Language of document : ECLI:EU:T:2016:489

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

15 septembre 2016(*)

« Dispositions particulières et dérogations applicables aux fonctionnaires affectés dans un pays tiers – Carrière des fonctionnaires ayant le grade d’administrateur – Modification du statut des fonctionnaires de l’Union – Règlement (UE, Euratom) n° 1023/2013 – Irrégularités au cours de la procédure d’adoption des actes – Défaut de consultation du comité du statut et des organisations syndicales »

Dans l’affaire T‑17/14,

Union pour l’Unité (U4U), établie à Bruxelles (Belgique),

Unité & solidarité – Hors Union (USHU), établie à Bruxelles,

Regroupement Syndical (RS), établi à St Josse ten Noode (Belgique),

Georges Vlandas, demeurant à Bruxelles,

représentés par Me F. Krenc, avocat,

parties requérantes,

contre

Parlement européen, représenté par M. A. Troupiotis et Mme E. Taneva, en qualité d’agents,

et

Conseil de l’Union européenne, représenté initialement par MM. M. Bauer et A. Bisch, puis par M. Bauer, Mme M. Veiga et M. J. Herrmann, en qualité d’agents,

parties défenderesses,

soutenus par

Commission européenne, représentée initialement par MM. J. Currall et G. Gattinara, puis par M. Gattinara et Mme F. Simonetti, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de l’article 1er, paragraphes 27, 61, 70 et paragraphe 73, sous k), du règlement (UE, Euratom) n° 1023/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2013, modifiant le statut des fonctionnaires de l’Union européenne et le régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (JO 2013, L 287, p. 15), en ce que ces dispositions modifient l’article 45 et les annexes I, X et XIII dudit statut, annexé au règlement n° 31 (CEE)/11 (CEEA), fixant le statut des fonctionnaires et le régime applicable aux autres agents de la Communauté économique européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique (JO 1962, 45, p. 1385),

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. D. Gratsias, président, Mme M. Kancheva (rapporteur) et M. C. Wetter, juges,

greffier : Mme G. Predonzani, administrateur,

vu la phase écrite de la procédure et l’audience du 4 février 2016,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») et le régime applicable aux autres agents de l’Union (ci-après le « RAA ») sont annexés au règlement n° 31 (CEE)/11 (CEEA), fixant le statut des fonctionnaires et le régime applicable aux autres agents de la Communauté économique européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique (JO 1962, 45, p. 1385).

2        Le statut et le RAA ont été modifiés à de nombreuses reprises depuis leur adoption, notamment par le règlement (UE, Euratom) n° 1023/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2013 (JO 2013, L 287, p. 15).

3        En particulier, l’article 1er, paragraphes 27, 61, 70 et paragraphe 73, sous k), du règlement n° 1023/2013 a modifié l’annexe X du statut, relative aux dispositions particulières et dérogatoires applicables aux fonctionnaires affectés sur le territoire d’un État tiers, ainsi que l’article 45 et les annexes I et XIII du statut, relatifs à la carrière des fonctionnaires ayant le grade d’administrateur.

4        La procédure qui a conduit à l’adoption du règlement n° 1023/2013 a débuté le 7 septembre 2011, par la consultation des organisations syndicales ou professionnelles (ci-après les « OSP ») sur un projet de révision du statut. Des concertations administratives, techniques et politiques entre la Commission européenne et les OSP ont ensuite eu lieu à cet égard, respectivement le 6 octobre 2011, le 28 octobre 2011 et le 7 novembre 2011.

5        Par lettre du 21 novembre 2011, la Commission a ensuite saisi le comité du statut d’une proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le statut et le RAA (ci-après la « proposition de modification du statut »).

6        Par un courrier du 12 décembre 2011, le comité du statut a informé la Commission qu’il avait bien examiné la proposition de modification du statut, mais que, compte tenu des suffrages exprimés, la majorité requise par l’article 20 de son règlement intérieur pour qu’il puisse émettre un avis sur cette proposition n’avait pas été atteinte.

7        Par lettre du 13 décembre 2011, la Commission a transmis au Parlement européen et au Conseil de l’Union européenne la proposition de modification du statut.

8        Le 25 avril 2012, la commission des affaires juridiques du Parlement a adopté son rapport sur la proposition de modification du statut.

9        En juin 2012, à la fin de la présidence danoise du Conseil, celle-ci a établi un rapport sur l’état d’avancement des travaux du groupe « Statut » du Conseil. Ce rapport, qui incluait les résultats obtenus par ledit groupe dans l’élaboration de la position du Conseil sur la proposition de modification du statut de janvier 2012 à juin 2012, a fait l’objet d’une réunion informelle entre le président de ce groupe et les OSP du Conseil le 20 juin 2012.

10      Le 17 septembre 2012, un groupe de huit États membres, à savoir le Royaume du Danemark, la République fédérale d’Allemagne, la République française, le Royaume des Pays-Bas, la République d’Autriche, la République de Finlande, le Royaume de Suède et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du nord, ont adressé à la Commission un courrier demandant à celle-ci de calculer les économies qui pourraient résulter de l’application de plusieurs mesures, dont le fait de limiter les carrières des administrateurs au grade AD 11 pour ceux n’occupant pas de poste d’encadrement et au grade AD 13 pour les chefs d’unité et équivalents.

11      Le même jour, trois OSP du Conseil ont publié un tract dans lequel elles s’opposaient fermement aux mesures proposées dans les contributions des États membres mentionnées au point 10 ci-dessus. Cette position a été confirmée par une résolution de l’assemblée générale du personnel du secrétariat général du Conseil du 2 octobre 2012.

12      Le 14 novembre 2012 et le 1er février 2013, ont eu lieu deux rencontres entre les représentants des OSP du Conseil et le président du Conseil européen, M. Van Rompuy.

13      Le 7 décembre 2012, le groupe « Statut » du Conseil a soumis au comité des représentants permanents (Coreper) un nouveau rapport sur l’état d’avancement de ses travaux concernant l’établissement de la position du Conseil sur la proposition de modification du statut.

14      Par lettre du 24 janvier 2013, le président du Coreper a demandé au Parlement de clarifier sa position quant à sa possible participation, en sa qualité de colégislateur, dans la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981 instituant une procédure de concertation tripartite en matière de relations avec le personnel.

15      Dans ses conclusions du 8 février 2013 sur le cadre financier pluriannuel, le Conseil européen a souligné que le nécessaire assainissement des finances publiques à court, moyen et long terme exigeait de chaque administration publique et de son personnel un effort particulier pour améliorer l’efficacité et les performances et pour s’adapter à l’évolution du contexte économique. Dans ce contexte, il a fixé des plafonds pour la rubrique 5 (Administration) qui tiennent compte des effets des économies résultant notamment d’une réduction de 5 % des effectifs de l’ensemble des institutions, organes et agences de l’Union au cours de la période 2013-2017, compensée par une augmentation du temps de travail du personnel sans adaptation salariale et d’une suspension de la méthode salariale pendant deux ans.

16      Le même jour, le secrétaire général du Conseil a informé par courriel le personnel du secrétariat général du Conseil que le Conseil européen avait décidé que les plafonds mentionnés au point 15 ci-dessus établissaient un cadre politique pour la procédure de codécision en cours, relative à la révision du statut, qui déterminerait la mise en œuvre concrète de ceux-ci ainsi que des autres mesures proposées par la Commission.

17      Par lettre du 4 mars 2013, le président du Parlement a décliné l’invitation à participer à la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981 en estimant qu’il appartiendrait au seul Conseil d’adapter le dialogue social prévu par ladite décision à la nouvelle situation résultant du passage à la procédure législative ordinaire pour la révision du statut, à la suite de l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne. Dans cette lettre, il précisait que la commission de concertation instaurée par ladite décision avait pour objet de s’assurer que l’avis des fonctionnaires était connu des représentants des États membres avant que ceux-ci légifèrent et que le Conseil recevait l’information lui permettant de prendre ses décisions en pleine connaissance des faits pertinents. Selon lui, avec l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne, cette décision était devenue, sinon obsolète, du moins une question de nature purement interne. Il ajoutait qu’il ne voyait aucun moyen pour que le Parlement participe à la commission de concertation, et ce pour deux raisons. La première était l’absence de base juridique d’une telle participation. La seconde était l’absence de nécessité d’une telle participation, l’objectif d’écouter l’avis des représentants du personnel avant de légiférer étant atteint par des moyens plus directs et flexibles au Parlement. À ce dernier égard, le président du Parlement indiquait que, au sein du Parlement, les discussions étaient publiques, l’information facilement disponible et le rapporteur comme les « shadow rapporteurs » pour la révision du statut maintenaient et continueraient de maintenir un dialogue constant avec les OSP et les autres parties intéressées à toutes les étapes de la rédaction et de l’adoption du rapport de la commission des affaires juridiques. Il précisait encore que la vice-présidente du Parlement, le secrétaire général du Parlement ainsi que le chef de cabinet du président du Parlement et le directeur général du personnel du Parlement avaient, ensemble, pris la parole devant l’assemblée générale du personnel du Parlement au sujet de l’état du dossier de la révision du statut et que, dans ce contexte, la vice-présidente du Parlement avait répondu de façon détaillée à tous les problèmes qui avaient été soulevés. Il indiquait en outre qu’avaient assisté à cette réunion, non seulement des membres du personnel du Parlement, mais également des membres du personnel d’autres institutions, y compris du Conseil.

18      Le 10 avril 2013, le Coreper a approuvé un mandat final pour le groupe « Statut » du Conseil.

19      Le 25 avril 2013, le Conseil a informé les OSP de toutes les institutions de la réponse du Parlement du 4 mars 2013 ainsi que des discussions sur un projet de déclaration interprétative de sa décision du 23 juin 1981.

20      Le 6 mai 2013, le Conseil a adopté une déclaration interprétative de sa décision du 23 juin 1981, en vue de son application dans le cadre de la procédure législative ordinaire relative à la proposition de modification du statut.

21      Le même jour, à la demande de deux OSP, une réunion de la commission de concertation s’est tenue. Aucun compte rendu de cette réunion n’a été établi, mais le secrétaire général du Conseil a informé le personnel du secrétariat général du Conseil par courriel du 6 mai 2013 de cette réunion et de l’échange de vues qui y avait eu lieu. Le secrétaire général du Conseil a également donné un compte rendu oral de ladite réunion au Coreper le 8 mai 2013.

22      Le 8 mai 2013, le Coreper a adopté un mandat de négociation pour des négociations en trilogue, avec notamment le Parlement, en vue d’arriver à un accord en première lecture sur la proposition de modification du statut.

23      Le 13 mai 2013, la première négociation en trilogue entre le Parlement, le Conseil et la Commission a eu lieu. Le même jour, le président du Coreper a rencontré les représentants des OSP du Conseil. Il les a informés des résultats de la réunion du Coreper du 8 mai 2013 et a pris connaissance de leurs positions.

24      Le 27 mai 2013, l’assemblée générale du personnel du secrétariat général du Conseil a demandé au secrétaire général du Conseil de convoquer la commission de concertation. Cette demande a été confirmée par l’union syndicale fédérale le 7 juin 2013.

