Language of document : ECLI:EU:T:2013:462

DOCUMENT DE TRAVAIL

ARRÊT DU TRIBUNAL (première chambre)

16 septembre 2013 (*)

« Marque communautaire – Procédure d’opposition – Demande de marque communautaire figurative GITANA – Marque communautaire figurative antérieure KiTANA – Preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure – Article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement (CE) n° 207/2009 – Motif relatif de refus – Risque de confusion – Identité ou similitude des produits – Similitude des signes – Article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 – Refus partiel d’enregistrement »

Dans l’affaire T‑569/11,

Gitana SA, établie à Pregny‑Chambésy (Suisse), représentée par Me F. Benech, avocat,

partie requérante,

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. P. Geroulakos, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

l’intervenante devant le Tribunal, admise à se substituer à l’autre partie à la procédure devant la chambre de recours de l’OHMI, étant

Teddy SpA, établie à Rimini (Italie), représentée par Me S. Rizzo, avocat,

ayant pour objet un recours formé contre la décision de la première chambre de recours de l’OHMI du 4 août 2011 (affaire R 1825/2007-1), relative à une procédure d’opposition entre Rosenruist – Gestão e serviços, Lda et Gitana SA,

LE TRIBUNAL (première chambre),

composé de M. J. Azizi, président, Mme M. Kancheva et M. E. Buttigieg (rapporteur), juges,

greffier : M. E. Coulon,

vu la requête déposée au greffe du Tribunal le 4 novembre 2011,

vu le mémoire en réponse de l’OHMI déposé au greffe du Tribunal le 8 mars 2012,

vu le mémoire en réponse de l’intervenante déposé au greffe du Tribunal le 22 février 2012,

vu l’ordonnance du 7 juin 2012 autorisant la substitution de Teddy SpA à Rosenruist – Gestão e serviços, Lda,

vu la modification de la composition des chambres du Tribunal,

vu l’absence de demande de fixation d’une audience présentée par les parties dans le délai d’un mois à compter de la signification de la clôture de la procédure écrite et ayant dès lors décidé, sur rapport du juge rapporteur et en application de l’article 135 bis du règlement de procédure du Tribunal, de statuer sans phase orale de la procédure, 

rend le présent

Arrêt

 Antécédents du litige

1        Le 11 février 2003, la requérante, Gitana SA, a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), tel que modifié [remplacé par le règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1)].

2        La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe figuratif suivant :

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3        Les produits pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent notamment des classes 18 et 25 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante :

–        classe 18 : « Cuir et imitations du cuir, produits en ces matières non compris dans d’autres classes ; malles et valises ; sacs de voyage ; sacs de sport ; sacs à voiles ; parapluies, parasols » ;

–        classe 25 : « Vêtements, chaussures, chapellerie ; vêtements pour les sports nautiques ».

4        La demande de marque communautaire a été publiée au Bulletin des marques communautaires n° 38/2004, du 20 septembre 2004.

5        Le 15 décembre 2004, Rosenruist – Gestão e serviços, Lda a formé opposition, au titre de l’article 42 du règlement n° 40/94 (devenu article 41 du règlement n° 207/2009), à l’enregistrement de la marque demandée pour les produits visés au point 3 ci-dessus.

6        L’opposition était fondée sur le signe figuratif antérieur reproduit ci‑après :

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7        Ledit signe fait l’objet des droits antérieurs suivants (ci-après pris ensemble les « marques antérieures ») :

–        la marque figurative communautaire antérieure enregistrée le 20 février 2002 sous le numéro 1 609 312 (ci-après la « marque communautaire antérieure »), pour des produits relevant, après constatation d’une déchéance partielle le 31 octobre 2008 (voir point 14 ci‑après), de la classe 25 correspondant à la description suivante : « vêtements, jupes, pantalons, chemises, vestes, pardessus, imperméables, vêtements d’extérieur et pullovers, blousons, chapeaux, écharpes, foulards, chaussettes, gants, ceintures pour vêtements, chaussures, bottes, sandales, sabots, pantoufles » ;

–        la marque figurative internationale antérieure, enregistrée le 12 juillet 1990 sous la référence W00 555 706, produisant ses effets en Allemagne, en Espagne, en France, en Autriche et au Portugal (ci-après la « marque internationale antérieure »), pour les « sacs, sacoches, porte‑monnaie, portefeuilles, valises, malles, beauty‑cases vides, porte‑documents, parapluies, sacs à main », relevant de la classe 18, et les  « vêtements, jupes, pantalons, chemises, vestes, manteaux, imperméables, maillots et pull-overs, blousons, chapeaux, écharpes, foulards, bas, gants, ceintures d’habillement, chaussures, bottes, sandales, sabots, pantoufles », relevant de la classe 25 ;

–        la marque figurative italienne antérieure enregistrée le 12 juillet 1990 sous le numéro 531 768 (ci-après la « marque italienne antérieure »), pour les « sacs, bourses, porte-monnaie, portefeuilles, sacs de voyage, malles, trousses de maquillage, vanity-cases vides, porte-documents, parapluies, sacs à main », relevant de la classe 18, et les « vêtements, jupes, pantalons, chemises, vestes, manteaux, imperméables, maillots et pull-overs, blousons, chapeaux, écharpes, foulards, bas, gants, ceintures d’habillement, chaussures, bottes, sandales, sabots, pantoufles », relevant de la classe 25.

