Language of document : ECLI:EU:T:2009:371

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (septième chambre)

30 septembre 2009 (*)

« FEOGA – Section ‘Garantie’ – Dépenses exclues du financement communautaire – Soutien au développement rural – Mesures transitoires – Notion de ‘dépenses pluriannuelles’ – Article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement (CE) n° 2603/1999 »

Dans l’affaire T‑55/07,

Royaume des Pays-Bas, représenté initialement par Mme H. Sevenster et M. M. de Grave, puis par M. de Grave, Mmes C. Wissels et M. Noort, en qualité d’agents,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par MM. T. van Rijn et F. Jimeno Fernández, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande d’annulation partielle de la décision 2006/932/CE de la Commission, du 14 décembre 2006, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Garantie » (JO L 355, p. 96), dans la mesure où elle concerne le Royaume des Pays-Bas et, plus particulièrement, la correction financière appliquée au remboursement de dépenses non éligibles au titre du FEOGA section « Garantie » pour l’année 2002 à concurrence de 5,67 millions d’euros,

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE

DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (septième chambre),

composé de MM. N. J. Forwood, président, D. Šváby et E. Moavero Milanesi (rapporteur), juges,

greffier : M. J. Plingers, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 23 avril 2009,

rend le présent

Arrêt

 Cadre juridique

1        L’article 1er du règlement (CEE) n° 2052/88 du Conseil, du 24 juin 1988, concernant les missions des fonds à finalité structurelle, leur efficacité ainsi que la coordination de leurs interventions entre elles et celles de la Banque européenne d’investissement et des autres instruments financiers existants (JO L 185, p. 9), tel que modifié par le règlement (CE) n° 3193/94 du Conseil, du 19 décembre 1994, qui modifie également le règlement (CEE) n° 4253/88 portant dispositions d’application du règlement n° 2052/88 (JO L 337, p. 11), énonce les cinq objectifs prioritaires qui doivent notamment être réalisés au moyen du concours des fonds à finalité structurelle.

2        L’objectif no 1 est ainsi formulé : « promouvoir le développement et l’ajustement structurel des régions en retard de développement ». L’objectif no 5, à savoir « promouvoir le développement rural », se subdivise en deux sous-objectifs :

a)      accélérer l’adaptation des structures agricoles dans le cadre de la réforme de la politique agricole commune ;

b)      faciliter le développement et l’ajustement structurel des zones rurales.

3        En vertu de l’article 2, paragraphe 1, du règlement n° 2052/88, tant la réalisation de l’objectif n° 5, sous a), que celle de l’objectif n° 5, sous b), est, conjointement avec d’autres fonds structurels, financée par le Fonds européen d’orientation et de garantie agricole (FEOGA), section « Orientation ».

4        L’article 20 du règlement (CEE) n° 4253/88 du Conseil, du 19 décembre 1988, portant dispositions d’application du règlement n° 2052/88 en ce qui concerne la coordination entre les interventions des différents fonds structurels, d’une part, et entre celles-ci et celles de la Banque européenne d’investissement et des autres instruments financiers existants, d’autre part (JO L 374, p. 1), tel que modifié par le règlement (CEE) n° 2082/93 du Conseil du 20 juillet 1993 modifiant le règlement n° 4253/88, dispose :

« 1. Les engagements budgétaires sont effectués sur la base des décisions de la Commission approuvant les actions concernées. Ils sont valables pour une période dont la durée dépend de la nature et des conditions spécifiques de mise en œuvre des actions concernées.

2. Les engagements pour des actions d’une durée égale ou supérieure à deux ans sont, en règle générale, […] réalisés par tranches annuelles. L’engagement de la première tranche a lieu lorsque la décision approuvant l’action est adoptée par la Commission.

[…] »

5        Aux termes de l’article 21 du règlement n° 4253/88 :

« 1. Le paiement du concours financier est effectué conformément aux engagements budgétaires et est adressé à l’autorité ou l'organisme national, régional ou local désigné à cet effet dans la demande soumise par l’État membre concerné dans un délai ne dépassant pas, en règle générale, deux mois à compter de la réception d'une demande recevable. Il peut revêtir soit la forme d’avances soit la forme de paiements définitifs se référant aux dépenses effectives encourues. Pour les actions d’une durée égale ou supérieure à deux ans, les paiements se rapportent aux tranches annuelles des engagements visés à l’article 20, paragraphe 2.

[…]

4. Le paiement du solde de chaque engagement est effectué si :

–        l’autorité ou l'organisme désigné, visé au paragraphe 1, soumet à la Commission une demande de paiement dans les six mois suivant la fin de l’année concernée ou l’achèvement matériel de l’action,

[…] »

6        La réglementation relative au financement de la politique agricole commune est prévue, en ce qui concerne les dépenses effectuées avant le 1er janvier 2000, par le règlement (CEE) n° 729/70 du Conseil, du 21 avril 1970 (JO L 94, p. 13), et, en ce qui concerne les dépenses effectuées à partir du 1er janvier 2000, par le règlement (CE) n° 1258/1999 du Conseil, du 17 mai 1999 (JO L 160, p. 103).

7        Selon les articles 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement n° 729/70 et du règlement n° 1258/1999, la section « Garantie » du FEOGA finance les interventions destinées à la régularisation des marchés agricoles. L’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 729/70 et l’article 2, paragraphe 2, du règlement n° 1258/1999 précisent que sont financées au titre de l’article 1er, paragraphe 2, sous b), les interventions destinées à la régularisation des marchés agricoles entreprises selon les règles communautaires dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles.

8        En vertu de l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70, tel que modifié par le règlement (CE) n° 1287/95 du Conseil, du 22 mai 1995 (JO L 125, p. 1), ainsi que de l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999, la Commission des Communautés européennes décide des dépenses à écarter du financement communautaire, lorsqu’elle constate qu’elles n’ont pas été effectuées conformément aux règles communautaires. Préalablement à toute décision de refus de financement, les résultats des vérifications de la Commission ainsi que les réponses de l’État membre concerné font l’objet de notifications écrites, à l’issue desquelles les deux parties tentent de parvenir à un accord sur les mesures à prendre. À défaut d’accord, l’État membre peut demander l’ouverture d’une procédure de conciliation, conformément à la décision 94/442/CE de la Commission, du 1er juillet 1994, relative à la création d’une procédure de conciliation dans le cadre de l’apurement des comptes du FEOGA, section « Garantie » (JO L 182, p. 45). L’article 1er, paragraphe 1, de cette décision a institué un organe de conciliation qui intervient dans ce cadre. Aux termes du paragraphe 2, sous a), de cet article, « la position prise par l’organe de conciliation ne préjuge pas la décision définitive de la Commission en matière d’apurement des comptes ».

9        Les résultats de cette procédure font l’objet d’un rapport communiqué à la Commission, qui est examiné par elle avant qu’elle n’adopte une éventuelle décision de refus de financement. La Commission évalue les montants à écarter au regard, notamment, de l’importance de la non-conformité constatée, en tenant compte de la nature et de la gravité de l’infraction ainsi que du préjudice financier causé à la Communauté européenne.

10      Aux termes des articles 8, paragraphe 1, du règlement n° 729/70 et du règlement n° 1258/1999, les États membres prennent, conformément aux dispositions législatives, réglementaires et administratives nationales, les mesures nécessaires pour s’assurer de la réalité et de la régularité des opérations financées par le FEOGA, pour prévenir et poursuivre les irrégularités et pour récupérer les sommes perdues à la suite d’irrégularités ou de négligences.

11      En vertu de l’article 7, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1663/95 de la Commission, du 7 juillet 1995, établissant les modalités d’application du règlement n° 729/70 en ce qui concerne la procédure d’apurement des comptes du FEOGA, section « Garantie » (JO L 158, p. 6), le montant des dépenses reconnues à la charge du FEOGA est déterminé sur la base des comptes annuels ainsi que des réductions et des suspensions d’avances au titre de l’exercice financier concerné. Les montants recouvrables de chaque État membre sont déterminés en déduisant le montant des avances versées au cours de l’exercice financier en question des dépenses reconnues à la charge du FEOGA pour le même exercice.

12      L’article 8 du règlement n° 1663/95 définit la procédure à suivre lorsque, à l’issue d’une enquête, la Commission considère que certaines dépenses n’ont pas été effectuées conformément aux règles communautaires. Cette procédure est engagée par une communication adressée à l’État membre concerné. La Commission indique les mesures correctives à prendre. Après l’expiration du délai de réponse de deux mois accordé à l’État membre, la Commission convoque une discussion bilatérale, après quoi elle communique ses conclusions en indiquant les dépenses qu’elle a l’intention d’écarter du financement. En l’absence d’accord, la Commission signale à l’État membre la possibilité de mettre en place une procédure de conciliation.

13      L’article 55, paragraphe 1, du règlement (CE) n° 1257/1999 du Conseil, du 17 mai 1999, concernant le soutien au développement rural par le FEOGA et modifiant et abrogeant certains règlements (JO L 160, p. 80), a abrogé le règlement (CE) n° 951/97 du Conseil, du 20 mai 1997, concernant l’amélioration des conditions de transformation et de commercialisation des produits agricoles (JO L 142, p. 22), et le règlement (CEE) n° 867/90 du Conseil, du 29 mars 1990, concernant l’amélioration des conditions de transformation et de commercialisation des produits sylvicoles (JO L 91, p. 7), applicables en l’espèce. L’article 55, paragraphe 3, du règlement n° 1257/1999 dispose toutefois que ces règlements continuent à s’appliquer aux actions que la Commission approuve en vertu desdits règlements avant le 1er janvier 2000.

14      Aux termes de l’article 44 du règlement n° 1257/1999 :

« 1. Les plans de développement rural doivent être présentés au plus tard six mois après l’entrée en vigueur du présent règlement.

