ARRÊT DU TRIBUNAL (troisième chambre)
15 septembre 1998 (1)
«Recours en annulation - Fonds social européen - Réduction d'un concours
financier - Certification par l'État membre - Erreur d'appréciation des faits -
Confiance légitime - Sécurité juridique - Proportionnalité»
Dans l'affaire T-142/97,
Eugénio Branco Ld.a , société de droit portugais, établie à Lisbonne, représentée
par Me Bolota Belchior, avocat au barreau de Vila Nova de Gaia, ayant élu
domicile à Luxembourg en l'étude de Me Jacques Schroeder, 6, rue Heine,
contre
Commission des Communautés européennes , représentée par Mme Maria Teresa
Figueira et M. Knut Simonsson, membres du service juridique, en qualité d'agents,
ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre
du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,
ayant pour objet une demande d'annulation de la décision C (96) 3170 de la
Commission, du 16 décembre 1996, réduisant un concours financier octroyé à la
requérante par le Fonds social européen,
LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (troisième chambre),
composé de Mme V. Tiili, président, C. P. Briët et A. Potocki, juges,
greffier: Mme B. Pastor, administrateur principal,
vu la procédure écrite et à la suite de la procédure orale du 11 juin 1998,
rend le présent
Arrêt
Cadre réglementaire
- 1.
- La décision 83/516/CEE du Conseil, du 17 octobre 1983, concernant les missions
du Fonds social européen (JO L 289, p. 38, ci-après «décision 83/516»), prévoit
dans son article 1er, paragraphe 2, sous a), que le Fonds social européen participe
au financement d'actions de formation et d'orientation professionnelle.
- 2.
- Selon l'article 2, paragraphe 2, de cette décision, les États membres intéressés
garantissent la bonne fin des actions.
- 3.
- Le règlement (CEE) n° 2950/83 du Conseil, du 17 octobre 1983, portant application
de la décision 83/516 (JO L 289, p. 1, ci-après «règlement n° 2950/83»), prévoit
dans son article 5, paragraphe 1, que l'agrément par le Fonds social européen (ci-après «FSE») d'une demande de financement entraîne le versement d'une avance
de 50 % du concours à la date prévue pour le début de l'action de formation.
- 4.
- L'article 5, paragraphe 4, de ce règlement prévoit, d'une part, que les demandes
de paiement du solde contiennent un rapport détaillé sur le contenu, les résultats
et les aspects financiers de l'action concernée, et, d'autre part, que l'État membre
certifie l'exactitude factuelle et comptable des indications contenues dans les
demandes de paiement.
- 5.
- Aux termes de l'article 6, paragraphe 1, lorsque le concours du FSE n'est pas utilisé
dans les conditions fixées par la décision d'agrément, la Commission peut
suspendre, réduire ou supprimer ce concours, après avoir donné à l'État membre
concerné l'occasion de présenter ses observations.
- 6.
- Selon l'article 6, paragraphe 2, les sommes versées qui n'ont pas été utilisées dans
les conditions fixées par la décision d'agrément donnent lieu à répétition.
- 7.
- En application de l'article 7, paragraphe 1, la Commission peut procéder à des
vérifications sur place, sans préjudice des contrôles effectués par les États
membres.
- 8.
- La décision 83/673/CEE de la Commission, du 22 décembre 1983, concernant la
gestion du FSE (JO L 377, p. 1, ci-après «décision 83/673»), prévoit dans son
article 6 que les demandes de paiement de solde des États membres doivent
parvenir à la Commission dans un délai de dix mois après la date de fin des
actions. Il est précisé que le paiement du concours pour lequel la demande est
présentée après l'expiration de ce délai est exclu.
Faits à l'origine du litige
- 9.
- Le Departamento para os Assuntos do Fundo Social Europeu (département des
affaires du Fonds social européen, ci-après «DAFSE») représente l'État portugais
dans les matières relatives au FSE. Il est l'interlocuteur unique et obligatoire, d'une
part, des services de la Commission responsables de la mise en oeuvre du FSE et,
d'autre part, des organismes publics et privés portugais qui souhaitent bénéficier
d'un concours du FSE.
- 10.
- Le 31 juillet 1987, la requérante a présenté au DAFSE une demande de concours
financier du FSE pour une action de formation professionnelle à réaliser pendant
la période du 4 juillet au 30 décembre 1988 (ci-après «demande de concours»).
- 11.
- Par la suite, le DAFSE a introduit cette demande, au nom de l'État portugais et
en faveur de la requérante, auprès de la Commission.
- 12.
- Le projet pour lequel le concours était sollicité (dossier n° 880280 P1) a été
approuvé par décision de la Commission notifiée à la requérante par lettre du
DAFSE du 25 mai 1988 (ci-après «décision d'agrément»).
- 13.
- Cette décision d'agrément fixait le montant du concours du FSE à 62 191 499 ESC.
L'État portugais s'engageait pour sa part à financer le projet de la requérante à
concurrence de 50 883 954 ESC, par l'intermédiaire de l'Orçamento da Segurança
Social/Instituto de Gestão Financeira da Segurança Social (budget de la sécurité
sociale/institut de gestion financière de la sécurité sociale, ci-après «OSS/IGFSS»).