25      Plusieurs autres réunions de négociation en trilogue se sont tenues au niveau politique le 28 mai et les 3, 11 et 19 juin 2013. Au cours de cette période, des réunions techniques au niveau d’experts et des réunions informelles entre le président du Coreper, le vice-président de la Commission et le rapporteur du Parlement ont eu lieu. Lors de la réunion du 19 juin 2013, le Parlement, le Conseil et la Commission sont arrivés à un compromis provisoire sur les principaux éléments de la réforme.

26      Le 20 juin 2013, en réponse à la demande de l’union syndicale fédérale, une réunion de la commission de concertation a eu lieu. Le président du Coreper a exposé les principaux éléments du compromis, y compris la limitation des carrières dans le groupe de fonctions AD aux grades AD 12/13 et a répondu aux questions concernant le paquet, notamment en ce qui concerne la suppression de l’objectif de l’équivalence des carrières avant et après la réforme de 2004. Le même jour, il a informé le Coreper des résultats de la négociation en trilogue du 19 juin 2013.

27      Le 21 juin 2013, lors d’une assemblée générale du personnel du secrétariat général du Conseil, le directeur général de la direction générale (DG) « Administration » du Conseil a exposé les principaux éléments du compromis.

28      Le 25 juin 2013, le texte provisoire du compromis entre le Parlement, le Conseil et la Commission a été envoyé concomitamment aux délégations des États membres et aux membres de la commission de concertation ainsi qu’à l’ensemble du personnel du secrétariat général du Conseil. Le même jour, une autre réunion de négociation en trilogue a eu lieu pour examiner ce texte.

29      Le 26 juin 2013, le Coreper a examiné le résultat des négociations en trilogue et a entendu le rapport oral du secrétaire général du Conseil sur la réunion de la commission de concertation du 20 juin 2013.

30      Le 27 juin 2013, le texte du compromis a été voté par la commission des affaires juridiques du Parlement.

31      Le 28 juin 2013, le Coreper a procédé à l’examen final du compromis concernant la modification du statut et l’a approuvé. Le même jour, le secrétaire général du Conseil en a informé l’ensemble du personnel du secrétariat général du Conseil.

32      Par une lettre datée du 28 juin 2013, le président du Coreper a informé le président de la commission des affaires juridiques du Parlement de l’approbation par le Coreper du texte du compromis provisoire. Dans ce même courrier, il indiquait « […] être en position de confirmer que, si le [Parlement] adopt[ait] sa position en première lecture, conformément à l’article 294, paragraphe 3, TFUE, dans la forme établie dans le compromis provisoire contenu dans l’annexe à cette lettre (soumis à révision par les juristes linguistes des deux institutions), le Conseil approuvera[it], conformément à l’article 294, paragraphe 4, TFUE, la position du [Parlement] et l’acte serait adopté dans la rédaction qui correspond à la position du Parlement, soumise, si nécessaire, aux experts juridiques et linguistiques des deux institutions ».

33      Le 2 juillet 2013, en séance plénière, le Parlement a adopté sa position en première lecture correspondant au texte de compromis convenu avec le Conseil et la Commission lors de leurs contacts informels.

34      Par lettre du 5 juillet 2013, la Commission a transmis au comité du statut la position en première lecture du Parlement du 2 juillet 2013, en précisant que, selon elle, la proposition de modification du statut, dont elle avait saisi le comité du statut le 21 novembre 2011, n’avait pas été substantiellement modifiée dans le cadre de la procédure législative ordinaire. Elle précisait également dans ce courrier que, à ce stade de la procédure législative ordinaire, l’article 10 du statut ne trouvait pas à s’appliquer, mais qu’elle souhaitait toutefois prendre connaissance des éventuelles observations des coprésidents du comité du statut. À cette fin, elle demandait qu’on lui fasse parvenir l’avis du comité du statut, dans un délai de quinze jours ouvrables, soit au plus tard le 26 juillet 2013.

35      Le 17 juillet 2013, les représentants du comité du personnel au sein du comité du statut ont répondu à la Commission par une déclaration dans laquelle ils ont constaté l’impossibilité de trouver un accord avec les représentants des administrations de l’Union au sein du comité du statut quant au changement d’ordre du jour de la réunion de celui-ci en vue de l’adoption d’observations en lieu et place d’un avis. Ils ont en effet contesté la tardiveté de la saisine du comité du statut et l’utilité, dans ces conditions, d’un avis du comité du statut sur la position en première lecture du Parlement et ont dénoncé la violation des principes du dialogue social.

36      Le 10 octobre 2013, le Conseil a approuvé la position du Parlement et a, conformément à l’article 294, paragraphe 4, TFUE, adopté le règlement n° 1023/2013 dans la formulation correspondant à la position du Parlement.

37      À la suite de la signature de l’acte législatif par le président du Parlement et le président du Conseil le 22 octobre 2013, le règlement n° 1023/2013 a été publié au Journal officiel de l’Union européenne le 29 octobre 2013.

 Procédure et conclusions des parties

38      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 10 janvier 2014, les requérants, l’Union pour l’Unité (U4U), l’Unité & solidarité – Hors Union (USHU), le Regroupement Syndical (RS) et M. Georges Vlandas, ont introduit un recours contre le règlement en cause, enregistré sous le numéro T‑17/14.

39      Par actes déposés au greffe du Tribunal, respectivement les 15 et 16 avril 2014, le Parlement et le Conseil ont, chacun, soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal du 2 mai 1991.

40      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 16 avril 2014, la Commission a demandé à intervenir dans l’affaire T‑17/14 au soutien des conclusions du Parlement et du Conseil.

41      Le 6 juin 2014, les requérants ont déposé leurs observations sur les exceptions soulevées par le Conseil et le Parlement.

42      Par ordonnance du 11 décembre 2014, le Tribunal a décidé de joindre les exceptions d’irrecevabilité au fond.

43      Le Parlement et le Conseil ont déposé leurs mémoires en défense le 27 janvier 2015.

44      Par ordonnance du 28 janvier 2015, le président de la huitième chambre du Tribunal a admis l’intervention de la Commission.

45      La Commission a déposé le mémoire en intervention le 16 mars 2015. Le même jour, les requérants ont déposé la réplique.

46      Le Parlement et le Conseil ont déposé les dupliques le 28 avril 2015.

47      Le 29 avril 2015, le Parlement a déposé ses observations sur le mémoire en intervention de la Commission. Les requérants et le Conseil ont déposé leurs observations sur le mémoire en intervention de la Commission le 30 avril 2015.

48      Le 9 décembre 2015, le Tribunal a adressé plusieurs questions aux parties dans le cadre de mesures d’organisation de la procédure visées par l’article 89, paragraphe 3, sous a) et b), de son règlement de procédure. Le Parlement, le Conseil et la Commission ont répondu à ces questions respectivement le 5 janvier 2016, le 23 décembre 2015 et le 6 janvier 2016. Les requérants ont répondu auxdites questions le 6 janvier 2016.

49      Lors de l’audience du 4 février 2016, le Conseil a demandé au Tribunal l’autorisation de soumettre certains documents, en application de l’article 85, paragraphes 3 et 4, du règlement de procédure. Il lui a également demandé, dans l’hypothèse où celui-ci déciderait d’annuler l’article 1er, paragraphes 27, 61, 70 et paragraphe 73, sous k), du règlement n° 1023/2013 (ci-après les « dispositions attaquées »), de « maintenir les effets » de ces dispositions.

50      Le Tribunal a fixé un délai aux autres parties pour prendre position sur la recevabilité des documents visés au point 49 ci-dessus ainsi que sur la demande de maintien des effets des dispositions attaquées. Le 17 février 2016, les requérants ont contesté la recevabilité desdits documents et indiqué ne pas être en mesure de prendre position sur ladite demande en l’absence d’argumentation à son appui de la part du Conseil. Le même jour, le Parlement a pris position en faveur de la recevabilité de ces documents et soutenu cette demande. Le 19 février 2016, la Commission a également pris position en faveur de la recevabilité des documents en question.

51      La procédure orale a été clôturée le 4 mars 2016.

52      Les requérants concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’article 1er, paragraphe 70, du règlement n° 1023/2013 ainsi que l’article 1er, paragraphes 27, 61 et paragraphe 73, sous k), de ce même règlement, en ce qu’ils modifient, respectivement, l’annexe X du statut et l’article 45 ainsi que les annexes I et XIII dudit statut ;

–        condamner le Parlement et le Conseil aux dépens.

53      Le Parlement et le Conseil concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ;

–        à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner les requérants aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité

54      Le Parlement et le Conseil ont soulevé, chacun, une exception d’irrecevabilité à l’égard du recours. Dans leurs exceptions d’irrecevabilité, ils soutiennent que les requérants n’ont pas qualité pour agir dans le cadre du recours. À cet égard, ils font valoir que l’U4U, l’USHU et le RS ne remplissent pas les conditions établies par la jurisprudence relative à la recevabilité des recours en annulation introduits par les associations professionnelles. M. Vlandas ne remplirait pas davantage ces conditions en sa qualité de président de l’U4U et de coprésident du RS ou de membre du comité du statut. Il ne serait pas non plus individuellement et directement affecté par les dispositions attaquées en sa qualité de fonctionnaire.

55      Dans le mémoire en intervention, la Commission se rallie aux arguments développés par le Parlement et le Conseil dans leurs exceptions d’irrecevabilité.

56      Il ressort du dossier, ainsi que de la réponse des requérants à une question du Tribunal lors de l’audience, que M. Vlandas a introduit le présent recours en sa qualité de président de l’U4U et de coprésident de RS, conformément au mandat qu’il avait reçu de ces derniers, ainsi qu’en sa qualité de membre du comité du statut et de leader syndical. Il conviendra dès lors d’examiner d’abord la qualité pour agir de l’U4U, de l’USHU et du RS avant d’apprécier, si nécessaire, la qualité pour agir de M. Vlandas en qualité de membre du comité du statut et de leader syndical.

57      Il y a lieu de rappeler que le règlement n° 1023/2013 a été adopté sur le fondement de l’article 336 TFUE, conformément à la procédure législative ordinaire. Dès lors, force est de constater qu’il relève de la catégorie des actes de portée générale, de nature législative, à l’égard desquels l’article 263, quatrième alinéa, TFUE soumet la recevabilité des recours en annulation, introduits par les personnes physiques ou morales, au respect des conditions d’affectation directe et individuelle (voir, en ce sens, arrêt du 3 octobre 2013, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, C‑583/11 P, EU:C:2013:625, points 56 à 60).

