Language of document : ECLI:EU:T:2011:237

DOCUMENT DE TRAVAIL

ORDONNANCE DU TRIBUNAL (septième chambre)

24 mai 2011 (*)

« Responsabilité non contractuelle – Régime d’aides prévu par la législation italienne – Régime déclaré compatible avec le marché commun – Mesure transitoire – Exclusion de certaines entreprises – Principe de protection de la confiance légitime − Violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit conférant des droits aux particuliers – Absence − Incompétence manifeste − Recours manifestement dépourvu de tout fondement en droit »

Dans l’affaire T‑373/08,

Nuova Agricast Srl, établie à Cerignola (Italie), représentée par Me M. A. Calabrese, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. V. Di Bucci et Mme E. Righini, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

ayant pour objet une demande en réparation du préjudice prétendument subi par la requérante du fait de l’adoption par la Commission de la décision du 12 juillet 2000 de ne pas soulever d’objections à l’encontre d’un régime d’aides aux investissements dans les régions défavorisées de l’Italie [aide d’État N 715/99 – Italie (SG 2000 D/105754)] et du fait du comportement de la Commission au cours de la procédure ayant précédé l’adoption de cette décision,

LE TRIBUNAL (septième chambre),

composé de M. A. Dittrich, président, Mme I. Wiszniewska-Białecka (rapporteur) et M. M. Prek, juges,

greffier : M. E. Coulon,

rend la présente

Ordonnance

 Antécédents et faits à l’origine du litige

 Régimes d’aides prévus par la loi italienne n° 488/92 et autorisés jusqu’au 31 décembre 1999

1        Par le decreto legge n. 415, su rifinanziamento della legge 1° marzo 1986, n. 64, recante disciplina organica dell’intervento straordinario nel Mezzogiorno (décret-loi n° 415 relatif au refinancement de la loi n° 64, du 1er mars 1986, portant réglementation organique de l’intervention extraordinaire dans le Mezzogiorno), du 22 octobre 1992 (GURI n° 249, du 22 octobre 1992, p. 3), converti en loi, après modification, par la legge n. 488 (loi n° 488), du 19 décembre 1992 (GURI n° 299, du 21 décembre 1992, p. 3, et rectificatif, GURI n° 301, du 23 décembre 1992, p. 40), elle-même modifiée par le decreto legge n. 96 (décret-loi n° 96), du 3 avril 1993 (GURI n° 79, du 5 avril 1993, p. 5) (ci-après la « loi n° 488/92 »), le législateur italien a prévu des mesures financières destinées à inciter les entreprises à développer certaines activités productives dans les régions défavorisées de l’Italie.

2        Le régime d’aides instauré par la loi n° 488/92 était appliqué de façon périodique au moyen d’avis de mise en œuvre (ci-après les «  avis »). Le Comitato interministeriale di programmazione economica (Comité interministériel de programmation économique, ci-après le « CIPE ») allouait, par décision, une somme destinée au financement de l’avis concerné, pour chaque région italienne concernée. Le ministère de l’Industrie, du Commerce et de l’Artisanat italien (ci-après le « MICA ») fixait les délais dans lesquels les entreprises pouvaient présenter leurs demandes d’aides, lesquelles devaient être accompagnées d’un projet d’investissement. Les entreprises étaient classées par ordre de mérite, sur la base de certains indicateurs fixés par le CIPE, dans un tableau régional (ci-après le « tableau »), le projet présentant les meilleures garanties de viabilité occupant la meilleure place. Les aides étaient octroyées selon l’ordre du tableau, jusqu’à épuisement des ressources disponibles pour la période de référence.

3        Par décision du 1er mars 1995 [aide d’État N 40/95 – Aides à finalité régionale en Italie (SG 1995 D/3693), communication succincte au JO C 184, p. 4], la Commission a décidé de ne pas soulever d’objections à l’encontre de ce régime d’aides fondé sur la loi n° 488/92 jusqu’au 31 décembre 1996 ou jusqu’au 31 décembre 1999.

4        Le 20 octobre 1995, le MICA a adopté, par le decreto n. 527 (décret n° 527), le Regolamento recante le modalità e le procedure per la concessione ed erogazione delle agevolazioni in favore delle attività produttive nelle aree depresse del Paese (règlement relatif aux modalités et aux procédures d’octroi et d’affectation des subventions en faveur des activités productives dans les zones défavorisées du pays) (GURI n° 292, du 15 décembre 1995, p. 3, ci-après le « décret n° 527/95 »).

5        Aux termes de l’article 6, paragraphe 8, du décret n° 527/95, « les demandes pour lesquelles l’octroi provisoire des aides n’est pas prévu, en raison de disponibilités financières inférieures au montant des aides globalement sollicitées, sont inscrites dans les tableaux pour la répartition des aides prévues pour le seul exercice suivant celui auquel se réfère la demande » (mécanisme dit d’« inscription automatique »), « si elles ne sont pas retirées par le demandeur en vue d’une reformulation et d’une nouvelle présentation ultérieure » (mécanisme dit de « reformulation ») et, « [d]ans ce dernier cas, aux fins de l’éligibilité des dépenses, la première demande d’aide subsiste ». Aux termes de l’article 4, paragraphe 3, de ce même décret, les dépenses étaient en principe éligibles à l’aide à condition qu’elles aient été exposées postérieurement à la présentation de la demande d’aide. Ces dispositions ont régi les deux premiers avis de mise en œuvre du régime d’aides approuvé par la décision du 1er mars 1995.

6        Le décret n° 527/95 a été modifié notamment par le decreto ministeriale n. 319 (décret ministériel n° 319), du 31 juillet 1997 (GURI n° 221, du 22 septembre 1997, p. 31), et publié dans une version consolidée (GURI n° 221, du 22 septembre 1997, p. 66, ci-après le « décret n° 527/95, deuxième version »). La modification portait en particulier sur le dies a quo de l’éligibilité des dépenses fixé par l’article 4, paragraphe 3, du décret n° 527/95. Étaient éligibles à l’aide non plus les dépenses exposées à compter du jour de présentation de la demande d’aide, mais celles exposées à compter du jour suivant la date de clôture de l’avis précédent. Les modifications introduites prenaient effet pour les demandes présentées à partir du troisième avis. Par décision du 21 mai 1997 [aide d’État N 27/A/97 – Italie (SG 1997 D/4949) (communication succincte au JO C 242, p. 4, ci-après la « décision du 21 mai 1997 »)], la Commission a décidé de ne pas soulever d’objections à ces modifications et à la prorogation du régime d’aides prévu par la loi n° 488/92 jusqu’au 31 décembre 1999.

7        Dans le cadre du troisième avis, la requérante, la société Nuova Agricast Srl, a présenté une demande d’aide pour un projet d’investissement. Le montant total des dépenses prévues s’élevait à 9 516 000 000 lires italiennes, cette somme incluant des dépenses exposées avant la présentation de la demande d’aide, mais après la date de clôture de l’avis précédent.

8        Par le decreto n. 45718 (décret n° 45718), du 14 août 1998, le MICA a annoncé que la demande d’aide présentée par Nuova Agricast, jugée éligible, avait été classée au 1 386e rang, non utile pour l’octroi d’une aide. Ce décret indiquait que, conformément au décret n° 527/95, deuxième version, les demandes classées en rang non utile pour l’obtention d’une aide dans le cadre de ce troisième avis seraient inscrites automatiquement, inchangées, dans le tableau relatif au quatrième avis, en maintenant valides, aux fins de l’éligibilité des dépenses à l’aide, les conditions applicables à la demande initiale. Il précisait également que, si une entreprise entendait maintenir valides les conditions d’éligibilité des dépenses à l’aide et, en même temps, reformuler sa demande d’aide, elle devrait renoncer à cette inscription automatique et représenter sa demande dans les délais de présentation relatifs au seul cinquième avis (correspondant au premier semestre de 1999), qui devaient être fixés par décret.