Des contributions privées complétaient le financement de l'action de formation.
- 14.
- Par lettre du 21 juillet 1988, la requérante a fait retour au DAFSE d'un «acte
d'acceptation de la décision d'agrément», dûment signé par elle à la demande de
la Commission. Dans cet acte, elle déclarait qu'elle utiliserait le concours du FSE
en respectant, d'une part, les normes nationales et communautaires applicables et,
d'autre part, les conditions énoncées dans la décision d'agrément.
- 15.
- Le 12 août 1988, elle a, en application de l'article 5, paragraphe 1, du règlement
n° 2950/83, perçu une avance égale à 50 % du montant du concours octroyé par
le FSE, ainsi que de celui octroyé par l'OSS/IGFSS, représentant respectivement
les sommes de 31 095 749 ESC et de 25 441 977 ESC.
- 16.
- L'action de formation achevée, elle a constaté que le coût total final de celle-ci
s'élevait à un montant de 104 289 500 ESC, inférieur à la somme initialement
prévue. Elle a donc présenté au DAFSE une demande de paiement d'un solde de
20 527 598 ESC, à verser par le FSE, et d'un solde de 16 795 307 ESC, à verser
par l'OSS/IGFSS.
- 17.
- Lors d'un premier examen de cette demande, le DAFSE a eu des doutes quant à
la régularité des indications qu'elle contenait. Par conséquent, il a demandé à
l'Inspecçao Geral de Finanças (Inspection générale des finances, ci-après «IGF»)
d'effectuer, en application de l'article 7, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, un
contrôle de la demande de paiement du solde.
- 18.
- Pendant que cet examen était en cours, le DAFSE a, le 2 août 1989, certifié
l'exactitude factuelle et comptable de la demande de paiement du solde, en
application de l'article 5, paragraphe 4, du règlement n° 2950/83. Il a versé à la
requérante la somme de 16 795 307 ESC, constituant le solde du concours à verser
par l'OSS/IGFSS, tout en indiquant que ce versement ne préjugeait pas de la
décision finale à adopter par la Commission.
- 19.
- Le 9 janvier 1990, l'IGF a présenté son rapport. Constatant, d'une part, que la
requérante avait fait certaines dépenses inutiles et, d'autre part, que certaines
autres dépenses avaient été faites en violation des dispositions du droit national,
elle a conclu à une réduction du concours financier accordé.
- 20.
- Reprenant à son compte la position de l'IGF, le DAFSE a écrit, le 23 mai 1990,
une lettre à la requérante par laquelle il l'a informée que le concours du FSE
devait être réduit à 30 672 242 ESC, et celui de l'OSS/IGFSS à 25 095 471 ESC.
Il a ordonné en conséquence à la requérante de restituer une partie des sommes
qu'elle avait déjà obtenues du FSE et de l'OSS/IGFSS, à savoir respectivement
423 507 ESC et 17 141 813 ESC.
- 21.
- Le 23 mai 1990, le DAFSE a également présenté à la Commission, au nom de la
requérante, une demande corrigée de paiement du solde. Il proposait la réduction
du concours à concurrence des montants indiqués dans la lettre qu'il avait adressée
le même jour à la requérante.
- 22.
- Par décision du 29 mars 1993, la Commission, suivant cette proposition, a réduit
le concours financier du FSE à 30 672 242 ESC.
- 23.
- Par lettre du 15 décembre 1993, reçue le 17 décembre 1993, le DAFSE a informé
la requérante de cette décision.
- 24.
- Le 23 février 1994, la requérante a introduit devant le Tribunal un recours en
annulation de ladite décision.
- 25.
- La Commission n'ayant pas déposé de mémoire en défense dans le délai fixé, le
Tribunal a rendu, le 12 janvier 1995, un arrêt par défaut, Branco/Commission
(T-85/94, Rec. p. II-45). Considérant que le moyen tiré d'une violation de
l'obligation de motivation était fondé, il a annulé la décision de la Commission, sans
procéder à l'examen des autres moyens soulevés par la requérante.
- 26.
- Le 22 février 1995, la Commission a formé opposition à cet arrêt, en vertu de
l'article 122, paragraphe 4, du règlement de procédure.
- 27.
- Par arrêt du 13 décembre 1995, Commission/Branco [T-85/94 (122),
Rec. p. II-2993], le Tribunal a rejeté l'opposition.
- 28.
- A la suite de cet arrêt, la Commission a procédé à un nouvel examen du dossier.
Par lettre du 30 mai 1996, elle a envoyé au DAFSE un nouveau projet de décision
de réduction du concours et l'a invité à faire valoir ses observations, conformément
à l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83. Elle lui a également demandé
de notifier ledit projet à la requérante et de lui transmettre l'éventuelle réaction
de celle-ci.
- 29.
- Par lettre du 19 juin 1996, le DAFSE a communiqué à la requérante une copie du
projet de décision de la Commission et l'a invitée à faire valoir ses observations
dans un délai de dix jours. La requérante a répondu à cette invitation dans le délai
imparti.
- 30.
- Par lettre reçue le 4 septembre 1996, le DAFSE a transmis à la Commission une
copie des observations de la requérante sur son projet de décision, accompagnée
de ses propres observations.
