Language of document : ECLI:EU:T:2014:221



ORDONNANCE DU TRIBUNAL (neuvième chambre)

3 avril 2014 (*)

« Recours en annulation – Aide d’État – Décision déclarant l’aide compatible avec le marché intérieur sous certaines conditions – Association – Défaut d’affectation individuelle – Irrecevabilité »

Dans l’affaire T‑7/13,

Association pour la défense de l’épargne et de l’actionnariat des salariés de France Télécom-Orange (ADEAS), établie à Paris (France), représentée par Mes A.‑L. Lefort des Ylouses et A.‑S. Gay, avocats,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par MM. L. Flynn, D. Grespan et B. Stromsky, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 2012/540/UE de la Commission, du 20 décembre 2011, concernant l’aide d’État C 25/08 (ex NN 23/08) – Réforme du mode de financement des retraites des fonctionnaires de l’État rattachés à France Télécom mise à exécution par la République française en faveur de France Télécom (JO 2012, L 279, p. 1),

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

composé de MM. G. Berardis, président, O. Czúcz (rapporteur) et A. Popescu, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Faits à l’origine du litige

1        La requérante, l’association pour la défense de l’épargne et de l’actionnariat des salariés de France Télécom-Orange (ADEAS), est une association qui représente et défend les intérêts de tous les personnels du groupe France Télécom, c’est-à-dire les salariés, fonctionnaires et retraités régis par la législation française en matière de rémunération, d’épargne salariale, d’actionnariat salarié et de stock-options.

2        France Télécom a été créée en 1990, en tant qu’entreprise distincte de l’administration de l’État, comme exploitant public doté de la personnalité juridique. Elle a continué cependant à recruter des fonctionnaires jusqu’en 1997.

3        La loi n° 90 568, du 2 juillet 1990, relative à l’organisation du service public de la poste et des télécommunications (JORF du 8 juillet 1990, p. 8069, ci-après la « loi de 1990 »), a repris la pratique antérieure en ce qui concerne le financement des retraites des anciens fonctionnaires de France Télécom.

4        Selon ladite pratique, entre 1991 et 1996, en application de l’article 30 de la loi de 1990, la contribution « employeur » qui incombait à France Télécom au titre de l’emploi de ses fonctionnaires était fixée par différence entre le montant total des pensions versées par l’État français aux anciens fonctionnaires de France Télécom et la part acquittée par les fonctionnaires en activité de France Télécom sur leurs traitements.

5        En 1996, dans le contexte de l’ouverture totale à la concurrence des marchés des télécommunications, la loi n° 96-660, du 26 juillet 1996, relative à l’entreprise nationale France Télécom (JORF du 27 juillet 1996, p. 11398, ci-après la « loi de 1996 »), a transformé France Télécom en société anonyme de droit français. À la suite de cette transformation, en 1997, France Télécom a mis fin au recrutement de fonctionnaires.

6        L’article 6, sous c) et d), de la loi de 1996, qui modifie l’article 30 de la loi de 1990, impose désormais à France Télécom de verser au Trésor public, en contrepartie de la liquidation et du service, par l’État, des pensions allouées au personnel fonctionnaire de France Télécom, ce qui suit :

« c)      […] une contribution employeur à caractère libératoire, due à compter du 1er janvier 1997, en proportion des sommes payées à titre de traitement soumis à retenue pour pension. Le taux de la contribution libératoire est calculé de manière à égaliser les niveaux de charges sociales et fiscales obligatoires assises sur les salaires entre France Télécom et les autres entreprises du secteur des télécommunications relevant du droit commun des prestations sociales, pour ceux des risques qui sont communs aux salariés de droit commun et aux fonctionnaires de l’État […] ;

d)      […] une contribution forfaitaire exceptionnelle, dont le montant et les modalités de versement seront fixés en loi de finances avant le 31 décembre 1996. »

7        La contribution employeur de France Télécom, prévue par l’article 6, sous c), de la loi de 1996, recalculée chaque année, est exprimée en pourcentage des traitements indiciaires bruts des fonctionnaires en service. En raison de la cessation de l’embauche de fonctionnaires à partir de 1997, qui a causé la diminution du nombre de fonctionnaires en service, la contribution employeur payé par France Télécom a connu une tendance à la baisse après 1997, malgré l’augmentation du nombre des anciens fonctionnaires de France Télécom déjà partis à la retraite. Ladite contribution équivalait à 744 millions d’euros en 2010, c’est-à-dire 407 millions d’euros de moins que la contribution de 1 151 millions d’euros payée par France Télécom en 1996.