9        La requérante a opté pour la reformulation. Toutefois, aucun avis utile permettant la reformulation de sa demande n’a été publié par les autorités italiennes avant le 31 décembre 1999.

 Prorogation du régime d’aides prévu par la loi n° 488/92

10      Le 18 novembre 1999, en application de l’article 88, paragraphe 3, CE, les autorités italiennes ont notifié à la Commission, qui l’a enregistré sous la référence N 715/99, un projet de régime d’aides applicable à compter du 1er janvier 2000, également fondé sur la loi n° 488/92. Cette notification a été suivie d’un échange de correspondance entre la Commission et les autorités italiennes et d’une réunion entre des représentants du gouvernement italien et les services de la Commission le 16 mai 2000.

11      Parmi la correspondance échangée figure une lettre des autorités italiennes du 3 avril 2000. Dans cette lettre, le MICA faisait valoir que, au cas où la Commission maintiendrait sa position selon laquelle le principe de l’éligibilité à l’aide des dépenses engagées à compter du jour suivant la date de clôture de l’avis précédent est contraire au principe de nécessité des aides d’État, il serait indispensable, compte tenu de la modification considérable qui serait ainsi apportée au régime d’aides tel qu’il s’appliquait par le passé, que la possibilité de prise en compte rétroactive des dépenses engagées à compter de la date de clôture de l’avis précédent fasse l’objet d’une mesure transitoire, limitée à la seule première application du nouveau régime.

12      Parmi cette correspondance figure également une lettre de la Commission du 29 mai 2000 (ci-après la « lettre du 29 mai 2000 »). Dans cette lettre, la Commission se réfère à la réunion du 16 mai 2000. Elle y indique ce qui suit : « […] les autorités italiennes ont présenté la proposition de prévoir une disposition de transition pour le régime en question [aide d’État N 715/99], pour la seule première phase de l’application de ce régime, sur la base de laquelle on aurait voulu reconnaître la prise en compte rétroactive des dépenses éligibles à l’aide depuis la date de clôture du dernier avis ayant eu lieu. » La Commission expose ensuite que « [l]a proposition des autorités italiennes vise à éviter toute discontinuité entre le précédent régime et le nouveau régime, principalement en raison de l’attente légitime des entreprises […] qui seraient concernées par ladite règle transitoire et qui appartiendraient à deux catégories distinctes : a) celles [ayant] présenté une demande d’aide au titre du dernier avis utile, favorablement instruite par les banques concessionnaires et inscrite dans les tableaux régionaux, mais qui n’ont pas obtenu d’aide en raison de l’insuffisance des ressources financières [disponibles] ; b) celles n’[ayant] pas encore présent[é] [une demande], bien que l’exécution du projet d’investissement soit déjà entamée ».

13      S’agissant de la catégorie visée sous a), la Commission a invité les autorités italiennes, dans la lettre du 29 mai 2000, « à s’engager à considérer, exclusivement pour la première phase d’application du nouveau régime, les demandes en suspens dans le cadre du dernier avis intervenu, exactement comme ayant été instruites favorablement et inscrites dans les derniers tableaux ». S’agissant de la catégorie visée sous b), elle a invité lesdites autorités à retirer la proposition relative à l’éligibilité du projet d’investissement dans les cas où l’exécution du projet a été entamée antérieurement à la demande d’aide, cette proposition n’étant pas conforme aux lignes directrices concernant les aides d’État à finalité régionale (JO 1998, C 74, p. 9). Les autorités italiennes ont par la suite modifié leur projet de régime d’aides.

14      Le decreto n. 133 (décret n° 133) du MICA, du 9 mars 2000, publié le 25 mai 2000 (GURI n° 120, du 25 mai 2000, p. 5), réglait la transition entre le régime d’aides dont l’autorisation était venue à expiration le 31 décembre 1999 et le nouveau régime pour lequel l’approbation de la Commission avait été sollicitée le 18 novembre 1999 pour la période 2000-2006. Ce décret prévoyait notamment que les demandes présentées au titre de l’un des avis utiles antérieurs à son entrée en vigueur, qui n’ont pas été classées en rang utile et qui peuvent bénéficier des conditions prévues à l’article 6, paragraphe 8, du décret n° 527/95, deuxième version (point 5 ci-dessus), pouvaient, en ce qui concerne le premier avis utile suivant ladite entrée en vigueur, avoir recours à la seule reformulation, selon les modalités et les procédures qu’il introduisait. Cette transition a été mise en place en particulier au moyen d’une modification du décret n° 527/95, deuxième version (GURI n° 120, du 25 mai 2000, p. 60, ci-après le « décret n° 527/95, troisième version »).

15      Par décision du 12 juillet 2000 [aide d’État N 715/99 – Italie (SG 2000 D/105754), communication succincte au JO C 278, p. 26, ci-après la « décision du 12 juillet 2000 »], la Commission a décidé de ne pas soulever d’objections à l’encontre de ce régime d’aides jusqu’au 31 décembre 2006. Cette décision contient, dans sa partie décrivant le mécanisme de fonctionnement et d’application du régime d’aides notifié par les autorités italiennes, un paragraphe libellé comme suit :

« Seulement à l’occasion de la première application du régime en cause, c’est-à-dire lors du premier avis qui sera organisé au titre de ce régime, et sous réserve, en tout état de cause, que les demandes d’aide aient été introduites avant le début d’exécution des projets d’investissement, les demandes introduites au titre du dernier avis, organisé sous le précédent régime approuvé par la Commission jusqu’au 31 décembre 1999, qui ont été considérées comme éligibles à l’aide, mais pour lesquelles aucune aide financière n’a été octroyée à cause de la limitation des ressources budgétaires allouées à cet avis, seront admises à titre exceptionnel. »

 Mesures d’application de la décision du 12 juillet 2000

16      Le 18 juillet 2000, deux décrets du MICA, datés du 14 juillet 2000, ont été publiés (GURI n° 166, du 18 juillet 2000, p. 49). Le premier fixait les délais de présentation des demandes d’aides pour certaines régions d’Italie du 24 juillet au 30 septembre 2000. Le second [Misure massime consentite relative alle agevolazioni in favore delle attività produttive nelle aree depresse del Paese di cui alla legge n° 488/92 per le regioni Basilicata, Calabria, Campania, Puglia, Sardegna e Sicilia (décret fixant les mesures maximales consenties quant aux subventions en faveur des activités productives dans les régions défavorisées du pays visées par la loi n° 488/92 pour les régions de Basilicate, de Calabre, de Campanie, des Pouilles, de Sardaigne et de Sicile)], précisait notamment que lesdites aides pouvaient être octroyées, compte tenu de la décision du 12 juillet 2000, exclusivement sur la base des dépenses inscrites dans des projets d’investissement lancés à partir du jour suivant celui de la présentation de la demande d’aide, ainsi que, pour la seule première application du nouveau régime, sur la base des dépenses considérées comme éligibles à l’aide dans le cadre des projets relatifs au dernier avis utile, dont le résultat de l’instruction a été positif et qui n’ont pas obtenu d’aide en raison de l’insuffisance des ressources financières disponibles.