58      Ce constat ne saurait être remis en cause par l’argument des requérants selon lequel le fait de soumettre la recevabilité du présent recours aux conditions d’affectation directe et individuelle prévues par l’article 263, quatrième alinéa, TFUE serait contraire au droit à un recours effectif consacré par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

59      En effet, il convient de rappeler, eu égard à la protection conférée par l’article 47 de la charte des droits fondamentaux, que ledit article n’a pas pour objet de modifier le système de contrôle juridictionnel prévu par les traités, et notamment les règles relatives à la recevabilité des recours formés directement devant la juridiction de l’Union, ainsi qu’il découle également des explications afférentes à cet article, lesquelles doivent, conformément à l’article 6, paragraphe 1, troisième alinéa, TUE et à l’article 52, paragraphe 7, de la charte des droits fondamentaux, être prises en considération pour l’interprétation de celle-ci. Ainsi, les conditions de recevabilité prévues à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE doivent être interprétées à la lumière du droit fondamental à une protection juridictionnelle effective, sans pour autant aboutir à écarter les conditions expressément prévues par le traité FUE (voir arrêt du 3 octobre 2013, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, C‑583/11 P, EU:C:2013:625, points 97 et 98 et jurisprudence citée).

60      Quant à l’argument des requérants selon lequel l’interprétation retenue par le juge de l’Union de la notion d’« actes réglementaires », prévue à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, entraînerait un déficit dans la protection juridictionnelle et serait incompatible avec l’article 47 de la charte des droits fondamentaux en ce qu’elle aurait pour conséquence que tout acte législatif serait pratiquement exempté de contrôle juridictionnel, il y a lieu de constater que la protection conférée par ce dernier article n’exige pas qu’un justiciable puisse, de manière inconditionnelle, intenter un recours en annulation, directement devant la juridiction de l’Union, contre des actes législatifs de l’Union (arrêt du 3 octobre 2013, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, C‑583/11 P, EU:C:2013:625, point 105).

61      Cela étant précisé, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, la recevabilité des recours en annulation formés par des associations, fussent-elles des OSP ou des regroupements d’OSP, peut être admise dans trois types de situations, à savoir, premièrement, lorsqu’une disposition légale reconnaît expressément aux associations professionnelles une série de facultés à caractère procédural, deuxièmement, lorsque l’association représente les intérêts de ses membres qui seraient eux-mêmes recevables à agir et, troisièmement, lorsque l’association est individualisée en raison de l’affectation de ses intérêts propres en tant qu’association, notamment, parce que sa position de négociatrice a été affectée par l’acte dont l’annulation est demandée (voir ordonnance du 26 octobre 2006, European Association of Im- and Exporters of Birds and live Animals e.a./Commission, T‑209/06 R, non publiée, EU:T:2006:336, point 36 et jurisprudence citée, et arrêt du 11 juin 2009, Confservizi/Commission, T‑292/02, EU:T:2009:188, point 52 et jurisprudence citée).

62      En l’espèce, les requérants ne prétendent pas que l’U4U, l’USHU et le RS représentent les intérêts de leurs membres, fonctionnaires et agents de l’Union, qui seraient eux-mêmes recevables à agir, mais soutiennent que ces organisations ont qualité pour agir dans la mesure où, d’une part, les dispositions attaquées ont affecté leurs intérêts propres et, d’autre part, ils contestent la violation de leurs droits procéduraux par le Conseil et le Parlement.

 Sur l’affectation des intérêts propres de l’U4U, de l’USHU et du RS

63      Il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence, une organisation constituée pour la défense des intérêts collectifs d’une catégorie de justiciables ne saurait être considérée comme concernée directement et individuellement par un acte affectant les intérêts généraux de cette catégorie (arrêt du 18 mars 1975, Union syndicale-Service public européen e.a./Conseil, 72/74, EU:C:1975:43, point 17).

64      Il importe également de rappeler que la seule circonstance que des organisations représentatives du personnel ont participé aux négociations qui ont conduit à l’adoption des dispositions attaquées ne suffit pas pour modifier la nature du droit d’action que, dans le cadre de l’article 263 TFUE, elles peuvent posséder à l’égard de ces dispositions (voir, en ce sens, arrêt du 18 mars 1975, Union syndicale-Service public européen e.a./Conseil, 72/74, EU:C:1975:43, point 19).

65      En conséquence, il appartient aux requérants de démontrer que l’U4U, l’USHU et le RS sont individualisés au regard des dispositions attaquées en raison d’une affectation de leurs intérêts propres en tant qu’OSP ou regroupement d’OSP.

66      En l’espèce, les requérants se bornent à alléguer que l’article 1er, paragraphe 70, du règlement n° 1023/2013, qui modifie l’annexe X du statut, porte atteinte aux intérêts propres de l’USHU, en ce qu’elle est la seule OSP ayant pour unique objet de défendre le personnel en délégation, et le RS, en ce qu’il est le seul regroupement d’OSP ayant pour objet unique de défendre les intérêts du personnel du service européen d’action extérieure et de tout le personnel en délégation.

67      Or, cette allégation ne permet aucunement de comprendre en quoi cette circonstance individualiserait l’USHU et le RS par rapport aux autres organisations qui ont pour objet de défendre l’ensemble des fonctionnaires et des agents de l’Union indépendamment de leur lieu d’affectation.

68      Au demeurant, il y a lieu de relever que les requérants n’expliquent pas dans quelle mesure l’U4U verrait ses intérêts propres affectés par l’article 1er, paragraphe 70, du règlement n° 1023/2013, ni d’ailleurs en quoi les intérêts propres de l’U4U, de l’USHU et du RS seraient affectés par l’article 1er, paragraphes 27, 61 et paragraphe 73, sous k), du même règlement.

69      Dès lors, force est de constater que les requérants restent en défaut de démontrer que les dispositions attaquées affectent les intérêts propres de l’U4U, de l’USHU et du RS au sens de la jurisprudence citée au point 61 ci-dessus.

 Sur l’existence d’une disposition légale reconnaissant expressément aux associations professionnelles une série de facultés à caractère procédural

70      Les requérants soutiennent que l’U4U, l’USHU et le RS sont, à plusieurs titres, en tant qu’OSP ou regroupement d’OSP, censés participer à la procédure d’élaboration et de révision du statut et que, en conséquence, ils sont fondés à introduire un recours en vue de faire sanctionner la méconnaissance de leurs garanties procédurales dans le cadre de l’adoption des dispositions attaquées.

71      En effet, selon les requérants, l’U4U, l’USHU et le RS sont censés pouvoir participer à la procédure de révision du statut sur le fondement des droits à l’information, à la consultation et à la concertation tels qu’ils sont consacrés par l’article 11 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »), et les articles 12, 27 et 28 de la charte des droits fondamentaux. Ils estiment que, conformément à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, l’article 11 de la CEDH impose non seulement une obligation pour les institutions de ne pas entraver les droits consacrés par cette disposition, mais aussi des obligations positives visant à les garantir en vue de les rendre concrets et effectifs. Il aurait donc incombé aux institutions de garantir à l’U4U, à l’USHU et au RS une information, une consultation et une concertation adéquates, ce qui n’aurait pas été le cas en l’espèce.

72      Les requérants ajoutent que l’U4U, l’USHU et le RS sont également censés pouvoir participer à la procédure de révision du statut par l’intermédiaire du comité du statut, visé à l’article 10 du statut. Il en découlerait que ceux-ci ont nécessairement la qualité pour contester l’absence de consultation dudit comité dans le cadre de la procédure de révision du statut. À défaut, eu égard à la composition paritaire de ce comité, la méconnaissance dudit article ne pourrait pas être sanctionnée et cet article demeurerait privé de toute effectivité.

73      Les requérants font en outre valoir que les droits procéduraux de l’U4U, de l’USHU et du RS, qui découlent de la décision du Conseil du 23 juin 1981, ont également été violés dans le cadre de l’adoption du règlement n° 1023/2013, car la procédure de concertation prévue par ladite décision n’a pas été respectée dans le cadre des propositions de modification du statut.

74      Le Parlement et le Conseil font valoir que les articles 27 et 28 de la charte des droits fondamentaux, l’article 11 de la CEDH et l’article 10 du statut ne créent pas de droits procéduraux au profit de l’U4U, de l’USHU et du RS.

75      À titre liminaire, il convient de relever, à l’instar du Parlement et du Conseil, que l’article 12, paragraphe 1, de la charte des droits fondamentaux et l’article 11 de la CEDH ne prévoient pas la participation des OSP ou des regroupements d’OSP dans le processus d’élaboration des actes de l’Union, mais consacrent simplement la liberté d’association sous la forme de syndicats, de sorte que les requérants ne sauraient tirer des droits procéduraux de ces dispositions.

76      Par ailleurs, il y a lieu de rappeler que, conformément à la jurisprudence, le fait qu’une personne intervienne, d’une manière ou d’une autre, dans le processus menant à l’adoption d’un acte de l’Union n’est de nature à individualiser cette personne en ce qui concerne l’acte en question que lorsque la réglementation de l’Union applicable lui accorde certaines garanties de procédure. Or, sauf disposition expresse contraire, ni le processus d’élaboration des actes de portée générale, ni ces actes eux-mêmes n’exigent, en vertu des principes généraux du droit de l’Union, tels que le droit d’être consulté et informé, la participation des personnes affectées, les intérêts de celles-ci étant censés être représentés par les instances politiques appelées à adopter ces actes (arrêt du 2 mars 2010, Arcelor/Parlement et Conseil, T‑16/04, EU:T:2010:54, point 119).

77      Or, les articles 27 et 28 de la charte des droits fondamentaux, également invoqués par les requérants, consacrent, respectivement, le droit à la consultation et à l’information des travailleurs dans l’entreprise et le droit de négociation et d’action collective. Il importe ainsi de relever que, conformément à la jurisprudence, ces dispositions sont susceptibles de s’appliquer dans les rapports entre les institutions de l’Union et leur personnel, ainsi qu’il découle de l’arrêt du 19 septembre 2013, Réexamen Commission/Strack (C‑579/12 RX‑II, EU:C:2013:570). Néanmoins, selon les termes mêmes de ces dispositions, l’exercice des droits qu’elles consacrent est limité aux cas et conditions prévus par le droit de l’Union.

78      Il y a donc lieu de vérifier si les dispositions de droit de l’Union invoquées par les requérants, autres que les articles 27 et 28 de la charte des droits fondamentaux, prévoient des droits procéduraux dont l’U4U, l’USHU et le RS pouvaient se prévaloir à la date d’adoption des dispositions attaquées.

–       Sur la participation à la procédure de consultation prévue par l’article 10 du statut

79      Les requérants invoquent au soutien de leur argumentation la participation indirecte de l’U4U, de l’USHU et du RS à la procédure de consultation du comité du statut prévue par l’article 10 du statut.

80      À cet égard, il y a lieu de relever que, à la date d’adoption du règlement n° 1023/2013, le statut prévoyait à son article 10, premier et deuxième alinéas, l’obligation de consulter les fonctionnaires, à travers un organe paritaire, le comité du statut, composé en nombre égal des représentants des institutions de l’Union et des représentants de leurs comités du personnel, sur toute proposition de la Commission de révision du statut.

81      Il s’ensuit que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les OSP ou les regroupements d’OSP ne sauraient tirer de l’article 10 du statut le droit d’être consulté ou informé dans le cadre du processus d’élaboration des actes de l’Union qui modifient le statut.