8        Le motif invoqué à l’appui de l’opposition était celui visé à l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 40/94 [devenu article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009].

9        Le 17 mai 2006, la requérante a présenté, au cours de la procédure d’opposition, une requête en preuve de l’usage sérieux des marques antérieures invoquées à l’appui de l’opposition, au sens de l’article 43, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 40/94 (devenu article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009) en sorte que la division d’opposition a invité Rosenruist – Gestão e serviços à rapporter cette preuve, à l’exception de la preuve de l’usage de la marque communautaire antérieure.

10      Le 8 septembre 2006, Rosenruist – Gestão e serviços a produit divers documents afin de démontrer que les marques internationale et italienne antérieures avaient fait l’objet d’un usage sérieux.

11      Le 30 octobre 2007, la division d’opposition a partiellement fait droit à l’opposition en refusant l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant des classes 18 et 25, à l’exception de « cuir et imitation de cuir », au motif qu’il existait un risque de confusion avec la marque communautaire antérieure.

12      Le 20 novembre 2007, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI, au titre des articles 57 à 62 du règlement n° 40/94 (devenus articles 58 à 64 du règlement n° 207/2009), contre la décision de la division d’opposition en ce qu’elle a refusé l’enregistrement de la marque demandée pour les produits relevant des classes 18 et 25. Elle a également sollicité la suspension de la procédure en attendant l’issue de la procédure en déchéance n° 2116C de la marque communautaire antérieure, pendante devant l’OHMI. Enfin, elle a demandé que soit rapportée la preuve de l’usage sérieux de la marque communautaire antérieure.

13      Par décision du 17 juillet 2008, la chambre de recours a suspendu la procédure en attendant l’issue de la procédure en déchéance de la marque communautaire antérieure.

14      Par décision du 31 octobre 2008, la division d’annulation a prononcé la déchéance de la marque communautaire antérieure en ce qui concernait les produits relevant de la classe 18, ladite marque demeurant enregistrée pour les produits relevant de la classe 25. L’opposante a formé un recours contre cette décision, qui a été rejeté par la chambre de recours le 17 mars 2010 (affaire R 2/2009-1). Cette décision n’ayant pas fait l’objet d’un recours devant le Tribunal, elle est devenue définitive.

15      Le 2 février 2011, la procédure d’opposition a repris.

16      Par décision du 4 août 2011 (ci-après la « décision attaquée »), la chambre de recours de l’OHMI a partiellement accueilli le recours pour une partie des produits relevant de la classe 18, à savoir les « malles et valises ; sacs de voyage ; sacs de sport ; sacs à voiles ; parapluies et parasols » visés par la marque demandée et l’a rejeté pour les autres produits en considérant que, compte tenu de l’identité ou de la similitude de ces derniers avec les produits visés par la marque communautaire antérieure et des similitudes visuelles et phonétiques des signes en conflit, il existait un risque de confusion entre les marques en conflit (points 42 et 43 de la décision attaquée). La chambre de recours a aussi rejeté la demande de preuve de l’usage de la marque antérieure communautaire présentée par la requérante dès lors que le délai de cinq ans visé à l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 ne s’était pas écoulé à la date de la publication de la demande de ladite marque (points 16 et 17 de la décision attaquée). Enfin, la chambre de recours a jugé que l’opposante n’a pas produit une preuve de l’usage suffisante en ce qui concernait les produits relevant de la classe 18, visés par la marque internationale antérieure et la marque italienne antérieure. En conséquence, elle a rejeté l’opposition dans la mesure où celle-ci était fondée sur ces marques (points 59 et 60 de la décision attaquée).

 Conclusions des parties

17      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        annuler la décision attaquée dans la mesure où elle a accueilli l’opposition et a rejeté la demande d’enregistrement de la marque pour les « produits en cuir et imitation du cuir non compris dans d’autres classes », relevant de la classe 18, et les « vêtements, chaussures, chapellerie ; vêtements pour les sports nautiques », relevant de la classe 25 ;

–        condamner l’OHMI aux dépens ;

–        autoriser l’enregistrement de la marque demandée pour l’ensemble des produits relevant des classes 18 et 25.

18      L’OHMI et l’intervenante concluent à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours ;

–        condamner la requérante aux dépens.

 En droit

 Sur la recevabilité des annexes A 7 à A 10 à la requête

19      Dans son mémoire en réponse, l’OHMI conteste la recevabilité des pièces jointes en annexes A 7 à A 10 à la requête, au motif que ces pièces ont été produites pour la première fois devant le Tribunal.

20      Le Tribunal constate à cet égard que les annexes en question consistent en des impressions du site Internet, ainsi qu’en des extraits de livres et en un article de presse concernant les bateaux portant le nom Gitana. Ces pièces ont été produites par la requérante afin de prouver la notoriété et la réputation du signe gitana en ce qui concerne les traditions de la famille Rothschild dans le domaine des bateaux et des courses de bateau.

21      Les pièces en question figurent, en partie, dans le dossier de la procédure devant l’OHMI, transmis au Tribunal. En effet, les pages 93 à 96 de l’annexe A 7 à la requête correspondent aux pages 257 à 258 des pièces dudit dossier et les pages 108, 109, 113 à 115, 116 à 119, 166, 167, 169 à 170 et 172 à 173 de l’annexe A 9 à la requête correspondent aux pages 263, 269, 270 à 273, 274, 276, 277 à 278 et 279 à 280 de celui-ci.