2. La Commission apprécie les plans proposés en fonction de leur cohérence avec le présent règlement. […] »

15      Conformément à l’article 53, paragraphe 1, du règlement n° 1257/1999, des mesures spécifiques pour faciliter le passage du régime antérieurement en vigueur (ci-après l’« ancien régime ») à celui institué par ledit règlement (ci-après le « nouveau régime ») ont été prises par l’adoption du règlement (CE) n° 2603/1999 de la Commission, du 9 décembre 1999, fixant des règles transitoires pour le soutien au développement rural prévu par le règlement n° 1257/1999 (JO L 316, p. 26). Le règlement n° 2603/1999 a été modifié en dernier lieu par le règlement (CE) n° 2055/2001 de la Commission, du 19 octobre 2001 (JO L 277, p. 12).

16      Selon l’article 35, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 1257/1999 :

« 1. Le soutien communautaire en faveur […] des mesures agro-environnementales […] est financé par le FEOGA, section ‘Garantie’, dans l’ensemble de la Communauté.

2. Le soutien communautaire en faveur des autres mesures de développement rural est financé par le FEOGA :

[…]

–         section ‘Garantie’, dans les zones ne relevant pas de l’objectif n° 1. »

17      Selon le considérant 5 du règlement n° 2603/1999 :

« […] il convient que les paiements liés aux engagements contractés avant le 1er janvier 2000 en rapport avec les régimes de soutien au développement rural, qui seront financés à l’avenir par le FEOGA, section ‘Garantie’, continuent à être financés par le FEOGA, section ‘Orientation’, jusqu’au 31 décembre 2001, dans le respect des conditions en vigueur applicables au soutien et sous réserve des crédits disponibles. Cependant jusqu’au 31 décembre 2001 les dépenses pluriannuelles découlant de tels engagements ainsi que les indemnités compensatoires liées au plus tard à l’année 1999 doivent pouvoir sous certaines conditions être financées par la section ‘Garantie’ du FEOGA dans le cas où les crédits sont épuisés ou insuffisants. Dans tous les cas, les dépenses pluriannuelles postérieures au 31 décembre 2001 seront financées par le FEOGA, section ‘Garantie’. »

18      L’article 4 du règlement n° 2603/1999, dans la version modifiée par le règlement n° 2055/2001, est rédigé comme suit :

« 1.      En cas de soutien accordé en vertu des règlements […] n° 867/90, […] n° 951/97 […], les dispositions des paragraphes 2 et 3 du présent article s’appliquent.

2.      Les paiements liés aux engagements contractés par les États membres avant le 1er janvier 2000, y inclus les indemnités compensatoires relatives à l’année 1999, et pour lesquels des dépenses sont encourues par les États membres avant le 1er janvier 2002, continuent à être financés par le FEOGA, section ‘Orientation’, dans le respect des conditions fixées dans les règlements visés au paragraphe 1 et sous réserve des crédits disponibles.

Dans le cas où, pour les actions mentionnées au premier alinéa, les crédits sont épuisés ou insuffisants, les paiements suivants pourront être intégrés dans la programmation du développement rural pour la période 2000-2006 et financés par le FEOGA, section ‘Garantie’, à condition que des critères identifiant clairement les dépenses à intégrer dans la programmation soient définis par l’État membre concerné :

a)      les paiements relatifs aux indemnités compensatoires relatives au plus tard à l’année 1999 ou

b)      les paiements relatifs aux dépenses pluriannuelles dans les zones non couvertes par l’objectif n° 1 telles que définies à partir du 1er janvier 2000.

3.      Le soutien communautaire pour des dépenses pluriannuelles liées à des actions dans les cas prévus au paragraphe 2, premier alinéa, et pour lesquelles des dépenses sont encourues par les États membres après le 1er janvier 2002, est financé par le FEOGA, section ‘Garantie’, dans les zones non couvertes par l’objectif n° 1 telles que définies à partir du 1er janvier 2000.

4.      Dans chaque cas où les États membres appliquent les paragraphes 2 ou 3, ils le spécifient dans leurs plans de développement rural. »

 Faits à l’origine du litige

19      Le plan néerlandais d’amélioration et de rationalisation du traitement, de la transformation et de la commercialisation de produits agricoles a été approuvé par la décision 94/835/CE de la Commission, du 15 décembre 1994, portant approbation du document unique de programmation pour les interventions structurelles communautaires relatives à l’amélioration des conditions de transformation et de commercialisation des produits agricoles aux Pays-Bas, au titre de l’objectif n° 5, sous a), couvrant la période entre 1994 et 1999 (JO L 352, p. 10).

20      En exécution de ce plan, les autorités néerlandaises ont établi un programme d’investissement intitulé « Programme d’investissement ‘Marché et compétitivité’, contenant deux parties, ‘Transformation et commercialisation de produits agricoles’ et ‘Transformation et commercialisation de produits sylvicoles’ » (ci‑après le « programme d’investissement »).

21      En vertu de l’article 6 de la décision 94/835, l’aide du FEOGA ne concerne que les dépenses liées aux opérations couvertes par le document unique de programmation qui auront fait l’objet, dans l’État membre, de dispositions juridiquement obligatoires et pour lesquelles les moyens financiers nécessaires auront été spécifiquement engagés au plus tard le 31 décembre 1999. La date limite pour la prise en compte des dépenses relatives à ces actions est fixée au 31 décembre 2001.

22      Selon ledit plan, le bénéficiaire final devait avoir effectué les opérations et les dépenses nécessaires pour l’exécution des engagements contractés, au plus tard le 31 décembre 2001. Le bénéficiaire final devait envoyer une déclaration finale, sur la base de laquelle l’organisme payeur néerlandais Laser (ci‑après l’« organisme payeur néerlandais ») pouvait effectuer un versement.

23      Par ailleurs, par la décision C (2000) 2751 final, du 28 septembre 2000, la Commission a approuvé le « Plan de développement rural 2000-2006 » présenté par les autorités néerlandaises pour la période de programmation 2000-2006.

24      Plusieurs déclarations finales ont été envoyées à l’organisme payeur néerlandais peu avant ou peu après le 31 décembre 2001. Dans une lettre du 16 décembre 2002, l’organisme payeur néerlandais a déclaré que les paiements qu’il avait effectués après le 31 décembre 2001 n’entraient pas en ligne de compte pour un remboursement par le FEOGA, section « Orientation » et que tous les montants concernés avaient été, en vertu du règlement n° 2603/1999, intégrés aux demandes de paiement à la charge du FEOGA, section « Garantie ». Le paiement sur le fondement de telles déclarations a donc été effectué par cet organisme peu après le 1er janvier 2002.

25      Divers projets d’investissement, approuvés dans le cadre du programme d’investissement, ont bénéficié du concours financier du FEOGA, section « Orientation ». En revanche, d’autres dépenses effectuées par les autorités néerlandaises au profit des bénéficiaires finaux après le 31 décembre 2001, pour des projets qui avaient été approuvés avant cette date, ont été déclarées auprès de la section « Garantie » du FEOGA par le Royaume des Pays-Bas, qui considérait que les règles transitoires, et notamment celles de l’article 4 du règlement n° 2603/1999, devaient être appliquées en l’espèce.

26      Par lettre du 1er décembre 2003, la Commission a, sur le fondement de l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1663/1995, indiqué aux autorités néerlandaises son intention d’écarter du financement communautaire les dépenses qui, au 31 décembre 2001, n’avaient pas été déclarées à la section « Orientation » du FEOGA et avaient été déclarées à la section « Garantie » de celui-ci, au motif que le financement par la section « Garantie » n’était permis que s’il était question de « dépenses pluriannuelles » au sens de l’article 4 du règlement n° 2603/1999, ce qui n’aurait pas été le cas pour les dépenses dont il était question.

27      Selon cette même lettre, « les dépenses pluriannuelles peuvent être définies comme des dépenses liées à une action prévue au cours de la période de programmation précédente, mais pour laquelle il existe un engagement d’octroyer un concours pendant une période suivant la période de paiement fixée par la décision d’approbation du programme ».

28      Dans la lettre de réponse du 2 février 2004, le Royaume des Pays-Bas a contesté l’interprétation de la Commission, en indiquant que les projets financés constituaient des projets pluriannuels, que la définition de la notion de « dépenses pluriannuelles » retenue par la Commission ne ressortait pas du règlement n° 2603/1999 et que, en tout état de cause, les projets financés dans le cadre du programme d’investissement répondaient à la définition de la notion de « dépenses pluriannuelles » retenue par la Commission.

29      Par lettre du 9 septembre 2004, la Commission a précisé ce qui suit :

« Les dépenses pluriannuelles peuvent être définies comme des dépenses liées à une action prévue au cours de la période de programmation précédente, mais pour laquelle il existe un engagement d’octroyer un concours pendant une période suivant la période de paiement fixée par la décision d’approbation du programme. Le fait qu’un projet soit financé par tranches sur une période de plusieurs années ne suffit pas pour considérer les dépenses qui y sont afférentes comme des dépenses pluriannuelles pouvant, à compter du 1er janvier 2002, être financées par le FEOGA section ‘Garantie’, conformément à l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 2603/1999. »

30      La Commission a ensuite invité les autorités néerlandaises compétentes à une discussion bilatérale, qui s’est tenue à Bruxelles le 11 octobre 2004.

31      Par lettre du 22 novembre 2005, la Commission a informé le Royaume des Pays-Bas de son intention d’exclure certaines dépenses du concours financier de la section « Garantie » du FEOGA et a ultérieurement précisé la définition de la notion de « dépenses pluriannuelles » dans les termes suivants :

« Les dépenses pluriannuelles doivent être définies comme des dépenses liées à une action prévue au cours de la période de programmation précédente et pour laquelle il existe un engagement d’octroyer un concours annuel pendant une période qui se prolonge au-delà de la date limite fixée par la décision d’approbation du programme (le 31 décembre 2001). »

32      Le 22 décembre 2005, le Royaume des Pays-Bas a demandé l’ouverture d’une procédure de conciliation en application de l’article 8, paragraphe 2, du règlement n° 1663/95.