- 31.
- Le 16 décembre 1996, la Commission a adopté la décision C (96) 3170 (ci-après
«décision litigieuse»). Après avoir rappelé la procédure suivie par elle et le
DAFSE et s'être référée tant au rapport de l'IGF qu'à sa lettre du 30 mai 1996,
elle a conclu que le concours financier du FSE devait être réduit à concurrence dumême montant que celui retenu dans sa décision du 29 mars 1993, à savoir
30 672 242 ESC.
- 32.
- Par lettre du 24 février 1997, le DAFSE a notifié la décision litigieuse à la
requérante, en lui demandant la restitution dans un délai de 30 jours des sommes
de 423 507 ESC et 17 141 813 ESC, dues respectivement au FSE et à l'OSS/IGFSS.
- 33.
- Par lettres reçues les 25 octobre 1996 et 6 mai 1997, le Tribunal criminal do Porto
et le DAFSE ont informé la Commission que, à la suite du rapport comptable
établi par l'IGF, le DAFSE avait déposé plainte devant ledit tribunal contre larequérante pour détournement de subventions et actes frauduleux en vue d'obtenir
des subventions.
Procédure et conclusions des parties
- 34.
- Par requête déposée au greffe du Tribunal le 29 avril 1997, la requérante a
introduit le présent recours en annulation de la décision litigieuse.
- 35.
- Sur rapport du juge rapporteur, le Tribunal (troisième chambre) a décidé d'ouvrir
la procédure orale sans procéder à des mesures d'instruction préalables. Il a
toutefois décidé de poser quelques questions écrites à la Commission, auxquelles
celle-ci a répondu lors de l'audience publique qui s'est déroulée le 11 juin 1998.
- 36.
- Lors de cette audience, les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs
réponses aux questions du Tribunal.
- 37.
- La requérante conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
- annuler la décision litigieuse;
- condamner la Commission aux dépens.
- 38.
- La Commission conclut à ce qu'il plaise au Tribunal:
- rejeter le recours;
- condamner la requérante aux dépens.
Sur le fond
- 39.
- La requérante invoque cinq moyens d'annulation, tirés respectivement d'une
violation du règlement n° 2950/83, d'une erreur d'appréciation des faits, d'une
violation des principes de protection de la confiance légitime et de sécurité
juridique, d'une violation de droits acquis et, enfin, d'une violation du principe de
proportionnalité.
1. Sur le premier moyen, tiré d'une violation du règlement n° 2950/83
Arguments des parties
- 40.
- La requérante observe que, au cours du mois d'août 1989, le DAFSE a certifié
l'exactitude factuelle et comptable de la demande de paiement de solde présentée
par elle, conformément à l'article 5, paragraphe 4, du règlement n° 2950/83. Or,
après transmission de cette certification à la Commission, le pouvoir du DAFSE et
de l'État membre aurait pris fin. En effet, la réglementation applicable, et plus
particulièrement le règlement n° 2950/83, ne permettrait pas que, après lacertification et la transmission de celle-ci à la Commission, le DAFSE procède
encore, comme en l'espèce, à un «réexamen» du dossier, en modifiant ainsi sa
certification préalable.
- 41.
- L'État membre devrait examiner s'il existe des irrégularités avant de prendre l'acte
de certification. Dans l'hypothèse contraire, il effectuerait une fausse certification.
Saisi de la demande de paiement de solde, le DAFSE n'aurait pu prendre qu'une
des deux décisions suivantes: soit conclure à l'authenticité des éléments présentés
et procéder à la certification de ceux-ci, soit constater leur inexactitude et, dans ce
cas, refuser la certification. En certifiant la demande de paiement de solde, il aurait
donc définitivement approuvé les indications contenues dans cette demande.
- 42.
- La requérante observe enfin que le réexamen susvisé a été réalisé par l'IGF,
laquelle ne serait ni habilitée à contrôler les actions du FSE, ni techniquement en
mesure de se prononcer sur l'application de la réglementation communautaire.
- 43.
- La Commission conteste l'argumentation de la requérante.
Appréciation du Tribunal
- 44.
- Dans la mesure où il confirme l'exactitude factuelle et comptable des indications
contenues dans les demandes de paiement de solde, l'État membre est responsable
vis-à-vis de la Commission des certifications qu'il fournit.
- 45.
- Par ailleurs, en vertu de l'article 2, paragraphe 2, de la décision 83/516, les États
membres intéressés garantissent la bonne fin des actions de formation et
d'orientation professionnelle du FSE. En outre, en vertu de l'article 7, paragraphe
1, du règlement n° 2950/83, la Commission peut procéder à des vérifications des
demandes de paiement de solde, «sans préjudice des contrôles effectués par les
États membres».
- 46.
- Ces obligations et pouvoirs des États membres ne sont limités par aucune
restriction temporelle.
- 47.
- En conséquence, dans un cas comme celui de l'espèce, où l'État membre a déjà
certifié l'exactitude factuelle et comptable de la demande de paiement de solde,
ledit État peut encore modifier son appréciation de la demande de paiement de
solde, lorsqu'il estime être confronté à des irrégularités qui ne s'étaient pas révélées
précédemment.
