Language of document : ECLI:EU:T:2009:157

Affaire T-165/06

Elio Fiorucci

contre

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins etmodèles) (OHMI)

« Marque communautaire — Procédure de nullité et de déchéance — Marque communautaire verbale ELIO FIORUCCI — Enregistrement en tant que marque d’un nom de personne notoire — Article 52, paragraphe 2, sous a), et article 50, paragraphe 1, sous c), du règlement (CE) nº 40/94 »

Sommaire de l'arrêt

1.      Marque communautaire — Procédure de recours — Recours devant le juge communautaire — Compétence du Tribunal — Réexamen des faits à la lumière de preuves présentées pour la première fois devant lui — Exclusion

(Art. 229 CE et 230 CE; règlement de procédure du Tribunal, art. 135, § 4; règlement du Conseil nº 40/94, art. 63)

2.      Marque communautaire — Renonciation, déchéance et nullité — Causes de déchéance — Marque propre à induire le public en erreur

(Règlement du Conseil nº 40/94, art. 50, § 1, c); directive du Conseil 89/104, 12, § 2, b))

1.      Le recours devant le Tribunal vise le contrôle de la légalité des décisions des chambres de recours de l'Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) au sens de l'article 63 du règlement nº 40/94 sur la marque communautaire. En effet, si, aux termes de l'article 63, paragraphe 3, dudit règlement, le Tribunal « a compétence aussi bien pour annuler que pour réformer les décisions des chambres de recours », ce paragraphe doit être lu à la lumière du paragraphe précédent, aux termes duquel le « recours est ouvert pour incompétence, violation des formes substantielles, violation du traité, du présent règlement ou de toute règle de droit relative à leur application, ou détournement de pouvoir », et ce dans le cadre des articles 229 CE et 230 CE. Le contrôle de légalité opéré par le Tribunal sur une décision de la chambre de recours doit donc se faire au regard des questions de droit qui ont été portées devant celle-ci.

Dès lors, la fonction du Tribunal n'est pas d'examiner de nouveaux moyens introduits devant lui ou de réexaminer les circonstances de fait à la lumière des preuves présentées pour la première fois devant lui. En effet, l'examen de ces nouveaux moyens et l'admission de ces preuves sont contraires à l'article 135, paragraphe 4, du règlement de procédure du Tribunal, selon lequel les mémoires des parties ne peuvent pas modifier l'objet du litige devant la chambre de recours.

(cf. points 21-22)

2.      Il ne saurait être déduit de la seule identité entre une marque et un patronyme que le public concerné pensera que la personne dont le patronyme constitue la marque a dessiné les produits qui portent cette marque, de sorte que ce public serait induit en erreur au sens de l'article 50, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94 sur la marque communautaire. En effet, l'utilisation de marques constituées par un patronyme est une pratique diffuse dans tous les secteurs commerciaux et le public concerné sait bien que derrière chaque marque patronymique ne se cache pas obligatoirement un styliste portant le même nom.

La Cour a identifié la fonction essentielle de la marque, qui est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service désigné par la marque, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit ou service de ceux qui ont une autre provenance. En effet, pour que la marque puisse jouer son rôle d’élément essentiel du système de concurrence non faussé que le traité entend établir et maintenir, elle doit constituer la garantie que tous les produits ou services qu’elle désigne ont été fabriqués ou fournis sous le contrôle d’une entreprise unique à laquelle peut être attribuée la responsabilité de leur qualité.

Par ailleurs, s'agissant des conditions de la déchéance prévues à l'article 12, paragraphe 2, sous b), de la directive 89/104, rapprochant les législations des États membres sur les marques, dont le contenu normatif est, en substance, identique à celui de l'article 50, paragraphe 1, sous c), du règlement nº 40/94, la Cour a jugé que le titulaire d'une marque correspondant au nom du créateur et premier fabricant des produits portant cette marque ne peut, en raison de cette seule particularité, être déchu de ses droits au motif que ladite marque induirait le public en erreur notamment quand la clientèle attachée à cette marque a été cédée avec l'entreprise fabriquant les produits qui en sont revêtus. Cette conclusion est motivée par l'absence d'une tromperie effective ou d'un risque suffisamment grave de tromperie du consommateur moyen. Quand bien même celui-ci pourrait être influencé dans son acte d’achat du produit concerné en imaginant que la personne au nom de laquelle correspond la marque a participé à sa création, les caractéristiques et les qualités dudit produit restent garanties par l’entreprise titulaire de la marque.

De même doit-il être jugé que le titulaire d'une marque correspondant au prénom et au nom du créateur et premier fabricant des produits portant cette marque ne peut, en raison de cette seule particularité, être déchu de ses droits au motif que ladite marque induirait le public en erreur, quand ce titulaire a légalement acquis, dans le cadre d'une cession, une marque consistant dans le seul nom de famille du créateur ainsi que l'ensemble du patrimoine créatif de l'entreprise fabriquant les produits qui en sont revêtus.

(cf. points 30, 32-34)