82      L’absence de droits procéduraux de l’U4U, de l’USHU et du RS, tirés de l’article 10 du statut, dans sa version applicable à la date d’adoption du règlement n° 1023/2013, ne saurait être remise en cause par l’argument des requérants, selon lequel l’U4U, l’USHU et le RS participaient au comité du statut par l’entremise de certains membres du comité du personnel, qui étaient issus des élections professionnelles, au motif que lesdits membres avaient été élus sur les listes présentées par ceux-ci.

83      En effet, à supposer que les membres du comité du statut puissent, individuellement, fonder leur qualité pour agir sur la violation des droits procéduraux dudit comité, cela n’aurait, en tout état de cause, aucune incidence sur la qualité pour agir des OSP ou des regroupements d’OSP auxquelles ils appartiennent.

84      De même, il convient de rejeter comme inopérant l’argument des requérants selon lequel, eu égard à sa composition paritaire, le comité du statut ne serait pas en mesure d’introduire un recours en annulation à l’encontre de dispositions adoptées par les institutions de l’Union, dans la mesure où, même à la supposer établie, cette circonstance ne serait pas de nature à fonder, en elle-même, la qualité pour agir de l’U4U, de l’USHU et du RS.

–       Sur la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981

85      Les requérants font valoir le non-respect de la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981.

86      À cet égard, il convient de relever que, si la décision du Conseil du 23 juin 1981 ne vise aucune disposition du statut ni aucune disposition spécifique de droit de l’Union, un tel acte n’en reste pas moins une décision adoptée par une institution de l’Union, au sens de l’article 288, alinéa 4, TFUE, et est donc obligatoire dans tous ses éléments, y compris pour le Conseil (voir, en ce sens, arrêts du 22 juin 1994, Rijnoudt et Hocken/Commission, T‑97/92 et T‑111/92, EU:T:1994:69, points 94 à 100, et du 11 juillet 2007, Wils/Parlement, F‑105/05, EU:F:2007:128, points 49 à 57).

87      Il convient également de relever que la jurisprudence citée au point 75 ci-dessus ne s’oppose pas à ce que les institutions de l’Union s’engagent unilatéralement à consulter, selon une procédure particulière, les OSP ou les regroupements d’OSP sur les modifications envisagées du statut, pour autant que cette procédure ne remette pas en cause la répartition des compétences définie par l’article 336 TFUE et par le statut.

88      Or, il convient de rappeler que la décision du Conseil du 23 juin 1981 prévoit une procédure de concertation qui peut être appliquée aux propositions soumises au Conseil par la Commission relatives à la modification du statut, chaque fois qu’un membre de la commission de concertation en fait la demande. Or, conformément à cette décision, la commission de concertation se compose, notamment, de représentants du personnel désignés par les OSP.

89      Dès lors, il y a lieu de constater que, contrairement à ce que font valoir le Parlement et le Conseil, la décision du Conseil du 23 juin 1981 contient des garanties procédurales au profit de l’U4U, de l’USHU et du RS dont le respect s’impose au Conseil.

90      Il s’ensuit que l’U4U, l’USHU et le RS ont, conformément à la jurisprudence rappelée au point 76 ci-dessus, la qualité pour agir sur le fondement de l’article 263 TFUE, en vue d’obtenir l’annulation des dispositions attaquées.

91      S’agissant d’un seul et même recours, la constatation de sa recevabilité à l’égard de l’U4U, l’USHU et le RS exonère de la nécessité d’examiner la qualité pour agir de M. Vlandas en qualité de membre du comité du statut et de leader syndical (arrêts du 24 mars 1993, CIRFS e.a./Commission, C‑313/90, EU:C:1993:111, point 31, et du 15 septembre 1998, European Night Services e.a./Commission, T‑374/94, T‑375/94, T‑384/94 et T‑388/94, EU:T:1998:198, point 61).

 Sur le fond

92      À l’appui du recours, les requérants soulèvent formellement six moyens. Ceux-ci peuvent toutefois être regroupés en quatre moyens. Le premier moyen est tiré, en substance, de la violation de l’article 10 du statut et des articles 12, 27 et 28 de la charte des droits fondamentaux ainsi que de l’article 11 de la CEDH, en ce que le comité du statut n’aurait pas été utilement consulté concernant les modifications du statut introduites par les dispositions attaquées. Le deuxième moyen est tiré, en substance, de la violation des articles 12, 27 et 28 de la charte des droits fondamentaux ainsi que de l’article 11 de la CEDH, en ce que les OSP ou les regroupements d’OSP n’auraient pas été consultées concernant les modifications introduites par les dispositions attaquées conformément à la procédure prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981. Le troisième moyen est tiré, en substance, d’une violation du « principe des droits acquis » en matière d’information et de consultation des travailleurs dans la procédure de révision du statut. Le quatrième moyen est tiré, en substance, de la violation des « principes de bonne législation » et, en particulier, du devoir de minutie et de l’obligation de motivation.

 Observations liminaires

–       Sur la recevabilité des premier, deuxième et quatrième moyens

93      Il convient d’observer que le Parlement soutient que, dans l’hypothèse où le Tribunal considérerait que les requérants tirent leur qualité pour agir de garanties procédurales dont ceux-ci pourraient se prévaloir dans le cadre de l’adoption des dispositions attaquées, la recevabilité des moyens qu’ils soulèvent à l’appui de leur recours serait, conformément à la jurisprudence, limitée à la contestation de la violation desdites garanties. Il en découlerait que, dès lors que le quatrième moyen des requérants devrait être compris comme visant à contester le bien-fondé des dispositions attaquées, il devrait être rejeté comme étant irrecevable.

94      Dans ce contexte, le Parlement et le Conseil ont également précisé lors de l’audience que le premier moyen, tiré de la violation de l’article 10 du statut, est irrecevable en ce qu’il est soulevé par l’U4U, l’USHU et le RS, qui ne tirent aucune garantie procédurale de cette disposition. Il en irait de même du deuxième moyen, tiré de la violation de la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981, en ce que celui-ci est soulevé, à titre personnel, par M. Vlandas.

95      À cet égard, il importe de rappeler que, ainsi qu’il a été constaté au point 90 ci-dessus, l’U4U, l’USHU et le RS peuvent invoquer à leur bénéfice les garanties procédurales tirées de la décision du Conseil du 23 juin 1981, de sorte que l’argumentation du Parlement et du Conseil est inopérante en ce qu’elle vise la recevabilité du deuxième moyen.

96      Au demeurant, il importe également de rappeler que le non-respect des règles de procédure relatives à l’adoption d’un acte de l’Union, fixées par les institutions compétentes elles-mêmes, telles que celles issues de l’article 10 du statut et de la décision du Conseil du 23 juin 1981, visées par les premier, deuxième et troisième moyens, constitue une violation des formes substantielles, au sens de l’article 263, deuxième alinéa, TFUE, laquelle peut être examinée par le juge de l’Union même d’office (voir, en ce sens, arrêts du 13 décembre 2007, Angelidis/Parlement, T‑113/05, EU:T:2007:386, point 62 ; du 2 octobre 2009, Chypre/Commission, T‑300/05 et T‑316/05, non publié, EU:T:2009:380, points 205 et 206, et du 8 juillet 2010, Commission/Putterie-De-Beukelaer, T‑160/08 P, EU:T:2010:294, point 63).

97      Conformément à une jurisprudence constante, il en va de même d’une insuffisance ou d’un défaut de motivation, tel que celui invoqué par les requérants dans le cadre de leur quatrième moyen (voir arrêt du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a., C‑89/08 P, EU:C:2009:742, point 34 et jurisprudence citée).

98      Par ailleurs, il convient de relever que, si les requérants font également valoir dans le cadre de leur quatrième moyen que le Parlement, le Conseil et la Commission auraient, en l’espèce, violé le « devoir de minutie » qui s’imposait prétendument à eux lors de l’adoption des dispositions attaquées, il ressort des écritures des requérants que, afin de démontrer cette violation, ils avancent les mêmes arguments que ceux déjà présentés dans le cadre des premier et deuxième moyens, relatifs à la procédure qui a conduit à l’adoption des dispositions attaquées. Par conséquent, l’argument du Parlement selon lequel les requérants viseraient, par ce moyen, à contester la légalité au fond des actes attaqués manque en fait.

99      Il convient donc de rejeter les fins de non-recevoir soulevées par le Parlement et le Conseil à l’encontre des premier, deuxième et quatrième moyens du recours.

–       Sur la recevabilité des éléments de preuve présentés par le Conseil lors de l’audience

100    Il convient de relever que le Conseil n’a pas produit de justification écrite quant au dépôt tardif des documents produits pour la première fois lors de l’audience, mais s’est borné à fournir des explications orales, après que le président du Tribunal lui a rappelé l’obligation pesant sur lui à cet égard en application de l’article 85, paragraphe 3, du règlement de procédure.

101    Le représentant du Conseil a ainsi précisé que le dépôt tardif des documents était justifié par la circonstance que ce n’est qu’après la lecture du point 66 du rapport d’audience qu’il a compris que ce qui était reproché au Conseil par les requérants était de ne pas avoir organisé de réunion de la commission de concertation lors de la négociation en trilogue qui aurait pris fin avec l’adoption du compromis provisoire le 19 juin 2013. Il fait état de l’ambiguïté qui aurait été créée par l’affirmation des requérants figurant au point 18 de la réplique selon laquelle la réunion de la commission de concertation du 20 juin 2013 était inutile, car elle avait eu lieu après les négociations en trilogue. Le Conseil aurait simplement considéré que cette affirmation étant manifestement erronée, la dernière négociation en trilogue ayant eu lieu le 25 juin 2013, il n’y avait pas lieu d’y répondre, sans réaliser que les requérants faisaient en réalité référence à la négociation en trilogue du 19 juin 2013.

102    À cet égard, il convient de relever que les requérants ont fait grief au Conseil dans la requête d’avoir refusé d’engager un dialogue au sujet de la proposition de réforme du statut dans le cadre de la commission de concertation et de poursuivre celui-ci au sein de ladite commission tout au long de la négociation en trilogue. Dans la requête, les requérants ont également fait valoir, s’agissant de la réunion de la commission de concertation du 20 juin 2013, qu’aucun document écrit n’avait été distribué à cette occasion et que celle-ci n’avait donné lieu qu’à des explications de caractère vague et général quant au contenu de la réforme du statut. Ces circonstances démontraient, selon les requérants, que la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981 n’avait pas été respectée en l’espèce.

103    Au point 53 du mémoire en défense, le Conseil a soutenu qu’il avait appliqué de bonne foi la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981. Il a précisé que deux réunions de la commission de concertation s’étaient ainsi tenues à des moments décisifs de la procédure législative ordinaire, à savoir « le 6 mai 2013, juste avant l’adoption du mandat de négociation en trilogue avec le [Parlement] par le [Coreper] du 8 mai 2013, et le 20 juin 2013, lorsque les trois institutions étaient arrivées lors de la négociation en trilogue du 19 juin 2013 à un compromis provisoire sur les éléments principaux de la réforme, mais avant d’arrêter leurs positions sur ce compromis ». Il en a conclu qu’il était donc en mesure de prendre en compte les points de vue exprimés dans la commission de concertation.