- 48.
- A cet égard, il convient d'observer que l'article 6 de la décision 83/673 prévoit que
les demandes de paiement de solde doivent parvenir à la Commission dans un délai
de dix mois après la fin des actions de formation et que tout paiement du concours
pour lequel la demande est présentée après l'expiration de ce délai est exclu. Dans
ces conditions, si des contrôles de régularité ne pouvaient être effectués qu'avantla certification de l'exactitude factuelle et comptable d'une demande de paiement
de solde, il pourrait arriver que l'État membre ne soit pas en mesure de présenter
cette demande à la Commission dans le délai de dix mois susvisé, de sorte que le
paiement du solde du concours serait exclu. Il s'ensuit que, dans certaines
hypothèses, la certification de l'exactitude factuelle et comptable d'une demande
de paiement de solde antérieurement à un contrôle de régularité ou avant
l'achèvement de celui-ci peut être de l'intérêt du bénéficiaire du concours.
- 49.
- Enfin, rien ne s'oppose à ce qu'une autorité telle que le DAFSE ait recours à un
auditeur professionnel afin de l'aider à contrôler l'exactitude factuelle et comptable
des indications contenues dans une demande de paiement de solde. Or, il ressort
du dossier que l'IGF est une entité d'audit professionnelle et que, en vertu de la
législation portugaise, elle a le pouvoir d'effectuer des enquêtes en cas de soupçons
d'irrégularités telles que celles de l'espèce. En outre, il n'est pas contesté que l'IGF
a procédé à l'audit du dossier de la requérante à la demande du DAFSE et
conformément aux pouvoirs qui lui sont conférés par la loi portugaise. Dans ces
conditions, on ne saurait critiquer son intervention dans la procédure qui a conduit
à l'adoption de la décision litigieuse.
- 50.
- Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré d'une violation du règlement
n° 2950/83 doit être rejeté.
2. Sur le deuxième moyen, tiré d'une erreur d'appréciation des faits
Arguments des parties
- 51.
- La requérante observe que la Commission a décidé de réduire le concours financier
du FSE sur la base du rapport de l'IGF. Par conséquent, elle considère que, si,
comme elle le croit, ce rapport est entaché d'erreurs d'appréciation des faits, la
décision litigieuse l'est également.
- 52.
- Elle critique d'abord le fait que l'IGF n'a effectué aucun examen factuel de l'action
de formation, mais a uniquement procédé à un examen comptable. Dans son
rapport, l'IGF n'aurait fait aucune référence à la décision d'agrément. En
particulier, elle n'aurait pas indiqué dans quelle mesure les conditions formulées
dans cette décision auraient été violées. En définitive, son rapport ne relèverait
qu'une simple divergence entre elle-même et la requérante, relative aux critères
d'éligibilité des dépenses.
- 53.
- Le rapport de l'IGF comporterait par ailleurs des erreurs d'appréciation en ce qui
concerne la sous-traitance confiée à la société E. B. Ld.a, le taux horaire des
stagiaires et, enfin, les primes d'assiduité, l'équipement informatique faisant l'objet
d'un leasing et les amortissements.
- 54.
- En ce qui concerne, en premier lieu, la sous-traitance de certaines activités confiée
à la société E. B. Ld.a, l'IGF aurait considéré à tort qu'elle n'était pas justifiée.
- 55.
- La réglementation applicable et la décision d'agrément permettraient au moins
implicitement au bénéficiaire d'un concours du FSE de faire appel à des tiers pour
effectuer des travaux spécialisés dans le cadre d'une action de formation. La sous-traitance confiée à E. B. Ld.a aurait d'ailleurs été indiquée dans la demande de
concours, les coûts liés aux travaux concernés figurant sous le poste «travaux
spécialisés».
- 56.
- La critique émise par l'IGF, selon laquelle les montants facturés par E. B. Ld.a
auraient été augmentés par le recours excessif à des collaborateurs indépendants
ne serait pas justifiée, dès lors que la requérante elle-même aurait recouru à de tels
collaborateurs, pour des coûts encore plus élevés, et que cette pratique n'aurait
jamais été contestée ni par le DAFSE ni par la Commission.
- 57.
- Quant à la critique de l'IGF selon laquelle les dépenses liées à la sous-traitance
confiée à la société E. B. Ld.a n'auraient pas été nécessaires, puisque les associés
de la requérante étaient également associés de la société sous-traitante, la
requérante fait valoir qu'elle a également sous-traité certaines activités en recourant
aux services d'une autre société (Açorlis Ld.a), alors que cette sous-traitance n'a
suscité aucune remarque de la part de l'IGF. Elle souligne encore que la société
E. B. Ld.a possède une personnalité juridique distincte de la sienne.
- 58.
- En ce qui concerne, en deuxième lieu, le taux horaire de rémunération des
stagiaires, le rapport de l'IGF aurait estimé à tort qu'il n'était pas conforme à la
législation nationale portugaise. La requérante aurait formé des professionnels
«hautement qualifiés», c'est-à-dire des cadres supérieurs, auxquels elle aurait
accordé une rémunération horaire de 300 ESC, parfaitement compatible avec
l'arrêté du ministère du Travail et de la Sécurité sociale portugais du 14 juin 1986.
