Language of document : ECLI:EU:T:2014:8

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (cinquième chambre)

16 janvier 2014(*)

« Marque communautaire – Demande de marque communautaire consistant en la fixation d’un bouton au milieu de l’oreille d’une peluche – Motif absolu de refus – Absence de caractère distinctif – Article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 »

Dans l’affaire T‑433/12,

Margarete Steiff GmbH, établie à Giengen an der Brenz (Allemagne), représentée par Me D. Fissl, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. A. Pohlmann, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 23 juillet 2012 (affaire R 1693/2011‑1), concernant une demande d’enregistrement d’un signe constitué par la fixation d’un bouton en métal au milieu de l’oreille d’une peluche comme marque communautaire,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre),

composé de MM. A. Dittrich, président, J. Schwarcz (rapporteur) et Mme V. Tomljenović, juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 28 septembre 2012,

vu le mémoire en réponse déposé au greffe du Tribunal le 21 janvier 2013,

vu le mémoire en réplique déposé au greffe du Tribunal le 6 mai 2013,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 12 octobre 2010, la requérante, Margarete Steiff GmbH, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1).

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé, identifiée par la requérante en tant que marque « autre », est reproduite ci-après :


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3        Dans la demande d’enregistrement, la marque en cause est décrite de la manière suivante :

« Il s’agit d’une marque de position : la marque dont l’enregistrement est demandé vise à protéger le signe consistant en un bouton en métal rond, brillant ou mat, fixé au milieu de l’oreille d’un animal en peluche. Le bouton est ici beaucoup plus petit que l’oreille, si bien que celle-ci dépasse de tous les côtés du bouton. La forme et la taille de l’oreille de l’animal en peluche sont ici variables et ne font pas partie de la demande de protection. Les traits en pointillés ne font pas partie de la marque et ne servent qu’à montrer la position de la marque sur les produits. La forme de tête d’animal représentée par les traits en pointillés n’est qu’un exemple et ne vise pas à limiter l’étendue de la protection de la marque à cette forme de tête d’animal. »

4        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent de la classe 28 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent à la description suivante : « Figures dures et moles d’animaux en peluche en feutre, fourrure, laine d’alpaca, mohair ou polyester, qui ont des oreilles ».

5        Par décision du 17 juin 2011, l’examinateur a refusé l’enregistrement de la marque demandée pour tous les produits visés au point 4 ci-dessus, au motif que la marque en cause était dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

6        Le 17 août 2011, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI contre la décision de l’examinateur.

7        Par décision du 23 juillet 2012 (ci-après la « décision attaquée »), la première chambre de recours de l’OHMI a rejeté le recours au motif que la marque demandée était dépourvue de caractère distinctif, conformément à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

8        En substance, la chambre de recours a indiqué que les produits en question s’adressaient à un public général, qui leur prêtera une attention moyenne. Elle a relevé qu’en raison du rattachement du bouton sur l’animal en peluche, la marque demandée n’était pas indépendante de l’aspect des figures d’animaux en peluche. Eu égard aux innombrables configurations possibles des animaux en peluche, l’utilisation de boutons, qui en constituent d’ailleurs des éléments courants, ne peut pas, par principe, être qualifiée d’inusuelle. Selon la chambre de recours, la simplicité de la forme géométrique plaide également et à elle seule, contre la possibilité que le consommateur puisse y associer l’origine commerciale du produit. L’absence de caractère distinctif de la marque ne saurait être mise en cause par la combinaison de matériaux différents, dont se prévaut la requérante, à savoir un bouton en métal et un animal en peluche, dans la mesure où cette circonstance ne procèderait pas de la demande d’enregistrement. Par ailleurs, la marque demandée n’aurait qu’une fonction décorative.

 Conclusions des parties

9        La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée ;

–        annuler le rejet de l’enregistrement de la marque demandée ;

–        condamner l’OHMI aux dépens.

10      L’OHMI conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

11      À l’appui du recours, la requérante soulève un moyen unique, tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement nº 207/2009.

