Language of document : ECLI:EU:T:2016:495

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre)

15 septembre 2016 (*) (1)

« Régime linguistique – Avis de concours généraux pour le recrutement d’administrateurs – Choix de la deuxième langue parmi trois langues – Règlement n° 1 – Article 1erquinquies, paragraphe 1, article 27 et article 28, sous f), du statut – Principe de non-discrimination – Proportionnalité »

Dans les affaires T‑353/14 et T‑17/15,

République italienne, représentée par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. P. Gentili, avvocato dello Stato,

partie requérante,

soutenue par

République de Lituanie, représentée par M. D. Kriaučiūnas et Mme V. Čepaitė, en qualité d’agents,

partie intervenante dans l’affaire T‑17/15,

contre

Commission européenne, représentée initialement, dans les affaires T‑353/14 et T‑17/15, par MM. J. Currall et G. Gattinara ainsi que, dans l’affaire T‑17/15, par Mme F. Simonetti, puis par M. Gattinara et Mme Simonetti, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet, dans l’affaire T‑353/14, une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de l’avis de concours général EPSO/AD/276/14, pour la constitution d’une liste de réserve d’administrateurs (JO 2014, C 74 A, p. 4), et, dans l’affaire T‑17/15, une demande fondée sur l’article 263 TFUE et tendant à l’annulation de l’avis de concours général EPSO/AD/294/14, pour la constitution d’une liste de réserve d’administrateurs dans le domaine de la protection des données pour le Contrôleur européen de la protection des données (JO 2014, C 391 A, p. 1),

LE TRIBUNAL (huitième chambre),

composé de M. D. Gratsias (rapporteur), président, Mme M. Kancheva et M. C. Wetter, juges,

greffier : M. J. Palacio González, administrateur principal,

vu la phase écrite de la procédure et à la suite de l’audience du 17 mars 2016,

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        L’Office européen de sélection du personnel (EPSO) est un organisme interinstitutionnel, créé en vertu de la décision 2002/620/CE du Parlement européen, du Conseil, de la Commission, de la Cour de justice, de la Cour des comptes, du Comité économique et social, du Comité des régions et du médiateur, du 25 juillet 2002, portant création de l’EPSO (JO 2002, L 197, p. 53). En application de l’article 2, troisième alinéa, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci‑après le « statut »), dans sa version antérieure au règlement (CE, Euratom) n° 723/2004 du Conseil, du 22 mars 2004, modifiant le statut (JO 2004, L 124, p. 1), les institutions signataires de cette décision ont, par son article 2, paragraphe 1, confié à l’EPSO l’exercice des pouvoirs de sélection qui sont dévolus, par l’article 30, premier alinéa, du statut et par l’annexe III du statut à leurs autorités investies du pouvoir de nomination. En outre, selon l’article 2, paragraphe 2, de ladite décision, l’EPSO peut exercer les pouvoirs visés au paragraphe 1 lorsqu’ils sont dévolus à l’autorité investie du pouvoir de nomination d’un organisme, organe ou agence institué par les traités ou sur la base de ceux-ci, sur demande de ce dernier. L’article 4 de la même décision prévoit que, alors que, en application de l’article 91 bis du statut, les demandes et les réclamations relatives à l’exercice des pouvoirs dévolus à l’EPSO sont introduites auprès de celui-ci, tout recours dans ces domaines est dirigé contre la Commission européenne.

2        Le 1er mars 2014, l’EPSO a publié au Journal officiel de l’Union européenne (JO 2014, C 60 A, p. 1) les dispositions générales applicables aux concours généraux (ci-après les « dispositions générales »).

3        Au point 1.3 des dispositions générales, intitulé « Éligibilité », il est indiqué, sous le titre « Connaissances linguistiques », ce qui suit :

« Selon le concours, il vous sera demandé d’apporter la preuve de vos connaissances des langues officielles de l’UE. En règle générale, vous devrez disposer de connaissances solides dans l’une des langues officielles de l’UE et de connaissances satisfaisantes dans une autre. Toutefois, l’avis de concours peut imposer des exigences plus strictes (c’est notamment le cas pour les profils de linguistes). Sauf spécification contraire dans l’avis de concours, le choix de la deuxième langue sera normalement limité à l’anglais, au français ou à l’allemand. »

4        Dans la note en bas de page n° 7 des dispositions générales, il est précisé que « [c]onformément à l’arrêt rendu par la [Cour de justice] dans l’affaire C‑566/10 P, Italie/Commission, les institutions de l’[Union européenne] doivent formuler les raisons pour lesquelles elles restreignent le choix de la deuxième langue à un petit nombre de langues officielles de l’UE ».

5        Au même point 1.3 des dispositions générales, il est, par ailleurs, indiqué ce qui suit :

« Lors de l’organisation de concours généraux, EPSO applique les “Lignes directrices générales sur l’utilisation des langues dans les concours EPSO” adoptées le 15 mai 2013 par le collège des chefs d’administration.

Dans la pratique, les institutions européennes utilisent depuis longtemps l’anglais, le français et l’allemand principalement pour la communication interne et ce sont également ces langues qui sont le plus souvent nécessaires pour communiquer avec le monde extérieur et gérer les dossiers.

Les options en matière de deuxième langue pour les concours ont été définies dans l’intérêt du service et requièrent des nouvelles recrues qu’elles soient immédiatement opérationnelles et capables de communiquer efficacement dans le cadre de leurs tâches quotidiennes, sans quoi le bon fonctionnement des institutions pourrait être gravement compromis.

Pour garantir l’égalité de traitement de tous les candidats, tous – y compris ceux dont la première langue officielle est l’une des trois langues en question – doivent passer certains tests dans leur deuxième langue, choisie parmi ces trois langues. Apprécier des compétences spécifiques par ce moyen permet aux institutions d’évaluer dans quelle mesure les candidats sont capables d’être immédiatement opérationnels dans un environnement qui correspond étroitement à ce que serait la réalité de leur travail. Rien de tout ceci n’affecte la possibilité d’une formation linguistique ultérieure pour que le personnel puisse travailler dans une troisième langue, comme l’exige l’article 45, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires.

[…] »

6        Les lignes directrices mentionnées au point 5 ci-dessus sont annexées aux dispositions générales (annexe 2), ainsi qu’il ressort de la note en bas de page n° 8 de ces dernières.

7        Au point 2.1.4 des dispositions générales, intitulé « Complétez votre acte de candidature électronique », il est précisé que « [t]outes les parties [de l’acte de candidature], y compris l’“évaluateur de talent”, doivent être complétées en anglais, en français ou en allemand, sauf spécification contraire dans l’avis de concours ».

8        Au point 3.1.1 des dispositions générales, intitulé « Communications d’EPSO adressées aux candidats », le paragraphe 1 indique ce qui suit :

« Vos résultats et toutes les convocations vous seront adressés uniquement via votre compte EPSO en anglais, en français ou en allemand. »

9        Le point 3.1.2 des dispositions générales, intitulé « Communications des candidats adressées à l’EPSO », est formulé comme suit :

« Avant de prendre contact avec EPSO, assurez-vous d’avoir lu attentivement toutes les informations contenues dans l’avis de concours, dans les présentes règles générales et sur le site Internet d’EPSO, notamment les “questions les plus fréquentes […]”.

Les coordonnées se trouvent sur le site Internet […] Dans toute correspondance relative à une candidature, les candidats sont tenus de mentionner leur nom tel qu’il apparaît dans leur candidature, le numéro du concours et leur numéro de candidature.

EPSO veille à appliquer les principes du code de bonne conduite administrative […] Toutefois, en vertu de ces mêmes principes, EPSO se réserve le droit de cesser tout échange de correspondance si celle qu’il reçoit des candidats est abusive, car répétitive, outrageante et/ou sans objet. »

10      Au point 4 du code de bonne conduite administrative pour le personnel de la Commission dans ses relations avec le public, annexé à la décision 2000/633/CE, CECA, Euratom de la Commission, du 17 octobre 2000, modifiant son règlement intérieur (JO 2000, L 267, p. 63), auquel il est fait référence au point 9 ci-dessus (ci-après le « code de bonne conduite administrative »), il est précisé, sous le titre « Correspondance », ce qui suit :

« Conformément à l’article 21 du traité instituant la Communauté européenne, la Commission répond aux lettres qu’elle reçoit dans la langue de la correspondance initiale, à condition qu’il s’agisse de l’une des langues officielles de la Communauté. »

11      L’annexe 2 des dispositions générales, intitulée « Orientation générale du collège des chefs d’administration sur l’utilisation des langues dans le cadre des concours EPSO » (ci-après l’« orientation générale »), indique ce qui suit :

« En règle générale, l’utilisation des langues dans le cadre des concours EPSO est confirmée comme suit :

–        éléments stables du site web de l’Office dans toutes les langues officielles,

–        publication dans toutes les langues officielles des avis de concours, y compris ceux destinés aux linguistes et ceux organisés dans le cadre de l’élargissement, ainsi que des dispositions générales applicables aux concours généraux,

–        tests/épreuves organisés dans toutes les langues officielles :

–        tests d’accès (raisonnement verbal et numérique),

–        tests de compréhension linguistique pour le concours de traducteurs,

–        tests préliminaires de traduction pour les concours de juristes linguistes,

–        tests intermédiaires d’interprétation (sur PC) pour les concours d’interprètes,

–        épreuves de compétence (traduction ou interprétation) pour les concours de linguistes.

[…]

–        les épreuves des centres d’évaluation seront organisées uniquement dans la deuxième langue des candidats au choix parmi l’anglais, le français et l’allemand.

Par analogie, en ce qui concerne les sélections d’agents contractuels organisées par l’Office, les appels à manifestation d’intérêt sont publiés dans toutes les langues officielles.

La limitation du choix de la deuxième langue se justifie par plusieurs facteurs.

Premièrement, l’intérêt du service exige que les nouveaux recrutés soient immédiatement opérationnels et capables d’accomplir efficacement les tâches dans le domaine ou la fonction pour lequel/laquelle ils sont recrutés.

L’anglais, le français et l’allemand demeurent les langues les plus largement employées au sein des institutions. Ils constituent traditionnellement les langues des délibérations dans les réunions entre membres des institutions. En outre, ces trois langues sont les langues véhiculaires utilisées le plus souvent pour la communication interne et externe, comme le confirment les statistiques concernant les langues sources des textes traduits par les services de traduction des institutions.

Au vu des besoins réels des services des institutions en matière d’utilisation des langues dans la communication interne et externe, il est nécessaire d’imposer comme critère de sélection en vertu de l’article 27, paragraphe 1, du statut, une connaissance satisfaisante d’une de ces trois langues et de la tester en simulant une situation de travail réelle. En outre, la connaissance d’une troisième langue prévue par l’article 45, paragraphe 2, du statut ne remplace pas la connaissance d’une de ces trois langues au moment du recrutement.

Deuxièmement, la limitation du choix des langues pour les étapes ultérieures des concours se justifie par la nature des épreuves. Conformément à l’article 27 du statut, les autorités investies du pouvoir de nomination (AIPN) des institutions ont décidé de modifier les procédures de sélection en introduisant, à partir de 2010, des méthodes d’évaluation fondées sur les compétences permettant de mieux prévoir si les candidats seront en mesure d’exercer leurs fonctions.

De nombreuses recherches scientifiques approfondies démontrent que le recours à des centres d’évaluation qui simulent des situations professionnelles réelles est le meilleur moyen de prévoir les performances. Cette méthode est utilisée au niveau mondial comme étant la méthode d’évaluation la plus efficace. Une telle évaluation est essentielle pour les institutions, étant donné la durée des carrières et la mobilité au sein des institutions. Sur la base d’un cadre de compétences déterminé par les AIPN, un certain nombre d’exercices pertinents sont sélectionnés pour évaluer les compétences souhaitées. Or, le recours à cette méthode exige, afin de permettre une évaluation homogène des candidats et la communication directe entre ceux-ci, les évaluateurs et les autres candidats également soumis à cet exercice, que l’épreuve organisée au centre d’évaluation se déroule dans une langue véhiculaire ou, dans certains cas, dans la seule langue principale du concours. Dans le premier cas, la langue véhiculaire doit être choisie parmi les langues que les candidats sont les plus susceptibles de maîtriser déjà.

Cela étant posé, il convient ensuite de prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter toute discrimination entre les candidats. Ainsi, tous les candidats doivent subir cette épreuve dans leur seconde langue, mais puisque cette langue doit également être véhiculaire, le choix doit être limité. Étant donné que les usages historiques décrits ci-dessus correspondent toujours à la réalité interne actuelle, ce choix doit être limité aux langues française, anglaise et allemande. Les centres d’évaluation ne procèdent à aucune évaluation des connaissances linguistiques, et une connaissance satisfaisante de l’une de ces trois langues en tant que deuxième langue suffit largement pour passer les tests (conformément aux exigences minimales énoncées à l’article 28 du statut). Ce niveau de connaissances linguistiques est entièrement proportionné aux besoins réels du service décrits ci-dessus.

Le recours à l’anglais, au français ou à l’allemand en tant que deuxième langue durant les étapes ultérieures des procédures de concours n’implique aucune discrimination sur la base de la langue maternelle. Il ne s’agit pas d’une restriction de l’utilisation de la langue maternelle. L’obligation faite aux candidats de choisir une deuxième langue, différente de leur première langue (normalement la langue maternelle ou équivalente), parmi l’anglais, le français et l’allemand permet de les comparer sur une base homogène. Il y a également lieu de rappeler qu’une connaissance suffisante de la deuxième langue repose surtout sur les efforts personnels des candidats.

De toute façon, cette exigence est proportionnée aux besoins réels du service. En effet, la limitation du choix de la deuxième langue reflète les connaissances linguistiques de la population européenne. L’anglais, le français et l’allemand ne sont pas seulement les langues de plusieurs États membres de l’Union européenne, mais également celles les plus largement maîtrisées en tant que langue étrangère. Ce sont les langues les plus étudiées en tant que langues étrangères ainsi que celles que la population européenne considère comme les plus utiles à apprendre. Les besoins réels du service semblent donc raisonnablement refléter les capacités linguistiques que l’on peut attendre des candidats, d’autant plus que la connaissance linguistique au sens strict (erreurs de grammaire, d’orthographe ou de vocabulaire) n’est pas évaluée dans le cadre des tests portant sur les compétences. Ainsi, le fait de limiter le choix de la deuxième langue aux trois langues en question ne crée aucun obstacle disproportionné à l’accès des citoyens aux concours. En effet, au vu des informations disponibles, cela correspond assez bien aux habitudes et aux attentes des citoyens.

Le caractère proportionnel et non discriminatoire de la limitation du choix de la deuxième langue pour certaines étapes du concours est corroboré par des statistiques pertinentes. Ainsi, l’anglais, le français et l’allemand étaient aussi les deuxièmes langues les plus choisies par les candidats aux concours, lorsque ceux-ci avaient la possibilité de choisir leur deuxième langue parmi les onze langues officielles dans le cadre des grands concours généraux EU-25 pour administrateurs et assistants, en 2005. Les statistiques relatives aux concours après la réforme de 2010 ne démontrent aucune distorsion en faveur des ressortissants des pays dont l’anglais, le français ou l’allemand est la langue officielle. De même, il s’avère que ces trois langues continuent d’être choisies en tant que deuxième langue par un nombre non négligeable de candidats, comme le montrent les statistiques des épreuves du cycle AD 2010.

Pour les mêmes raisons, il semble justifié d’exiger des candidats qu’ils choisissent l’une de ces langues pour communiquer avec EPSO et compléter l’évaluateur de talent.

Par conséquent, pour trouver un équilibre entre l’intérêt du service et les aptitudes des candidats, il convient d’organiser certaines épreuves dans un nombre réduit de langues de l’Union afin de garantir que les futurs lauréats possèdent des connaissances suffisantes dans une combinaison de langues qui leur permette d’exercer efficacement leurs fonctions et afin d’appliquer des méthodes de sélection fondées sur l’évaluation des performances. Les avis de concours et les guides destinés aux candidats étant publiés dans les 24 langues de l’Union et les candidats ayant la possibilité de se soumettre à l’importante première phase des concours dans la langue maternelle de leur choix parmi les 24 langues de l’Union, il semble qu’un juste équilibre s’établisse entre le principe du multilinguisme et la non-discrimination sur la base de la langue, d’une part, et l’intérêt du service, d’autre part.

Un choix devrait donc être opéré cas par cas en tenant compte à la fois du régime linguistique adopté par le conseil d’administration d’EPSO et des besoins spécifiques des institutions de recruter des lauréats immédiatement opérationnels.