17      Le 28 juillet 2000, le MICA a publié la circulaire n° 900 315, datée du 14 juillet 2000 (supplément ordinaire n° 122 à la GURI n° 175, du 28 juillet 2000). Cette circulaire explicative indiquait notamment que, conformément à la décision du 12 juillet 2000, les demandes présentées au titre du quatrième avis et celles présentées au titre du septième avis, à l’exclusion de celles inscrites automatiquement ou reformulées dans le cadre de l’un de ces avis, qui avaient été instruites positivement, mais qui n’avaient pas obtenu d’aide, pouvaient être inscrites dans les tableaux pertinents relatifs au seul premier avis utile suivant la publication de cette circulaire, « en maintenant valides les conditions de rétroactivité des dépenses en vigueur en ce qui concerne la demande d’aide initiale ».

18      Les demandes d’aides introduites au titre du troisième avis qui attendaient d’être reformulées dans le cadre du premier avis utile suivant la renonciation à l’inscription automatique ne pouvant pas être reformulées dans le cadre du premier avis qui allait être organisé dans le cadre du nouveau régime d’aides autorisé par la décision du 12 juillet 2000 (huitième avis de mise en œuvre du régime d’aides organisé sur la base de la loi n° 488/92), la requérante a reformulé sa demande de manière informelle, en soumettant un dossier à la banque concernée.

19      Le tableau relatif au huitième avis a été publié à la Gazzetta ufficiale della Repubblica italiana (journal officiel de la République italienne) le 26 mai 2001. Compte tenu des conditions en vigueur dans le cadre du régime d’aides autorisé par la décision du 12 juillet 2000, la requérante n’a pas pu formellement présenter sa demande d’aide reformulée et sa demande n’a donc pas été inscrite dans ce tableau. La requérante estime toutefois que sa demande reformulée, si elle avait pu être présentée, aurait été classée en rang utile pour l’octroi d’une aide.

20      La requérante a alors introduit un recours devant le Tribunale ordinario di Roma (tribunal ordinaire de Rome, Italie) aux fins de voir condamner le ministère des Activités productives italien, qui a repris les attributions du MICA, à réparer le préjudice qu’elle prétend avoir subi du fait de la non-perception de l’aide sollicitée. Dans le cadre de cette procédure, le Tribunale ordinario di Roma a introduit une demande de décision préjudicielle, laquelle portait sur la validité de la décision du 12 juillet 2000 au regard du principe d’égalité de traitement et de l’obligation de motivation.

21      Par arrêt du 15 avril 2008, Nuova Agricast (C‑390/06, Rec. p. I‑2577), la Cour a répondu à cette demande que l’examen de la question posée n’a révélé aucun élément de nature à affecter la validité de la décision du 12 juillet 2000 au regard du principe d’égalité de traitement et de l’obligation de motivation.

22      Par ailleurs, le 30 janvier 2001, le Consiglio di Stato (Conseil d’État italien) a rendu une décision dans le cadre de l’examen d’un recours qui avait été introduit par une entreprise à l’encontre des mesures nationales de mise en œuvre de la décision du 12 juillet 2000 (avis n° 55/2001). Le Consiglio di Stato a considéré que, en optant pour la reformulation dans le cadre prévu par le décret n° 527/95, deuxième version, les entreprises avaient accepté le risque que, en attendant le lancement d’un nouvel avis, la réglementation change et les empêche éventuellement de bénéficier des droits qui seraient nés au moment où l’option pour la reformulation a été exercée. Il a également considéré que la procédure commençant par la demande reformulée était une procédure différente de celle engagée par la première demande, à laquelle la nouvelle réglementation intervenue entre-temps devait s’appliquer.

23      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 21 septembre 2005, la requérante a introduit un recours tendant à obtenir la condamnation de la Commission à réparer le préjudice qu’elle prétendait avoir subi en raison de l’adoption de la décision du 12 juillet 2000 et du comportement de la Commission au cours de la procédure ayant précédé l’adoption de cette décision. Ce préjudice consisterait, d’une part, en la non-obtention de l’aide qu’elle aurait obtenue si elle avait pu reformuler la demande introduite au titre du troisième avis organisé selon la loi n° 488/92 dans le cadre du huitième avis organisé selon cette même loi et, d’autre part, en le fait que le résultat de la gestion caractéristique de l’entreprise requérante, qui a été obtenu au cours de l’exercice financier clos le 30 juin 2002, est inférieur à celui qui aurait été atteint si le projet d’investissement avait été achevé (affaire T‑362/05, Nuova Agricast/Commission).

24      Par arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission (T‑362/05 et T‑363/05, non publié au Recueil), le Tribunal a rejeté ce recours comme étant non fondé.

25      Par requête déposée au greffe de la Cour le 12 février 2009, la requérante a introduit un pourvoi à l’encontre de l’arrêt Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra.

26      Par arrêt du 14 octobre 2010, Nuova Agricast et Cofra/Commission (C‑67/09 P, non encore publié au Recueil), la Cour a rejeté ce pourvoi.

 Procédure et conclusions des parties

27      Par requête déposée au greffe du Tribunal le 3 septembre 2008, la requérante a introduit le présent recours.

28      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 22 octobre 2008, la Commission a demandé au Tribunal, conformément à l’article 77 du règlement de procédure du Tribunal, de suspendre la procédure dans la présente affaire jusqu’au prononcé de l’arrêt du Tribunal dans l’affaire T‑362/05, Nuova Agricast/Commission. Par cette même lettre, la Commission a présenté une demande de mesure d’organisation de la procédure au titre de l’article 64, paragraphe 4, du règlement de procédure, visant à ce qu’elle soit autorisée, à titre subsidiaire et en toute hypothèse après l’éventuelle reprise de la procédure, à se concentrer, dans ses conclusions écrites, d’une part, sur la question de la recevabilité du recours et, d’autre part, quant au fond de l’affaire, sur les questions relatives à l’existence de comportements illégaux imputables à la Commission, à la réalité et la nature du préjudice invoqué, ainsi qu’au lien de causalité entre le comportement reproché à la Commission et le préjudice invoqué.

29      Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 29 octobre 2008, la requérante a indiqué, d’une part, qu’elle s’opposait à la suspension demandée, au moins jusqu’au dépôt du mémoire en défense de la Commission et, d’autre part, qu’elle renonçait à présenter des observations sur la demande de mesure d’organisation de la procédure déposée par la Commission.

30      Par ordonnance du 20 novembre 2008, le président de la première chambre du Tribunal a suspendu la procédure dans la présente affaire, en application de l’article 77, sous d), du règlement de procédure, jusqu’au prononcé de la décision du Tribunal mettant fin à l’instance dans l’affaire T‑362/05, Nuova Agricast/Commission.

31      La procédure a repris son cours le 2 décembre 2008.

32      Par décision du 15 décembre 2008, le Tribunal a admis la demande de mesure d’organisation de la procédure qui avait été présentée par la Commission et l’a invitée à se concentrer, dans ses conclusions écrites, d’une part, sur la question de la recevabilité du recours et, d’autre part, quant au fond de l’affaire, sur les questions concernant l’existence de comportements illégaux imputables à la Commission, la réalité et la nature du préjudice allégué et le lien de causalité entre le comportement reproché à la Commission et le préjudice allégué.

33      La Commission a déposé son mémoire en défense le 19 février 2009.

34      Par ordonnance du 4 mai 2009, le président de la première chambre du Tribunal, les parties entendues, a suspendu la procédure dans la présente affaire, en application de l’article 77, sous d), du règlement de procédure, jusqu’au prononcé de la décision de la Cour mettant fin à l’instance dans l’affaire C‑67/09 P, Nuova Agricast et Cofra/Commission.

