Language of document : ECLI:EU:T:2007:385

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (deuxième chambre)

12 décembre 2007 (*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire verbale suchen.de – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Nom de domaine – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 40/94 »

Dans l’affaire T‑117/06,

DeTeMedien Deutsche Telekom Medien GmbH, établie à Francfort-sur-le-Main (Allemagne), représentée initialement par Mes J. Fesenmair et I. Gehring, puis par Mes Fesenmair et T. M. Müller, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. G. Schneider, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 30 janvier 2006 (affaire R 287/2005‑1), concernant une demande d’enregistrement du signe verbal suchen.de comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (deuxième chambre),

composé de M. N. J. Forwood, faisant fonction de président, Mme I. Pelikánová et M. S. Papasavvas, juges,

greffier : Mme C. Kristensen, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 13 avril 2006,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 18 juillet 2006,

vu le rejet de la demande de déposer un mémoire en réplique du 16 août 2006,

à la suite de l’audience du 11 juillet 2007,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 6 juillet 2004, la requérante a présenté une demande de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal suchen.de.

3        Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 9, 16, 35, 36, 38 et 42 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 9 : « Appareils et instruments électriques, électroniques, optiques, de mesurage, de signalisation, de contrôle (inspection) ou d’enseignement (compris dans la classe 9) ; appareils pour l’enregistrement, la transmission, le traitement, la reproduction du son, des images ou des données ; supports d’enregistrement de données exploitables par une machine ; distributeurs automatiques et mécanismes pour appareils à prépaiement ; équipements pour le traitement de données et ordinateurs » ;

–        classe 16 : « Produits de l’imprimerie, en particulier cartes en carton ou en plastique imprimées et/ou gaufrées ; matériel d’instruction et d’enseignement (à l’exception des appareils) ; articles de bureau (à l’exception des meubles) » ;

–        classe 35 : « Publicité ; gestion des affaires commerciales ; systématisation et compilation de données et d’informations dans des bases de données informatiques » ;

–        classe 36 : « Affaires financières ; affaires immobilières » ;

–        classe 38 : « Télécommunications ; exploitation et location d’équipements de télécommunication, en particulier pour la radio et la télévision ; services d’une banque de données, à savoir location de temps d’accès à un centre serveur de bases de données ; transmission d’informations dans le domaine de la culture, du sport, de l’économie, de la formation et de l’éducation ainsi que de la récréation et du divertissement par voie électronique » ;

–        classe 42 : « Création de programmes informatiques ; location d’équipements pour le traitement de données et d’ordinateurs ; planification et conception d’équipements de télécommunication ».

4        Par décision du 12 janvier 2005, l’examinateur a rejeté la demande d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement n° 40/94, sauf en ce qui concerne les produits et les services suivants :

–        classe 9 : « Distributeurs automatiques et mécanismes pour appareils à prépaiement » ;

–        classe 16 : « Articles de bureau (à l’exception des meubles) » ;

–        classe 35 : « Gestion des affaires commerciales ».

5        Le 14 mars 2005, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94, contre la décision de l’examinateur.

6        Par décision du 30 janvier 2006 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté ce recours au motif que, par rapport aux produits et aux services pour lesquels l’enregistrement était demandé et qui demeuraient litigieux à la suite du rejet partiel de la demande d’enregistrement par l’examinateur, le signe suchen.de était descriptif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, et dépourvu de caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement.

 Conclusions des parties

7        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

8        L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

9        À l’appui de son recours, la requérante invoque, en substance, deux moyens tirés, le premier, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 et, le second, de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), dudit règlement. Il convient, en l’espèce, d’examiner tout d’abord le premier moyen.

 Arguments des parties

10      La requérante considère que le signe suchen.de possède un caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

11      À cet égard, premièrement, elle fait valoir que, dans la décision attaquée, la chambre de recours n’examine pas de façon argumentée le caractère distinctif du signe demandé, mais fonde sa motivation uniquement sur l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94. La chambre de recours n’aurait donc pas suffisamment examiné si l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement était applicable. Or, selon la requérante, de plus amples développements relatifs au caractère distinctif auraient été nécessaires.