Dans ce contexte, il existe deux cas de figure généraux :

–        en premier lieu, des profils généraux ou bien des profils spécifiques pour lesquels l’élément principal de la sélection, en plus des compétences générales, demeure l’expertise ou l’expérience dans un domaine ou une fonction en particulier. Ici, le besoin essentiel est de pouvoir travailler et communiquer dans un contexte multilingue où la maîtrise des langues les plus utilisées au sein des institutions justifie un choix limité parmi les langues de l’Union au moment de la sélection.

–        en second lieu, des profils pour lesquels la connaissance d’une ou de plusieurs langues est d’une importance particulière, comme dans le cas des linguistes ou d’autres profils où les procédures de sélection sont organisées par langue. Dans ce contexte, en plus d’une évaluation des compétences générales comme décrites au premier cas de figure ci-dessus, d’autres épreuves de compétences spécifiques doivent être organisées dans la (les) langue(s) en question.

Même dans le contexte d’une telle orientation, toute décision limitant le nombre de langues des concours devrait être examinée pour chaque concours afin de répondre aux besoins particuliers des institutions pour le(s) profil(s) en question. »

12      Le 13 mars 2014, l’EPSO a publié au Journal officiel de l’Union européenne l’avis de concours général EPSO/AD/276/14, pour la constitution d’une liste de réserve d’administrateurs (JO 2014, C 74 A, p. 4). Le 6 novembre 2014, l’EPSO a publié au Journal officiel de l’Union européenne l’avis de concours général EPSO/AD/294/14, pour la constitution d’une liste de réserve d’administrateurs dans le domaine de la protection des données pour le Contrôleur européen de la protection des données (JO 2014, C 391 A, p. 1). Il s’agit des avis de concours dont l’annulation est demandée par les présents recours (ci-après, pris ensemble, les « avis attaqués »).

13      Il est indiqué dans la partie introductive de chacun des avis attaqués que les dispositions générales en font « partie intégrante ».

14      Au titre des conditions d’admission aux concours concernés par les avis attaqués, ces derniers exigent une connaissance approfondie d’une des langues officielles de l’Union, cette langue étant désignée comme la « langue 1 » du concours et une connaissance satisfaisante d’une deuxième langue, désignée comme « langue 2 » du concours, à choisir par le candidat parmi l’allemand, l’anglais ou le français, étant précisé qu’elle doit obligatoirement être différente de la langue choisie par le candidat en tant que langue 1 (partie III, point 2.3, des avis attaqués).

15      Des précisions sont fournies au point 2.3 de la partie III des avis attaqués, s’agissant de la limitation du choix de la langue 2 aux seules trois langues susmentionnées. L’avis de concours général EPSO/AD/276/14 relève, à cet égard, ce qui suit :

« Au vu de l’arrêt [du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, Rec, EU:C:2012:752)], les institutions de l’Union souhaitent, dans le cadre du présent concours, motiver la limitation du choix de la deuxième langue à un nombre restreint de langues officielles de l’Union.

Les candidats sont donc informés que les deuxièmes langues retenues aux fins du présent concours ont été définies conformément à l’intérêt des services, qui exige que les nouveaux recrutés soient immédiatement opérationnels et capables de communiquer efficacement dans leur travail quotidien. Le fonctionnement effectif des institutions risquerait autrement d’être gravement entravé.

Eu égard à la longue pratique des institutions de l’Union en ce qui concerne les langues de communication interne, et compte tenu des besoins des services en matière de communication externe et de traitement des dossiers, l’anglais, le français et l’allemand demeurent les langues les plus largement employées. En outre, l’anglais, le français et l’allemand sont les deuxièmes langues les plus répandues dans l’Union et les plus étudiées en tant que deuxièmes langues. Cela confirme le niveau d’études et les compétences professionnelles qui peuvent être actuellement attendus des candidats à des postes au sein des institutions de l’Union, à savoir la maîtrise d’au moins l’une de ces langues. Par conséquent, dans la mise en balance de l’intérêt du service et des aptitudes des candidats, compte tenu du domaine particulier du présent concours, il est justifié d’organiser des épreuves dans ces trois langues afin de garantir que, quelle que soit leur première langue officielle, tous les candidats maîtriseront au moins l’une de ces trois langues officielles au niveau d’une langue de travail. L’appréciation des compétences spécifiques permet ainsi aux institutions de l’Union d’évaluer l’aptitude des candidats à être immédiatement opérationnels dans un environnement proche de celui dans lequel ils seront appelés à travailler.

Pour les mêmes raisons, il est indiqué de limiter la langue de communication entre les candidats et l’institution, y inclus la langue dans laquelle les actes de candidature doivent être rédigés. D’ailleurs, cette exigence assure l’homogénéité [dans la comparaison des candidats et dans le contrôle de leurs actes de candidature].

En outre, dans un souci d’égalité de traitement, tout candidat, même s’il a l’une de ces trois langues comme première langue officielle, est tenu de passer certaines épreuves dans sa deuxième langue, à choisir parmi ces trois langues.

Ces dispositions ne portent pas atteinte à l’apprentissage ultérieur d’une troisième langue de travail conformément à l’article 45, paragraphe 2, du statut. »

16      L’avis de concours général EPSO/AD/294/14 fournit, en substance, les mêmes précisions.

17      La partie IV de l’avis de concours général EPSO/AD/276/14 prévoit l’organisation de tests d’accès, effectués sur ordinateur. Il s’agit d’épreuves de raisonnement verbal [test a)], de raisonnement numérique [test b)], de raisonnement abstrait [test c)] et de jugement situationnel [test d)]. Au point 3 de cette partie de l’avis, il est précisé que la langue des tests a) à c) est la langue 1 du concours, alors que la langue du test d) est la langue 2 du concours.

18      Par ailleurs, la partie IV de l’avis de concours général EPSO/AD/294/14 prévoit également l’organisation de tests d’accès. Il s’agit d’épreuves de raisonnement verbal [test a)], de raisonnement numérique [test b)] et de raisonnement abstrait [test c)]. Au point 3 de cette partie de l’avis, il est précisé que la langue des tests a) à c) est la langue 1 du concours.

19      La partie V de l’avis de concours général EPSO/AD/294/14 définit la procédure d’admission au concours et de la sélection sur titres. Il y est précisé que l’examen des conditions générales et spécifiques et la sélection sur titres sont effectués dans un premier temps sur la base des déclarations des candidats faites dans l’acte de candidature. Les réponses des candidats aux questions relatives aux conditions générales et spécifiques sont traitées afin de déterminer s’ils font partie de la liste des candidats qui remplissent toutes les conditions d’admission au concours, conformément à ce qui est prévu au titre III de l’avis EPSO/AD/294/14. Ensuite, le jury procède, pour les candidats qui remplissent les conditions d’admission au concours concerné, à une sélection sur titres, afin d’identifier les candidats qui possèdent les qualifications les plus pertinentes, notamment en ce qui concerne leurs diplômes et leur expérience professionnelle, par rapport à la nature des fonctions et aux critères de sélection décrits dans l’avis EPSO/AD/294/14. Cette sélection s’effectue uniquement sur la base des déclarations des candidats faites dans l’onglet « évaluateur de talent », selon une notation établie dans la partie V, point 1, sous b), de l’avis EPSO/AD/294/14.

20      Les critères de sélection pris en considération par le jury dans le cadre de la sélection sur titres sont définis au point 2 de la partie V de l’avis EPSO/AD/294/14, comme suit :

« 1)      Un diplôme universitaire en droit européen ;

2)      Un diplôme universitaire comportant une spécialisation dans le domaine de la protection des données ;

3)      Une formation certifiée en matière de protection des données […] en plus des titres et diplômes requis pour l’accès au concours ;

4)      Expérience professionnelle d’au moins un an et demi en matière de protection des données acquise dans les institutions européennes ou dans une autorité nationale de la protection des données ou dans l’administration publique nationale en plus de celle requise pour l’accès au concours ;

5)      Expérience professionnelle en matière de rédaction d’avis, de décisions ou de conclusions devant la Cour de justice de l’Union européenne, relatifs à la législation européenne en matière de protection de données ;

6)      Expérience professionnelle en matière de rédaction de rapports relatifs aux contrôles préalables, consultations et plaintes en matière de protection des données ;

7)      Expérience professionnelle en matière de rédaction d’avis relatifs à la législation européenne en matière de protection des données […] ;

8)      Expérience professionnelle en matière d’enquêtes ou d’audit pour analyser le respect du traitement des données personnelles aux réglementations en vigueur ;

9)      Expérience professionnelle en matière de technologies modernes d’information et de la communication (TIC) afin de pouvoir évaluer l’impact de leur utilisation sur la protection des données. »

21      L’ultime étape des procédures de sélection concernées par les avis attaqués consiste en un « centre d’évaluation » (partie V de l’avis EPSO/AD/276/14 ; partie VI de l’avis EPSO/AD/294/14).

22      Au point 3 de la partie V de l’avis EPSO/AD/276/14, il est indiqué que la langue du centre d’évaluation est la langue 2 du concours.

23      Selon le point 2 de la partie VI de l’avis EPSO/AD/294/14, dans le cadre de l’épreuve du centre d’évaluation, les candidats seront soumis à trois types d’exercice, visant à évaluer :

–        leurs aptitudes en matière de raisonnement, par le biais d’un test de raisonnement verbal [test a)], d’un test de raisonnement numérique [test b)] et d’un test de raisonnement abstrait [test c)] ;

–        leurs compétences spécifiques, par le biais d’un entretien structuré sur les compétences dans le domaine [test d)] ;

–        leurs compétences générales, par le biais d’une étude de cas [test e)], d’un exercice de groupe [test f)] et d’un entretien structuré [test g)].

24      Il est indiqué, par ailleurs, au point 3 de la même partie de l’avis EPSO/AD/294/14, que les langues du centre d’évaluation seront la langue 1 du concours pour les tests a) à c) et la langue 2 du concours pour les tests d) à g).

 Procédure et conclusions des parties

25      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 23 mai 2014, la République italienne a introduit le recours dans l’affaire T‑353/14. Elle conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’avis EPSO/AD/276/14 ;

–        condamner la Commission aux dépens.

26      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme infondé ;

–        condamner la République italienne aux dépens.

27      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 15 janvier 2015, la République italienne a introduit le recours dans l’affaire T‑17/15.

28      Par acte déposé au greffe du Tribunal le 30 avril 2015, la République de Lituanie a demandé à intervenir au soutien des conclusions de la République italienne. Par ordonnance du 1er juin 2015, le président de la huitième chambre du Tribunal a admis cette intervention. La République de Lituanie a déposé son mémoire en intervention le 13 juillet 2015.

29      Dans l’affaire T‑17/15, la République italienne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler l’avis EPSO/AD/294/14 ;

–        condamner la Commission aux dépens.

30      La République de Lituanie soutient les conclusions de la République italienne tendant à l’annulation de l’avis attaqué dans l’affaire T‑17/15.

31      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme infondé ;

–        condamner la République italienne aux dépens ;

–        ordonner que la République de Lituanie supporte ses propres dépens.

32      Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (huitième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure dans les présentes affaires et de les joindre aux fins de cette dernière. Dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure du Tribunal, le Tribunal a demandé à la Commission de répondre par écrit à certaines questions. Celle-ci a déféré à cette demande dans le délai imparti.

33      Les parties principales ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 17 mars 2015, à laquelle la République de Lituanie n’a pas participé.

 En droit

34      Les parties principales ayant été entendues lors de l’audience à cet égard, le Tribunal décide de joindre les présentes affaires aux fins de la décision mettant fin à l’instance, conformément à l’article 68 du règlement de procédure.

35      À l’appui des recours, la République italienne invoque sept moyens, tirés, le premier, de la violation des articles 263, 264 et 266 TFUE ; le deuxième, de la violation de l’article 342 TFUE et des articles 1er et 6 du règlement n° 1 du Conseil, du 15 avril 1958, portant fixation du régime linguistique de la Communauté économique européenne (JO 1958, 17, p. 385), tel que modifié ; le troisième, de la violation de l’article 6, paragraphe 3, UE, de l’article 18 TFUE, de l’article 22 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, des articles 1er et 6 du règlement n° 1, de l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, de l’article 27, deuxième alinéa, et de l’article 28, sous f), du statut ainsi que de l’article 1er, paragraphes 2 et 3, de l’annexe III du statut ; le quatrième, de la violation de l’article 6, paragraphe 3, UE et du principe de protection de la confiance légitime ; le cinquième, d’un détournement de pouvoir ainsi que de la violation des « normes substantielles inhérentes à la nature et la finalité des avis de concours », en particulier de l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, de l’article 27, deuxième alinéa, de l’article 28, sous f), de l’article 34, paragraphe 3, et de l’article 45, paragraphe 1, du statut ainsi que du principe de proportionnalité ; le sixième, de la violation de l’article 18 TFUE, de l’article 24, quatrième alinéa, TFUE, de l’article 22 de la charte des droits fondamentaux, de l’article 2 du règlement n° 1 ainsi que de l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, du statut et, le septième, de la violation de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, des articles 1er et 6 du règlement n° 1, de l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, et de l’article 28, sous f), du statut, de l’article 1er, paragraphe 1, sous f), de l’annexe III du statut, du principe de proportionnalité ainsi que d’une « dénaturation des faits ».

36      Il convient de constater que, par ses moyens, la République italienne conteste la légalité de deux volets du régime linguistique des concours concernés par les avis attaqués tel qu’il est instauré, selon la République italienne, par ces derniers. Elle conteste, ainsi, les dispositions des avis attaqués qui limiteraient à l’allemand, à l’anglais et au français, d’une part, le choix de la deuxième langue desdits concours et, d’autre part, le choix de la langue pouvant être utilisée dans les échanges entre les candidats et l’EPSO.

37      Avant d’examiner, à la lumière des moyens invoqués par la République italienne, la légalité des deux volets des avis attaqués contestés par celle-ci, il y a lieu d’examiner la fin de non-recevoir opposée par la Commission, dans les mémoires en défense, à l’encontre de chacun des présents recours, sans toutefois soulever formellement une exception d’irrecevabilité.

 Sur la recevabilité

38      La Commission fait valoir, dans les mémoires en défense, que la République italienne n’a pas, en l’espèce, tenu compte de la publication, au Journal officiel de l’Union européenne, de l’orientation générale que la partie III des avis attaqués ne fait que mettre en œuvre et que la République italienne n’a jamais contesté, ni à titre principal, ni de manière incidente, ladite orientation générale. Les griefs de la République italienne devraient, ainsi, être rejetés comme irrecevables, « l’orientation générale n’ayant pas été contestée en temps utile ».

39      Dans les répliques, la République italienne avance que tant l’orientation générale que les dispositions générales constituent des actes par nature internes, ne relevant d’aucune des catégories d’actes attaquables de façon autonome, au sens de l’article 263 TFUE. À cet égard, les dispositions générales ne différeraient pas du « guide aux concours » les ayant précédées. Leur contenu n’aurait, ainsi, de valeur juridiquement contraignante qu’une fois effectivement intégré à un avis de concours. Plus spécifiquement, la base juridique des dispositions générales, publiées dans la série C du Journal officiel de l’Union européenne, n’y est pas indiquée, alors qu’une telle indication serait indispensable pour des actes de droit dérivé produisant des effets contraignants immédiats. Elle conclut que les dispositions en question n’ont pas de valeur juridique contraignante indépendamment des avis de concours qui s’y réfèrent.

40      Par ailleurs, il serait, en effet, précisé, dans l’orientation générale, que c’est uniquement « en règle générale » que la deuxième langue des candidats doit être choisie parmi l’anglais, l’allemand et le français. La République italienne conclut que, par conséquent, le régime linguistique du concours concerné par l’avis étant fixé par ce dernier, elle n’aurait pas pu le contester en demandant l’annulation de l’orientation générale.

41      La Commission allègue, dans les dupliques, que les critères mentionnés par la République italienne portent sur des aspects purement formels et n’ont aucun lien avec les effets des avis attaqués. Elle souligne qu’il n’existe qu’une seule réglementation juridiquement contraignante du régime linguistique des concours, totalement autonome des avis attaqués, celle figurant dans l’orientation générale et dans les dispositions générales. Les avis attaqués seraient pris « en stricte exécution » de l’orientation générale et ne feraient que « confirmer les dispositions » de cette dernière.

42      Le Tribunal déduit de l’argumentation avancée par la Commission dans les mémoires en défense et explicitée dans les mémoires en duplique ainsi que lors de l’audience que la fin de non-recevoir qu’elle présente est fondée sur la prémisse selon laquelle les avis attaqués constituent soit des actes confirmatifs, soit des actes de pure exécution des dispositions générales et de l’orientation générale. Pour répondre à l’argumentation présentée par la Commission, il est, par conséquent, nécessaire d’examiner la nature et la portée juridique desdits textes.

