérants 124 à 135 et 155 à 159 de la décision attaquée, et des notes en bas de page auxquelles ceux‑ci renvoient, que la Commission disposait également de preuves documentaires quant au volet de l’entente relatif au magnésium, consistant en des documents saisis lors d’une inspection effectuée dans les locaux d’une autre entreprise ayant participé à l’entente (le groupe à la tête duquel figurait Ecka Granulate).

188    Il en ressort que la Commission disposait d’un nombre important de preuves des faits retenus à l’encontre des requérantes, tant sous la forme de déclarations émanant d’autres participants à l’entente que sous la forme de documents constituant une trace écrite, fût-elle fragmentaire, des différentes réunions tenues dans le cadre de l’entente et des engagements pris lors de ces réunions. Dans ces conditions et à défaut d’arguments des requérantes de nature à démontrer le contraire, il convient de conclure que la Commission était, en tout état de cause, en mesure de prouver les faits reprochés aux requérantes en cas de contestation par celles‑ci. Il s’ensuit que l’absence d’une telle contestation de la part des requérantes ne saurait, en l’espèce, être considérée comme une coopération effective lors de la procédure administrative, au sens du paragraphe 29, quatrième tiret, des lignes directrices et de la jurisprudence citée au point 186 ci‑dessus, et ne saurait, par conséquent, justifier une réduction du montant de l’amende qui leur a été infligée.

189    Il ressort de l’ensemble des considérations qui précèdent que la seconde branche n’est pas fondée et doit être rejetée, de même que le quatrième moyen dans son intégralité.

 Sur le cinquième moyen, tiré de la violation des articles 7 et 23 du règlement n° 1/2003 ainsi que des principes de proportionnalité et de légalité des peines

190    Par le cinquième moyen, les requérantes font valoir que la Commission a, lors du calcul de l’amende qu’elle leur a infligée, violé pour plusieurs motifs les articles 7 et 23 du règlement n° 1/2003 ainsi que les principes de proportionnalité et de légalité des peines. Ce moyen s’articule en cinq branches, tirées, la première, de l’inclusion erronée de SKW dans deux groupes d’entreprises responsables pour le paiement de deux amendes différentes, la deuxième, du refus prétendument illégal de la Commission de reconnaître, à l’égard des requérantes, des circonstances atténuantes, la troisième, du refus de la Commission d’accorder aux requérantes une réduction du montant de l’amende au titre de la coopération de Degussa, la quatrième, d’une violation des articles 7 et 23 du règlement n° 1/2003 ainsi que du principe de proportionnalité, en ce que SKW est solidairement responsable de l’augmentation, au titre de la récidive, du montant de l’amende infligée à Degussa et, la cinquième, de l’inclusion erronée, dans le montant de l’amende infligée à SKW Holding, du montant additionnel (ci‑après le « droit d’entrée ») prévu au paragraphe 25 des lignes directrices.

–       Sur la première branche, tirée de l’inclusion erronée de SKW dans deux groupes d’entreprises responsables pour le paiement de deux amendes différentes

191    Selon les requérantes, la responsabilité solidaire de SKW pour le paiement de deux amendes différentes (voir point 4 ci-dessus) est illégale. Dès lors qu’elle figure dans deux « groupes de responsables » distincts, SKW serait exposée au risque d’être soumise à des obligations de paiement qui dépasseraient le montant de l’amende que la Commission a considéré comme approprié, suivant ses propres lignes directrices.

192    Certes, il ressortirait de la note en bas de page n° 681 de la décision attaquée que la volonté de la Commission était de fixer le montant de l’amende à infliger à SKW à 13,3 millions d’euros, conformément aux lignes directrices. Toutefois, la Commission ne tiendrait pas compte de l’éventualité que ce montant soit dépassé dans le cas, qui ne serait pas du tout hypothétique, où les autres entreprises, solidairement responsables avec SKW, se retourneraient contre celle-ci pour demander le remboursement des sommes qu’elles auraient payées à la Commission au titre des amendes qui leur ont été infligées. SKW serait, ainsi, exposée au risque de paiement d’un montant total pouvant s’élever jusqu’à 14,34 (13,3 + 1,04) millions d’euros, ce qui serait contraire aux lignes directrices. De surcroît, en raison de cette éventualité dont la Commission n’aurait aucunement tenu compte, la décision attaquée ne satisferait pas aux exigences de précision, de clarté et de prévisibilité découlant du principe de la légalité des peines, consacré à l’article 49 de la charte des droits fondamentaux.

193    Par ailleurs, l’intervenante fait valoir que la décision attaquée contient une motivation contradictoire, s’agissant de la question de la responsabilité solidaire de SKW pour le paiement de deux amendes différentes. La Commission aurait clairement indiqué, dans la décision attaquée, que SKW devait être tenue pour solidairement responsable de deux amendes respectivement de 13,3 millions d’euros et de 1,04 million d’euros, et elle les lui aurait infligées, par l’article 2, respectivement, sous f) et sous g), de ladite décision. Cependant, la note en bas de page n° 681 de la décision attaquée indiquerait, de manière contradictoire, que SKW est responsable pour une seule amende et que sa responsabilité solidaire cumulée avec celle des autres destinataires de la décision attaquée ne dépasserait pas le montant de 13,3 millions d’euros. Selon l’intervenante, une telle motivation contradictoire n’est pas conforme à l’article 253 CE et justifie l’annulation de la décision attaquée, pour violation d’une forme substantielle.

194    Le Tribunal relève que l’unité du comportement sur le marché d’une entreprise justifie, aux fins de l’application du droit de la concurrence, que les sociétés ou, plus généralement, les sujets de droit qui peuvent être tenus pour personnellement responsables du comportement de cette entreprise soient tous obligés au paiement de la sanction infligée pour cette infraction (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 14 juillet 1972, Geigy/Commission, 52/69, Rec. p. 787, point 45, et arrêt du Tribunal du 20 mars 2002, HFB e.a./Commission, T‑9/99, Rec. p. II‑1487, points 54, 524 et 525).

195    La notion de responsabilité solidaire de plusieurs personnes pour le paiement d’une seule et même amende infligée pour sanctionner le comportement anticoncurrentiel d’une entreprise sur le marché permet à la Commission d’exiger de chacune desdites personnes le paiement de l’intégralité de l’amende.

196    Dans le cas particulier d’une société qui, telle que SKW en l’espèce, a successivement fait partie de deux entreprises différentes ayant toutes les deux participé à l’infraction, il paraît justifié de lui infliger une amende composée de deux montants distincts pour chacune des périodes correspondant à son appartenance à ces deux entreprises, afin de distinguer le montant pour lequel elle est solidairement responsable avec les sociétés ayant composé la première entreprise, de celui pour lequel elle est solidairement responsable avec les sociétés ayant composé la seconde entreprise.

