Language of document : ECLI:EU:T:2014:6

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

      16 janvier 2014(*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire consistant en la fixation par un bouton d’une étiquette au milieu de l’oreille d’une peluche – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑434/12,

Margarete Steiff GmbH, établie à Giengen an der Brenz (Allemagne), représentée par Me D. Fissl, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Pohlmann, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 19 juillet 2012 (affaire R 1692/2011‑1), concernant une demande d’enregistrement d’un signe constitué par la fixation par un bouton d’une étiquette au milieu de l’oreille d’une peluche comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. A. Dittrich, président, J. Schwarcz (rapporteur) et Mme V. Tomljenović, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 28 septembre 2012,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 21 janvier 2013,

vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 6 mai 2013,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 12 octobre 2010, la requérante, Margarete Steiff GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé, identifiée par la requérante en tant que marque « autre », est reproduite ci-après :


Image not found

3        Dans la demande d’enregistrement, la marque en cause est décrite de la manière suivante :

« Il s’agit d’une marque de position: la marque dont l’enregistrement est demandé revendique une protection pour une étiquette rectangulaire en tissu de forme allongée, fixée au milieu de l’oreille d’un animal en peluche au moyen d’un bouton en métal rond, brillant ou mat. L’étiquette est plus étroite que l’oreille, mais la dépasse par sa longueur. Le bouton est plus petit que l’étiquette, celle-ci le dépassant de tous les côtés. La forme et la taille de l’oreille de l’animal en peluche sont ici variables et ne font pas partie de la demande de protection. Les traits en pointillés ne font pas partie de la marque et ne servent qu’à montrer la position de la marque sur les produits. La forme de tête d’animal représentée par les traits en pointillés n’est qu’un exemple et ne vise pas à limiter l’étendue de la protection de la marque à cette forme de tête d’animal. »

4        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 28 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Figures dures et moles d’animaux en peluche en feutre, fourrure, laine d’alpaca, mohair ou polyester, qui ont des oreilles ».

5        Par décision du 17 juin 2011, l’examinateur a refusé l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits visés au point 4 ci-dessus, au motif que la marque en cause était dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

6        Le 17 août 2011, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI contre la décision de l’examinateur.

7        Par décision du 19 juillet 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours au motif que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif, conformément à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

8        En substance, la chambre de recours a indiqué que les produits en question s’adressaient à un public général, qui leur prêtera une attention moyenne. Ce public reconnaîtrait dans le signe soit une vignette dans l’oreille d’une figure d’animal en peluche, qui pourrait par exemple comporter le prix du produit, des indications de lavage ou le nom du fabricant, soit un dispositif antivol. La simplicité de la forme de l’étiquette, plaiderait à elle seule contre la possibilité que le consommateur puisse y associer l’origine commerciale du produit. La chambre de recours a, ensuite, relevé qu’en raison du rattachement de l’étiquette sur l’animal en peluche au moyen du bouton, la marque demandée n’était pas indépendante de l’aspect des figures d’animaux en peluche. Quant aux boutons ainsi qu’aux petites vignettes, ils constitueraient des éléments de configuration usuels sur les figures d’animaux en peluche, lesquels se distingueraient par une grande diversité de designs et de configurations possibles. Or, la configuration en cause ne se démarquerait pas de cette diversité. L’absence de caractère distinctif de la marque ne saurait être mise en cause par la combinaison de matériaux différents, dont se prévaut la requérante, à savoir, d’une part, un bouton en métal et une vignette en tissu, et d’autre part, un animal en peluche, dans la mesure où cette circonstance ne procèderait pas de la demande d’enregistrement. Enfin, la marque demandée aurait plutôt une fonction décorative et fonctionnelle et non celle d’indiquer l’origine des produits désignés.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler le rejet de l’enregistrement de la marque demandée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

10      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

11      À l’appui du recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009.