104    C’est dans ce contexte que, au point 18 de la réplique, les requérants ont indiqué que les réunions de la commission de concertation ne reposaient pas sur l’idée de concertation, car la première réunion avait été organisée avant les négociations en trilogue et la seconde réunion l’avait été après lesdites négociations et qu’aucun document écrit relatif au contenu de la réforme du statut n’avait été distribué par le Conseil ni avant, ni pendant, ni même après ces réunions.

105    En dépit de l’imprécision de l’affirmation des requérants figurant au point 18 de la réplique, il est ainsi évident que, par l’expression « après les trilogues », les requérants faisaient référence au fait que la réunion de la commission de concertation du 20 juin 2013 a eu lieu après la négociation en trilogue du 19 juin 2013, au cours de laquelle les institutions sont arrivées à un compromis provisoire sur le contenu de la réforme. La réduction de la portée du grief des requérants est reflétée au point 66 du rapport d’audience par l’emploi du membre de phrase « [l]es requérants font grief au Parlement et au Conseil […] de ne pas avoir organisé de réunion du comité du statut lors de la phase de négociation en trilogue ». Le Tribunal estime à cet égard que, si le Conseil avait compris que les requérants entendaient faire valoir que la réunion de la commission de concertation du 20 juin 2013 avait eu lieu après la dernière négociation en trilogue, il n’aurait pas manqué de relever que, cette dernière négociation s’étant tenue le 25 juin 2013, cette affirmation était manifestement erronée. Toutefois, force est de constater que le Conseil n’a pas pris position à cet égard dans son mémoire en défense.

106    En outre, même à supposer que cela ne soit qu’à la lecture du rapport d’audience que le Conseil ait pris conscience du fait que les requérants lui reprochaient de ne pas avoir organisé de réunion de la commission de concertation avant le 19 juin 2013, c’est-à-dire avant que les institutions aboutissent à un compromis provisoire, force est de constater que les affirmations formulées pour la première fois lors de l’audience, prétendument étayées par les documents en question, concernant l’existence de différents préavis de grève, ne visaient pas à répondre à ce grief, mais à expliquer pourquoi il avait été conduit à organiser une réunion de la commission de concertation à une date à laquelle le texte du compromis provisoire n’était pas encore prêt et pourquoi il n’a pas non plus été en mesure de réunir à nouveau la commission de concertation avant l’adoption définitive de ce texte le 26 juin 2013.

107    Il apparaît en réalité que les affirmations du Conseil relatives aux conditions d’organisation de la réunion du 20 juin 2013, formulées pour la première fois à l’audience, ainsi que les pièces déposées à l’appui de ces affirmations, visent à compléter sa réponse écrite à la question posée par le Tribunal quant à la raison pour laquelle il n’avait pas communiqué aux OSP, lors de la réunion de la commission de concertation du 20 juin 2013, le texte du compromis provisoire auquel étaient parvenues les institutions le 19 juin 2013.

108    Or, la question posée par le Tribunal était motivée par l’absence de prise de position du Conseil dans ses écritures sur un grief parfaitement identifié dès la requête, à savoir le fait qu’aucun document n’avait été distribué à l’occasion de la réunion de la commission de concertation du 20 juin 2013. Le Conseil n’explique pas la raison pour laquelle il n’aurait pas pu prendre position sur ce grief dans le mémoire en défense ou la duplique. S’il ne fait aucun doute que le Conseil pouvait prendre position sur cette question au stade de la procédure orale et produire, à titre exceptionnel, des preuves à cet égard, il devait expliquer les raisons pour lesquelles ces preuves n’ont pas été produites plus tôt, ce qu’il est resté en défaut de faire en l’espèce.

109    Il s’ensuit que les documents produits par le Conseil lors de l’audience doivent être rejetés comme étant irrecevables.

–       Sur les considérations relatives à l’existence d’un prétendu droit à la négociation collective dans les premier et deuxième moyens

110    Il convient de relever que, dans le cadre du premier moyen, dans lequel ils font valoir l’absence de consultation du comité du statut sur les dispositions attaquées, les requérants invoquent la violation de l’article 10 du statut et de l’article 11 de la CEDH, qui garantit la liberté syndicale, dont découleraient, notamment, le droit à l’information et à la consultation des travailleurs et le droit de négociation collective, ainsi que la violation des articles 12, 27 et 28 de la charte des droits fondamentaux, qui consacreraient, en substance, les mêmes droits.

111    De même, dans le cadre du deuxième moyen, dans lequel ils font valoir l’absence de consultation des OSP sur les modifications du statut introduites par les dispositions attaquées, les requérants invoquent la violation de la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981 ainsi que la violation des mêmes dispositions de la CEDH et de la charte des droits fondamentaux que dans le premier moyen.

112    À cet égard, il importe de rappeler que, ainsi que cela a été précisé au point 77 ci-dessus, si le droit à la négociation collective et le droit à l’information et à la consultation des travailleurs, visés respectivement par l’article 27 et par l’article 28 de la charte des droits fondamentaux, sont susceptibles de s’appliquer dans les rapports entre les institutions de l’Union et leur personnel, l’exercice de ces droits est limité aux cas et conditions prévus par le droit de l’Union.

113    Or, ni l’article 10 du statut, ni la décision du Conseil du 23 juin 1981, invoqués par les requérants dans le cadre des premier et deuxième moyens, ne concernent les conditions d’exercice du droit de négociation collective.

114    En effet, l’article 10 du statut prévoit la consultation du comité du statut, composé en nombre égal des représentants des institutions de l’Union et des représentants de leurs comités du personnel, par la Commission sur toute proposition de révision du statut.

115    La procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981 s’applique aux propositions soumises au Conseil par la Commission relatives à la modification du statut ou relatives à l’application des dispositions dudit statut concernant les rémunérations ou les pensions, chaque fois qu’un membre de la commission de concertation, composée, en principe, d’un nombre égal de représentants des États membres et de représentants du personnel désignés par les OSP ainsi que des chefs de l’administration de chaque institution de l’Union, en fait la demande. Selon l’article I.8 de ladite décision, lu à la lumière de la déclaration interprétative du Conseil du 6 mai 2013, ladite procédure de concertation a pour objet d’examiner toutes les informations disponibles et les positions des parties dans le but de faciliter, dans toute la mesure du possible, la convergence des positions et d’assurer que les points de vue du personnel et des autorités administratives sont connus des représentants des États membres avant qu’ils ne prennent une position ferme dans le cadre de la procédure législative ordinaire. En vertu de cette même disposition, le Conseil a la possibilité de tenir compte du rapport du président de la commission de concertation lors de l’adoption d’une position dans le cadre de la procédure législative ordinaire.

116    Ainsi, l’article 10 du statut et la décision du Conseil du 23 juin 1981 ont trait aux conditions d’exercice du droit à l’information et à la consultation des travailleurs, consacré par l’article 27 de la charte des droits fondamentaux, dans les rapports entre les institutions et leur personnel.

117    Par ailleurs, il convient également de relever que, aux termes de l’article 28 de la charte des droits fondamentaux, le droit de négociation collective vise expressément la négociation et la conclusion de conventions collectives. Or, il y a lieu de rappeler que le droit de négocier et de conclure des conventions collectives a pour objet de permettre une négociation entre les partenaires sociaux afin de déterminer les conditions de travail lorsque les droits et les obligations ne sont pas suffisamment déterminés par les dispositions applicables (voir, en ce sens, arrêt du 18 juin 2013, Heath/BCE, T‑645/11 P, EU:T:2013:326, point 145).

118    Dès lors, contrairement à ce que pourrait suggérer certains passages de la requête, en particulier les points 20, 24, 35 et 40 de celle-ci, le droit de négociation collective ne saurait être assimilé au droit pour les OSP de négocier le contenu même des dispositions du statut dont l’adoption est régie, conformément à l’article 294 TFUE, par la procédure législative ordinaire.

119    L’examen des premier et deuxième moyens se limitera par conséquent à vérifier si les conditions d’exercice du droit à l’information et à la consultation des travailleurs, telles que prévues par l’article 10 du statut et la décision du Conseil du 23 juin 1981, ont été respectées en l’espèce.

 Sur le premier moyen, tiré, en substance, de la violation de l’article 10 du statut et des articles 12, 27 et 28 de la charte des droits fondamentaux ainsi que de l’article 11 de la CEDH, en ce que le comité du statut n’aurait pas été utilement consulté concernant les modifications du statut introduites par les dispositions attaquées

120    Les requérants soutiennent, en substance, que, lorsque la Commission a consulté le comité du statut sur une proposition de révision du statut, mais que ladite proposition de révision a, par la suite, fait l’objet de modifications substantielles, elle est tenue de consulter à nouveau le comité du statut sur les modifications en question avant que cette proposition de révision ne soit adoptée par le législateur.

121    Les requérants soulignent que, contrairement aux circonstances ayant donné lieu à l’arrêt du 11 juillet 2007, Centeno Mediavilla e.a./Commission (T‑58/05, EU:T:2007:218), rendu à une époque où la charte des droits fondamentaux n’avait pas de caractère contraignant, les modifications introduites par les dispositions attaquées ne figuraient pas dans la proposition de modification du statut initialement soumise au comité du statut et n’avaient pas un caractère minime.

122    Les modifications introduites par les dispositions attaquées ne répondraient pas, en outre, aux objectifs poursuivis par la Commission dans la proposition de modification du statut initialement soumise au comité du statut.

123    Ainsi, l’absence de consultation du comité du statut sur les modifications apportées à l’article 6 de l’annexe X du statut, concernant le droit à congé annuel des fonctionnaires et des autres agents de l’Union affectés sur le territoire d’un État tiers, ne pourrait pas être justifiée par l’objectif de rationalisation budgétaire poursuivi par la Commission dans la proposition de modification du statut. À défaut, il suffirait d’invoquer un objectif de rationalisation budgétaire pour vider l’obligation de consultation du comité du statut de sa substance, puisque toute mesure devrait, en principe, participer à un tel objectif. Les requérants soulignent que ce sont en fait précisément les moyens de parvenir à cet objectif de rationalisation budgétaire qui doivent faire l’objet de la consultation par le comité du statut.

124    De même, le fait que la Commission a poursuivi l’objectif d’établir un lien entre le grade et le niveau de responsabilité dans la proposition de modification du statut ne serait pas de nature à justifier l’absence de consultation du comité du statut sur les modifications apportées par la suite aux dispositions relatives à la carrière des administrateurs. En outre, les modifications introduites par les dispositions attaquées iraient au-delà de cet objectif, déjà assuré par l’AIPN lors de la comparaison des mérites entre fonctionnaires promouvables, en interdisant l’accès aux grades supérieurs par le processus de promotion pour le remplacer par un processus de nomination.