197    Il s’ensuit que, en l’espèce, l’imposition de deux amendes différentes à SKW était justifiée, au regard de la considération énoncée au point 195 ci-dessus. Toutefois, le présent cas d’espèce présente une particularité, en ce que la somme des montants de ces deux amendes (14,34 millions d’euros) dépasse le montant maximal (13,3 millions d’euros) pour lequel, conformément à la note en bas de page n° 681 de la décision attaquée, SKW est responsable.

198    Cette particularité tient à la décision de la Commission d’appliquer, pour le calcul du montant de l’amende à infliger solidairement à SKW, à SKW Holding et à Arques, un multiplicateur inférieur à celui qui aurait dû être utilisé conformément au paragraphe 24 des lignes directrices. Ce dernier paragraphe prévoit ce qui suit :

« Afin de prendre pleinement en compte la durée de la participation de chaque entreprise à l’infraction, le montant déterminé en fonction de la valeur des ventes […] sera multiplié par le nombre d’années de participation à l’infraction. Les périodes de moins d’un semestre seront comptées comme une demi-année ; les périodes de plus de six mois mais de moins d’un an seront comptées comme une année complète. »

199    En l’espèce, il ressort du tableau figurant au considérant 280 de la décision attaquée que la durée de la participation de SKW au volet de l’entente relatif à la poudre de carbure de calcium était de deux ans et huit mois, alors que sa participation au volet de l’entente relatif au magnésium a duré un an et six mois. S’agissant de SKW Holding, la durée de sa participation au volet de l’entente relatif au magnésium était égale à celle de SKW, alors que sa participation au volet de l’entente relatif à la poudre de carbure de calcium avait duré deux ans et quatre mois. Enfin, selon ce même tableau, la participation de Degussa et d’AlzChem Hart à l’entente a duré quatre mois. Ces indications reflètent le fait que, du début du volet de l’entente relatif à la poudre de carbure de calcium (22 avril 2004 ; voir le considérant 55 de la décision attaquée) jusqu’au 30 août 2004, SKW faisait partie de la même unité économique que Degussa et AlzChem Hart. Pendant cette période, le seul volet de l’entente auquel elle a participé, selon la décision attaquée, était celui relatif à la poudre de carbure de calcium. La Commission lui reproche également d’avoir participé au volet de l’entente relatif au magnésium. Toutefois cette participation concerne une période postérieure au 30 août 2004, la première réunion relative au magnésium mentionnée dans la décision attaquée ayant eu lieu le 14 juillet 2005.

200    Il ressort des indications mentionnées aux points 197 et 198 ci-dessus que SKW aurait dû se voir appliquer, pour sa participation de deux ans et huit mois au volet de l’entente relatif à la poudre de carbure de calcium, un multiplicateur égal à 3. Or, il ressort du tableau figurant au considérant 304 de la décision attaquée que la Commission a décidé de lui appliquer, pour sa participation à ce volet de l’entente, un multiplicateur de 2,5. Dès lors qu’un multiplicateur identique a été appliqué à SKW Holding et à Arques, malgré la durée légèrement moins élevée de leur participation à l’entente, ces deux entreprises et SKW se sont vu infliger la même amende (13,3 millions d’euros). En revanche, si un multiplicateur de 3 avait été retenu pour SKW, s’agissant du volet de l’entente relatif à la poudre de carbure de calcium, le montant de l’amende qui lui aurait été infligée dépasserait la somme (14,34 millions d’euros) des deux amendes pour le paiement desquelles SKW est solidairement responsable.

201    Plus particulièrement, il ressort de la réponse de la Commission à une question écrite du Tribunal que la valeur exacte des ventes de poudre de carbure de calcium réalisées par SKW en relation avec l’infraction, prise en considération pour la fixation du montant de base de l’amende, s’élevait à 16,848 millions d’euros. La proportion de cette valeur à prendre en considération, conformément aux paragraphes 19 à 23 des lignes directrices, pour la détermination du montant de base de l’amende a, en l’espèce, été fixée à 17 % par la Commission, ainsi qu’il ressort du considérant 301 de la décision attaquée. Un semestre supplémentaire de durée de participation de SKW au volet de l’infraction relatif à la poudre de carbure de calcium impliquerait, dès lors, après arrondissement, une augmentation du montant de base de l’amende de 1,4 million d’euros, ce qui porterait le montant de base de l’amende à infliger à SKW à 14,7 millions d’euros.

202    Il s’ensuit que le seul écart par rapport à la méthode de calcul du montant de l’amende énoncée dans les lignes directrices qui pourrait être reproché à la Commission à l’égard de SKW était favorable à cette dernière. Si la Commission s’était tenue strictement aux lignes directrices, SKW aurait été obligée de payer, au titre d’amende, une somme qui dépasserait la somme totale des deux amendes pour le paiement desquelles elle a été tenue comme solidairement responsable, avec d’autres entreprises, dans la décision attaquée. Partant, le grief des requérantes tiré d’une violation, par la Commission, de ses propres lignes directrices (voir point 191 ci‑dessus) n’est pas susceptible de leur procurer un bénéfice et doit être écarté (voir, en ce sens, arrêts de la Cour du 15 mars 1973, Marcato/Commission, 37/72, Rec. p. 361, points 7 et 8, et du Tribunal du 17 mai 2011, Arkema France/Commission, T‑343/08, Rec. p. II‑2287, points 48 et 49).

203    Indépendamment même de cette considération, il convient de relever, en tout état de cause, que le fait que SKW est solidairement responsable pour le paiement de deux amendes différentes, ou, pour reprendre la terminologie utilisée par les requérantes, qu’elle figure dans deux « groupes de responsables » différents, n’exclut pas que sa responsabilité à l’égard d’autres entreprises sanctionnées pour leur participation à l’entente litigieuse soit engagée sur une base juridique distincte de la décision attaquée, pour une somme supérieure au montant de l’amende (13,3 millions d’euros) qui lui a été infligée par la Commission.

204    À cet égard, s’agissant de l’éventualité que d’autres entreprises se retournent vers SKW en demandant le remboursement des sommes qu’elles auraient versées à la Commission en paiement de l’amende et des lettres en ce sens d’Arques et de Degussa versées au dossier par SKW, indépendamment des circonstances particulières des actions évoquées dans ces lettres, il ressort de celles-ci qu’Arques et Degussa invoquent, à l’appui de leurs prétentions, le fait que, selon la décision attaquée, seuls des membres du personnel de SKW étaient impliqués dans l’entente, dans laquelle elles n’auraient pas été elles-mêmes personnellement impliquées. Il s’ensuit que lesdites actions sont fondées sur l’éventuelle responsabilité contractuelle ou délictuelle de SKW à l’égard de ces entreprises, du fait de la participation des membres de son personnel ou de sa direction à l’entente, constatée par la décision attaquée. De telles actions auraient pu être poursuivies, par les entreprises en cause, devant les juridictions nationales compétentes, même en l’absence de reconnaissance, par la décision attaquée, de la responsabilité solidaire de SKW pour le paiement des amendes qui leur ont été infligées. Dès lors, contrairement à ce que semble considérer SKW, le fait que, conformément à la note en bas de page n° 681 de la décision attaquée, sa responsabilité, à l’égard de la Commission, pour le paiement d’une amende, ne peut en aucun cas dépasser 13,3 millions d’euros, ne signifie aucunement qu’elle ne peut pas être obligée, par les juridictions nationales compétentes, de verser à des tiers, du fait de sa participation à l’entente litigieuse, des sommes allant au-delà de ce montant. De telles obligations ne concernent pas la Commission, dont la compétence se limite à l’imposition de la sanction qu’elle estime appropriée pour l’infraction aux règles de la concurrence qu’elle a constatée.