Ce taux horaire aurait même été inférieur à celui de 330 ESC approuvé par la
Commission dans la décision d'agrément.
- 59.
- En ce qui concerne, en troisième lieu, les primes d'assiduité, l'équipement
informatique faisant l'objet d'un leasing et les amortissements, le rapport de l'IGF
comporterait une contradictio in terminis, dans la mesure où il aurait refusé pour
1988 certaines dépenses qui avaient été acceptées dans d'autres actions de
formation du FSE exécutées par la requérante en 1987. Cette contradiction serait
révélatrice de l'absence de rigueur technique et scientifique du rapport de l'IGF et
du caractère purement subjectif et discrétionnaire caractérisant les conclusions de
ce rapport.
- 60.
- Plus particulièrement, les primes d'assiduité accordées aux stagiaires en 1988
n'auraient pas été considérées par l'IGF comme des dépenses éligibles, alors que,
en 1987, l'IGF aurait estimé que des primes similaires constituaient effectivement
de telles dépenses. Le même raisonnement vaudrait pour les amortissements, quiavaient été acceptés en 1987 par l'IGF, mais refusés en 1988.
- 61.
- En outre, ce serait en conformité avec la décision d'agrément que la valeur de
l'équipement informatique acquis en leasing aurait été répartie sur les douze mois
de l'année au cours de laquelle l'action de formation avait été exécutée (1988), et
non sur la période de six mois pendant laquelle cette exécution avait effectivement
eu lieu.
- 62.
- En effet, au cours des années 1987 et 1988, l'amortissement de biens aurait
toujours été opéré sur une base annuelle, règle de l'administration fiscale qui
n'aurait été modifiée qu'en 1993. Or, en appliquant une législation entrée en
vigueur en 1993 à des situations de fait nées en 1987 et en 1988, l'IGF aurait
méconnu une règle élémentaire d'interprétation législative.
- 63.
- La Commission conteste l'argumentation de la requérante.
Appréciation du Tribunal
- 64.
- Aux termes de l'article 6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, lorsqu'un
concours du FSE n'est pas utilisé «dans les conditions fixées par la décision
d'agrément», la Commission peut suspendre, réduire ou supprimer ce concours.
- 65.
- Dans un cas comme celui de l'espèce où, à la demande de la Commission, le
bénéficiaire du concours du FSE a explicitement déclaré dans l'acte d'acceptation
de la décision d'agrément que le concours accordé serait utilisé «en conformité
avec les dispositions nationales et communautaires applicables», il doit être admis
que les «conditions» visées à l'article 6, paragraphe 1, précité, s'étendent au
respect par ledit bénéficaire des règles de droit national ainsi que des règles de
droit communautaire.
- 66.
- A cet égard, le droit portugais et le droit communautaire subordonnant l'utilisation
des fonds publics à une exigence de bonne gestion financière (arrêt du Tribunal du
16 juillet 1998, Proderec/Commission, T-72/97, non encore publié au Recueil, point
87), la Commission peut entre autres suspendre, réduire ou supprimer un concours
du FSE lorsque celui-ci n'a pas été utilisé en conformité avec ladite exigence.
- 67.
- S'agissant de l'étendue du pouvoir exercé par la Commission en vertu de l'article
6, paragraphe 1, du règlement n° 2950/83, il convient de constater que l'application
de cette disposition peut impliquer la nécessité de procéder à une évaluation de
situations factuelles et comptables complexes. Dans le cadre d'une telle évaluation,
l'institution dispose donc d'un large pouvoir d'appréciation. Par conséquent, dans
l'examen du bien-fondé du présent moyen, le contrôle du Tribunal doit être limité
à la vérification de l'absence d'erreur manifeste d'appréciation des données en
cause (voir, en ce sens, en dernier lieu, arrêt du Tribunal du 17 juillet 1998, Thai
Bicycle Industry/Conseil, T-118/96, non encore publié au Recueil, points 32 et 33).
- 68.
- Dans la décision litigieuse, la Commission, ainsi qu'elle était en droit de le faire
(arrêts précités Branco/Commission, point 36, et Commission/Branco, point 30), arenvoyé tant au rapport de l'IGF qu'à sa lettre du 30 mai 1996, documents dont il
est constant que la requérante a eu connaissance en temps utile.
- 69.
- La lettre de la Commission du 30 mai 1996 est entièrement fondée sur le rapport
de l'IGF.
- 70.
- Dans ces conditions, la décision litigieuse est, elle-même, uniquement fondée sur
ledit rapport.
- 71.
- Il y a donc lieu de vérifier si, en reprenant à son compte le contenu et les
conclusions de celui-ci, la Commission a commis une erreur manifeste
d'appréciation.
- 72.
- Ce contrôle suppose l'examen du bien-fondé des arguments de la requérante
relatifs à la méthode utilisée par l'IGF dans l'exécution de sa mission et aux erreurs
qui seraient contenues dans son rapport.
Sur la méthode de contrôle utilisée par l'IGF
- 73.
- La requérante ne saurait reprocher à l'IGF de ne pas s'être référée à la décision
d'agrément en précisant celles des conditions formulées par celle-ci qui auraient été
violées. En effet, dans les circonstances de l'espèce, une réduction du concours
initialement accordé pouvait également être justifiée par référence à d'autres
dispositions, notamment de droit national (voir ci-dessus point 65).