8        Le 4 octobre 2002, la Commission des Communautés européennes a été saisie d’une plainte selon laquelle la République française avait mis à exécution une aide en faveur de France Télécom qui aurait allégé partiellement ses charges financières, notamment celles liées au financement des retraites de son personnel.

9        Par décision du 20 mai 2008, la Commission a ouvert la procédure formelle d’examen au sens de l’article 88, paragraphe 2, CE.

10      Dans sa décision 2012/540/UE, du 20 décembre 2011, concernant l’aide d’État C 25/08 (ex NN 23/08) – Réforme du mode de financement des retraites des fonctionnaires de l’État rattachés à France Télécom mise à exécution par la République française en faveur de France Télécom (JO 2012, L 279, p. 1, ci-après la « décision attaquée »), la Commission a conclu que France Télécom était bénéficiaire d’une aide d’État qui était compatible avec le marché intérieur sous certaines conditions.

11      Selon les articles 1er et 2 de la décision attaquée, il est prévu ce qui suit :

« Article premier

L’aide d’État résultant de la réduction de la contrepartie à verser à l’État pour la liquidation et le service des pensions allouées, en application du code des pensions civiles et militaires de retraite, aux fonctionnaires de France Télécom en application de la [loi de 1996] modifiant la [loi de 1990] est compatible avec le marché intérieur, aux conditions prévues à l’article 2.

Article 2

La contribution employeur à caractère libératoire, due par France Télécom au titre de l’article 30, point c), de la [loi de 1990], est calculée et prélevée de manière à égaliser les niveaux de l’ensemble des charges sociales et fiscales obligatoires assises sur les salaires entre France Télécom et les autres entreprises du secteur des télécommunications relevant du droit commun des prestations sociales.

Pour remplir cette condition, au plus tard dans les sept mois suivant la notification de la présente décision, la République française :

a)      modifie l’article 30 de la [loi de 1990] et les textes règlementaires ou autres pris pour son application de sorte que l’assiette de calcul et le prélèvement de la contribution employeur à caractère libératoire, due par France Télécom, ne soient pas limités aux seuls risques communs aux salariés de droit privé et aux fonctionnaires de l’État, mais incluent également les risques non communs ;

b)      prélève sur France Télécom, à partir du jour où les montants de la contribution exceptionnelle instaurée par la [loi de 1996] capitalisés au taux d’actualisation résultant de l’application de la communication de la Commission concernant la méthode de fixation des taux de référence et d’actualisation applicable en l’espèce égalent le montant des contributions et charges que France Télécom aurait continué de payer au titre de l’article 30 de la [loi de 1990] dans sa rédaction initiale, une contribution employeur à caractère libératoire calculée selon les modalités précisées au point a), en prenant en considération les risques communs et non communs aux salariés de droit privé et aux fonctionnaires de l’État. »

12      Selon l’article 4 de la décision attaquée, la République française est destinataire de la décision attaquée.

 Procédure et conclusion des parties

13      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 7 janvier 2013, la requérante a introduit le présent recours.

14      Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 21 mars 2013, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114 du règlement de procédure du Tribunal. La requérante a déposé ses observations sur cette exception le 6 mai 2013.

15      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 6 mai 2013, la République française a demandé à intervenir dans la présente procédure au soutien des conclusions de la requérante.

16      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        déclarer le recours recevable ;

–        annuler la décision attaquée ;

–        condamner la Commission aux dépens.

17      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme manifestement irrecevable ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

18      En vertu de l’article 114, paragraphe 1, du règlement de procédure, si une partie le demande, le Tribunal peut statuer sur l’irrecevabilité sans engager le débat au fond. Conformément au paragraphe 3 du même article, la suite de la procédure est orale, sauf décision contraire du Tribunal. En l’espèce, le Tribunal estime qu’il est suffisamment éclairé par les pièces versées au dossier et considère qu’il n’y a pas lieu d’ouvrir la procédure orale.

