Language of document : ECLI:EU:T:2012:149

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (sixième chambre)

23 mars 2012 (1)

« Recours en annulation – Acte non susceptible de recours – Demande de constatation de nature déclaratoire – Demande d’injonction – Irrecevabilité manifeste »

Dans l’affaire T-535/11,

Zdeněk Altner, demeurant à Prague (République tchèque), représenté par Me J. Čapek, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne,

partie défenderesse,

ayant pour objet, notamment, une demande d’annulation de la lettre de la Commission, du 25 août 2011, informant la partie requérante qu’elle ne peut pas, faute de compétence, instruire la plainte qu’elle a déposée.

LE TRIBUNAL (sixième chambre),

composé de MM. M. Jaeger, président (rapporteur), N. Wahl et S. Soldevila Fragoso, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Procédure et conclusions de la partie requérante

1        Par requête déposée au greffe du Tribunal le 5 octobre 2011, la partie requérante a introduit le présent recours.

2        Elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        en application de l’article 256, paragraphe 3, deuxième alinéa, TFUE, renvoyer l’affaire devant la Cour de justice ;

–        annuler la lettre de la Commission du 25 août 2011, portant la référence JUST/B1/OT FVH D(2011), Ares(2011)906783-25/08/2011 ;

–        décider que le respect des obligations incombant aux partis politiques au niveau européen en vertu des traités relève du pouvoir de l’Union européenne ;

–        décider que la Commission est tenue d’examiner la demande de la partie requérante visant à ce que, après consultation de la Cour des comptes, l’OLAF conduise une enquête indépendante et réalise un audit sur le financement d’un parti politique tchèque.

 En droit

3        Aux termes de l’article 111 du règlement de procédure, lorsque le recours est manifestement irrecevable, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

4        En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de cet article, de statuer sans poursuivre la procédure.

5        Par son deuxième chef de conclusions, la partie requérante entend obtenir l’annulation de la lettre de la Commission, du 25 août 2011 (ci-après la « lettre du 25 août 2011 »), l’informant qu’elle ne peut pas, faute de compétence pour intervenir dans l’organisation judiciaire des États membres, instruire la plainte déposée. À cet égard, il y a lieu de relever que, selon une jurisprudence constante, constituent des actes ou des décisions susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation, au sens de l’article 263 TFUE, les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts de la partie requérante, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celui-ci (arrêt de la Cour du 11 novembre 1981, IBM/Commission, 60/81, Rec. p. 2639, point 9, et arrêt du Tribunal du 16 juillet 1998, Regione Toscana/Commission, T-81/97, Rec. p. II-2889, point 21). Par ailleurs, il a été jugé qu’un acte à caractère purement informatif, se limitant à expliquer l’état du droit, ne saurait ni affecter les intérêts du destinataire ni modifier la situation juridique de celui-ci par rapport à la situation antérieure à la réception dudit acte (ordonnance de la Cour du 4 octobre 2007, Finlande/Commission, C‑457/06 P, non publiée au Recueil, point 36).

6        En l’espèce, il ressort de la lettre du 25 août 2011 que la Commission s’est bornée à communiquer des informations à la partie requérante concernant les compétences de la Commission dans le domaine de l’organisation judiciaire des États membres. Cet acte, à caractère purement informatif, ne constitue donc pas un acte attaquable au sens de l’article 263 TFUE et le recours en annulation contre la lettre du 25 août 2011 doit être considéré comme manifestement irrecevable.

7        À titre subsidiaire, il ressort du dossier que, par sa plainte, la partie requérante visait à obtenir de la Commission qu’elle entame une enquête sur le financement d’un parti politique tchèque, ainsi que sur l’ingérence de la banque nationale tchèque dans les campagnes électorales qui se sont déroulées en République tchèque en 2010, pour prétendue violation du droit de l’Union. À supposer que la partie requérante allègue que la lettre du 25 août 2011 est illégale en ce que la Commission aurait refusé d’engager une procédure en manquement à l’encontre de la République tchèque, il convient de rejeter cette allégation comme manifestement irrecevable.

8        Il résulte, en effet, de l’économie de l’article 258 TFUE que la Commission n’est pas tenue d’engager une procédure au sens de cette disposition, mais qu’à cet égard elle dispose au contraire d’un pouvoir d’appréciation discrétionnaire excluant le droit pour les particuliers d’exiger d’elle qu’elle prenne position dans un sens déterminé (arrêt de la Cour du 14 février 1989, Star Fruit/Commission, 247/87, Rec. p. 291, point 11).

9        Selon une jurisprudence constante, une personne physique ou morale n’est donc pas recevable à demander l’annulation d’un refus de la Commission d’engager une procédure en manquement à l’encontre d’un État membre (voir, en ce sens, ordonnance de la Cour du 12 juin 1992, Asia Motor France/Commission, C-29/92, Rec. p. I 3935, point 21, et ordonnance du Tribunal du 15 mars 2004, Institouto N. Avgerinopoulou e.a./Commission, T-139/02, Rec. p. II-875, point 76). Ainsi, à supposer même que la partie requérante ait entendu contester le refus d’engagement d’une procédure en manquement par la Commission en l’espèce et que la lettre du 25 août 2011 puisse être interprétée comme constituant un tel refus, son deuxième chef de conclusions devrait également être rejeté comme irrecevable.

10      Quant au troisième chef de conclusions de la partie requérante, tendant à ce que le Tribunal déclare que le respect des obligations incombant aux partis politiques au niveau européen en vertu des traités relève du pouvoir de l’Union européenne, il convient de rappeler que le contentieux de l’Union ne connaît pas de voie de droit permettant au juge de prendre position, par le biais d’une déclaration générale, sur une question dont l’objet dépasse le cadre du litige (ordonnance du Tribunal du 7 juin 2004, Segi e.a./Conseil, T-338/02, Rec. p. II-1647, point 48).

11      S’agissant du quatrième chef de conclusions de la partie requérante tendant à ce que le Tribunal ordonne que la Commission est tenue d’examiner la demande de la partie requérante visant à ce que, après consultation de la Cour des comptes, elle charge l’OLAF d’une enquête, il y a lieu de relever que, dans le cadre du contrôle de légalité fondé sur l’article 263 TFUE, le Tribunal n’a pas compétence pour prononcer des injonctions à l’encontre des institutions, des organes et des organismes de l’Union, même lorsqu’elles ont trait aux modalités d’exécution de ses arrêts (ordonnance de la Cour du 26 octobre 1995, Pevasa et Inpesca/Commission, C-199/94 P et C-200/94 P, Rec. p. I-3709, point 24).

12      S’agissant du premier chef de conclusions, il suffit de constater que l’article 256, paragraphe 3, TFUE concerne les questions préjudicielles visées à l’article 267 TFUE, ce que ne constitue manifestement pas le présent recours, introduit directement par la partie requérante.

13      Il résulte des considérations qui précèdent qu’il y a lieu de rejeter le présent recours dans son intégralité comme étant manifestement irrecevable, sans qu’il soit nécessaire de le signifier à la partie défenderesse.

 Sur les dépens

14      La présente ordonnance étant adoptée avant la notification de la requête à la Commission et avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il suffit de décider que la partie requérante supportera ses propres dépens, conformément à l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (sixième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      La partie requérante supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 23 mars 2012.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

        M. Jaeger


1 Langue de procédure : le tchèque.