 Sur la recevabilité des éléments de preuve présentés pour la première fois devant le Tribunal

12      Il importe de rappeler que les conditions de recevabilité d’un recours, ainsi que des moyens et des éléments de preuve présentés à son appui sont des fins de non-recevoir d’ordre public que le juge de l’Union européenne doit soulever d’office le cas échéant [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 8 février 2011, Paroc/OHMI (INSULATE FOR LIFE), T‑157/08, Rec. p. II‑137, point 28, et la jurisprudence citée ; du 10 novembre 2011, Three‑N‑Products Private/OHMI – Shah (AYUURI NATURAL), T‑313/10, non publié au Recueil, points 18 et 19 ; du 14 décembre 2011, Häfele/OHMI (Infront), T‑166/11, non publié au Recueil, point 10, et du 20 juin 2012, Kraft Foods Schweiz/OHMI – Compañía Nacional de Chocolates (CORONA), T‑357/10, non publié au Recueil, point 14].

13      Il y a lieu de relever que l’OHMI présente aux annexes B1 et B2 des documents qui n’ont pas été produits lors de la procédure administrative. Toutefois, ils doivent être considérés comme recevables, dans la mesure où ils sont destinés à illustrer les arguments de l’OHMI, selon lesquels des étiquettes, décorations, boucles, nœuds, anneaux ou broderies se trouvant sur une ou deux oreilles sont des éléments de configuration typiques des animaux en peluche. Ces arguments ne sont qu’une ampliation, voire une généralisation des constatations faites aux points 19, 22 et 27 de la décision attaquée, fondées sur des faits notoires, mais contestées par la requérante, selon lesquelles les boutons constituent des éléments usuels sur des animaux en peluche lesquels se distinguent par une énorme diversité artistique, ainsi que par une grande diversité de leurs designs, et par d’innombrables différences de leurs configurations possibles (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 10 novembre 2011, LG Electronics/OHMI, C‑88/11 P, non publié au Recueil, points 28 à 30).

14      Quant aux documents présentés aux annexes K5 à K8, ceux-ci doivent être admis, en vertu du principe d’égalité des armes, en tant qu’éléments de preuve contraire des documents présentés aux annexes B1 et B2. En effet, les parties devant le Tribunal doivent disposer des mêmes moyens [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 1er février 2005, SPAG/OHMI – Dann et Backer (HOOLIGAN), T‑57/03, Rec. p. II‑287, point 23].

 Sur le fond

15      La requérante soutient, en substance, que la chambre de recours a considéré à tort que la marque demandée n’avait pas de caractère distinctif au regard des produits pour lesquels l’enregistrement était sollicité.

16      Aux termes de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sont refusées à l’enregistrement les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif.

17      Le caractère distinctif d’une marque, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, signifie que cette marque permet d’identifier le produit pour lequel l’enregistrement a été demandé comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de distinguer ce produit de ceux issus d’autres entreprises [arrêt de la Cour du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C‑456/01 P et C‑457/01 P, Rec. p. I‑5089, point 34, et arrêt du Tribunal du 15 juin 2010, X Technology Swiss/OHMI (Coloration orange de la pointe d’une chaussette), T‑547/08, Rec. p. II‑2409, point 23]. Un minimum de caractère distinctif suffit toutefois pour que le motif absolu de refus figurant à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 ne soit pas applicable [arrêts du Tribunal du 19 septembre 2001, Henkel/OHMI (Tablette ronde rouge et blanc), T‑337/99, Rec. p. II‑2597, point 44, et du 20 mai 2009, CFCMCEE/OHMI (P@YWEB CARD et PAYWEB CARD), T‑405/07 et T‑406/07, Rec. p. II‑1441, point 57].

18      Il y a également lieu de rappeler que, afin d’apprécier si une marque est ou non dépourvue de caractère distinctif, il convient de prendre en considération l’impression d’ensemble qu’elle produit. Cela ne saurait toutefois impliquer qu’il n’y aurait pas lieu de procéder, dans un premier temps, à un examen successif des différents éléments de présentation utilisés pour cette marque. En effet, il peut être utile, au cours de l’appréciation globale, d’examiner chacun des éléments constitutifs de la marque concernée [voir arrêt du Tribunal du 17 décembre 2010, Chocoladefabriken Lindt & Sprüngli/OHMI (Forme d’un lapin en chocolat avec ruban rouge), T‑336/08, non publié au Recueil, point 25, et la jurisprudence citée].

19      Ce caractère distinctif d’une marque doit être apprécié, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement a été demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent (arrêts de la Cour Henkel/OHMI, point 17 supra, point 35, et du 22 juin 2006, Storck/OHMI, C‑25/05 P, Rec. p. I‑5719, point 25 ; arrêt Coloration orange de la pointe d’une chaussette, point 17 supra, point 24).