22      En conséquence, il convient de constater que les annexes A 8 et A 10, ainsi que les annexes A 7 et A 9 dans la mesure où elles ne correspondent pas aux pièces figurant dans le dossier de procédure devant l’OHMI, ont été produites pour la première fois devant le Tribunal et, de ce fait, ne peuvent être prises en considération dans le cadre du présent recours. En effet, le recours devant le Tribunal vise au contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI au sens de l’article 65 du règlement n° 207/2009, de sorte que la fonction du Tribunal n’est pas de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des documents présentés pour la première fois devant lui. Il convient donc d’écarter les documents susvisés sans qu’il soit nécessaire d’examiner leur force probante [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 24 novembre 2005, Sadas/OHMI – LTJ Diffusion (ARTHUR ET FELICIE), T‑346/04, Rec. p. II‑4891, point 19, et la jurisprudence citée].

23      L’irrecevabilité des annexes A 7 et A 9 excipée par l’OHMI est rejetée pour le surplus.

 Considérations liminaires

24      En premier lieu, il convient de relever qu’il résulte de la décision attaquée que le rejet par la chambre de recours de la demande d’enregistrement de la marque demandée pour les produits autres que les « malles et valises ; sacs de voyage ; sacs de sport ; sacs à voiles ; parapluies et parasols », relevant de la classe 18, est fondé sur l’appréciation de l’existence d’un risque de confusion entre la marque demandée et la marque communautaire antérieure, l’opposition ayant été rejetée dans la mesure où elle avait été fondée sur les marques internationale et italienne antérieures.

25      C’est donc au vu de la seule marque communautaire antérieure qu’il y a lieu d’apprécier le présent recours.

26      En second lieu, il convient de relever que, même si la requérante ne fait pas valoir explicitement une violation par la chambre de recours d’une disposition du règlement n° 207/2009, son argumentation visant à faire valoir que l’opposante n’aurait pas produit de preuves suffisantes pour démontrer l’usage sérieux des marques antérieures doit être entendue comme un moyen tiré d’une violation par la chambre de recours de l’article 42, paragraphe 2 et 3, du règlement n° 207/2009. De même, son argumentation visant à demander au Tribunal qu’il soit constaté que c’est à tort que la chambre de recours a conclu à l’existence d’un risque de confusion entre la marque demandée et les marques antérieures doit être entendue comme un moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009.

 Sur la violation de l’article 42, paragraphes 2 et 3, du règlement n° 207/2009

27      La requérante fait valoir que l’opposante n’a pas fourni, en réponse à sa demande présentée devant la division d’opposition, de preuves suffisantes de l’usage sérieux des marques antérieures ni pour les produits relevant de la classe 18, ni pour les « chapeaux, chaussures, bottes, sandales, sabots et pantoufles » relevant de la classe 25.

28      Pour les motifs rappelés au point 24 ci-dessus, l’argument de la requérante doit être examiné au vu de la seule marque communautaire antérieure laquelle, après la constatation d’une déchéance partielle, ne vise que les produits relevant de la classe 25 (voir point 14 ci-dessus). Le présent moyen de la requérante est donc inopérant pour autant qu’il vise le prétendu défaut de preuve d’usage de la marque communautaire antérieure pour les produits relevant de la classe 18.

29       Au demeurant, il suffit de relever que l’article 42, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009 ne prévoit l’obligation pour l’opposant de fournir, sur requête du demandeur, la preuve de l’usage sérieux de la marque antérieure que « pour autant qu’à [la date de la publication de la demande d’enregistrement] la marque antérieure était enregistrée depuis cinq ans au moins ». Par conséquent, lorsque la marque antérieure invoquée à l’appui d’une opposition est enregistrée depuis moins de cinq ans avant la publication de la demande d’enregistrement d’une marque communautaire, la preuve de l’usage sérieux ne peut pas encore être exigée et la marque antérieure doit être réputée avoir été utilisée [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 30 juin 2004, BMI Bertollo/OHMI − Diesel (DIESELIT), T‑186/02, Rec. p. II‑1887, points 67 et 68, et du 15 septembre 2009, Royal Appliance International/OHMI – BSH Bosch und Siemens Hausgeräte (Centrixx), T‑446/07, non publié au Recueil, point 17].

30      En l’espèce, il est constant que, à la date de la publication de la demande de marque, le 20 septembre 2004, la marque communautaire antérieure, qui a été enregistrée le 20 février 2002, n’avait pas été enregistrée depuis au moins cinq ans.

31      C’est donc sans commettre d’erreur que la chambre de recours a estimé, aux points 16 et 17 de la décision attaquée, que la demande de preuve de l’usage de la marque communautaire antérieure n’était pas recevable.

 Sur la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

32      La requérante fait valoir que la chambre de recours a commis une erreur en considérant qu’il existait une similitude entre les « produits en ces matières [cuir et imitation de cuir] non compris dans d’autres classes » visés par la marque demandée relevant de la classe 18 et les produits visés par la marque communautaire antérieure relevant de la classe 25. En outre, elle soutient que, eu égard aux différences visuelle, phonétique et conceptuelle entre les signes en conflit, le risque de confusion n’existe pas.