 Sur la nature et la portée juridique des dispositions générales et de l’orientation générale

43      Lors de l’audience, la République italienne a fait valoir que les dispositions générales et l’orientation générale constituaient de simples communications qui n’auraient d’effet contraignant qu’à l’égard de leur auteur, à savoir l’EPSO, en établissant une limite à son pouvoir discrétionnaire. La République italienne a, par ailleurs, soutenu que, s’il y avait lieu de considérer que les dispositions générales et l’orientation générale établissaient des règles contraignantes, s’appliquant de manière générale et abstraite aux concours organisés par l’EPSO, il s’agirait d’actes adoptés par une autorité n’étant pas compétente pour établir de telles règles.

44      Pour sa part, la Commission a précisé, lors de l’audience, que, en adoptant les dispositions générales et l’orientation générale, l’EPSO, représentant toutes les institutions de l’Union, avait défini des critères clairs, objectifs et prévisibles concernant le choix de la deuxième langue dans les concours organisés par celui-ci, au sens du point 91 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752). L’EPSO aurait adopté les actes susmentionnés en se fondant sur les articles 29 et 30 du statut et l’annexe III du statut qui lui reconnaissent la compétence d’organiser des procédures de concours. Lesdits textes contiendraient, par ailleurs, une appréciation momentanée des besoins linguistiques des institutions.

45      À la lecture des dispositions générales et de l’orientation générale, le Tribunal constate, à l’instar de la Commission, que des critères concernant le choix de la deuxième langue des concours organisés par l’EPSO et de la langue de communication entre les candidats et celui-ci en ressortent. En effet, il peut être déduit des dispositions générales que ce choix doit être opéré en tenant compte de la pratique des institutions de l’Union en matière de communication interne et externe et de gestion des dossiers, de l’intérêt du service ainsi que des besoins liés à l’organisation des concours et à l’évaluation des candidats (voir point 5 ci-dessus).

46      Il en va de même de l’orientation générale. Il y est fait, plus particulièrement, référence à l’intérêt du service, à la pratique des institutions de l’Union, aux besoins réels des services de celles-ci, à la nature des épreuves qui garantiraient l’évaluation optimale des candidats, aux connaissances linguistiques de la population européenne en général et, enfin, aux choix déjà opérés en matière linguistique par les candidats aux concours organisés précédemment par l’EPSO (voir point 11 ci-dessus).

47      Force est, néanmoins, de constater que les textes susmentionnés ne se contentent pas d’énoncer de tels critères. Les dispositions générales et l’orientation générale comprennent également une série d’appréciations selon lesquelles le choix de la deuxième langue des concours organisés par l’EPSO ainsi que de la langue de communication entre celui-ci et les candidats sera restreint à l’allemand, à l’anglais et au français. La Commission soutient, en substance, que ces appréciations font état du régime linguistique qui devrait, en principe, être celui de ces concours, si les critères annoncés dans les dispositions générales et l’orientation générale étaient appliqués au moment de leur adoption, sans référence à des procédures de concours spécifiques.

48      Il convient, dès lors, de répondre à la question de savoir si, au vu des appréciations mentionnées au point 47 ci-dessus, les dispositions générales et l’orientation générale doivent être interprétées comme établissant des règles contraignantes établissant le régime linguistique de tous les concours organisés par l’EPSO.

49      Une telle interprétation des textes susmentionnés ne saurait être admise. Selon la jurisprudence, pour apprécier si les textes en question visent à établir de telles règles contraignantes, il convient d’examiner leur contenu (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 20 mai 2010, Allemagne/Commission, T‑258/06, Rec, EU:T:2010:214, point 27 et jurisprudence citée). À défaut d’établir des obligations spécifiques ou nouvelles, la seule publication d’une communication n’est pas suffisante pour conclure que celle-ci constitue un acte susceptible de produire des effets de droit obligatoires (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 20 mai 2010, Allemagne/Commission, T‑258/06, Rec, EU:T:2010:214, point 31).

50      Or il ressort du libellé même desdits textes que, en les publiant, l’EPSO n’a pas arrêté de manière définitive le régime linguistique de l’ensemble des concours qu’il est chargé d’organiser. En effet, en dépit des appréciations mentionnées au point 47 ci-dessus, les dispositions générales et l’orientation générale réservent expressément le choix du régime linguistique de chaque concours à l’avis de concours qui sera adopté au moment de l’ouverture de la procédure qui y est afférente.

51      Ainsi, certes, au point 1.3 des dispositions générales, il est indiqué que le choix de la deuxième langue et de la langue dans laquelle seront rédigés les actes de candidature « sera normalement limité à l’anglais, au français ou à l’allemand ». Il y est, néanmoins, également indiqué que cela sera le cas « sauf spécification contraire dans l’avis de concours » (voir points 3 et 4 ci-dessus).

52      L’orientation générale est formulée dans des termes analogues. S’il y est indiqué que, en règle générale, la deuxième langue des concours ainsi que la langue de communication entre l’EPSO et les candidats sera l’anglais, le français ou l’allemand, il y est, pourtant, précisé que, même dans un tel contexte, « toute décision limitant le nombre de langues des concours devrait être examinée pour chaque concours, afin de répondre aux besoins particuliers des institutions » (voir point 11 ci-dessus). Partant, il ne saurait être considéré que les textes en cause en l’espèce établissent des obligations spécifiques ou nouvelles, au sens de la jurisprudence (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 20 mai 2010, Allemagne/Commission, T‑258/06, Rec, EU:T:2010:214, point 28 et jurisprudence citée).

53      Par ailleurs et en tout état de cause, les appréciations mentionnées au point 47 ci-dessus ne sauraient être interprétées comme établissant un régime linguistique applicable à l’ensemble des concours organisés par l’EPSO, étant donné qu’aucune disposition n’a accordé à ce dernier ou au collège des chefs d’administration la compétence d’établir un tel régime d’application générale ou d’adopter, à cet égard, des règles de principe auxquelles un avis de concours ne pourrait se soustraire qu’à titre exceptionnel (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 29 novembre 2011, Birkhoff/Commission, T‑10/11 P, EU:T:2011:699, points 30 et 31 et jurisprudence citée).

54      À cet égard, ainsi qu’il a été rappelé au point 1 du présent arrêt, selon l’article 2, paragraphes 1 et 2, de la décision 2002/620, l’EPSO exerce les pouvoirs de sélection dévolus par l’article 30, premier alinéa, du statut et par l’annexe III du statut aux autorités investies du pouvoir de nomination (ci-après les ou l’« AIPN ») des institutions signataires de la décision en cause ainsi que des organismes, organes ou agences de l’Union, sur demande de ces derniers.

55      Or, aucune de ces dispositions ou de celles invoquées par la Commission (voir point 44 ci-dessus) n’attribue à l’EPSO le pouvoir de poser des règles contraignantes générales et abstraites régissant pour le futur les concours organisés sur le fondement des dispositions du statut.

56      Certes, aux termes de l’article 7, paragraphe 1, de l’annexe III du statut, les institutions, après consultation du comité du statut, confient à l’EPSO la responsabilité de prendre les mesures nécessaires pour garantir l’application de normes uniformes dans les procédures de sélection des fonctionnaires. Toutefois, d’une part, au paragraphe 2, sous a) et b), dudit article, il est précisé que les tâches de l’EPSO, s’agissant des procédures de sélection des fonctionnaires, se limitent à organiser des concours généraux et à fournir un appui technique aux concours internes qu’organisent les institutions, à la demande de ces dernières. D’autre part, force est de constater que la disposition susmentionnée ne permet que de confier à l’EPSO la responsabilité de prendre des mesures d’application de normes uniformes et non celle d’adopter des normes contraignantes générales et abstraites. En tout état de cause, même à supposer que tel était le cas, la Commission n’a fait, ni dans ses écritures ni lors de l’audience, référence à un acte des institutions par lequel, après consultation du comité du statut, elles auraient confié à l’EPSO la responsabilité d’établir des règles contraignantes générales et abstraites en matière de régime linguistique des concours organisés par celui-ci.

57      Si les dispositions mentionnées aux points 54 à 56 ci-dessus n’attribuent pas à l’EPSO la compétence d’édicter des règles contraignantes s’agissant du régime linguistique des concours organisés par lui, l’EPSO n’est pas empêché, afin de garantir l’égalité de traitement et la sécurité juridique, d’adopter et de publier des actes tels que les dispositions générales et l’orientation générale visant à annoncer comment il entend faire usage, dans certaines situations, du pouvoir d’appréciation que ces dispositions lui reconnaissent. Néanmoins, l’EPSO n’est tenu par de tels textes que dans la mesure où ceux-ci ne s’écartent pas des règles de portée générale encadrant ses attributions et à condition que, en les adoptant, il ne renonce pas à l’exercice du pouvoir qui lui est reconnu dans l’appréciation des besoins des institutions et des organes de l’Union, y compris des besoins linguistiques de ces derniers, à l’occasion de l’organisation des différents concours (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 8 mars 2016, Grèce/Commission, C‑431/14 P, EU:C:2016:145, points 69 et 71 et jurisprudence citée).

58      Au vu de tout ce qui précède, il y a lieu de conclure que les dispositions générales et l’orientation générale doivent être interprétées comme constituant, tout au plus, des communications, au sens du point 91 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), qui annoncent des critères selon lesquels l’EPSO envisage de procéder au choix du régime linguistique des concours qu’il est chargé d’organiser.

59      C’est à la lumière de ces constatations qu’il convient d’examiner la nature juridique des avis attaqués afin de statuer sur la recevabilité des présents recours.

 Sur la nature juridique des avis attaqués

60      Ainsi qu’il a été exposé au point 42 ci-dessus, la Commission considère que les avis attaqués constituent soit des actes confirmatifs, soit des actes de pure exécution des dispositions générales et de l’orientation générale.

61      À cet égard, il y a lieu de rappeler, en premier lieu, que, ainsi que cela résulte du premier alinéa de l’article 263 TFUE, le recours en annulation est ouvert à l’égard de toutes les dispositions prises par les institutions de l’Union, quelles qu’en soient la nature ou la forme, qui visent à produire des effets de droit (voir arrêt du 6 avril 2000, Espagne/Commission, C‑443/97, EU:C:2000:190, point 27 et jurisprudence citée), c’est-à-dire qui apportent une modification de la situation juridique telle qu’elle existait avant leur adoption (voir, en ce sens, arrêt du 29 juin 1995, Espagne/Commission, C‑135/93, EU:C:1995:201, point 21).

62      Il ressort de cette jurisprudence qu’échappe au contrôle juridictionnel prévu à l’article 263 TFUE tout acte ne produisant pas d’effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du justiciable, tel que les actes confirmatifs et les actes de pure exécution [voir, en ce sens, ordonnance du 14 mai 2012, Sepracor Pharmaceuticals (Ireland)/Commission, C‑477/11 P, non publiée, EU:C:2012:292, point 52 et jurisprudence citée].

63      En ce qui concerne, plus spécifiquement, les actes confirmatifs, il résulte d’une jurisprudence constante qu’un acte est considéré comme purement confirmatif d’un acte individuel antérieur lorsqu’il ne contient aucun élément nouveau par rapport à ce dernier et n’a pas été précédé d’un réexamen de la situation de son destinataire (voir, en ce sens, arrêts du 7 février 2001, Inpesca/Commission, T‑186/98, EU:T:2001:42, point 44 ; du 6 mai 2009, M/EMEA, T‑12/08 P, EU:T:2009:143, point 47, et du 15 septembre 2011, CMB et Christof/Commission, T‑407/07, non publié, EU:T:2011:477, point 89). Cette jurisprudence est, par ailleurs, transposable au cas des actes qui ne sauraient être considérés comme étant des actes individuels (voir, en ce sens, arrêt du 13 novembre 2014, Espagne/Commission, T‑481/11, EU:T:2014:945, points 28 et 29 et jurisprudence citée), tels qu’un règlement ou un avis de concours (voir arrêt du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑295/13, non publié, EU:T:2015:997, point 76 et jurisprudence citée).

64      S’agissant des actes de pure exécution, il y a lieu de considérer que de tels actes ne créent pas de droits et d’obligations dans le chef de tiers, mais interviennent dans le cadre de l’exécution d’un acte antérieur qui vise à produire des effets juridiques contraignants, alors que tous les éléments de la norme posée par ce dernier acte ont déjà été définis et arrêtés (voir, en ce sens, arrêt du 20 novembre 2008, Italie/Commission, T‑185/05, EU:T:2008:519, points 51 à 53 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens et par analogie, conclusions de l’avocat général Cruz Villalón dans l’affaire Commission/Parlement et Conseil, C‑427/12, EU:C:2013:871, point 63).

65      Il convient de rappeler, en deuxième lieu, que, en vertu de l’article 1er, paragraphe 1, sous e), de l’annexe III du statut, un avis de concours, tel que les avis attaqués, doit spécifier, en cas de concours sur épreuves, la nature des examens et leur cotation respective. En effet, selon une jurisprudence constante, les termes de l’avis de concours constituent aussi bien le cadre de la légalité que le cadre d’appréciation pour le jury de concours. Par ailleurs, le rôle essentiel d’un avis de concours est d’informer les intéressés d’une façon aussi exacte que possible de la nature des conditions requises pour occuper le poste dont il s’agit afin de les mettre en mesure d’apprécier s’il y a lieu pour eux de faire acte de candidature (voir arrêt du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑295/13, non publié, EU:T:2015:997, point 49 et jurisprudence citée).

66      Partant, chaque avis de concours est adopté dans l’objectif d’instaurer les règles régissant la procédure de déroulement d’un ou de plusieurs concours spécifiques, dont il arrête, ainsi, le cadre normatif en fonction de l’objectif fixé par l’AIPN. C’est ce cadre normatif, instauré, le cas échéant, conformément aux règles de portée générale applicables à l’organisation des concours, qui régit la procédure du concours concerné, depuis le moment de la publication de l’avis en cause jusqu’à la publication de la liste de réserve comportant les noms des lauréats du concours concerné (voir, en ce sens, arrêt du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑295/13, non publié, EU:T:2015:997, point 50).

67      Au vu de ce qui vient d’être exposé, force est de constater qu’un avis de concours, tel que les avis attaqués, qui, en tenant compte des besoins spécifiques des institutions ou des organes de l’Union concernés, instaure le cadre normatif d’un concours spécifique, y compris son régime linguistique, et ainsi comporte des effets juridiques autonomes, ne saurait, en principe, être considéré comme étant un acte confirmatif ou un acte de pure exécution d’actes antérieurs. Si l’AIPN doit, le cas échéant, dans le cadre de l’exercice de ses fonctions consistant à l’adoption d’un avis de concours, respecter ou appliquer des règles contenues dans des actes de portée générale antérieurs, il n’en reste pas moins que le cadre normatif de chaque concours est instauré et spécifié par l’avis de concours correspondant qui précise, ainsi, les conditions requises pour occuper le ou les postes en cause.

68      En tout état de cause et même à considérer qu’un avis de concours puisse, en principe, être un acte confirmatif ou un acte de pure exécution d’actes l’ayant précédé, il ressort de la jurisprudence citée aux points 62 et 63 du présent arrêt qu’un acte ne saurait être considéré comme confirmatif ou purement exécutoire d’un acte antérieur que si ce dernier vise à produire des effets de droit. Or, ainsi qu’il a été exposé aux points 48 à 57 ci-dessus, cela n’est pas le cas des dispositions générales et de l’orientation générale.

69      En effet, il a été conclu au point 58 ci-dessus que les dispositions générales et l’orientation générale doivent être interprétées comme constituant, tout au plus, des communications, au sens du point 91 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), qui annoncent des critères selon lesquels l’EPSO envisage de procéder au choix du régime linguistique de chacun des concours qu’il est chargé d’organiser.

70      Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de conclure que les avis attaqués constituent des actes qui comportent des effets juridiques obligatoires quant au régime linguistique des concours en cause et constituent, ainsi, des actes attaquables. Le fait que, lors de leur adoption, l’EPSO a tenu compte des critères énoncés dans les dispositions générales et dans l’orientation générale, auxquels les avis attaqués renvoient expressément (voir point 13 ci-dessus), ne saurait remettre en cause cette constatation.

71      Partant, il convient de rejeter la fin de non-recevoir opposée par la Commission et de procéder à l’examen des présents recours au fond.