33      Dans son rapport final du 5 mai 2006, l’organe de conciliation, après avoir constaté que les autorités néerlandaises avaient considéré que les paiements concernés devaient être déclarés à la section « Garantie » du FEOGA, bien que les fonds alloués au Royaume des Pays‑Bas au titre de la section « Orientation » n’étaient pas épuisés, a conclu que « les autorités néerlandaises n’[avaie]nt pas profité de ces occasions, en dépit du fait que les fonds qui leur avaient été alloués au titre de la section ‘Orientation’ étaient sous-utilisés (seuls 50 % du montant alloué de 396 millions d’euros [ayant] été effectivement utilisés) ».

34      Quant à la divergence de positions entre la Commission et les autorités néerlandaises sur la définition de la notion de « dépenses pluriannuelles », l’organe de conciliation a conclu qu’il ne lui appartenait pas de statuer en droit sur le différend concernant l’interprétation de l’article 4 du règlement n° 2603/1999. Il a indiqué ce qui suit :

« En ce qui concerne le niveau de la correction, l’organe relève que la proposition des services de la Commission repose sur des considérations d’éligibilité plutôt que de défaillances au niveau des contrôles. L’organe souhaiterait néanmoins souligner que l’approche suivie par les autorités néerlandaises n’a pas exposé le [FEOGA] au risque que les paiements effectués dépassent les montants alloués ou que des bénéficiaires inéligibles reçoivent une aide financière. En fait, les ressources financières qui avaient été allouées à ces programmes ont, dans une mesure substantielle, été sous-utilisées. D’autre part, aucune partie à ces projets ni les autorités elles-mêmes n’ont tiré un avantage du transfert de la section ‘Orientation’ à la section ‘Garantie’ du [FEOGA]. »

35      L’organe de conciliation a enfin invité les services de la Commission à vérifier si la correction financière envisagée était conforme au principe de proportionnalité, comme suit :

« Bien que les services de la Commission aient fait valoir qu’ils ne disposaient pas de la moindre marge de manœuvre à cause des règles de discipline budgétaire, l’organe souhaiterait néanmoins les inviter à considérer les conséquences potentiellement disproportionnées de cette proposition de correction. »

36      Dans son rapport de synthèse du 15 octobre 2006 (ci-après le « rapport de synthèse »), la Commission a maintenu sa position en ce qui concerne la définition de la notion de « dépenses pluriannuelles » aux fins de l’application de l’article 4 du règlement n° 2603/1999.

37      Il ressort du rapport de synthèse ce qui suit :

« Les paiements découlant d’engagements dans le domaine du développement rural contractés par les États membres avant le 1er janvier 2000 dans le cadre de la section ‘Orientation’ du FEOGA peuvent effectivement, en vertu des règles transitoires de l’article 4 du règlement n° 2603/1999, être financés par la section ‘Garantie’ pourvu que ces paiements aient un rapport avec des indemnités compensatoires ou des dépenses pluriannuelles. Cet article a clairement pour objectif de garantir une transition sans difficulté de l’ancienne période de programmation à la nouvelle, étant entendu qu’il convient également de veiller au respect de la date limite fixée par la Commission pour le financement des dépenses effectuées par les bénéficiaires finaux. »

38      La Commission a en outre confirmé son interprétation, s’agissant de la notion de « dépenses pluriannuelles », comme suit :

« Les dépenses pluriannuelles sont des dépenses liées à une action prévue au cours de la période de programmation précédente, mais pour laquelle il existe un engagement d’octroyer un concours pendant une période qui se prolonge au-delà de la période de paiement fixée par la décision d’approbation du programme. Le fait qu’un projet soit financé par tranches sur plusieurs années ne constitue pas une raison pour considérer les dépenses qui y sont afférentes comme des dépenses pluriannuelles pouvant, conformément à l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 2603/1999, être financées par le FEOGA, section ‘Garantie’, à compter du 1er janvier 2002.

Les services de la direction générale ‘Agriculture et développement rural’ sont donc d’avis que les dépenses effectuées après le 31 décembre 2001 […] et pour lesquelles des demandes de paiement ont été présentées à la section ‘Garantie’ du FEOGA, ne peuvent pas être considérées comme des dépenses susceptibles de bénéficier d’un financement en vertu de la réglementation communautaire […] »

39      Lors de la réunion du comité du FEOGA du 16 novembre 2006, le Royaume des Pays‑Bas a une nouvelle fois exprimé, dans une déclaration jointe au procès-verbal de la réunion, son désaccord avec la position de la Commission telle qu’elle ressort du rapport de synthèse. La correction financière définitive a été arrêtée par la Commission dans la décision 2006/932/CE, du 14 décembre 2006, écartant du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du FEOGA, section « Garantie » (JO L 355, p. 96, ci‑après la « décision attaquée »).

 Procédure et conclusions des parties

40      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 février 2007, le Royaume des Pays-Bas a introduit le présent recours.

41      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la septième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée. Sur rapport du juge rapporteur, la chambre a décidé d’ouvrir la procédure orale.

42      Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions posées par le Tribunal lors de l’audience du 23 avril 2009.

43      Le Royaume des Pays-Bas conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler partiellement la décision attaquée, en ce qu’elle écarte du financement communautaire certaines dépenses effectuées par les États membres au titre du FEOGA, section « Garantie », dans la mesure où elle le concerne et, plus particulièrement, la correction financière appliquée au remboursement de dépenses non éligibles au titre de la section « Garantie » du FEOGA pour l’année 2002 à concurrence de 5,67 millions d’euros ;

–        condamner la Commission aux dépens.

44      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme non fondé ;

–        condamner le Royaume des Pays-Bas aux dépens.

 En droit

45      À l’appui de son recours, le Royaume des Pays-Bas soulève deux moyens à titre principal, tirés, premièrement, de la violation de l’article 4 du règlement n° 2603/1999, en ce qui concerne la notion de « dépenses pluriannuelles », et, deuxièmement, de la violation de l’article 44, paragraphe 2, du règlement n° 1257/1999, ainsi que du principe de protection de la confiance légitime, compte tenu de l’application d’une correction financière à concurrence de la totalité du concours octroyé. Trois autres moyens sont soulevés à titre subsidiaire et sont tirés, respectivement, de la violation de l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999 et de l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70, de la méconnaissance du principe de proportionnalité, en ce qu’une correction financière a été imposée pour la totalité du concours octroyé, et de la violation de l’obligation de motivation.

 Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’article 4 du règlement n° 2603/1999

 Arguments des parties

46      Les parties sont en désaccord sur la question de savoir si les dépenses concernées peuvent être qualifiées de « dépenses pluriannuelles liées à des actions dans les cas prévus au paragraphe 2, premier alinéa » de l’article 4 du règlement n° 2603/1999.

47      Le Royaume des Pays-Bas estime que les dépenses effectuées par l’organisme payeur néerlandais après le 31 décembre 2001 pour des projets approuvés dans le cadre du programme d’investissement pour la période 1994-1999 sont des « dépenses pluriannuelles », qui ont été à juste titre déclarées à la section « Garantie » du FEOGA et auxquelles l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999 est applicable.

48      Selon le Royaume des Pays-Bas, dans la mesure où la notion de « dépenses pluriannuelles » n’est pas définie par le règlement n° 2603/1999 et où la définition retenue par la Commission n’est étayée par aucun renvoi à un autre règlement ou à des lignes directrices déterminées, l’interprétation de la notion de « dépenses pluriannuelles » devrait être effectuée à la lumière de l’objectif et de l’économie du règlement n° 2603/1999.

49      S’agissant, en premier lieu, de l’objectif des dispositions transitoires contenues dans le règlement n° 2603/1999, ces règles auraient été élaborées en vue de faciliter le déroulement du financement des différents projets en matière de développement rural. En vertu du nouveau régime, introduit par le règlement n° 1258/1999, la compétence pour le financement des mesures de développement rural, telles que celles en cause, aurait été transférée de la section « Orientation » à la section « Garantie » du FEOGA. À ce sujet, le règlement n° 2603/1999 prévoirait des règles spécifiques pour les dépenses effectuées après le 1er janvier 2002, en vertu d’engagements contractés avant le 1er janvier 2000.

50      S’agissant, en second lieu, de l’économie du règlement n° 2603/1999, son article 4, paragraphe 1, prévoirait que les dispositions des paragraphes 2 et 3 de ce même article s’appliquent en cas de soutien accordé en vertu, notamment, des règlements nos 867/90 et 951/97. Le Royaume des Pays-Bas en déduit que les dépenses effectuées en vertu de ces règlements peuvent être déclarées au titre desdits paragraphes 2 et 3. L’affirmation de la Commission selon laquelle les règlements nos 867/90 et 951/97 ne prévoient aucune dépense pluriannuelle serait dépourvue de fondement et contraire à l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 2603/1999.

51      Le Royaume des Pays-Bas précise que la période de programmation 1994‑1999 était ainsi conçue que les autorités pouvaient encore effectuer des paiements après le 1er janvier 2002 pour les engagements contractés avant le 1er janvier 2000 et achevés par les bénéficiaires finaux à la date du 31 décembre 2001 au plus tard. Dans un tel contexte normatif, il aurait pu arriver que la liquidation définitive des subventions et le versement de celles‑ci se produisent peu après le 1er janvier 2002. Or, à cette date, les autorités néerlandaises auraient estimé qu’elles ne pouvaient plus déclarer ces paiements au titre de la section « Orientation » du FEOGA, puisqu’une telle déclaration n’était possible que pour des dépenses effectuées par les États membres avant le 1er janvier 2002. Le Royaume des Pays-Bas aurait donc considéré que les « dépenses pluriannuelles » étaient celles pour lesquelles les engagements avaient été contractés pendant la période de programmation 1994‑1999 et pour lesquelles les paiements aux bénéficiaires finaux avaient été effectués par l’organisme payeur néerlandais lors de la période de programmation suivante, c’est-à-dire après le 1er janvier 2002. Cette définition de la notion de « dépenses pluriannuelles » serait d’ailleurs compatible avec celle donnée par la Commission dans sa lettre du 1er décembre 2003.