 Sur la recevabilité des éléments de preuve présentés pour la première fois devant le Tribunal

12      Il importe de rappeler que les conditions de recevabilité d’un recours, ainsi que des moyens et des éléments de preuve présentés à son appui sont des fins de non-recevoir d’ordre public que le juge de l’Union européenne doit soulever d’office le cas échéant [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 8 février 2011, Paroc/OHMI (INSULATE FOR LIFE), T‑157/08, Rec. p. II‑137, point 28, et la jurisprudence citée ; du 10 novembre 2011, Three‑N‑Products Private/OHMI – Shah (AYUURI NATURAL), T‑313/10, non publié au Recueil, points 18 et 19 ; du 14 décembre 2011, Häfele/OHMI (Infront), T‑166/11, non publié au Recueil, point 10, et du 20 juin 2012, Kraft Foods Schweiz/OHMI – Compañía Nacional de Chocolates (CORONA), T‑357/10, non publié au Recueil, point 14].

13      Il y a lieu de relever que l’OHMI présente aux annexes B1 et B2 des documents qui n’ont pas été produits lors de la procédure administrative. Toutefois, ils doivent être considérés comme recevables, dans la mesure où ils sont destinés à illustrer des arguments de l’OHMI, selon lesquels des étiquettes, décorations, boucles, nœuds, anneaux ou broderies se trouvant sur une ou deux oreilles sont des éléments de configuration typiques des animaux en peluche. Or, ces arguments ne sont qu’une ampliation, voire une généralisation des constatations faites aux points 20, 23 et 28 de la décision attaquée, fondées sur des faits notoires, mais contestées par la requérante, selon lesquelles des étiquettes et des boutons constituent des éléments usuels sur des animaux en peluche lesquels se distinguent par une énorme diversité artistique, ainsi que par une grande diversité de leurs designs, et par d’innombrables différences de leurs configurations possibles (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 10 novembre 2011, LG Electronics/OHMI, C‑88/11 P, non publié au Recueil, points 28 à 30).

14      Quant aux documents présentés par la requérante aux annexes K5 à K8, ceux-ci doivent être admis, en vertu du principe d’égalité des armes, en tant qu’éléments de preuve contraire des documents présentés aux annexes B1 et B2. En effet, les parties devant le Tribunal doivent disposer des mêmes moyens [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 1er février 2005, SPAG/OHMI – Dann et Backer (HOOLIGAN), T‑57/03, Rec. p. II‑287, point 23].

 Sur le fond

15      La requérante soutient, en substance, que, la chambre de recours a considéré à tort que la marque demandée n’avait pas de caractère distinctif au regard des produits pour lesquels l’enregistrement était sollicité.

16      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif.

17      Le caractère distinctif d’une marque, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, signifie que cette marque permet d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement a été demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux issus d’autres entreprises [arrêt de la Cour du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C‑456/01 P et C‑457/01 P, Rec. p. I‑5089, point 34, et arrêt du Tribunal du 15 juin 2010, X Technology Swiss/OHMI (Coloration orange de la pointe d’une chaussette), T‑547/08, Rec. p. II‑2409, point 23]. Un minimum de caractère distinctif suffit toutefois pour que le motif absolu de refus figurant à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 ne soit pas applicable [arrêts du Tribunal du 19 septembre 2001, Henkel/OHMI (Tablette ronde rouge et blanc), T‑337/99, Rec. p. II‑2597, point 44, et du 20 mai 2009, CFCMCEE/OHMI (P@YWEB CARD et PAYWEB CARD), T‑405/07 et T‑406/07, Rec. p. II‑1441, point 57].

18      Il y a également lieu de rappeler que, afin d’apprécier si une marque est ou non dépourvue de caractère distinctif, il convient de prendre en considération l’impression d’ensemble qu’elle produit. Cela ne saurait toutefois impliquer qu’il n’y aurait pas lieu de procéder, dans un premier temps, à un examen successif des différents éléments de présentation utilisés pour cette marque. En effet, il peut être utile, au cours de l’appréciation globale, d’examiner chacun des éléments constitutifs de la marque concernée [voir arrêt du Tribunal du 17 décembre 2010, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli/OHMI (Forme d’un lapin en chocolat avec ruban rouge), T‑336/08, non publié au Recueil, point 25, et la jurisprudence citée].