 Sur le fond

72      Ainsi qu’il a été exposé au point 36 ci-dessus, la République italienne, soutenue par la République de Lituanie dans l’affaire T‑17/15, conteste deux volets distincts des avis attaqués.

73      Il y a, dès lors, lieu d’examiner successivement, à la lumière des moyens invoqués et des arguments présentés par les parties, la légalité, d’une part, de la limitation à l’allemand, à l’anglais et au français du choix de la deuxième langue par les candidats aux concours concernés par les avis attaqués et, d’autre part, de la limitation aux seules trois langues susmentionnées des langues pouvant être utilisées dans les échanges entre les candidats et l’EPSO.

 Sur la légalité de la limitation à l’allemand, à l’anglais et au français du choix de la deuxième langue par les candidats aux concours concernés par les avis attaqués

74      Le volet des avis attaqués qui porte sur la limitation à l’allemand, à l’anglais et au français du choix de la deuxième langue par les candidats aux concours en cause fait l’objet des troisième et septième moyens soulevés, dans chacun des recours, par la République italienne.

75      Le troisième moyen est tiré de la violation de l’article 6, paragraphe 3, TUE, de l’article 18 TFUE, de l’article 22 de la charte des droits fondamentaux, des articles 1er et 6 du règlement n° 1, de l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, de l’article 27, deuxième alinéa, et de l’article 28, sous f), du statut ainsi que de l’article 1er, paragraphes 2 et 3, de l’annexe III du statut. En substance, la République italienne fait valoir que la limitation, prévue par les avis attaqués, à l’allemand, à l’anglais et au français du choix de la deuxième langue des candidats aux concours en cause, qui serait la langue tant des tests de présélection que des épreuves d’évaluation des candidats admis, viole toutes ces dispositions. La requérante souligne, en outre, que les tâches que seront appelés à exécuter les lauréats des concours concernés par les avis attaqués, à savoir la conception, la mise en œuvre, le suivi et le contrôle de plans d’actions, la gestion des ressources, la rédaction de notes d’analyse politique, la communication externe, les relations avec des intervenants externes et avec les États membres et la coordination de groupes de travail formés par les États membres, ne justifient pas l’exigence, imposée par ces avis, de la connaissance d’une des trois langues susmentionnées en tant que deuxième langue. Selon la République italienne, ces fonctions imposeraient la plus large connaissance possible des langues de l’Union.

76      Le septième moyen est tiré de la violation de l’article 296, deuxième alinéa, TFUE, des articles 1er et 6 du règlement n° 1, de l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, et de l’article 28, sous f), du statut, de l’article 1er, paragraphe 1, sous f), de l’annexe III du statut, du principe de proportionnalité ainsi que d’une « dénaturation des faits ». En substance, par ce moyen, la République italienne fait valoir un défaut et une insuffisance de motivation des avis attaqués. Elle conteste, par ailleurs, le bien-fondé de cette motivation et sa conformité avec les dispositions susmentionnées.

77      Dans son mémoire en intervention dans l’affaire T‑17/15, la République de Lituanie soutient les arguments de la République italienne. Elle fait valoir que la Commission a méconnu l’autorité de la chose jugée s’attachant à l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752) et que la motivation contenue dans l’avis attaqué dans l’affaire T‑17/15 ne suffit pas à justifier la limitation du choix de la deuxième langue du concours concerné.

78      En ce qui concerne, tout d’abord, un éventuel défaut ou une éventuelle insuffisance de motivation des avis attaqués, invoqué dans le cadre du septième moyen, la Commission réfute l’argumentation de la République italienne.

79      À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver des décisions constitue une formalité substantielle qui doit être distinguée de la question du bien-fondé des motifs, celui-ci relevant de la légalité au fond de l’acte litigieux. En effet, la motivation d’un acte consiste à exprimer formellement les motifs sur lesquels il repose. Si ces motifs comportent des erreurs, celles-ci affectent la légalité au fond de l’acte en cause, mais non la motivation de celui-ci, qui peut être suffisante tout en exprimant des motifs erronés (voir arrêt du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 181 et jurisprudence citée).

80      En l’espèce, ainsi qu’il a été relevé aux points 15 et 16 ci-dessus, les avis attaqués comportent bien une motivation tendant à justifier l’exigence selon laquelle les candidats doivent posséder une connaissance satisfaisante de l’allemand, de l’anglais ou du français, langues auxquelles se limite leur choix de la deuxième langue des concours. Partant, il ne saurait être reproché à son auteur, l’EPSO, une violation de l’obligation de motivation. La question du bien-fondé de cette motivation est distincte et sera examinée ci-après.

81      Aux fins de l’examen de cette dernière question, il convient de rappeler le libellé des dispositions mentionnées par la Cour dans l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), également évoquées par la République italienne dans son argumentation, ainsi que les conclusions que la Cour a tirées de ces dispositions.

82      Aux points 81 à 84 de son arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), la Cour s’est référée à l’article 1er du règlement n° 1, à l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, et à l’article 28, sous f), du statut ainsi qu’à l’article 1er, paragraphe 1, sous f), de l’annexe III du statut.

83      Le règlement n° 1, en son article 1er, dans sa version applicable au moment de la publication des avis attaqués, prévoit ce qui suit :

« Les langues officielles et les langues de travail des institutions de l’Union sont le bulgare, le croate, l’espagnol, le tchèque, le danois, l’allemand, l’estonien, le grec, l’anglais, le français, l’irlandais, l’italien, le letton, le lituanien, le hongrois, le maltais, le néerlandais, le polonais, le portugais, le roumain, le slovaque, le slovène, le finnois et le suédois. »

84      L’article 1er quinquies du statut dispose, en son paragraphe 1, que, dans l’application du statut, est interdite toute discrimination, telle qu’une discrimination fondée, notamment, sur la langue. Conformément au paragraphe 6 du même article, « [d]ans le respect du principe de non-discrimination et du principe de proportionnalité, toute limitation de ces principes doit être objectivement et raisonnablement justifiée et doit répondre à des objectifs légitimes d’intérêt général dans le cadre de la politique du personnel ».

85      L’article 28, sous f), du statut prévoit que nul ne peut être nommé fonctionnaire s’il ne justifie posséder une connaissance approfondie d’une des langues de l’Union et une connaissance satisfaisante d’une autre langue de l’Union. Comme l’a fait remarquer la Cour dans son arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752, point 83), si cette disposition précise que la connaissance satisfaisante d’une autre langue est exigée « dans la mesure nécessaire aux fonctions » que le candidat est appelé à exercer, elle n’indique pas les critères qui peuvent être pris en considération pour limiter le choix de cette langue parmi les langues officielles mentionnées à l’article 1er du règlement n° 1.

86      Selon l’article 1er, paragraphe 1, sous f), de l’annexe III du statut, l’avis de concours peut spécifier éventuellement les connaissances linguistiques requises par la nature particulière des postes à pourvoir. Toutefois, comme la Cour l’a indiqué dans son arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752, point 84), ne découle pas de cette disposition une autorisation générale pour déroger aux exigences de l’article 1er du règlement n° 1.

87      La Cour a, ensuite, conclu que les dispositions mentionnées aux points 84 à 86 ci-dessus ne prévoient pas de critères explicites permettant de limiter le choix de la deuxième langue que doivent maîtriser les candidats à un concours tendant au recrutement de fonctionnaires de l’Union, que ce soit aux trois langues imposées par les avis attaqués ou à d’autres langues officielles (arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission, C‑566/10 P, EU:C:2012:752, point 85). Elle a, par ailleurs, constaté que les institutions concernées par les avis attaqués dans cette affaire n’étaient pas soumises à un régime linguistique spécifique, mais à celui institué par le règlement n° 1.

88      La Cour a, néanmoins, relevé qu’il ressortait de l’ensemble des dispositions susvisées que l’intérêt du service pouvait constituer un objectif légitime pouvant être pris en considération. Notamment, l’article 1er quinquies du statut autorise des limitations aux principes de non-discrimination et de proportionnalité. Il importe cependant, selon la Cour, que cet intérêt du service soit objectivement justifié et que le niveau de connaissance linguistique exigé s’avère proportionné aux besoins réels du service (arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission, C‑566/10 P, EU:C:2012:752, point 88).

89      À cet égard, la Cour a souligné que des règles limitant le choix de la deuxième langue doivent prévoir des critères clairs, objectifs et prévisibles afin que les candidats puissent savoir, suffisamment à l’avance, quelles exigences linguistiques sont requises, et ce pour pouvoir se préparer aux concours dans les meilleures conditions (arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission, C‑566/10 P, EU:C:2012:752, point 90).

90      Dans l’affaire ayant donné lieu à son arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752, point 91), la Cour a constaté que les institutions concernées n’avaient jamais adopté de règles internes conformément à l’article 6 du règlement n° 1. Elle a ajouté que la Commission n’avait pas non plus invoqué l’existence d’autres actes, tels que des communications stipulant les critères pour une limitation du choix d’une langue en tant que deuxième langue pour participer aux concours en cause dans cette affaire. Enfin, elle a constaté que les avis de concours en cause dans cette affaire ne contenaient aucune motivation justifiant le choix des trois langues (allemand, anglais, français) auxquelles se limitait le choix de la deuxième langue des candidats auxdits concours.

91      Il ressort de ces considérations de la Cour que la limitation du choix de la deuxième langue par les candidats à un concours à un nombre restreint de langues, à l’exclusion des autres langues officielles, constitue une discrimination en raison de la langue (voir, en ce sens, arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752, point 102). Il est, en effet, évident que, par une telle stipulation, certains candidats potentiels, à savoir ceux qui possèdent une connaissance satisfaisante d’au moins une des langues désignées, sont favorisés, en ce qu’ils peuvent participer au concours et être, ainsi, recrutés en tant que fonctionnaires ou agents de l’Union, alors que les autres, qui ne possèdent pas une telle connaissance, sont exclus (arrêts du 24 septembre 2015, Italie et Espagne/Commission, T‑124/13 et T‑191/13, EU:T:2015:690, point 92 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑275/13, non publié, EU:T:2015:1000, point 76 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑295/13, non publié, EU:T:2015:997, point 133, et du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑510/13, non publié, EU:T:2015:1001, point 87).

92      La Commission fait valoir que cette circonstance ne constitue pas une discrimination fondée sur la nationalité. Or, un tel argument est inopérant, dès lors que l’article 1er quinquies du statut n’interdit pas seulement la discrimination fondée sur la nationalité, mais également plusieurs autres formes de discrimination, y compris celle fondée sur la langue.

93      Dans le même contexte, la Commission fait valoir qu’aucune discrimination ne pouvait « exister en droit, étant donné que, dans [les avis attaqués], mis à part les [tests sur ordinateur], réalisés dans la langue maternelle du candidat […], tous les candidats devaient passer les autres tests et épreuves de concours dans leur deuxième langue, obligatoirement différente de leur langue maternelle ». Selon la Commission, compte tenu du choix que les candidats pouvaient faire, la prétendue discrimination en raison de la langue ne pouvait exister, puisque les candidats étaient « autorisés à choisir de passer les épreuves dans la langue “qu’ils considéraient maîtriser le mieux” », comme l’exigerait l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752, point 94). Enfin, la Commission avance qu’il ressort des éléments de preuve qu’elle a produits devant le Tribunal, plus spécifiquement des données collectées par l’EPSO et relatives aux candidats inscrits sur les listes de réserve au terme des concours organisés de 2010 à 2013, qu’« une telle discrimination ne s’est [pas] non plus vérifiée dans les faits ».

94      Ces arguments doivent être rejetés. Tout d’abord, il convient de relever que rien dans les avis attaqués ne permet de déduire que la première langue du concours, dont les candidats devaient avoir une « connaissance approfondie » et qui était obligatoirement différente de la deuxième langue du concours, devait nécessairement coïncider avec leur langue maternelle.

95      Il en va de même en ce qui concerne l’argument que la Commission semble tirer du point 94 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752). Certes, selon la Cour, l’objectif d’assurer aux institutions le concours de fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité peut être mieux préservé lorsque les candidats sont autorisés à présenter les épreuves de sélection d’un concours dans leur langue maternelle ou dans la deuxième langue qu’ils considèrent maîtriser le mieux. Toutefois, contrairement à ce que semble avancer la Commission, il ne saurait être déduit de ce point de l’arrêt susmentionné que toute limitation du choix de la deuxième langue des candidats serait justifiée à condition que les candidats puissent choisir, parmi les langues proposées, celle qu’ils maîtrisent le mieux après leur langue maternelle. En effet, en l’espèce, contrairement à ce qui est avancé dans les mémoires en défense, rien n’exclut que la deuxième langue que lesdits candidats « considèrent maîtriser le mieux », au sens du point 94 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), soit une langue autre que l’allemand, l’anglais ou le français.

96      Enfin, s’agissant des arguments que la Commission entend tirer des données mentionnées au point 93 ci-dessus, il y a lieu de souligner que l’article 1er quinquies du statut interdit toute discrimination en raison de la langue, quand bien même le nombre des victimes d’une telle discrimination serait assez restreint. Tout autre est la question de savoir si une discrimination peut être tolérée pour d’autres motifs, auquel cas le nombre restreint des victimes potentielles d’une discrimination peut constituer un argument valable, plaidant en faveur du caractère proportionnel de la mesure en cause.

97      Partant, il y a lieu d’examiner si, en limitant à l’allemand, à l’anglais et au français le choix de la deuxième langue des concours concernés par les avis attaqués, l’EPSO, auteur desdits avis, a violé l’article 1er quinquies du statut, en instituant une discrimination interdite, fondée sur la langue.

98      Il convient de constater que, comme les avis de concours en cause dans les affaires ayant donné lieu à l’arrêt du 24 septembre 2015, Italie et Espagne/Commission (T‑124/13 et T‑191/13, EU:T:2015:690), ainsi qu’aux arrêts du 17 décembre 2015, Italie/Commission (T‑275/13, non publié, EU:T:2015:1000, T‑295/13, non publié, EU:T:2015:997 et T‑510/13, non publié, EU:T:2015:1001), et à la différence des avis de concours en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), les avis attaqués, tout en renvoyant aux dispositions générales et à l’orientation générale, qui en font partie intégrante, contiennent une motivation (voir points 15 et 16 ci‑dessus), insérée spécifiquement aux fins de répondre aux exigences de ce dernier arrêt. Il ressort notamment de cette motivation que les deuxièmes langues retenues aux fins des concours en cause ont été définies conformément à l’intérêt du service, qui exige que les nouveaux recrutés soient immédiatement opérationnels et capables de communiquer efficacement dans leur travail quotidien et que le fonctionnement effectif des institutions risquerait autrement d’être gravement entravé.

99      Cela étant établi, il convient d’examiner si les autres constatations de la Cour rappelées au point 90 ci‑dessus demeurent valables en ce qui concerne les circonstances des présentes affaires.

100    À cet égard, ainsi que la Commission l’a confirmé lors de l’audience, les institutions concernées par les avis attaqués n’ont pas adopté, après le prononcé de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), et jusqu’à la publication des avis attaqués, de règles internes conformément à l’article 6 du règlement n° 1.

101    En revanche, la Commission soutient que les dispositions générales et l’orientation générale constituent des communications, au sens du point 91 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752). Elle avance, à cet égard, que, dans le cas des avis attaqués, les candidats « avaient été mis au courant de la réglementation “[préalable], objective et transparente” que constitue l’Orientation générale », qui a été, comme d’ailleurs les Dispositions générales, publiée dans toutes les langues officielles de l’[Union] ». La Commission soutient, dès lors, en substance, que lesdits textes prévoient des critères « clairs, objectifs et prévisibles afin que les candidats puissent savoir, suffisamment à l’avance, “quelles exigences linguistiques sont requises […] pour pouvoir se préparer aux concours dans les meilleures conditions” […] », au sens du point 90 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752).

102    Ainsi qu’il a été exposé au point 69 ci-dessus, les dispositions générales et l’orientation générale doivent être interprétées comme constituant, tout au plus, des communications qui annoncent des critères selon lesquels l’EPSO envisage de procéder au choix du régime linguistique de chacun des concours qu’il est chargé d’organiser.

103    Or, indépendamment de la question de savoir si lesdits critères peuvent être considérés comme étant prévisibles, au sens du point 90 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), pour les candidats ayant participé aux concours concernés par les avis attaqués, alors que ces avis ont été publiés, le premier, douze jours et, le deuxième, huit mois après la publication des dispositions générales et de l’orientation générale, ce sont, en l’espèce, lesdits avis qui arrêtent de manière définitive le cadre normatif de ces concours en renvoyant, certes, aux textes susmentionnés, mais en établissant des règles autonomes, y compris quant au régime linguistique. Il appartient, ainsi, au juge de l’Union de contrôler, dans le cadre des présents recours, la légalité dudit régime.