33      Il y a lieu de rappeler que, aux termes de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, sur opposition du titulaire d’une marque antérieure, la marque demandée est refusée à l’enregistrement lorsque, en raison de son identité ou de sa similitude avec une marque antérieure et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public du territoire sur lequel la marque antérieure est protégée. Le risque de confusion comprend le risque d’association avec la marque antérieure.

34      En outre, selon une jurisprudence constante, constitue un risque de confusion le risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement. Selon cette même jurisprudence, le risque de confusion doit être apprécié globalement, selon la perception que le public pertinent a des signes et des produits ou des services en cause, et en tenant compte de tous les facteurs pertinents en l’espèce, notamment de l’interdépendance de la similitude des signes et de celle des produits ou des services désignés [voir arrêt du Tribunal du 9 juillet 2003, Laboratorios RTB/OHMI – Giorgio Beverly Hills (GIORGIO BEVERLY HILLS), T-162/01, Rec. p. II-2821, points 30 à 33, et la jurisprudence citée].

35      Aux fins de l’application de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, un risque de confusion présuppose à la fois une identité ou une similitude des marques en conflit et une identité ou une similitude des produits ou des services qu’elles désignent. Il s’agit là de conditions cumulatives [voir arrêt du Tribunal du 22 janvier 2009, Commercy/OHMI – easyGroup IP Licensing (easyHotel), T-316/07, Rec. p. II-43, point 42, et la jurisprudence citée].

36      C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il y a lieu d’examiner l’appréciation par la chambre de recours du risque de confusion entre les marques en conflit.

 Sur le public pertinent

37      Le public visé est, ainsi que l’a relevé à juste titre la chambre de recours (voir points 20 à 22 de la décision attaquée), constitué, eu égard aux produits concernés, à savoir les produits en cuir et imitation du cuir, produits de voyage, articles vestimentaires, chaussures et chapellerie, du consommateur moyen normalement informé et raisonnablement attentif. En outre, la marque antérieure pertinente en l’espèce étant une marque communautaire, le territoire pertinent est celui de l’Union européenne, ainsi que l’a constaté la chambre de recours au point 20 de la décision attaquée, ce qui n’est pas contesté par la requérante.

 Sur la comparaison des produits

38      La chambre de recours a confirmé, à bon droit, la décision de la division d’opposition en ce que celle-ci a considéré qu’il existait une identité entre les produits visés par la marque demandée relevant de la classe 25 et les produits visés par la marque communautaire antérieure relevant de la classe 25.

39      En ce qui concerne les produits visés par la marque demandée relevant de la classe 18, la chambre de recours les a divisés en deux groupes. Elle a jugé que les produits relevant du premier groupe, à savoir les « produits en ces matières [cuir et imitation de cuir] non compris dans d’autres classes », présentaient, conformément à la jurisprudence, une similitude avec les produits relevant de la classe 25 visés par la marque communautaire antérieure, notamment dans la mesure où ces produits étaient souvent vendus dans les mêmes points de vente. En revanche, la chambre de recours a annulé la décision de la division d’opposition en ce qui concerne les produits relevant du second groupe de la classe 18, à savoir les « malles et valises ; sacs de voyage ; sacs de sport ; sacs à voiles ; parapluies, parasols », qui, selon la chambre de recours, ne présentaient pas de similitude avec les produits relevant de la classe 25 visés par la marque communautaire antérieure.

40      La requérante conteste cette appréciation au motif qu’il n’existe pas de similitude entre les « produits en ces matières [cuir et imitation de cuir] non compris dans d’autres classes » relevant de la classe 18 visés par la marque demandée et les produits visés par la marque communautaire antérieure relevant de la classe 25.

41      À cet égard, le Tribunal considère que, contrairement à ce que prétend la requérante, la chambre de recours a correctement conclu à la similitude entre les « produits en ces matières [cuir et imitation de cuir] non compris dans d’autres classes » relevant de la classe 18, visés par la marque demandée, et les produits visés par la marque communautaire antérieure relevant de la classe 25.

42      En effet, l’appréciation de la chambre de recours fait directement écho de la jurisprudence constante selon laquelle les produits relevant du premier groupe de la classe 18, à savoir les « produits en ces matières [cuir et imitation de cuir] non compris dans d’autres classes », tels que un sac à main, un porte-monnaie ou un portefeuille, sont fréquemment commercialisés avec les produits de la classe 25 dans des points de vente qui ne sont pas seulement constitués par des établissements relevant de la grande distribution, mais également des magasins plus spécialisés. Il s’agit là d’un facteur qui doit être pris en compte dans l’appréciation de la similitude de ces produits [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 11 juillet 2007, El Corte Inglés/OHMI – Bolaños Sabri (PiraÑAM diseño original Juan Bolaños), T-443/05, Rec. p. II-2579, points 45 ; du 10 septembre 2008, Tsakiris‑Mallas/OHMI – Late Editions (exē), T‑96/06, non publié au Recueil, point 31, et du 16 décembre 2009, Giordano Enterprises/OHMI – Dias Magalhães & Filhos (GIORDANO), T‑483/08, non publié au Recueil, point 23].

43      Il y a également lieu de rappeler que, comme le soutiennent à juste titre l’OHMI et l’intervenante, le Tribunal a confirmé l’existence d’une faible similitude entre les produits « sacs pour dames » et « chaussures pour dames » [arrêt du Tribunal du 1er mars 2005, Sergio Rossi/OHMI – Sissi Rossi (SISSI ROSSI), T‑169/03, Rec. p. II‑685, point 68].