- 74.
- La requérante ne peut davantage soutenir que l'IGF n'a procédé qu'à un contrôle
comptable et que son rapport relève «une simple divergence entre l'IGF et la
requérante relative aux critères à utiliser en ce qui concerne l'éligibilité des
dépenses». En effet, l'IGF a clairement indiqué (p. 2 du rapport) que l'objectif de
son contrôle était l'appréciation des éléments disponibles concernant la vérification
de l'action de formation mise en oeuvre par la requérante en 1988, «en particulier
en ce qui concerne sa légalité et sa régularité». A cet égard, elle s'est référée à
plusieurs occasions à une disposition législative portugaise pour démontrer une
irrégularité dans l'exécution par la requérante de l'action de formation.
- 75.
- Il s'ensuit que la critique de la requérante relative à la méthode de contrôle utilisée
par l'IGF doit être rejetée.
Sur les erreurs prétendument contenues dans le rapport de l'IGF
- 76.
- Il convient de vérifier si le rapport de l'IGF contient effectivement des erreurs
manifestes d'appréciation du coût de l'action de formation en ce qui concerne la
sous-traitance confiée à la société E. B. Ld.a, le taux horaire de la rémunération des
stagiaires et, enfin, les primes d'assiduité, l'équipement informatique en leasing et
les amortissements.
- Sous-traitance confiée à E. B. Ld.a
- 77.
- S'il est vrai qu'aucune disposition de la réglementation relative au FSE ou de la
décision d'agrément ne s'oppose au recours à la sous-traitance, un tel recours doit
se justifier, ainsi que la Commission l'a souligné dans ses mémoires, par le fait que
le sous-traitant est en mesure d'effectuer certains travaux spécialisés clairement
identifiés et relevant de ses activités habituelles. La requérante elle-même a admis
implicitement cette analyse, dans la mesure où elle a inscrit la sous-traitance
confiée à E. B. Ld.a sous le poste «travaux spécialisés».
- 78.
- En revanche, un recours à un sous-traitant ne saurait servir à augmenter
artificiellement les coûts d'une action de formation, en méconnaissance de
l'exigence d'une bonne gestion financière.
- 79.
- Or, il ressort du rapport de l'IGF (p. 8) qu'E. B. Ld.a, société composée des mêmes
associés que la société requérante, ne disposait d'aucun travailleur salarié en 1988,
année de réalisation de l'action du FSE, et qu'elle se bornait à engager des
entrepreneurs indépendants pour assurer certaines prestations. Il s'ensuit que cette
sous-traitante ne pouvait être considérée comme véritablement «spécialisée» dans
les travaux qui lui avaient été confiés par la requérante et qu'elle a uniquement
servi d'intermédiaire, percevant à cette occasion un bénéfice, comme le relève à
juste titre le rapport de l'IGF.
- 80.
- En outre, certains coûts assumés par E. B. Ld.a n'étaient pas «liés à l'action de
formation, eu égard tant au descriptif de ces factures (services de consultation)
qu'aux dates d'émission (une avant le début de l'action, une après la fin)» (p. 8 du
rapport de l'IGF).
- 81.
- A cet égard, l'IGF a proposé de ne pas accepter un montant total de
5 250 000 ESC accordé par E. B. Ld.a à trois travailleurs indépendants au titre
d'honoraires pour la «planification détaillée des cours de formation professionnelle
réalisés en 1988», mais a proposé d'admettre un montant de 612 735 ESC constitué
par les rémunérations versées par la requérante à cinq travailleurs indépendants
dans le cadre de la «planification des cours» (p. 12 du rapport).
- 82.
- L'IGF a conclu (p. 8 du rapport):
«On ne voit absolument pas quelle était l'utilité de l'intervention de E. B. Ld.a dans
l'action de formation, ce qui fait qu'on ne pourra accepter comme éligibles que les
imputations qui, basées sur des factures d'E. B. Ld.a, se situent dans les limites des
sommes qu'elle a supportées, parce que liées à l'action de formation.»
- 83.
- En ce qui concerne la comparaison faite par la requérante avec la sous-traitante
Açorlis Ld.a, il ressort du rapport de l'IGF (p. 15) que le montant perçu par
Açorlis Ld.a a été accepté dans sa totalité parce qu'il n'était pas important et neméritait pas, en conséquence, un examen approfondi du type de celui dont a fait
l'objet E. B. Ld.a.
- 84.
- Au regard des constatations ainsi opérées, la Commission n'a pas commis une
erreur manifeste d'appréciation en réduisant, sur la base du rapport de l'IGF, le
concours de la requérante sur le poste relatif à la sous-traitance confiée à
E. B. Ld.a.
- Taux horaire de la rémunération des stagiaires
- 85.
- Il ressort de la demande de concours que la requérante se proposait de former des
professionnels «qualifiés» («jeunes chômeurs dont la qualification est insuffisante
pour permettre leur insertion sur le marché du travail») et non des professionnels
«hautement qualifiés». Or, la requérante ne conteste pas que, en vertu de la
législation nationale applicable, la rémunération horaire pour des stagiaires formés
en vue de devenir des professionnels «qualifiés» est de 267 ESC, ainsi que le
souligne le rapport de l'IGF (p. 10).