205    Quant à l’affirmation des requérantes, selon laquelle Degussa et AlzChem Hart, dans leur recours contre la décision attaquée, demandent au Tribunal d’augmenter la partie de l’amende qui leur a été infligée pour le paiement de laquelle SKW est solidairement responsable, il suffit de relever qu’il s’agit d’un recours distinct, et ses conclusions ne sauraient être examinées dans le cadre de la présente affaire. Par ailleurs, ce recours parallèle n’est pas pertinent pour juger en l’espèce de la légalité de la démarche de la Commission de tenir SKW pour solidairement responsable pour le paiement de deux amendes différentes, ainsi qu’il ressort également des points 198 à 203 ci‑dessus. En tout état de cause, si SKW estimait qu’elle avait un intérêt à la solution du litige dans le cadre du recours formé par Degussa et AlzChem Hart, elle aurait pu demander à intervenir audit litige, conformément à l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et à l’article 115 du règlement de procédure. En outre, dans l’hypothèse où l’arrêt dans l’affaire concernant le recours de Degussa et d’AlzChem Hart préjudicierait aux droits de SKW, cette dernière pourrait, conformément à l’article 42 du statut de la Cour et à l’article 123 du règlement de procédure, former tierce opposition contre cet arrêt.

206    S’agissant de l’argument des requérantes tiré du principe de légalité des peines, il ne saurait non plus prospérer. Il convient, à cet égard, de rappeler que le principe de légalité des délits et des peines (nullum crimen, nulla poena sine lege), tel que consacré notamment à l’article 49, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux, exige qu’une réglementation de l’Union définisse clairement les infractions et les sanctions (arrêt de la Cour du 29 mars 2011, ThyssenKrupp Nirosta/Commission, C‑352/09 P, Rec. p. I‑2359, point 80), mais ne s’oppose pas à la reconnaissance, à la Commission, d’une marge d’appréciation limitée pour la fixation du montant d’une amende à infliger pour infraction aux règles de la concurrence (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 5 avril 2006, Degussa/Commission, T‑279/02, Rec. p. II‑897, points 74 à 76, et arrêt Schunk et Schunk Kohlenstoff-Technik/Commission, point 164 supra, points 35 et 36).

207    Cependant, indépendamment même de cette dernière considération, il convient de relever que la décision attaquée définit clairement la sanction infligée à SKW, dans la mesure où elle précise que le montant de l’amende qui lui a été infligée est de 13,3 millions d’euros et sa responsabilité ne peut en aucun cas excéder ce montant. L’argument en question des requérantes ne repose, en définitive, que sur la prémisse selon laquelle SKW ne saurait être appelée, du fait de sa participation à l’entente litigieuse, à verser à d’autres entreprises des sommes allant au-delà du montant de l’amende que la Commission lui a infligée par la décision attaquée, prémisse qui, pour les motifs exposés au point 204 ci‑dessus, est erronée.

208    Enfin, s’agissant de l’argument de l’intervenante, selon lequel la motivation de la décision attaquée serait contradictoire, il ne saurait non plus prospérer.

209    Il y a lieu de rappeler, à cet égard, que le dispositif d’un acte est indissociable de sa motivation, de sorte qu’il doit être interprété, si nécessaire, en tenant compte des motifs qui ont conduit à son adoption (voir ordonnance du Tribunal du 30 avril 2007, EnBW Energie Baden‑Württemberg/Commission, T‑387/04, Rec. p. II‑1195, point 127, et la jurisprudence citée).

210    En l’espèce, si, certes, comme le fait valoir l’intervenante, dans le dispositif de la décision attaquée, la Commission a infligé deux amendes différentes à SKW, en la tenant pour solidairement responsable avec différentes autres entreprises pour le paiement de chacune d’entre elles, il ressort clairement des motifs de la même décision qui constituent le support nécessaire de son dispositif et, en particulier, de la note en bas de page n° 681, que le montant maximal que SKW pourrait être appelée à verser à la Commission, au titre d’amende, ne saurait en aucun cas dépasser 13,3 millions d’euros. Cette dernière somme était, au demeurant, compatible avec les différents paramètres pris en considération, selon les motifs de la décision attaquée, pour le calcul du montant de l’amende à infliger à SKW, à savoir, notamment, la valeur des ventes que celle-ci avait réalisées en relation avec l’infraction et le multiplicateur retenu par la Commission pour refléter la durée de sa participation aux différents volets de l’entente.

211    Lu à la lumière de ces motifs, l’article 2, sous f) et g), de la décision attaquée, ne peut qu’être compris en ce sens que la Commission est en droit d’exiger de SKW le paiement tant de l’amende de 13,3 millions d’euros, pour le paiement de laquelle elle a été tenue pour solidairement responsable avec SKW Holding et Arques, que de l’amende de 1,04 million d’euros, pour le paiement de laquelle elle a été tenue pour solidairement responsable avec Degussa et AlzChem Hart, étant, toutefois, précisé que le montant total que SKW doit verser à la Commission, au titre de ces deux amendes, ne doit en aucun cas dépasser 13,3 millions d’euros.

212    Il n’existe, dès lors, aucune contradiction entre les motifs et le dispositif de la décision attaquée et l’argument en sens contraire de l’intervenante doit être rejeté.

213    Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de rejeter la première branche du présent moyen.

–       Sur la deuxième branche, tirée du refus prétendument illégal de la Commission de reconnaître, à l’égard des requérantes, des circonstances atténuantes

214    Dans le cadre de la deuxième branche, les requérantes réitèrent, en substance, leur argumentation, résumée aux points 24 et 45 ci‑dessus, selon laquelle Degussa continuait à exercer un contrôle sur SKW même après la cession de l’intégralité du capital de celle-ci à SKW Holding, et font valoir que la Commission aurait dû tenir compte, dans la décision attaquée, des faits invoqués dans ce contexte, au titre de circonstances atténuantes.

215    Dans son mémoire en défense, la Commission a, notamment, relevé que les affirmations des requérantes résumées ci‑dessus n’ont pas été prouvées et doivent, pour ce seul motif, être rejetées. En réponse à cet argument, les requérantes ont indiqué, dans la réplique, que la Commission n’avait pas fait valoir, durant la procédure administrative, que leurs affirmations n’étaient pas étayées de preuves. Elles ont fourni, en annexe à la réplique, certains éléments de preuve additionnels, pour démontrer l’exactitude matérielle de leurs allégations. Dans la duplique, la Commission a contesté la pertinence de ces preuves.