35      La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée à partir de la nouvelle année judiciaire, le juge rapporteur a été affecté à la septième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.

36      La procédure a repris son cours le 14 octobre 2010.

37      Par lettre du 21 octobre 2010, le Tribunal a invité les parties à lui présenter les enseignements qu’elles tiraient, aux fins du recours dans la présente affaire, de l’arrêt du 14 octobre 2010, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 26 supra.

38      La requérante n’a pas présenté de réponse à cette question. Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 5 novembre 2010, la Commission a répondu que, selon elle, il appartenaient à la requérante de se désister de son recours et que, dans le cas contraire, le Tribunal devrait rejeter le présent recours par voie d’ordonnance adoptée sur le fondement de l’article 111 du règlement de procédure, soit comme manifestement irrecevable pour les motifs exposés dans son mémoire en défense, soit comme manifestement non fondé, pour les motifs exposés dans l’arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra.

39      Par lettre du 11 novembre 2010, le Tribunal a invité la requérante à présenter ses observations sur la réponse de la Commission.

40      La requérante n’a pas présenté d’observations sur cette réponse.

41      En application de l’article 47, paragraphe 1, du règlement de procédure, le Tribunal (septième chambre), a décidé qu’un second échange de mémoires n’était pas nécessaire.

42      La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        constater et déclarer que, en adoptant les comportements illégaux indiqués dans la requête, et d’éventuels autres comportements illégaux que l’instruction ferait apparaître, la Commission a violé de manière grave et manifeste le droit de l’Union et a causé un préjudice patrimonial à la requérante ;

–        condamner, par conséquent, la Commission à lui verser :

–        1 447 249 euros, ou un autre montant, supérieur ou inférieur, qui serait déterminé, éventuellement en accord avec la Commission, en cours d’instance, à titre de réparation du préjudice consistant en le fait que le résultat de la gestion caractéristique de l’entreprise requérante qui a été obtenu au cours de l’exercice financier clos le 30 juin 2003 est inférieur à celui qui aurait été atteint si le projet d’investissement avait été achevé, réévalué selon les indices de l’Istituto nazionale di statistica (Institut national des statistiques italien) (ISTAT) à partir du 1er juillet 2003 et jusqu’à la date de l’arrêt ;

–        1 432 497 euros, ou un autre montant, supérieur ou inférieur, qui serait déterminé, éventuellement en accord avec la Commission, en cours d’instance, à titre de réparation du préjudice consistant en le fait que le résultat de la gestion caractéristique de l’entreprise requérante qui a été obtenu au cours de l’exercice financier clos le 30 juin 2004 est inférieur à celui qui aurait été atteint si le programme d’investissement avait été achevé, réévalué selon les indices de l’ISTAT à partir du 1er juillet 2004 et jusqu’à la date de l’arrêt ; 

–        2 009 197 euros, ou un autre montant, supérieur ou inférieur, qui serait déterminé, éventuellement en accord avec la Commission, en cours d’instance, à titre de réparation du préjudice consistant en le fait que le résultat de la gestion caractéristique de l’entreprise requérante qui a été obtenu au cours de l’exercice financier clos le 30 juin 2005 est inférieur à celui qui aurait été atteint si le programme d’investissement avait été achevé, réévalué selon les indices de l’ISTAT à partir du 1er juillet 2005 et jusqu’à la date de l’arrêt ;

–        1 830 564 euros, ou un autre montant, supérieur ou inférieur, qui serait déterminé, éventuellement en accord avec la Commission, en cours d’instance, à titre de réparation du préjudice consistant en le fait que le résultat de la gestion caractéristique de l’entreprise requérante qui a été obtenu au cours de l’exercice financier clos le 30 juin 2006 est inférieur à celui qui aurait été atteint si le programme d’investissement avait été achevé, réévalué selon les indices de l’ISTAT à partir du 1er juillet 2006 et jusqu’à la date de l’arrêt ;

–        1 947 081 euros, ou un autre montant, supérieur ou inférieur, qui serait déterminé, éventuellement en accord avec la Commission, en cours d’instance, à titre de réparation du préjudice consistant en le fait que le résultat de la gestion caractéristique de l’entreprise requérante qui a été obtenu au cours de l’exercice financier clos le 30 juin 2007 est inférieur à celui qui aurait été atteint si le programme d’investissement avait été achevé, réévalué selon les indices de l’ISTAT à partir du 1er juillet 2007 et jusqu’à la date de l’arrêt ;

–        les intérêts sur ces sommes réévaluées, calculés à partir de la date de l’arrêt et jusqu’au paiement intégral, en appliquant le taux fixé par la BCE pour les principales opérations de refinancement, majoré du nombre de points de pourcentage jugé opportun par le Tribunal, qui ne devra pas être inférieur à deux ;

–        condamner la Commission aux dépens, y compris ceux exposés pour l’établissement du rapport technique de 2008.

43      La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

–        rejeter le recours comme irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme non fondé ;

–        condamner la requérante aux dépens.

44      Par ailleurs, la Commission invite le Tribunal à confirmer que la lettre du 29 mai 2000 ne constitue pas un « falso ideologico » (faux intellectuel).

 En droit

45      En vertu de l’article 111 du règlement de procédure, lorsque le Tribunal est manifestement incompétent pour connaître d’un recours ou lorsque celui-ci est manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée. En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la procédure.

46      S’agissant du premier chef de conclusions de la requérante, par lequel elle demande au Tribunal de rendre un arrêt déclaratoire, et de la demande de la Commission invitant le Tribunal à confirmer l’absence de faux intellectuel dans la lettre du 29 mai 2000, il suffit de constater que le contentieux de l’Union ne connaît pas de voie de droit permettant au juge de prendre position par le biais d’une déclaration générale ou de principe (arrêt du Tribunal du 15 décembre 2005, Infront WM/Commission, T‑33/01, Rec. p. II‑5897, point 171, et ordonnance du Tribunal du 3 septembre 2008, Cofra/Commission, T‑477/07, non publiée au Recueil, point 21). Partant, ce chef de conclusions et cette demande doivent être rejetés, le Tribunal étant manifestement incompétent pour en connaître.

47      S’agissant de la demande en réparation présentée par la requérante, la Commission conteste la recevabilité du recours. Toutefois, il appartient au Tribunal d’apprécier ce que commande une bonne administration de la justice dans les circonstances de la cause (voir arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra, point 52, et la jurisprudence citée). En l’espèce, le Tribunal estime qu’il convient de se prononcer tout d’abord sur le fond du recours.

48      À l’appui de son recours, la requérante fait valoir que les conditions auxquelles est subordonné le droit à réparation en vertu de l’article 288, deuxième alinéa, CE sont remplies.