104    Il y a lieu, en effet, d’examiner, à la lumière de l’argumentation de la République italienne, si la motivation insérée dans lesdits avis démontre que la limitation à l’allemand, à l’anglais et au français, du choix de la deuxième langue par les candidats aux concours litigieux est justifiée par l’intérêt du service et respecte le principe de proportionnalité.

105    Il convient, tout d’abord, de définir les paramètres d’un tel examen. La Commission évoque le principe d’autonomie des institutions de l’Union pour faire valoir que ces dernières disposent d’un pouvoir d’appréciation « particulièrement large », dès lors qu’elles sont les seules à pouvoir décider de leur politique du personnel, à constater quels sont les besoins du service, qui incluraient inévitablement les besoins linguistiques, ainsi qu’à déterminer les mesures permettant d’y répondre. Elle en conclut que, dans ce contexte, le principe de non-discrimination est méconnu uniquement en cas de choix arbitraires ou manifestement inadéquats par rapport à l’objectif visé, qui, selon elle, est de pouvoir disposer de candidats immédiatement opérationnels et de recruter des fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, au sens de l’article 27, premier alinéa, du statut.

106    À cet égard, il doit être remarqué que seul l’objectif consistant à disposer de candidats immédiatement opérationnels est capable de justifier, éventuellement, une discrimination fondée sur la langue. En revanche, une telle discrimination n’est pas apte à faciliter le recrutement des fonctionnaires possédant les plus hautes qualités de compétence, de rendement et d’intégrité, ces qualités étant, manifestement, indépendantes des connaissances linguistiques d’un candidat (arrêts du 24 septembre 2015, Italie et Espagne/Commission, T‑124/13 et T‑191/13, EU:T:2015:690, point 103 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑275/13, non publié, EU:T:2015:1000, point 86 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑295/13, non publié, EU:T:2015:997, point 144, et du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑510/13, non publié, EU:T:2015:1001, point 101).

107    Il est, certes, vrai que la jurisprudence reconnaît le principe d’autonomie fonctionnelle des institutions de l’Union quant au choix de leurs fonctionnaires et agents, consacré à l’article 2 du statut. Ces institutions disposent, ainsi, d’un large pouvoir d’appréciation et d’une autonomie quant à la création d’un emploi de fonctionnaire ou d’agent, quant au choix du fonctionnaire ou de l’agent aux fins de pourvoir à l’emploi créé et quant à la nature de la relation de travail qui les lie à un agent (voir, en ce sens, arrêt du 8 septembre 2005, AB, C‑288/04, EU:C:2005:526, points 26 et 28). Toutefois, cette autonomie ne les dispense pas de l’obligation de respecter les dispositions applicables du droit de l’Union, y compris celles de l’article 1er quinquies du statut (arrêts du 24 septembre 2015, Italie et Espagne/Commission, T‑124/13 et T‑191/13, EU:T:2015:690, point 104 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑275/13, non publié, EU:T:2015:1000, point 87 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑295/13, non publié, EU:T:2015:997, point 145, et du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑510/13, non publié, EU:T:2015:1001, point 106).

108    Il ressort, en outre, d’une jurisprudence constante que, dans les matières qui relèvent de l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire, le principe de non-discrimination est méconnu lorsque l’institution concernée procède à une différenciation arbitraire ou manifestement inadéquate par rapport à l’objectif de la réglementation (voir arrêt du 20 mars 2012, Kurrer e.a./Commission, T‑441/10 P à T‑443/10 P, EU:T:2012:133, point 54 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 15 avril 2010, Gualtieri/Commission, C‑485/08 P, EU:C:2010:188, point 72).

109    Toutefois, cette jurisprudence n’exclut pas tout contrôle, par le juge de l’Union, des éventuelles exigences de connaissances linguistiques spécifiques des candidats à un concours pour le recrutement des fonctionnaires ou des agents de l’Union. Au contraire, il ressort des considérations de la Cour mentionnées au point 88 ci‑dessus qu’il appartient au juge de l’Union de vérifier que de telles exigences sont objectivement justifiées et proportionnées aux besoins réels du service, en d’autres termes qu’elles ne sont pas arbitraires ou manifestement inadéquates par rapport à l’objectif escompté (arrêts du 24 septembre 2015, Italie et Espagne/Commission, T‑124/13 et T‑191/13, EU:T:2015:690, point 106 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑275/13, non publié, EU:T:2015:1000, point 89 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑295/13, non publié, EU:T:2015:997, point 147, et du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑510/13, non publié, EU:T:2015:1001, point 108).

110    Selon la motivation des avis attaqués, « l’intérêt des services […] exige que les nouveaux recrutés soient immédiatement opérationnels et capables de communiquer efficacement dans leur travail quotidien ». Eu égard à la longue pratique des institutions de l’Union en ce qui concerne les langues de communication interne et compte tenu des besoins des services en matière de communication externe et de traitement des dossiers, il est conclu que les trois langues susmentionnées demeurent les langues les plus largement employées.

111    Il est, ensuite, constaté que ces trois langues « sont les plus étudiées en tant que deuxième langue ». Selon les avis attaqués, « [c]ela confirme le niveau d’études et les compétences professionnelles qui peuvent être actuellement attendus des candidats à des postes au sein des institutions de l’Union, à savoir la maîtrise d’au moins l’une de ces langues ». Au regard de ces considérations, il est conclu que, « dans la mise en balance de l’intérêt du service et des besoins et des aptitudes des candidats, compte tenu du domaine particulier du présent concours, il est justifié d’organiser des épreuves dans ces trois langues afin de garantir que, quelle que soit leur première langue officielle, tous les candidats maîtriseront au moins l’une de ces trois langues officielles au niveau d’une langue de travail ».

112    La considération selon laquelle « [l’]appréciation des compétences spécifiques permet […] aux institutions de l’Union d’évaluer l’aptitude des candidats à être immédiatement opérationnels dans un environnement proche de celui dans lequel ils seront appelés à travailler » paraît être avancée pour justifier l’organisation de certaines épreuves dans la deuxième langue, choisie par chaque candidat parmi l’allemand, l’anglais et le français. L’exigence selon laquelle les candidats qui choisissent une de ces trois langues comme première langue doivent, néanmoins, passer ces épreuves dans une autre de ces trois langues, qu’ils auront choisie en tant que deuxième langue, est expliquée par un « souci d’égalité de traitement ».

113    L’affirmation selon laquelle les trois langues susmentionnées « demeurent les langues les plus largement employées » eu égard, notamment, à la « longue pratique des institutions de l’Union en ce qui concerne les langues de communication interne », occupe une position clé dans ce raisonnement. Force est, toutefois, de constater qu’il s’agit d’une affirmation vague, non complétée par des indications concrètes.

114    En effet, cette prétendue pratique des institutions de l’Union en ce qui concerne les langues de communication interne n’est aucunement explicitée dans les avis attaqués. Notamment, il n’y est pas précisé si elle implique l’utilisation parallèle de ces trois langues en tant que langues de communication interne dans tous les services de l’ensemble des institutions et organes concernés par les avis attaqués, ou si, plutôt, certains services utilisent l’une de ces langues et d’autres une autre. Dans cette dernière hypothèse, il existerait un risque que les services susceptibles d’être intéressés par les lauréats des concours litigieux n’utiliseront pas l’une ou l’autre des trois langues susmentionnées comme langue de travail interne, ce qui mettrait en question le caractère raisonnable et proportionnel de la limitation, à ces trois langues, du choix de la deuxième langue pour les candidats aux concours en cause. En effet, dans un tel cas, soit certains candidats, bien qu’ayant réussi ces concours, ne seraient pas engagés, soit les services concernés seraient obligés d’engager, en partie, des candidats qui ne maîtriseraient pas la langue de communication interne, auquel cas se poserait légitimement la question du sens et de l’utilité de la limitation susmentionnée.

115    Les dispositions générales, qui font partie intégrante des avis attaqués, contiennent certains éléments d’information à cet égard. En effet, au point 1.3 dudit texte, il est affirmé que, « [d]ans la pratique, les institutions européennes utilisent depuis longtemps l’anglais, le français et l’allemand, principalement pour la communication interne et ce sont également ces langues qui sont le plus souvent nécessaires pour communiquer avec le monde extérieur et gérer les dossiers ».

116    Des indications supplémentaires sont contenues dans l’orientation générale. Il y est, plus particulièrement, affirmé que les trois langues susmentionnées « constituent traditionnellement les langues des délibérations dans les réunions entre membres des institutions » et qu’elles « sont les langues véhiculaires utilisées le plus souvent pour la communication interne et externe, comme le confirment les statistiques concernant les langues sources des textes traduits par les services de traduction des institutions ».

117    La Commission a fourni, par ailleurs, dans ses écrits, certaines précisions à cet égard et elle a produit des éléments de preuve additionnels dans les présentes affaires. Toutefois, leur examen ne permet pas de dissiper les doutes sérieux que soulèvent les affirmations susvisées des avis attaqués. Il en va de même pour ce qui est des éléments supplémentaires contenus dans l’orientation générale, dans la mesure où ces derniers sont, en substance, identiques aux arguments présentés par la Commission dans ses écritures devant le Tribunal.

118    Premièrement, la Commission fait valoir que l’allemand, l’anglais et le français sont « les trois langues principales des délibérations des institutions de l’Union ». Selon elle, cette situation était caractérisée par l’utilisation initiale du français et de l’allemand et s’était enrichie, depuis 1973, avec l’introduction de l’anglais. Elle ajoute que la langue traditionnelle des délibérations des juridictions au sein de la Cour de justice de l’Union européenne est le français, alors que l’anglais est « la langue de travail de plus grande diffusion dans les agences ». Cet état de fait serait confirmé, notamment, par le régime linguistique du comité des représentants permanents (Coreper), chargé, conformément à l’article 16, paragraphe 7, TUE, de la préparation des travaux du Conseil de l’Union européenne.

119    Force est, toutefois, de constater que, à l’exception des copies de certains courriels, produits pour démontrer que l’allemand, l’anglais et le français seraient les langues véhiculaires utilisées par les États membres au sein du Coreper, la Commission n’a pas fourni d’autres éléments de preuve à l’appui des allégations résumées ci-dessus.

120    À défaut de tels éléments, l’affirmation, vague et générale, selon laquelle l’allemand, l’anglais et le français seraient les langues « principales » des délibérations des institutions de l’Union ne saurait être admise. La Commission admet elle-même que la seule langue des délibérations de toutes les juridictions qui composent la Cour de justice est, traditionnellement, le français. Par ailleurs, il est notoire que les membres du Parlement européen s’expriment, en séance plénière ou en commission, dans toutes les langues officielles. Il en va de même des représentants des États membres, réunis au sein du Conseil.

121    En outre, même à admettre que, comme l’affirme la Commission, les trois langues susmentionnées soient les « langues véhiculaires » utilisées au sein du Coreper, un tel fait serait dépourvu de pertinence pour la solution des présents litiges. En effet, il ne ressort d’aucun élément des dossiers des présentes affaires et n’est pas allégué par la Commission qu’il existe un quelconque lien entre les activités du Coreper et les fonctions que les candidats aux concours litigieux sont susceptibles d’exercer, s’ils réussissent ceux-ci et sont engagés.

122    Cette considération est valable, plus généralement, pour tout éventuel argument tiré de l’utilisation d’une ou de plusieurs langues comme « langues de délibération » d’une institution de l’Union : à supposer même que les membres d’une institution déterminée utilisent exclusivement une ou certaines langues dans leurs délibérations, il ne saurait être présumé, sans davantage d’explications, qu’un fonctionnaire nouvellement recruté, qui ne maîtrise aucune de ces langues, ne serait pas capable de fournir immédiatement un travail utile dans l’institution en question.

123    Deuxièmement, la Commission fait valoir que l’allemand, l’anglais et le français sont les trois langues dans lesquelles la quasi-totalité des documents est traduite par sa direction générale de la traduction. La Commission produit, à l’appui de cette affirmation, également contenue dans l’orientation générale, des statistiques sur les langues sources et langues cibles des textes traduits entre 2000 et 2012. Selon elle, il peut en être déduit clairement que les trois langues en question représentent les langues les plus demandées par ses services dans les demandes de traduction des documents, à la fois comme langue source, dans le cas de la traduction à usage interne d’un document externe, et comme langue cible, dans le cas de documents internes destinés à un usage externe.

124    Il convient de remarquer, d’emblée, que la pertinence de ces statistiques se trouve réduite, du fait qu’elles ne concernent que la Commission. En effet, rien ne permet de conclure que la situation est la même s’agissant des autres institutions et organes concernés par les avis attaqués. L’affirmation vague et générale contenue dans l’orientation générale, selon laquelle l’approche de la Commission serait confirmée par des statistiques « concernant les langues sources des textes traduits par les services de traduction des institutions » et non de la seule Commission ne saurait remettre en cause cette conclusion.

125    Il convient, par ailleurs, de constater que c’est à tort que la Commission part de la prémisse que les statistiques sur la langue source d’un document traduit ne couvrent que des documents externes, traduits en vue d’un usage interne et que, inversement, les statistiques relatives à la langue cible des documents traduits ne couvrent que des documents internes, destinés à un usage externe. Les statistiques qu’elle invoque répartissent les nombres de pages traduites en fonction de la langue du document original (langue source) ou de la langue vers laquelle la traduction a été effectuée (langue cible), sans distinguer entre les traductions destinées à un usage interne ou externe.

126    Il est, ainsi, impossible d’identifier la proportion des textes pris en considération dans ces statistiques, qui serait d’origine interne, destinée à un usage interne, ou pertinente pour les domaines visés par les avis attaqués. Or, si une proportion élevée des pages traduites est d’origine externe, la pertinence des statistiques relatives à la langue source des documents traduits, pour la détermination des langues internes de travail de la Commission, est douteuse. Par ailleurs, dès lors qu’il n’est fait aucune distinction s’agissant des services auxquels chaque traduction est destinée, les éventuelles conclusions qui pourraient être tirées de ces statistiques, quant à l’utilisation des langues à l’intérieur de la Commission prise dans son ensemble, ne refléteront pas nécessairement la situation à l’intérieur des services particuliers de celle-ci susceptibles d’être concernés par les domaines visés par les avis attaqués.

127    En tout état de cause, les statistiques produites par la Commission ne sauraient étayer les affirmations de celle-ci, qui reflètent celles qui figurent également dans les avis attaqués.

128    S’agissant des statistiques relatives à la langue source des documents traduits, si elles démontrent, certes, que l’anglais, le français et l’allemand se trouvent, respectivement, en première, en deuxième et en troisième position en termes de langue source des pages traduites, l’écart entre ces trois langues est considérable.

129    Ainsi, en 2012, les textes anglais représentaient 77,06 % des textes traduits, contre 5,20 % pour le français et 2,90 % pour l’allemand. La situation était largement analogue en 2011, avec 80,63 % des pages traduites pour l’anglais, 5,76 % pour le français et 2,28 % pour l’allemand. Entre 2000 et 2012, la proportion de l’anglais a augmenté considérablement (elle est passée de 55,08 à 77,06 %), celle du français a connu un recul très substantiel (elle est passée de 32,49 à 5,20 %), alors que, dans le cas de l’allemand, il y a eu, aussi, un recul (de 4,08 à 2,90 %). Il convient, également, de constater que l’écart entre l’allemand et l’italien, qui, sauf en 2012, se trouvait en quatrième position, n’est pas considérable. Leurs proportions respectives étaient de 2,24 % contre 2,06 % en 2010 et de 2,28 % contre 1,49 % en 2011. En 2012, c’était l’espagnol et le grec qui se trouvaient en quatrième position, avec 1,61 % des pages traduites, contre 2,90 % pour l’allemand.

