Language of document : ECLI:EU:T:2015:44

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

22 janvier 2015 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Enregistrement international désignant la Communauté européenne – Marque figurative H – Marque nationale figurative antérieure H – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Article 8 paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 – Absence de motivation – Article 75 du règlement n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑193/12,

MIP Metro Group Intellectual Property GmbH & Co. KG, établie à Düsseldorf (Allemagne), représentée par Mes J.-C. Plate et R. Kaase, avocats,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par Mme D. Walicka, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI intervenant devant le Tribunal, étant

Holsten-Brauerei AG, établie à Hambourg (Allemagne), représentée par Mes N. Hebeis et M. R. Douglas, avocats,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 23 février 2012 (affaire R2340/2010‑1), relative à une procédure d’opposition entre Holsten-Brauerei AG et MIP Metro Group Intellectual Property GmbH & Co. KG,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. M. van der Woude, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka et M. I. Ulloa Rubio (rapporteur), juges,

greffier : Mme J. Weychert, administrateur,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 8 mai 2012,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 23 août 2012,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 31 juillet 2012,

vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 23 novembre 2012,

vu le mémoire en duplique de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 25 février 2013,

vu le mémoire en duplique de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 25 février 2013,

à la suite de l’audience du 10 septembre 2014,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige 

1        Le 29 mai 2008, la requérante, MIP Metro Group Intellectual Property GmbH & Co. KG, a présenté une demande d’enregistrement international à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)] et désigné l’Union européenne.

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits et services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 1 à 12, 14, 16 à 27 et 29 à 35 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié. Cependant, seuls les produits correspondant à la description suivante, relevant de la classe 32, font l’objet de la présente procédure : « Bières ».

4        L’enregistrement international a été publié au Bulletin des marques communautaires n° 50/2008, du 15 décembre 2008.

5        Le 4 septembre 2009, l’intervenante, Holsten-Brauerei AG, a formé opposition, au titre de l’article 41 du règlement n° 207/2009, à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur la marque figurative enregistrée en Allemagne pour les « Bières », relevant de la classe 32, reproduite ci-après :

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7        Les motifs invoqués à l’appui de l’opposition étaient ceux visés à l’article 8, paragraphe 1, sous b) du règlement n° 207/2009 et à l’article 8, paragraphe 5, du même règlement.

8        Le 23 novembre 2010, la division d’opposition a fait droit à l’opposition.

9        Le 25 novembre 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009, contre la décision de la division d’opposition.

10      Par décision du 23 février 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours.

11      En particulier, la chambre de recours a considéré qu’il existait un risque de confusion du fait que les produits en cause étaient identiques, les signes à comparer visuellement similaires, phonétiquement identiques pour les consommateurs ne mentionnant que la lettre « h » et présentaient également une similitude conceptuelle.

 Procédure et conclusions des parties

12      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 8 mai 2012, la requérante a introduit le présent recours.

13      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours recevable, y compris les pièces produites ;

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens, y compris ceux de la procédure de recours.

14      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit 

 Sur la recevabilité des pièces présentées pour la première fois devant le Tribunal 

15      En annexe à la requête, la requérante a notamment produit des extraits de sites Internet qu’elle n’avait pas présentés dans le cadre de la procédure devant l’OHMI. Ces extraits visent à démontrer que l’utilisation de signes héraldiques pour de la bière est très habituelle en Allemagne. De même, en annexe à la réplique, la requérante a notamment produit des extraits visant à démontrer que la lettre « h » est souvent utilisée, sous la forme d’un signe héraldique, en Allemagne pour des denrées alimentaires.

16      À cet égard, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, un recours porté devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours au sens de l’article 65 du règlement n° 207/2009 et que, dans le contentieux de l’annulation, la légalité de l’acte attaqué doit être appréciée en fonction des éléments de fait et de droit existant à la date à laquelle l’acte a été adopté. Dès lors, la fonction du Tribunal n’est pas celle de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui. En effet, l’admission de telles pièces serait contraire à l’article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal, selon lequel les mémoires des parties ne peuvent modifier l’objet du litige devant la chambre de recours [voir arrêt du Tribunal du 27 juin 2013, MOL/OHMI – Banco Bilbao Vizcaya Argentaria (MOL Blue Card), T‑367/12, non publié au Recueil, point 22, et la jurisprudence citée].