52      En outre, selon le Royaume des Pays-Bas, et contrairement à ce que la Commission soutient, il n’est pas correct d’affirmer que l’article 21, paragraphe 4, du règlement n° 4253/88 permettait aux pouvoirs publics d’effectuer les paiements jusqu’au 30 juin 2002. En effet, il ressortirait de cette disposition que l’organisme payeur néerlandais devait, au plus tard le 30 juin 2002, introduire auprès de la Commission une demande de paiement au titre de l’année 2001, pour les paiements aux bénéficiaires finaux effectués avant le 1er janvier 2002, et non après comme c’était le cas en l’espèce. Par conséquent, l’affirmation de la Commission selon laquelle l’article 21, paragraphe 4, du règlement n° 4253/88 permettait que les paiements effectués par les autorités néerlandaises aux bénéficiaires finaux durant la période allant du 1er janvier au 30 juin 2002 soient encore déclarés auprès de la section « Orientation » du FEOGA ne serait pas correcte, puisque l’article 4 du règlement n° 2603/1999 viserait l’hypothèse des demandes de paiement introduites après le 1er janvier 2002.

53      Le Royaume des Pays-Bas ajoute que, à supposer même que l’article 21, paragraphe 4, du règlement n° 4253/88 soit applicable, il n’aurait aucune incidence en l’espèce, car la Commission n’a jamais invoqué le dépassement du délai de six mois prévu par cette disposition comme motif justifiant la correction financière, ni dans le cadre de la phase précontentieuse ni dans la décision attaquée. S’agissant de la note que la Commission affirme avoir envoyée aux États membres le 4 août 2001, le Royaume des Pays-Bas affirme n’en avoir jamais reçu la version définitive, laquelle n’a au demeurant pas été versée au dossier.

54      La définition de la notion de « dépenses pluriannuelles », telle qu’elle a été précisée à plusieurs reprises par la Commission après la lettre du 1er décembre 2003, est contestée par le Royaume des Pays-Bas, car elle aurait pour conséquence que les dépenses effectuées après le 1er janvier 2002 ne pourraient être déclarées à aucun titre : ni au titre de la section « Orientation » du FEOGA, puisqu’elles ont été effectuées après le 1er janvier 2002, ni au titre de la section « Garantie », si elles n’étaient pas considérées comme étant des « dépenses pluriannuelles ». Cela signifierait que des projets déjà approuvés, bien qu’ils satisfassent aux conditions de financement et aient été achevés à temps, ne pourraient plus être déclarés en vertu des dispositions transitoires contenues dans le règlement n° 2603/1999, ce qui créerait une contradiction en l’espèce.

55      Contrairement à ce que soutient la Commission, le Royaume des Pays-Bas considère que les dépenses effectuées dans le cadre du règlement n° 951/97 relèvent du champ d’application du régime transitoire de l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999, à condition qu’il s’agisse de « dépenses pluriannuelles » au sens de cette disposition. Dans ce contexte, l’article 11 du règlement n° 951/97 désignerait les investissements et les dépenses entrant en ligne de compte pour un concours financier. Il s’agirait, notamment, des investissements et des dépenses relatifs à la rationalisation et au développement de la conservation, du traitement et de la transformation des produits agricoles, ainsi que du traitement des déchets, comme à l’application de nouvelles techniques de transformation et à des investissements innovateurs. Selon l’article 11, paragraphe 3, du règlement n° 951/97, les dépenses éligibles pourraient concerner la construction et l’acquisition de biens immobiliers, les machines et les équipements nouveaux, ainsi que les frais d’architectes, d’ingénieurs, de consultants et d’étude de faisabilité. Même les demandes de permis et les frais nécessaires pour tester une installation pourraient faire partie d’un plan d’investissement. Le Royaume des Pays-Bas conclut que, compte tenu de la nature des programmes d’investissement visés par le règlement n° 951/97, il s’agit de projets pluriannuels, pour lesquels les États membres contractent des engagements en vue d’accorder un soutien sur plusieurs années et qui relèvent donc de la notion de « dépenses pluriannuelles ».

56      La Commission estime que la notion de « dépenses pluriannuelles », figurant à l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999, doit être interprétée en ce sens qu’elle désigne des dépenses effectuées pour une action prévue au cours de la période de programmation précédente et pour laquelle il existe un engagement d’octroyer annuellement un montant fixe pendant une période postérieure à la date limite fixée par la décision d’approbation du programme. Cette interprétation serait conforme à la finalité dudit règlement, consistant à assurer une transition sans difficulté d’une période de programmation à l’autre.

57      Selon la Commission, les actions approuvées dans le cadre du règlement n° 951/97 sont des actions ponctuelles et, en conséquence, ne nécessitent pas d’engagements pluriannuels. Elle relève que, s’il est vrai que le FEOGA peut participer au financement d’investissements, aux conditions des articles 2 et 11 du règlement précité, de tels investissements ne seraient toutefois pas des engagements pluriannuels, même s’ils peuvent être d’une ampleur telle que le financement s’opère par tranches. La Commission fournit un exemple de « dépenses pluriannuelles » tiré du règlement (CE) n° 952/97 du Conseil, du 20 mai 1997, concernant les groupements de producteurs et leurs unions (JO L 142, p. 30). L’article 10 de ce règlement montrerait clairement que l’action d’aide à des groupements de producteurs entraîne des obligations financières sur plusieurs années.

58      Selon la Commission, la circonstance que l’article 4, paragraphe 1, du règlement n° 2603/1999 mentionne les règlements nos 867/90 et 951/97 ne signifie pas que son paragraphe 3 s’applique de ce fait aux dépenses effectuées en vertu des règlements précités. La Commission fait observer que ledit paragraphe 1 énumère tous les règlements qui prévoient un financement communautaire pour la période de programmation 1994-1999 et qui peuvent faire l’objet de mesures transitoires qui seraient celles énoncées soit au paragraphe 2, soit au paragraphe 3, soit dans les deux paragraphes dudit article 4.

59      La Commission fait encore observer qu’une acceptation plus large de la notion de « dépenses pluriannuelles » présenterait le risque que les États membres contournent la date limite du 31 décembre 2001 fixée pour l’éligibilité des dépenses : il leur suffirait de prévoir que les paiements s’effectuent par tranches pour faire en sorte que les dépenses effectuées après cette date soient également financées par le FEOGA. La Commission précise que, du moment que l’article 4, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement n° 2603/1999 prévoit que les dépenses effectuées avant le 1er janvier 2002 sont financées par la section « Orientation » du FEOGA, cela confirme que les dépenses effectuées après la date limite du 31 décembre 2001 ne peuvent plus être admises au bénéfice d’un financement par le FEOGA, sauf dans les cas exceptionnels prévus par l’article 4, paragraphe 2, second alinéa, et paragraphe 3, de ce même règlement.

60      La Commission souligne que le Royaume des Pays-Bas a recours à l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999, non en raison du caractère pluriannuel des dépenses en cause, mais parce que les paiements effectués par l’organisme payeur néerlandais peu après le 1er janvier 2002 ne pouvaient plus être déclarés à la section « Orientation » du FEOGA. Toutefois, dans une note adressée aux États membres le 4 août 2001, la Commission aurait affirmé avoir déclaré que, à la date limite du 31 décembre 2001, les déclarations finales de dépenses éligibles, faites par les bénéficiaires finaux, devaient parvenir à l’organisme payeur, qui, à son tour, pouvait effectuer les paiements auxdits bénéficiaires après le 1er janvier 2002, mais avant le 1er juillet suivant, date limite pour l’introduction par les organismes payeurs des demandes de paiement auprès d’elle. Par conséquent, l’organisme payeur néerlandais aurait eu la possibilité de déclarer les dépenses en question auprès de la section « Orientation » du FEOGA, grâce à l’assouplissement introduit par la Commission par rapport au texte du règlement, et ce afin de remédier aux problèmes que le Royaume des Pays-Bas avait également rencontrés.

 Appréciation du Tribunal

61      Il résulte du considérant 5 du règlement n° 1258/1999 que « la responsabilité du contrôle des dépenses du FEOGA, section ‘Garantie’, incombe, en premier lieu, aux États membres » et que « la Commission ne peut financer les dépenses que lorsque les conditions dans lesquelles les paiements et les contrôles ont été effectués offrent toutes les assurances nécessaires quant à la conformité aux règles communautaires ».

62      Il y a lieu de souligner que, selon une jurisprudence constante, l’article 8, paragraphe 1, du règlement n° 1258/1999, qui constitue, dans ce domaine particulier, une expression de l’obligation de coopération loyale instituée à l’article 10 CE, impose aux États membres l’obligation générale de prendre les mesures nécessaires pour s’assurer de la réalité et de la régularité des opérations financées par le FEOGA, de prévenir et de poursuivre les irrégularités et de récupérer les sommes perdues à la suite d’irrégularités ou de négligences, même si l’acte communautaire spécifique ne prévoit pas expressément l’adoption de telle ou telle mesure de contrôle (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 9 janvier 2003, Grèce/Commission, C‑157/00, Rec. p. I‑153, points 11 et 12).

63      C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient de vérifier si les dépenses, écartées du financement par la Commission dans la décision attaquée, avaient été régulièrement déclarées à la section « Garantie » du FEOGA.

64      Le Royaume des Pays‑Bas fait valoir que, en adoptant la décision attaquée, la Commission a méconnu l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999. La Commission estime que les dépenses en question ne sont pas des « dépenses pluriannuelles » et ne pouvaient donc être déclarées à la section « Garantie » du FEOGA en application de la disposition précitée.

65      Dès lors, il y a lieu de déterminer l’étendue de la notion de « dépenses pluriannuelles » et de vérifier si les dépenses déclarées par le Royaume des Pays‑Bas constituent de telles dépenses.