130    S’agissant des statistiques relatives aux langues cibles des textes traduits, il est vrai que l’anglais, le français et l’allemand occupent, respectivement, les trois premières positions dans les statistiques les plus récentes (2011 et 2012). Toutefois, l’écart entre le nombre de pages traduites vers ces trois langues et celles traduites vers d’autres langues n’est pas très significatif. Ainsi, en 2011, 12,31 % des pages traduites l’ont été vers l’anglais, 7,92 % vers le français, 6,53 % vers l’allemand, 4,27 % vers l’italien, 4,20 % vers l’espagnol, 4,13 % vers le néerlandais, 4,09 % vers le portugais et 3,94 % vers le grec, les traductions vers les autres langues officielles, à l’exception de l’irlandais (0,61 % des pages traduites), représentant, dans chaque cas, une proportion supérieure à 3,50 % des pages traduites. Pour 2012, les proportions des pages traduites vers l’anglais, le français et l’allemand étaient, respectivement, de 14,92, de 8,25 et de 6,47 %, contre 4,40 % pour l’italien et 4,26 % pour l’espagnol, les traductions vers toutes les autres langues officielles (à l’exception de l’irlandais, 0,41 % des pages traduites) représentant, dans chaque cas, au moins 3,35 % des pages traduites. Ces statistiques ne permettent pas de conclure qu’un candidat ayant réussi un des concours litigieux qui aurait une connaissance satisfaisante de l’anglais, du français ou de l’allemand serait pleinement opérationnel dès le premier jour de son engagement, alors qu’un candidat qui aurait une connaissance au moins satisfaisante de deux autres langues officielles ne le serait pas.

131    Il ressort, certes, de ces statistiques qu’une très grande proportion des pages traduites provenaient d’originaux rédigés en anglais (langue source). Toutefois, les avis attaqués n’exigent pas exclusivement une connaissance satisfaisante de l’anglais. Un candidat qui n’a pas une connaissance satisfaisante de cette langue peut participer aux concours visés par ces avis, s’il possède une connaissance satisfaisante au moins de l’allemand ou du français. Ainsi que cela a été relevé, chacune de ces deux langues représente, aussi bien en tant que langue source qu’en tant que langue cible, une proportion relativement faible des pages traduites par les services de la Commission. Si un candidat qui maîtrise, en tant que deuxième langue seulement l’une de ces deux langues peut participer aux concours en question, il ne paraît pas justifié d’en exclure des candidats potentiels qui maîtrisent d’autres langues officielles.

132    Troisièmement, la Commission fait valoir que l’allemand, l’anglais et le français sont les langues les plus parlées par ses fonctionnaires et agents. Pour prouver cette affirmation, elle a produit un tableau, extrait du système d’enregistrement des informations personnelles de ses fonctionnaires et agents, qui aurait également été communiqué, par courrier du 14 mars 2013 du directeur général du personnel de la Commission, à la République italienne. Selon la Commission, il ressort de ce tableau que le français, l’allemand et, ensuite, l’anglais sont les langues majoritairement indiquées par les fonctionnaires et agents comme langue principale, suivies par le néerlandais et l’italien.

133    Il convient, tout d’abord, de relever que les réserves exprimées ci‑dessus quant au fait que les statistiques relatives aux textes traduits concernent la seule Commission s’appliquent également en ce qui concerne ce tableau, qui ne vise que le personnel de la Commission.

134    Ensuite, et indépendamment même de cette circonstance, il convient de constater que ce tableau regroupe les fonctionnaires et agents de la Commission en fonction de leur langue principale, c’est-à-dire, à l’évidence, leur langue maternelle. Par conséquent, et contrairement à ce que fait valoir la Commission, ce tableau ne permet de tirer aucune conclusion utile quant aux langues parlées par les fonctionnaires de la Commission, dans la mesure où les fonctionnaires et agents de la Commission doivent maîtriser de manière satisfaisante, outre leur langue maternelle, au moins une autre langue, comme l’exige l’article 28, sous f), du statut (voir point 85 ci-dessus).

135    Par ailleurs, il convient de constater que la Commission fait une lecture erronée de ce tableau, lorsqu’elle affirme que les fonctionnaires et agents ayant l’anglais comme langue principale (9,1 %) constituent le troisième groupe le plus large, après ceux qui ont le français (26,9 % du total) et l’allemand (11,1 % du total) comme langues principales. En réalité, les fonctionnaires et agents ayant l’anglais comme langue principale se trouvent en quatrième position, précédés également par ceux qui ont le néerlandais comme langue principale (9,2 % du total). Les fonctionnaires et agents qui ont l’italien comme langue principale (9 % du total) se trouvent en cinquième position, suivis par ceux qui ont l’espagnol (6,8 %), le grec (4 % du total) et le polonais (4 % du total) comme langues principales.

136    Ces chiffres ne sauraient ainsi justifier, même pour la seule Commission, une exigence telle que celle figurant dans les avis attaqués, selon laquelle un fonctionnaire ou agent nouvellement recruté doit posséder une connaissance satisfaisante de l’allemand, de l’anglais ou du français. Dans le meilleur des cas, celui d’un candidat aux concours qui possède une connaissance satisfaisante du français, il s’agirait d’une langue qui est la langue principale d’environ un quart des fonctionnaires ou agents de la Commission. Dans les cas des deux autres langues concernées (allemand et anglais), il serait question de la langue principale d’environ un fonctionnaire ou agent sur dix au sein de la Commission. Ainsi, rien ne permet d’identifier les raisons pour lesquelles de telles connaissances doivent être considérées comme indispensables pour un fonctionnaire ou agent nouvellement recruté, d’autant plus qu’une connaissance analogue d’autres langues, notamment de l’italien, qui constituent les langues principales de groupes comparables de fonctionnaires ou d’agents, n’est pas exigée.

137    La Commission produit également un tableau montrant la répartition de ses fonctionnaires et de ses agents en fonction de leur nationalité et de leur deuxième langue. Ce tableau comporte également une ligne indiquant la « moyenne » par langue, celle-ci étant de 56,4 % pour l’anglais, 19,8 % pour le français, 5,5 % pour l’allemand, 2,2 % pour le néerlandais, 2 % pour l’italien et 1,6 % pour l’espagnol, la moyenne pour toutes les autres langues officielles étant inférieure à 1 % par langue. Une moyenne de 11,5 % est indiquée pour la colonne « n/a » qui, selon la Commission, regroupe des membres de son personnel qui n’ont pas déclaré de deuxième langue.

138    De nouveau, même si l’on se limite au cas de la Commission, les données indiquées dans ce tableau ne sauraient justifier une exigence quant aux connaissances linguistiques des candidats à un concours tel que ceux en cause en l’espèce. Tout d’abord, ce tableau prend en considération uniquement la deuxième langue déclarée par chaque fonctionnaire et ne donne, dès lors, pas une image très exacte des connaissances linguistiques des fonctionnaires et des agents de la Commission. En effet, pour savoir combien parmi ces fonctionnaires et agents ont une connaissance au moins satisfaisante, par exemple, de l’anglais, il faudrait également prendre en considération tant ceux qui ont l’anglais comme langue principale que ceux pour lesquels l’anglais constitue une troisième ou une quatrième langue (et non seulement une deuxième langue), dès lors qu’il ne saurait être exclu qu’un fonctionnaire ou agent possède une connaissance satisfaisante de plus de deux langues.

139    En tout état de cause, à supposer même que les pourcentages indiqués pour l’anglais et, à un moindre degré, le français soient à même de justifier une exigence selon laquelle les candidats aspirant à un poste à la Commission doivent maîtriser de manière satisfaisante au moins une de ces deux langues, les données indiquées par ce tableau ne peuvent pas justifier l’inclusion, parmi les langues dont la connaissance est exigée, de l’allemand, à savoir d’une langue qui est la langue principale d’environ un fonctionnaire sur dix et qui est déclarée comme deuxième langue uniquement par 5,5 % des fonctionnaires de la Commission. Par ailleurs, si l’allemand y figure, l’inclusion de l’italien, de l’espagnol ou même du néerlandais ne paraît alors pas déraisonnable, les pourcentages indiqués pour chacune de ces trois langues n’étant pas très éloignés de ceux indiqués pour l’allemand.

140    En effet, une limitation du choix de la deuxième langue des candidats à un concours à un nombre restreint de langues officielles ne saurait être considérée comme objectivement justifiée et proportionnée lorsque figurent, parmi ces langues, outre une langue dont la connaissance est souhaitable, voire nécessaire, d’autres langues qui ne confèrent aucun avantage particulier. Si l’on admet, comme alternative à la seule langue dont la connaissance constitue un avantage pour un fonctionnaire nouvellement recruté, d’autres langues dont la connaissance ne constitue pas un atout, il n’existe aucune raison valable de ne pas admettre également toutes les autres langues officielles.

141    Quatrièmement, la Commission fait valoir que l’allemand, l’anglais et le français sont les langues majoritairement étudiées et parlées, comme langues étrangères, dans les États membres de l’Union. À l’appui de ses allégations, elle produit un rapport de l’office statistique de l’Union européenne (Eurostat), publié dans Statistics in Focus n° 49/2010, qui conclut, d’une part, que l’anglais est « de loin la langue étrangère la plus étudiée [en Europe] à tous les niveaux d’éducation suivie du français, de l’allemand, du russe et, [à] un moindre degré, de l’espagnol » et, d’autre part, que « la langue étrangère la mieux connue de loin [, en Europe,] est perçue comme étant l’anglais, suivie de l’allemand, du russe, du français et de l’espagnol ». Des affirmations analogues sont contenues dans l’orientation générale.

142    Ces statistiques se réfèrent à l’ensemble des citoyens de l’Union et il ne saurait être présumé qu’elles reflètent correctement les connaissances linguistiques des fonctionnaires de l’Union. Il en va de même s’agissant du rapport spécial Eurobaromètre n° 386 de 2012, auquel renvoie la Commission, selon lequel l’allemand serait la langue la plus parlée en Europe, « puisqu’elle est utilisée par 16 % de l’ensemble de la population de l’Union […] et que les trois langues étrangères les plus étudiées et parlées en Europe comme deuxième langue sont, dans l’ordre, l’anglais, le français et l’allemand, parlés respectivement par 38 %, 12 % et 11 % de la population de l’Union ».

143    En tout état de cause, la seule chose que ces statistiques peuvent démontrer est que le nombre de candidats potentiels dont la situation est affectée par la limitation à l’allemand, à l’anglais et au français des langues pouvant être choisies en tant que deuxième langue des concours visés par les avis attaqués est moins important qu’il ne le serait si ce choix était limité à d’autres langues. Or, cette circonstance ne suffit pas pour conclure que la limitation en question n’est pas discriminatoire, le nombre éventuellement restreint de personnes dont la situation serait potentiellement affectée ne pouvant pas constituer un argument valable à cet égard (voir point 96 ci-dessus).

144    Tout au plus, ces données pourraient démontrer le caractère proportionné de la limitation en question, s’il était avéré qu’elle répondait à l’intérêt du service. Or, la Commission est, précisément, restée en défaut de prouver que cette dernière condition était remplie.

145    Les considérations qui précèdent sont également applicables s’agissant des éléments de preuve invoqués par la Commission pour démontrer que, lorsque les candidats aux concours n’étaient pas limités dans leur choix de deuxième langue, l’allemand, l’anglais et le français étaient les langues les plus choisies. Des affirmations analogues sont contenues dans l’orientation générale. Or, la circonstance que le nombre des candidats qui se voient empêcher de choisir une autre langue comme deuxième langue du concours est, éventuellement, réduit ne signifie pas que ces candidats ne subissent pas une discrimination.

146    Même à considérer, par ailleurs, à l’instar de la Commission, que l’orientation générale, certes publiée antérieurement aux avis attaqués, constitue un élément supplémentaire qui serait susceptible de prouver « que la limitation du choix de la deuxième langue du concours au français, à l’anglais et à l’allemand est motivée par l’intérêt du service », il ressort de ce qui précède que cette orientation ne mentionne aucun nouvel élément factuel par rapport à ceux déjà analysés ci-dessus. Ce texte ne contient, en effet, que des affirmations vagues et générales à cet égard et la Commission a confirmé, lors de l’audience, que les données que les chefs d’administration ayant adopté ce texte ont examinées coïncident à tout le moins largement avec celles produites par la Commission dans le cadre des présentes affaires. Or, ces données ne sauraient justifier, pour les motifs indiqués ci-dessus, les affirmations relatives à l’utilisation des langues à l’intérieur des institutions de l’Union, qui figurent dans la motivation des avis attaqués ou sont avancées par la Commission dans ses écrits. Le fait que les chefs d’administration des institutions de l’Union sont parvenus à une conclusion différente est dépourvu de pertinence à cet égard.

147    Cinquièmement, enfin, la Commission soutient que la limitation du choix de la deuxième langue édictée par les avis attaqués se justifie par la nature des épreuves. En particulier, la phase du « centre d’évaluation » exigerait, en vue d’une évaluation homogène des candidats et de la facilitation de la communication de ceux-ci avec les autres participants aux concours et le jury, de s’assurer que ces épreuves se déroulent dans une langue véhiculaire.

148    Il suffit de relever, en réponse à cet argument, qu’une telle justification de la limitation en question n’est pas avancée dans la motivation des avis attaqués. Or, il ne pourrait être conclu que la discrimination en raison de la langue, résultant de ces derniers, est justifiée pour des motifs différents de ceux invoqués dans ces mêmes avis. Partant, cet argument doit également être rejeté.

149    Ce motif est, certes, développé dans l’orientation générale. Il est, néanmoins, évident que les précisions qui y sont apportées ne sauraient suffire à remettre en cause les conclusions exposées ci-dessus.

150    Selon ledit texte, le recours à la méthode du centre d’évaluation exige, afin de permettre une évaluation homogène des candidats et la communication directe entre ceux-ci, les évaluateurs et les autres candidats également soumis à cet exercice, que celui-ci se déroule, notamment, dans une langue véhiculaire. Il y est, par ailleurs, indiqué que les candidats doivent subir l’épreuve du centre d’évaluation dans leur seconde langue afin d’éviter toute discrimination entre eux. Or, cette langue devant également être une langue véhiculaire, « le choix doit être limité ». Ainsi, « [é]tant donné que les usages historiques décrits [dans le texte de l’orientation générale] correspondent toujours à la réalité interne actuelle, ce choix doit être limité aux langues française, anglaise et allemande » (voir point 11 ci-dessus).

151    Or, cette motivation, qui est expressément fondée sur les « usages historiques » de l’allemand, de l’anglais et du français décrits dans l’orientation générale, ne saurait suffire à justifier la limitation imposée par les avis attaqués. Cette motivation serait, plus spécifiquement, fondée sur la prémisse selon laquelle l’anglais, le français et l’allemand sont « les langues les plus largement employées au sein des institutions », « constituent les langues des délibérations dans les réunions entre membres des institutions » et sont « les langues véhiculaires utilisées le plus souvent pour la communication interne et externe, comme le confirment les statistiques concernant les langues sources des textes traduits par les services de traduction des institutions ».

152    Force est de constater que l’orientation générale ne comporte, à cet égard, que des affirmations vagues et générales, sans se référer à des éléments concrets et vérifiables. Or, eu égard au fait que, pour l’adoption de ce texte, des données analogues ou identiques à celles invoquées par la Commission devant le Tribunal ont été prises en compte, celles-ci ne sauraient suffire, ainsi qu’il ressort des développements effectués ci-dessus (voir points 123 à 131, 132 à 140 et 141 à 146 ci-dessus), à justifier la limitation du choix de la deuxième langue des concours concernés par les avis attaqués à l’allemand, à l’anglais et au français.

153    Au demeurant, il importe de constater que l’arrêt du 12 février 2014, De Mendoza Asensi/Commission (F‑127/11, EU:F:2014:14), invoqué par la Commission, ne saurait être considéré comme pertinent en l’espèce. En effet, à considérer, à l’instar de la Commission, que cet arrêt ait confirmé la légalité de certains aspects de l’épreuve intitulée « centre d’évaluation », qui se déroulait dans la deuxième langue des concours en cause, force est de constater que le régime linguistique du concours litigieux dans le cadre de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 12 février 2014, De Mendoza Asensi/Commission (F‑127/11, EU:F:2014:14), n’a pas été examiné en lui-même par le juge de l’Union.

154    S’agissant, enfin, de l’argument de la Commission fondé sur « l’énorme coût économique » qu’impliquerait l’utilisation de toutes les langues officielles en tant que langues de travail ou en tant que langues des épreuves des concours organisés par l’EPSO dans un contexte qui serait marqué par une prépondérance du français, de l’anglais et de l’allemand, une telle justification de la limitation en cause n’est pas non plus avancée dans la motivation des avis attaqués. Par conséquent, ainsi qu’il ressort du point 148 ci-dessus, ledit argument doit être également rejeté.

155    Il convient dès lors de conclure, pour l’ensemble des motifs indiqués ci-dessus, que la limitation, dans les avis attaqués, à l’allemand, à l’anglais et au français du choix de la deuxième langue des candidats aux concours concernés par ces avis ne se révèle ni objectivement justifiée ni proportionnée à l’objectif escompté, qui, selon la Commission, est de recruter des fonctionnaires et des agents qui seraient immédiatement opérationnels.