216    Il n’est aucunement nécessaire, en l’espèce, de prendre position sur le différend entre les parties relatif à l’exactitude matérielle des allégations susvisées des requérantes. Il suffit de relever que, même en partant de la prémisse que ces allégations sont exactes, elles ne sauraient justifier une réduction, au titre de circonstances atténuantes, du montant de l’amende infligée aux requérantes.

217    À cet égard, il convient de relever que, selon une jurisprudence constante, lorsqu’une infraction a été commise par plusieurs entreprises, il y a lieu, dans le cadre de la détermination du montant des amendes, d’examiner la gravité relative de la participation de chacune d’entre elles, ce qui implique, en particulier, d’établir leurs rôles respectifs dans l’infraction pendant la durée de leur participation à celle‑ci. Cette conclusion constitue la conséquence logique du principe d’individualité des peines et des sanctions en vertu duquel une entreprise ne doit être sanctionnée que pour les faits qui lui sont individuellement reprochés, principe qui est applicable dans toute procédure administrative susceptible d’aboutir à des sanctions en vertu des règles de concurrence du droit de l’Union (voir arrêt du Tribunal du 25 octobre 2005, Groupe Danone/Commission, T‑38/02, Rec. p. II‑4407, points 277 et 278, et la jurisprudence citée, et arrêt Ecka, point 185 supra, point 56).

218    Conformément à ces considérations, les lignes directrices prévoient, au paragraphe 29, une modulation du montant de base de l’amende en fonction de certaines circonstances atténuantes propres à chaque entreprise concernée. Ce paragraphe établit, en particulier, une liste non exhaustive de circonstances atténuantes susceptibles d’être prises en compte (arrêt Ecka, point 185 supra, point 57). Toutefois, cette liste n’étant qu’indicative, la prise en considération, à ce titre, d’autres circonstances n’est pas exclue, sous condition que celles-ci soient aptes à démontrer que la gravité relative de la participation de ladite entreprise à l’infraction est moins importante (voir, en ce sens, arrêt Novácke chemické závody/Commission, point 165 supra, point 94).

219    En l’espèce, les circonstances alléguées par les requérantes dans le cadre de la présente branche ne correspondent à aucune des cinq hypothèses de circonstances atténuantes énoncées, à titre indicatif, au paragraphe 29 des lignes directrices. Les requérantes n’ont, d’ailleurs, pas allégué que les circonstances qu’elles invoquaient correspondaient à l’une ou l’autre de ces hypothèses.

220    En outre, si les requérantes ont exposé de manière suffisamment détaillée la manière selon laquelle, d’après elles, Degussa avait continué à « contrôler à distance » SKW même après la cession de l’intégralité de son capital à SKW Holding, en revanche, elles n’ont exposé, ni dans leurs écrits ni lors de l’audience, les raisons pour lesquelles cette circonstance serait susceptible de démontrer que la gravité de la participation de ces deux dernières sociétés à l’infraction serait moins importante. Tenant également compte de l’absence d’une argumentation en ce sens, il y a lieu de relever que rien dans les faits invoqués par les requérantes n’autorise une telle conclusion.

221    En effet, les requérantes ne contestent pas la participation directe des membres de la direction ou du personnel de SKW dans l’entente litigieuse (voir également point 46 ci‑dessus). En ce qui concerne, en particulier, M. N., mentionné par les requérantes également dans ce contexte, si elles affirment qu’il était, formellement, un employé de Degussa, elles ne contestent pas que, durant la période infractionnelle, il travaillait, dans les faits, pour le compte de SKW (voir également point 45 ci‑dessus). Quant à SKW Holding, ainsi qu’il a déjà été relevé (voir point 48 ci‑dessus), elle n’a été tenue responsable de l’infraction qu’au seul motif qu’elle faisait partie, avec SKW, de la même unité économique. Cette dernière conclusion a, par ailleurs, été approuvée dans le cadre de l’analyse du deuxième moyen.

222    Dans ces circonstances, même à accepter que, comme les requérantes semblent l’affirmer, c’était Degussa qui avait incité certains collaborateurs de SKW à participer, pour le compte de cette dernière, à l’infraction, ce seul fait ne saurait démontrer que la gravité de la participation de SKW (et, par voie de conséquence, de SKW Holding) à l’infraction était moins importante.

223    En outre, il convient de relever que les requérantes n’ont pas allégué que leur argumentation relative au rôle de Degussa après la cession de l’intégralité du capital de SKW pourrait constituer une circonstance atténuante au titre de la coopération, au sens du paragraphe 29, quatrième tiret, des lignes directrices. En tout état de cause, la Commission n’a pas constaté, dans la décision attaquée, une participation de Degussa à l’infraction après la cession du capital de SKW, de sorte qu’il ne saurait être question d’une coopération efficace des requérantes à cet égard.

224    Les requérantes allèguent également que c’était Degussa qui percevait la majeure partie des bénéfices de l’entente, alors que SKW ne percevait qu’une commission sur le prix de vente net. Indépendamment même des considérations exposées, à ce sujet, au point 160 ci‑dessus, il convient de relever que les requérantes ne contestent pas que SKW avait tiré un bénéfice de sa participation à l’infraction. Sans qu’il soit nécessaire de s’interroger sur les conséquences, pour Degussa, du fait allégué qu’elle tirait un bénéfice de l’infraction même après la fin de la période de sa participation à celle-ci constatée par la décision attaquée, il suffit de relever que ce fait, à le supposer exact, ne démontre nullement que la gravité relative de la participation de SKW à l’infraction était moins importante.

225    En tout état de cause, il y a lieu de rappeler la jurisprudence constante, selon laquelle, si le montant de l’amende infligée doit être proportionné à la durée de l’infraction et aux autres éléments de nature à entrer dans l’appréciation de la gravité de l’infraction, parmi lesquels figure le profit que l’entreprise concernée a pu retirer de ses pratiques, le fait qu’une entreprise n’ait retiré aucun bénéfice de l’infraction ne saurait faire obstacle à ce qu’une amende soit infligée, sous peine de faire perdre à cette dernière son caractère dissuasif. Il s’ensuit que la Commission n’est pas tenue, en vue de fixer le montant des amendes, de prendre en considération l’absence de bénéfice tiré de l’infraction en cause (voir arrêt du Tribunal du 25 juin 2010, Imperial Chemical Industries/Commission, T‑66/01, Rec. p. II‑2631, point 443, et la jurisprudence citée).

226    Enfin, les requérantes rappellent que la participation de SKW à l’infraction avait commencé avant son acquisition par SKW Holding, lorsque celle-ci faisait encore partie de la même unité économique que Degussa. Elles considèrent, dès lors, que la Commission aurait dû prendre en considération, au titre de circonstance atténuante, le fait que SKW Holding avait acquis une entreprise qui participait déjà à une infraction.