19      Ce caractère distinctif d’une marque doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement a été demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (arrêts de la Cour Henkel/OHMI, point 17 supra, point 35, et du 22 juin 2006, Storck/OHMI, C‑25/05 P, Rec. p. I‑5719, point 25 ; arrêt Coloration orange de la pointe d’une chaussette, point 17 supra, point 24).

20      La perception du public pertinent est susceptible d’être influencée par la nature du signe dont l’enregistrement a été demandé. Ainsi, dans la mesure où les consommateurs moyens n’ont pas l’habitude de présumer l’origine commerciale des produits en se fondant sur des signes qui se confondent avec l’aspect de ces mêmes produits, de tels signes sont distinctifs au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, seulement s’ils divergent, de manière significative, de la norme ou des habitudes du secteur (voir arrêt Coloration orange de la pointe d’une chaussette, point 17 supra, point 25, et la jurisprudence citée).

21      L’élément déterminant pour l’applicabilité de la jurisprudence citée au point précédent n’est pas la qualification du signe concerné en tant que signe figuratif, tridimensionnel ou autre, mais le fait qu’il se confonde avec l’aspect du produit désigné. Ainsi, ce critère a été appliqué, outre aux marques tridimensionnelles, à des marques figuratives consistant en une reproduction bidimensionnelle du produit désigné, ou encore à un signe constitué par un motif appliqué à la surface du produit. De même, la jurisprudence considère que les couleurs et leurs combinaisons abstraites ne peuvent se voir reconnaître un caractère distinctif intrinsèque que dans des circonstances exceptionnelles, étant donné qu’elles se confondent avec l’aspect des produits désignés et qu’elles ne sont pas, en principe, utilisées comme moyens d’identification d’origine commerciale (voir arrêt Coloration orange de la pointe d’une chaussette, point 17 supra, point 26, et la jurisprudence citée). Il en va de même de l’aspect brillant ou mat d’une marque.

22      Par ailleurs, dans la mesure où une requérante se prévaut du caractère distinctif de la marque demandée, en dépit de l’analyse de la chambre de recours fondée sur l’expérience pratique généralement acquise de la commercialisation de produits de large consommation , c’est à elle qu’il appartient de fournir des indications concrètes et étayées établissant que la marque demandée est dotée d’un caractère distinctif, étant donné qu’elle est beaucoup mieux à même de le faire, au vu de sa connaissance approfondie du marché (voir arrêt Coloration orange de la pointe d’une chaussette, point 17 supra, point 43, et la jurisprudence citée).

23      En l’espèce, il convient de déterminer, tout d’abord, si la marque demandée se confond avec l’aspect des produits désignés.

24      À cet égard, la marque demandée, telle que décrite dans la demande d’enregistrement, est une « marque de position », en ce sens que la requérante revendique une protection pour la fixation d’une étiquette en tissu rectangulaire de forme allongée, au moyen d’un bouton en métal rond brillant ou mat au milieu de l’oreille d’un quelconque animal en peluche, ayant des oreilles. L’objet de la protection demandée n’est donc ni l’illustration concrète de la marque, telle qu’elle apparaît à titre d’exemple dans la demande, ni une étiquette en tissu rectangulaire de forme allongée assortie d’un bouton en métal rond, brillant ou mat, en tant que tels, mais uniquement la fixation d’une telle étiquette au moyen d’un bouton, tel que décrit plus haut, sur une partie précise des produits concernés.

25      Ainsi que l’a indiqué en substance la chambre de recours (points 18 et 22 de la décision attaquée), le rattachement fixe d’une étiquette en tissu, au moyen d’un bouton en métal, au milieu de l’oreille d’un animal en peluche, a en soi, pour conséquence de confondre la marque demandée avec l’aspect des produits désignés.