125    En tout état de cause, une nouvelle saisine du comité du statut aurait été justifiée au regard des très nombreuses autres modifications apportées par le règlement n° 1023/2013 à la proposition de modification du statut initialement soumise audit comité. À ce dernier égard, les requérants renvoient au relèvement de l’âge de la retraite à 66 ans (article 52 du statut), avec un taux d’accumulation réduit à 1,8% (article 77 du statut modifié), à l’augmentation du taux du prélèvement de solidarité de 6 % à 7 % pour les fonctionnaires des grades les plus élevés (article 66 bis, paragraphe 2, du statut modifié), à la méthode d’adaptation des salaires « avec des clauses assez complexes de modération et d’exception », mais d’application automatique, avec « gel de l’adaptation » en 2013 et en 2014 (articles 10 et 11 de l’annexe XI du statut modifié), à la limitation du « flexitime » selon les grades (article 55 du statut modifié), à la modification des indemnités de voyage annuel et du délai de route (article 7 de l’annexe V et article 8 de l’annexe VII du statut modifié), au congé dans l’intérêt du service (article 42 quater du statut modifié), aux procédures de traitement de l’insuffisance professionnelle (article 51, paragraphe 1, du statut modifié), aux conditions « plus sévères » pour l’accès des agents contractuels aux concours de titularisation (article 29, paragraphe 1, du statut modifié), aux dispositions pour la gestion du personnel des agences (article 2, sous f), et articles 51 à 56 du RAA modifié).

126    Or, selon les requérants, si la Commission a bien saisi le comité du statut une seconde fois, elle ne l’a pas fait en temps utile dans la mesure où, premièrement, la nouvelle proposition résultait d’un compromis politique entre le Parlement, le Conseil et la Commission qui, de l’aveu de la Commission, ne pouvait plus être modifié, deuxièmement, le Parlement avait déjà adopté la nouvelle proposition en séance plénière et, troisièmement, le délai de quinze jours fixé par la Commission au comité du statut pour examiner la nouvelle proposition était beaucoup trop court pour rendre un avis utile, compte tenu de l’ampleur des modifications introduites dans la proposition de modification du statut.

127    Le Parlement, le Conseil et la Commission contestent l’argumentation des requérants.

128    À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’article 10 du statut, le comité du statut est consulté par la Commission sur toute proposition de révision du statut.

129    L’article 10 du statut impose à la Commission une obligation de consultation qui s’étend, outre aux propositions formelles, aux modifications substantielles de propositions déjà examinées auxquelles elle procède, à moins que, dans ce dernier cas, les modifications correspondent pour l’essentiel à celles proposées par le comité du statut (arrêt du 11 juillet 2007, Centeno Mediavilla e.a./Commission, T‑58/05, EU:T:2007:218, point 35).

130    Une telle interprétation est commandée tant par le libellé de l’article 10 du statut que par le rôle assumé par le comité du statut. En effet, d’une part, en prévoyant la consultation sans réserve ni exception du comité du statut sur toute proposition de révision du statut, cette disposition confère une large portée à l’obligation qu’elle définit. Ses termes sont donc manifestement inconciliables avec une interprétation restrictive de sa portée. D’autre part, le comité du statut, en tant qu’organe paritaire regroupant les représentants des administrations et ceux du personnel, ces derniers étant démocratiquement élus, de toutes les institutions, est amené à prendre en considération et à exprimer les intérêts de la fonction publique de l’Union dans son ensemble (arrêt du 11 juillet 2007, Centeno Mediavilla e.a./Commission, T‑58/05, EU:T:2007:218, point 36).

131    Par conséquent, le Tribunal a jugé dans l’arrêt du 11 juillet 2007, Centeno Mediavilla e.a./Commission (T‑58/05, EU:T:2007:218), que, lorsque des amendements à une proposition de révision du statut étaient introduits lors de la négociation du texte devant le Conseil, il existait une obligation de reconsultation du comité du statut avant l’adoption par le Conseil des dispositions réglementaires concernées, lorsque ces amendements affectaient de façon substantielle l’économie de la proposition (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 2007, Centeno Mediavilla e.a./Commission, T‑58/05, EU:T:2007:218, point 37).

132    Il importe de souligner que la procédure ayant conduit à l’adoption des dispositions du statut dont la légalité était contestée dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 11 juillet 2007, Centeno Mediavilla e.a./Commission (T‑58/05, EU:T:2007:218), était régie par l’article 283 TCE, en vertu duquel le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, arrêtait, sur proposition de la Commission et après consultation des autres institutions intéressées, le statut des fonctionnaires des Communautés européennes et le régime applicable aux autres agents de ces Communautés.

133    Toutefois, il y a lieu de rappeler que, en l’espèce, les dispositions attaquées ont été adoptées sur le fondement de l’article 336 TFUE, en vertu duquel la révision du statut et du RAA est soumise à la procédure législative ordinaire. Or, conformément à l’article 294 TFUE, la procédure législative ordinaire consiste en l’adoption d’un règlement, d’une directive ou d’une décision conjointement par le Parlement et le Conseil, « sur proposition de la Commission » (arrêt du 14 avril 2015, Conseil/Commission, C‑409/13, EU:C:2015:217, point 69).

134    Il convient également de rappeler qu’il résulte des dispositions combinées de l’article 17, paragraphe 2, TUE ainsi que des articles 289 et 293 TFUE que, de même qu’il revient, en principe, à la Commission de décider de présenter, ou non, une proposition législative et, le cas échéant, d’en déterminer l’objet, la finalité et le contenu, la Commission a, aussi longtemps que le Conseil n’a pas statué, le pouvoir de modifier sa proposition, voire, au besoin, de la retirer (arrêt du 14 avril 2015, Conseil/Commission, C‑409/13, EU:C:2015:217, point 74).

135    Au regard de la jurisprudence citée aux points 132 à 134, l’article 10 du statut est à interpréter en ce sens que, lorsque la Commission procède à une modification de sa proposition de révision du statut lors de la procédure législative ordinaire, elle a l’obligation de consulter de nouveau le comité du statut avant l’adoption par le Conseil des dispositions réglementaires concernées, lorsque cette modification affecte de façon substantielle l’économie de la proposition.

136    Or, en l’espèce, force est de constater que, si la Commission a fait usage de son pouvoir d’initiative législative en présentant la proposition de modification du statut au Parlement et au Conseil le 13 décembre 2011, elle n’a pas fait usage de ce pouvoir pour modifier ladite proposition.

137    Certes, la Commission a .participé aux négociations en trilogue tenues lors de la procédure législative ordinaire en cause. Or, selon le point 13 de la déclaration commune sur les modalités pratiques de la procédure de codécision (article 251 du traité CE) (JO 2007, C 145, p. 5), faite par le Parlement, le Conseil et la Commission le 13 juin 2007 et qui régit ces réunions informelles, au stade de la première lecture du Parlement, le rôle de la Commission se restreint à favoriser les contacts pris « pour faciliter la conduite des travaux en première lecture » et à exercer « son droit d’initiative de manière constructive en vue de rapprocher les positions du Parlement [...] et du Conseil, dans le respect de l’équilibre entre les institutions et du rôle que lui confère le traité ».

138    Ainsi, le fait que les négociations en trilogue tenues, en l’espèce, au stade de la première lecture par le Parlement ont abouti, avec la participation de la Commission dont le rôle est rappelé au point 137 ci-dessus, à un compromis entre le Parlement et le Conseil visant à amender la proposition de modification du statut ne saurait être considéré comme constituant une modification de ladite proposition par la Commission elle-même, au sens de l’arrêt du 11 juillet 2007, Centeno Mediavilla e.a./Commission (T‑58/05, EU:T:2007:218).

139    Par ailleurs, l’adoption en première lecture, par le Parlement, d’un texte ayant amendé la proposition de modification du statut ne saurait pas non plus être assimilée à une modification par la Commission elle-même de sa proposition initiale.

140    Il ressort de ce qui précède que la Commission n’était tenue de consulter à nouveau le comité du statut en vertu de l’article 10 du statut, tel qu’interprété à la lumière de la jurisprudence Centeno Mediavilla e.a./Commission, ni après l’aboutissement des négociations en trilogue tenues au stade de la première lecture du Parlement ni après l’adoption, par ce dernier, de sa proposition en première lecture.

141    Par conséquent, indépendamment du caractère substantiel des amendements adoptés par le Parlement en première lecture, il y a lieu d’écarter les arguments des requérants présentés au point 126 ci-dessus.

142    Dès lors, le premier moyen doit être rejeté comme étant non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré, en substance, de la violation des articles 12, 27 et 28 de la charte des droits fondamentaux ainsi que de l’article 11 de la CEDH, en ce que les OSP ou les regroupements d’OSP n’auraient pas été consultées concernant les modifications introduites par les dispositions attaquées conformément à la procédure prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981

143    Les requérants reprochent au Parlement et au Conseil l’absence de participation du Parlement à la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981. Ils font également grief au Conseil, en substance, d’avoir violé ladite procédure de concertation en n’ayant pas permis aux OSP faisant partie de la commission de concertation, dont l’U4U, de faire utilement entendre leur point de vue lors des réunions de la commission de concertation organisées à l’occasion de la procédure d’adoption des dispositions attaquées.

–       Sur l’absence de participation du Parlement à la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981

144    Il convient de relever que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le refus du Parlement de participer à la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981 ne constitue pas une violation du droit à l’information et à la consultation des travailleurs visé par l’article 27 de la charte des droits fondamentaux.

145    Il convient en effet de replacer la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981 dans le contexte juridique dans lequel elle a été instaurée. En effet, ladite décision a été adoptée par le Conseil à une époque où celui-ci était seul compétent pour arrêter le statut des fonctionnaires et des autres agents de l’Union.

146    Une telle procédure n’était donc, par nature, pas adaptée dans le cadre de la révision du statut selon la procédure législative ordinaire. C’est la raison pour laquelle le Conseil a, ainsi que cela a été exposé au point 20 ci-dessus, adopté une déclaration interprétative de sa décision du 23 juin 1981, après le refus du Parlement de participer à la procédure de concertation prévue par ladite décision en qualité de colégislateur.

147    Le refus du Parlement de participer à la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981 serait de nature à constituer une violation de l’article 27 de la charte des droits fondamentaux uniquement dans l’hypothèse où, d’une part, cette disposition imposerait aux institutions de l’Union l’obligation de consulter les OSP sur les propositions de révision du statut et, d’autre part, le Parlement n’aurait, en l’espèce, procédé à aucune consultation de la sorte.

148    Or, il y a lieu de rappeler que, aux termes mêmes de l’article 27 de la charte des droits fondamentaux, l’exercice des droits qu’il consacre est limité aux cas et conditions définis par le droit de l’Union. En l’espèce, il ressort de l’article 10 ter du statut que les propositions de révision du statut peuvent faire l’objet d’une consultation des OSP représentatives. Les institutions qui ne s’y sont pas engagées unilatéralement ne sont donc pas tenues de procéder à une telle consultation.

149    Dès lors, même à supposer que, contrairement à ce que pouvait laisser penser la lettre du 4 mars 2013 adressée par le président du Parlement au Conseil en réponse à l’invitation faite par ce dernier au Parlement de participer à la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981, les OSP n’aient pas été consultées par le Parlement sur les modifications du statut introduites par les dispositions attaquées, cette circonstance ne constituerait pas une violation du droit à l’information et à la consultation des travailleurs visé par l’article 27 de la charte des droits fondamentaux.