227    Cet argument ne saurait non plus prospérer. Ainsi qu’il a déjà été relevé (voir point 221 ci‑dessus), SKW Holding a été tenue pour responsable de l’infraction du seul fait que, depuis son acquisition de l’intégralité du capital de SKW, elle faisait partie de la même unité économique que cette dernière, en d’autres termes de l’entreprise impliquée dans l’infraction. Le seul fait que cette implication avait commencé auparavant n’est en rien susceptible de démontrer que la gravité relative de sa continuation, durant la période pendant laquelle SKW et SKW Holding constituaient une unité économique, était moins importante.

228    Partant, il convient de rejeter la deuxième branche du présent moyen.

–       Sur la troisième branche, tirée du refus de la Commission d’accorder aux requérantes une réduction du montant de l’amende au titre de la coopération de Degussa

229    Par la troisième branche, les requérantes font valoir que la Commission aurait dû réduire le montant de l’amende qui leur a été infligée au même titre que la réduction du montant de l’amende accordée à Degussa en vertu de la communication sur la clémence.

230    Il y a lieu de relever, à cet égard, que, ainsi qu’il ressort du considérant 350 de la décision attaquée, le 26 février 2007, Degussa a présenté une demande au sens de la communication sur la clémence. Il ressort des considérants 351 et 352 de la décision attaquée que, dans ce contexte, elle a fourni à la Commission des éléments qui ont renforcé la capacité de cette dernière à prouver les faits de l’infraction, en ce qui concerne, en particulier, les granulés de magnésium. La Commission a, dès lors, décidé d’accorder à Degussa une réduction de 20 % du montant de l’amende qui allait lui être infligée, en récompense de sa coopération (considérant 356 de la décision attaquée). Dès lors qu’AlzChem Hart s’est vu infliger la même amende que Degussa, la même réduction a été accordée également à celle‑ci.

231    En revanche, la Commission a rejeté, au considérant 357 de la décision attaquée, une demande d’Arques tendant à bénéficier de la réduction du montant de l’amende accordée à Degussa. La Commission a relevé, à cet égard, ce qui suit :

« [Arques] affirme que [SKW et SKW Holding] (y compris [Arques]) devrai[ent] bénéficier de la demande de clémence de Degussa, car les preuves fournies par Degussa proviennent d’un employé qui travaillait de facto pour SKW pendant la durée de l’entente […] Cette demande doit être rejetée. Degussa a déposé sa demande en son propre nom et non pas pour le compte de [SKW et SKW Holding]. »

232    Les requérantes reprochent à la Commission, à cet égard, une interprétation contradictoire de la notion d’entreprise, laquelle divergerait selon le contexte. Alors que, aux fins de l’application de l’article 81 CE, la Commission aurait considéré SKW et Degussa comme faisant partie de la même entreprise, pour les besoins de l’application de la communication sur la clémence, la Commission n’aurait accordé une réduction de l’amende qu’à Degussa, au motif qu’elle avait introduit la demande de clémence en son propre nom seulement. Il en résulte, selon les requérantes, une inégalité de traitement injustifiée à leur détriment.

233    Cette argumentation ne saurait prospérer.

234    Il est vrai que, comme le font observer les requérantes, la communication sur la clémence vise, selon ses termes mêmes, les entreprises. En particulier, selon le paragraphe 4 de ladite communication, la « Commission estime qu’il est de l’intérêt de [l’Union] de faire bénéficier d’un traitement favorable les entreprises qui coopèrent avec elle ».

235    Or, il convient de constater, d’emblée, que, selon la décision attaquée, qui n’a pas été contestée sur ce point par les requérantes, Degussa et SKW Holding n’ont jamais fait partie de la même entreprise.

236    En revanche, s’agissant de SKW, la Commission a considéré qu’elle faisait partie de la même entreprise que Degussa jusqu’à la cession de l’intégralité de son capital, le 30 août 2004, à SKW Holding. À partir de cette date et jusqu’à la fin de l’infraction, elle a constitué, ainsi qu’il a déjà été jugé, une unité économique avec SKW Holding.

237    Compte tenu également des considérations exposées aux points 235 et 236 ci-dessus, il y a lieu de relever que rien dans la décision attaquée ne confirme la thèse des requérantes, selon laquelle la Commission a adopté, aux fins de l’application de la communication sur la clémence, une interprétation de la notion d’entreprise différente de celle qu’elle a utilisée aux fins de l’application de l’article 81 CE. En réalité, le fait que, durant la période infractionnelle, SKW a fait partie de la même unité économique successivement avec Degussa et avec SKW Holding ne pose pas un problème d’interprétation de la notion d’entreprise, dont il est évident qu’elle doit être interprétée de la même manière aux fins de l’application tant de l’article 81 CE que de la communication sur la clémence. La question qui se pose est celle de savoir quelle sera la composition d’une entreprise à retenir aux fins de l’application de la communication sur la clémence, en cas de modification de sa composition, comme en l’espèce. Concrètement, la question se pose de savoir s’il convient de faire bénéficier de la communication sur la clémence l’entreprise dans sa composition au moment des faits litigieux ou dans sa composition au moment de la présentation de la demande d’application de la communication sur la clémence.

238    Or, il ressort de la finalité de la communication sur la clémence que c’est la seconde de ces deux options qu’il convient de retenir. En effet, en offrant aux entreprises la possibilité d’une récompense, sous forme d’immunité d’amende ou de réduction du montant de l’amende, cette communication vise à les inciter à coopérer avec la Commission et à faciliter, ainsi, les actions entreprises par cette dernière pour mettre fin aux infractions aux règles de la concurrence et pour les sanctionner. Il est logique, compte tenu de cette finalité, de faire bénéficier de la coopération non seulement l’entité ayant présenté la demande de clémence, mais également l’ensemble de l’entreprise dont celle-ci fait partie. D’une part, s’agissant d’une unité économique dont le comportement est déterminé de manière centralisée, la coopération d’une des entités la composant suppose nécessairement et implique la coopération des autres entités faisant partie de la même entreprise au moment où cette coopération est fournie. D’autre part, accorder une réduction du montant de l’amende à une seule des entités d’une entreprise qui ont toutes été tenues pour responsables pour l’infraction, priverait cette réduction d’effet utile, dès lors que l’entreprise devrait, en tout état de cause, supporter l’amende non réduite infligée aux autres entités qui la composent.

239    En revanche, rien dans la finalité de la communication sur la clémence ne justifie l’extension de la réduction du montant de l’amende accordée en vertu de la communication sur la clémence également aux entités qui, tout en ayant appartenu, au moment de l’infraction, à la même entreprise que celle à laquelle appartient l’entité ayant coopéré avec la Commission, ont quitté cette entreprise avant la présentation de la demande visant à bénéficier de ladite communication.

240    Dès lors que le 26 février 2007, lorsque Degussa a présenté une demande en vue de bénéficier de la communication sur la clémence (voir considérant 350 de la décision attaquée), ni SKW ni SKW Holding ne faisaient partie de la même entreprise qu’elle, il s’ensuit que ces dernières ne sauraient bénéficier de la réduction du montant de l’amende qui lui a été accordée (voir également, en ce sens, arrêt du Tribunal du 30 septembre 2009, Hoechst/Commission, T‑161/05, Rec. p. II‑3555, point 75).