44      L’existence d’une faible similitude a été ensuite reconnue par le Tribunal en ce qui concerne la relation entre l’ensemble des produits désignés par la marque antérieure, et relevant de la classe 25, et les « produits en ces matières [cuir et imitation de cuir] non compris dans d’autres classes », relevant de la classe 18, désignés par la marque dont l’enregistrement est demandé (arrêt PiraÑAM diseño original Juan Bolaños, point 42 supra, points 46 et 47).

45      Par ailleurs, s’agissant de la relation entre les « produits en cuir ou en imitation de cuir » relevant de la classe 18 visés par la marque demandée et les produits relevant de la classe 25, visés par la marque antérieure, il ressort également d’une jurisprudence constante que les « produits en cuir, ou en imitation de cuir » incluent les accessoires vestimentaires tels que les « sacs ou portefeuilles », fabriqués à partir de cette matière première, et en tant que tels contribuent, avec les vêtements et d’autres produits vestimentaires, à l’image extérieure du consommateur concerné, ce qui peut impliquer une coordination entre ses différentes composantes à l’occasion de leur création ou de leur acquisition. De plus, la circonstance que ces produits sont fréquemment vendus dans les mêmes points de vente spécialisés est de nature à faciliter la perception par le consommateur concerné des liens étroits existant entre eux et à renforcer l’impression que la responsabilité de leur fabrication incombe à la même entreprise. Il en résulte que certains des consommateurs perçoivent l’existence d’un lien étroit entre les vêtements, les chaussures et la chapellerie, relevant de la classe 25, et les accessoires vestimentaires que sont certains « produits en ces matières [cuir et imitation de cuir] non compris dans d’autres classes », relevant de la classe 18. En conséquence, les vêtements, les chaussures et la chapellerie relevant de la classe 25 et une catégorie des « produits en ces matières [cuir et imitation de cuir] non compris dans d’autres classes », relevant de la classe 18, constituée par les accessoires vestimentaires fabriqués en ces matières, présentent un degré de similitude qui ne saurait être qualifié de faible (voir, en ce sens, arrêts PiraÑAM diseño original Juan Bolaños, point 42 supra, points 49 à 51, exē, point 42 supra, point 32, et GIORDANO, point 42 supra, points 25 à 27).

46      En conséquence, c’est à bon droit que la décision attaquée a conclu, en substance, à la faible similitude entre les « produits en ces matières [cuir et imitation de cuir] non compris dans d’autres classes » relevant de la classe 18 visés par la demande de marque et les produits couverts par la marque communautaire antérieure relevant de la classe 25.

47      Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’argument de la requérante tirée d’une décision antérieure de la division d’annulation de l’OHMI qui aurait reconnu que les sacs à main, portefeuilles, porte-documents, serviettes et sacs pour les articles de sport doivent être considérés comme différents des vêtements et chaussures.

48      En effet, il ressort de la jurisprudence constante que les décisions que les chambres de recours de l’OHMI sont amenées à prendre, en vertu du règlement n° 207/2009, concernant l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire, relèvent de l’exercice d’une compétence liée et non d’un pouvoir discrétionnaire. Dès lors, la légalité desdites décisions doit être appréciée uniquement sur le fondement de ce règlement et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci (arrêt de la Cour du 26 avril 2007, Alcon/OHMI, C‑412/05 P, Rec. p. I‑3569, point 65, et arrêt ARTHUR ET FELICIE, point 22 supra, point 71).

 Sur la comparaison des signes

49      Les marques en conflit à comparer en l’espèce sont des marques figuratives constituées de signes complexes composés chacun d’un élément verbal et d’un élément figuratif.

50      Il convient de rappeler que l’appréciation globale du risque de confusion doit, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en conflit, être fondée sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci, en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants. La perception des marques qu’a le consommateur moyen des produits ou des services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale dudit risque. À cet égard, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas à un examen de ses différents détails (voir arrêt de la Cour du 12 juin 2007, OHMI/Shaker, C‑334/05 P, Rec. p. I‑4529, point 35, et la jurisprudence citée).

51      En outre, l’appréciation de la similitude entre deux marques ne peut se limiter à prendre en considération uniquement un composant d’une marque complexe et à le comparer avec une autre marque. Il y a lieu, au contraire, d’opérer la comparaison en examinant les marques en cause, considérées chacune dans son ensemble, ce qui n’exclut pas que l’impression d’ensemble produite dans la mémoire du public pertinent par une marque complexe puisse, dans certaines circonstances, être dominée par un ou plusieurs de ses composants (voir arrêt OHMI/Shaker, point 50 supra, point 41, et la jurisprudence citée). Ce n’est que si tous les autres composants de la marque sont négligeables que l’appréciation de la similitude pourra se faire sur la seule base de l’élément dominant (arrêts de la Cour OHMI/Shaker, point 50 supra, point 42, et du 20 septembre 2007, Nestlé/OHMI, C‑193/06 P, non publié au Recueil, point 42). Tel pourrait notamment être le cas lorsque ce composant est susceptible de dominer à lui seul l’image de cette marque que le public pertinent garde en mémoire, de telle sorte que tous les autres composants de la marque sont négligeables dans l’impression d’ensemble produite par celle-ci (arrêt Nestlé/OHMI, précité, point 43).

