Language of document : ECLI:EU:T:2013:91

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

21 février 2013 (*)

« Retrait de document »

Dans l’affaire T‑331/11,

Leonard Besselink, demeurant à Utrecht (Pays‑Bas), représenté par Mes O. W. Brouwer et J. Blockx, avocats,

partie requérante,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté initialement par Mmes P. Plaza García et C. Fekete et M. J. Herrmann, puis par Mme Plaza García et M. Herrmann, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par

Commission européenne, représentée par M. E. Paasivirta et Mme P. Costa de Oliveira, en qualité d’agents,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision du Conseil de l’Union européenne, du 1er avril 2011, refusant l’accès intégral au document n° 9689/10 comportant un projet de décision du Conseil autorisant la Commission européenne à négocier l’accord d’adhésion de l’Union européenne à la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de S. Papasavvas, président, V. Vadapalas (rapporteur) et K. O’Higgins, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

1        Par requête déposée au Tribunal le 16 juin 2011, le requérant, M. Leonard Besselink, a, en vertu de l’article 263 TFUE, demandé l’annulation de la décision du Conseil de l’Union européenne du 1er avril 2011, refusant l’accès intégral au document n° 9689/10 comportant un projet de décision du Conseil autorisant la Commission européenne à négocier l’accord d’adhésion de l’Union européenne à la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (ci-après la « décision attaquée »).

2        En annexe A.13 à la requête, le requérant a produit le document DS 1930/10 du Conseil, du 22 décembre 2010, présentant un document de travail de la Commission (ci-après le « document DS 1930/10 »).

3        Le Conseil, soutenu en ce sens par la Commission, a demandé que le document DS 1930/10 soit retiré du dossier et que les références à celui-ci, contenues dans la requête, soient supprimées. En effet, ce document n’aurait jamais été rendu public, ni à la suite d’une demande d’accès présentée au titre du règlement (CE) n° 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO L 145, p. 43), ni de la propre initiative du Conseil. La Commission, auteur du document de travail, n’aurait pas non plus divulgué le document au public.

4        Par conséquent, selon le Conseil, le requérant n’était pas autorisé à accéder à ce document et à l’utiliser dans une procédure judiciaire, puisqu’il se l’aurait procuré par l’intermédiaire d’une personne qui aurait enfreint les règles de procédure énoncées dans le règlement n° 1049/2001 et dans la décision du Conseil 2006/683/CE, Euratom, du 15 septembre 2006, portant adoption de son règlement intérieur (JO L 285, p. 47).

5        Enfin, le Conseil fait valoir que la production non autorisée du document DS 1930/10 irait à l’encontre de l’intérêt public qui veut que les institutions puissent bénéficier des avis de leur service juridique, donnés en toute indépendance et invoque, afin d’étayer sa thèse, l’ordonnance du Tribunal du 10 janvier 2005, Gollnisch e.a./Parlement (T‑357/03, Rec. p. II‑1, point 34).

6        Le requérant conteste que la présente affaire soit comparable à celle ayant donné lieu à l’ordonnance Gollnisch e.a./Parlement, précitée, dans la mesure où le document DS 1930/10 n’est pas un avis juridique sur la légalité de la décision attaquée, mais simplement un document décrivant, d’un point de vue factuel, le contenu de la partie du document ayant fait l’objet de la demande d’accès. En outre, le requérant aurait trouvé ledit document sur un site internet accessible au public. Il n’y aurait donc aucune raison de retirer l’annexe A.13 du dossier ainsi que les références qui y sont faites dans le corps de la requête.

7        Il revient au Tribunal de statuer sur la demande du Conseil de retirer le document DS 1930/10 du dossier.

8        Il convient, tout d’abord, de remarquer qu’il ne ressort pas du document DS 1930/10 qu’il a été établi par le service juridique d’une institution. Il ne s’agit donc pas, contrairement à l’affaire ayant donné lieu à l’ordonnance Gollnisch e.a./Parlement, précitée, d’un avis juridique, mais d’un document interne au Conseil, établi dans le cadre d’une réunion du groupe de travail Fundamental Rights, Citizens Rights and Free Movement of Persons (Droits fondamentaux, droits des citoyens et libre circulation des personnes) (FREMP).