241    Les requérantes font également valoir qu’elles ont été empêchées de coopérer avec la Commission par Degussa, laquelle a interdit à M. N. de communiquer avec elles. M. L., qui serait « contrôlé à distance » par Degussa, leur aurait également caché certaines informations. Par ailleurs, les informations procurées à la Commission par Degussa proviendraient essentiellement de M. N., dont la Commission reconnaît que, tout en étant formellement un employé de Degussa, il fournissait ses services à SKW. En refusant de prendre en considération l’ensemble de ces éléments, la Commission prouverait une fois encore qu’elle n’avait pas suffisamment prêté attention à l’argumentation avancée par les requérantes dans leur réponse à la communication des griefs.

242    Cette argumentation ne saurait prospérer. Il ne ressort aucunement de la décision attaquée ou des éléments du dossier que les requérantes aient eu l’intention de coopérer avec la Commission. Il convient de souligner, à cet égard, que les requérantes n’ont à aucun moment de la procédure administrative présenté une demande en vue de bénéficier de la communication sur la clémence.

243    Indépendamment même de cette considération, il convient de relever, en tout état de cause, que, compte tenu de la finalité de la communication sur la clémence, telle qu’elle a été exposée au point 238 ci‑dessus, une entreprise qui n’a pas fourni une coopération effective à la Commission ne saurait bénéficier de l’immunité d’amende ou de la réduction du montant de l’amende prévues par cette communication. Est, à cet égard, indifférente la question de savoir si la non-coopération résulte d’une absence de volonté de coopérer ou si elle tient, plutôt, à des raisons objectives, indépendantes de la volonté des responsables de l’entreprise concernée. Même dans cette dernière hypothèse, il demeure que l’entreprise en question n’a fourni aucune coopération et ne saurait, dès lors, prétendre aux récompenses prévues pour une coopération efficace.

244    En outre, il convient également de relever qu’une entreprise qui a la volonté de coopérer avec la Commission, mais qui se voit empêchée, pour des raisons objectives, de mettre à la disposition de cette dernière des éléments de preuve qui pourraient lui être utiles, peut, à tout le moins, l’informer, par une demande en vue de bénéficier de la communication sur la clémence, de l’existence de ces éléments et des motifs pour lesquels elle ne peut pas elle-même les lui transmettre.

245    Au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de conclure qu’aucune violation du principe d’égalité de traitement ne saurait être reprochée à la Commission, du fait de son refus d’étendre aux requérantes le bénéfice de la réduction du montant de l’amende accordée à Degussa. Compte tenu du contenu de ce principe, tel que défini dans la jurisprudence (voir point 153 ci‑dessus), il convient de relever que, dès lors que les requérantes ne faisaient pas partie de la même entreprise que Degussa au moment où cette dernière a coopéré avec la Commission et qu’elles n’ont pas fourni une coopération analogue, leur situation n’était pas comparable, de sorte que le principe d’égalité de traitement ne s’opposait pas à ce qu’elles soient traitées, concernant cette réduction, de manière différente par rapport à Degussa.

246    Il convient, dès lors, de rejeter la troisième branche du présent moyen.

–       Sur la quatrième branche, tirée d’une violation des articles 7 et 23 du règlement n° 1/2003 ainsi que du principe de proportionnalité, en ce que SKW est solidairement responsable de l’augmentation, au titre de la récidive, du montant de l’amende infligée à Degussa

247    Dans le cadre de la quatrième branche, les requérantes font valoir que la Commission a violé les articles 7 et 23 du règlement n° 1/2003, ainsi que le principe de proportionnalité, du fait qu’elle a condamné SKW et, par voie de conséquence, SKW Holding, à supporter une charge financière plus importante, dès lors que le montant de base de l’amende infligée à Degussa, pour le paiement de laquelle SKW est solidairement responsable, a été augmenté de 50 %, pour cause de récidive.

248    Force est de constater que cette branche est fondée sur une prémisse erronée et doit, pour ce motif, être rejetée comme non fondée. Ainsi que le fait observer à juste titre la Commission, en vertu de l’article 2, sous g), de la décision attaquée, SKW n’est responsable que d’une partie de l’amende infligée à Degussa, qui s’élève à 1,04 million d’euros. Ce montant ne tient compte ni de l’augmentation du montant de l’amende infligée à Degussa au titre de la récidive, ni même, comme le précise la Commission, du droit d’entrée (voir également point 147 ci‑dessus), inclus dans le montant de l’amende infligée à Degussa aux fins de dissuasion.

249    En effet, il ressort du tableau figurant au considérant 308 de la décision attaquée que le montant de base de l’amende à infliger à Degussa, avant augmentation au titre de la récidive (dont il est question au considérant 332 de la décision attaquée), s’élevait à 3,9 millions d’euros. Il ressort du tableau figurant au considérant 304 de la décision attaquée que, pour refléter sa durée de participation à l’infraction, Degussa s’est vu imposer un multiplicateur de 0,5. Il s’ensuit que deux tiers du montant susmentionné de 3,9 millions d’euros (à savoir 2,6 millions d’euros) représentent le droit d’entrée (qui correspond à un multiplicateur de 1) et un tiers (à savoir 1,3 million d’euros) la partie du montant de l’amende correspondant à la durée de participation de Degussa à l’infraction. Ce dernier montant de 1,3 million d’euros, réduit de 20 % pour refléter la coopération de Degussa avec la Commission (voir considérant 356 de la décision attaquée), correspond au montant de 1,04 million d’euros, pour le paiement duquel SKW est solidairement responsable avec Degussa.

250    Il résulte des considérations qui précèdent que la quatrième branche du présent moyen ne saurait pas non plus prospérer.

–       Sur la cinquième branche, tirée de l’inclusion erronée du droit d’entrée dans le montant de l’amende infligée à SKW Holding

251    Par la cinquième branche du cinquième moyen, les requérantes reprochent à la Commission une violation de l’article 23, paragraphe 3, du règlement n° 1/2003, ainsi que des principes d’égalité de traitement et de proportionnalité, du fait qu’elle a inclus, dans le montant de l’amende infligée à SKW Holding, le droit d’entrée. Les requérantes rappellent que, selon le paragraphe 25 des lignes directrices, le droit d’entrée vise à dissuader les entreprises de participer à des accords horizontaux de fixation de prix, de répartition de marché et de limitation de production. Or, une telle dissuasion n’aurait aucun sens à l’égard de SKW Holding, laquelle, en tant qu’investisseur financier, aurait, en toute ignorance, acquis une entreprise (SKW) déjà impliquée dans l’entente. Il s’ensuit, selon les requérantes, qu’il n’était pas nécessaire d’inclure dans le montant de l’amende à infliger à SKW Holding le droit d’entrée, « étant donné que SKW [Holding] ne participait à un acte illégal ni volontairement ni par négligence, mais que la [Commission] souhait[ait] seulement lui imputer l’infraction ». Les requérantes considèrent, en conclusion, que le montant de l’amende à infliger à SKW Holding n’aurait pas dû dépasser 2,488 millions d’euros.