20      La perception du public pertinent est susceptible d’être influencée par la nature du signe dont l’enregistrement a été demandé. Ainsi, dans la mesure où les consommateurs moyens n’ont pas l’habitude de présumer l’origine commerciale des produits en se fondant sur des signes qui se confondent avec l’aspect de ces mêmes produits, de tels signes sont distinctifs au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, seulement s’ils divergent, de manière significative, de la norme ou des habitudes du secteur (voir arrêt Coloration orange de la pointe d’une chaussette, point 17 supra, point 25, et la jurisprudence citée).

21      L’élément déterminant pour l’applicabilité de la jurisprudence citée au point précédent n’est pas la qualification du signe concerné en tant que signe figuratif, tridimensionnel ou autre, mais le fait qu’il se confonde avec l’aspect du produit désigné. Ainsi, ce critère a été appliqué, outre aux marques tridimensionnelles, à des marques figuratives consistant en une reproduction bidimensionnelle du produit désigné, ou encore à un signe constitué par un motif appliqué à la surface du produit. De même, la jurisprudence considère que les couleurs et leurs combinaisons abstraites ne peuvent se voir reconnaître un caractère distinctif intrinsèque que dans des circonstances exceptionnelles, étant donné qu’elles se confondent avec l’aspect des produits désignés et qu’elles ne sont pas, en principe, utilisées comme moyens d’identification d’origine commerciale (voir arrêt Coloration orange de la pointe d’une chaussette, point 17 supra, point 26, et la jurisprudence citée). Il en va de même de l’aspect brillant ou mat d’une marque.

22      Par ailleurs, dans la mesure où une requérante se prévaut du caractère distinctif de la marque demandée, en dépit de l’analyse de la chambre de recours fondée sur l’expérience pratique généralement acquise de la commercialisation de produits de large consommation, c’est à elle qu’il appartient de fournir des indications concrètes et étayées établissant que la marque demandée est dotée d’un caractère distinctif, étant donné qu’elle est beaucoup mieux à même de le faire, au vu de sa connaissance approfondie du marché (voir arrêt Coloration orange de la pointe d’une chaussette, point 17 supra, point 43, et la jurisprudence citée).

23      En l’espèce, tout d’abord, il convient de déterminer, si la marque demandée se confond avec l’aspect des produits désignés.

24      À cet égard, la marque demandée, telle que décrite dans la demande d’enregistrement, est une « marque de position », en ce sens que la requérante revendique une protection pour la fixation d’un bouton en métal rond, brillant ou mat au milieu de l’oreille d’un quelconque animal en peluche, ayant des oreilles. L’objet de la protection demandée n’est donc ni l’illustration concrète de la marque, telle qu’elle apparaît à titre d’exemple dans la demande ni un bouton en métal rond brillant ou mat, en tant que tel, mais uniquement la fixation d’un tel bouton sur une partie précise des produits concernés.

25      Ainsi que l’ont indiqué à bon droit tant la chambre de recours (point 21 de la décision attaquée) que l’OHMI, le rattachement fixe d’un bouton en métal à l’oreille d’un animal en peluche a, en soi, pour conséquence de confondre la marque demandée avec l’aspect des produits désignés.

26      En outre, d’une part, en raison des caractéristiques intrinsèques des « marques de position », la marque demandée, qui est une « marque de position », n’existerait pas sans le rattachement fixe du bouton à l’endroit précis des produits désignés. Elle se confond donc nécessairement avec l’aspect desdits produits.

27      D’autre part, la chambre de recours a correctement noté au point 19 de la décision attaquée que les boutons constituaient des éléments de configuration usuels sur les figures des animaux en peluche. Leur utilisation pour la représentation des yeux n’a été évoquée qu’en tant qu’exemple particulièrement connu. La requérante admet en outre que les boutons sont souvent fixés sur les vêtements des animaux en peluche. Il en découle que, au regard de l’énorme diversité des animaux en peluche, de la grande diversité de leurs designs, et d’innombrables différences de leurs configurations, constatées aux points 22 et 27 de la décision attaquée, des boutons attachés à l’oreille des produits désignés constituent l’un de leurs aspects possibles.

28      Partant, comme la marque demandée se confond avec l’un des aspects possibles des produits désignés, il convient d’apprécier, ensuite, si elle diverge de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur.