49      À cet égard, il y a lieu de relever à titre liminaire que la requérante avance, en l’espèce, des arguments substantiellement identiques à ceux qu’elle avait avancés dans son recours ayant donné lieu à l’arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra. Les différences résident, en substance, premièrement, dans la période à laquelle se rapportent les préjudices dont elle demande réparation (voir points 23 et 42 ci-dessus) ; deuxièmement, dans l’interprétation de la législation italienne au vu de la correspondance échangée entre la Commission et le gouvernement italien au cours de la procédure ayant précédé l’adoption par la Commission de la décision du 20 décembre 2006 [aide d’État N 440/2006 − Misure a favore delle attività produttive nelle aree depresse del Paese — Modifiche al regime di aiuto N 715/1999 (mesures en faveur des activités productives dans les zones défavorisées du pays − Modification du régime d’aides N 715/1999)] ; troisièmement, dans le fait que la fixation d’une date d’échéance de l’autorisation du régime d’aides conserverait son effet utile dès lors qu’elle désignerait le moment à partir duquel il ne serait plus permis d’organiser des avis ouverts à des entreprises souhaitant y participer pour la première fois, une telle interprétation étant, selon la requérante, confirmée par l’arrêt Nuova Agricast, point 21 supra ; quatrièmement, dans l’interprétation de l’arrêt du Tribunal du 11 juillet 2007, Schneider Electric/Commission (T‑351/03, Rec. p. II‑2237), et sa pertinence en l’espèce s’agissant de l’existence d’un lien de causalité ; cinquièmement, dans la preuve et la quantification des nouveaux préjudices dont la réparation est demandée ; sixièmement, dans la question de la prescription.

50      Selon une jurisprudence constante, l’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté pour comportement illicite de ses organes, au sens de l’article 288, deuxième alinéa, CE, est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le dommage invoqué. Dès lors que l’une de ces conditions n’est pas remplie, le recours doit être rejeté dans son ensemble sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres conditions (voir arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra, point 54, et la jurisprudence citée).

51      En l’espèce, il convient de commencer par vérifier si la condition relative à l’illégalité du comportement reproché à l’institution est satisfaite.

 Arguments des parties

52      La requérante est d’avis que, malgré la position adoptée par le Consiglio di Stato dans son avis n° 55/2001 (point 22 ci-dessus), la procédure ouverte par la première demande d’aide se poursuit comme une procédure unique, l’option pour la reformulation et la présentation de la demande reformulée relevant de cette même procédure. Ainsi, le fait d’opter pour la reformulation ferait naître un droit à la reformulation. L’expiration de l’autorisation du régime d’aides en cause n’aurait pas pour effet d’éteindre ce droit, une telle extinction n’étant pas prévue par les dispositions applicables.

53      Cette interprétation serait confirmée par la correspondance échangée entre la Commission et les autorités italiennes au cours de la procédure relative à l’examen préliminaire de l’aide d’État N 440/2006, au cours de laquelle les autorités italiennes auraient sollicité une modification partielle du régime d’aides N 715/99, laquelle a été autorisée par la Commission par la décision du 20 décembre 2006 (point 49 ci-dessus). Il ressortirait de cet échange de correspondance que la Commission et les autorités italiennes s’accordent sur le fait que la présentation de la première demande d’aide fait débuter la procédure et emporte détermination de la réglementation applicable, la seconde demande étant une simple continuation de cette procédure. Seule cette conception serait compatible avec le principe du caractère nécessaire de l’aide.

54      En toute hypothèse, quand bien même il y aurait deux procédures, la seconde ne commencerait pas par la présentation de la demande reformulée, mais par la renonciation à l’inscription automatique. La réglementation applicable à cette seconde procédure serait donc celle qui était en vigueur en 1998.

55      À cet égard, la situation de la requérante présenterait de nombreux points communs avec l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt de la Cour du 22 juin 2006, Belgique et Forum 187/Commission (C‑182/03 et C‑217/03, Rec. p. I‑5479, ci-après l’« arrêt Forum 187 »). En particulier, la requérante aurait pu raisonnablement s’attendre à ce que la Commission ne s’oppose pas à son droit à la reformulation et ne revienne pas sur son appréciation antérieure sans accorder les mesures transitoires nécessaires à la prise en compte de ce changement et à ce que la Commission protège la confiance qu’elle avait générée en n’émettant pas de réserve à l’autorisation accordée en 1997.

56      La requérante déduit de ce qui précède qu’elle disposait d’un droit à la reformulation assorti des conditions d’éligibilité des dépenses à l’aide qui étaient en vigueur lors de la présentation de sa demande initiale, ou, au plus tard, le jour de sa renonciation à l’inscription automatique. Cette interprétation ne porterait pas atteinte à l’effet utile de la date d’échéance de l’autorisation du régime d’aides, dès lors que cette date désignerait le moment à partir duquel il ne serait plus permis aux autorités italiennes d’organiser des avis ouverts à des entreprises souhaitant y participer pour la première fois. De plus, il ressortirait de l’arrêt Nuova Agricast, point 21 supra, que seule une telle interprétation peut être retenue.

57      Sur le fondement de cette prémisse et de l’hypothèse selon laquelle la décision du 21 mai 1997 permettait, même après son expiration, le lancement d’un avis utile réservé à la réalisation des droits à la reformulation acquis au cours de la période pendant laquelle cette décision autorisait le régime d’aides en cause, la requérante allègue que la Commission lui a causé des dommages en commettant diverses illégalités. Ces illégalités résulteraient du fait que la Commission, dans la lettre du 29 mai 2000, a invité les autorités italiennes à modifier leur projet de mesure transitoire et qu’elle a adopté la décision du 12 juillet 2000.

58      Premièrement, en n’autorisant pas, dans le cadre du huitième avis de mise en œuvre de la loi n° 488/92, la reformulation des demandes initialement présentées dans le cadre du troisième avis, en invitant le gouvernement italien à retirer sa proposition visant à autoriser une telle reformulation et en omettant de prévoir une réserve explicite dans la décision du 21 mai 1997 selon laquelle, au 31 décembre 1999, les droits à la reformulation légalement acquis seraient éteints, la Commission aurait violé le principe de protection de la confiance légitime.

59      Deuxièmement, la Commission aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que la proposition relative à la mesure transitoire initialement envisagée faisait partie du nouveau régime d’aides qui lui avait été notifié. La Commission aurait été tenue de distinguer la partie relevant du nouveau régime de la partie relevant du régime existant. Les autorités italiennes auraient d’ailleurs mentionné, lors de la réunion du 16 mai 2000, qu’elles cherchaient à sauvegarder les demandes d’aides présentées tant au titre du troisième avis qu’au titre du quatrième avis. Afin de confirmer ce fait, la requérante demande que les personnes ayant participé à cette réunion soient entendues. En outre, en autorisant la sauvegarde des demandes présentées dans le cadre du quatrième avis, la Commission admettrait que des droits soient attachés à la situation des entreprises ayant présenté une demande d’aide mais ne l’ayant pas reçue du fait de l’insuffisance des fonds disponibles. Les principes de sécurité juridique et de confiance légitime auraient imposé la sauvegarde de l’ensemble de ces droits.

60      Troisièmement, la Commission ayant considéré que la proposition d’autorisation de reformulation des demandes présentées dans le cadre du troisième avis n’était pas compatible avec le principe de nécessité des aides d’État, elle aurait violé les droits de la défense de la requérante en n’ouvrant pas la procédure formelle d’examen.

61      Quatrièmement, la Commission aurait violé le principe posé par l’arrêt de la Cour du 5 octobre 1994, Italie/Commission (C‑47/91, Rec. p. I‑4635), selon lequel, lorsque la Commission a approuvé un régime général d’aides, les mesures individuelles d’exécution ne doivent pas lui être notifiées, sauf si des réserves ont été émises en ce sens dans la décision d’approbation. En l’espèce, la Commission aurait su que le projet de régime d’aides qui lui avait été notifié contenait une proposition visant à régir des situations déjà acquises. Dès lors, elle aurait dû considérer que la possibilité d’organiser un avis permettant aux entreprises ayant participé aux troisième et quatrième avis de reformuler leurs demandes d’aides était déjà autorisée par la décision du 21 mai 1997. Ainsi, selon le principe posé dans l’arrêt Italie/Commission, précité, la Commission aurait dû se limiter à vérifier si cette proposition relevait du régime autorisé par cette décision. Elle aurait ainsi commis une erreur en examinant cette proposition sur la base de nouvelles règles entrées en vigueur après qu’ont été créées les situations juridiques que la proposition des autorités italiennes visait à protéger. Elle aurait en outre commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que ces situations juridiques s’étaient éteintes et un détournement de pouvoir en occultant, dans la lettre du 29 mai 2000, avoir eu connaissance de l’existence des droits à la reformulation des entreprises ayant participé au troisième avis.