150    Il s’ensuit que le premier grief des requérants est non fondé.

–       Sur l’absence de réunions de la commission de concertation lors desquelles les requérants auraient pu utilement faire entendre leur point de vue

151    Les requérants soutiennent, en substance, que les réunions de la commission de concertation organisées lors des négociations en trilogue ne leur ont pas permis de faire valoir utilement leur point de vue. En particulier, ils font valoir que la réunion de la commission de concertation du 20 juin 2013 a été organisée après la phase décisive des négociations en trilogue et qu’aucun document écrit n’a été distribué à l’occasion de cette réunion.

152    Le Conseil fait valoir que la réunion du 20 juin 2013 a été organisée à un moment où elle pouvait encore être utile, soit avant la dernière négociation en trilogue, qui a eu lieu le 25 juin 2013, lors de laquelle le texte reflétant le compromis obtenu le 19 juin 2015 a été examiné. Il soutient également que sa décision du 23 juin 1981 ne prescrit pas la distribution de documents écrits en vue de l’organisation d’une réunion de la commission de concertation.

153    En réponse à une question du Tribunal adoptée sur le fondement de l’article 89, paragraphe 3, sous a) et b), du règlement de procédure, le Conseil a précisé que la raison pour laquelle il avait présenté oralement aux OSP lors de la réunion de la commission de concertation du 20 juin 2013 le compromis provisoire auquel avaient abouti les négociations en trilogue le jour précédent sans fournir de document écrit était qu’un travail technique important devait encore être fourni par les institutions pour refléter ce compromis dans un texte.

154    Le Conseil a ainsi indiqué que, à la suite des contacts préparatoires en cadre restreint entre le président du Coreper, le vice-président de la Commission et le rapporteur du Parlement, les représentants des trois institutions étaient arrivés à un compromis provisoire sur les éléments principaux de la réforme lors de la réunion de négociation en trilogue au soir du mercredi 19 juin 2013. Lors de cette réunion, le rapporteur du Parlement aurait souligné l’absence de texte reflétant le compromis provisoire. Il n’y aurait pas eu à ce moment d’accord politique final entre les participants à la négociation en trilogue. En outre, il aurait encore fallu refléter le compromis provisoire dans un projet de texte. Selon le Conseil, l’information et la consultation de la commission de concertation sur le compromis provisoire ont eu lieu le jeudi 20 juin 2013. Dans ce contexte, le président du Coreper aurait informé les OSP que le texte reflétant ce compromis provisoire serait disponible au début de la semaine suivante et distribué lorsqu’il serait prêt, donc avant la réunion suivante du Coreper le mercredi 26 juin 2013. Entre le jeudi 20 juin 2013 et le lundi 24 juin 2013, il y aurait eu d’intenses travaux techniques au niveau des experts des trois institutions afin d’établir un texte qui reflétait le compromis provisoire du 19 juin 2013. Le Conseil cite par exemple des réunions techniques au niveau des experts le jeudi 20 juin et le vendredi 21 juin 2013. Il y aurait également eu d’intenses échanges par courriel. À la suite de l’établissement du texte reflétant le compromis provisoire au soir du lundi 24 juin 2013, ce texte aurait été envoyé encore le même soir par courriel tant aux OSP participant à la commission de concertation qu’aux délégations des États membres. Au matin du mardi 25 juin 2013, le directeur général de l’administration du secrétariat général du Conseil aurait informé le personnel dudit secrétariat général par un message électronique que le texte en question avait été publié sur le site électronique interne de ce secrétariat général. Au soir du mardi 25 juin 2013, une ultime réunion de négociation en trilogue aurait eu lieu afin d’analyser le texte et de trouver un compromis politique final entre les négociateurs à soumettre à leurs institutions respectives. Lors de cette réunion, les négociateurs se seraient mis d’accord sur un nombre limité de modifications de substance. Cela aurait exigé quelques ajustements du texte de compromis au cours de la journée du mercredi 26 juin 2013. Le même jour, le Coreper aurait entendu le rapport oral du secrétaire général du Conseil sur la réunion de la commission de concertation du 20 juin 2013 et aurait procédé à un premier examen du résultat de la négociation en trilogue. À la suite de la réunion de la commission des affaires juridiques du Parlement au matin du 27 juin 2013 qui aurait approuvé le texte du compromis final, l’administration du secrétariat général du Conseil aurait envoyé aux participants de la commission de concertation la version finale du compromis avec des explications par courriel le même jour, et donc avant l’examen final par le Coreper le vendredi 28 juin 2013. De nouveau, le texte du compromis final aurait été distribué concomitamment par courriel tant aux OSP participant à la commission de concertation qu’aux délégations des États membres. Selon le Conseil, il ne saurait lui être fait grief de ne pas avoir distribué un texte qui ne faisait pas encore partie des informations disponibles au sens de sa décision du 23 juin 1981.

155    Dans sa réponse écrite à la question du Tribunal, le Conseil rappelle, par ailleurs, que, dans sa déclaration interprétative du 6 mai 2013, il a émis une réserve selon laquelle l’application de la décision de 1981 était sans préjudice des délais et du déroulement de la procédure législative ordinaire. Or, en l’espèce, l’impossibilité de produire le texte du compromis provisoire déjà le 20 juin 2013 aurait été liée à la dynamique du déroulement de la procédure législative dans cette période cruciale. Cette dynamique s’était accélérée, selon le Conseil, par la perspective d’un accord politique avant la fin de la présidence irlandaise fin juin 2013 et par le lien politique entre la réforme du statut et un accord politique entre le Parlement et le Conseil sur le cadre financier pluriannuel sous présidence irlandaise. Cela aurait permis à la procédure législative sur la réforme du statut d’aboutir en première lecture, en dépit des circonstances politiques particulièrement difficiles.

156    S’agissant, premièrement, de la question de savoir si la réunion de concertation du 20 juin 2013 a été organisée à un moment où elle pouvait encore être utile, il convient de rappeler que, conformément au point I.5 de la décision du Conseil du 23 juin 1981, les réunions de la commission de concertation sont convoquées par son président, agissant de sa propre initiative ou à la demande d’un membre de ladite commission, après que les membres de la commission de concertation auront disposé d’un délai raisonnable pour se familiariser avec la question à débattre.

157    À cet égard, il convient de relever que l’U4U a adressé une demande d’organisation de la réunion de la commission de concertation au président de cette dernière le 7 juin 2013 et que celui-ci a, le 14 juin 2013, convoqué les membres de la dite commission pour le 20 juin 2013.

158    Il convient également de rappeler que, lors de la négociation en trilogue du 19 juin 2013, le Parlement, le Conseil et la Commission sont parvenus à un compromis provisoire sur le contenu de la réforme du statut. Par conséquent, à cette date, aucune position ferme n’avait encore été adoptée au sens de l’article I.8 de la décision du Conseil du 23 juin 1981.

159    Il importe de souligner que ce n’est que lors de la négociation en trilogue du 25 juin 2013, soit cinq jours après la tenue de la réunion de la commission de concertation, que les institutions ont marqué leur accord sur le texte du compromis final dont la rédaction avait été terminée le 24 juin 2013 au soir. Encore convient-il de préciser que ce n’est formellement que le 28 juin 2013 qu’une proposition ferme a été adoptée par le Coreper (voir point 170 ci-après).

160    Il s’ensuit que le fait d’organiser la réunion de la commission de concertation le 20 juin 2013, soit postérieurement à la négociation en trilogue lors de laquelle le compromis provisoire sur le contenu de la réforme avait été atteint, n’était pas, en soi, de nature à priver les OSP participant à la commission de concertation de la possibilité de faire entendre utilement leur point de vue. Bien au contraire, c’est précisément afin de recueillir celui-ci avant l’adoption d’une position ferme qu’il importait que la réunion fût tenue dès que possible, en l’espèce le jour suivant l’adoption d’un compromis provisoire.

161    S’agissant, deuxièmement, de la question de savoir si les OSP participant à la commission de concertation ont été privées de la possibilité de faire entendre utilement leur point de vue au motif qu’aucun document n’avait été distribué à l’occasion des réunions de cette commission et, en particulier, que seule une synthèse orale des grandes lignes de la réforme aurait été présentée lors de la réunion du 20 juin 2013, il y a lieu de relever que la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981 ne prescrit ni ne prohibe la remise de documents écrits aux OSP en vue de la préparation des réunions de concertation ou à l’occasion de celles-ci.

162    Or, il convient de relever que, selon l’article I.8 de la décision du Conseil du 23 juin 1981, lu à la lumière de la déclaration interprétative du Conseil du 6 juin 2013, la procédure de concertation prévue par ladite décision a pour objet d’examiner toutes les informations disponibles et les positions des parties dans le but de faciliter, dans toute la mesure du possible, la convergence des positions et d’assurer que les points de vue du personnel et des autorités administratives sont connus des représentants des États membres avant qu’ils ne prennent une position ferme dans le cadre de la procédure législative ordinaire.

163    Eu égard à l’objet de la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981, la réponse à la question de savoir si le Conseil est tenu de communiquer les informations dont il dispose par écrit aux OSP de façon que celles-ci puissent exprimer leur point de vue dépend donc de la connaissance que ces dernières ont desdites informations, de la nature et de l’étendue de ces informations ainsi que des contraintes temporelles et techniques caractérisant le déroulement de la négociation en trilogue.

164    En l’espèce, s’agissant de la première réunion de la commission de concertation, qui avait pour objet le mandat de négociation du Conseil en vue de la négociation en trilogue, il y a lieu de considérer que le Conseil n’était pas tenu de communiquer des documents écrits aux OSP, celles-ci ayant eu connaissance de la proposition de modification du statut sur laquelle devait précisément porter la négociation.

165    S’agissant de la seconde réunion de la commission de concertation, qui s’est tenue le 20 juin 2013 après que le Parlement, le Conseil et la Commission furent parvenus, le 19 juin 2013, à un compromis provisoire sur la proposition de révision du statut, il convient de relever que, si les OSP avaient connaissance du contenu de la proposition de modification du statut et de certaines propositions des États membres, comme en témoigne le tract publié par plusieurs OSP le 17 septembre 2012 et mentionné au point 11 ci-dessus, elles n’avaient pas connaissance du résultat exact des négociations en trilogue qui portaient, notamment, sur ces propositions.

166    Dès lors, compte tenu tant de la nature que de l’étendue des modifications introduites dans la proposition de modification du statut lors de la négociation en trilogue, notamment par les dispositions attaquées, le Conseil était tenu de transmettre aux OSP toutes les informations disponibles de façon à leur permettre de donner utilement leur point de vue sur ces modifications. Cela supposait donc, en principe, que lesdites OSP pussent disposer d’un support écrit pour pouvoir réagir efficacement.

167    Toutefois, force est de constater que, ainsi qu’il ressort des explications fournies par le Conseil et non remises en cause par les requérants, le 20 juin 2013, le texte reflétant le compromis provisoire du 19 juin 2013 n’était pas encore disponible, de sorte qu’il ne pouvait matériellement être transmis aux OSP membres de la commission de concertation.