156    En effet, il ne suffit pas de défendre le principe d’une telle limitation en faisant référence au grand nombre de langues reconnues à l’article 1er du règlement n° 1 comme langues officielles et de travail de l’Union et à la nécessité qui en découle de choisir un nombre plus restreint de langues, voire une seule, comme langues de communication interne ou « langues véhiculaires ». Encore faut-il objectivement justifier le choix d’une ou de plusieurs langues spécifiques, à l’exclusion de toutes les autres (arrêts du 24 septembre 2015, Italie et Espagne/Commission, T‑124/13 et T‑191/13, EU:T:2015:690, point 146 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑275/13, non publié, EU:T:2015:1000, point 129 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑295/13, non publié, EU:T:2015:997, point 187, et du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑510/13, non publié, EU:T:2015:1001, point 159).

157    C’est précisément cela que tant l’EPSO, auteur des avis attaqués, que la Commission, partie défenderesse devant le Tribunal, sont restés en défaut de faire. Rien dans les données fournies par la Commission ne démontre qu’un fonctionnaire nouvellement recruté, qui aurait une connaissance satisfaisante de l’allemand, de l’anglais ou du français, serait immédiatement opérationnel, alors qu’un candidat qui aurait une connaissance au moins satisfaisante de deux autres langues officielles ne le serait pas.

158    Par conséquent, il convient de faire droit aux troisième et septième moyens soulevés par la République italienne et d’annuler les avis attaqués, en ce qu’ils restreignent le choix de la deuxième langue des concours en cause à l’anglais, à l’allemand et au français.

159    À cet égard, il convient de constater que la conclusion selon laquelle les avis de concours en question, en ce qu’ils limitent le choix de la deuxième langue par les candidats, sont entachés d’illégalité, implique également, et nécessairement, l’illégalité de la limitation de la langue pouvant être utilisée pour certaines épreuves de l’ultime stade des concours.

 Sur la légalité de la limitation des langues pouvant être utilisées dans les communications entre les candidats aux concours concernés par les avis attaqués et l’EPSO

160    Le deuxième volet des avis attaqués fait l’objet du sixième moyen invoqué dans chacun de ses recours par la République italienne, tiré de la violation de l’article 18 TFUE, de l’article 24, quatrième alinéa, TFUE, de l’article 22 de la charte des droits fondamentaux, de l’article 2 du règlement n° 1 ainsi que de l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, du statut.

161    À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il est expressément prévu au point 2.3 de la partie III des avis attaqués que le choix de la langue de communication entre les candidats et l’EPSO, y compris le choix de la langue de rédaction des candidatures, est limité à l’allemand, à l’anglais et au français, et cela pour les mêmes raisons que celles justifiant, selon l’EPSO, la limitation du choix de la deuxième langue des concours en question (voir point 15 ci-dessus).

162    Dans le cadre d’une mesure d’organisation de la procédure, le Tribunal a adressé à l’EPSO une question, concernant l’articulation entre les dispositions des avis attaqués, mentionnées au point 161 ci-dessus, les dispositions générales et le code de bonne conduite administrative, dont l’EPSO veille à appliquer les principes, selon les dispositions générales, et qui dispose que, « conformément à l’article 21 du traité instituant la Communauté européenne, la Commission répond aux lettres qu’elle reçoit dans la langue de la correspondance initiale, à condition qu’il s’agisse de l’une des langues officielles de la Communauté » (voir points 9 et 10 ci-dessus). En réponse à cette question, la Commission a prétendu que, si un candidat adressait une demande à l’EPSO dans une langue autre que l’allemand, l’anglais et le français, ce dernier « serait en mesure de lui répondre dans cette même langue ».

163    Lors de l’audience, la Commission a prétendu que c’est pour inciter les candidats à utiliser l’allemand, l’anglais et le français et pour alléger au maximum le travail des services de traduction que les avis attaqués contiennent une mention spécifique concernant la langue de communication, selon laquelle, pour les mêmes raisons que celles justifiant la limitation du choix pour la deuxième langue des concours, il est indiqué « de limiter la langue de communication entre les candidats et l’institution, y inclus la langue dans laquelle les actes de candidature doivent être rédigés ».

164    Pour autant, la Commission a fait valoir que, eu égard au caractère contraignant que l’EPSO a reconnu, en vertu des dispositions générales, au code de bonne conduite administrative, les griefs de la République italienne liés à la communication entre les candidats et l’EPSO étaient devenus inopérants. Il convient de déduire de ces allégations que, selon la Commission, nonobstant le libellé des avis attaqués, pour respecter le code de bonne conduite administrative, rendu contraignant pour l’EPSO, ce dernier est obligé tant de répondre aux candidats dans la langue dans laquelle ceux-ci choisissent de s’adresser à lui que d’admettre les candidatures rédigées dans une langue autre que l’allemand, l’anglais ou le français.

165    La République italienne a, pour sa part, déclaré qu’elle maintenait le présent moyen.

166    Le Tribunal constate que, eu égard au fait que, d’une part, ce sont les avis attaqués qui instaurent, en définitive, le cadre normatif des concours concernés, y compris leur régime linguistique (voir point 50 ci-dessus), et que, d’autre part, ces avis contiennent des dispositions expresses et claires s’agissant de la langue de communication entre les candidats et l’EPSO (voir point 161 ci-dessus), il n’est pas possible de reconnaître à ces dispositions le sens que leur prête, en substance, la Commission. En effet, compte tenu de leur libellé clair et inconditionnel, ces dispositions ne sauraient être interprétées ni comme laissant aux candidats le choix de communiquer avec l’EPSO dans une langue autre que l’allemand, l’anglais et le français, ni comme imposant ou laissant la faculté à l’EPSO d’utiliser une autre langue lors de ses échanges avec les candidats.

167    Partant, il y a lieu d’examiner l’argumentation présentée par la République italienne à l’appui du présent moyen.

168    La République italienne fait valoir que la limitation en question constitue une violation manifeste de l’article 18 TFUE, de l’article 24, quatrième alinéa, TFUE, de l’article 22 de la charte des droits fondamentaux, de l’article 2 du règlement n° 1 ainsi que de l’article 1er quinquies, paragraphes 1 et 6, du statut. Elle considère qu’il découle clairement de ces dispositions que les citoyens européens ont le droit de s’adresser aux institutions de l’Union en utilisant l’une quelconque des langues officielles et qu’ils ont le droit de recevoir les réponses des institutions dans la même langue. Cette conclusion découlerait également de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752). La limitation susvisée constituerait une discrimination, au détriment des citoyens des États membres autres que ceux ayant l’allemand, l’anglais ou le français comme langue officielle.

169    La République italienne rejette la thèse selon laquelle la participation à un concours pour le recrutement de fonctionnaires ou agents de l’Union n’est pas une forme de participation des citoyens à la vie démocratique de l’Union. Elle considère, au contraire, que la procédure d’un concours et la langue de communication utilisée sont « les éléments constitutifs d’un rapport de nature constitutionnelle entre le citoyen intéressé et l’Union ». Elle en déduit que « la langue de concours doit être la langue du citoyen ». Par ailleurs, s’appuyant sur l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), elle conteste la thèse selon laquelle la participation à un concours concernerait une situation interne à l’organisation institutionnelle. Il s’agit, selon elle, d’un rapport entre l’institution en question et un sujet de droit, un citoyen, qui ne fait pas encore partie du personnel de cette institution.

170    Enfin, la République italienne allègue qu’une restriction à un droit fondamental telle que celle établie en l’espèce ne saurait être justifiée ni au nom d’une vague « capacité d’être immédiatement opérationnel » ni par le prétendu besoin de l’EPSO de comparer et de contrôler les renseignements transmis par les candidats aux concours concernés. Imposer aux candidats de soumettre leur candidature uniquement en allemand, en anglais ou en français constituerait une violation du principe de non-discrimination. En effet, selon la République italienne, les candidats dont la langue maternelle n’est pas une des trois langues susmentionnées sont ainsi exposés à un risque d’erreur plus important que celui auquel sont exposés les candidats dont la langue maternelle est une de ces trois langues.

171    La Commission répond, tout d’abord, que les points de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), invoqués par la République italienne n’ont aucun rapport avec la question des langues utilisées dans les épreuves d’un concours, mais se réfèrent à l’aspect différent de la publication des avis de concours. Elle considère, plus concrètement, que, aux points 67, 81 et 91 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), la Cour « a exigé que soit fournie une motivation pour justifier la limitation » aux trois langues susmentionnées des langues utilisables dans ces communications. Dans ce contexte, elle rappelle également la jurisprudence, notamment l’arrêt du 9 septembre 2003, Kik/OHMI (C‑361/01 P, EU:C:2003:434, point 82), selon laquelle les nombreuses références à l’emploi des langues dans l’Union, figurant dans le traité FUE, ne peuvent être considérées comme étant la manifestation d’un principe général du droit de l’Union, assurant à chaque citoyen le droit à ce que tout ce qui serait susceptible d’affecter ses intérêts soit rédigé, en toutes circonstances, dans sa langue.

172    La Commission fait, en outre, valoir que les candidats à une procédure de concours se trouvent dans une « position intermédiaire ». Certes, ils prendraient connaissance de l’existence d’une procédure de concours en lisant l’avis de concours publié dans le Journal officiel de l’Union européenne et ce serait pour ce motif que tant les avis attaqués que les dispositions générales et l’orientation générale auraient été publiés dans toutes les langues officielles de l’Union. Toutefois, une fois que le candidat serait en communication avec l’administration en vue de sa participation au concours, il serait légitime d’attendre de celui-ci qu’il maîtrise au moins une langue officielle différente de sa langue maternelle. La Commission allègue, à cet égard, que « la nécessité de disposer de connaissances linguistiques appropriées est pleinement justifiée, par exemple, pour les travailleurs migrants, personnes auxquelles les fonctionnaires européens sont traditionnellement assimilés », en s’appuyant sur la jurisprudence de la Cour et plus spécifiquement sur les arrêts du 17 décembre 1980, Commission/Belgique (149/79, EU:C:1980:297, point 13), du 6 juin 2000, Angonese (C‑281/98, EU:C:2000:296, point 44), et du 16 décembre 2004, My (C‑293/03, EU:C:2004:821, point 37).

173    Selon la Commission, il ne saurait être admis que les compétences linguistiques des candidats à un concours revêtent une importance secondaire. Une telle thèse serait contraire au principe d’autonomie des institutions de l’Union, consacré aux articles 335 et 336 TFUE. En vertu de ce principe, la détermination des besoins linguistiques du service incomberait exclusivement aux institutions, et non aux États membres. L’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752, points 87 et 88), reconnaîtrait également que l’intérêt du service constitue un objectif légitime, pouvant justifier des limitations au principe de non-discrimination sur la base de la langue, visé à l’article 1er quinquies du statut.

174    La Commission fait, ainsi, valoir que toute prétention à ce que, dans le cadre de la procédure d’un concours, les candidats puissent indistinctement utiliser n’importe quelle langue officielle de l’Union est indéfendable. Les institutions auraient besoin de personnel opérationnel et il serait, dès lors, inévitable que, dans les contacts de nature administrative relatifs à l’organisation du concours, le candidat doive également être en mesure de communiquer dans des langues utiles aux institutions, telles que l’allemand, l’anglais et le français. Ces communications administratives seraient déjà des éléments associés au contexte de travail dans lequel le candidat serait immergé, s’il réussissait un des concours litigieux.

175    La Commission ajoute que, en tout état de cause, les communications entre les candidats et l’EPSO portent sur des informations élémentaires, relatives au déroulement des épreuves et aux différentes étapes de la procédure de concours. Par rapport au niveau de connaissance et d’utilisation de l’allemand, de l’anglais ou du français exigé dans les avis attaqués, un candidat dont les connaissances linguistiques ne lui permettraient même pas de comprendre les communications en question, rédigées dans une de ces langues, ne pourrait certainement pas imaginer pouvoir être recruté dans une institution de l’Union. Pour les mêmes motifs, les candidats de langue maternelle allemande, anglaise ou française ne seraient aucunement avantagés. La Commission invoque, à l’appui de ses affirmations, des statistiques relatives aux concours concernés par les avis attaqués, qui démontrent, selon elle, que c’étaient les candidats de nationalité italienne qui étaient en tête de la liste de ceux dont la candidature avait été validée.

176    Par ailleurs, les informations générales relatives aux procédures de concours qui figureraient sur le site de l’EPSO, tout comme les dispositions générales et l’orientation générale, seraient publiées dans toutes les langues officielles.

177    Selon la Commission, imposer à l’EPSO l’obligation de garantir la traduction de tous les actes de candidature reçus, de la langue maternelle du candidat vers l’allemand, l’anglais et le français, serait manifestement incompatible avec l’intérêt du service. En outre, une traduction des curriculum vitae des candidats les désavantagerait, car ils perdraient le contrôle des informations qu’ils auraient eux-mêmes données.

178    La Commission soutient, à cet égard, que l’effort requis pour comprendre l’intégralité d’un avis de concours n’est en rien comparable à celui requis pour comprendre le contenu d’un acte de candidature, d’autant que le contenu d’un tel acte est expliqué en détail au point 2.1 des dispositions générales, publiées dans toutes les langues officielles de l’Union. De plus, dans le cas des avis attaqués, les candidats auraient connu « largement à l’avance […] les raisons pour lesquelles les actes de candidature devaient être rédigés dans une des trois langues en question », puisque ces raisons, exposées au point 2.1.4 des dispositions générales, auraient été rendues publiques dans toutes les langues officielles de l’Union, ce qui n’aurait pas été le cas dans le cadre de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752).

179    Enfin, selon la Commission, la République italienne ne tient pas compte du fait que les indications fournies par les candidats au moment de l’envoi des candidatures peuvent comporter des éléments justifiant leur exclusion du concours, ce qui rend absolument nécessaire que le jury soit en mesure, dès la réception de l’acte de candidature, de prendre connaissance de ce qui y est mentionné. Il conviendrait donc que les actes de candidature soient rédigés dans une langue bien connue des membres du jury. Lesdits actes seraient, par ailleurs, « tout simplement illisible[s] » s’ils étaient écrits dans une langue dotée d’un alphabet autre que le latin, comme le bulgare ou le grec, ou qui n’appartiennent pas à la souche indo-européenne, telles que le hongrois ou le finnois. La Commission conclut que la rédaction uniforme du « modèle » de candidature n’est pas la réponse adéquate à la nécessité de garantir le respect des conditions d’accès aux épreuves du concours, ainsi que l’évaluation et la comparaison objectives de tous les actes de candidature.

180    Aux fins de l’examen des arguments des parties, il convient de rappeler, tout d’abord, les termes des dispositions pertinentes du règlement n° 1, en dehors de son article 1er, cité au point 83 ci-dessus.

181    L’article 2 dudit règlement dispose :

« Les textes adressés aux institutions par un État membre ou par une personne relevant de la juridiction d’un État membre sont rédigés au choix de l’expéditeur dans l’une des langues officielles. La réponse est rédigée dans la même langue. »

182    L’article 6 du règlement n° 1 prévoit que les institutions peuvent déterminer les modalités d’application du régime linguistique institué par ledit règlement dans leurs règlements intérieurs. Toutefois, comme l’a constaté la Cour au point 67 de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), les institutions concernées par les avis de concours en cause dans ladite affaire n’ont pas déterminé, sur le fondement de l’article 6 du règlement n° 1, les modalités de leur régime linguistique dans leurs règlements intérieurs. La Cour a également précisé que les avis de concours ne sauraient être considérés comme constituant des règlements intérieurs à cet égard.

183    Antérieurement au prononcé de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), le Tribunal avait jugé que le règlement n° 1 n’était pas applicable aux relations entre les institutions et leurs fonctionnaires et agents, en ce qu’il fixe uniquement le régime linguistique applicable entre les institutions et un État membre ou une personne relevant de la juridiction de l’un des États membres. Le Tribunal avait également jugé que les fonctionnaires et autres agents de l’Union, ainsi que les candidats à de tels postes, relèvent de la seule juridiction de l’Union, s’agissant de l’application des dispositions du statut, y compris celles relatives au recrutement au sein d’une institution. Selon cette même jurisprudence, l’assimilation aux fonctionnaires et autres agents de l’Union des candidats à de tels postes, en matière de régime linguistique applicable, trouvait sa justification dans le fait que lesdits candidats entrent en relation avec une institution de l’Union uniquement aux fins d’obtenir un poste de fonctionnaire ou d’agent, pour lequel certaines connaissances linguistiques sont nécessaires et peuvent être exigées par les dispositions applicables pour pourvoir le poste en cause. Cette jurisprudence faisait également référence à l’article 6 du règlement n° 1 et à la possibilité pour les institutions, prévue dans cet article, de déterminer les modalités d’application du régime linguistique dans leurs règlements intérieurs (voir, en ce sens, arrêt du 20 novembre 2008, Italie/Commission, T‑185/05, EU:T:2008:519, points 117 à 119 et jurisprudence citée).