62      Cinquièmement, la Commission aurait violé le principe de sécurité juridique et le « principe de la protection des situations juridiques acquises ». En effet, en examinant la compatibilité avec le marché commun de la proposition visant à permettre aux entreprises ayant participé au troisième avis de reformuler leurs demandes d’aides et en concluant, sans entendre les intéressés, à son incompatibilité, elle aurait en réalité modifié sa décision du 21 mai 1997.

63      Sixièmement, la Commission aurait révoqué la décision du 21 mai 1997, sans toutefois respecter les garanties procédurales prévues par le règlement (CE) n° 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [88] CE (JO L 83, p. 1), en cas de révocation d’une aide.

64      Septièmement, en omettant de préciser, dans la décision du 12 juillet 2000, que les droits à la reformulation nés en 1998 devaient désormais être considérés incompatibles avec le marché commun et de faire référence au fait que la situation des entreprises ayant participé au troisième avis avait été abordée au cours des négociations, la Commission aurait violé le principe de non-rétroactivité des lois. En tout état de cause, elle aurait violé le principe selon lequel les dispositions de droit matériel de l’Union ne peuvent avoir d’incidence sur les situations juridiques qui se sont créées avant leur entrée en vigueur sauf si cela ressort clairement de leurs termes, de leur finalité ou de leur économie. Elle se serait aussi rendue coupable d’un détournement de pouvoir en adoptant une décision d’autorisation sans objection, alors que la non-autorisation de la proposition visant à permettre la reformulation des demandes d’aides présentées dans le cadre du troisième avis constituerait une décision de refus, devant être adoptée au terme d’une procédure différente.

65      Huitièmement, la Commission aurait violé les articles 17, 18 et 19 du règlement n° 659/1999. Les droits à la reformulation légalement acquis en 1998 ne s’étant pas éteints du simple fait de l’expiration de la décision du 21 mai 1997, la Commission, en exigeant que les autorités italiennes les excluent de la proposition initiale, aurait implicitement proposé à ces autorités d’adopter des mesures pour modifier le régime d’aides autorisé en 1997 sans respecter les garanties prévues par ces articles. Le comportement de la Commission serait ainsi également entaché d’un détournement de pouvoir.

66      À titre subsidiaire, dans l’hypothèse où le Tribunal serait d’avis que les droits à la reformulation acquis par les entreprises ayant participé au troisième avis se sont éteints automatiquement le 31 décembre 1999, la requérante fait valoir que la Commission a en tout état de cause violé de manière grave et manifeste le principe de proportionnalité en autorisant la participation au premier avis de mise en œuvre du régime d’aides approuvé par la décision du 12 juillet 2000 des entreprises ayant pris part au quatrième avis, et non celle des entreprises ayant pris part au troisième avis.

67      La violation du principe de proportionnalité serait évidente bien que la Commission ait omis de mentionner, dans la lettre du 29 mai 2000, avoir connaissance de l’existence des entreprises ayant participé au troisième avis. Le droit de l’Union obligerait de ne pas exiger la récupération d’une aide lorsque cette récupération contrevient à un principe général du droit de l’Union et, dans certaines conditions, il ne ferait pas obstacle à une réglementation nationale permettant d’exclure le remboursement d’une aide même lorsqu’il s’agit d’une aide qui n’aurait pas dû être versée. Cela devrait valoir encore plus dans les cas où il s’agit, comme en l’espèce, de la simple possibilité d’obtenir une aide, créée sans objection de la Commission, en particulier lorsque cette possibilité est devenue incompatible avec la réglementation de l’Union, quod non, du seul fait de la négligence d’une autorité nationale. La disproportion serait plus évidente encore au vu du fait que, comme en l’espèce, la proposition en cause aurait imposé à ces entreprises les autres limitations introduites par les nouvelles orientations en matière d’aide d’État, modifiant déjà ainsi de manière importante les droits acquis par les entreprises ayant participé au troisième avis.

68      La Commission aurait également violé l’article 87 CE en considérant que la proposition initiale des autorités italiennes visant à permettre la reformulation des demandes d’aides des entreprises ayant participé aux troisième et quatrième avis était incompatible avec le marché commun.

69      La Commission rétorque qu’il n’existe pas d’acte de la Commission susceptible de porter préjudice à la requérante.

70      Cela étant, même à supposer que les actes et les comportements dénoncés par la requérante soient pris en considération, ils ne seraient entachés d’aucune illégalité. Le régime d’aides dans le cadre duquel la requérante avait introduit une demande de participation au troisième avis avait été autorisé par la décision du 21 mai 1997 jusqu’au 31 décembre 1999 et cette décision n’aurait pas couvert les aides qui auraient été accordées après cette date. Cette décision n’aurait pas pu faire naître chez les personnes concernées la confiance selon laquelle des aides seraient octroyées également après la date de son expiration. La notion de « droit à la reformulation » n’aurait pas de sens, le traité CE ne consacrant aucun droit à l’obtention d’aides d’État, mais prévoyant une interdiction générale des aides d’État, les exceptions étant d’interprétation stricte. Cette position aurait été confirmée par le Tribunal dans son arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra. Tous les arguments de la requérante seraient donc inopérants.

71      En tout état de cause, les arguments de la requérante seraient dénués de tout fondement. En particulier, il serait manifestement erroné de soutenir que le régime autorisé par la décision du 21 mai 1997 était par nature susceptible de produire des effets durables. Il serait également erroné d’affirmer que les autorités italiennes ont qualifié le régime d’aides notifié de régime existant. Les arguments fondés sur l’affirmation selon laquelle les entreprises telles que la requérante jouissaient d’une situation juridique protégée en tant que bénéficiaires d’aides existantes seraient donc inopérants. En outre, les griefs tirés de la violation du principe de proportionnalité et de l’article 87 CE ne devraient pas être pris en considération. Par ailleurs, il ne pourrait pas être reproché à la Commission d’avoir violé des règles de droit en excluant les entreprises qui avaient participé au troisième avis et qui, à la suite des modifications apportées, n’étaient pas éligibles à participer au premier avis du nouveau régime selon le projet présenté par l’Italie. Cela serait confirmé par l’arrêt Nuova Agricast, point 21 supra, et l’arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra. Partant, le recours devrait être rejeté comme étant manifestement non fondé.

 Appréciation du Tribunal

72      S’agissant de la condition d’engagement de la responsabilité de la Communauté liée à l’illégalité du comportement reproché à l’institution en cause, la jurisprudence exige que soit établie une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers. Le critère décisif pour considérer qu’une violation du droit de l’Union est suffisamment caractérisée est celui de la méconnaissance manifeste et grave, par l’institution de l’Union concernée, des limites qui s’imposent à son pouvoir d’appréciation. Lorsque cette institution ne dispose que d’une marge d’appréciation considérablement réduite, voire inexistante, la simple infraction au droit de l’Union peut suffire à établir l’existence d’une violation suffisamment caractérisée (voir arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra, point 76, et la jurisprudence citée).