19      La Commission fait valoir, dans son exception d’irrecevabilité, que la requérante n’est ni directement ni individuellement concernée par la décision attaquée. En particulier, s’agissant de l’affectation individuelle, la Commission soulève que la requérante n’a pas participé activement à la procédure menant à l’adoption de la décision attaquée en tant que négociateur. De même, la requérante ne serait pas l’auteur de la loi de 1996, examinée dans la décision attaquée. Enfin, elle ne saurait davantage être individuellement concernée en raison de l’affectation individuelle de ses membres.

20      En premier lieu, la requérante fait valoir qu’elle a un intérêt propre à l’annulation de la décision attaquée dans la mesure où celle-ci détériore la situation financière de France Télécom, ce qui aurait un effet négatif sur le cours de l’action de France Télécom. Une telle évolution du cours de l’action aurait une conséquence négative sur les membres de la requérante qui sont détenteurs de titres de France Télécom.

21      Elle ajoute à cet égard que, lors de l’introduction de France Télécom en bourse le 20 octobre 1997, la valeur de l’entreprise a été définie par rapport aux informations transmises par France Télécom et validées par la commission des opérations de bourse (COB), prenant en compte le paiement par France Télécom de la contribution forfaitaire exceptionnelle en 1997. Il aurait était affirmé dans le document transmis par France Télécom que celle-ci était « déliée de toute autre obligation envers l’État, y compris si les pensions payées par ce dernier aux retraités de France Télécom exc[édai]ent les montants reçus de la part de France Télécom ». Or, la décision attaquée aurait pour effet de soumettre France Télécom à une charge financière annuelle supplémentaire de près de 150 millions d’euros par rapport à ses charges prévues et prévisibles. Cette charge aurait pour effet d’augmenter son niveau d’endettement, de dégrader ses performances et sa compétitivité et ainsi d’abaisser sa valeur intrinsèque sur les marchés financiers et donc la valeur de ses titres.

22      En second lieu, la requérante fait valoir qu’elle est individuellement concerné par la décision attaquée, puisque celle-ci modifie substantiellement les éléments de rétribution des salariés de France Télécom qui sont ses membres.

23      Premièrement, la charge supplémentaire affecterait les négociations annuelles obligatoires visant à déterminer le montant des augmentations collectives du salaire de base.

24      Deuxièmement, l’intéressement des salariés de France Télécom, membres de la requérante, serait calculé en fonction de deux indicateurs : un indicateur de qualité du service rendu au client (IQSC) et un indicateur de performance opérationnelle (IPO). Or, les charges supplémentaires découlant de la décision attaquée réduiraient l’IPO.

25      Troisièmement, les sommes allouées aux personnels de France Télécom au titre de la participation résulteraient de la réserve spéciale de participation du groupe, calculée en fonction des résultats de France Télécom.

26      Quatrièmement, des parts variables managériales seraient indexées sur la performance de l’entreprise. De même, l’attribution gratuite d’actions en faveur des personnels de France Télécom n’interviendrait que si un objectif en termes de capacité d’autofinancement (cash-flow) opérationnelle cumulée de 27 milliards d’euros sur la période allant de 2011 à 2013 était atteint.

27      En troisième lieu, la requérante rappelle qu’elle n’a été créée que le 1er octobre 2009 et était donc inexistante le 21 août 2008, date de publication au Journal Officiel de l’Union européenne de l’avis de la Commission invitant les tiers intéressés à présenter leurs observations. Dès lors, elle n’aurait pas eu de possibilité de participer à la procédure administrative menant à l’adoption de la décision attaquée et de faire valoir sa position.

28      Aux termes de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, « [t]oute personne physique ou morale peut former, dans les conditions prévues aux premier et deuxième alinéas, un recours contre les actes dont elle est le destinataire ou qui la concernent directement et individuellement, ainsi que contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d’exécution ».

