Language of document : ECLI:EU:T:2009:517

ORDONNANCE DU 16. 12. 2009 – AFFAIRE T-370/08

CSEPELI ÁRAMTERMELŐ / COMMISSION

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (sixième chambre)

16 décembre 2009 (*)

« Aides accordées par les autorités hongroises en faveur de certains producteurs d’électricité – Accords d’achat d’électricité – Intervention – Intérêt à la solution du litige – Confidentialité »

Dans l’affaire T‑370/08,

Csepeli Áramtermelő kft, établie à Budapest (Hongrie), représentée par Mes Á. Máttyus, K Ferenczi, B. van de Walle de Ghelcke, T. Franchoo et D. Fessenko, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. L. Flynn, M. N. Khan et Mme K. Talabér-Ritz, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision de la Commission, du 4 juin 2008, déclarant incompatible avec le marché commun l’aide accordée par les autorités hongroises en faveur de certains producteurs d’électricité, sous la forme d’accords d’achat d’électricité à long terme conclus, à une date antérieure à l’adhésion de la République de Hongrie à l’Union européenne, entre l’opérateur réseau Magyar Villamos Művek (MVM), détenu par l’État hongrois, et certains producteurs d’électricité [Aide d’État C 41/2005 (ex NN 49/2005) – « Coûts échoués » en Hongrie]

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. A. W. H. Meij (président), V. Vadapalas et T. Tchipev (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Procédure

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 septembre 2008, la requérante a introduit, en vertu de l’article 230, quatrième alinéa, CE, un recours tendant à l’annulation de la décision de la Commission, du 4 juin 2008, déclarant incompatible avec le marché commun l’aide accordée par les autorités hongroises en faveur de certains producteurs d’électricité, sous la forme d’accords d’achat d’électricité à long terme conclus, à une date antérieure à l’adhésion de la République de Hongrie à l’Union européenne, entre l’opérateur réseau Magyar Villamos Művek (MVM), détenu par l’État hongrois, et certains producteurs d’électricité [Aide d’État C 41/2005 (ex NN 49/2005) – « Coûts échoués » en Hongrie] (ci‑après la « décision attaquée »).

2        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 12 janvier 2009, Budapesti Erőmű Zártkörűen Működő Részvénytársaság (ci-après « BERT ») a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la requérante.

3        La demande en intervention a été signifiée aux parties à la cause le 22 janvier 2009, conformément à l’article 116, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal.

4        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 11 février 2009, la Commission a soulevé des objections à l’encontre de cette demande et demandé au Tribunal de condamner BERT aux dépens afférents à la procédure d’intervention.

5        Par acte déposé au greffe du Tribunal le 17 février 2009, la requérante a indiqué qu’elle n’avait pas d’observations à formuler sur la demande en intervention.

6        Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 17 février 2009, la requérante a demandé le traitement confidentiel, à l’égard de BERT, de certains éléments de sa requête ainsi que du mémoire en défense. Par lettre déposée au greffe le 3 avril 2009, elle a formulé la même demande en ce qui concerne certains éléments de son mémoire en réplique et par lettre déposée au greffe le 3 juin 2009 en ce qui concerne certains éléments du mémoire en duplique. La requérante a produit une version non confidentielle de sa requête et de son mémoire en réplique. La Commission a produit une version non confidentielle de ses mémoires en défense et en duplique.

7        Conformément à l’article 116, paragraphe 1, troisième alinéa, du règlement de procédure, le président de la sixième chambre a décidé de déférer la demande à la formation de jugement.

 Sur la demande en intervention

 Arguments des parties

8        BERT soutient qu’elle justifie d’un intérêt direct et actuel à la solution du litige soumis au Tribunal dans la présente affaire, au sens de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice. À cet égard, elle expose qu’elle est affectée par la décision attaquée de la même manière que la requérante. À l’instar de celle-ci, BERT aurait conclu avec MVM un accord d’achat d’électricité qui serait conjointement traité par la décision attaquée comme faisant partie d’une même catégorie que l’accord conclu par la requérante et qui serait considéré de manière identique à tous les autres accords rentrant dans cette catégorie comme constituant une aide d’État nouvelle. La décision du Tribunal aurait ainsi un effet direct sur le traitement à réserver à l’accord conclu par BERT.