52      En l’espèce, la chambre de recours a conclu à une similitude visuelle et phonétique des marques en conflit, tout en excluant une similitude conceptuelle au motif que le terme « kitana » n’avait pas de signification particulière.

53      La requérante conteste l’appréciation de la chambre de recours et fait valoir qu’il n’existe pas de similitudes visuelle et phonétique entre les marques, dans la mesure où celles-ci contiennent des éléments figuratifs « radicalement différents » et que les premières lettres des deux marques, qui sont différentes et plus grandes, jouent, de ce fait, un rôle plus important dans la perception du public pertinent, ce qui serait confirmé par une pratique décisionnelle de l’OHMI. Cette différence de lettres en position initiale impliquerait également une différence du point de vue phonétique. La requérante fait valoir que l’appréciation de la perception des signes sur le plan phonétique par le public allemand ne serait pas pertinent en l’espèce dans la mesure où l’opposante n’aurait pas prouvé l’utilisation de sa marque en Allemagne. La requérante reconnaît en revanche que le terme « kitana » n’a pas de signification particulière et en conclut que les signes « véhiculent des idées très différentes ».

–       Sur la comparaison visuelle

54      En premier lieu, il convient de constater, comme l’a fait, en substance, la chambre de recours aux points 31 et 32 de la décision attaquée, que les signes en conflit sont tous deux composés d’un mot comportant chacun six lettres, dont les cinq dernières « i »,« t », « a », « n » et « a » sont identiques. Les deux termes sont écrits en caractères majuscules, à l’exception de la lettre « i » de la marque antérieure KiTANA. Les mots divergent par leurs premières lettres « g » et « k » écrites en caractères plus grands que les autres lettres. Les deux signes contiennent également un élément figuratif : une représentation de cinq flèches grises en arrière-plan de la marque demandée, et une représentation d’un globe stylisé figurant au-dessus de la deuxième lettre « a » de la marque communautaire antérieure.

55      En deuxième lieu, il convient de relever que c’est à bon droit que la chambre de recours a constaté, au point 33 de la décision attaquée, que les termes « gitana » et « kitana » des marques en conflit constituaient leurs éléments dominants, les éléments figuratifs des deux signes étant de nature décorative. En effet, aussi bien la représentation des flèches de la marque demandée que la représentation du globe de la marque communautaire antérieure peuvent être considérées comme plutôt banales et peu imaginatives, de sorte qu’elles sont négligeables dans l’impression d’ensemble que le public pertinent peut avoir des signes en conflit. En outre, les flèches de la marque demandée sont présentées dans des tons fades, donnant l’impression d’une représentation d’une ombre, ce qui diminue leur capacité à attirer l’attention du consommateur. Les éléments figuratifs des signes en conflit ne sont donc pas susceptibles de créer l’image des marques que le public pertinent gardera en mémoire et d’influencer de façon considérable l’impression globale produite par les signes. Partant, il convient de conclure que les éléments figuratifs des marques en conflit sont susceptibles d’être perçus par le consommateur essentiellement comme des éléments décoratifs, et non comme des éléments indiquant l’origine commerciale des produits.

56      En outre, il y a lieu de rappeler que, lorsqu’une marque est composée d’éléments verbaux et figuratifs, les premiers sont, en principe, plus distinctifs que les seconds, car le consommateur moyen fera plus facilement référence aux produits en cause en en citant le nom qu’en décrivant l’élément figuratif de la marque [voir arrêt du Tribunal du 22 mai 2008, NewSoft Technology/OHMI – Soft (Presto! Bizcard Reader), T‑205/06, non publié au Recueil, point 54, et la jurisprudence citée]. Au vu des caractéristiques de l’élément figuratif de la marque antérieure décrites au point précédent, c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré au point 33 de la décision attaquée que ce raisonnement s’appliquait à la présente espèce.

57      Par ailleurs, comme le soutient à juste titre l’intervenante, le fait que les termes « gitana » et « kitana » ne sont pas descriptifs des produits désignés, et possèdent alors un caractère distinctif intrinsèque par rapport à ces produits, renforce leur dominance dans l’appréciation globale des signes en conflit [voir arrêt du Tribunal du 13 décembre 2007, Cabrera Sánchez/OHMI – Industrias Cárnicas Valle (el charcutero artesano), T‑242/06, non publié au Recueil, point 53, et du 3 septembre 2010, Companhia Muller de Bebidas/OHMI – Missiato Industria e Comercio (61 A NOSSA ALEGRIA), T‑472/08, Rec. p. II‑3907, point 49 ].