168    Contrairement à ce que soutiennent les requérants, le fait qu’il soit hautement improbable que les négociations se soient tenues sans l’aide d’aucun document écrit est ici dénué de pertinence dans la mesure où, à la date à laquelle s’est tenue la réunion de la commission de concertation, de tels documents ne pouvaient, par nature, refléter fidèlement le compromis provisoire auquel étaient parvenues les institutions le 19 juin 2013.

169    Dans ces conditions, il ne saurait être reproché au Conseil d’avoir procédé lors de la réunion de la commission de concertation du 20 juin 2013 à une présentation orale des principaux éléments du compromis provisoire obtenu le 19 juin 2013, présentation qui correspondait, dans les circonstances particulières de l’espèce, caractérisées par des contraintes temporelles et techniques caractérisant le déroulement de la négociation en trilogue, au seul procédé envisageable d’information des OSP.

170    En outre, il ressort des explications et des éléments de preuve fournis par le Conseil en réponse à la question posée par le Tribunal sur le fondement de l’article 89, paragraphe 3, du règlement de procédure que celui-ci a bien transmis aux OSP membres de la commission de concertation le texte du compromis provisoire, accompagné d’explications, le soir du 24 juin 2013, ainsi que le texte du compromis final, également accompagné d’explications, le 27 juin 2013, soit antérieurement à la prise de position ferme des États membres, au sens de l’article I.8 de la décision du Conseil du 23 juin 1981, lors de l’examen du texte du compromis final par le Coreper le 28 juin 2013. Or, force est de constater que, ainsi que les requérants l’ont admis lors de l’audience, les OSP participant à la commission de concertation n’ont pas demandé l’organisation d’une nouvelle réunion en vue d’être entendues sur le texte du compromis provisoire ni même sur le texte du compromis final.

171    Par conséquent, le grief pris de ce que le Conseil n’aurait pas organisé de réunions de la commission de concertation lors desquelles les requérants auraient pu faire utilement valoir leur point de vue doit être rejeté comme non fondé. Il convient, dès lors, de rejeter le deuxième moyen.

 Sur le troisième moyen, tiré, en substance, d’une violation du « principe des droits acquis » en matière de concertation et d’information des travailleurs dans le cadre de la procédure de révision du statut

172    Les requérants soutiennent que la violation du droit à l’information et à la consultation des travailleurs, qui aurait pris la forme du défaut de consultation du comité du statut et de l’absence de concertation avec les OSP, constitue une violation de l’obligation de « standstill » ou du « principe des droits acquis » en matière de consultation et d’information des travailleurs au regard de la place qui avait été reconnue aux OSP lors de la précédente réforme du statut en 2004.

173    À cet égard, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la question de savoir si les dispositions arrêtées par les institutions de l’Union pour mettre en œuvre les droits à l’information et à la consultation des travailleurs consacrés par l’article 27 de la charte des droits fondamentaux font l’objet d’une obligation de « standstill », il suffit de rappeler que les griefs des requérants tirés d’une violation de l’article 10 du statut et de la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981 ont été rejetés comme étant non fondés à l’issue de l’examen des premier et deuxième moyens.

174    En outre, il importe de souligner que les requérants restent en défaut d’expliquer en quoi les droits qu’ils tirent de la décision du Conseil du 23 juin 1981 ou de toute autre disposition arrêtée par les institutions de l’Union pour mettre en œuvre les droits à l’information et à la consultation des travailleurs consacrés par l’article 27 de la charte des droits fondamentaux auraient été réduits par les institutions depuis la précédente réforme du statut opérée en 2004.

175    Le troisième moyen doit donc également être rejeté comme non fondé.

 Sur le quatrième moyen, tiré, en substance, de la violation des « principes de bonne législation » et, en particulier, du devoir de minutie et de l’obligation de motivation

176    Au soutien du quatrième moyen, les requérants font valoir que, en manquant à leur obligation d’assurer l’information et la consultation des travailleurs dans le cadre de l’adoption des dispositions attaquées, le Parlement et le Conseil ont, du même coup, violé les « principes de bonne législation », qui recouvrent le devoir de minutie, c’est-à-dire l’obligation pour le législateur de tenir compte de tous les éléments pertinents avant d’adopter un texte, ainsi que l’obligation de motivation.

177    Le Parlement, le Conseil et la Commission contestent l’argumentation des requérants.

178    Il convient de relever d’emblée, sans qu’il soit besoin d’apprécier dans quelle mesure le législateur de l’Union pourrait être tenu par un devoir de minutie, que ce grief repose sur la prémisse selon laquelle le Parlement, le Conseil et la Commission ont, en l’espèce, violé les droits à la consultation et à l’information des travailleurs. Or, d’une part, ainsi qu’il ressort de l’examen des premier et deuxième moyens, le Parlement, le Conseil et la Commission n’ont violé en l’espèce ni l’article 10 du statut ni la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981. D’autre part, les requérants ne font valoir la violation d’aucune autre disposition susceptible de mettre en œuvre l’article 27 de la charte des droits fondamentaux qui consacre le droit à la l’information et à la consultation des travailleurs.

179    Il convient, dès lors, de rejeter le grief tiré de la violation du devoir de minutie comme non fondé.

180    Par ailleurs, s’agissant de la prétendue violation de l’obligation de motivation, il convient de rappeler que, conformément à l’article 296 TFUE, l’obligation de motivation vise tous les actes juridiques adoptés par les institutions et les organes de l’Union, sans préjudice de leur mode d’adoption. Il s’ensuit que les dispositions attaquées sont également soumises à l’obligation de motivation.

181    À cet égard, il convient également de rappeler que, conformément à la jurisprudence, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et faire apparaître, de façon claire et non équivoque, le raisonnement de l’institution qui en est l’auteur, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. Cette exigence doit être appréciée en fonction des circonstances de l’espèce, notamment du contenu de l’acte, de la nature des motifs invoqués et de l’intérêt que les destinataires ou d’autres personnes concernées directement et individuellement par l’acte peuvent avoir à recevoir des explications. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêt du 24 novembre 2005, Italie/Commission, C‑138/03, C‑324/03 et C‑431/03, EU:C:2005:714, points 54 et 55).

182    Les considérants 17 à 19 du règlement n° 1023/2013 précisent ce qui suit :

« (17)       Le Conseil a demandé à la Commission de réaliser une étude et de présenter des propositions appropriées concernant l’article 5, paragraphe 4, l’annexe I, section A, et l’article 45, paragraphe 1, du statut, afin que soit établi un lien clair entre les responsabilités et le grade et que l’accent soit davantage mis sur le niveau de responsabilités lors de la comparaison des mérites dans le cadre de la promotion.

(18)       Compte tenu de cette demande, il convient de faire en sorte que la promotion à un grade plus élevé soit subordonnée à l’implication personnelle, à l’amélioration des qualifications et des compétences, ainsi qu'à l’exercice de fonctions dont l’importance justifie la nomination du fonctionnaire à ce grade supérieur.

(19)       Le parcours de carrière dans les groupes de fonctions AD et AST devrait être restructuré de telle sorte que les grades les plus élevés soient réservés à un nombre limité de fonctionnaires exerçant des responsabilités au plus haut niveau. Dès lors, les administrateurs peuvent progresser uniquement jusqu’au grade AD 12, sauf s’ils sont nommés à un poste spécifique d’un grade supérieur, et les grades AD 13 et AD 14 devraient être réservés au personnel exerçant un rôle comportant des responsabilités importantes. De la même manière, les fonctionnaires de grade AST 9 ne peuvent être promus au grade AST 10 que conformément à la procédure prévue à l’article 4 et à l’article 29, paragraphe 1, du statut. »

183    La motivation des modifications de l’article 45, ainsi que des annexes I et XIII du statut, relatives à la structure de carrière du personnel appartenant au groupe de fonctions AD introduites par les dispositions attaquées fait donc apparaître, de façon claire et non équivoque, le raisonnement du Parlement et du Conseil, et permet ainsi aux requérants de connaître les justifications de la mesure prise et au Tribunal d’exercer son contrôle.

184    Il en va de même en ce qui concerne la motivation des modifications introduites par les dispositions attaquées à l’annexe X du statut, quant au nombre de jours de congé des fonctionnaires de l’Union affectés sur le territoire d’un État tiers qui figure au considérant 27 du règlement n° 1023/2013, qui indique qu’il convient de moderniser les conditions de travail du personnel employé dans des pays tiers et de les rendre meilleures sur le plan du rapport coût-efficacité tout en réalisant des économies et que les droits à congé annuel devraient être adaptés.

185    Dès lors, il convient de rejeter le grief tiré de la violation de l’obligation de motivation des dispositions attaquées comme non fondé et, partant, le quatrième moyen dans son ensemble.

186    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, le recours doit être rejeté comme étant non fondé.

 Sur les dépens

187    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Les requérants ayant succombé, il y a lieu de les condamner aux dépens, conformément aux conclusions du Parlement et du Conseil. Conformément à l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, la Commission supportera ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      L’Union pour l’Unité (U4U), l’Unité & solidarité - Hors Union (USHU), le Regroupement Syndical (RS) et M. Georges Vlandas sont condamnés aux dépens.

3)      La Commission européenne supportera ses propres dépens.

Gratsias

Kancheva

Wetter

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 septembre 2016.

Signatures

Table des matières


Antécédents du litige

Procédure et conclusions des parties

En droit

Sur la recevabilité

Sur l’affectation des intérêts propres de l’U4U, de l’USHU et du RS

Sur l’existence d’une disposition légale reconnaissant expressément aux associations professionnelles une série de facultés à caractère procédural

– Sur la participation à la procédure de consultation prévue par l’article 10 du statut

– Sur la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981

Sur le fond

Observations liminaires

– Sur la recevabilité des premier, deuxième et quatrième moyens

– Sur la recevabilité des éléments de preuve présentés par le Conseil lors de l’audience

– Sur les considérations relatives à l’existence d’un prétendu droit à la négociation collective dans les premier et deuxième moyens

Sur le premier moyen, tiré, en substance, de la violation de l’article 10 du statut et des articles 12, 27 et 28 de la charte des droits fondamentaux ainsi que de l’article 11 de la CEDH, en ce que le comité du statut n’aurait pas été utilement consulté concernant les modifications du statut introduites par les dispositions attaquées

Sur le deuxième moyen, tiré, en substance, de la violation des articles 12, 27 et 28 de la charte des droits fondamentaux ainsi que de l’article 11 de la CEDH, en ce que les OSP ou les regroupements d’OSP n’auraient pas été consultées concernant les modifications introduites par les dispositions attaquées conformément à la procédure prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981

– Sur l’absence de participation du Parlement à la procédure de concertation prévue par la décision du Conseil du 23 juin 1981

– Sur l’absence de réunions de la commission de concertation lors desquelles les requérants auraient pu utilement faire entendre leur point de vue

Sur le troisième moyen, tiré, en substance, d’une violation du « principe des droits acquis » en matière de concertation et d’information des travailleurs dans le cadre de la procédure de révision du statut

Sur le quatrième moyen, tiré, en substance, de la violation des « principes de bonne législation » et, en particulier, du devoir de minutie et de l’obligation de motivation

Sur les dépens


* Langue de procédure : le français.