29      À cet égard, en premier lieu, il suffit de constater, ainsi que cela découle en substance, des points 19, 22 et 27 de la décision attaquée, que les boutons constituent des éléments usuels sur des animaux en peluche. La requérante admet elle-même que les boutons représentent souvent les yeux des animaux en peluche et qu’ils sont fixés sur leurs vêtements. Quant aux consommateurs, ceux-ci sont habitués à une très grande diversité de ces produits, de leurs designs et de leurs configurations possibles. Il en découle qu’un rattachement fixe d’un tel bouton au milieu de l’oreille des produits désignés ne saurait aucunement être considéré comme exceptionnel, c’est‑à‑dire, comme divergeant, de manière significative, de la norme ou des habitudes de ce secteur. Les éventuelles différences existant par rapport à la norme ou aux habitudes du secteur, voire avec les configurations les plus courantes des produits désignés ne sont pas suffisamment caractéristiques ou marquantes pour conférer à la marque demandée un degré minimal de caractère distinctif. Elles seraient plutôt perçues par le public pertinent comme une possible présentation des boutons inamovibles qui peuvent se retrouver sur n’importe quel endroit des animaux en peluche ou comme une forme originale d’ornementation. Elles ne seront donc pas perçues par le public pertinent comme une indication de l’origine commerciale des produits [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 28 septembre 2010, Rosenruist/OHMI (Représentation de deux courbes sur une poche), T‑388/09, non publié au Recueil, point 26].

30      En deuxième lieu, cette conclusion se trouve confirmée par le caractère très simple de la marque demandée.

31      En l’espèce, d’une part, la forme ronde du bouton est une forme géométrique simple qui ne se démarque en rien des normes ou des habitudes du secteur. D’autre part, bien que les boutons soient fixés sur une partie précise des produits en question, s’agissant ici de leurs oreilles, cette combinaison banale n’est pas à même de susciter l’impression, chez un consommateur moyen, normalement informé, raisonnablement attentif et avisé, et n’ayant aucune expérience particulière avec les produits concernés, qu’il s’agit d’une identification de l’origine commerciale desdits produits [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 14 septembre 2009, Lange Uhren/OHMI (Champs géométriques sur le cadran d’une montre), T‑152/07, non publié au Recueil, points 96 à 98]. Partant, la marque demandée ne permettra pas d’individualiser les produits en cause par rapport à des produits concurrents [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 29 septembre 2009, The Smiley Company/OHMI (Représentation de la moitié d’un sourire de smiley), T‑139/08, Rec. p. II‑3535, point 31].

32      En troisième lieu, la même conclusion découle également du fait que le caractère simple du bouton en métal rond, brillant ou mat, suscite auprès du public ciblé, dans le contexte d’une très grande diversité de ces produits, de leurs designs et de leurs configurations possibles, l’impression qu’il n’est pas apposé aux produits concernés afin de désigner leur origine commerciale, mais plutôt à des fins purement décoratives.

33      En quatrième lieu, en ce qui concerne l’argument de la requérante, selon lequel elle est le seul fabriquant à apposer des boutons en métal rond, brillant ou mat, aux oreilles des animaux en peluche, il y a lieu de relever que la nouveauté ou l’originalité ne sont pas des critères pertinents pour l’appréciation du caractère distinctif d’une marque, de sorte que, pour qu’une marque puisse être enregistrée, il ne suffit pas qu’elle soit originale, mais il faut qu’elle se différencie substantiellement des formes de base du produit en cause, communément utilisées dans le commerce, et qu’elle n’apparaisse pas comme une simple variante de ces formes (voir arrêt Champs géométriques sur le cadran d’une montre, point 30 supra, point 71, et la jurisprudence citée). En outre, il n’est pas nécessaire d’apporter la preuve du caractère usuel de la forme dans le commerce pour établir le manque de caractère distinctif de la marque demandée [arrêt du Tribunal du 13 juillet 2011, Evonik Industries/OHMI (Rectangle pourpre avec un côté convexe), T‑499/09, non publié au Recueil, point 30].