26      En outre, d’une part, en raison des caractéristiques intrinsèques des « marques de position », la marque demandée, qui est une « marque de position », n’existerait pas sans le rattachement fixe du bouton et de l’étiquette à l’endroit précis des produits désignés. Elle se confond donc nécessairement avec l’aspect desdits produits.

27      D’autre part, la chambre de recours a correctement noté au point 20 de la décision attaquée que des boutons et des petites vignettes constituaient des éléments de configuration usuels sur des animaux en peluche. Leurs utilisations pour la représentation des yeux, pour l’indication du prix des produits, des consignes de lavage, ou du nom du fabricant n’ont été évoquées qu’en tant qu’exemples particulièrement connus. La requérante admet en outre que les boutons sont souvent fixés sur les vêtements des animaux en peluche et que des étiquettes informatives peuvent être fixées sur ces derniers. Il en découle que, au regard de l’énorme diversité des animaux en peluche, de la grande diversité de leurs designs, et d’innombrables différences de leurs configurations, constatées aux points 23 et 28 de la décision attaquée, des étiquettes et des boutons, attachés à l’oreille des produits désignés constituent, qu’ils soient attachés ensemble ou non, des aspects possibles desdits produits.

28      Partant, comme la marque demandée se confond avec des aspects possibles des produits désignés, il convient d’apprécier, ensuite, si elle diverge de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur.

29      À cet égard, en premier lieu, il suffit de constater, ainsi que cela découle, en substance, des points 20, 23 et 28 de la décision attaquée, que, les étiquettes et les boutons constituent des éléments de configuration usuels des figures d’animaux en peluche. La requérante admet elle-même que les boutons représentent souvent les yeux des animaux en peluche et qu’ils sont fixés sur leurs vêtements. Elle reconnaît également que des étiquettes portant des informations à l’attention des consommateurs peuvent être fixées sur les produits désignés. Quant aux consommateurs, ceux-ci sont habitués à une très grande diversité de ces produits, de leurs designs et de leurs configurations possibles. Il en découle qu’un rattachement fixe d’une étiquette en tissu, au moyen d’un bouton en métal, au milieu de l’oreille d’un animal en peluche ne saurait aucunement être considéré comme exceptionnel, c’est‑à‑dire, comme divergeant, de manière significative, de la norme ou des habitudes de ce secteur. Les éventuelles différences existant par rapport à la norme ou aux habitudes du secteur, voire avec les configurations les plus courantes des produits désignés ne sont pas suffisamment caractéristiques ou marquantes pour conférer à la marque demandée un degré minimal de caractère distinctif. Elles seraient plutôt perçues par le public pertinent comme une possible présentation des étiquettes inamovibles qui peuvent se retrouver sur n’importe quel endroit des animaux en peluche ou comme une forme originale d’ornementation. Elles ne seront donc pas perçues par le public pertinent comme une indication de l’origine commerciale des produits [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 28 septembre 2010, Rosenruist/OHMI (Représentation de deux courbes sur une poche), T‑388/09, non publié au Recueil, point 26].

30      En deuxième lieu, cette conclusion se trouve confirmée par le caractère très simple de la marque demandée.

31      En l’espèce, d’une part, tant la forme rectangulaire de l’étiquette, que la forme ronde du bouton sont des formes géométriques simples qui ne se démarquent en rien des normes ou des habitudes du secteur. D’autre part, bien que l’étiquette soit fixée au moyen d’un bouton sur une partie précise des produits en question, s’agissant ici de leurs oreilles, cette combinaison banale n’est pas à même de susciter l’impression, chez un consommateur moyen, normalement informé, raisonnablement attentif et avisé, et n’ayant aucune expérience particulière avec les produits concernés, qu’il s’agit d’une identification de l’origine commerciale desdits produits [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 septembre 2009, Lange Uhren/OHMI (Champs géométriques sur le cadran d’une montre), T‑152/07, non publié au Recueil, points 96 à 98]. Partant, la marque demandée ne permettra pas d’individualiser les produits en cause par rapport à des produits concurrents [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 29 septembre 2009, The Smiley Company/OHMI (Représentation de la moitié d’un sourire de smiley), T‑139/08, Rec. p. II‑3535, point 31].