12      Deuxièmement, la requérante soutient que, conformément à la jurisprudence, si aucun contenu sémantique évident ne peut être attribué à une marque pour les produits et les services concernés et s’il ne s’agit pas non plus d’un terme courant de la langue concernée, alors rien n’indique que le signe verbal utilisé comme marque soit dépourvu de caractère distinctif. Ainsi, une marque ne consistant pas exclusivement en une indication courante fournissant des informations sur les produits et les services concernés posséderait un caractère distinctif. Dans ces circonstances, la requérante considère que tout caractère distinctif ne saurait être dénié au signe demandé, étant donné que, utilisé pour les produits et les services concernés, il est apte à distinguer ces produits et ces services.

13      Troisièmement, la requérante prétend que, contrairement à ce que considère la chambre de recours, le signe suchen.de n’est pas descriptif des produits et des services concernés. Selon elle, la condition pour qu’il le soit est qu’il désigne, de manière univoque, ces produits ou ces services ou leurs caractéristiques. Or, elle indique que le signe demandé ne consiste pas exclusivement en une telle indication désignant directement certaines caractéristiques desdits produits ou services. Selon la requérante, l’OHMI ne saurait exclure de la protection en tant que marque un « signe parlant », c’est-à-dire faisant allusion au contenu des produits et des services couverts ou laissant entendre de quoi il s’agit.

14      Ainsi, la requérante souligne que, contrairement à l’analyse de la chambre de recours (point 38 de la décision attaquée), le signe suchen.de est une invention lexicale qui n’est pas entrée dans le langage courant [voir, s’agissant de ce concept, arrêt du Tribunal du 3 octobre 2001, Zapf Creation/OHMI (New Born Baby), T‑140/00, Rec. p. II‑2927]. À cet égard, elle soutient que, contrairement à la position de la chambre de recours (point 36 de la décision attaquée), l’élément « suchen » (chercher) n’indique pas qu’il serait possible de chercher quelque chose à l’aide des produits et des services concernés ou que le consommateur aurait la possibilité d’effectuer une recherche relative à ceux-ci. De plus, elle relève que ce signe n’a justement pas été déposé pour des produits et des services portant sur la recherche de données sur Internet. Aussi, aucun caractère directement descriptif des produits et des services concernés ne saurait lui être reconnu.

15      La requérante souligne en outre que l’OHMI n’a pas procédé à des constatations différenciées en ce qui concerne les produits et les services concernés et estime que c’est la raison pour laquelle il a abouti à un résultat inexact. Elle fait ainsi valoir, par exemple, que le signe demandé n’a aucun caractère descriptif s’agissant des produits et des services suivants : « Produits de l’imprimerie » ; « Publicité et gestion des affaires commerciales » ; « Affaires financières ; affaires immobilières » ; « Télécommunications ».

16      La requérante considère enfin que le fait que la marque dont l’enregistrement est demandé fasse indirectement référence aux produits et aux services concernés ne suffit pas pour justifier un refus d’enregistrement en application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94. Or, en l’espèce, le signe suchen.de ne décrit pas directement ou immédiatement les produits et les services concernés, étant donné que ceux-ci ne remplissent aucune fonction de recherche, mais ne fait qu’indirectement référence auxdits produits et services.

17      Quatrièmement, la requérante reconnaît que le public pertinent comprendra le signe suchen.de comme un nom de domaine correspondant à un site Internet, dont elle admet, par ailleurs, être effectivement propriétaire. À cet égard, elle souligne que les consommateurs sont conscients du fait que, derrière un nom de domaine, se trouve un fournisseur unique, puisque chaque nom de domaine est unique et ne peut être attribué qu’une fois. Par conséquent, les produits et les services proposés sur un site Internet seraient toujours associés à un seul fournisseur. L’enregistrement du nom de domaine entraînerait donc une monopolisation de celui-ci, qui ne pourrait alors plus être utilisé par des tiers. Dès lors, l’utilisation du signe suchen.de ne présenterait aucun intérêt pour les tiers.