9        Toutefois, le document DS 1930/10 n’ayant pas, comme l’ont souligné le Conseil et la Commission, été rendu public à l’initiative de l’une de ces institutions, il était nécessaire, afin que ledit document puisse être rendu public, qu’une demande d’accès audit document eût été introduite, conformément aux dispositions du règlement n° 1049/2001.

10      Or, il ressort du mémoire en réplique que le requérant n’a pas introduit une telle demande. En outre, le Conseil indique, sans être contredit par le requérant, que le document DS 1930/10 a été divulgué sans l’autorisation du Conseil ou de la Commission et a donc été rendu public en violation de la procédure d’accès aux documents prévue par le règlement n° 1049/2001.

11      Toutefois, il ressort de la jurisprudence que même des documents internes peuvent, dans certains cas, figurer légitimement au dossier d’une affaire (ordonnances de la Cour du 19 mars 1985, Tordeur e.a., 232/84, non publiée au Recueil, point 8, et du 15 octobre 1986, LAISA/Conseil, 31/86, non publiée au Recueil, point 5).

12      Ainsi, dans certaines situations, il n’a pas été nécessaire à la partie requérante de démontrer qu’elle avait obtenu légalement le document interne ou confidentiel invoqué au soutien de sa thèse. Le Tribunal a estimé, en procédant à une mise en balance des intérêts à protéger, qu’il convenait d’apprécier si des circonstances particulières, telles que le caractère décisif de la production du document aux fins d’assurer le contrôle de la régularité de la procédure d’adoption de l’acte attaqué (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 6 mars 2001, Dunnett e.a./BEI, T‑192/99, Rec. p. II‑813, points 33 et 34) ou d’établir l’existence d’un détournement de pouvoir (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 29 février 1996, Lopes/Cour de justice, T‑280/94, RecFP p. I‑A‑77 et II‑239, point 59), peuvent justifier de maintenir un tel document dans le dossier.

13      Or, en l’espèce, il convient de remarquer que le requérant n’a pas fait valoir de telles circonstances particulières et n’a pas invoqué le caractère décisif du document DS 1930/10 dans la résolution du présent litige.

14      En effet, le requérant a indiqué que le document DS 1930/10 n’a été produit que dans le seul but d’illustrer le fait qu’une grande partie des informations contenues dans le document et dans les directives de négociation qui y sont jointes étaient publiques à l’époque de l’adoption de la décision attaquée. Il a signalé, à cet égard, que d’autres documents, officiellement rendus publics par les institutions de l’Union et produits en annexes A.8, A.14 et A.16 de la requête, examinaient, comme le document DS 1930/10, l’objet de la directive de négociation n° 11.

15      Au vu de ces circonstances, il n’y a pas lieu de maintenir dans le dossier le document DS 1930/10, s’agissant d’un document interne des institutions, produit sans l’autorisation du Conseil.

16      Il y a donc lieu de faire droit à la demande du Conseil de retirer du dossier de l’affaire le document DS 1930/10, figurant à l’annexe A.13 de la requête, et de ne pas tenir compte de l’extrait de ce dernier figurant au point 44 de la requête.

17      Il convient de réserver les dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

ordonne :

1)      Le document DS 1930/10 du Conseil, du 22 décembre 2010, présentant un document de travail de la Commission, figurant à l’annexe A.13 de la requête ainsi que l’extrait dudit document contenu au point 44 de la requête, sont écartés du dossier de l’affaire.

2)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 21 février 2013.

Le greffier

 

       Le président

E.  Coulon

 

       S. Papasavvas


* Langue de procédure : l’anglais.