32      En troisième lieu, en ce qui concerne l’argument de la requérante, selon lequel elle est le seul fabriquant à apposer une étiquette en tissu rectangulaire de forme allongée au milieu de l’oreille des animaux en peluche au moyen d’un bouton en métal rond, brillant ou mat, il y a lieu de relever que la nouveauté ou l’originalité ne sont pas des critères pertinents pour l’appréciation du caractère distinctif d’une marque, de sorte que, pour qu’une marque puisse être enregistrée, il ne suffit pas qu’elle soit originale, mais il faut qu’elle se différencie substantiellement des formes de base du produit en cause, communément utilisées dans le commerce, et qu’elle n’apparaisse pas comme une simple variante de ces formes (voir arrêt Champs géométriques sur le cadran d’une montre, point 31 supra, point 71, et la jurisprudence citée). En outre, il n’est pas nécessaire d’apporter la preuve du caractère usuel de la forme dans le commerce pour établir le manque de caractère distinctif de la marque demandée [arrêt du Tribunal du 13 juillet 2011, Evonik Industries/OHMI (Rectangle pourpre avec un côté convexe), T‑499/09, non publié au Recueil, point 30].

33      Or, ainsi qu’il découle en substance des points 29 à 31 ci-dessus, d’une part, les étiquettes et les boutons constituent des éléments de configuration usuels des animaux en peluche, et d’autre part, les consommateurs, sont habitués à une très grande diversité de ces produits, de leurs designs et de leurs configurations possibles. Leur fixation à l’oreille, créant en fait une combinaison banale, qui sera perçue par le public comme un élément décoratif, voire fonctionnel (points 35 à 42 ci-dessous), ne saurait aucunement être considérée comme exceptionnelle, c’est-à-dire, comme divergeant, de manière significative, de la norme ou des habitudes de ce secteur. Cette configuration ne sera perçue par les consommateurs qu’en tant qu’une variante des possibles fixations de l’étiquette et du bouton sur d’autres parties de ces mêmes produits, voire une variante d’autres éventuelles décorations fixées à leurs oreilles. Partant, le public ciblé ne peut pas en présumer l’indication d’une origine commerciale.

34      Il en découle, que bien que la requérante puisse être le seul fabriquant à attacher une étiquette en tissu rectangulaire de forme allongée au milieu de l’oreille des animaux en peluche au moyen d’un bouton en métal rond, brillant ou mat, cette circonstance n’a pas d’incidence sur la solution du présent litige.

35      En quatrième lieu, l’absence du caractère distinctif de la marque demandée, ainsi que l’absence de divergence significative entre la présentation de la marque demandée et la norme ou les habitudes du secteur, découlent également du fait que le caractère simple de la fixation d’une étiquette en tissu de forme rectangulaire allongée au moyen d’un bouton en métal rond, brillant ou mat, suscite auprès du public ciblé, dans le contexte d’une très grande diversité de ces produits, de leurs designs et de leurs configurations possibles, l’impression que ces deux éléments ne sont pas apposés aux produits concernés afin de désigner leur origine commerciale, mais plutôt à des fins purement décoratives et/ou fonctionnelles.

36      En particulier, quant au caractère fonctionnel de la marque demandée, la chambre de recours a relevé aux points 16 et 30 de la décision attaquée que le public pertinent reconnaîtrait dans le signe soit une vignette à l’oreille d’un animal en peluche, qui pourrait par exemple comporter le prix du produit, des indications de lavage ou le nom du fabricant, soit un dispositif antivol, et non une indication d’origine.