252    Il y a lieu de relever que les requérantes avaient avancé une argumentation analogue dans leur réponse à la communication des griefs, laquelle a été rejetée au considérant 307 de la décision attaquée. Celui-ci est libellé de la manière suivante :

« SKW fait remarquer que le montant additionnel ajouté à des fins dissuasives devrait s’appliquer uniquement à l’entité juridique qui a directement participé à l’infraction […] Cependant, les amendes sont infligées aux entreprises et, après avoir établi l’infraction, la Commission détermine un montant d’amende et identifie les entités juridiques au sein de l’entreprise qui sont tenues pour responsables du paiement de cette amende. Elle ne fait pas de différence entre ces entités juridiques pour le calcul de l’amende […] »

253    Comme l’a fait remarquer, en substance, la Commission au considérant 307 de la décision attaquée, l’argumentation concernée par la présente branche est fondée sur une prémisse erronée, en ce qu’elle méconnaît que SKW Holding s’est vu infliger une amende au motif qu’elle faisait partie de la même entreprise que SKW et, de ce fait, est censée avoir participé de manière directe à l’infraction (voir point 82 ci‑dessus ; voir également, en ce sens, arrêt Schunk et Schunk Kohlenstoff‑Technik/Commission, point 164 supra, point 74). En effet, s’il en était autrement, ce ne serait pas seulement l’inclusion, dans le montant de l’amende infligée à SKW Holding, du droit d’entrée qui serait illégale, mais l’imposition d’une amende, en tant que telle, à cette entreprise. Par ailleurs, il a déjà été relevé que le deuxième moyen, par lequel SKW Holding conteste la conclusion de la décision attaquée, selon laquelle, lors de la plus grande partie de la période infractionnelle, elle faisait partie de la même entreprise que SKW, doit être rejeté.

254    Les requérantes reprochent également à la Commission de ne pas avoir fait usage de son pouvoir d’appréciation, s’agissant de la détermination du pourcentage approprié à utiliser aux fins de la détermination du droit d’entrée. Elles rappellent, dans ce contexte, que, dans une décision relative à une autre affaire, la Commission avait fixé ce pourcentage à 15 % de la valeur des ventes réalisées en relation avec l’infraction, malgré une durée d’infraction plus importante qu’en l’espèce.

255    Cet argument ne saurait non plus prospérer. D’emblée, il convient d’écarter, comme dépourvue de pertinence, la référence des requérantes à une décision de la Commission dans une autre affaire (voir point 86 ci‑dessus).

256    Ensuite, il y a lieu de rappeler que, aux termes du paragraphe 25 des lignes directrices, « [e]n vue de décider la proportion de la valeur des ventes à prendre en compte dans un cas donné [aux fins de la fixation du droit d’entrée], la Commission tiendra compte d’un certain nombre de facteurs, en particulier ceux identifiés au [paragraphe] 22 ». Selon ce dernier paragraphe, les facteurs à prendre en considération « [a]fin de décider si la proportion de la valeur des ventes […] devrait être au bas ou au haut de [l’]échelle [incluent] la nature de l’infraction, la part de marché cumulé de toutes les parties concernées, l’étendue géographique de l’infraction et la mise en œuvre ou non de l’infraction ». Il convient, en outre, de rappeler que l’échelle des pourcentages de ventes à utiliser aux fins de la détermination du droit d’entrée s’étend de 15 à 25 %, conformément au paragraphe 25, première phrase, des lignes directrices.

257    En l’espèce, il y a lieu de rappeler, premièrement, que, ainsi que l’a relevé la Commission au considérant 294 de la décision attaquée, au demeurant non contesté par les requérantes, l’infraction litigieuse « a consisté en une entente à plusieurs facettes incluant un partage du marché et la répartition des clients, la fixation de prix horizontaux et de quotas, ainsi que des échanges d’informations sensibles concernant les prix, les clients et les volumes. Une telle infraction compte, par sa nature même, parmi les restrictions de concurrence les plus graves, dans la mesure où elle fausse le jeu de la concurrence sur les principaux paramètres de celle-ci ».

258    Deuxièmement, s’agissant de la part de marché cumulée de toutes les parties concernées ainsi que de l’étendue géographique de l’infraction, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il ressort de l’article 1er de la décision attaquée, l’infraction litigieuse a couvert l’ensemble de l’EEE à l’exception de l’Irlande, de l’Espagne, du Portugal et du Royaume‑Uni. En outre, il ressort du tableau figurant au considérant 46 de la décision attaquée, dont les données n’ont pas non plus été contestées par les requérantes, que la part de marché cumulée des entreprises ayant participé à l’infraction s’élevait à au moins 80 % pour la poudre de carbure de calcium, à 65 % pour les granulés de carbure de calcium et à 70 % pour le magnésium.

259    Troisièmement, enfin, il peut être déduit de la décision attaquée et les requérantes n’allèguent, d’ailleurs, pas le contraire, que, en règle générale, les accords et pratiques concernées par l’infraction ont été mis en œuvre.

260    Les facteurs mentionnés aux points 257 à 259 ci-dessus plaidaient, dès lors, pour le choix, aux fins de la fixation du droit d’entrée en l’espèce, d’une proportion des valeurs des ventes réalisées en relation avec l’infraction qui se situerait vers le haut de l’échelle mentionnée au point 256 ci‑dessus.

261    Dans leurs écrits, les parties s’opposent également sur la question de savoir si la durée de l’infraction doit également être prise en considération à cet égard. La Commission rappelle, à juste titre, que la durée de la participation de chaque entreprise dans l’infraction est reflétée dans le composant du montant de base déterminé en fonction des années de participation (paragraphe 24 des lignes directrices) et que, aux termes mêmes du paragraphe 25 des lignes directrices, le droit d’entrée est à déterminer « indépendamment de la durée de la participation d’une entreprise à l’infraction ». S’agissant de la durée de l’infraction en elle-même (indépendamment de la durée de la participation de chaque entreprise à celle-ci), il convient de constater que le même paragraphe des lignes directrices laisse à la Commission une certaine marge de manœuvre, s’agissant des facteurs à prendre en considération aux fins de la détermination du droit d’entrée et, par conséquent, il ne saurait a priori être exclu qu’elle puisse être prise en considération dans ce contexte. Toutefois, en l’espèce, même à supposer qu’elle aurait dû être prise en considération, elle est d’environ 33 mois (du 22 avril 2004 au 16 janvier 2007 ; voir article 1er de la décision attaquée) et ne constitue pas non plus un facteur plaidant pour le choix, aux fins de la fixation du droit d’entrée, d’un pourcentage situé vers le bas de l’échelle pertinente.