73      Il convient donc d’examiner si la requérante a établi que la Commission a violé une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers et, le cas échéant, si cette violation est suffisamment caractérisée.

74      À titre liminaire, il y a lieu d’observer que les arrêts préjudiciels en appréciation de validité d’un acte de l’Union s’imposent non seulement à la juridiction nationale qui a saisi la Cour de la question de la validité de l’acte en cause, mais également à tout autre juge tenu de considérer la légalité du même acte pour les besoins d’une décision qu’il doit rendre (voir arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra, point 78, et la jurisprudence citée). Il s’ensuit que les constatations effectuées par la Cour dans l’arrêt Nuova Agricast, point 21 supra, s’imposent au Tribunal.

75      Dans cet arrêt, la Cour a constaté que, même dans l’hypothèse où les autorités italiennes n’auraient pas pris l’initiative d’informer spécifiquement et complètement les services de la Commission des situations juridiques respectives des entreprises intéressées à obtenir des aides au titre de la loi n° 488/92, il ressort de la décision du 12 juillet 2000 et du contexte dans lequel elle a été adoptée que la Commission devait connaître tant l’existence des entreprises telles que la requérante, ayant participé au troisième avis, n’ayant pas obtenu l’aide demandée en raison de l’insuffisance des fonds disponibles et ayant renoncé à l’inscription automatique afin de présenter une demande reformulée au titre du premier avis utile suivant le quatrième avis, que l’existence des entreprises dont la demande avait été inscrite au tableau afférent au quatrième avis et qui n’avaient pas obtenu l’aide demandée en raison de l’insuffisance des fonds disponibles (voir, en ce sens, arrêt Nuova Agricast, point 21 supra, points 38, 61 et 62, arrêt du 14 octobre 2010, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 26 supra, points 29 et 70, et arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra, point 79). Dès lors, c’est à la lumière du fait que la Commission ne pouvait pas ignorer la situation dans laquelle se trouvait la requérante que l’argumentation de cette dernière sera examinée.

76      S’agissant de l’argumentation principale de la requérante tendant à démontrer les illégalités qui auraient été commises par la Commission, elle est, en substance, fondée sur la prémisse selon laquelle, par la décision du 21 mai 1997, la Commission a décidé de ne pas soulever d’objections à l’égard de la seconde participation de la requérante à un avis de mise en œuvre du régime d’aides fondé sur la loi n° 488/92 qui serait lancé après le 31 décembre 1999. À cet égard, il convient de rappeler que le principe général posé par l’article 87, paragraphe 1, CE est celui de l’interdiction des aides d’État. Selon la jurisprudence, les dérogations à ce principe sont d’interprétation stricte. Afin de déterminer si une aide relève du champ d’application temporel d’une décision de ne pas soulever d’objections à un régime d’aides, il convient d’examiner si cette aide peut être considérée comme ayant été accordée avant la date d’expiration de cette décision, le critère pertinent à cet égard étant celui de l’acte juridiquement contraignant par lequel l’autorité nationale compétente s’engage à accorder l’aide. Il s’ensuit qu’une décision de ne pas soulever d’objections à un régime d’aides ne concerne que l’octroi effectif des aides relevant de ce régime, l’autorité nationale concernée devant s’engager à accorder l’aide en cause avant l’expiration de cette décision (voir arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra, point 80, et la jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 14 octobre 2010, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 26 supra, points 74 et 75).

77      Par conséquent, en l’espèce, quand bien même, dans la décision du 21 mai 1997, la Commission ne s’est pas opposée à ce que le régime d’aides en cause permette à la requérante de présenter une demande d’aide reformulée dans le cadre d’un avis utile postérieur au quatrième avis, il était nécessaire, afin de relever du champ d’application de cette décision, que, d’une part, cette seconde participation intervienne avant que l’autorisation accordée par cette décision n’expire et que, d’autre part, les autorités italiennes s’engagent à attribuer l’aide demandée dans le cadre de cette seconde participation également avant cette expiration. Or, il est constant que, par la décision du 21 mai 1997, la Commission a décidé de ne pas soulever d’objections au régime d’aides en cause jusqu’au 31 décembre 1999. Il est également constant qu’aucun avis permettant la seconde participation de la requérante n’a été publié avant le 1er janvier 2000 et que, avant cette date, les autorités italiennes n’ont adopté aucun acte contraignant par lequel elles s’engageaient à octroyer à la requérante l’aide demandée.

78      En outre, il est exclu que la simple possibilité de participer une seconde fois à un avis dans le cadre duquel une aide pourrait éventuellement être attribuée suffise à permettre de considérer que les aides demandées ont été accordées lorsque cette possibilité a été offerte. Tant le libellé de la décision du 21 mai 1997 que la règle d’interprétation stricte des dérogations au principe général d’interdiction des aides d’État posé par l’article 87, paragraphe 1, CE s’opposent à une telle extension du champ d’application temporel du régime d’aides approuvé (arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra, point 82). De plus, il est constant que la requérante n’avait aucune certitude, si elle présentait une demande reformulée, de se voir accorder l’aide demandée.

79      Par ailleurs, les deux nouveaux arguments présentés à cet égard par la requérante (voir point 49 ci-dessus, deuxième et troisième arguments) sont sans influence sur les considérations qui précèdent. D’une part, l’échange de correspondance auquel la requérante renvoie, à supposer même qu’il ait la portée que la requérante lui attribue, n’est manifestement pas de nature à modifier la portée de la décision du 21 mai 1997 ou de l’article 87, paragraphe 1, CE. D’autre part, si, aux termes de l’arrêt Nuova Agricast, point 21 supra, une aide d’État qui, par certaines de ses modalités, viole d’autres dispositions du traité CE ou les principes généraux du droit communautaire ne saurait être déclarée compatible avec le marché commun par la Commission (arrêt Nuova Agricast, point 21 supra, points 50 et 51), il ne ressort manifestement pas de cet arrêt, contrairement à ce que la requérante fait valoir, que la décision du 21 mai 1997 doit être interprétée en ce sens qu’elle autorisait implicitement, même après la date d’expiration de cette décision, l’organisation d’un avis de mise en œuvre du régime d’aides fondé sur la loi n° 488/92, dans le cadre duquel les entreprises ayant opté pour la reformulation dans le cadre d’un avis antérieur auraient été autorisées à faire valoir leurs prétendus droits à une seconde participation.

80      Par conséquent, le « droit à la reformulation » auquel la requérante se réfère, à supposer qu’il existe, n’était couvert par la décision du 21 mai 1997 que dans la mesure où il était exercé avant le 1er janvier 2000 et dans la mesure où les autorités italiennes se seraient engagées, avant cette date, à accorder à la requérante l’aide qu’elle aurait demandée pour la seconde fois, et ce même en l’absence de réserve explicite en ce sens dans la décision du 21 mai 1997 autre que la date d’expiration de cette dernière. Or, comme déjà indiqué précédemment, il est constant que tel n’a pas été le cas.

81      La décision du 21 mai 1997 ne pouvant être considérée comme autorisant la requérante à présenter une demande d’aide reformulée dans le cadre d’un avis publié après l’expiration de cette décision, force est de constater que la prémisse du raisonnement de la requérante est manifestement erronée. Dès lors, l’ensemble des arguments que la requérante fonde sur cette prémisse doivent être écartés comme manifestement non fondés.