37      Cette appréciation doit être approuvée excepté pour ce qui a trait à ce que la marque demandée pourrait être perçue comme une étiquette de prix. Ainsi que la requérante le fait valoir, une étiquette de prix doit être facilement détachable, puisque le consommateur ne souhaitera pas que le prix soit durablement affiché sur l’animal en peluche. Toutefois, ceci ne remet pas en cause la circonstance qu’un producteur peut souhaiter qu’une étiquette contenant d’autres informations sur les produits, telles que celles relatives aux matériaux, aux indications de lavage, au nom de la marque ou au marquage « CE », voire un slogan, soit fixée de manière durable sur lesdits produits.

38      À cet égard, le caractère fonctionnel de la marque demandée, de même que l’absence de divergence significative entre la présentation de cette dernière et la norme ou les habitudes du secteur, ne sauraient être remis en question par l’argument de la requérante selon lequel les boutons, tels que ceux faisant partie de la marque demandée, ne sont pas, voire ne peuvent pas être utilisés pour fixer des étiquettes, puisqu’en raison de la fixation d’une étiquette à l’animal en peluche au moyen d’un tel bouton, l’étiquette ne pourrait pas être retirée sans abîmer le produit en question.

39      Premièrement, il convient de rappeler, qu’il n’est pas nécessaire d’apporter la preuve du caractère usuel de la forme dans le commerce pour établir le manque de caractère distinctif de la marque demandée (arrêt Rectangle pourpre avec un côté convexe, point 32 supra, point 30).

40      Deuxièmement, il n’est aucunement prouvé que des étiquettes ne soient pas, ou ne peuvent pas être fixées aux animaux en peluche au moyen de boutons en métal. Bien au contraire, lorsqu’un producteur souhaite que l’étiquette soit durablement fixée à l’animal en peluche, il lui est tout à fait loisible de préférer une fixation au moyen d’un bouton en métal plutôt qu’une fixation au moyen d’une couture.

41      Troisièmement, la circonstance que les photographies présentées aux annexes K5 à K8, ainsi qu’aux annexes B1 et B2, ne font pas ressortir que des boutons en métal sont utilisés pour fixer des étiquettes, n’est pas suffisante pour démontrer la pertinence de l’argument de la requérante en question. Puisque lesdites photographies sont de caractère commercial, elles peuvent volontairement mettre en avant d’autres parties des animaux en peluche que celles où sont fixées des informations destinées aux consommateurs.

42      Le caractère fonctionnel de la marque demandée est également confirmé par la photographie d’un des produits de la requérante au point 21 de la requête, représentant un ours en peluche dont l’oreille gauche est pourvue d’une étiquette avec l’indication du nom de la marque de ce produit. Il en est de même de la photographie et de la page du site Internet présentés au point 20 du mémoire en défense de l’OHMI, dans lequel ce dernier contredit l’allégation de la requérante, selon laquelle des étiquettes faisant partie de la marque demandée ne comportent pas d’informations destinées aux consommateurs. Au recto de ces étiquettes se trouve l’impression du nom de la marque et du slogan en allemand « Knopf im Ohr » (bouton dans l’oreille). Au verso figurent des informations sur les matériaux composant les produits, le marquage « CE », ainsi que des indications sur l’édition limitée du produit. Il en ressort que, dans des conditions normales de commercialisation, des étiquettes telles que celles faisant partie de la marque demandée peuvent être utilisées par les fabricants des produits désignés comme support pour l’impression de diverses informations à l’attention des consommateurs. Partant, l’argument de la requérante, selon lequel le public ciblé ne s’attend pas à trouver sur un tel endroit une étiquette informative, n’est pas fondé.

43      Par ailleurs, l’argument de la requérante, selon lequel l’impression du nom de la marque sur le signe dont l’enregistrement a été demandé renforce son caractère distinctif doit être écarté, le nom de la marque ne figurant pas sur la demande d’enregistrement.

44      Il y a donc lieu de conclure que la marque demandée ne présente pas le minimum de caractère distinctif requis par l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

45      Enfin, la conclusion faite au point précédent n’est remise en cause par aucun des autres arguments soulevés par la requérante.