18      Selon la requérante, tout impératif de disponibilité est exclu d’emblée. Au contraire, l’utilisation du signe suchen.de par des tiers pourrait suggérer aux consommateurs que des offres de ces tiers se trouvent sur son site Internet, ce qui est impossible, puisque seules s’y trouvent ses propres offres. Selon la requérante, l’enregistrement du nom de domaine suffit à interdire aux tiers l’utilisation du signe suchen.de, parce que cette utilisation pourrait induire les consommateurs en erreur et entraîner un risque de confusion avec son nom de domaine. Ainsi, même si le public comprenait indirectement la combinaison des mots « suchen » et « de » comme un « signe parlant » indiquant qu’il s’agit d’un instrument de recherche en langue allemande relatif aux produits et aux services concernés, cela serait sans incidence.

19      Premièrement, l’OHMI relève que la chambre de recours a fondé la décision attaquée en développant des arguments relatifs, en premier lieu, à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 et au caractère descriptif du signe demandé. Selon l’OHMI, l’allégation de la requérante selon lequel l’examen de l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement serait insuffisant est erronée dans la mesure où il suffit qu’il existe un motif absolu de refus pour qu’une demande d’enregistrement soit rejetée. Ainsi, la chambre de recours aurait pu fonder la décision attaquée exclusivement sur l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94 et le caractère descriptif du signe demandé.

20      L’OHMI constate que la chambre de recours a néanmoins vérifié également si le motif absolu de refus fondé sur l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 pouvait être retenu et que, dans ce cadre, elle a relevé le caractère descriptif du signe demandé. À cet égard, l’OHMI rappelle que, selon la jurisprudence, le fait de relever le caractère descriptif d’un signe dans le cadre de l’examen de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 ne constitue pas une erreur de droit. Il est normalement permis, selon l’OHMI, de considérer que l’existence d’un caractère descriptif entraîne le défaut de caractère distinctif.

21      Deuxièmement, l’OHMI fait valoir que, même sans suivre le raisonnement de la chambre de recours relatif au caractère descriptif du signe demandé, le rejet de l’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 est justifié. En effet, en considérant comme la requérante que le signe suchen.de devrait être compris ou serait perçu uniquement comme synonyme de l’expression « chercher des données sur l’Internet », la raison de l’absence de caractère distinctif résiderait précisément dans ce contenu conceptuel. Selon l’OHMI, le consommateur percevra ce signe en tant que nom de domaine allemand à l’aide duquel il peut chercher des données sur Internet. L’OHMI précise, à cet égard, que le signe demandé n’est pas le symbole d’un nom de domaine à associer à un fabricant déterminé mais celui d’un nom de domaine caractérisé par sa fonctionnalité (voir, à cet égard, les décisions de la deuxième chambre de recours de l’OHMI du 13 mai 2003 dans l’affaire R 834/2001‑2, relative au signe LISTEN.COM, du 8 juillet 2003 dans l’affaire R 1043/2001‑2, portant sur le signe LASTMINUTE.COM, et du 14 septembre 2004 dans l’affaire R 127/2004‑2, relative au signe BESTDRESSEDKIDS.COM). En d’autres termes, le consommateur percevra, selon l’OHMI, le signe demandé comme étant une indication publicitaire ou une référence à la localisation virtuelle d’un outil Internet et non comme une référence à l’origine commerciale des produits et des services concernés.

 Appréciation du Tribunal

22      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, sont refusées à l’enregistrement les « marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ». En outre, l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 40/94 énonce que le « paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté ».

23      Il découle des termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 qu’un minimum de caractère distinctif suffit pour que le motif de refus défini dans cet article ne soit pas applicable [arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Eurocool Logistik/OHMI (EUROCOOL), T‑34/00, Rec. p. II‑683, point 39].

24      Le caractère distinctif d’une marque au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 signifie que cette marque permet d’identifier le produit ou le service pour lequel l’enregistrement est demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit ou ce service de ceux d’autres entreprises, et, partant, est à même de remplir la fonction essentielle de la marque (voir arrêt de la Cour du 21 octobre 2004, OHMI/Erpo Möbelwerk, C‑64/02 P, Rec. p. I‑10031, point 42, et jurisprudence citée).

25      Le caractère distinctif d’une marque ne peut être apprécié que, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent [arrêt de la Cour du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C-456/01 P et C-457/01 P, Rec. p. 5089, point 33 ; arrêt du Tribunal du 3 juillet 2003, Best Buy Concepts/OHMI (BEST BUY), T‑122/01, Rec. p. II‑2235, point 22].