17      Dès lors, il y a lieu de déclarer ces pièces irrecevables.

 Sur le fond 

18      La requérante invoque deux moyens, tirés, respectivement, de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et de l’article 75 du même règlement.

 Sur le moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 

19      Au soutien de ce moyen, la requérante avance, en substance, que c’est à tort que la chambre de recours de l’OHMI a considéré qu’il existait une similitude entre les signes sur les plans visuel, phonétique et conceptuel.

20      Il convient de rappeler que, aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure. Par ailleurs, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, sous a), ii), du règlement n° 207/2009, il convient d’entendre par marque antérieure, notamment, la marque enregistrée dans un État membre dont la date de dépôt est antérieure à celle de la demande de marque communautaire.

21      Selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T‑162/01, Rec. p. II‑2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

22      Par ailleurs, aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T‑316/07, Rec. p. II‑43, point 42, et la jurisprudence citée].

23      À titre liminaire, il doit être relevé que la requérante ne conteste pas l’appréciation de la chambre de recours relative à la définition du public pertinent, selon laquelle il s’agit des consommateurs moyens allemands, normalement informés et raisonnablement attentifs et avisés.

24      De plus, il est constant que les produits en cause sont identiques.

–       Sur la comparaison des signes 

25      Selon une jurisprudence constante, deux marques sont similaires lorsque, du point de vue du public pertinent, il existe entre elles une égalité au moins partielle en ce qui concerne un ou plusieurs aspects pertinents [arrêt du Tribunal du 23 octobre 2002, Matratzen Concord/OHMI – Hukla Germany (MATRATZEN), T‑6/01, Rec. p. II‑4335, point 30]. L’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

26      Par ailleurs, l’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants. Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant. Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci [arrêt du Tribunal du 6 septembre 2013, Eurocool Logistik/OHMI – Lenger (EUROCOOL), T‑599/10, non publié au Recueil, point 99].

27      À titre préliminaire, il convient de relever que, pour la première fois lors de l’audience, la requérante a avancé que la représentation graphique figurant sur le bouclier de la marque antérieure n’est pas la lettre « h », mais un graphique ressemblant à cette lettre, entouré de deux points. Cet argument doit être déclaré irrecevable car tardif, en application de l’article 48, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement de procédure.

28      La requérante soutient, essentiellement, que la chambre de recours ne s’est pas fondée sur l’impression d’ensemble produite par les signes en conflit. Ainsi, la chambre de recours aurait attribué une trop grande importance au bouclier portant la lettre « h » de la marque antérieure et négligé les autres éléments de cette marque. [Requête, points 12 et suivants]

29      Or, force est de constater que la chambre de recours, après avoir relevé tant les éléments de ressemblance que les éléments de différence entre les signes], a conclu que, compte tenu des nombreuses concordances entre l’élément figuratif central de la marque antérieure, lequel se compose d’un bouclier avec la lettre majuscule « H », et la marque demandée, à l’exception de la représentation de la petite couronne, il fallait globalement présumer une similitude visuelle entre les signes. La chambre de recours a ajouté qu’il y avait lieu de prendre en considération le fait que la marque demandée reprend justement l’élément figuratif de la marque antérieure, lequel présente un élément verbal. Même s’il ne s’agit là que d’une seule lettre, il faut, selon la chambre de recours, présumer que cette lettre « h » concordante influence en tout cas l’impression d’ensemble des deux signes.

30      La chambre de recours a ainsi examiné les deux marques, en relevant tant les éléments de concordance, à savoir le bouclier illustré de la lettre « h », que les éléments de différence, à savoir d’un côté le chevalier à cheval et de l’autre la couronne.