66      Selon le considérant 2 du règlement n° 2603/1999, l’objectif de ce règlement est « de faciliter par des règles transitoires le passage des régimes de soutien existants au nouveau régime de soutien au développement rural, afin d’éviter tous retards ou difficultés dans la mise en œuvre du soutien au développement rural au cours de la période de transition ».

67      L’article 4 du règlement n° 2603/1999 vise à permettre, dans la phase de transition, le déroulement régulier des paiements des dépenses liées aux engagements contractés avant le 1er janvier 2000 et pour lesquels des dépenses sont encourues par les États membres avant ou après le 1er janvier 2002. Ainsi :

–        les paiements liés aux engagements contractés par les États membres avant le 1er janvier 2000, date d’application du nouveau régime, continuent à être financés selon l’ancien régime, à savoir par la section « Orientation » du FEOGA, lorsque des dépenses sont encourues par les États membres avant le 1er janvier 2002 (article 4, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement n° 2603/1999) ;

–        toutefois, si, pour ces mêmes actions, les crédits sont épuisés ou insuffisants, certains paiements, parmi lesquels sont pris en compte ceux relatifs aux dépenses pluriannuelles, peuvent être intégrés dans la programmation du développement rural pour la période 2000‑2006 et financés par la section « Garantie » du FEOGA (article 4, paragraphe 2, second alinéa, du règlement n° 2603/1999) ;

–        en revanche, si des dépenses pluriannuelles sont encourues par les États membres après le 1er janvier 2002, le soutien communautaire pour les engagements contractés avant le 1er janvier 2000 sera financé par la section « Garantie » du FEOGA (article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999).

68      Il s’ensuit que le règlement n° 2603/1999 vise à ce que, d’une part, la date limite du 31 décembre 2001, pour la réalisation des actions approuvées, soit respectée et, d’autre part, les engagements de paiement contractés et approuvés pendant la période de programmation 1994-1999, mais toujours en cours après le 1er janvier 2002, puissent être honorés.

69      Par ailleurs, le règlement n° 2055/2001, modifiant l’article 4, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 2603/1999, indique, au considérant 2, que, afin de ne pas entraîner une sous‑utilisation significative des crédits du FEOGA, section « Orientation », il est préférable de retenir comme date limite pour le financement des dépenses par la section « Orientation » au lieu de la section « Garantie » du FEOGA, non la date d’introduction par l’organisme payeur de la demande de paiement à la Commission, comme c’était le cas avant la modification introduite par le règlement n° 2055/2001, mais le moment auquel les dépenses sont encourues par les États membres.

70      Les « dépenses encourues par les États membres » sont celles auxquelles les États membres s’exposent en conséquence des engagements qu’ils ont pris. Il ne s’agit donc pas de dépenses déjà payées, mais de dépenses exigibles, qui naissent du fait que les bénéficiaires finaux ont adressé à l’organisme payeur la déclaration finale pour obtenir le versement du soutien financier convenu pour une action approuvée dans le passé. Ainsi, les dépenses encourues par les États membres avant le 1er janvier 2002 sont financées par le FEOGA, section « Orientation », bien que l’organisme payeur n’ait pas encore introduit la demande de paiement auprès de la Commission.

71      En l’espèce, dans le cadre de la période de programmation 1994-1999, les actions et les programmes approuvés devaient être achevés avant le 31 décembre 2001, date à laquelle les bénéficiaires finaux devaient présenter la déclaration finale auprès de l’organisme payeur national. Ce dernier devait rembourser les bénéficiaires finaux et introduire la demande de paiement auprès de la Commission.

72      Or, l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 2603/1999 prévoit que les paiements liés aux engagements contractés par les États membres avant le 1er janvier 2000 et pour lesquels des dépenses sont encourues par les États membres avant le 1er janvier 2002 sont déclarés auprès du FEOGA, section « Orientation », même si l’organisme payeur national n’a pas encore, à cette date, remboursé ces paiements ni introduit la demande auprès de la Commission, ce qui correspond à l’objectif de la disposition susmentionnée, tel qu’il a été précisé au point 69 ci-dessus.

73      Par voie de conséquence, eu égard à la répartition des compétences entre la section « Orientation » et la section « Garantie » du FEOGA, qui est prévue à l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 2603/1999, c’est donc à juste titre que, dans la décision attaquée, la Commission a écarté du financement les dépenses en cause, celles-ci n’ayant pas été régulièrement déclarées à la section ‘Garantie’ du FEOGA. 

74      En ce qui concerne l’application en l’espèce de l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999, la Commission soutient que cette disposition introduit une ‘exception’ par rapport au paragraphe 2 de cet article, s’agissant des « dépenses pluriannuelles ». Le financement serait effectué par la section « Garantie » du FEOGA lorsqu’il s’agit d’un soutien pour les dépenses pluriannuelles liées à des actions pour lesquelles des dépenses sont encourues par les États membres après le 1er janvier 2002.

75      Selon le Royaume des Pays-Bas, les « dépenses pluriannuelles » seraient en l’espèce celles pour lesquelles les engagements ont été contractés pendant la période de programmation 1994‑1999 et dont les paiements aux bénéficiaires finaux ont été effectués par l’organisme payeur lors de la période de programmation suivante, à savoir après le 1er janvier 2002.

76      Le Tribunal considère que cette dernière interprétation n’est pas correcte. En effet, ainsi qu’il a été précisé au point 71 ci-dessus, les dépenses relatives aux actions pour lesquelles une déclaration finale a été adressée à l’organisme payeur au 31 décembre 2001 sont financées par la section « Orientation », même si l’organisme payeur n’a pas encore remboursé lesdites dépenses.

77      Dès lors, des dépenses ne peuvent être définies comme des « dépenses pluriannuelles » du simple fait que l’organisme payeur a procédé au paiement après le 1er janvier 2002, ainsi que le Royaume des Pays-Bas le soutient. Ainsi que cela a été précisé au point 71 ci-dessus, des dépenses doivent être déclarées à la section ‘Orientation’ du FEOGA, dès lors que celles-ci sont encourues par les États membres avant le 1er janvier 2002.

78      En revanche, il convient de considérer que des dépenses sont des « dépenses pluriannuelles » lorsqu’elles sont liées à une action prévue au cours de la période de programmation 1994-1999, mais pour lesquelles il existe un engagement d’octroyer un concours pendant une période suivant la période de paiement fixée par la décision d’approbation du programme.

79      La Commission a fourni un exemple de « dépenses pluriannuelles » tiré de l’article 10 du règlement n° 952/97. Cet article prévoit que les États membres accordent aux groupements et aux unions reconnus, au titre des trois années suivant la date de leur reconnaissance, des aides pour encourager leur constitution et faciliter leur fonctionnement administratif. Le montant de ces aides peut être versé en cinq ans. Cela signifie, par exemple, que, si l’aide était versée sur une période de cinq ans, commençant à courir en 1998, soit pendant la période de programmation 1994-1999, la disposition en cause permettrait de s’assurer que les engagements contractés puissent être respectés, y compris après la période de programmation, alors même que la période de cinq ans débutant en 1998 se terminerait en 2003, à savoir au cours d’une autre période de programmation.

80      Or, ainsi que la Commission l’a fait valoir à juste titre, pour les actions dont les dépenses ont été déclarées à la section « Garantie » en l’espèce, le Royaume des Pays-Bas n’a fourni aucun élément de nature à démontrer qu’il s’agissait de « dépenses pluriannuelles », telles qu’elles ont été définies aux points 76 à 78 ci-dessus. Dans ce contexte, en l’absence de preuve de l’existence d’un engagement de l’État membre à fournir son soutien sur plusieurs années, compte tenu de l’irrégularité constatée, la Commission a valablement pu exclure du financement par le FEOGA, section « Garantie », les dépenses qui font l’objet de la décision attaquée.

81      S’agissant des dépenses liées à des programmes approuvés sur la base du règlement n° 951/97, le Royaume des Pays-Bas allègue que ces dépenses sont des « dépenses pluriannuelles », puisque, étant donné la nature des programmes d’investissement, il est question de projets pluriannuels, pour lesquels les États membres contractent des engagements en vue d’accorder un soutien sur plusieurs années. À ce propos, il convient de relever qu’il ressort de l’article 3 du règlement n° 951/97 que le délai de réalisation des plans devait en général couvrir une période de trois à six ans. Toutefois, il convient de distinguer, d’une part, le temps nécessaire au bénéficiaire final pour achever un plan ou une action approuvés et, d’autre part, l’engagement pris par un État membre d’étaler son soutien sur plusieurs années, ce qui comporte, pour l’État membre concerné, l’obligation de respecter l’engagement pris de payer des dépenses sur plusieurs années, comme c’est le cas dans l’exemple fourni par la Commission et tiré du règlement n° 952/97. Il ressort de la lecture de l’article 4 du règlement n° 2603/1999 que la notion de « dépenses pluriannuelles » vise les dépenses que les États membres se sont engagés à payer sur plusieurs années et ne fait pas référence à la durée qui est nécessaire aux bénéficiaires finaux pour achever les plans ou les actions approuvés.

82      L’argument du Royaume des Pays-Bas selon lequel l’interprétation de la Commission aurait pour conséquence que des projets déjà approuvés, bien qu’ils satisfassent aux conditions de financement et aient été achevés à temps, ne pourraient plus être déclarés en vertu des dispositions transitoires contenues dans le règlement n° 2603/1999, ne saurait prospérer. En effet, les dépenses relatives aux projets ou actions approuvés dans le cadre de la période de programmation 1994-1999, pour lesquelles une déclaration finale avait été adressée à l’organisme payeur au 31 décembre 2001, ont pu être financées par le FEOGA, section « Orientation ».

83      S’agissant de la discussion que les parties ont eue quant au délai dans lequel l’organisme payeur devait, une fois la déclaration finale reçue des bénéficiaires finaux, effectuer le remboursement et introduire la demande de paiement auprès de la Commission, conformément à une note du 4 août 2001, note que la Commission affirme avoir adressée aux États membres, il convient de constater que cet argument doit être écarté comme inopérant, à défaut d’avoir une quelconque incidence sur l’interprétation de l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999.