9        La Commission estime que BERT ne justifie pas d’un intérêt direct à la solution du litige. À cet égard, elle fait valoir que la décision attaquée aurait été adoptée au terme d’un examen au cas par cas et qui aurait constaté l’incompatibilité avec le marché commun des subventions que la République de Hongrie aurait individuellement accordée aux producteurs d’électricité nommément désignés sous la forme d’accords d’achat d’électricité. La décision attaquée constituerait ainsi un faisceau de décisions individuelles qui ne pourrait être annulé qu’en ce qui concerne les producteurs d’électricité ayant introduit un recours devant le Tribunal et qui demeurerait, en tout état de cause, contraignante à l’égard de ceux qui n’ont pas introduit un tel recours. Se limitant à faire état de similarités entre sa situation et celle de la requérante, BERT n’aurait qu’un intérêt indirect et potentiel à la solution du litige.

 Appréciation du Tribunal

10      En vertu de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour de justice, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, dudit statut, toute personne justifiant d’un intérêt à la solution d’un litige, à l’exclusion des litiges entre États membres, entre institutions de la Communauté, ou entre États membres, d’une part, et institutions de la Communauté, d’autre part, a le droit d’intervenir.

11      Il résulte d’une jurisprudence constante que la notion d’intérêt à la solution du litige, au sens de ladite disposition, doit se définir au regard de l’objet même du litige et s’entendre comme un intérêt direct et actuel au sort réservé aux conclusions elles-mêmes, et non comme un intérêt par rapport aux moyens ou aux arguments soulevés. En effet, par « solution » du litige, il faut entendre la décision finale demandée au juge saisi, telle qu’elle serait consacrée dans le dispositif de l’arrêt (ordonnances de la Cour du 25 novembre 1964, Lemmerz-Werke/Haute Autorité, 111/63, Rec. p. 883, et du 12 avril 1978, Amylum e.a./Conseil et Commission, 116/77, 124/77 et 143/77, Rec. p. 893, points 7 et 9 ; ordonnance du Tribunal du 4 février 2004, Coöperatieve Aan- en Verkoopvereniging Ulestraten, Schimmert en Hulsberg e.a./Commission, T‑14/00, Rec. p. II‑497, point 11, et la jurisprudence citée).

12      Il ressort également de la jurisprudence qu’il convient d’établir une distinction entre les demandeurs en intervention justifiant d’un intérêt direct au sort réservé à l’acte spécifique dont l’annulation est demandée et ceux qui ne justifient que d’un intérêt indirect à la solution du litige, en raison de similarités entre leur situation et celle d’une des parties (ordonnance de la Cour du 15 novembre 1993, Scaramuzza/Commission, C‑76/93 P, Rec. p. I‑5715, point 11 ; voir ordonnance du président de la sixième chambre du Tribunal du 11 mars 2008, Budapesti Erőmű « Zártkörűen Működő Részvénytársaság »/Commission, T‑80/06, non encore publiée, point 9, et la jurisprudence citée).

13      En l’espèce, il convient d’observer que, ainsi qu’il ressort du point 153 de la décision attaquée, la Commission a effectué une évaluation conjointe, par rapport à tous les accords d’achat d’électricité faisant l’objet de la décision attaquée, de l’existence d’une aide d’État et de la compatibilité de celle-ci avec le marché commun. Pour justifier cette approche globale la Commission a évoqué la présence de fortes ressemblances entre les principes directeurs de tous les accords concernés, à savoir la réservation des capacités à long terme, l’achat minimal garanti et le mécanisme de fixation des prix destiné à couvrir les coûts fixes, variables et de capital (points 236 et 340). La Commission a également considéré que le principal avantage conféré par les accords en cause était commun à tous les accords examinés et que pour refléter fidèlement la réalité du marché hongrois de la production d’énergie électrique, elle devait évaluer dans sa décision tous les accords dans leur ensemble (point 153) Ainsi, la Commission a procédé à une analyse générale et abstraite des principes directeurs de ces accords.