31      Ainsi, l’argument essentiel de la requérante repose sur une lecture erronée de la décision attaquée.

32      En outre, la requérante affirme qu’un élément, tel que le bouclier portant la lettre « h » de la marque antérieure, ne peut être pris en compte de manière isolée que, d’une part, dans le cas d’une marque composée, alors que la marque antérieure est un signe homogène [Requête, points 15 et 16], et, d’autre part, si cet élément domine l’impression d’ensemble, alors que la position centrale dudit bouclier ne saurait lui conférer une importance dominante [Requête, points 19 à 25 ; réplique point 10].

33      À cet égard, il convient de rappeler que la décision attaquée n’a pas pris en compte le bouclier portant la lettre « h » de manière isolée, mais a simplement indiqué que ce bouclier se retrouvait dans les deux signes (voir point 30 ci-dessus). Par ailleurs, il convient également de constater que la chambre de recours n’est pas partie du principe que l’élément central de la marque antérieure, à savoir ledit bouclier, est un élément dominant, mais a souligné que l’élément figuratif central de la marque antérieure compte de nombreuses concordances avec la marque demandée (voir point 29 ci-dessus).

34      Il convient donc de rejeter également cet argument de la requérante.

35      En premier lieu, s’agissant de la comparaison des signes en conflit sur le plan visuel, il convient de constater, à l’instar de la chambre de recours, que les signes en conflit présentent comme unique élément verbal la lettre majuscule « H », laquelle, dans chacune des représentations, se trouve à peu près au centre, en blanc sur un fond noir en forme de bouclier. De plus, contrairement à ce que soutient la requérante, les signes se ressemblent encore en ce qui concerne le type de représentation, en ce sens qu’ils présentent des éléments figuratifs noirs, sans relief, dont les détails sont reconnaissables grâce à des interruptions dans la coloration.

36      Il convient ainsi de considérer que la présence de la lettre « h » sur un bouclier, représentée selon une configuration semblable et arborant des caractéristiques physiques communes, constitue un facteur de similitude visuelle, étant donné le rôle non négligeable que joue cet élément dans la perception de chacune des marques en conflit, compte tenu de sa taille et de sa position centrale.

37      Dès lors, force est de constater qu’il existe une certaine similitude visuelle entre les signes en conflit, même si la marque demandée comporte une couronne et que dans la marque antérieure apparaît un chevalier en armure sur un cheval.

38      Cette conclusion ne saurait être remise en cause dans l’hypothèse où il pourrait être considéré, comme le suggère la requérante, que l’élément figuratif de la marque demandée pourrait être non pas nécessairement un bouclier, mais un blason. Dans cette hypothèse, cet élément pourrait alors apparaître comme une version simplifiée de l’élément figuratif de la marque antérieure.

39      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que les signes sont visuellement similaires.

40      En deuxième lieu, en ce qui concerne la comparaison des signes en conflit sur le plan phonétique, la requérante considère que c’est également à tort que la chambre de recours a admis une identité phonétique entre les signes. Elle avance que les lettres uniques, étant la plupart du temps considérées par les consommateurs comme un élément purement visuel, ne sont pas prononcées. En l’espèce, les consommateurs décriraient donc la marque antérieure comme un « chevalier ou un chevalier à cheval » et la marque demandée comme un « h » sur un blason couronné, ou un « h royal ».

41      À l’instar de la chambre de recours, il convient de constater qu’il existe deux hypothèses .

42      En effet, une partie du public pertinent est susceptible de décrire les signes pour se faire comprendre oralement à leur sujet et mentionnera alors non seulement l’existence de la lettre « h » dans la description, mais aussi les autres éléments des signes figuratifs. Il n’est alors pas possible de pratiquer une comparaison entre les signes.

43      L’autre partie du public pertinent est susceptible de ne mentionner que la lettre « h » pour chacun des signes. En effet, il ne saurait être exclu que des lettres uniques soient prononcées par le consommateur pour désigner une marque [à propos de la prononciation des lettres « e » et « c », arrêt du Tribunal du 10 novembre 2011, Esprit International/OHMI – Marc O’Polo International (Représentation d’une lettre sur une poche), T‑22/10, non publié au Recueil, points 94 à 97]. Pour ce public, les signes seront alors prononcés d’une manière identique [voir, par analogie, à propos de la prononciation de la lettre « x », arrêt du Tribunal du 5 novembre 2013, Capitalizaciones Mercantiles/OHMI – Leineweber (X), T‑378/12, non publié au Recueil, point 60].