84      Eu égard à ce qui précède, le présent moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l’article 44, paragraphe 2, du règlement n° 1257/1999, ainsi que du principe de protection de la confiance légitime

 Arguments des parties

85      Le Royaume des Pays-Bas fait observer que, en lui reprochant d’avoir déclaré les dépenses en question au titre de la section « Garantie » du FEOGA au lieu de les déclarer auprès de la section « Orientation » de celui-ci, la Commission a méconnu, d’une part, l’article 44, paragraphe 2, du règlement n° 1257/1999 et, d’autre part, le principe de protection de la confiance légitime, en ce que, en approuvant le « Plan de développement rural 2000-2006 », elle les avait déjà expressément approuvées.

86      Le Royaume des Pays-Bas souligne que, par la décision C (2000) 2751 final du 28 septembre 2000, la Commission avait approuvé le « Plan de développement rural 2000-2006 » présenté par les autorités néerlandaises qui, en vertu de l’article 35 du règlement n° 1257/1999 et de l’article 1er du règlement n° 1258/1999, est financé par la section « Garantie » du FEOGA. Or, l’article 2 de la décision relative au « Plan de développement rural 2000-2006 » prévoirait que la contribution de la section « Garantie » du FEOGA est d’un montant maximal de 417 millions d’euros, dont 4,59 millions d’euros pour les années 2002 et 2003, ce qui signifie, selon le Royaume des Pays-Bas, qu’il est question de « dépenses pluriannuelles » à déclarer au titre de la section « Garantie » du FEOGA.

87      En outre, l’article 2, paragraphe 2, sous b), de la décision relative au « Plan de développement rural 2000-2006 » disposerait que « [f]igurent également dans le montant total mentionné dans le tableau financier général indicatif de l’annexe 1 les dépenses afférentes aux actions de développement rural qui ont été approuvées avant le 1er janvier 2000 et qui sont intégrées dans la nouvelle programmation en vertu de l’article 4, paragraphe 2, du règlement […] n° 2603/1999 ». Selon le Royaume des Pays-Bas, ce tableau fait également référence à des « dépenses pluriannuelles » au sens de l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999. La notion de « dépenses pluriannuelles » utilisée à l’article 2, paragraphe 2, sous b), de la décision relative au « Plan de développement rural 2000-2006 » serait, en effet, identique à celle figurant audit article 4, paragraphe 3. Par conséquent, s’il peut être considéré que la Commission a approuvé les dépenses déclarées dans le cadre du programme concerné en 2002 et en 2003 au titre de la section « Garantie » du FEOGA, la décision attaquée serait en contradiction avec cette approbation en ce qui concerne les engagements pris avant le 1er janvier 2000.

88      S’agissant du moyen tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime, la décision relative au « Plan de développement rural 2000-2006 » aurait été adoptée à la suite d’une « concertation approfondie » entre les autorités néerlandaises et la Commission et cette dernière aurait donné son accord à la déclaration des dépenses en cause au titre de la section « Garantie » du FEOGA. Par conséquent, le Royaume des Pays-Bas aurait été en droit d’escompter que la procédure qu’il avait suivie pour effectuer les déclarations en cause était la bonne. La décision attaquée aurait donc été adoptée en violation du principe de protection de la confiance légitime.

89      La Commission conteste les arguments du Royaume des Pays-Bas et rétorque que, conformément à l’article 44, paragraphe 2, du règlement n° 1257/1999, la Commission apprécie les plans proposés par les États membres en fonction de leur cohérence avec le règlement lui‑même. La Commission souligne également que, si, en vertu de l’article 53 de ce même règlement, des mesures transitoires peuvent faire partie de plans de développement rural et de documents de programmation, ces mesures ne sont pas précisées dans le détail, parce qu’elles ne constituent pas l’essentiel des projets de développement rural.

90      S’agissant de l’article 2, paragraphe 2, sous b), de la décision relative au « Plan de développement rural 2000-2006 » (voir point 87 ci-dessus), selon la Commission, il ressort du renvoi à l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 2603/1999 qui y est opéré que cette disposition vise les dépenses afférentes à des actions approuvées durant la période de programmation précédente pour lesquelles il n’y avait pas de crédits suffisants dans le cadre du FEOGA, section « Orientation ». En revanche, la décision précitée ne contiendrait aucun renvoi à l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999. Par conséquent, les dépenses relevant de cette dernière disposition n’auraient pas été approuvées par la Commission.

91      En outre, la Commission soutient que, au moment où elle a approuvé le document de programmation, elle n’avait pas connaissance du contenu concret des mesures transitoires, qui n’ont pas été précisées plus en détail dans le plan. Par conséquent, la Commission conteste que l’approbation dudit document de programmation ait également valu approbation desdites dépenses en tant que « dépenses pluriannuelles » au sens de l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999. En outre, il découlerait du règlement n° 1258/1999 que la Commission doit toujours apprécier par la suite la légalité des dépenses en faveur du développement rural, même si les actions concernées ont été approuvées dans le cadre du document de programmation.

92      S’agissant de la prétendue violation du principe de protection de la confiance légitime, la Commission l’exclut, en s’appuyant sur la jurisprudence constante selon laquelle ce principe ne peut être invoqué en l’absence d’assurances précises par l’administration, de telles assurances précises faisant pour le moins défaut en l’espèce, puisque les mesures transitoires ne sont évoquées qu’en termes généraux dans la décision sur le « Plan de développement rural 2000-2006 » ainsi que dans le document de programmation qui en constitue le fondement. Il ne serait nulle part indiqué expressément que certaines dépenses sont reconnues comme des « dépenses pluriannuelles » au sens de l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999. Il ne saurait donc y avoir violation du principe de confiance légitime.

 Appréciation du Tribunal

93      Le Royaume des Pays-Bas reproche, en substance, à la Commission d’avoir considéré, dans la décision attaquée, que certaines dépenses ne pouvaient être déclarées au titre de la section « Garantie » du FEOGA, conformément à l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999, alors que les mêmes dépenses avaient déjà été approuvées dans le « Plan de développement rural 2000-2006 » au titre de l’article 44, paragraphe 2, du règlement n° 1257/1999.

94      À cet égard, il y a lieu de relever que, ainsi qu’il a été expliqué ci‑dessus dans le cadre de l’examen du premier moyen, dans la décision attaquée, les dépenses en cause, dont la Commission a considéré dans la décision attaquée qu’elles ne pouvaient être financées par le FEOGA, section « Garantie », avaient été déclarées par les autorités néerlandaises comme « dépenses pluriannuelles » au sens de l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999, alors que, ainsi que la Commission l’a relevé à juste titre, la décision approuvant le « Plan de développement rural 2000-2006 » fait état de dépenses intégrées dans la nouvelle programmation en vertu de l’article 4, paragraphe 2, second alinéa, du règlement n° 2603/1999, à savoir des dépenses afférentes à des actions approuvées durant la période de programmation précédente pour lesquelles il n’y avait pas de crédits suffisants dans le cadre du FEOGA, section « Orientation ».

95      Force est de constater que les paragraphes 2 et 3 de l’article 4 du règlement n° 2603/1999 visent des situations différentes. L’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 2603/1999 concerne les paiements liés aux engagements contractés par les États membres avant le 1er janvier 2000 et pour lesquels des dépenses sont encourues par les États membres avant le 1er janvier 2002, le second alinéa de cette disposition prévoyant expressément que ces paiements pourront être intégrés dans la programmation du développement rural pour la période 2000-2006 et financés par la section « Garantie » du FEOGA lorsque les crédits de la section « Orientation » sont épuisés ou insuffisants. En revanche, l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999 vise les dépenses pluriannuelles liées aux actions pour lesquelles des dépenses sont encourues par les États membres après le 1er janvier 2002.

96      Dans ce contexte, le renvoi à l’article 4, paragraphe 2, du règlement n° 2603/1999, contenu dans la décision relative au « Plan de développement rural 2000-2006 », ne peut être considéré comme couvrant également l’article 4, paragraphe 3, de ce même règlement, ces deux dispositions conservant leur autonomie et régissant des situations différentes, même si elles font référence à une même notion de « dépenses pluriannuelles ».

97      En tout état de cause, ainsi qu’il a été souligné par la Commission, même à supposer qu’il faille admettre, comme le Royaume des Pays-Bas le soutient, que le poste de dépenses pour les mesures transitoires, mentionné dans la décision relative au « Plan de développement rural 2000-2006 », porte sur des « dépenses pluriannuelles » au sens de l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999, il convient de constater que le contrôle opéré par la Commission au moment de l’approbation d’un plan d’investissement est différent de celui qu’elle opère lorsqu’elle vérifie la légalité des dépenses exposées. En effet, la Commission doit apprécier les plans proposés par les États membres en fonction de leur cohérence avec le règlement lui‑même. Si cette cohérence est constatée, elle approuve les documents de programmation en matière de développement rural. En outre, il ressort du règlement n° 1258/1999 que la Commission doit toujours apprécier la légalité des dépenses en faveur du développement rural au moment de l’apurement des comptes, même si elle a déjà approuvé auparavant le plan d’investissement dans son ensemble.

98      Il y a lieu de conclure que le fait d’approuver un plan d’investissement, lorsque le contrôle de la Commission est limité à la cohérence dudit plan par rapport au règlement n° 1258/1999, ne peut tenir lieu d’approbation implicite de certaines dépenses antérieures et propres à une mesure transitoire, liée au passage de l’ancien au nouveau régime de soutien au développement rural.

99      S’agissant du grief tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime, il convient de rappeler la règle selon laquelle le FEOGA ne finance que les interventions effectuées conformément aux dispositions communautaires dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles (arrêts de la Cour du 6 mars 2001, Pays-Bas/Commission, C‑278/98, Rec. p. I‑1501, point 38, et du 8 mai 2003, Espagne/Commission, C‑349/97, Rec. p. I‑3851, point 45). En outre, conformément à une jurisprudence constante, la naissance de la confiance légitime implique que des assurances précises et conformes aux dispositions applicables aient été données par une personne habilitée à le faire (voir, en ce sens, arrêts du Tribunal 6 juillet 1999, Forvass/Commission, T‑203/97, RecFP p. I‑A‑129 et II‑705, point 70, et du 30 juin 2005, Branco/Commission, T‑347/03, Rec. p. II‑2555, point 102).