26      En l’espèce, en premier lieu, il convient de constater que, ainsi que la chambre de recours l’a relevé au point 35 de la décision attaquée, les produits et les services concernés s’adressent essentiellement aux consommateurs finals et aux professionnels, ce que la requérante n’a pas contesté. Ils sont donc destinés à la consommation générale. En outre, il est constant que le signe demandé est composé de termes compris et utilisés dans la langue allemande. Par conséquent, le public ciblé pertinent par rapport auquel il convient d’apprécier l’existence d’un motif absolu de refus est le consommateur germanophone moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

27      En deuxième lieu, il convient de relever que le signe suchen.de est uniquement composé des éléments « suchen » et « .de », tous deux relevant de la langue allemande ou étant utilisés ou compris par un public germanophone.

28      Premièrement, il échet de constater que l’élément « suchen » est un verbe courant en langue allemande évoquant, de manière générale, la notion de « recherche ». Il permet ainsi au public pertinent de comprendre, comme la chambre de recours l’a en substance indiqué (point 36 de la décision attaquée) et contrairement à ce que prétend la requérante, qu’il est possible de chercher quelque chose à l’aide des produits et des services concernés ou que le consommateur a la possibilité de mener une recherche relative à ceux-ci. Dès lors, il y a lieu de considérer que l’élément « suchen » est dépourvu de caractère distinctif en ce qui concerne les produits et les services concernés.

29      Deuxièmement, il y a lieu de relever que l’élément « .de » constitue l’extension nationale allemande d’un nom de domaine de premier niveau [country code Top Level Domain (ccTLD)] correspondant à un site Internet et sera ainsi directement intelligible par le public pertinent comme se rapportant à l’adresse d’un site Internet allemand ou ayant un lien avec l’Allemagne. Il convient en outre de relever que cet élément est générique et technique. En effet, un tel suffixe est généralement requis dans le cadre de la structure normale de l’adresse d’un site Internet d’origine allemande. De plus, ainsi que la chambre de recours l’a relevé au point 37 de la décision attaquée, cet élément n’est pas inhabituel pour désigner des produits et des services, étant donné qu’il est considéré par le public pertinent comme renvoyant à une adresse Internet à laquelle ceux-ci peuvent être proposés ou achetés. En effet, il évoque l’idée que les produits et les services concernés peuvent être consultés ou achetés par le biais du réseau Internet. Dès lors, il y a lieu de considérer que l’élément « .de » est également dépourvu de caractère distinctif par rapport aux produits et aux services concernés.

30      Il résulte de ce qui précède que le signe demandé est constitué par une combinaison d’éléments courants ou techniques, qui ne sont pas aptes à distinguer les produits et les services de la requérante de ceux d’autres entreprises et qui sont donc chacun dépourvus de caractère distinctif par rapport aux produits et aux services concernés.

31      En troisième lieu, il convient de procéder à un examen d’ensemble du signe suchen.de. En effet, s’agissant d’un signe composé de mots et d’un signe typographique, comme celui faisant l’objet du présent litige, un éventuel caractère distinctif peut être examiné, en partie, pour chacun de ses termes ou de ses éléments, pris séparément, mais doit, en tout état de cause, dépendre d’un examen de l’ensemble qu’ils composent. La seule circonstance que chacun de ces éléments, pris séparément, est dépourvu de caractère distinctif n’exclut en effet pas que la combinaison qu’ils forment puisse présenter un caractère distinctif [voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 16 septembre 2004, SAT.1/OHMI, C‑329/02 P, Rec. p. I‑8317, point 28, et arrêt du Tribunal du 12 juin 2007, Sherwin-Williams/OHMI (TWIST & POUR), T‑190/05, non encore publié au Recueil, point 43, et la jurisprudence citée].

32      Premièrement, il apparaît, ainsi que la chambre de recours l’a relevé au point 38 de la décision attaquée, qu’il n’existe aucune différence sensible entre le signe demandé et la somme des deux éléments qui le constituent. Ainsi, même si l’enregistrement d’un signe en tant que marque n’est pas subordonné à la constatation d’un certain niveau de créativité ou d’imagination linguistique ou artistique de la part du titulaire de la marque (arrêt SAT.1/OHMI, précité, point 41), il n’en demeure pas moins qu’aucun élément additionnel, par exemple de nature graphique, ne permet de considérer que la combinaison formée par les éléments courants et usuels « suchen » et « .de » serait inhabituelle, notamment dans la perception que le consommateur germanophone moyen peut avoir des produits et des services concernés.