29      En l’espèce, il est constant que la décision attaquée a pour unique destinataire la République française et concerne une aide individuelle dont le bénéficiaire était France Télécom. La décision attaquée ayant ainsi une portée individuelle, il ne peut s’agir d’un acte règlementaire au sens de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE , cette notion d’« acte règlementaire » devant être comprise comme visant tout acte de portée générale à l’exception des actes législatifs (voir, en ce sens, ordonnance du Tribunal du 6 septembre 2011, Inuit Tapiriit Kanatami e.a./Parlement et Conseil, T‑18/10, Rec. p. II‑5599, point 56). 

30      Il s’ensuit que, la requérante n’étant pas destinataire de la décision attaquée, son recours est recevable à condition qu’elle soit directement et individuellement concerné par la décision attaquée.

31      Il y a lieu de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, des tiers ne sauraient être concernés individuellement par une décision adressée à une autre personne que si cette décision les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et de ce fait les individualise d’une manière analogue à celle dont le serait le destinataire de la décision (arrêts de la Cour du 15 juillet 1963, Plaumann/Commission, 25/62, Rec. p. 197, 223, et du 29 avril 2004, Italie/Commission, C‑298/00 P, Rec. p. I‑4087, point 36).

32      Il convient de rappeler que les recours formés par des associations, telles que la requérante, chargée de défendre les intérêts collectifs des personnels de France Télécom en matière de rémunération, d’épargne salariale, d’actionnariat salarié et de stock-options, sont recevables, selon la jurisprudence, dans trois situations, à savoir lorsqu’elles représentent les intérêts de leurs membres qui seraient recevables à agir, lorsqu’elles sont individualisées en raison de l’affectation de leurs intérêts propres en tant qu’association, notamment parce que leur position de négociatrice a été affectée par l’acte dont l’annulation est demandée, ou encore lorsqu’une disposition légale leur reconnaît expressément une série de facultés à caractère procédural (ordonnances du Tribunal du 30 septembre 1997, Federolio/Commission, T‑122/96, Rec. p. II‑1559, point 60 , et du 28 juin 2005, FederDoc e.a./Commission, T‑170/04, Rec. p. II‑2503, point 49 ; arrêt du Tribunal du 18 mars 2010, Forum 187/Commission, T‑189/08, Rec. p. II‑1039, point 58).

33      En premier lieu, en l’espèce, force est de constater que la requérante n’allègue pas avoir occupé une position de négociateur durant la procédure administrative.

34      En deuxième lieu, s’agissant de l’argument de la requérante selon lequel elle a été constituée après l’expiration du délai prévu pour déposer des observations dans le cadre de la procédure formelle d’examen, ouverte en vertu de de l’article 88, paragraphe 2, CE, de sorte que le présent recours serait son unique opportunité de présenter sa position, il convient de relever que de telles considérations sont étrangères aux différents cas de figure établis par la jurisprudence, figurant au point 33 ci-dessus.

35      Certes, quant à la sauvegarde de leurs facultés procédurales, selon la jurisprudence, les intéressés au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, qui peuvent introduire des recours en annulation contre une décision déclarant l’aide compatible avec le marché intérieur sans ouvrir la procédure formelle d’examen, prévue audit paragraphe, sont les personnes, entreprises ou associations éventuellement affectées dans leurs intérêts par l’octroi d’une aide, c’est-à-dire en particulier les entreprises concurrentes des bénéficiaires de cette aide et les organisations professionnelles (voir arrêt de la Cour du 13 décembre 2005, Commission/Aktionsgemeinschaft Recht und Eigentum, C‑78/03 P, Rec. p. I‑10737, points 34 à 36, et la jurisprudence citée).

36      Cependant, en l’espèce, la décision attaquée a été adopté à la fin de la procédure formelle d’examen, de sorte que les intéressés avaient la possibilité de déposer leurs observations. Le seul fait que la requérante a été constituée après l’ouverture de la procédure formelle d’examen ne constitue pas une qualité qui lui est particulière ou une situation de fait qui la caractérise par rapport à toute autre personne et de ce fait l’individualise d’une manière analogue à celle dont le destinataire de la décision le serait. En effet, reste indéterminé et indéterminable le nombre des entités juridiques qui ont été constituées après l’ouverture de ladite procédure et, tout comme la requérante, avaient un intérêt à ce que France Télécom ne soit pas soumise aux charges supplémentaires dans le contexte de l’aide en cause, ou, au contraire, avaient un intérêt à ce que l’aide en cause ne soit pas déclarée compatible avec le marché intérieur.