46      En premier lieu, la requérante considère que la chambre de recours a commis une erreur en indiquant, au point 21 de la décision attaquée, que la circonstance que l’étiquette et le bouton en cause soient dans un autre matériau que l’animal en peluche lui-même ne procédait pas de la demande de marque, si bien qu’elle ne saurait être prise en considération.

47      À cet égard, il ressort de la description de la marque demandée, dont le libellé ne saurait être ignoré par la chambre de recours (voir, en ce sens, arrêt Champs géométriques sur le cadran d’une montre, point 31 supra, point 88), que cette dernière consiste en une étiquette rectangulaire en tissu de forme allongée, fixée au milieu de l’oreille d’un animal en peluche au moyen d’un bouton en métal rond, brillant ou mat. Or, il est notoire que les tissus utilisés pour la fabrication d’étiquettes, ainsi que le métal, à partir duquel est produit le bouton en question, d’une part, et la peluche, d’autre part, sont des matériaux différents et qu’ils ont un aspect extérieur différent.

48      Néanmoins, bien que la critique en question soit fondée, elle n’est pas de nature à entacher la décision attaquée d’illégalité. En effet, ainsi que le fait valoir à bon droit l’OHMI, les matériaux en question ne jouent aucun rôle dans l’appréciation du caractère distinctif de la marque demandée. Un bouton en métal, brillant ou mat, attaché à l’oreille d’un animal en peluche ne sera pas perçu par le public concerné différemment d’un bouton en verre, en plastique ou d’un autre matériau fixé au même endroit, du point de vue de son aptitude à désigner l’origine commerciale des produits en question. Le choix des matériaux du bouton et de l’étiquette ne sera perçu que comme un choix d’ordre purement décoratif, voire technique en raison du caractère fonctionnel de la marque demandée.

49      En deuxième lieu, la requérante soutient que l’étiquette, qui n’est apposée au moyen du bouton qu’à l’oreille gauche des animaux en peluche, crée un effet asymétrique, de nature à conférer à la marque demandée un aspect atypique.

50      À cet égard, il suffit de constater que, si la représentation de la marque ne fait apparaître l’étiquette et le bouton que sur l’oreille gauche de l’animal en peluche, il ne ressort nullement de la description de la marque demandée que la protection recherchée ne porte que sur une seule oreille, voire que le bouton sera forcément attaché à l’oreille gauche. En tout état de cause, même si la demande d’enregistrement précisait bien que la protection n’était demandée que pour la fixation de l’étiquette et du bouton à l’oreille gauche, cet élément ne parviendrait pas à remettre en cause l’analyse opérée aux points 29 à 43 ci‑dessus. L’asymétrie qui serait ainsi créée ne diverge pas significativement des normes ou des habitudes du secteur concerné et ne saurait être perçue par les consommateurs comme une indication de l’origine commerciale des produits en question, mais plutôt comme un élément purement décoratif ou fonctionnel. En effet, il est tout à fait possible qu’un effet décoratif découle d’un positionnement asymétrique de certains éléments constituant un produit donné. Il est également normal que des informations à l’attention des consommateurs ne soient affichées qu’à un seul côté d’un tel produit et non d’une manière symétrique.

51      En troisième lieu, l’argument de la requérante, selon lequel le bouton en question ne serait pas perçu par le public pertinent comme une boucle d’oreille, si bien que sa fixation au milieu d’une oreille d’un animal en peluche serait atypique, est également non fondé. Ainsi qu’il découle en substance des points 29 à 43 ci-dessus, d’une part, les étiquettes et les boutons constituent des éléments de configuration usuels des animaux en peluche, et, d’autre part, les consommateurs sont habitués à une très grande diversité de ces produits, de leurs designs et de leurs configurations possibles. Leur fixation à l’oreille ou sur toute autre partie de tels produits, créant en fait une combinaison banale, qui sera perçue par le public comme un élément décoratif, voire fonctionnel, ne saurait aucunement être considérée comme exceptionnelle, c’est-à-dire, comme divergeant, de manière significative, de la norme ou des habitudes de ce secteur. Cette configuration ne sera perçue par les consommateurs qu’en tant qu’une variante des possibles fixations de l’étiquette et du bouton sur d’autres parties de ces mêmes produits, voire une variante d’autres éventuelles décorations qu’une boucle d’oreilles fixées à leurs oreilles. Partant, le public ciblé ne peut pas en présumer l’indication d’une origine commerciale.