44      C’est donc à juste titre que la chambre de recours a considéré que, pour le public ne mentionnant que la lettre « h », il existait une identité phonétique entre les deux signes.

45      En troisième lieu, en ce qui concerne, enfin, la comparaison des signes sur le plan conceptuel, la requérante réfute également l’appréciation de la chambre de recours selon laquelle il existe une similitude. D’une part, pour déterminer la signification de la marque antérieure, la chambre de recours ne se serait fondée que sur l’un de ses éléments, à savoir le bouclier imprimé, au lieu d’apprécier l’impression d’ensemble produite par les deux marques. Elle aurait ainsi méconnu que les marques en cause, considérées globalement, présentaient d’importantes différences conceptuelles, l’une représentant un « chevalier à cheval », et l’autre un « blason royal ». D’autre part, la requérante conteste qu’il existe une similitude conceptuelle en raison d’une « référence héraldique ».

46      Il convient de constater que la chambre de recours a d’abord exposé que les deux signes présentaient la lettre « h » comme unique élément verbal affiché sur un élément figuratif en forme de bouclier. Elle a ensuite considéré que ces deux signes utilisaient des éléments figuratifs qui présentaient une nette référence héraldique. La chambre de recours a enfin conclu que, si la marque demandée faisait apparaître une couronne et la marque antérieure un chevalier sur un cheval, malgré ces différences, les impressions d’ensemble des signes étaient conceptuellement similaires.

47      Ainsi, contrairement à ce que soutient la requérante, la chambre de recours s’est bien fondée sur l’impression d’ensemble produite par les signes, en concluant, « malgré ces différences », à une similarité conceptuelle.

48      À cet égard, il y a en effet lieu de considérer que le chevalier en armure sur un cheval, protégé d’un bouclier, tout comme la couronne figurant sur un bouclier renverront incontestablement, aux yeux du public concerné, c’est-à-dire le consommateur moyen allemand, au même concept de « temps féodaux ».

49      Par ailleurs, en ce qui concerne la question de l’existence d’une « référence héraldique », il ne peut qu’être constaté que la présence des boucliers dans les deux signes constitue, à l’évidence, une telle référence. En effet, il est généralement connu du public concerné que les boucliers des chevaliers portaient leurs armoiries, qui servaient non seulement de décoration, mais aussi d’identification, raison pour laquelle les armoiries sont généralement représentées sur un arrière-plan en forme de bouclier pouvant comporter d’autres attributs, comme  des couronnes.

50      Il résulte de ce qui précède que la chambre de recours n’a pas commis d’erreur lors de l’appréciation des similitudes entre les signes en conflit.

–       Sur le risque de confusion 

51      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507 point 17, et arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 74].

52      Selon la chambre de recours, les produits désignés par les marques en conflit sont identiques, les signes à comparer sont visuellement similaires, identiques phonétiquement pour une partie du public et présentent aussi une similitude conceptuelle. Dès lors, la chambre de recours a conclu à un risque de confusion.

53      La requérante considère que la chambre de recours n’a pas pris en compte le fait que les lettres uniques n’ont pas de caractère distinctif intrinsèque et ne peuvent donc pas avoir d’importance dominante. Selon la requérante, dans les échanges commerciaux, les lettres uniques ne sont en principe pas de nature à distinguer les produits d’une entreprise de ceux d’une autre entreprise.

54      De plus, selon la requérante, le risque de confusion est encore réduit du fait que l’utilisation de signes héraldiques pour des boissons alcooliques, tout spécialement pour la bière en Allemagne, est très habituelle.