33      Deuxièmement, le signe demandé ne présente aucun écart perceptible par rapport à la désignation générique d’un nom de domaine correspondant à un site Internet d’origine allemande.

34      Il convient donc, tout d’abord, d’écarter l’argument de la requérante par lequel elle conteste que le signe suchen.de soit une invention lexicale entrée dans le langage courant, dès lors que sa construction est générique par rapport à une adresse Internet classique et que, en tout état de cause, l’OHMI n’a pas l’obligation de prouver qu’un signe figure dans le dictionnaire pour refuser son enregistrement [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 22 juin 2005, Metso Paper Automation/OHMI (PAPERLAB), T‑19/04, Rec. p. II‑2383, point 34].

35      Ensuite, il y a lieu de considérer que l’enregistrement d’une marque composée de signes ou d’indications qui sont par ailleurs utilisés pour désigner un nom de domaine n’est pas exclu, en tant que tel, en raison d’une telle utilisation [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 5 décembre 2002, Sykes Enterprises/OHMI (REAL PEOPLE, REAL SOLUTIONS), T‑130/01, Rec. p. II‑5179, point 19 ; BEST BUY, précité, point 21, et du 30 juin 2004, Norma Lebensmittelfilialbetrieb/OHMI (Mehr für Ihr Geld), T‑281/02, Rec. p. II‑1915, point 25].

36      Toutefois, un signe qui remplit d’autres fonctions que celle d’une marque n’est distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, que s’il peut être perçu d’emblée comme une indication de l’origine commerciale des produits ou des services visés afin de permettre au public concerné de distinguer sans confusion possible les produits ou les services du titulaire de la marque de ceux qui ont une autre provenance commerciale (arrêts REAL PEOPLE, REAL SOLUTIONS, précité, point 20 ; BEST BUY, précité, point 21, et Mehr für Ihr Geld, précité, point 25).

37      En l’espèce, il n’est pas contesté que le signe suchen.de remplit également la fonction d’indication d’un nom de domaine, dont la requérante est propriétaire. Or, eu égard notamment aux caractéristiques du signe demandé, en particulier sa structure, l’absence de caractère distinctif de ses composantes et le fait qu’il s’agit d’une marque verbale, le signe demandé sera perçu d’emblée par le public pertinent comme étant le nom de domaine correspondant à un site Internet d’origine allemande, ainsi que la requérante l’a d’ailleurs admis (voir point 17 ci-dessus), et non comme désignant l’origine commerciale des produits et des services concernés. Cette appréciation est renforcée par le fait que le consommateur moyen n’étant que raisonnablement attentif, si le signe ne lui indique pas immédiatement l’origine du produit ou du service désigné, mais ne lui donne qu’une information purement promotionnelle et abstraite, il ne prendra pas le temps de s’interroger sur les différentes fonctions possibles du signe ou de le percevoir comme étant une marque.

38      Troisièmement, il convient d’ajouter que le signe suchen.de sera immédiatement perçu par le public pertinent, s’agissant des produits et des services concernés, comme indiquant, ainsi que la chambre de recours l’a en substance relevé au point 40 de la décision attaquée, soit que les produits et les services concernés permettent de procéder à une recherche sur Internet en langue allemande, soit qu’il est possible de trouver les produits et les services visés par la demande d’enregistrement par une recherche sur Internet en langue allemande. La circonstance, évoquée par la requérante, que les catégories de produits et de services concernés ne comprennent pas de moteurs de recherche est sans influence sur les considérations qui précèdent. En effet, d’une part, il ne saurait être exclu que certains des produits et des services concernés, et, notamment, ceux relevant des classes 9, 38 ou 42, permettent de créer ou d’utiliser un tel moteur de recherche. Le signe demandé serait donc descriptif d’une caractéristique de ces produits et de ces services, en l’occurrence de leur destination ou de leur contenu, et, de ce fait, nécessairement dépourvu de caractère distinctif au regard de ces mêmes produits ou services (voir, en ce sens, arrêt TWIST & POUR, précité, point 39). D’autre part, et en tout état de cause, lesdits produits et services peuvent être recherchés et obtenus par le biais d’une recherche sur Internet en langue allemande.