- 86.
- Sur ce point, la requérante ne saurait reprocher à la Commission de ne pas avoir
soulevé, au stade de la décision d'agrément, des objections à l'encontre d'une
rémunération horaire de 330 ESC, dès lors qu'une décision d'agrément ne peut pas
emporter approbation d'une illégalité en droit national.
- 87.
- Dans ces circonstances, la Commission n'a pas commis une erreur manifeste
d'appréciation en réduisant, sur la base du rapport de l'IGF, le concours de la
requérante relatif au taux horaire de rémunération des stagiaires.
- Primes d'assiduité, équipement informatique en leasing et amortissements
- 88.
- Il convient tout d'abord d'observer que, si un poste de dépenses avait été approuvé
en 1987, cela n'impliquait pas nécessairement que le même poste devait l'être
également en 1988, alors même qu'il n'était pas compatible avec les conditions
imposées par la décision d'agrément, ou avec les dispositions du droit national ou
communautaire applicables.
- 89.
- S'agissant du poste relatif aux primes d'assiduité, il ressort du rapport de l'IGF
(p. 21) qu'elles sont, en vertu du droit national portugais, assimilées à des
rémunérations des stagiaires, ce que ne conteste pas la requérante. En l'espèce,
c'est l'utilisation de taux supérieurs à ceux légalement autorisés (voir ci-dessus point
85) qui a entraîné la réduction du poste concerné. Par suite, la requérante ne
saurait soutenir que les primes d'assiduité «ont été refusées en 1988».
- 90.
- En ce qui concerne l'équipement informatique faisant l'objet d'un leasing, il
convient de constater que l'action de formation a été menée du 4 juillet au 30décembre 1988, c'est-à-dire pendant environ six mois. Par conséquent, ainsi quecela ressort du rapport de l'IGF (p. 20 et 22) , les sommes relatives à ce poste
devaient être calculées sur la base d'une période de six mois, et non de douze mois
comme le suggère la requérante.
- 91.
- S'agissant plus généralement des amortissements de biens, il convient de constater
que la requérante n'a nullement étayé par la production de documents, notamment
de textes législatifs, son affirmation selon laquelle l'IGF aurait erronément appliqué
une législation entrée en vigueur en 1993 à des situations de fait nées en 1987 et
en 1988 (voir ci-dessus point 62). Elle n'a donc pas établi que, contrairement aux
indications du rapport de l'IGF (p. 22) et aux explications fournies par la
Commission lors de l'audience, le droit portugais applicable à l'époque des faits
s'opposait à ce que l'amortissement de biens soit opéré sur la base d'une période
inférieure à une année (douze mois).
- 92.
- Dans ces circonstances, la Commission n'a pas commis une erreur manifeste
d'appréciation en réduisant, sur la base du rapport de l'IGF, le concours de la
requérante sur les postes relatifs aux primes d'assiduité, à l'équipement
informatique faisant l'objet d'un leasing et aux amortissements.
- 93.
- Il s'ensuit que le moyen tiré d'une erreur d'appréciation des faits doit être rejeté.
3. Sur le troisième moyen, tiré d'une violation des principes de protection de la
confiance légitime et de sécurité juridique
Arguments des parties
- 94.
- La requérante fait valoir que le DAFSE a transmis sa demande de paiement de
solde à la Commission dès le mois de septembre 1989, alors que celle-ci n'a pris
la décision litigieuse que vers la fin de l'année 1996. Ce délai de plus de sept ans
aurait créé dans son chef une confiance légitime dans le fait que la Commission
accueillerait sa demande de paiement telle que certifiée par le DAFSE. Cette
confiance légitime aurait encore été renforcée par l'arrêt Branco/Commission,
précité.
- 95.
- La requérante souligne que la Commission doit prendre toute décision dans un
délai raisonnable. Elle ne pourrait pas laisser s'éterniser la procédure et reporter
à l'infini l'adoption d'une décision, sous peine de violer les principes de protection
de la confiance légitime et de sécurité juridique (arrêt de la Cour du 24 novembre
1987, RSV/Commission, 223/85, Rec. p. 4617, à partir du point 12).
- 96.
- La Commission conteste l'argumentation de la requérante.
Appréciation du Tribunal
- 97.
- Dans un cas comme celui de l'espèce, où le bénéficiaire d'un concours du FSE n'a
pas exécuté l'action de formation selon les conditions auxquelles l'octroi de ce
concours était subordonné, ledit bénéficiaire ne peut pas se prévaloir du principe
de protection de la confiance légitime en vue d'obtenir le paiement du solde du
montant total du concours initialement accordé (arrêts de la Cour du 4 juin 1992,
Consorgan/Commission, C-181/90, Rec. p. I-3557, point 17, et Cipeke/Commission,
C-189/90, Rec. p. I-3573, point 17; arrêt du Tribunal du 19 mars 1997,
Oliveira/Commission, T-73/95, Rec. p. II-381, point 27).
- 98.