34      Or, ainsi qu’il découle en substance des points 29 à 32 ci-dessus, d’une part, les boutons constituent des éléments de configuration usuels sur des animaux en peluche, et d’autre part les consommateurs sont habitués à une très grande diversité de ces produits, de leurs designs et de leurs configurations possibles. La fixation de ces boutons à l’oreille, créant en fait une combinaison banale, qui sera perçue par le public comme un élément décoratif, ne saurait aucunement être considérée comme exceptionnelle, c’est-à-dire, comme divergeant, de manière significative, de la norme ou des habitudes de ce secteur. Cette configuration ne sera perçue par les consommateurs qu’en tant qu’une variante des possibles fixations du bouton sur d’autres parties de ces mêmes produits, voire une variante d’autres éventuelles décorations fixées à leurs oreilles. Partant, le public ciblé ne peut pas en présumer l’indication d’une origine commerciale.

35      Il en découle, que bien que la requérante puisse être le seul fabriquant à attacher des boutons en métal ronds, brillants ou mats, aux oreilles des animaux en peluche, cette circonstance n’a pas d’incidence sur la solution du présent litige.

36      Il y a donc lieu de conclure que la marque demandée ne présente pas le minimum de caractère distinctif requis par l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

37      Enfin, la conclusion faite au point précédent n’est remise en cause par aucun des autres arguments soulevés par la requérante.

38      En premier lieu, la requérante considère que la chambre de recours a commis une erreur en indiquant, au point 20 de la décision attaquée, que la circonstance que le bouton en cause soit dans un autre matériau que celui de l’animal en peluche lui-même ne procédait pas de la demande de marque, si bien qu’elle ne saurait être prise en considération.

39      À cet égard, il ressort de la description de la marque demandée, dont le libellé ne saurait être ignoré par la chambre de recours (voir, en ce sens, arrêt Champs géométriques sur le cadran d’une montre, point 31 supra, point 88), que cette dernière consiste en un bouton en métal rond, brillant ou mat, fixé au milieu de l’oreille d’un animal en peluche. Or, il est notoire que le métal, d’une part, et la peluche, d’autre part, sont des matériaux différents et qu’ils ont un aspect extérieur différent.

40      Néanmoins, bien que la critique en question soit fondée, elle n’est pas de nature à entacher la décision attaquée d’illégalité. En effet, ainsi que le fait valoir à bon droit l’OHMI, les matériaux en question ne jouent aucun rôle dans l’appréciation du caractère distinctif de la marque demandée. Un bouton en métal, brillant ou mat, attaché à l’oreille d’un animal en peluche ne sera pas perçu par le public concerné différemment d’un bouton en verre, en plastique, ou d’un autre matériau fixé au même endroit, du point de vue de son aptitude à désigner l’origine commerciale des produits en question. Le choix du matériau du bouton ne sera perçu que comme un choix d’ordre purement décoratif.

41      En deuxième lieu, la requérante soutient que le bouton, qui n’est apposé qu’à l’oreille gauche des animaux en peluche, crée un effet asymétrique, de nature à conférer à la marque demandée un aspect atypique.

42      À cet égard, il suffit de constater que, si la représentation de la marque ne fait apparaître le bouton que sur l’oreille gauche de l’animal en peluche, il ne ressort nullement de la description de la marque demandée que la protection recherchée ne porte que sur une seule oreille, voire que le bouton sera forcément attaché sur l’oreille gauche. En tout état de cause, même si la demande d’enregistrement précisait bien que la protection n’était demandée que pour la fixation du bouton à l’oreille gauche, cet élément ne parviendrait pas à remettre en cause l’analyse opérée aux points 29 à 36 ci‑dessus. L’asymétrie ainsi créée ne diverge pas significativement des normes ou des habitudes du secteur concerné et ne saurait être perçue par les consommateurs comme une indication de l’origine commerciale des produits en question, mais plutôt comme un élément purement décoratif. En effet, il est tout à fait possible qu’un effet décoratif découle d’un positionnement asymétrique de certains éléments constituant un produit donné.

43      En troisième lieu, l’argument de la requérante, selon lequel le bouton en question ne serait pas perçu par le public pertinent comme une boucle d’oreille, si bien que sa fixation au milieu d’une oreille d’un animal en peluche serait atypique, est également non fondé. Ainsi qu’il découle en substance des points 29 à 36 ci-dessus, d’une part, les boutons constituent des éléments de configuration usuels des animaux en peluche, et, d’autre part, les consommateurs sont habitués à une très grande diversité de ces produits, de leurs designs et de leurs configurations possibles. La fixation de ces boutons à l’oreille ou sur toute autre partie de tels produits, créant en fait une combinaison banale, qui sera perçue par le public comme un élément décoratif, ne saurait aucunement être considérée comme exceptionnelle, c’est-à-dire, comme divergeant, de manière significative, de la norme ou des habitudes de ce secteur. Cette configuration ne sera perçue par les consommateurs qu’en tant qu’une variante des possibles fixations du bouton sur d’autres parties de ces mêmes produits, voire une variante d’autres éventuelles décorations qu’une boucle d’oreilles fixées à leurs oreilles. Partant, le public ciblé ne peut pas en présumer l’indication d’une origine commerciale.