39      Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le signe suchen.de est, du point de vue du public pertinent, dépourvu de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 s’agissant des produits et des services concernés.

40      Aucun des arguments avancés par la requérante ne permet de remettre en cause cette considération.

41      En effet, s’agissant, premièrement, des arguments tirés de ce que le signe demandé ne serait pas directement descriptif des produits et des services concernés (voir points 13 à 16 ci-dessus), il y a lieu de rappeler que la seule absence d’information, dans le contenu sémantique du signe suchen.de, relative à la nature des produits et des services concernés ne saurait être suffisante pour conférer un caractère distinctif à ce signe (voir, en ce sens, arrêt BEST BUY, précité, point 30). D’ailleurs, une marque peut être dépourvue de caractère distinctif pour des raisons autres que son éventuel caractère descriptif (voir arrêt TWIST & POUR, précité, point 39, et la jurisprudence citée).

42      Or, en l’espèce, le signe demandé étant dépourvu de caractère distinctif indépendamment de son éventuel caractère descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94, l’argumentation de la requérante, tirée de l’absence de caractère directement descriptif du signe demandé pour les produits et les services concernés et d’un rapport seulement indirect entre ceux-ci, est inopérante. Doit également être rejetée l’argumentation tirée de ce qu’une marque ne consistant pas exclusivement en une indication courante fournissant des informations sur les produits et les services concernés posséderait un caractère distinctif (voir point 12 ci‑dessus). Enfin, doit aussi être écarté l’argument pris de ce qu’une référence indirecte par le signe demandé aux produits et aux services concernés serait insuffisante pour l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94.

43      S’agissant, deuxièmement, du grief de la requérante tiré de ce que l’OHMI n’aurait pas procédé à des constatations différenciées relatives aux produits et aux services concernés (voir point 15 ci‑dessus), il y a lieu de relever qu’il ressort de la décision attaquée que les faits et les considérations d’ordre juridique retenus par la chambre de recours pour justifier le caractère descriptif et l’absence de caractère distinctif du signe s’appliquent à toutes les classes de produits et de services concernés.

44      S’agissant, troisièmement, des arguments tirés de ce que, d’une part, le signe demandé désigne un nom de domaine, dont la requérante est propriétaire et dont l’utilisation n’aurait donc aucun intérêt pour les tiers et, d’autre part, de ce que tout impératif de disponibilité serait exclu (voir points 17 et 18 ci-dessus), force est de constater qu’ils ne sauraient remettre en cause l’appréciation portée quant à l’absence de caractère distinctif du signe demandé. En effet, il convient d’opérer une distinction entre les droits tirés de l’enregistrement d’un nom de domaine, d’une part, et les droits tirés de l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire, d’autre part. Ainsi, le fait que la requérante possède le nom de domaine « suchen.de » n’implique pas que ledit nom puisse, de ce fait, être enregistré en tant que marque communautaire. Pour ce faire, il convient en effet qu’il remplisse l’ensemble des conditions posées par le règlement n° 40/94 à cet égard. Les arguments liés à l’absence d’impératif de disponibilité invoquée par la requérante sont donc inopérants.

45      S’agissant, quatrièmement, des décisions des chambres de recours de l’OHMI et de l’enregistrement effectué en Suisse évoqués par la requérante lors de l’audience, de tels éléments doivent être écartés, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur leur recevabilité. En effet, il y a lieu de rappeler que, selon la jurisprudence, le régime communautaire des marques est un système autonome [arrêt du Tribunal du 5 décembre 2000, Messe München/OHMI (electronica), T‑32/00, Rec. p. II‑3829, point 47], et la légalité des décisions des chambres de recours doit être appréciée uniquement sur la base du règlement n° 40/94, tel qu’interprété par le juge communautaire, et non sur la base d’une pratique décisionnelle antérieure de l’OHMI [voir arrêt du Tribunal du 3 juillet 2003, Alejandro/OHMI – Anheuser-Busch (BUDMEN), T‑129/01, Rec. p. II‑2251, point 61, et la jurisprudence citée]. Dès lors, l’OHMI n’est lié ni par les enregistrements nationaux ni par ses décisions antérieures (arrêt REAL PEOPLE, REAL SOLUTIONS, précité, point 31).