262    Il ressort de ces considérations qu’aucune erreur ne saurait être reprochée à la Commission, en ce qu’elle a choisi le pourcentage de 17 %, et non un pourcentage inférieur, aux fins de la détermination du droit d’entrée. Par ailleurs, dès lors que, conformément à l’article 31 du règlement n° 1/2003, le Tribunal dispose d’une compétence de pleine juridiction en la matière et peut, notamment, supprimer l’amende infligée ou réduire son montant, il convient au regard de ces mêmes considérations, de ne pas réduire ledit pourcentage, mais de maintenir celui-ci et, partant, le montant de l’amende infligée aux requérantes, en l’état.

263    Il convient, dès lors, de rejeter la cinquième branche du cinquième moyen et, par voie de conséquence, ce moyen dans son intégralité.

 Sur le sixième moyen, tiré d’une violation de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003

264    Par le sixième moyen, les requérantes reprochent à la Commission une violation de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, en ce qu’elle a fixé, dans la décision attaquée, le montant maximal des amendes pour le paiement duquel SKW est responsable à 13,3 millions d’euros. Les requérantes relèvent que, au cours du dernier exercice social complet précédant l’adoption de la décision attaquée, à savoir celui de 2008, SKW avait réalisé un chiffre d’affaires global de 62,232 millions d’euros et que, par conséquent, même si tous les autres moyens invoqués dans le cadre du présent recours ne devaient pas aboutir, le montant de l’amende à lui infliger ne saurait dépasser 6,2232 millions d’euros.

265    L’article 23, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement n° 1/2003 prévoit que la Commission « peut, par voie de décision, infliger des amendes aux entreprises et associations d’entreprises » notamment lorsque « de propos délibéré ou par négligence […] elles commettent une infraction aux dispositions de l’article 81 [CE] ou 82 [CE] ». Toutefois, aux termes du deuxième alinéa du même paragraphe, « [p]our chaque entreprise et association d’entreprises participant à l’infraction, l’amende n’excède pas 10 % de son chiffre d’affaires total réalisé au cours de l’exercice précédent ».

266    Selon une jurisprudence constante, la circonstance selon laquelle plusieurs sociétés sont solidairement tenues au paiement d’une amende au motif qu’elles forment une entreprise au sens de l’article 81 CE n’implique pas, en ce qui concerne l’application du plafond prévu par l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, que l’obligation de chacune se limite à 10 % du chiffre d’affaires qu’elle a réalisé durant le dernier exercice social. En effet, le plafond de 10 %, au sens de cette disposition, doit être calculé sur la base du chiffre d’affaires cumulé de toutes les sociétés constituant l’entité économique unique agissant en tant qu’entreprise au sens de l’article 81 CE, puisque seul le chiffre d’affaires cumulé des sociétés composantes peut constituer une indication de la taille et de la puissance économique de l’entreprise en question (voir arrêt du 12 décembre 2007, Akzo Nobel e.a./Commission, point 93 supra, point 90, et la jurisprudence citée).

267    L’éventualité, évoquée par les requérantes dans leur réplique d’une dissolution, postérieurement à l’adoption de la décision attaquée, de l’unité économique que constitue l’entreprise en question, ne saurait conduire à une conclusion différente, le montant approprié de l’amende à infliger devant être déterminé sur la base de la situation telle qu’elle existe au moment de l’adoption de la décision attaquée et non sur la base de simples hypothèses à l’égard de développements futurs possibles.

268    En l’espèce, il a déjà été relevé, dans le cadre de l’analyse du deuxième moyen, que la Commission a considéré, à juste titre, que SKW et SKW Holding constituaient une seule et même entreprise. Partant, conformément à la jurisprudence citée au point 266 ci‑dessus, il convenait, aux fins du calcul du plafond de l’amende prévu à l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003, de prendre en considération leurs chiffres d’affaires cumulés. Ainsi qu’il ressort du considérant 32 de la décision attaquée, non contesté par les requérantes, celui-ci s’élevait, pour le dernier exercice social complet précédant l’adoption de la décision attaquée, à 377 millions d’euros. Il s’ensuit que la Commission n’a pas violé la disposition susmentionnée, de sorte que le présent moyen doit être rejeté. Au surplus, le Tribunal, dans l’exercice de sa compétence de pleine juridiction quant au montant de l’amende infligée aux requérantes, considère, en tout état de cause, que ce montant est approprié au regard des circonstances de l’espèce, en particulier celles tenant à la gravité et à la durée de l’infraction constatée par la Commission ainsi qu’aux ressources économiques des requérantes. Partant, il convient de rejeter le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

269    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérantes ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

270    La Commission n’ayant pas conclu à la condamnation de l’intervenante aux dépens liés à son intervention, il suffit d’ordonner que l’intervenante supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (troisième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      SKW Stahl-Metallurgie Holding AG et SKW Stahl-Metallurgie GmbH supporteront, outre leurs propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne.

3)      Gigaset AG supportera ses propres dépens.

Czúcz

Labucka

Gratsias

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 23 janvier 2014.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur le premier moyen, tiré de la violation du droit d’être entendu

Sur le deuxième moyen, tiré d’une application erronée de l’article 81 CE

Rappel de la jurisprudence pertinente

Décision attaquée

– Sur la première branche, tirée d’une erreur de droit dans l’imputation à SKW Holding de la responsabilité pour l’infraction commise par SKW

– Sur les deuxième à quatrième branches, tirées, respectivement, d’une appréciation erronée des faits par la Commission, d’une erreur de droit en ce que la Commission a soumis le renversement de la présomption capitalistique à des exigences impossibles à respecter et d’une violation, par la Commission, de son devoir d’enquêter d’office sur les faits pertinents

– Sur le grief tiré de l’arrêt Siemens évoqué lors de l’audience

Sur le troisième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

Sur le quatrième moyen, tiré de la violation du principe d’égalité de traitement en raison du traitement discriminatoire de SKW par rapport à Almamet

Sur la première branche, relative au chiffre d’affaires utilisé pour le calcul du montant de base de l’amende

– Sur la seconde branche, relative à la réduction exceptionnelle de 20 % du montant de l’amende accordée à Almamet

Sur le cinquième moyen, tiré de la violation des articles 7 et 23 du règlement n° 1/2003 ainsi que des principes de proportionnalité et de légalité des peines

– Sur la première branche, tirée de l’inclusion erronée de SKW dans deux groupes d’entreprises responsables pour le paiement de deux amendes différentes

– Sur la deuxième branche, tirée du refus prétendument illégal de la Commission de reconnaître, à l’égard des requérantes, des circonstances atténuantes

– Sur la troisième branche, tirée du refus de la Commission d’accorder aux requérantes une réduction du montant de l’amende au titre de la coopération de Degussa

– Sur la quatrième branche, tirée d’une violation des articles 7 et 23 du règlement n° 1/2003 ainsi que du principe de proportionnalité, en ce que SKW est solidairement responsable de l’augmentation, au titre de la récidive, du montant de l’amende infligée à Degussa

– Sur la cinquième branche, tirée de l’inclusion erronée du droit d’entrée dans le montant de l’amende infligée à SKW Holding

Sur le sixième moyen, tiré d’une violation de l’article 23, paragraphe 2, du règlement n° 1/2003

Sur les dépens


* Langue de procédure : l’allemand.