100    En l’espèce, il ne ressort pas des éléments du dossier que la Commission a fourni une quelconque assurance au Royaume des Pays-Bas s’agissant de la circonstance qu’il aurait pu bénéficier du concours financier communautaire concerné. Force est donc de constater que le Royaume des Pays-Bas n’apporte aucun élément de nature à établir que la Commission aurait adopté un comportement susceptible d’être interprété comme signifiant que, en approuvant le plan d’investissement 2000-2006, elle aurait approuvé en même temps les dépenses qui ont été écartées du soutien communautaire dans la décision attaquée.

101    Eu égard à ce qui précède, le deuxième moyen doit être rejeté comme non fondé.

 Sur les troisième et quatrième moyens, tirés de la violation de l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999 et de l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70 ainsi que de la méconnaissance du principe de proportionnalité

 Arguments des parties

102    Le Royaume des Pays-Bas fait valoir à titre subsidiaire que la Commission ne peut pas imposer une « correction financière intégrale », si le FEOGA n’a pas subi de préjudice financier résultant de la procédure suivie par les autorités néerlandaises. En effet, lorsque la Commission décide des dépenses à écarter du financement communautaire, elle devrait agir au regard, notamment, de l’importance de la non-conformité constatée aux règles communautaires, en tenant compte de la nature et de la gravité de l’infraction, ainsi que du préjudice financier causé à la Communauté.

103    Or, il ressortirait de l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70 et de l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999, que la Commission ne peut écarter une dépense du financement que s’il existe un risque réel de pertes, ainsi qu’il ressortirait également des conclusions rendues par l’avocat général Jacobs sous l’arrêt de la Cour du 9 septembre 2004, Grèce/Commission (C‑332/01, Rec. p. I‑7699, I‑7703, point 19), dans lesquelles celui-ci aurait indiqué que le taux de correction doit clairement être mis en relation avec la perte probable et qu’il doit exister une carence grave dans l’application de règles communautaires explicites, qui doit exposer le FEOGA à un risque réel de pertes ou d’irrégularités.

104    Le Royaume des Pays-Bas estime que tel n’est pas le cas en l’espèce. Il ne serait pas contesté que les fonds du FEOGA ont été correctement redistribués et que celui-ci n’a subi aucun préjudice financier, ni qu’aucune partie concernée n’a tiré un avantage du fait que les dépenses effectuées par l’organisme payeur néerlandais après le 31 décembre 2001, pour des projets approuvés dans le cadre du programme concerné, ont été déclarées par les autorités néerlandaises auprès de la section « Garantie » du FEOGA. Ce fait a été confirmé par l’organe de conciliation, dans son rapport final du 5 mai 2006, excluant l’absence de risque réel de pertes pour le FEOGA. Au contraire, ce seraient les autorités néerlandaises qui auraient été désavantagées par la procédure qu’elles ont suivie, étant donné que près de 200 millions d’euros restaient encore, à ce moment, disponibles pour le Royaume des Pays-Bas au titre de la section « Orientation » et que les fonds disponibles, ou les 5,67 millions d’euros litigieux, au titre de la section « Garantie », auraient pu être affectés à d’autres mesures.

105    Le Royaume des Pays-Bas fait également observer que la procédure suivie en l’espèce pour mettre les dépenses à la charge de la section « Garantie » tient à l’interprétation retenue par la Commission de la notion de « dépenses pluriannuelles ». Or, cette interprétation s’appuierait sur une notion qui n’était pas définie dans les règles transitoires et dont la Commission n’a précisé la portée que deux à trois ans après les dépenses en question. Cette circonstance justifierait que, au moment de déclarer les dépenses en cause, les autorités néerlandaises étaient fondées à croire que la procédure suivie était la bonne, ce qui permettrait de distinguer le cas d’espèce de situations où les autorités nationales se sont simplement trompées de procédure.

106    Le Royaume des Pays-Bas soutient que le remboursement intégral du concours financier octroyé est contraire au principe de proportionnalité. Le Royaume des Pays-Bas invoque la jurisprudence de la Cour selon laquelle ce n’est que lorsqu’il est établi que le bénéficiaire d’un concours du FEOGA a violé une obligation fondamentale pour le bon fonctionnement de celui‑ci que la suppression totale de ce concours n’est, en principe, pas disproportionnée (arrêt de la Cour du 24 janvier 2002, Conserve Italia/Commission, C‑500/99 P, Rec. p. I‑867, point 101, et arrêt du Tribunal du 11 décembre 2003, Conserve Italia/Commission, T‑305/00, Rec. p. II‑5659, point 113). En l’espèce, la Commission aurait imposé une correction financière pour la totalité du concours octroyé, alors que les fonds du FEOGA auraient été correctement redistribués et la procédure suivie par les autorités néerlandaises n’aurait fait courir aucun risque réel pour le bon fonctionnement du FEOGA. Par conséquent, une telle correction, appliquée à concurrence de la totalité du concours octroyé, serait disproportionnée.

107    La Commission estime que les dépenses que les autorités néerlandaises ont déclarées en tant que « dépenses pluriannuelles » au sens de l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999 ne relèvent pas de cette notion et ne peuvent être financées par la section « Garantie » du FEOGA. La Cour aurait déclaré à plusieurs reprises que des dépenses qui n’ont pas été effectuées conformément aux règles en vigueur ne peuvent bénéficier d’un financement communautaire. Il serait indifférent à cet égard que l’État membre ait commis une erreur excusable ou non. La Commission affirme ne disposer à cet égard d’aucune marge d’appréciation, même dans les cas où les pratiques nationales incompatibles avec le droit communautaire entraîneraient des effets favorables sur les dépenses inscrites à d’autres postes du FEOGA : elle serait tenue d’exclure ces dépenses du financement. Le principe de proportionnalité ne pourrait donc jouer aucun rôle à cet égard.

108    S’agissant des conclusions rendues par l’avocat général M. Jacobs sous l’arrêt du 9 septembre 2004, Grèce/Commission, point 103 supra, invoquées par le Royaume des Pays-Bas, elles ne seraient pas pertinentes en l’espèce. Au point concerné, l’avocat général viserait des orientations définies par la Commission dans un document spécifique (document de la Commission n° VI/5330/97, du 23 décembre 1997, intitulé « Orientations concernant le calcul des conséquences financières lors de la préparation de la décision d’apurement des comptes du FEOGA-Garantie »), orientations qui s’appliquent aux déficiences constatées dans le cadre des mesures de contrôle des États membres. Ce serait dans ce contexte qu’il faudrait replacer les conclusions de l’avocat général qui ne sont pas pertinentes pour le présent recours. Dans le cas d’espèce, il ne s’agirait pas de déficiences des mesures de contrôle, mais de dépenses qui n’auraient pas été déclarées conformément aux règles communautaires applicables.

109    La Commission estime ne pas avoir à démontrer l’éventuelle existence d’un préjudice financier pour le FEOGA, dans le cas où des règles communautaires n’ont pas été observées lors de la déclaration de certaines dépenses. Par ailleurs, le FEOGA aurait subi un préjudice financier en l’espèce. Il ressortirait du tableau joint à la lettre des autorités néerlandaises du 2 février 2004 qu’une grande partie des paiements de l’organisme payeur néerlandais ont été versés après le 30 juin 2002, qui serait la « date limite pour les paiements ». Selon la Commission, les paiements effectués après cette date ne pouvaient donc plus être mis à la charge du FEOGA, section « Orientation » et s’ils étaient maintenant mis à la charge de la section « Garantie » de celui-ci la Communauté subirait un préjudice financier.

110    La Commission explique qu’une compensation des dépenses déclarées au titre de la section « Garantie » par celles non déclarées au titre de la section « Orientation » n’est pas une opération neutre pour le FEOGA, qui subirait un préjudice financier. Les sections « Orientation » et « Garantie » du FEOGA seraient totalement distinctes sur le plan budgétaire : la section « Garantie » relèverait de la sous-section B 1 du budget communautaire tandis que la section « Orientation » relèverait de sa sous-section B 2. La Commission en conclut, conformément au principe de spécialité prévu par règlement financier, qu’un poste budgétaire ne peut être utilisé que pour les fins qui y sont limitativement décrites. Or, dans le budget pour l’exercice 2002, les mesures transitoires visées par le règlement n° 2603/1999 seraient mentionnées sous le « poste B1-4092 », alors que les dépenses pour l’achèvement des programmes, antérieurs à la période de programmation 2000-2006, seraient mentionnées sous le « poste B2-105 » avec un renvoi au règlement (CEE) n° 4256/88 du Conseil, du 19 décembre 1988, portant dispositions d’application du règlement n° 2052/88 en ce qui concerne le FEOGA, section « Orientation » (JO L 374, p. 25). Une compensation entre les deux postes ne serait par conséquent pas possible.

111    La Commission rappelle que, selon une jurisprudence constante, le principe de proportionnalité exige que les actes des institutions communautaires ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause. Puisque l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70 et l’article 7, paragraphe 4, du règlement n° 1258/1999 visent à préserver les intérêts financiers de la Communauté, le bon fonctionnement du système d’aide financière communautaire ainsi qu’une saine gestion financière, il ne saurait être affirmé que la correction financière, fondée sur ces dispositions et nécessaire pour atteindre ces objectifs, soit contraire au principe de proportionnalité.