184    Toutefois, à la suite de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), ces considérations ne pourraient plus être considérées comme valables. En effet, la Cour a jugé que, en l’absence de dispositions réglementaires spéciales applicables aux fonctionnaires et aux agents, et en l’absence de dispositions à cet égard dans les règlements intérieurs des institutions concernées, aucun texte ne permet de conclure que les relations entre ces institutions et leurs fonctionnaires et agents sont totalement exclues du champ d’application du règlement n° 1. A fortiori en est-il de même, selon la Cour, en ce qui concerne les relations entre des institutions et des candidats à un concours externe qui ne sont, en principe, ni fonctionnaires ni agents (arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission, C‑566/10 P, EU:C:2012:752, points 68 et 69).

185    Doit, à cet égard, être rejeté l’argument de la Commission (voir point 171 ci-dessus) relatif à l’absence de pertinence de cette partie de l’arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission (C‑566/10 P, EU:C:2012:752), s’agissant de la légalité de la limitation des langues de communication entre les candidats et l’EPSO. En effet, dans cette partie de son arrêt, la Cour a examiné l’applicabilité du règlement n° 1 aux candidats à un concours et a conclu qu’il leur était applicable. Cette conclusion est également pertinente pour la question soulevée par le sixième moyen invoqué par la République italienne.

186    Par ailleurs, au regard des considérations qui précèdent, l’argument de la Commission (voir point 172 ci-dessus) selon lequel les candidats à une procédure de concours se trouvent dans une « position intermédiaire » doit également être rejeté.

187    S’agissant de l’argument de la Commission tiré de l’arrêt du 9 septembre 2003, Kik/OHMI (C‑361/01 P, EU:C:2003:434, point 82), il suffit de relever que, à la différence de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), devenu l’Office européen de la propriété intellectuelle (EUIPO), dont le régime linguistique était en cause dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, les institutions et organes concernés par les avis attaqués ne sont pas soumis à un régime linguistique spécifique (arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission, C‑566/10 P, EU:C:2012:752, point 86). Elles sont soumises au régime linguistique institué par le règlement n° 1.

188    Au regard de ces considérations ainsi que du libellé clair et non ambigu de l’article 2 du règlement n° 1, il doit être conclu que les avis attaqués, en ce qu’ils prévoient que les candidats aux concours litigieux sont tenus de communiquer avec l’EPSO dans une langue, choisie par eux, parmi l’allemand, l’anglais et le français, violent le règlement n° 1. Ce motif est suffisant pour justifier leur annulation, sans qu’il soit nécessaire d’examiner si, comme le fait valoir la République italienne, cette stipulation des avis attaqués conduit à une discrimination interdite en raison de la langue.

189    En effet, l’acte de candidature est, sans aucun doute, un texte, adressé aux institutions qui ont établi l’EPSO, par une personne relevant de la juridiction d’un État membre, à savoir le candidat. Partant, en application de l’article 2 du règlement n° 1, cette personne, le candidat, a le droit de choisir la langue de rédaction de ce texte, parmi toutes les langues officielles énumérées à l’article 1er du même règlement. Dans la mesure où les avis attaqués limitent ce choix à l’allemand, à l’anglais et au français, ils violent ces dispositions. Il en va de même en ce qui concerne les autres communications éventuelles qu’un candidat aurait pu être amené à adresser à l’EPSO au sujet des concours visés par les avis attaqués (arrêts du 24 septembre 2015, Italie et Espagne/Commission, T‑124/13 et T‑191/13, EU:T:2015:690, point 61 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑275/13, non publié, EU:T:2015:1000, point 45 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑295/13, non publié, EU:T:2015:997, point 101, et du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑510/13, non publié, EU:T:2015:1001, point 51).

190    Par ailleurs, les communications adressées par l’EPSO à chaque candidat qui lui a soumis un acte de candidature constituent des réponses, au sens de l’article 2 du règlement n° 1, à l’acte de candidature et aux autres textes éventuels que lui a adressés le candidat en question. Partant, en application de cette dernière disposition, ces réponses doivent être rédigées dans la langue choisie, parmi toutes les langues officielles, par le candidat en question, pour la rédaction de ses textes. Partant, les avis attaqués violent ledit règlement également en ce qu’ils prévoient que l’EPSO adressera des communications aux candidats dans une langue choisie par eux parmi l’allemand, l’anglais ou le français, et non parmi toutes les langues officielles (arrêts du 24 septembre 2015, Italie et Espagne/Commission, T‑124/13 et T‑191/13, EU:T:2015:690, point 62 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑275/13, non publié, EU:T:2015:1000, point 46 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑295/13, non publié, EU:T:2015:997, point 102, et du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑510/13, non publié, EU:T:2015:1001, point 52).

191    Le respect, par l’EPSO, de son obligation, découlant de l’article 2 du règlement n° 1, de communiquer avec les candidats aux concours visés par les avis attaqués dans une langue choisie librement parmi toutes les langues officielles, et non uniquement en allemand, en anglais ou en français, présente d’autant plus d’importance que les avis attaqués prévoient que les candidats seront invités au centre d’évaluation si, au vu des informations qu’ils fournissent dans leur acte de candidature, ils remplissent les conditions générales et spécifiques du titre III desdits avis. Il importe, ainsi, que ces déclarations soient faites dans la langue choisie par chaque candidat, le cas échéant dans leur langue maternelle, et non dans une langue qui, pour certains d’entre eux, ne serait pas la langue dans laquelle ils s’expriment le mieux, quand bien même ils en posséderaient une connaissance satisfaisante (arrêts du 24 septembre 2015, Italie et Espagne/Commission, T‑124/13 et T‑191/13, EU:T:2015:690, point 63 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑275/13, non publié, EU:T:2015:1000, point 46 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑295/13, non publié, EU:T:2015:997, point 103, et, en ce sens, du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑510/13, non publié, EU:T:2015:1001, point 53).

192    En tout état de cause, il convient de relever que l’article 2 du règlement n° 1 ne prévoit d’exception à l’obligation qu’il impose ni pour les motifs mentionnés dans les avis attaqués, ni pour ceux indiqués dans l’orientation générale, ni pour d’autres motifs (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 27 novembre 2012, Italie/Commission, C‑566/10 P, EU:C:2012:752, point 72).

193    Les considérations exposées ci-dessus permettent également de rejeter les autres arguments avancés par la Commission.

194    L’argument tiré de l’autonomie des institutions de l’Union ne saurait prospérer. Ainsi qu’il a été rappelé au point 107 ci-dessus, l’autonomie fonctionnelle des institutions ne les dispense pas de l’obligation de respecter les dispositions applicables du droit de l’Union, dont fait partie l’article 2 du règlement n° 1.

195    Il convient d’ajouter que, ainsi qu’il ressort de l’examen du premier volet des avis attaqués contesté par la République italienne, la nécessité de se conformer aux obligations découlant du règlement n° 1 n’a pas pour conséquence d’empêcher les institutions de l’Union de déterminer elles-mêmes, dans l’exercice de leur autonomie fonctionnelle évoquée par la Commission, leurs besoins linguistiques. L’article 2 du règlement n° 1, dont il est question dans le cadre de l’examen du sixième moyen, ne s’oppose pas à ce que des exigences linguistiques spécifiques soient stipulées, dans un avis de concours, à l’égard des candidats. Il prévoit seulement que, même dans une telle hypothèse, l’auteur de l’avis de concours, en l’occurrence l’EPSO, doit communiquer avec chaque candidat dans la langue officielle choisie par ce dernier, et non dans une langue choisie parmi un groupe plus restreint de langues, quand bien même la connaissance d’au moins une de ces langues serait une des conditions d’admission audit concours (arrêts du 24 septembre 2015, Italie et Espagne/Commission, T‑124/13 et T‑191/13, EU:T:2015:690, point 68 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑275/13, non publié, EU:T:2015:1000, point 52 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑295/13, non publié, EU:T:2015:997, point 108, et du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑510/13, non publié, EU:T:2015:1001, point 58).

196    L’argument de la Commission selon lequel les communications entre les candidats et l’EPSO portent sur des informations élémentaires qu’un candidat qui aurait une connaissance de l’allemand, de l’anglais ou du français suffisante pour pouvoir participer aux concours n’aurait aucune difficulté à comprendre doit également être rejeté, tout comme celui selon lequel il serait incompatible avec l’intérêt du service et le bon sens de devoir traduire les actes de candidature des langues de leur rédaction vers l’allemand, l’anglais ou le français. L’article 2 du règlement n° 1 ne prévoit d’exceptions à l’obligation qu’il impose, ni pour des raisons liées à l’intérêt du service, ni pour d’autres raisons. Par ailleurs, il a déjà été relevé que cet article laisse à la personne qui adresse un texte à une institution le choix de la langue de rédaction de ce texte et impose aux institutions l’obligation de lui répondre dans la même langue, indépendamment de l’éventuelle connaissance, par lui, d’une autre langue.

197    Enfin, ne saurait prospérer ni l’argument selon lequel les informations figurant sur le site de l’EPSO, dans les dispositions générales et dans l’orientation générale seraient disponibles dans toutes les langues officielles, ni celui selon lequel les candidats de nationalité italienne n’auraient subi aucun préjudice du fait de l’impossibilité d’utiliser l’italien dans leurs communications avec l’EPSO.

198    S’agissant du premier argument, il suffit de relever que, en l’espèce, il est question de la langue utilisée dans les communications individuelles entre les candidats et l’EPSO, et les circonstances invoquées n’ont aucune incidence sur l’obligation de ce dernier de respecter l’article 2 du règlement n° 1, s’agissant de ces communications.

199    Quant au second argument, il suffit de rappeler que la violation d’une règle du droit de l’Union, en l’occurrence de l’article 2 du règlement n° 1, dont le respect s’imposait à l’EPSO, est suffisante pour entraîner l’annulation des avis attaqués, sans qu’il soit nécessaire de démontrer que cette violation a causé un préjudice à des candidats déterminés.

200    De même, il convient d’écarter l’argumentation que tire la Commission d’une prétendue assimilation des fonctionnaires de l’Union à des travailleurs migrants, pour lesquels la nécessité de disposer de connaissances linguistiques appropriées serait pleinement justifiée (voir point 172 ci-dessus).

201    À cet égard, l’argument que la Commission tire de la jurisprudence citée au point 172 ci-dessus, consiste à prétendre que, de la même manière que les États membres sont en droit d’exiger, sous certaines conditions, des travailleurs migrants des connaissances linguistiques spécifiques, une institution de l’Union est, également, en droit d’exiger de telles connaissances de ses fonctionnaires.

202    Cette argumentation n’est pas pertinente en l’espèce. En effet, la question qui se pose dans le cadre du présent moyen n’est pas celle de savoir si une institution de l’Union est en droit d’exiger de ses fonctionnaires des connaissances linguistiques spécifiques. Si de telles exigences sont parfaitement légitimes et conformes au statut, cela ne signifie pas que l’institution en question est en droit de méconnaître les dispositions du règlement n° 1 lui imposant de communiquer avec un candidat à un concours pour le recrutement de fonctionnaires dans la langue officielle de l’Union choisie par ce candidat.

203    Compte tenu de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu d’accueillir le sixième moyen.

204    En tout état de cause, le fait que le point 2.3 des avis attaqués relève que le choix des langues de communication entre les candidats et l’EPSO est limité, d’une part, « [p]our les mêmes raisons » qu’est limité le choix de la deuxième langue du concours et, d’autre part, afin d’assurer « l’homogénéité [dans la comparaison des candidats et dans le contrôle de leurs actes de candidature] » ne saurait remettre en cause cette conclusion.

205    En effet, en premier lieu, même à supposer que l’intérêt du service puisse justifier une dérogation aux exigences du règlement n° 1 en ce qui concerne la langue de communication entre les candidats aux concours organisés par l’EPSO et ce dernier, en l’espèce, dans la mesure où les avis attaqués s’appuient, quant à cette limitation, sur les mêmes motifs que ceux justifiant la limitation du choix de la deuxième langue du concours, aucun élément du dossier ne permet de s’écarter des conclusions exposées dans le présent arrêt à l’occasion de l’examen du premier volet des avis attaqués contesté par la République italienne.

206    Il en va de même s’agissant des indications contenues dans l’orientation générale à cet égard.

207    S’agissant, en second lieu, de la nécessité d’assurer l’homogénéité dans la comparaison entre les candidats et dans le contrôle de leurs actes de candidature, elle ne saurait suffire à justifier une dérogation aux dispositions du règlement n° 1 telle que celle prévue en l’espèce.

208    En effet, il y a lieu de relever que les avis attaqués se limitent à énoncer le motif de l’évaluation homogène des candidats et de leurs actes de candidature, sans apporter plus de précisions.

209    De même, les arguments avancés à cet égard par la Commission dans ses écrits (voir point 179 ci-dessus) sont voués au rejet, dans la mesure où ils sont, implicitement mais nécessairement, fondés sur la prémisse selon laquelle l’allemand, l’anglais et le français sont effectivement les trois langues les plus employées par les fonctionnaires tant au sein des institutions qu’aux fins de la communication externe de ces institutions. En effet, l’affirmation de la Commission selon laquelle un membre du jury « connaît certainement au moins une langue entre l’anglais, le français et l’allemand » ne peut qu’être fondée sur cette prémisse. Or, il ressort de l’analyse effectuée à l’occasion de l’examen du premier volet des avis attaqués contesté par la République italienne que, même à la lumière des données produites par la Commission devant le Tribunal, cette affirmation ne saurait être considérée comme étant établie.

210    Au surplus, compte tenu de ce qui a été exposé aux points 123 à 131, 132 à 140 et 141 à 146 du présent arrêt, aucun élément ne permet, en l’espèce, d’établir qu’il serait plus aisé pour l’EPSO de constituer des jurys de personnes maîtrisant suffisamment l’allemand, l’anglais et le français et non pas, par exemple, l’anglais, le français et l’italien.

211    Enfin, s’agissant des arguments de la Commission exposés au point 179 ci-dessus, selon lesquels les écrits des candidats seraient illisibles s’ils étaient rédigés en un alphabet autre que l’alphabet latin ou dans une langue qui ne relèverait pas de la famille indo-européenne, il suffit de relever que l’article 1er du règlement n° 1 n’établit aucune distinction entre les langues officielles de l’Union en fonction de l’alphabet dont elles sont dotées ou en fonction de la famille de langues au sein de laquelle elles sont regroupées.

212    Eu égard à tout ce qui précède, sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres moyens des recours, il y a lieu d’annuler les avis attaqués également en ce qu’ils limitent à l’allemand, à l’anglais et au français le choix de la langue de communication entre les candidats et l’EPSO.

213    Il importe néanmoins de préciser que, après avoir entendu les parties lors de l’audience, qui n’ont pas formulé d’objection à cet égard, le Tribunal considère qu’il n’y a pas lieu de mettre en cause les résultats des concours concernés par les avis attaqués (voir, en ce sens, arrêts du 24 septembre 2015, Italie et Espagne/Commission, T‑124/13 et T‑191/13, EU:T:2015:690, point 151 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑275/13, non publié, EU:T:2015:1000, point 133 ; du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑295/13, non publié, EU:T:2015:997, point 191, et du 17 décembre 2015, Italie/Commission, T‑510/13, non publié, EU:T:2015:1001, point 162).

 Sur les dépens

214    Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il convient de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la République italienne, conformément à ses conclusions.

215    La République de Lituanie, partie intervenante dans l’affaire T‑17/15, supportera ses propres dépens afférents à cette intervention, conformément à l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (huitième chambre)

déclare et arrête :

1)      Les affaires T‑353/14 et T‑17/15 sont jointes aux fins de l’arrêt.

2)      L’avis de concours général EPSO/AD/276/14, pour la constitution d’une liste de réserve d’administrateurs, et l’avis de concours général EPSO/AD/294/14, pour la constitution d’une liste de réserve d’administrateurs dans le domaine de la protection des données pour le Contrôleur européen de la protection des données, sont annulés.

3)      La Commission européenne supportera, outre ses propres dépens, ceux exposés par la République italienne.

4)      La République de Lituanie supportera ses propres dépens afférents à son intervention dans l’affaire T‑17/15.

Gratsias

Kancheva

Wetter

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 15 septembre 2016.

Signatures


* Langue de procédure : l’italien.


1 Le présent arrêt fait l’objet d’une publication par extraits.