14      Il est vrai que cette analyse comporte plusieurs références aux accords individuels faisant ressortir certains de leurs paramètres, tels que la date et la procédure de leur conclusion (points 36 à 45), leur durée (tableau 1), la capacité des centrales électriques concernées (tableau 3), leur production annuelle d’électricité (tableau 4), les prix moyens de vente appliqués sur une base annuelle par les différents producteurs d’électricité concernés (points 245 à 250) etc., qui sont généralement présentés de manière exhaustive pour chaque accord sous la forme d’une liste ou d’un tableau. Il convient de remarquer, néanmoins, que la plupart de ces références figurent dans un contexte purement descriptif (par exemple aux points 29 et 36 à 45 et tableaux 3 et 4) ou ont pour but simplement d’écarter certains arguments spécifiques et de confirmer que certains éléments du raisonnement général de la Commission concernant les principes énoncés s’appliquent invariablement à tous les accords concernés (voir par exemple points 245 à 250 et tableau 10).

15      Dans ces conditions il y a lieu de retenir que, dans la mesure où elle établit l’existence d’une aide d’État et l’incompatibilité de celle-ci avec le marché commun, la décision attaquée identifie de manière indistincte les éléments d’aide communs à l’ensemble des accords en cause et apprécie ensuite d’une manière générale l’application des principes critiqués. En effet, malgré le fait que les bénéficiaires de l’aide condamnée sont individuellement identifiés dans le dispositif, la décision revêt pour autant une portée générale à l’égard de l’ensemble des accords considérés. Dès lors, contrairement à ce qu’affirme la Commission, sa décision concernant l’existence d’une aide d’État et l’incompatibilité de celle-ci avec le marché commun ne saurait être considérée comme un faisceau de décisions individuelles concernant séparément chacun des accords identifiés dans le dispositif.

16      Il en résulte que BERT, en tant que partie à un tel accord, dispose d’un intérêt direct et actuel à la solution du litige au sens de l’article 40, deuxième alinéa, du statut de la Cour. Par conséquent, il y a lieu d’accueillir sa demande en intervention.

17      La communication au Journal officiel visée à l’article 24, paragraphe 6, du règlement de procédure ayant été publiée le 22 novembre 2008, la demande d’intervention a été présentée dans le délai prévu à l’article 115, paragraphe 1, du même règlement et les droits de l’intervenant seront ceux prévus à l’article 116, paragraphes 2 à 4, du règlement de procédure.

 Sur les demandes de traitement confidentiel

18      La requérante a demandé le traitement confidentiel, à l’égard de BERT, de certaines informations contenues dans le dossier.

19      À ce stade, la communication à BERT des actes de procédure signifiés aux parties doit être limitée aux versions non confidentielles produites par la requérante et par la Commission. Une décision sur le bien-fondé de la demande de confidentialité sera, le cas échéant, prise ultérieurement au vu des objections ou des observations qui pourraient être présentées à ce sujet.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

ordonne :

1)      Budapesti Erőmű Zártkörűen Működő Részvénytársaság est admise à intervenir dans l’affaire T‑370/08 à l’appui des conclusions de la partie requérante, Csepeli Áramtermelő kft.

2)      Le greffier communiquera à la partie intervenante la version non confidentielle de chaque acte de procédure signifié aux parties.

3)      Un délai sera fixé à la partie intervenante pour présenter ses observations éventuelles sur la demande de traitement confidentiel. La décision sur le bien-fondé de cette demande est réservée.

4)      Un délai sera fixé à la partie intervenante pour présenter un mémoire en intervention, sans préjudice de la possibilité de le compléter le cas échéant ultérieurement, à la suite d’une décision sur le bien-fondé de la demande de traitement confidentiel.

5)      Les dépens sont réservés.

Fait à Luxembourg, le 16 décembre 2009.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       A. W. H. Meij


* Langue de procédure : l’anglais.