37      Au demeurant, dès lors que la participation à la procédure administrative est un élément susceptible d’indiquer, dans certaines conditions, l’affectation individuelle des parties intéressées, l’absence d’une telle participation peut être prise en compte, tout au plus, comme un indice du défaut de ladite affectation individuelle (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 23 mai 2000, Comité d’entreprise de la Société française de production e.a./Commission, C‑106/98 P, Rec. p. I‑3659, point 54).

38      Il ressort de ce qui précède que la requérante n’est pas individuellement concernée par la décision attaquée par ses intérêts propres en tant qu’association.

39      En troisième lieu, il convient d’examiner si la requérante est individuellement concernée par la décision attaquée en raison de l’affectation individuelle de ses membres.

40      En l’espèce, la requérante fait valoir que la baisse de la performance de France Télécom en raison de la condition prévue dans la décision attaquée affecte ses membres, en substance, puisqu’elle change un indicateur dans le calcul de l’intéressement et des parts variables managériales, fait baisser la réserve spéciale de participation, réduit la chance de l’attribution gratuite d’actions aux personnels de France Télécom et, en général, réduit la valeur des prix des actions et autres titres de France Télécom, dont ses membres sont détenteurs.

41      À cet égard, même à supposer que la décision attaquée exerce l’effet allégué par la requérante, il suffit de relever que le prétendu impact sur la performance de France Télécom est, selon les décisions prises par celle-ci quant à sa politique commerciale et à l’allocation de ses ressources, susceptible d’affecter les intérêts de tous ses actionnaires, voire de ses fournisseurs, clients et créanciers. Il s’agit ainsi d’un ensemble indéterminé d’opérateurs économiques, dont le cercle peut s’agrandir après l’adoption de la décision attaquée (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 14 novembre 1984, Intermills/Commission, 323/82, Rec. p. 3809, point 16).

42      Les opérateurs économiques appartenant à un tel groupe indéterminé et indéterminable ne sont pas individuellement concernées par un acte adressé à une tierce partie. Il s’ensuit que la qualité pour agir de la requérante ne saurait être davantage déduite de celle de ses membres.

43      Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de constater que la requérante n’est pas individuellement concernée par la décision attaquée.

44      Dès lors, il convient de rejeter son recours comme irrecevable sans qu’il soit nécessaire d’examiner son affectation directe.

 Sur la demande en intervention de la République française

45      Selon la jurisprudence, dans le cas où le recours au principal est d’une telle nature qu’il doit être déclaré irrecevable sans que soit engagé le débat au fond, il ne saurait être admis qu’une tierce personne puisse utilement intervenir au soutien des conclusions de l’une des parties. Dès lors, rien ne s’oppose à ce que le Tribunal mette fin à un litige en le déclarant irrecevable avant qu’une demande d’intervention ne soit admise (ordonnance de la Cour du 5 juillet 2001, Conseil national des professions de l’automobile e.a./Commission, C‑341/00 P, Rec. p. I‑5263, points 36 et 37).

46      En l’espèce, eu égard aux exigences de la bonne administration de la justice, le recours doit être rejeté comme irrecevable, sans qu’il y ait lieu de statuer sur la demande en intervention de la République française.

 Sur les dépens

47      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

48      La requérante ayant succombé en son recours, il y a lieu de la condamner à supporter ses propres dépens, ainsi que ceux exposés par la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière.

49      En vertu de l’article 87, paragraphe 6, du règlement de procédure, la République française, demandeur en intervention, supportera ses propres dépens. 

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté comme irrecevable.

2)      Il n’y a pas lieu de statuer sur la demande en intervention de la République française.

3)      L’association pour la défense de l’épargne et de l’actionnariat des salariés de France Télécom-Orange (ADEAS) supportera ses propres dépens, ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

4)      La République française supportera ses propres dépens.

Fait à Luxembourg, le 3 avril 2014.

Le greffier

 

      Le président

E. Coulon

 

      G. Berardis


* Langue de procédure : le français.