82      Cette conclusion n’est pas remise en cause par la solution retenue dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Forum 187, point 55 supra, invoqué par la requérante. Dans cette affaire, la Cour a, certes, considéré que les bénéficiaires d’un régime fiscal pouvaient s’attendre à ce qu’une décision de la Commission revenant sur son appréciation antérieure leur accorde le temps nécessaire pour prendre effectivement en compte ce changement d’appréciation (arrêt Forum 187, point 55 supra, point 161) et que ces bénéficiaires étaient fondés à placer une confiance légitime dans l’octroi d’une période transitoire raisonnable pour s’adapter aux conséquences découlant de cette décision (arrêt Forum 187, point 55 supra, point 163).

83      Toutefois, dans cette affaire, les requérants avaient bénéficié du régime fiscal en cause. De plus, la Commission avait auparavant adopté plusieurs décisions déclarant que le régime fiscal en cause ne contenait pas d’élément d’aide et avait, de ce fait, créé une confiance dans le fait que les règles du traité CE ne s’opposaient pas au renouvellement de l’agrément fiscal dont bénéficiaient les requérants (arrêt Forum 187, point 55 supra, points 155 à 158).

84      Tel n’est pas le cas en l’espèce. Dans la décision du 21 mai 1997, la Commission a constaté que le régime d’aides en cause constituait une aide d’État et elle s’est contentée de ne pas soulever d’objections à son égard jusqu’au 31 décembre 1999. Ainsi, au vu du principe d’interdiction des aides d’État et des limites posées au champ d’application temporel d’une décision de ne pas soulever d’objections à un régime d’aides (point 76 ci-dessus), la requérante ne pouvait légitimement croire que, par cette décision, la Commission avait également décidé de ne pas s’opposer à une application du régime d’aides en cause qui aurait lieu après la date d’expiration de cette décision. Contrairement aux affirmations de la requérante, les circonstances de la présente affaire sont donc substantiellement différentes de celles en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Forum 187, point 55 supra, et, partant, la solution retenue dans cet arrêt est sans influence en l’espèce.

85      Il convient donc d’examiner les arguments présentés à titre subsidiaire par la requérante afin de démontrer l’illégalité des comportements reprochés à la Commission.

86      S’agissant de l’argumentation de la requérante visant à établir que la Commission a violé le principe de proportionnalité, il y a lieu d’observer que, selon une jurisprudence constante, ce principe exige que les actes des institutions de l’Union ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimes poursuivis par la réglementation en cause, étant entendu que, lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (voir arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra, point 91, et la jurisprudence citée).

87      En l’espèce, la requérante allègue que la Commission a violé le principe de proportionnalité, d’une part, en autorisant la participation au premier avis de mise en œuvre du régime d’aides approuvé par la décision du 12 juillet 2000 des entreprises ayant pris part au quatrième avis et non de celles ayant pris part au troisième avis, et, d’autre part, en s’opposant à la mesure transitoire initialement proposée par les autorités italiennes, alors que le droit de l’Union permettrait qu’une aide ne soit pas remboursée même si elle n’aurait pas dû être versée et que, en l’espèce, il se serait seulement agi de la possibilité d’obtenir une aide.

88      Cette argumentation ne peut être retenue. Par son premier argument, la requérante conteste, en substance, le traitement différencié accordé par la mesure transitoire en cause aux entreprises ayant participé au troisième avis et opté pour la reformulation, telles que la requérante, et aux entreprises ayant participé au quatrième avis. Or, la Cour a constaté dans l’arrêt Nuova Agricast, point 21 supra, que ces deux catégories d’entreprises ne se trouvaient pas dans une situation comparable et que, dès lors, en autorisant le régime d’aides en cause, y compris la mesure transitoire, la Commission n’avait pas violé le principe d’égalité de traitement (arrêt Nuova Agricast, point 21 supra, points 38, 77 et 78). Au vu de la jurisprudence rappelée au point 74 ci-dessus, ce premier argument doit donc être écarté comme manifestement non fondé.

89      Quant au second argument présenté par la requérante, il a déjà été rappelé au point 76 ci-dessus que le principe posé par le traité CE est celui de l’interdiction des aides d’État, et non, comme le sous-entend l’argument de la requérante, celui de leur autorisation, et que les dérogations à cette interdiction sont d’interprétation stricte. Par conséquent, le fait que, dans certaines circonstances exceptionnelles, le droit de l’Union puisse ne pas s’opposer au non-remboursement d’une aide versée illégalement ne permet pas de considérer que, en cherchant à voir le champ d’application d’une mesure transitoire limité afin de respecter au mieux le principe de nécessité des aides d’État, la Commission est allée au-delà de l’objectif poursuivi par la réglementation en cause et a violé le principe de proportionnalité (arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra, point 94). Ce second argument doit donc également être écarté comme manifestement non fondé. Il s’ensuit que la violation alléguée du principe de proportionnalité n’est manifestement pas établie.

90      S’agissant de l’argumentation de la requérante visant à établir que la Commission a violé l’article 87 CE au motif qu’elle aurait considéré incompatible avec le marché commun la proposition initiale des autorités italiennes visant à permettre également aux entreprises ayant participé au troisième avis de reformuler leurs demandes d’aide dans le cadre du premier avis de mise en œuvre du nouveau régime d’aides envisagé, il suffit de constater que, au cours de la procédure ayant précédé l’adoption de la décision du 12 juillet 2000, la Commission s’est contentée d’inviter les autorités italiennes à limiter le champ d’application de la mesure transitoire en cause et que, dans la décision du 12 juillet 2000, la Commission a décidé de ne pas soulever d’objections à l’encontre du régime d’aides notifié, tel qu’il avait été modifié par les autorités italiennes (arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra, point 95). Dès lors, l’argument de la requérante selon lequel la Commission aurait déclaré incompatible avec le marché commun la proposition en cause manque en fait et doit être rejeté. La violation alléguée de l’article 87 CE, qu’elle résulte de l’adoption de la décision du 12 juillet 2000 ou du comportement adopté par la Commission au cours des négociations ayant précédé cette adoption, n’est donc manifestement pas établie.

91      Il résulte de tout ce qui précède que les violations alléguées par la requérante ne sont manifestement pas établies. Il s’ensuit que la requérante n’a pas démontré que la Commission aurait violé une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers et, partant, n’a pas établi que la Commission aurait commis une violation suffisamment caractérisée de nature à engager la responsabilité non contractuelle de la Communauté.

92      Par conséquent, une des conditions d’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté n’étant pas remplie, la demande en réparation de la requérante doit être rejetée comme manifestement non fondée.

93      Il résulte de ce qui précède que le recours doit être rejeté dans son ensemble en partie pour cause d’incompétence manifeste et en partie comme manifestement dépourvu de tout fondement en droit (voir arrêt du 2 décembre 2008, Nuova Agricast et Cofra/Commission, point 24 supra, établissant le caractère non fondé des arguments présentés dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt et auxquels les arguments présentés en l’espèce sont substantiellement identiques) − les nouveaux arguments présentés en l’espèce (voir point 49 ci-dessus) étant soit manifestement non fondés (voir point 79 ci-dessus), soit sans pertinence s’agissant de l’appréciation de l’illégalité du comportement reproché à la Commission −, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur sa recevabilité ou sur la demande de la requérante visant à ce que des personnes ayant participé à la réunion du 16 mai 2000 soient entendues.

 Sur les dépens

94      Aux termes de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens, conformément aux conclusions de la Commission.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (septième chambre)

ordonne :

1)      Le recours est rejeté.

2)      Nuova Agricast Srl est condamnée aux dépens.

Fait à Luxembourg, le 24 mai 2011.

Le greffier

 

       Le président

E. Coulon

 

       A. Dittrich


* Langue de procédure : l’italien.