52      En quatrième lieu, le caractère atypique du placement de l’étiquette sur l’oreille de l’animal en peluche découlerait du fait que lorsque les étiquettes et des boutons décoratifs sont utilisés comme élément de conception d’un animal en peluche, ils sont normalement placés sur les vêtements de l’animal, mais pas sur l’animal lui-même, et en particulier pas sur son oreille.

53      À cet égard, ainsi qu’il découle en substance des points 29 à 43 ci-dessus, d’une part, les étiquettes et les boutons constituent des éléments de configuration usuels des animaux en peluche, et d’autre part, les consommateurs, sont habitués à une très grande diversité de ces produits, de leurs designs et de leurs configurations possibles. Leur fixation directement sur l’animal en peluche lui-même, y compris sur son oreille, ne saurait créer un élément de conception atypique des produits concernés. Cette configuration ne sera perçue par les consommateurs qu’en tant qu’une variante des possibles fixations de l’étiquette et du bouton sur d’autres parties de ces mêmes produits, voire une variante d’autres éventuelles décorations fixées à leurs oreilles. Partant, le public ciblé ne peut pas en présumer l’indication d’une origine commerciale. De surcroît, il a été déjà rappelé qu’il n’est pas nécessaire d’apporter la preuve du caractère usuel de la forme dans le commerce pour établir le manque de caractère distinctif de la marque demandée (arrêt Rectangle pourpre avec un côté convexe, point 32 supra, point 30).

54      En cinquième et dernier lieu, la requérante contredit les arguments de l’OHMI, selon lesquels des étiquettes, décorations, boucles, nœuds, anneaux ou broderies se trouvant sur une oreille ou sur les deux sont des éléments de configuration typiques sur les animaux en peluche. En se fondant sur les documents qu’elle présente aux annexes K5 à K8, elle fait valoir que des animaux en peluche pourvus de décorations aux oreilles, sont plutôt exceptionnels.

55      À cet égard, il suffit de relever que, bien que les animaux en peluche pourvus d’étiquettes ou de toute sorte de décorations aux oreilles puissent être minoritaires sur le marché où se présente une très grande variété des configurations desdits produits, il n’en demeure pas moins, comme les documents présentés tant aux annexes B1 et B2 qu’aux annexes K5 à K8 le montrent, qu’il n’est aucunement anormal, au regard des habitudes du secteur concerné, d’apposer de tels éléments aux oreilles des produits désignés. Il en est ainsi des produits TY 36081, TY 3229, TY 7136034, Aurora 00721A, ou Heunec 752474, pour ne citer à titre d’exemple que ceux dont les photographies ont été fournies par la requérante (voir, en ce sens, arrêt Forme d’un lapin en chocolat avec ruban rouge, point 18 supra, points 38 et 39). La marque demandée sera plutôt perçue par le public pertinent comme une possible présentation des étiquettes inamovibles qui peuvent se retrouver sur n’importe quel endroit des peluches ou comme une forme originale d’ornementation. Elle ne sera donc pas perçue par le public pertinent comme une indication de l’origine commerciale des produits.

56      Eu égard à tout ce qui précède, la demande en annulation de la décision attaquée doit être rejetée comme étant non fondée, de même que le recours dans son intégralité, et ce sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de la requérante visant à demander au Tribunal d’annuler le rejet de l’enregistrement de la marque demandée [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 8 juillet 2009, Mineralbrunnen Rhön-Sprudel Egon Schindel/OHMI – Schwarzbräu (Alaska), T‑226/08, non publié au Recueil, point 41].

 Sur les dépens

57      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Margarete Steiff GmbH est condamnée aux dépens.

Dittrich

Schwarcz

Tomljenović

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 janvier 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.