112    La Commission considère que l’affirmation du Royaume des Pays-Bas selon laquelle elle aurait continuellement adapté la définition de la notion de « dépenses pluriannuelles » au cours de la procédure – à supposer que ce fait soit démontré, ce que la Commission réfute – est totalement dénuée de pertinence pour déterminer si la décision attaquée a été adoptée en méconnaissance du principe de proportionnalité ou non. Pour répondre à cette question, il s’agirait simplement de savoir si la correction financière appliquée à l’intégralité des dépenses déclarées par les autorités néerlandaises comme des « dépenses pluriannuelles » ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour le bon fonctionnement du FEOGA. À cet effet, la définition retenue par la Commission dans le rapport de synthèse serait la seule qui importe et les éventuelles versions différentes qu’elle aurait utilisées au cours de la procédure n’auraient aucune importance. Cette définition signifierait qu’aucune des dépenses déclarées en tant que « dépenses pluriannuelles » ne peut être considérée comme régulière au sens de l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999.

 Appréciation du Tribunal

113    À titre liminaire, il convient de relever que, selon une jurisprudence constante, le FEOGA ne finance que les interventions effectuées conformément aux dispositions communautaires dans le cadre de l’organisation commune des marchés agricoles (arrêt de la Cour du 20 septembre 2001, Belgique/Commission, C‑263/98, Rec. p. I‑6063, point 35). Par conséquent, il laisse à la charge des États membres tout autre montant versé, notamment les montants que les autorités nationales se sont à tort estimées autorisées à payer dans le cadre de cette organisation commune (voir, par analogie, arrêt de la Cour du 18 avril 2002, Belgique/Commission, C‑332/00, Rec. p. I‑3609, points 44 et 45 ; voir également, en ce sens et par analogie, arrêt de la Cour du 24 mars 1988, Royaume‑Uni/Commission, 347/85, Rec. p. 1749, points 52 et 53).

114    S’agissant du troisième moyen, ainsi qu’il a été constaté au point 80 ci-dessus, le Royaume des Pays-Bas a déclaré les dépenses en cause à la section « Garantie » du FEOGA, au lieu de les déclarer à la section « Orientation », sur un fondement incorrect, ce qui a eu pour conséquence, en application de l’article 5, paragraphe 2, sous c), du règlement n° 729/70, leur exclusion du financement communautaire, et ce indépendamment de la constatation d’irrégularités ou de négligences de la part des autorités néerlandaises.

115    L’argument du Royaume des Pays-Bas selon lequel la Commission aurait dû se conformer au rapport final de l’organe de conciliation du 5 mai 2006, dans lequel ce dernier a estimé que le fait d’avoir déclaré les dépenses en cause à la section « Garantie », et non à la section « Orientation », a eu pour effet que les fonds du FEOGA avaient été redistribués sans qu’aucune des parties ait tiré un avantage de cette opération, ne saurait être retenu. Il convient en effet de constater que, ainsi qu’il ressort du point 8 ci-dessus, les conclusions de l’organe de conciliation ne sont pas contraignantes pour la Commission, ce qui n’est par ailleurs pas contesté par le Royaume des Pays-Bas. Par conséquent, le troisième moyen doit être rejeté comme non fondé.

116    Par son quatrième moyen, le Royaume des Pays‑Bas soutient, en substance, que, en imposant le remboursement intégral du concours financier, la Commission n’a pas respecté le principe de proportionnalité et a dépassé les limites de son pouvoir discrétionnaire.

117    Le principe de proportionnalité, consacré au troisième alinéa de l’article 5 CE, exige que les actes des institutions communautaires ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire pour atteindre le but recherché (arrêt de la Cour du 17 mai 1984, Denkavit Nederland, 15/83, Rec. p. 2171, point 25, et arrêt du Tribunal du 19 juin 1997, Air Inter/Commission, T‑260/94, Rec. p. II‑997, point 144).

118    Ainsi qu’il a été constaté au point 80 ci-dessus, le Royaume des Pays-Bas a irrégulièrement déclaré les dépenses en cause à la section « Garantie » du FEOGA et, ayant constaté l’irrégularité, la Commission a donc pu valablement adopter la décision attaquée. Dans ce contexte, le Royaume des Pays-Bas n’a fourni aucun indice visant à faire constater par le Tribunal que la décision attaquée, par laquelle la Commission a appliqué une correction financière pour l’intégralité des dépenses en cause, était entachée d’une erreur manifeste ou d’un détournement ou d’un excès de pouvoir, mais il s’est limité à soutenir que les fonds du FEOGA avaient été correctement redistribués. De plus, afin de garantir l’efficacité du régime de soutien au développement rural et la réalisation de ses objectifs, il importe que les mesures éligibles au soutien soient conformes à la législation communautaire et que les États membres coopèrent à ce résultat par le respect du cadre normatif contenu dans les règlements fixant des règles pour le soutien au développement rural, résultat qui ne serait pas atteint si les États membres pouvaient opérer des redistributions des fonds en violation des dispositions fixées pour les concours financiers accordés par les différentes sections du FEOGA.

119    Pour importante que puisse être la correction financière litigieuse, qui a été appliquée par la Commission à l’intégralité des dépenses en cause, il convient de conclure que la Commission est restée dans les limites des pouvoirs qui lui sont conférés et n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation. Par conséquent, le quatrième moyen doit être rejeté.

 Sur le cinquième moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

 Arguments des parties

120    Le Royaume des Pays-Bas fait également valoir à titre subsidiaire que la Commission a violé l’obligation de motivation en n’indiquant pas la raison pour laquelle elle considère le montant de la correction financière comme n’étant pas disproportionné, malgré le fait que l’organe de conciliation ait expressément invité les services de la Commission à vérifier si le montant de la correction était conforme au principe de proportionnalité.

121    En effet, nonobstant l’invitation faite par l’organe de conciliation, il ressortirait du rapport de synthèse que la Commission a simplement confirmé sa position en ce qui concerne la correction financière, sans donner aucune explication au maintien de cette position ni aucune raison supplémentaire de celui-ci. En procédant de cette façon, elle n’aurait pas respecté l’obligation de motivation.

122    La Commission rappelle la jurisprudence de la Cour, selon laquelle la motivation d’une décision doit être considérée comme suffisante dès lors que l’État destinataire a été étroitement associé au processus d’élaboration de la décision et qu’il connaissait les raisons pour lesquelles elle estimait ne pas devoir mettre à la charge du FEOGA les sommes litigieuses (arrêts de la Cour du 14 avril 2005, Portugal/Commission, C‑335/03, Rec. p. I‑2955, point 84, et du 19 juin 2003, Espagne/Commission, C‑329/00, Rec. p. I‑6103, point 83). La Commission se reporte, en conséquence, aux raisons, exposées dans le rapport de synthèse, justifiant l’impossibilité de mettre les dépenses en cause à la charge de la section « Garantie » du FEOGA.

123    Quant à l’invitation de l’organe de conciliation, la Commission fait valoir son manque de clarté, l’organe de conciliation ayant invité la Commission, d’une part, à vérifier si la correction envisagée respectait le principe de proportionnalité et, d’autre part, à en apprécier le caractère potentiellement disproportionné des conséquences. Selon la Commission, face à un tel manque de clarté, la Commission n’était pas tenue de motiver davantage la décision attaquée.

 Appréciation du Tribunal

124    Selon une jurisprudence constante, la motivation exigée par l’article 253 CE doit faire apparaître, d’une façon claire et non équivoque, le raisonnement de l’institution auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et de défendre leurs droits et au juge d’exercer son contrôle. Il ne saurait toutefois être exigé que la motivation spécifie tous les différents éléments de fait et de droit pertinents. En effet, la question de savoir si la motivation d’une décision satisfait à ces exigences doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 18 janvier 2000, Mehibas Dordtselaan/Commission, T‑290/97, Rec. p. II‑15, point 92, et la jurisprudence citée).

125    Ainsi que la Commission l’a rappelé, dans le contexte particulier de l’élaboration des décisions relatives à l’apurement des comptes, il est de jurisprudence constante que la motivation d’une décision doit être considérée comme suffisante dès lors que l’État destinataire a été étroitement associé au processus d’élaboration de cette décision et qu’il connaissait les raisons pour lesquelles la Commission estimait ne pas devoir mettre à la charge du FEOGA les sommes litigieuses (voir, en ce sens, arrêts du 20 septembre 2001, Belgique/Commission, point 113 supra, point 98 ; du 9 septembre 2004, Grèce/Commission, point 103 supra, point 67, et Pays-Bas/Commission, point 97 supra, point 47).

126    Or, il ressort de la lecture de la décision attaquée que la Commission a exposé les raisons pour lesquelles elle considérait que les dépenses en cause n’étaient pas des « dépenses pluriannuelles » et ne pouvaient pas, en conséquence, être déclarées à la section « Garantie » du FEOGA, en application de l’article 4, paragraphe 3, du règlement n° 2603/1999. En effet, ainsi qu’il a été exposé au point 38 ci-dessus, le rapport de synthèse, auquel la décision attaquée renvoie de façon explicite (considérant 6 de la décision attaquée), indique clairement le raisonnement suivi par la Commission pour arriver à une telle conclusion.

127    Par ailleurs, le fait que le Royaume des Pays-Bas a pu développer et organiser sa défense, tant au cours de la procédure administrative que par ses mémoires dans le cadre de la présente instance, atteste que les autorités néerlandaises en ont bien eu connaissance. Au surplus, le Tribunal constate qu’il a pu exercer son contrôle sur la légalité de la décision attaquée.

128    Dans un tel contexte, force est de reconnaître que la motivation donnée par la Commission était suffisante pour permettre au Royaume des Pays-Bas de connaître clairement les motifs de la décision attaquée et de préparer sa défense. Par conséquent, le présent moyen doit être rejeté comme non fondé.

129    Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, le recours du Royaume des Pays-Bas doit être rejeté dans son intégralité.

 Sur les dépens

130    Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le Royaume des Pays-Bas ayant succombé, il y a lieu de le condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Le Royaume des Pays-Bas est condamné aux dépens.

Forwood

Šváby

Moavero Milanesi

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 30 septembre 2009.

Signatures


* Langue de procédure : le néerlandais.