55      Quant au premier argument de la requérante, il convient de rappeler qu’une lettre est en soi susceptible de conférer à une marque un caractère distinctif [arrêt du Tribunal du 8 mai 2012, Mizuno/OHMI – Golfino (G), T‑101/11, non publié au Recueil, point 50]. Tel est d’autant plus le cas lorsque, comme en l’espèce, la lettre est apposée au centre d’un élément figuratif élaboré, effectivement pris en compte dans le cadre de l’appréciation de l’impression d’ensemble.

56      Par ailleurs, il convient de rappeler que la chambre de recours n’a pas retenu l’existence d’un élément dominant (voir point 33 ci-dessus).

57      Quant au second argument de la requérante, tiré du fait que le consommateur concerné est habitué à voir utilisés des motifs héraldiques pour désigner de la bière en Allemagne, il apparaît logique, au contraire, que celui-ci prêtera sans doute, de ce fait, une attention d’autant plus grande à l’illustration apposée sur l’armoirie, c’est-à-dire, en l’occurrence, la même lettre « h ». Cette habitude tend donc plutôt à renforcer le risque de confusion.

58      Il résulte de ce qui précède, d’une part, qu’il existe une certaine similitude visuelle, une identité phonétique pour une partie du public et une similitude conceptuelle entre les signes à comparer et, d’autre part, que les produits, à savoir de la bière, sont identiques. Dès lors, c’est à juste titre que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion.

 Sur le moyen tiré de la violation de l’article 75 du règlement n° 207/2009 

59      La requérante affirme que la motivation de la décision de la chambre de recours est incomplète et globale. Plus précisément, la requérante affirme que la décision attaquée ne permet pas de savoir pour quelles raisons la chambre de recours a considéré le bouclier du chevalier de la marque fondant l’opposition comme étant un élément dominant.

60      Selon une jurisprudence constante, l’obligation de motivation consacrée à l’article 75 du règlement n° 207/2009 a la même portée que celle découlant de l’article 296 TFUE (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 21 octobre 2004, KWS Saat/OHMI, C‑447/02 P, Rec. p. I‑10107, point 64, et ordonnance de la Cour du 9 décembre 2008, Enercon/OHMI, C‑20/08 P, non publiée au Recueil, point 29). Par ailleurs, la motivation exigée par l’article 296 TFUE doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’auteur de l’acte de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle. Toutefois, il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (arrêt KWS Saat/OHMI, précité, point 65). Il suffit que la chambre de recours expose les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision [voir arrêt du Tribunal du 29 septembre 2011, New Yorker SHK Jeans/OHMI – Vallis K. – Vallis A. (FISHBONE), T‑415/09, non publié au Recueil, point 40, et la jurisprudence citée].

61      En l’espèce, il convient à nouveau de rappeler que la requérante appuie son raisonnement sur une lecture erronée de la décision attaquée, celle‑ci n’étant pas fondée sur la présence d’un éventuel élément dominant dans la marque antérieure, mais sur l’impression d’ensemble résultant des deux signes.

62      Par ailleurs, comme il a été relevé précédemment, la chambre de recours a procédé à une appréciation de tous les éléments nécessaires, à savoir, la comparaison des signes en conflit sur le plan visuel (voir points 27 et suivants ci-dessus), sur le plan phonétique (voir points 40 et suivants ci-dessus) et sur le plan conceptuel (voir points 45 et suivants ci-dessus), étant donné que la définition du public concerné et l’identité des produits concernés ne sont pas contestés.

63      Ainsi, il ne peut qu’être constaté que la chambre de recours a fait apparaître sommairement, mais clairement, les motifs et circonstances factuelles justifiant sa décision.

64      Il convient également de souligner que cette motivation a permis à la requérante de comprendre la décision attaquée et d’introduire un recours contestant son bien-fondé. Ainsi qu’il résulte de l’analyse précédente, le Tribunal a également pu exercer son contrôle.

65      Le deuxième moyen doit donc être rejeté comme étant non fondé ainsi que le recours dans son intégralité.

 Sur les dépens

66      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      MIP Metro Group Intellectual Property GmbH & Co. KG est condamnée aux dépens.


Van der Woude

Wiszniewska-Białecka

Ulloa Rubio

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 22 janvier 2015.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.