58      En troisième lieu, force est de constater, ainsi que l’a relevé la chambre de recours, que les éléments dominants des signes en conflit, à savoir les termes « gitana » et « kitana », sont similaires d’un point de vue visuel. Contrairement à ce que prétend la requérante, le fait que les signes divergent par leurs premières lettres écrites avec des caractères plus grands, n’est pas de nature à atténuer la similitude visuelle résultant du groupe de cinq lettres « itana ». En outre, comme le relèvent à juste titre l’OHMI et l’intervenante, l’attention du consommateur n’est pas toujours concentrée sur le début d’un mot. S’il est vrai que la partie initiale des marques verbales peut être susceptible de retenir davantage l’attention du consommateur que les parties suivantes [voir, en ce sens, arrêts du Tribunal du 17 mars 2004, El Corte Inglés/OHMI – González Cabello et Iberia Líneas Aéreas de España (MUNDICOR), T-183/02 et T-184/02, Rec. p. II-965, point 81, et du 16 mars 2005, L’Oréal/OHMI – Revlon (FLEXI AIR), T-112/03, Rec. p. II-949, points 64 et 65], en l’espèce, la différence au niveau de la première lettre de chaque signe ne suffit pas pour neutraliser la similitude existant entre les signes au niveau de toutes les autres lettres constituant la plus grande partie des signes en cause [voir, en ce sens, arrêt du Tribunal du 22 mai 2012, Aitic Penteo/OHMI – Atos Worldline (PENTEO), T‑585/10, non publié au Recueil, point 67]. C’est donc à juste titre que la chambre de recours a conclu à la similitude des signes sur le plan visuel.

59      Cette conclusion ne saurait être infirmée par l’argument de la requérante tiré de la pratique décisionnelle de l’OHMI, selon laquelle le fait que la différence entre les signes en conflit provient de leurs premières lettres constituerait un élément plus frappant. Conformément à la jurisprudence citée au point 48 ci-dessus, la légalité des décisions des chambres de recours de l’OHMI doit être appréciée uniquement sur le fondement du règlement n° 207/2009 et non sur celui d’une pratique décisionnelle antérieure à celles-ci.

–       Sur la comparaison phonétique

60      La chambre de recours a conclu que, dans l’ensemble, l’impression phonétique des signes en conflit sera hautement similaire en raison de la similitude de leurs premières syllabes et de l’identité de leurs deuxièmes et troisièmes syllabes.

61      Tout en contestant les conclusions de la chambre de recours quant à la similitude phonétique des premières lettres « g » et « k » des signes en conflit, la requérante admet un certain degré de similitude phonétique entre les signes compte tenu du fait que ceux-ci ont en commun le groupe de lettres « itana ».

62      À cet égard, force est de constater que, comme l’a observé la chambre de recours, les deuxièmes et troisièmes syllabes des signes en conflit sont identiques phonétiquement.

63      S’agissant de la comparaison phonétique des premières syllabes « gi » et « ki », il convient de constater que l’impression phonétique que celles-ci procurent est hautement similaire dans certains États membres de l’Union, territoire pertinent en l’espèce, et à tout le moins similaire dans d’autres. En effet, comme l’a relevé la chambre de recours au point 34 de la décision attaquée, les lettres « g » et « k » sont toutes deux des consonnes occlusives vélaires, la lettre « g » étant une consonne occlusive vélaire sonore et la lettre « k », une consonne occlusive vélaire sourde. En conséquence, et compte tenu de l’identité de la lettre « i », les premières syllabes des deux termes produisent une impression phonétique similaire, à tout le moins pour le public germanophone.

64      En outre, il y a lieu de rejeter l’argument de la requérante selon lequel l’appréciation de la similitude phonétique des signes faite par la chambre de recours par rapport à l’impression du public germanophone ne serait pas pertinent en l’espèce, étant donné que l’intervenante n’aurait pas prouvé l’usage de la marque antérieure en Allemagne. À cet égard, force est de constater que, comme il a été relevé au point 31 ci‑dessus, la preuve de l’usage sérieux de la marque communautaire antérieure ne devait pas être démontrée par l’intervenante en ce qui concerne l’ensemble du territoire de l’Union, y inclus en Allemagne. En outre, conformément à la jurisprudence constante, il résulte du caractère unitaire de la marque communautaire, consacré à l’article 1er, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, qu’une marque communautaire antérieure, telle que celle de l’espèce, est protégée de façon identique dans tous les États membres et est opposable à toute demande d’enregistrement de marque communautaire qui porterait atteinte à cette protection, ne fût-ce que par rapport à la perception des consommateurs d’une partie du territoire de l’Union (arrêt de la Cour du 18 septembre 2008, Armacell/OHMI, C‑514/06 P, non publié au Recueil, point 57). Il s’ensuit par ailleurs que le principe consacré à l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, selon lequel il suffit, pour refuser l’enregistrement d’une marque, qu’un motif absolu de refus n’existe que dans une partie de l’Union, s’applique, par analogie, au cas d’un motif relatif de refus au sens de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 [voir arrêt du Tribunal du 27 novembre 2007, Gateway/OHMI – Fujitsu Siemens Computers (ACTIVY Media Gateway), T‑434/05, non publié au Recueil, point 36, et la jurisprudence citée]. En conséquence, même à supposer que la perception du public germanophone retenue par la chambre de recours ne soit pas pertinente en l’espèce, cela ne priverait pas de protection la marque communautaire antérieure sur l’ensemble du territoire de l’Union compte tenu de la perception des deux signes en conflit que peut avoir le public pertinent sur les territoires des autres États membres de l’Union.

–       Sur la comparaison conceptuelle

65      La chambre de recours a conclu que, sur le plan conceptuel, les signes ne présentaient pas de similitude, étant donné que le terme « gitana » signifie « gitane » en espagnol et en italien, alors que le terme « kitana » n’a de signification particulière dans aucune des langues de l’Union.

66      Cette appréciation n’est pas contestée par la requérante qui soutient que les signes en conflit transmettent des idées très différentes.