- L'arrêt Branco/Commission, précité, n'a pas davantage pu créer une confiance
légitime dans le chef de la requérante, dans la mesure où le Tribunal ne s'est pas
prononcé, dans cet arrêt, sur la légalité de la réduction du concours, mais a
uniquement statué sur l'absence de motivation de la décision en cause.
- 99.
- Quant à la question de savoir si la Commission a violé le principe de sécurité
juridique en ce qu'elle n'aurait pas adopté la décision litigieuse dans un délai
raisonnable, il convient d'observer que cette décision a été adoptée en exécution
de l'arrêt Branco/Commission, précité, qui a annulé la décision de la Commission
du 29 mars 1993. Étant donné, en outre, que dans son premier recours, la
requérante n'a pas contesté le délai dans lequel la Commission avait adopté cette
dernière décision, seule la période postérieure à l'arrêt Branco/Commission doit
être prise en compte pour apprécier le caractère raisonnable du délai d'adoption
de la décision litigieuse, appréciation qui dépend par ailleurs des circonstances de
l'espèce (arrêt Oliveira/Commission, précité, points 41 à 43).
- 100.
- Or, il ressort du dossier que, pendant le délai de deux ans écoulé entre le 12
janvier 1995, date de l'arrêt Branco/Commission, et le 16 décembre 1996, date
d'adoption de la décision litigieuse, la Commission a formé opposition à l'arrêt
Branco/Commission, puis, après le prononcé de l'arrêt Commission/Branco, précité,
le 13 décembre 1995, a pris les mesures nécessaires en vue d'adopter une nouvelle
décision. A cet effet, elle a réexaminé le dossier, préparé un nouveau projet de
décision et donné à l'État membre et à la requérante la possibilité de faire valoir
leurs observations sur cette proposition.
- 101.
- Dans ces circonstances, le délai concerné doit être considérée comme raisonnable.
- 102.
- Il s'ensuit que le moyen tiré d'une violation des principes de protection de la
confiance légitime et de sécurité juridique doit être rejeté.
4. Sur le quatrième moyen, tiré d'une violation de droits acquis
Arguments des parties
- 103.
- La requérante estime que la décision litigieuse viole des droits acquis par elle. Elle
se réfère aux conclusions de l'avocat général M. Darmon sous l'arrêt de la Cour du
7 mai 1991, Interhotel/Commission (C-291/89, Rec. p. I-2257), et fait valoir que la
décision d'agrément a créé dans son chef des droits subjectifs et engendre le droit
d'exiger le paiement intégral du concours.
- 104.
- La Commission conteste l'argumentation de la requérante.
Appréciation du Tribunal
- 105.
- S'il est vrai qu'une décision d'agrément fait naître dans le chef du bénéficiaire d'un
concours du FSE un droit d'exiger le paiement du concours, il ne peut en être ainsi
que dans l'hypothèse où ce bénéficiaire exécute l'action de formation concernée
conformément aux conditions dont cette action est assortie.
- 106.
- Or, dans le cas d'espèce, la requérante n'a pas respecté les conditions auxquelles
l'action de formation menée par elle était soumise.
- 107.
- Il s'ensuit que le moyen tiré d'une violation de droits acquis doit être rejeté.
5. Sur le cinquième moyen, tiré d'une violation du principe de proportionnalité
Arguments des parties
- 108.
- La requérante observe que la Commission avait initialement fixé le montant du
concours du FSE pour l'action de formation concernée à 125 639 392 ESC, alors
que, après l'achèvement de l'action, elle a réduit cette somme à 61 964 126 ESC.
En réduisant ainsi le concours de plus de moitié, l'institution aurait violé le principe
de proportionnalité.
- 109.
- La Commission conteste l'argumentation de la requérante.
Appréciation du Tribunal
- 110.
- Dans le cas d'espèce, les réductions opérées par la Commission sont directement
liées aux irrégularités relevées et ont pour objet d'exclure le remboursement des
seules dépenses illégales ou inutiles.
- 111.
- Ces diminutions sont donc conformes au principe de proportionnalité.
- 112.
- Il s'ensuit que le moyen tiré d'une violation du principe de proportionnalité doit
être rejeté.
- 113.
- En conséquence, le recours doit être rejeté dans son ensemble.
Sur la demande de la requérante tendant à ce que le Tribunal écarte un document
joint à la duplique de la Commission
- 114.
- Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 28 janvier 1998, la requérante a
demandé au Tribunal d'écarter le document intitulé «accusation» joint à la
duplique de la Commission et qui se réfère à la procédure initiée par l'IGF devant
le Tribunal criminal do Porto.
- 115.
- La Commission s'oppose à cette demande.
- 116.
- En l'espèce, le Tribunal ne s'est pas fondé sur le document en cause en vue de
trancher le présent litige.
- 117.
- Par conséquent, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de la requérante.
Sur les dépens
- 118.
- Aux termes de l'article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie
qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La requérante
ayant succombé en ses conclusions, il y a lieu de la condamner aux dépens,
conformément aux conclusions en ce sens de la Commission.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (troisième chambre)
déclare et arrête:
1) Le recours est rejeté.
2) La requérante est condamnée aux dépens.
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 septembre 1998.
Le greffier
Le président
H. Jung
V. Tiili