44      En quatrième lieu, le caractère atypique du placement du bouton sur l’oreille de l’animal en peluche découlerait du fait que lorsque les étiquettes et des boutons décoratifs sont utilisés comme élément de conception d’un animal en peluche, ils sont normalement placés sur les vêtements de l’animal, mais pas sur l’animal lui-même, et en particulier pas sur son oreille.

45      À cet égard, ainsi qu’il découle en substance des points 29 à 36 ci-dessus, d’une part, les boutons constituent des éléments de configuration usuels des animaux en peluche, et d’autre part, les consommateurs sont habitués à une très grande diversité de ces produits, de leurs designs et de leurs configurations possibles. La fixation d’un bouton, directement sur l’animal en peluche lui-même, y compris sur son oreille, ne saurait créer un élément de conception atypique des produits concernés. Cette configuration ne sera perçue par les consommateurs qu’en tant qu’une variante des possibles fixations du bouton sur d’autres parties de ces mêmes produits, voire une variante d’autres éventuelles décorations fixées à leurs oreilles. Partant, le public ciblé ne peut pas en présumer l’indication d’une origine commerciale. De surcroît, il a été déjà rappelé qu’il n’est pas nécessaire d’apporter la preuve du caractère usuel de la forme dans le commerce pour établir le manque de caractère distinctif de la marque demandée (arrêt Rectangle pourpre avec un côté convexe, point 33 supra, point 30).

46      En cinquième et dernier lieu, la requérante contredit les arguments de l’OHMI, selon lesquels des étiquettes, décorations, boucles, nœuds, anneaux ou broderies se trouvant sur une oreille ou sur les deux sont des éléments de configuration typiques sur les animaux en peluche. En se fondant sur les documents qu’elle présente aux annexes K5 à K8, elle fait valoir que des animaux en peluche pourvus de décorations aux oreilles, sont plutôt exceptionnels.

47      À cet égard, il suffit de relever que, bien que les animaux en peluche pourvus d’étiquettes ou de toute sorte de décorations aux oreilles puissent être minoritaires sur le marché où se présente une très grande variété des configurations desdits produits, il n’en demeure pas moins, comme les documents présentés tant aux annexes B1 et B2 qu’aux annexes K5 à K8 le montrent, qu’il n’est aucunement anormal, au regard des habitudes du secteur concerné, d’apposer de tels éléments aux oreilles des produits désignés. Il en est ainsi des produits TY 36081, TY 3229, TY 7136034, Aurora 00721A, ou Heunec 752474, pour ne citer à titre d’exemple que ceux dont les photographies ont été fournies par la requérante (voir, en ce sens, arrêt Forme d’un lapin en chocolat avec ruban rouge, point 18 supra, points 38 et 39). La marque demandée sera plutôt perçue par le public pertinent comme une possible présentation des boutons inamovibles qui peuvent se retrouver sur n’importe quel endroit des peluches ou comme une forme originale d’ornementation. Elle ne sera donc pas perçue par le public pertinent comme une indication de l’origine commerciale des produits.

48      Eu égard à tout ce qui précède, la demande en annulation de la décision attaquée doit être rejetée comme étant non fondée, de même que le recours dans son intégralité, et ce sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur la recevabilité du deuxième chef de conclusions de la requérante visant à demander au Tribunal d’annuler le rejet de l’enregistrement de la marque demandée [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 8 juillet 2009, Mineralbrunnen Rhön-Sprudel Egon Schindel/OHMI – Schwarzbräu (Alaska), T‑226/08, non publié au Recueil, point 41].

 Sur les dépens

49      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (cinquième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Margarete Steiff GmbH est condamnée aux dépens.

Dittrich

Schwarcz

Tomljenović

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 janvier 2014.

Signatures


* Langue de procédure : l’allemand.