67      Le Tribunal observe que, compte tenu du fait que le terme « kitana » n’a de signification dans aucune des langues de l’Union, ce qui est constant entre les parties, il n’est pas possible de procéder à une comparaison des signes sur le plan conceptuel [voir, par analogie, arrêt du Tribunal du 22 mars 2007, Saint-Gobain Pam/OHMI – Propamsa (PAM PLUVIAL), T‑364/05, Rec. p. II‑757, point 101].

 Sur le risque de confusion

68      L’appréciation globale du risque de confusion implique une certaine interdépendance des facteurs pris en compte et, notamment, de la similitude des marques et de celle des produits ou des services désignés. Ainsi, un faible degré de similitude entre les produits ou les services désignés peut être compensé par un degré élevé de similitude entre les marques, et inversement [arrêt de la Cour du 29 septembre 1998, Canon, C‑39/97, Rec. p. I‑5507, point 17, et arrêt du Tribunal du 14 décembre 2006, Mast-Jägermeister/OHMI – Licorera Zacapaneca (VENADO avec cadre e.a.), T‑81/03, T‑82/03 et T‑103/03, Rec. p. II‑5409, point 74].

69      Compte tenu des similitudes visuelle et phonétique des signes en conflit et eu égard au fait que les produits désignés par les marques en conflit sont en partie identiques et en partie similaires, c’est sans commettre d’erreur de droit que la chambre de recours a conclu qu’il existait un risque de confusion entre celles-ci. Ainsi, c’est à juste titre que la chambre de recours a confirmé la décision de la division d’opposition refusant l’enregistrement de la marque demandée à l’exception des « malles et valises ; sacs de voyage ; sacs de sport ; sacs à voiles ; parapluies, parasols », produits relevant de la classe 18 jugés comme n’ayant pas de similitudes avec les produits désignés par la marque communautaire antérieure.

70      Cette appréciation ne saurait être remise en cause par l’argument de la requérante tiré d’une prétendue renommée ou notoriété du signe gitana que la requérante entend prouver par les pièces produites en annexes A 7 à A 10 à sa requête.

71      À cet égard, il convient de rappeler, premièrement, que, ainsi qu’il a été exposé au point 22 ci-dessus, certaines des preuves apportées par la requérante à l’appui de son allégation selon laquelle le terme « gitana » jouit d’une certaine réputation sont irrecevables.

72      Deuxièmement, il convient de rappeler que la renommée d’une marque n’est pertinente, dans le cadre de l’appréciation du risque de confusion, que lorsqu’il s’agit de celle de la marque antérieure (arrêt de la Cour du 3 septembre 2009, Aceites del Sur-Coosur/Koipe, C‑498/07 P, Rec. p. I‑7371, point 84).

73      Troisièmement, comme le soutiennent à juste titre l’OHMI et l’intervenante, à supposer que la notoriété du signe gitana soit établie, elle ne pourrait en tout état de cause être prise en considération que pour autant qu’elle concerne les produits visés par la demande de marque, seuls pertinents en l’espèce. Or, la requérante n’a présenté de preuve d’une certaine réputation du signe gitana que pour les bateaux et les courses de bateau, qui ne correspondent pas aux produits relevant des classes 18 et 25 visés par la demande d’enregistrement de la marque.

74      Quatrièmement, cette appréciation ne saurait être infirmée par l’argument de la requérante selon lequel les produits visés par la marque demandée sont commercialisés par le biais de magasins d’articles pour la navigation de skippers et de magasins spécialisés dans les activités nautiques. En effet, il ressort d’une jurisprudence constante que les modalités de commercialisation particulières des produits désignés par les marques pouvant varier dans le temps et suivant la volonté des titulaires de ces marques, l’analyse prospective du risque de confusion entre deux marques ne saurait dépendre des intentions commerciales, réalisées ou non, et par nature subjectives, des titulaires des marques [arrêt de la Cour du 15 mars 2007, T.I.M.E. ART/OHMI, C‑171/06 P, non publié au Recueil, point 59, et arrêt du Tribunal du 9 septembre 2008, Honda Motor Europe/OHMI – Seat (MAGIC SEAT), T‑363/06, Rec. p. II‑2217, point 63]. Ainsi, est sans pertinence dans ce contexte l’utilisation qu’entend faire la requérante de la marque demandée. En effet, dans le cadre de la procédure d’opposition, l’OHMI peut seulement prendre en compte la liste des produits demandés telle qu’elle découle de la demande de marque concernée, sous réserve des modifications éventuelles de cette dernière [arrêt du Tribunal du 13 avril 2005, Gillette/OHMI – Wilkinson Sword (RIGHT GUARD XTREME sport), T‑286/03, non publié au Recueil, point 33 ; voir également, en ce sens, arrêt PAM PLUVIAL, point 67 supra, point 89].

75      Il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la chambre de recours a correctement conclu à l’existence d’un risque de confusion entre les marques en conflit. Partant, le moyen de la requérante tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 doit être écarté comme non fondé.

76      Ainsi, il y a lieu de rejeter le recours de la requérante dans son intégralité, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de la demande de la requérante visant à autoriser l’enregistrement de la marque demandée.

 Sur les dépens

77      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure du Tribunal, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.

78      La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de l’OHMI et de l’intervenante.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (première chambre)

déclare et arrête :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Gitana SA est condamnée aux dépens.

Azizi

Kancheva

Buttigieg

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 16 septembre 2013.

Signatures


* Langue de procédure : l’anglais.