46      S’agissant, cinquièmement, des griefs de la requérante se rapportant à la motivation de la décision attaquée, et notamment de celui tiré de la nécessité de plus amples développements relatifs au caractère distinctif (voir point 11 ci‑dessus), il y a lieu de rappeler que, en vertu de l’article 73 du règlement n° 40/94, les décisions de l’OHMI doivent être motivées. Cette obligation de motivation a la même portée que celle découlant de l’article 253 CE. Il est de jurisprudence constante que la motivation exigée par l’article 253 CE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte. Cette obligation a pour double objectif de permettre, d’une part, aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin de défendre leurs droits et, d’autre part, au juge communautaire d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision (voir arrêt de la Cour du 21 octobre 2004, KWS Saat/OHMI, C‑447/02 P, Rec. p. I‑10107, points 63 à 65, et la jurisprudence citée).

47      En l’espèce, la chambre de recours a considéré, au point 45 de la décision attaquée, que, « [e]n l’absence de tout autre élément additionnel, en particulier graphique, la marque verbale dont a été demandé l’enregistrement ne présente pas […] le minimum de caractère distinctif requis au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, étant donné qu’elle n’est comprise par le public concerné que comme une indication de l’espèce, de la qualité et de la destination des produits et des services concernés et non comme une marque remplissant une fonction d’indication de l’origine commerciale ». Elle ajoute que, « en tant que combinaison courante et usuelle de termes, et en l’absence d’éléments supplémentaires distinctifs, la marque demandée est dépourvue de tout caractère distinctif », réfutant ainsi l’argument de la requérante selon lequel « [cette] marque est enregistrable dans la mesure où ‘suchen.de’ est [...] un néologisme dont la preuve de l’existence dans le dictionnaire ne peut être rapportée ».

48      Il apparaît donc que la chambre de recours a déduit l’application du motif absolu visé à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94, principalement, du caractère descriptif du signe demandé (examiné aux points 33 à 44 de la décision attaquée), mais également de considérations relatives au caractère distinctif dudit signe et de ses composants. Dans ces conditions, d’une part, le raisonnement de la chambre de recours concernant l’application de cette disposition apparaît de façon claire et non équivoque. D’autre part, la décision attaquée contient une motivation concernant l’absence de caractère distinctif du signe demandé qui, indépendamment de celle concernant le caractère descriptif de celui-ci, est suffisante, lue à la lumière de l’ensemble de ladite décision, pour que la requérante puisse connaître les justifications de la décision attaquée et pour que le Tribunal puisse exercer son contrôle juridictionnel.

49      En tout état de cause, il ressort de la jurisprudence qu’un requérant n’a aucun intérêt légitime à l’annulation pour vice de forme d’une décision dans le cas où l’annulation de la décision ne pourrait que donner lieu à l’intervention d’une nouvelle décision, identique, quant au fond, à la décision annulée [voir arrêt du Tribunal du 3 décembre 2003, Audi/OHMI (TDI), T‑16/02, Rec. p. II‑5167, point 97, et la jurisprudence citée]. Or, en l’espèce, il résulte des considérations qui précèdent que le signe demandé est dépourvu de caractère distinctif. Dans la mesure où ils se rapportent à la motivation de la décision attaquée, les griefs de la requérante doivent donc être rejetés.

50      Compte tenu de tout ce qui précède, le moyen tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 doit être rejeté.

51      Dans ces conditions, il n’y a pas lieu d’examiner le moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 40/94. En effet, il suffit qu’un des motifs absolus de refus s’applique pour qu’un signe ne puisse être enregistré comme marque communautaire [voir arrêt du Tribunal du 12 janvier 2000, DKV/OHMI (COMPANYLINE), T‑19/99, Rec. p. II‑1, point 30, et la jurisprudence citée].

52      Par conséquent, il convient de rejeter le recours.

 Sur les dépens

53      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (deuxième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      DeTeMedien Deutsche Telekom Medien GmbH est condamnée aux dépens.

Forwood

Pelikánová

Papasavvas

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 12 décembre 2007.

Le greffier

 

      Le président faisant fonction

E. Coulon

 

      N. J. Forwood


* Langue de procédure : l’allemand.